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À PROPOS DE LA CORVÉE DANS L'OUEST TIBÉTAIN

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Academic year: 2021

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Patrick Kaplanian

À PROPOS DE LA CORVÉE DANS L’OUEST TIBÉTAIN

Dans son livre Jahoda (2015) critique les deux articles de Grist (1985 et 1994) consacrés à la corvée au Ladakh. La longueur (pp. 35, 84-86 et 178) et la virulence du ton (« from a curiously simplistic perspective », p. 178) contraste avec le reste du livre dont le ton est plutôt neutre. Le principal reproche qui est fait à Grist (décédée en 2004) serait qu‟elle ne décrit le phénomène que du point de vue de ceux qui en profitent : « her examination of this phenomenon is strictly limited to the use made by these services by the power-holders and their beneficiaries » (p. 35) ; « Her view of this phenomenon is primarily from the perspective of these in position of power, i. e. the immediate beneficiaries and whose who in turn benefited from the latter (…) and hardly ever from the perspective of the peasant class of subjects who were obliged to perform these services and paid for them with their time and labor » (p. 84).

Nous verrons que cette critique n'est pas tout à fait fondée et, même si effectivement Grist s‟en était strictement tenue au point de vue de ceux auxquels ce système profite, son analyse n‟en aurait pas pour autant eu moins d‟intérêt. Une analyse du point de vue du bénéficiaire n'exclut pas, par ailleurs, une autre du point de vue de ceux qui fournissent l'effort. Imaginons qu'on veuille faire le profil d'une entreprise. On peut rendre visite à la direction et entendre parler de chiffre d'affaires, de marge, de bénéfice, d‟impôts de charges sociales, de masse salariale, de brevets, de marketing, de croissance, etc. On peut aussi faire une enquête auprès du salariat. Dans ce cas on entendra parler d‟horaires, de conditions de travail, de congés payés, de salaires, etc. Il en résultera deux rapports tout aussi valables et tout aussi intéressants l‟un que l‟autre. La véhémence de Jahoda est d‟autant moins justifiée que l‟étude complémentaire a été faite par Bray (2008), un article que Jahoda mentionne du bout des lèvres dans une note en bas de page (page 84, note 154) mais, qu‟il ne commente pas1. Je serais donc tenté de penser que nous maîtrisons désormais les deux faces du sujet.

*

Alors, pourquoi cette polémique ? Pour tenter d'y voir clair je vais essayer le remettre le sujet à plat. Le point de départ de Jahoda consiste en deux articles de Surkhang Wangchen Gelek (1984 et 1986). D'après ce dernier auteur, au Tibet central, le terme lag don désigne les taxes et impôts en espèces ou en nature et le terme rkang gro désigne la corvée (1984, p. 26).

Dans ng g o il y a rkang mais le concept de rkang s‟applique aussi bien aux servitudes libellées lag don qu‟à celles libellées rkang gro. Ainsi « A government mi ser who owns one

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Il est intéressant de noter que cet article de Bray est inclus dans un volume dédié à Grist, et introduit par un éloge de Grist signé Day (2008).

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rkang of land must pay one srang for rgya bsos tax, 5 zho wood tax, 1 khal of tsam-pa for smon lam tax, 3 khal of barley grain for rgyal po lo khral, 20 rgyab of hay tax, 15 'degs rgya wood tax and about one khal of butter in proportion to the grazing land » (1986, p. 24). Surkhang Wangchen Gelek donne par ailleurs la définition du rkang. Qu‟est-ce que le rkang ? C‟est l‟unité de mesure pour calculer l‟assiette de l‟impôt et de la corvée, dans la province de gTsang et depuis 1740 au moins. Un rkang = 80 khals-surface (Surkhang Wangchen Gelek, 1984, p. 19) c'est-à-dire la surface qui nécessite 80 khals-capacité de semences, soit à peu près 80 x 13 kg. Pour Thupten Sangyay (1986, p. 41) un rkang = 50 khals-surface. Prenons, juste à titre d‟exemple, 50 khals. D‟après Goldstein (1971, p. 19), 1 khal de terre bien irriguée = 0,22 acre. D‟après Levine (1988) dans les hautes terres irriguées des nord-ouest du Népal, 1 khal = 0,3 acre. Donc 50 khals-surface = 50 x 0,22 = 11 acres et 50 khals-surface = 50 x 0,3 = 15 acres. Soit entre 4,5 et 6 ha2.

Après avoir fait rapidement le rappel des taxes de la catégorie l g ‘don à payer en nature ou en espèces (citée plus haut, 1986, p. 24), il précise « for the government mi ser, the material tax is not very heavy. For them the ng ‘g o is the most difficult ». Et il précise : « of the ng ‘g o tax, the chief is ‘u l g. » U lag, le mot le plus couramment employé au Ladakh comme nous allons le voir, désigne donc au Tibet central une sous-catégorie de ng g o, une forme particulière de corvée, mais on ne comprend pas très bien ce qui fait la spécificité du u lag par rapport aux autres corvées libellées ng g o. Surkhang Wangchen Gelek ne dit pas quelles sont les servitudes autre que le ‘u l g à placer dans la catégorie ng ‘g o.

Par contre Surkhang Wangchen Gelek fournit moultes explications quant aux sous-catégories du ‘u l g (ibidem). L‟une d‟elles est le travail dans les marais, une autre est la participation à des travaux de construction (ibidem). Et, en ce qui concerne la corvée-transport qui nous intéresse ici en premier lieu, il précise que « transportation tax is the worst form of u lag » (cf Jahoda, p.78). Et cette « transportation tax » est à son tour divisée en deux sous-catégories sa tshig ou sgo babs sa tshig (moins de 10 chevaux montés et de 15 mules) et rdzong bskyal (plus de 10 chevaux montés et plus de 15 mules).

Toutes ces corvées étaient proportionnelles au nombre de rkang y compris la corvée-transport. « Of the ng g o tax, the chief is u lag. Generally one person must go from one rkang » (ibidem, et Jahoda, p. 77). Autrement dit une famille propriétaire de quatre khals devait envoyer quatre hommes lors d‟une expédition dans le cadre d‟un u lag.

2

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Au Tibet de l’Ouest

Avant d‟en venir au Spiti et au Ladakh, je propose de traverser le Tibet de l‟Ouest d‟avant le régime actuel grâce à un article de Levine (1992 et 2020). À Purang le système était analogue à celui décrit par Surkhang Wangchen Gelek au Tibet central. Levine parle de « Full tax holding3 » de 80 khals pour les maisonnées (« holding ») appartenant à l‟État et de 60 khals pour celles qui appartenaient à un monastère. Les impôts à payer étaient proportionnels au nombre de khals et il en était de même pour la corvée-transport. On retrouve la règle de un homme un rkang décrite plus haut. « The holder of a full unit was obliged to send one man or woman to carry out agriculture work for the monastery for an entire year. If a household held only forty khal, he would have to send one person for a portion of the year and less would be required of still smaller holdings ». Levine appelle cela « inner taxes », nous allons voir pourquoi. En ce qui concerne la corvée-transport, il y en avait plusieurs pour le gouvernement et il semble bien que le nombre de jours de travail était aussi au prorata du nombre de « holding units » car Levine écrit : « the average tax payer household‟s share was perhaps eight transport trip tax per year ».

À Khochar, les maisonnées étaient sujettes du monastère drukpa de Darchen. Le système était le même qu‟à Purang. Un « Full tax allotment4 » était de 60 khals. On comptait 34 khral-pa5, payeurs de taxe, sur un total de 56 maisons : 21 possédaient un « full tax allotment » de 60 khals, une seule possédait 1,5 « full tax allotment », 2 possédaient 3/4 de « full tax allotment », une dizaine en possédaient ½. Il faut aussi compter avec 16 petites maisons (grong chung) qui louent bâtiment et terrain à des khral pa auxquels elles étaient apparentées. Cela ressemble

3 Elle ne donne pas le mot tibétain dans son texte mais m‟écrit que le mot est khral rkang. 4 dont le nom tibétain n'est pas donné.

5 Petit problème sémantique. En anglais le mot tax peut s'appliquer aux taxes aux impôts et aux corvées. Ainsi la

première phrase de l'article de Bray 2008 est-elle : « Historically, obligatory or corvée labour was an intrinsic part of the tax system in Ladakh ». En français cela ne passe pas : il n'y a pas de mot qui englobe à la fois taxe, impôt et corvée. Le mot tibétain khral englobe tout cela. L'impôt peut-être en nature, en orge (nas khral), en viande (sha

khral), en laine (bal khral), en tissu (snam khral), en pois et céréales ( bru khral) ; mais il peut être aussi en argent

métal (dngul khral). Il peut aussi désigner une corvée. Levine l'emploie à deux reprises dans ce dernier sens. Le

drung khral, à Tholing, consiste à fournir un cheval pour le service postal, et le tshams skor khral, toujours à

Tholing, consiste à fournir l'intendance aux deux représentants du gouvernement lorsqu'ils se rendent en inspection à la frontière. Signalons aussi tshong khral, une taxe sur le commerce (Levine, mais aussi Gergan).

Mais le champ sémantique de khral et encore plus large que celui de tax en anglais. Car khral sert aussi à désigner la « fourniture » d'un soldat pour l'armée (dmag khral) et même celle d'un moine pour le monastère (bsun khral ou

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beaucoup au système khang chen et khang chung du Ladakh et du Spiti. Levine ne dit pas que la corvée-transport était partagée au prorata du nombre de « full tax allotment » ; elle le laisse entendre lorsqu‟elle écrit que, pour ce qui est de la corvée-transport à fournir à un représentant du gouvernement, un « full tax allotment » devait fournir onze journées de travail d‟un animal. Par contre pour ce qui est du travail sur les champs du monastère, elle précise bien « the responsabilities of partial tax payers were proportionately reduced ». Elle m‟écrit : « Here is an example from my notes on Khochar: "The responsibilities of partial taxpayers were proportionately reduced, so, for example, one person from a half allotment household would join in the harvesting for two days, and the quarter-allotment taxpayer would work in alternate years. The combination of agricultural labor and the work expended leading on corvée trips for Tarchen labrang was estimated as costing each full taxpayer forty-five person-work days per year”. »

Reste à dire quelques mots à propos de Ruthog. Ici, le système était tout à fait original par rapport au reste du Tibet. Il existait bien une unité d‟imposition appelée sleb, mais elle ne renvoyait pas à un nombre de khals. Elle tenait compte de tous les biens d‟une maisonnée, le sleb étant une unité abstraite permettant d‟additionner toutes les formes de richesse. Ainsi 10 yaks = 1 sleb = 10 chevaux = 50 chèvres = 5 khals-surface = 10 occupants. Ainsi une maisonnée de 10 yaks, 5 chevaux, 100 chèvres, 5 individus, totalisait 5 sleb. Ce système était extraordinairement « moderne » et en totale opposition avec ce qui se passait au Tibet, comme Levine le fait elle-même remarquer. En ce qui concerne la corvée-transport (appelée ic ‘u lag) « the extend of a family‟s obligations (...) depended on the number of their sleb ». Le système était d‟autant plus « moderne » que l‟assiette de l‟impôt, nous écrit Levine, était recalculée tous les ans (au Tibet central elle n‟a plus été recalculée après 1830).

Un système de quotes-parts

Mais revenons à Jahoda et à son commentaire de Surkhang Wangchen Gelek. Ce dernier introduit un « external system of taxation (...) This “external” system of taxation correspond to an “internal” organization for provision of taxes in the respective units, i. e. villages (grong gseb) and group of villages (yul tsho) as well as regional units (tsho, brgya tsho) » (Jahoda, p 79). Autrement dit ce n'est plus la maisonnée qui est taxée, mais un village ou un groupe de villages, voire plus. Surkhang Wangchen Gelek introduit alors la notion de nang rkang. Cela désigne un arrangement « intérieur » (nang par opposition à phyi, « extérieur »). Jahoda cite alors Goldstein (1971) qui en donne des exemples concrets pris à Samada (Sa mda ), près de yantsé (r yal tse) au Tibet du Sud. L'autorité administrative attend certains revenus. Les fonctionnaires du district

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sont loin et n'ont guère envie de se déplacer. Du moment qu'ils reçoivent ce qui est prévu, ils ne cherchent pas à savoir comment les quantités ont été réparties entre les maisonnées du village. Les villageois s'arrangent eux-mêmes. Le village abrite huit maisonnées (ici khral pa) mais est divisé en 14 nang rkang. Il ne s'agit plus de rkang correspondant à un certain nombre de khals, il s‟agit de quotes-parts, certains paysans en possédant plus que d'autres, permettant de calculer l'écot de chacun.

Le système n'était pas inconnu au Tibet de l'ouest d‟après Levine. À Tholing on distinguait les nang khral et les dix phyi khral. Ici les phyi khral, les « outer taxes », étaient « allocated to a single village, falling upon village households according to the number of their workers granted a tenancy share, some were shared with a few other villages, and some were pooled among a number of village clusters ». Il y avait bien à l‟intérieur du village ou du groupe de villages un partage. « Some of these taxes were allocated to a single village, falling upon village household according to the numbers of their workers granted a tenancy share ». C‟est donc « according to the number of workers » et non pas en raison de la surface. Cela paraît logique lorsqu‟il s‟agissait de corvée : c‟est le nombre d‟hommes (et de bêtes) disponibles qui importait. Et puis il s‟agissait de métayers, toute la terre appartenant au monastère de Tholing. Le système était différent de celui des nang rkang décrit par Goldstein et, écrit Levine, « the taxes are so complicated that even with the aide of any still extent document, it would be difficult to assess the cost of a given Tholing household ». Peu importe : ce qu‟il faut retenir ici c‟est, d‟une part le principe du phyi khral, selon lequel c‟est un village, ou un groupe de villages qui est imposé et, ensuite, le second principe comme quoi à l‟intérieur du village ou de ce groupe de villages la répartition se fait selon la richesse des maisonnées, en prenant un certain critère.

La corvée au Ladakh

C‟est là que Jahoda attaque rist. Il rappelle d‟abord que, d‟après Surkhang Wangchen Gelek, u lag était la principale sous-catégorie du ng g o, et qu‟il y avait plusieurs sortes de u lag, la corvée-transport n‟étant que l‟une d‟elles. Il cite alors Grist (page 84) :

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Jahoda lui reproche alors de ne pas reprendre l‟analyse et les définitions de Surkhang Wangchen Gelek. « That shows that in rist‟s work the concept of the term u lag has been considerably simplified, which is what it is equated without further explanation with the word begar ». Précisons que le mot, probablement persan, de begar, emprunté par l‟ourdou, a progressivement remplacé u lag dans l‟Inde anglaise et dans les possessions du maharaja du Jammou et Cachemire, dans le sens de corvée, surtout de corvée-transport. Sinon je ne peux que m‟élever contre ces critiques de Jahoda. Quoi qu‟ait pu écrire Surkhang Wangchen Gelek, rien n‟indique que cela s‟applique au Ladakh ou au Spiti. J‟ai déjà écrit un article entier pour dénoncer les méfaits d‟une certaine tibétologie dominée par la philologie, qui tend à imposer au Ladakh des modèles pris au Tibet, surtout dans la littérature tibétaine écrite et savante (Kaplanian, 2015). Rien, mais absolument rien, ne permet d‟appliquer la nomenclature des corvées du Tibet central à partir de 1830 au Ladakh.

Nous avons vu que la définition de ‘u l g par Surkhang Wangchen elek n‟est pas claire dans la mesure où ce mot qualifie une sous-catégorie du ng ‘g o mais que nous ne savons pas quelles sont les autres sous-catégories. Par contre nous sommes bien renseignés sur les composantes du ‘u l g. Puisque le travail dans les marais est inconnu au Ladakh, et que les travaux de construction (en fait l‟entretien des routes) sont secondaires par rapport à la corvée-transport, il n‟y a rien d‟étonnant à ce que ‘u l g ait fini par désigner la corvée-transport par métonymie.

Ceci dit cette hypothèse n‟est pas nécessaire. Un mot peut changer de sens d‟un bout à l‟autre du monde tibétain, même si l‟on s‟exprime en tibétain classique. Voici un exemple pris sur le corpus de l‟Himalaya de l‟Ouest. Le mot srang désigne une pièce d‟argent d‟un certain poids (Surkhang Wangchen Gelek, 1984, p. 28, note 10). Le mot a fini par désigner une unité monétaire perdant de plus en plus de valeur à cause de l‟inflation (ibidem, note 12). Au Spiti, dans le village de Zibug, d‟après Tashi Tsering (2014, p. 235), chaque maisonnée doit contribuer à la nourriture des mâles de reproduction qui sont propriété commune des villageois. L‟étalon qui permet de peser la quantité de fourrage que chacun doit apporter est une lourde pierre (rdo) posée sur le plateau d‟une balance appelée srang. C‟est pour cela que cette taxe s‟appelle rdo srang. Bien entendu on est en droit de supposer que la valeur de l‟écot de chacun était au départ équivalente à une pièce d‟argent. Mais peu importe le cheminement : le sens des mots change.

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(Rizvi, 1999, page 301).

Le mot est employé par Petech (1977, pages 78, 151 et 158), par A. Cunningham (1854, pages 268-269), par Riaboff (1998), par les Chroniques du Ladakh (53, 1-7), par Tashi Tsering (p. 213). Et Levine le mentionne à propos de Rutog. En fait l‟emploi de u lag fait l‟unanimité et ne se réduit pas à rist. J‟ajouterai que la définition qu‟en fait Surkhang Wangchen Gelek placée à l‟intérieur d‟une nomenclature compliquée n‟était peut-être même pas connue des paysans concernés. N‟oublions pas que Surkhang Wangchen Gelek était un haut fonctionnaire. Il convient quand même aussi de rappeler que u lag est employé dans le texte des traités de 1684 et 1842. Et d'autres termes même le gouvernement tibétain ne savait pas employer les mots correctement !

Que u lag ait eu au départ le sens restreint que lui donne Surkhang Wangchen Gelek et en soit venu à désigner par métonymie la corvée, et plus particulièrement la corvée-transport, est donc fort possible. C'est ce qui ressort de l'article de Bray complémentaire de celui de Grist (2008). La souffrance des paysans, les abus, étaient tels, que la corvée-transport a pu devenir le point de fixation, et la corvée a fini par se réduire à la corvée-transport, non que les autres aient disparu, mais que c‟est cette dernière qui obnubilait les gens.

(Harcourt, 1871, p. 85).

Grist écrit à peu près la même chose, ce qui montre qu'elle s'intéresse aussi au point de vue du paysan. Jahoda écrit page 86 :

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Et je suis bien d'accord avec Jahoda lorsqu'il commente : « The potential for extending these services above and beyond the required tax burden was exploited in particular under the foreign rule of the Dogras in Ladakh ». Nous arrivons alors à l'essentiel de la critique de Jahoda. Je la cite intégralement :

(p. 85)

Je ne suis pas sûr qu'elle « substantiate the u lag for trade ». Grist savait parfaitement qu'il y avait d'autres formes de corvée, comme réparer les routes. Elle l'écrit page 266 : « mending roads (...) working on royal, noble or monastery estates ». Elle savait très bien qu'il existait d'autres formes de corvée-transport non liées au commerce, comme les services à fournir

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aux fonctionnaires anglais. Elle en donne elle-même un exemple : « The expedition of the British Joint Commissioner, who was the overseer of the Central Asian trade from the 1860's, required the maximum number of begar-pa to turn out. This was in recognition that Britain was the paramount power in the area ». (1994: 271). Et des témoins de l'époque lui ont raconté : « when the British come a bad smell comes ». (p. 268).

Mais il faut voir l'importance du commerce dans cette affaire. Évidemment, nous n'avons pas de statistiques, mais nous avons quelques témoignages. Le traité de 1684 prévoyait que le lo phyag enverrait un « tribu » consistant en quelques cadeaux : des écharpes cérémoniales (kha btags), dix sachets6 de poudre d'or, une livre de Safran, quatre pièces de pattu (un tissu), une ou deux pièces de coton, 10 srang7 de parfum. (Petech 1977, p. 78 et Bray 2008, p. 47. Voir aussi Bray 1990). Tout cela est dérisoire : cela tient sur une seule mule. Aussi le texte du traité précise-t-il explicitement est-ce que le lo phyag pourra être escorté de 200 lots de marchandises, de 25 chevaux, plus le personnel qui profitera du u lag. (Petech, 1977, p. 78). D'un côté on a affaire à la reconnaissance symbolique de la victoire d‟un des deux camps, et de l'autre on fait des affaires.

En 1889 les deux missions, le lo phyag, et la mission réciproque le ja-ba (prononcé cha pa8 « homme chargé du thé ») bénéficiaient de 260 animaux de bât, plus les animaux à monter9.

Il faut voir qu'il ne s'agissait pas d'une expédition facile. En 1942, Abdul Wahid Radhu a mis quatre mois pour atteindre Lhassa ; le soutient des deux États était indispensable. Abdul Wahid Radhu raconte que pour le lo phyag de 1942 le maharadja avait fourni 10 000 roupies pour payer le transport et que le gouvernement de Lhassa avait fourni 200 à 250 mules. (Abdul Wahid Radhu, 2019, p. 53). On est loin des 25 poneys et 3 serviteurs que mentionne Francke (Francke, 1926, p. 116 ; cité par Jahoda).

Le statut des deux caravanes, le lo phyag et le ja pa (gzhung tshong) comportait donc de grands avantages car sur le territoire tibétain, elles étaient autorisées à procéder à toute réquisition et même à recourir au travail de serfs pour leur transport. Dans le Jammou et Cachemire, le système était différent : le gouvernement versait des subsides pour couvrir les

6 En fait 10 thur zhos, c'est-à-dire 10 tolas. 1 tola = 11 grammes. 7

1 srang = une pièce d'argent. Voir plus haut.

8

Le nom officiel est gzhung tshong.

9

Lettre de Henri Samsay à Parry Nisbet du 23 juin 1889, British Librairy Oriental and India Office Collection (OJOC, L/P&S / 7 /57). Citée par Bray, 2008, p. 47 et note 6.

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frais. (Abdul Wahid Radhu, p. 56). Un passage d‟Abdul Wahid Radhu montre l'importance que lui attache le pouvoir de Lhasa.

Il s'agissait donc d'une affaire sérieuse pour le gouvernement tibétain. À deux reprises, à un siècle et demi d'intervalle, les Tibétains, vainqueurs, acceptèrent la mise en place de cette caravane, et la prépondérance du Ladakh dans le commerce de la laine pashmina.

Dans son article de 2018, Bray développe cet aspect diplomatique du lo phyag. On y apprend qu‟en 1797, par exemple, le lo phyag se chargea de transmettre une invitation du roi du Ladakh au 8ème Drukchen rinpoche (p. 54), ou que la reine du Ladakh, voulant faciliter le mariage de son fils avec un prince tibétain, profita du lo phyag de 1829 pour envoyer un négociateur (p. 55). Et que le monastère de Hémis était autorisé à envoyer 60 animaux de bât, 5 poneys de selle et 2 yaks de selle avec le lo phyag (p. 66).

Il faut insister sur ce point : vu les énormes distances et les dangers, seules de lourdes expéditions pouvaient permettre le maintien d‟une relation entre deux États qui relevaient de la même langue écrite et de la même religion. Et ceci ne pouvait pas fonctionner sans la réquisition des habitants. Mais revenons à Jahoda :

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(Jahoda, p. 86)

Ici je crois qu'il faut diviser ce commentaire critique de Jahoda en quatre points.

Premier point : l'expression « ritual of citizenship » est exagérée et inadaptée. Sur ce

point je suis d‟accord avec Jahoda. Le mot citizen n'a pas sa place dans une monarchie traditionnelle, le mot « sujet » étant plus adapté. (On notera au passage qu‟ici aussi rist se place du point de vue du paysan). Mais il s‟agit plutôt d‟une maladresse de vocabulaire, rist voulant dire que les khang chen sont les principaux sujets de droit et de devoir (et non pas les individus).

Deuxième point : « Her argumentation starts from the circumstance that "begar" in Ladakh

was part of a traditional obligation ("customary obligation") of the khang chen houses ("house of full status in a village") and thus represented a confirmation of their status » (…) « She goes on to add: “In contemporary Ladakh khang chen will still perform extensive labour and make donations for monastery and village work and ceremonies” (ibid.) ». Grist ne fait pas un parallèle entre le eg u l g et la participation des khang chen à la vie du village, aux travaux de réparation, aux cérémonies, et à l'aide aux gonpa (dgon pa). Ce serait effectivement discutable. L'entraide villageoise n'a effectivement rien à voir avec le begar ‘u lag lorsque, par exemple, on récure les canaux en début de saison. Même réflexion pour les cérémonies collectives. Quant aux dons et aux aides aux monastères, ils font partie des actions qui permettent d'améliorer le mérite, en réalité le prestige (Kaplanian, 1981, page 201). Grist écrit simplement que les khang chen ont un certain nombre de devoirs. La participation au ‘u l g en fait partie, la participation aux activités du village aussi.

Troisième point : il n‟en reste pas moins que rist a raison de dire que l‟ u lag était

quelque chose d'accepté. Le principe n'avait jamais été remis en cause. C‟est ce qui ressort d'une citation de Barnes (cf la phrase mise par moi en italiques) :

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1855, p. 228, § 433).

Ce qui était en cause sous la période dogra, c‟étaient les abus. À ce point de vue le Ladakh était particulièrement sous pression : déplacement des hauts fonctionnaires du maharadja, des Anglais, des nobles, des expéditions commerciales (et pas seulement le lo phyag et le ja pa). Le Ladakh était un carrefour caravanier. Le Spiti, en dehors de circuits commerciaux, était beaucoup moins victime des abus.

Il est difficile de savoir ce que pouvait être la corvée-transport à une période plus ancienne, avant les Dogra, et même avant le traité de 1684, à l‟époque de la dynastie Namgyal. C'est peut-être le Tibet de l'Ouest d'avant 1950 qui en donne une idée : ni fonctionnaires britanniques, ni nobles, ni Dogra, par contre nous sommes en partie sur les itinéraires commerciaux. Cela nous ramène au travail de Levine.

À Ruthog les paysans devaient fournir le ‘u lag (nous avons vu que c'était le mot employé) pour les fonctionnaires locaux et pour toute personne munie d'un ordre de réquisition. Étant donné que nous sommes dans une région déserte et que, par conséquent, les distances d'un lieu habité à l'autre sont grandes, les personnes réquisitionnées devaient parcourir trois étapes. Nous avons vu que l'effort fourni était proportionnel au nombre de sleb (point 3 de Levine).

Apparemment à Ruthog les expéditions commerciales ne profitaient pas de l‟‟u lag. Par contre les commerçants indiens et certaines agences du gouvernement se rattrapaient en vendant leurs marchandises aux paysans à des prix fixés (points 6 et 7).

Signalons quand même le gzhung lug rgyab mdun : il était demandé à cinq personnes d'accompagner quelque 500 moutons de bât jusqu'à Kargil pour échanger du sel contre des grains, de la farine, du thé et des abricots. Les cinq accompagnants devaient apporter leur nourriture. Il ne s‟agissait donc que de cinq personnes, les moutons étant fournis par les bénéficiaires.

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À Tholing il y avait le gzhung tshong10, une expédition pour Senge Khambab (Shiquanhe) à cinq jours de marche aller-retour (point 2). Ensuite il y avait le la tshams skor khral qui consistait à accompagner les deux représentants du gouvernement venant de Gartok jusqu'à la frontière indienne pour leur inspection annuelle (point 9). Ensuite il fallait envoyer des abricots du Ladakh à Lhasa. C‟était le Shing tog phar sgrub. Les paysans de Tholing n‟étaient chargés que de la première étape (point 9). Enfin (point 10) il fallait escorter un représentant du Lahoul (gar zhva dpon po).

À Purang les habitants devaient assurer trois corvées-transport :

― La visite annuelle d'un « gouvernement trade agent »,

― La visite à Purang du représentant du gouvernement à Gartok,

― Le transport des taxes et profits du gouvernement faits sur le commerce à la frontière

À Khochar il fallait amener et ramener le représentant de l'église bhoutanaise, ce qui représentait 35 journées de portage d'animaux (yaks et chevaux), plus le personnel, la nourriture et le fourrage. Le voyage du représentant du gouvernement à Gartok représentait onze journées de portage par animaux de bât, plus le personnel, la nourriture et le fourrage.

Dans l'ensemble les programmes paraissent moins chargés qu‟au Ladakh du XIXe siècle, et peut-être cela donne-t-il une idée de ce qu'était la corvée-transport à l‟époque des Namgyal avant l‟invasion dogra. Ceci dit ; il y a trois réflexions à faire sur cette liste :

1. Il s'agissait avant tout de services rendus à l'administration et aux monastères. Quoi de moins étonnant que de fournir des services à un haut fonctionnaire en déplacement pour raison professionnelle. Quant à l'aide aux monastères nous avons vu qu'elle est considérée comme moyen d'améliorer le mérite.

2. Il y avait très peu de commerce proprement dit. Cinq personnes pour accompagner à Kargil une expédition de 500 moutons est une charge dérisoire quand on compare à certaines corvées à fournir au Ladakh. Le transport des profits à Purang n'était pas non plus une lourde charge au sens littéral du mot. Il n'y a que l'expédition des abricots qui fût peut-être astreignante.

10

Gzung tshong est le nom de l‟expédition réciproque au lo phyag que les Ladakhi appellent ja ba (prononcé chapa, les « hommes du thé »). Ce dont parle Levine est-il une portion du gzung tshong réciproque du lo phyag ? Une citation de Surkhang Wangchen elek laisse entendre que c‟était le cas :

« The gzhung tshong brings over a thousand boxes of tea. This is sold among the mi ser of the province. They are charged higher prices than the usual market prices. The payments must also be made in the Indian rupees. With this money, the gzhung tshong purchases dried fruits, sweets and clothes from Ladakh and Kashmir for the rtse phyag

(15)

Il n'y avait donc pas ces abus, ces personnes qui profitent de leur appartenance à la famille royale, ou à la noblesse pour se servir du u lag / begar à des fins commerciales.

3. Dans l'ensemble les mouvements précités se répétaient annuellement. Il y avait un calendrier qui permettait aux paysans de s'organiser. Il a pu y avoir des réquisitions exceptionnelles et non programmées à l'avance pour la venue d'un personnage important, mais c'était inhabituel.

Revenons à la citation précédente de Jahoda, et reprenons une partie de la phrase du milieu (c‟est mon quatrième point) : « The "Ladakhis" (in this instance Grist does not limit it to the khang chen group), according to Grist », etc. Jahoda fait un contresens sur ce qu'écrit Grist. Il comprend que la confirmation du statut des khang chen se fait par opposition à celui des khang chung. Grist connait bien le système des khang chen + khang chung (plus éventuellement yang), elle a été une des premières après Pierre de Grèce (1963) à le décrire (Grist, Kaplanian et alii, 1976 et 1979), avant que j‟en reparle (1981) ainsi que Phylactou (1989). En aucun cas la khang chen ne s'oppose à la khang chung. La khang chen et la khang chung forment une seule entité, une seule personne morale. Au Ladakh on emploie le mot khang pa avec khang pa = khang chen + khang chung, autrement dit maisonnée = maison principale + maison annexe. Le mot khang pa ne semble pas utilisé au Spiti où khang chen est soit employé dans le sens de maison principale, soit employé dans le sens de maisonnée, c'est-à-dire khang chen + khang chung. La suite de la citation de Jahoda confirme son incompréhension :

(p.86) Là je suis en total désaccord. Aussi bien à l'époque royale qu‟à époque dogra (et encore dans les années 1970, quand nous avons commencé à travailler, Grist et moi) la khang chen, c'est-à-dire l'ensemble khang chen + khang chung, ne formait qu'une seule personne morale, les seuls sujets de droit et de devoir du village. Chaque khang chen, c'est-à-dire chaque khang chen + khang chung, avait un droit de vote pour l‟élection du chef de village, pour les prises de décision importantes, etc.

(16)

Et, encore aujourd‟hui, pour des festivités par exemple, le travail est partagé entre les khang chen. Quitte à ce qu‟à l'intérieur de chaque khang chen (membres de la khang chung inclus) on discute de qui va faire quoi. Cela n'a donc pas de sens de dire que « the status of the khang chung ». Cela n‟a pas de sens d‟écrire « other social classes, e. g. khang chung ». C'est le plus souvent le père de celui, qui dirige la khang chen qui est dans la khang chung. C'est la même classe !

La khang chen étant l'unité de base, il était donc tout à fait cohérent d‟écrire que « Begar was levied per household and traditionnally the tax fellow khang chen which were full landowning tax-paying households » (Grist, 1994, p.266). Et paragraphe suivant elle écrit :

(1994, p. 267)

Elle parle donc de « tenants », c‟est-à-dire de métayers, pas de khang chung, et Lyall parle de dotul (« landless tenants »). Les du ‘thul étaient propriétaires de petites maisons mais le plus souvent n‟avaient pas de terre. Jusqu‟aux réformes agraires qui ont suivi l‟indépendance, ils vivaient, et vivent toujours en partie, de travaux dans les khang chen11.

Jahoda aussi s‟appuie sur Lyall, et page 82 il cite Lyall 1874, p. 187. Or rien dans le passage en question ne nous indique que la khang chung est d‟une classe inférieure à l‟aide de laquelle la khang chen se fait remplacer. Voyons un peu mieux ce que dit Lyall :

11

Ce thème des du ‘thul est très important non seulement parce qu‟ils représentent la plus grande partie de la population du Spiti, mais parce que leur existence rapproche le Spiti du Tibet où l‟on trouve aussi des du ‘thul appelés dud chung (Aziz, Goldstein). Par contre ils sont inconnus au Ladakh.

(17)

(1874, pp 187-188, § 151, repris dans Barnes et Lyall 1889, p. 117, § 151).

Le travail ordinaire de réparation est donc du ressort des khang chen qui peuvent éventuellement appeler à la rescousse les khang chung et les du ‘thul. Les expéditions qui impliquent le passage d‟un col sont de la seule responsabilité des khang chen à tour de rôle, lesquelles khang chen peuvent sous-traiter avec un du ‘thul ou autre dépendant. Mais sous-traiter coûtera cher. Ensuite des provisions doivent être déposées par chaque khang chen au commencement de la saison pour les éventuels voyageur. Notons, car elle va bientôt resservir, cette distinction entre « ordinary repairs of roads » et les expéditions qui impliquent le passage d‟un col. Une liste (roster), indiquant le tour de chaque khang chen, est établie. Un passage de Barnes et Lyall est encore plus explicite :

12 On notera au passage la phrase ։ « I think, however, that in future each house, and not each holding, should

furnish a man for repairs of roads, as is now the practice in Láhaul ». D‟un côté Lyall a bien saisi la différence entre « house » et « holding », de l‟autre il la comprend mal et souhaite qu‟elle disparaisse. Pour lui une maison c‟est un bâtiment, et la notion de maison annexe, qui en fait fait partie de la maison principale, de dérange.

(18)

(p. 115, § 148)

C‟est on ne peut plus clair : les khang chung ne sont pas « liable for ordinary begar but must help on occasion of great demand near home ». Voilà pour le « ordinary begar ». Quant au « distant begar, il arrive que des membres de la khang chung remplacent le chef de la khang chen par « mutual agreement ». Mutual agreement veut dire qu‟on se réunit, « on » voulant dire khang chen + khang chung, et qu‟on discute de savoir qui va faire quoi. Cela n‟a rien à voir avec une sous-traitance faisant appel à des métayers ou à des du ‘thul, qu‟il faut payer, et apparemment assez cher. Barnes et Lyall donnent les tarifs pour le Lahoul (p. 111, § 140).

La Gazetteer est encore plus explicite :

(p. 96 /264)

Et un peu plus loin :

(p. 97 /265)

Et elle précise encore :

(19)

L’organisation du u lag / begar

Je pense que le dossier doit être remis entièrement à plat, car rist et Bray n‟ont pas tout à fait épuisé le sujet. Il reste quelque chose à décrire : c‟est l‟organisation du u lag / begar. Une première question est de savoir s‟il existe des rkang ou de sleb dans l‟Himalaya de l‟Ouest. Apparemment non. On partira d‟une citation de Barnes et Lyall, à propos du Lahoul :

p. 107, § 133 et p. 108)

Donc toutes les khang chen, appellées ici jeola, sont égales et paient le même impôt. Il n‟y a ni rkang, ni sleb. D‟après la Gazetteer :

(p.112 / 280)

Ce passage est très intéressant. Le système d‟imposition permet de combiner deux choses contradictoires. D‟une part toutes les khang chen (holding) sont égales. Elles paient donc le même impôt en espèces. D‟autre part elles sont de taille inégale et par conséquent elles paient un impôt en grains qui peut varier de un à dix khals (de 13 à 130 kg). Ce rapport de un à dix indique une très forte inégalité de taille. Certaines maisonnées payaient même plus : du papier fait main, du tissu, des barres à mine, etc.

(20)

La question sera donc maintenant de savoir si pour le begar u l g il y avait une adaptation à la taille de l‟établissement (style rkang ou sleb), un combiné entre une égalité fictive et une inégalité réelle comme c‟était le cas pour les impôts, ou une égalité totale. L‟organisation administrative du Spiti était la suivante :

― Cinq kothis (sous-districts) coiffés par un chef de kothi appelé gad po chen mo

― Des villages coiffés par un chef de village, le gad po chun ngun, élu pour un à trois ans sur la base d‟une voix par khang chen (Gazetteer, p. 95 / 263). Il s‟occupait de percevoir les impôts qu‟il remettait au Nono (le seigneur héréditaire du Spiti).

Les habitants du Spiti distinguaient clairement entre le « ordinary begar » et le « distant begar » (Gazetteer, p. 97 265). On se rappelle que c‟est surtout le distant begar, celui qui amène à franchir des cols, qui faisait problème. Ainsi il existait une liste qui indiquait le tour de chacun pour les corvées ordinaires, et une autre pour les corvées lointaines. La distinction était très nette, et c‟est ainsi que le chef de village « is also excused his turn of carrying loads from to village, but not his turn of carrying loads across the passes for which there is a different roster » (Gazetteer, p 95 / 263, et Lyall, p. 188, § 152). Le transport d‟un village à l‟autre restait de la petite corvée. Il n‟y avait de grande corvée que lorsqu‟il y avait le passage d‟un col13

.

C‟étaient les gad po chen mo qui étaient responsables du begar : « They have nothing to do with the collection of the revenue, but are in charge of the begár arrangements and receive and account for the collections of supplies for travellers.» (Lyall, p 188, § 152, et Gazetteer, p. 94 / 262). La Gazetteer le répète page 95 : en ce qui concerne le begar la responsabilité remontait au gad po chun ngun : « There is a gatpochungan for each village or group of two or three small villages. In begár arrangements he works. under the gatpo of the kothi, and he collects the revenue of the village direct from every payee, great or small, and conveys the sum due from the village to the Nono. » (page 195 / 263)

Cela veut dire quoi ? Que l‟organisation du begar était une affaire plus importante que la collecte des impôts. Pour cette dernière on faisait confiance au chef du village, tandis que pour l‟organisation de la corvée ce dernier était sous contrôle.

Il n‟en reste pas moins que dans les deux cas, avec des listes différentes, cela se faisait khang chen par khang chen.

13 On voit là que la division en différentes sortes de corvées n‟a rien à voir avec celle qu‟indique Surkhang

(21)

(Gazetteer, p. 100 / 268).

Cette citation appelle trois réflexions :

a) Les deux catégories de begar ne sont pas le transport de village à village versus le transport vers un village plus lointain impliquant le passage d‟un col, mais le begar « ordinaire », « simple » incluant le transport vers le prochain village sans passer un col, mais aussi toutes sortes de réparation et de travaux d‟entretiens, versus le transport impliquant le passage d‟un col. La coupure n‟était donc pas entre deux formes de transport. Il est assez facile de comprendre pourquoi le transport impliquant le passage d‟un col était une catégorie à part. C‟était quelque chose de particulièrement éprouvant comme le montrent les citations plus haut.

b) Il y a donc deux listes, pour les corvées « ordinaires » et pour le passage d‟un col. Pour les corvées ordinaires, c‟est assez simple à comprendre, puisque tout se passe au sein du même village d‟où la responsabilité du gad po chun ngan. Pour le passage des cols c‟était chaque village à tour de rôle, et ensuite, au sein de chaque village, khang chen par khang chen (encore une fois khang chen veut en fait dire khang chen + khang chung). C‟est la khang chen qui était responsable, mais éventuellement elle pouvait appeler à la rescousse. C‟est ce qu‟indique la suite du paragraphe que je viens de citer :

(idem)

c) Enfin il est dit que à partir de 1870 chaque « house » (donc aussi bien khang chen que khang chung) et non pas chaque holding (khang chen + khang chung) fournira un homme pour la réparation des routes. Décidément les Anglais avaient du mal à comprendre ce système de khang chen et khang chung. Ils avaient du mal à l‟accepter plutôt, car en fait ils le comprenaient bien. Leurs textes distinguent toujours très clairement « house » et « holding ». Ce n‟est pas le cas d‟auteurs comme A. Cunningham qui distinguent les maisons par la taille mais ne font pas la différence entre khang chen et khang chung.

(22)

Une chose est claire : il n'y avait ni rkang, ni sleb. Chaque maisonnée (khang chen) à tour de rôle était bonne pour la corvée ordinaire, elle devait fournir un homme. Chaque village à tour de rôle et dans chaque village chaque maisonnée (khang chen) à tour de rôle, était responsable de la corvée avec passage de col.

Le système était-il le même au Ladakh ? Probablement. Nous sommes mieux renseignés sur le fonctionnement de la corvée-transport sur les longues distances avec passage d'un col. Voici ce que résume Bray (2008) :

(Bray, 2008, p. 61)14.

Le système était donc le même : village après village dans un groupe de village, et ensuite maison par maison « every khang chen had to supply a man and a pony ». Les khang chen étaient donc à égalité, et il n'était pas tenu compte de leur taille. (Voir aussi Ramsay, 1890, pages 78-79).

Comme le remarque Rizvi citée par Bray, il y avait des abus. Dans son rapport de 1932, Glancy confirme le système de res et lui aussi dénonce les abus.

14

Cette citation appelle quelques précisions. « Treaty road » désigne la route de Srinagar à Leh, et au-delà, vers le Sinkiang. Assami veut dire Zamindar, propriétaire terrien.

(23)

Le cas du Zanskar

Ce tableau de la corvée ne serait pas complet sans un mot sur le Zanskar, ce qui est possible grâce à un article de Riaboff (1998). L'article se limite au royaume de Zangla composé de quatre villages Tsazar, Pishu, Pidmo et Zangla, au monastère de Karsha, et aux taxes et corvées dues au roi (avant 1950) et au monastère de Karcha (à l'époque où Riaboff a collecté les données, dans les années 1990). Nous avions affaire soit à des propriétaires de plein droit, soit à des métayers sur les terres du roi de Zangla ou du monastère de Karsha, soit à des chun pa, ce qui correspond au dud chung de Goldstein ou au du ‘thul ailleurs. La division khang chen et khang chung est attestée, cela nous le savons depuis la thèse de Riaboff (1997). Après quoi Riaboff écrit :

Une fois de plus les « households » étaient considérées comme égales. L‟étaient-elles ? Le loyer payé par les métayers aussi bien au roi de Zangla qu‟au monastère de Karsha était de l'ordre d'un tiers de la récolte.

De l'ordre de, car il était de toute façon fixé une fois pour toutes et n'était pas recalculé chaque année. En cas de mauvaises récoltes il fallait payer quand même la même quantité d'orge. Après quoi il y avait les corvées. Ici on retrouve une organisation assez similaire à celle de la vallée de l'Indus et du Spiti. Nous avons d'abord affaire au « King‟s trading expéditions » qui nécessitaient l'absence de plusieurs hommes pendant plusieurs semaines. Cette corvée-transport („u lag) impliquait toutes les khang chen de tous les métayers du roi : les quatre villages se relayaient tous les deux ans : Zangla, puis l‟un des trois, Pishu, Pidmo ou Tsazar, puis Zangla, puis le second des trois, etc. À l'intérieur même de Zangla un système de rotation existait. Le mot est tshir.

Restaient les corvées « ordinaires ». Certains métayers étaient chargés de s'occuper des moines en tournée de récolte d‟aumônes ; d‟autres étaient chargés d'apporter l'eau aux moines mutés à Zangla.

La règle d'égalité se retrouvait ailleurs. Toutes les khang chen du royaume (sauf les chun pa) devaient fournir chacune à son tour un homme (gsol pon) chargé d'apporter l'eau et le bois au palais. Et cette fois-ci il y a bien une distinction entre khang chen et khang chung car chaque khang chung devait ramasser en montagne du fourrage sauvage (ri rtsa), mais c'est chaque khang chen qui devait l'apporter au palais. Chaque khang chen devait envoyer quelqu'un pour aider à la

(24)

moisson, alors que chaque khang chung devait envoyer quelqu'un porter les gerbes jusqu'à l'aire de battage. Enfin les khang chen se chargeaient de couper la luzerne que les khang chung

mettaient en botte. À l'exception de ces quelques demeures chargées de s'occuper des moines, la règle de l'égalité était respectée. Elle était corrigée par la règle suivante : « Annualy, the houses of the kingdom also had to provide the king with a wood land per plough animal (rmo glang) in their possession ». Évidemment le nombre d'animaux de trait variait d‟un établissement à l'autre. Pour ce qui est du monastère de Karsha, il s'agissait surtout du travail des chun pa. Mais chaque khang chen devait fournir un cheval à deux occasions festives « regardless of their farm status ». Toutes les khang chen des villages sous l'autorité religieuse de Karsha, (ce pouvait être des métayers, mais pas forcément, ici c'est l‟autorité religieuse qui comptait) devaient fournir un chargement de bois. Les khang chung fournissaient la quantité de bois qu'elles voulaient. Une fois de plus khang chen et khang chung étaient distinguées. D'autre part les huit plus proches villages de Karsha étaient divisés en deux groupes. Pendant deux ans les khang chen d‟un groupe étaient chargées de couper la luzerne sur les terres du la bla brang (la résidence du rin po che), puis les deux années suivantes les khang chen du second groupe. Les khang chung mettaient la luzerne en botte.

L'originalité du Zanskar tient peut-être le fait que khang chen et khang chung sont distinguées en matière de corvée. Cela n'empêchait pas la khang chen + khang chung de ne constituer qu‟une seule personne morale. La règle d'égalité entre les khang chen n'existait pas en matière d'impôts, par contre elle existait en matière de corvées.

Conclusion

Dans les régions bouddhistes et tibétophones situées à l‟ouest du Tibet où il existe une division entre khang chen et khang chung, il semble qu‟il y ait une règle théorique d'égalité entre les khang chen (j‟entends par là les khang chen + khang chung) peu appliquée en matière d'impôts et de taxes, mais à peu près appliquée en matière de corvée. Il n'y avait ni rkang, ni sleb. Par contre du Tibet central au Tibet de l‟ouest il existait un système (rkang ou sleb) permettant d‟adapter la charge de travail en cas de corvée à l‟importance de la maison. Ceci est un exemple de coupure entre le Tibet et les royaumes marginaux qu‟étaient la Ladakh et le Spiti. La division entre corvées « ordinaires » ou nang et corvée lointaines avec passage de col ou phyi est aussi attestée dans toute la région de l‟Ouest, mais on la retrouve aussi dans certains endroits du Tibet15.

15 Je remercie John Bray, Nancy Levine, Isabelle Riaboff et Tashi Tsering pour de nombreux commentaires très

(25)

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