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F. Hudry (ed.), « Le De secretis nature du ps.-Apollonius de Tyane », Chrysopoeia, 6, 1997-1999

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décennie 1330. Boudet ajoute que le successeur de Jean XXII, Benoît XII, pape de 1334 à 1342, «continua sa politique de répression de la magie sur un rythme analogue, et en prenant lui aussi pour cible privilégiée des clercs du Midi de la France ». Or, précisé­ ment, Boudet a remarqué que, dans les actes du procès d’«un ancien frère mineur défroqué, Olivier Pépin», jugé en 1347 par l’officialité de F évêque de Mende, en Auvergne, il est question d’un Liber iuratus acheté par Pépin, qui est sans le moindre doute le nôtre, puisqu’un long extrait du prologue en est cité verbatim. Avec la précision suivante : quidam nominatus magister Pradellus reffert in quodam prologo suo ..., ce qui ferait de ce « maître Pradel », inconnu par ailleurs, l’auteur qui se dissimulait sous le nom majestueux d’«Honorius, fils d’Euclide, maître de Thèbes ». Il est certain, en tout cas, que le L iber iuratus existait déjà en 1347, et il est plus que probable qu’il fut écrit - ou disposé sous sa forme actuelle - seulement quelques années auparavant, dans le sud de la France (ce qui expliquerait au demeurant la présence dans le texte de nombreux éléments d’origine hébraïque, issus des « cercles cabalistiques» de Provence).

Jean-Marc M a n d o s io

Françoise H u d r y (éd.), « Le D e secretis nature du ps.-Apollonius de Tyane, traduction latine par Hugues de Santalla du Kitâb sirr al-halîqa», Chrysopœia, 6, 1997-1999 [2000], p. 1-154.

Le Kitâb sirr al-halîqa wa sa n ’a al-tabVa («Livre du secret de la création et de F ef­ ficacité de la nature ») est un traité arabe du ixe siècle, supposèrent rédigé par le célèbre mage-philosophe grec Apollonius de Tyane (« Balinûs » en arabe), qui n’aurait lui-même fait que recopier un livre d’Hermès Trismégiste découvert par ses soins dans une crypte, comme l’expose le prologue de l’ouvrage F Des deux rédactions - longue et courte - du texte arabe, seule la courte a fait l’objet d’une traduction latine, effectuée dans la première moitié du xne siècle par Hugues de Santalla, et cette traduction ne subsiste que dans deux manuscrits, tous deux conservés à la Bibliothèque nationale de France : Lat. 13951 (première moitié du xne s., anciennement à l’abbaye de Saint-Germain-des- Prés) et Lat. 13952 (xvne s.), copie de sauvegarde du précédent. Le titre utilisé est celui de F explicit (Liber Apollonii de secretis nature et oc<c>ultis rerum causis), tandis que

1 Le texte arabe a été édité par Ursula W e is s e r (Kitâb sirr al-halîqa wa san’a al-tabVa, Alep, 1979), qui lui a également consacré une étude (Das Buch über das Geheimnis der Schöpfung von Pseudo-Apollonios von Tyana, Berlin-New York, 1980). Dans sa thèse de doctorat (Teologia e meteorologia in un trattato ermetico in lingua araba : il Kitâb sirr al-halìqa, Naples, 2000), Massimo P a p p a c e n a a intégralement traduit en italien les livres I (théologie) et II (météorologie) ; par ailleurs, divers extraits du texte arabe sont traduits en regard de la version latine dans le livre de Pinella T r a v a g l i a , Una cosmologia ermetica : il Kitâb sirr al-halìqa / De secretis natura?,

Naples, 2001, p. 157-257. Il existe aussi une traduction française partielle, ancienne mais toujours utile, réalisée d’après Factuel ms. arabe 2302 de la B.N.F. par Antoine-Isaac S i l v e s t r e d e S a c y

(« Le livre du secret de la créature, par le sage Bélinous : manuscrit arabe de la Bibliothèque du Roi n° 959, in-4° de 117 feuillets », Notices et extraits des manuscrits de la Bibliothèque nationale, t. IV, Paris, an 7 [1799], p. 107-158). Un extrait - la traduction du prologue (ibid., p. 115-120) - en est reproduit par Didier K a h n dans Hermès Trismégiste : la Table d ’émeraude et sa tradition alchimique, Paris, 1994, p. 3-8.

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l’incipit indique, à l’imitation du texte arabe («Ceci est le livre de Balinûs sur les causes ») : Incipit liber Apollonii de principalibus rerum causis.

On reconnaît dans cette version latine, qui est plutôt une adaptation qu’une traduc­ tion fidèle, les six parties du texte arabe - (1) le créateur et ses créatures, (2) les corps célestes et la météorologie, (3) les minéraux, (4) les plantes, (5) les animaux, (6) les êtres humains - , mais la structure d’ensemble est différente : le volumen primum, inti­ tulé D e causa materiali, part du créateur pour arriver aux plantes ; le volumen secundum, intitulé D e secretis creature formam recipientis, regroupe les êtres pourvus d’âme

(forma). L’ouvrage comprend en outre un prologue et un épilogue narratifs, où Apollo­

nius - ego Apollonius, in prestigiis admirandus - raconte son entrée, à la suite de diverses péripéties, dans la crypte située aux pieds d’une lapidea effigies d’Hermès,

multiplici colorum varietate prefulgens, quam eiusdem opifex illustris supra vitream

columpnam invacillanter atque firmius locaverat. Il y découvre, dans les mains d’un

senex in aureo scabello residens qui n’est autre qu’Hermès, un livre - le D e secretis

naturœ - portant ces mots : Hic sunt geniture archana et principales omnium rerum

cause, et une tabula viridissimi smaragdinis surmontée de l ’inscription : Hic expressa

nature inscribitur efficacia. C’est la très célèbre Table d ’émeraude, qui constitue en

quelque sorte le complément pratique du livre des « secrets de la nature ». Le texte de la

Table, aussi court qu’énigmatique, figure à la toute fin de l’épilogue.

La publication de l’édition procurée par Françoise Hudry (qui circulait déjà depuis quelque temps)2 est bienvenue. Elle permet de consulter commodément un texte impor­ tant, non seulement en vertu des théories cosmologiques et physiques qu’il contient, mais aussi sous l’angle stylistique et linguistique. S’agissant d’une « édition de travail » visant surtout à mettre le texte à la disposition des chercheurs, elle ne comporte que très peu de notes explicatives (ce qui n’est peut-être pas un mal).

Pour ce qui est des théories, il faut se référer au livre de P. Travaglia déjà cité (Una

cosm ologia ermetica...), qui constitue un premier effort très appréciable d’élucidation de

cette « cosmologie hermétique ». Il comprend quatre parties : un essai sur « la doctrine des éléments » dans le texte arabe et dans le texte latin (p. 17-155) ; une anthologie bilingue annotée (dont il a déjà été question en note) ; un « glossaire raisonné arabo-latin des termes-clé

»

(p. 259-275) ; et une étude sur « le

S irr

[mais il aurait mieux valu dire, pour éviter toute confusion, le D e secretis naturœ\ dans la littérature scientifique du xiie siècle» (p. 277-337), à travers l’influence du texte d’Hugues de Santalla sur le D e

essentiis d’Hermann de Carinthie et sur le D e elementis de Marius 3. Ce travail est un

peu biaisé, dans l’ensemble, par une tendance à surinterpréter le texte en se fondant sur une idée préconçue de ce que la doctrine « hermétique » est censée être (et de son iden­ tité avec la doctrine alchimique), et par le recours fâcheux à des textes alchimiques, arabes ou latins, postérieurs au Kitâb sirr al-halîqa, pour élucider rétrospectivement le contenu doctrinal de ce dernier. Le texte risque de se trouver ainsi beaucoup plus « chargé » de sous-entendus alchimiques ou « occultes » qu’il ne l’était au départ - même si l’explication de la génération de tous les métaux à partir du mercure et du soufre est incontestablement d’origine alchimique. Le livre de Travaglia est une lecture indispen­ sable pour aborder le D e secretis naturœ, mais il doit être utilisé de façon réfléchie.

En ce qui concerne les aspects stylistique et linguistique de la version d’Hugues de Santalla, tout reste à faire. Le texte est évidemment un document fondamental pour

2 P. Travaglia l’a utilisée dans son livre cité à la note précédente (p. 157-257).

3 Cf. Charles B u r n e t t (éd.), Hermann o f Carinthia : De essentiis, Leyde-Cologne, 1982 ; Richard C. D a l e s (éd.), Marius : On the Elements, Berkeley-Los Angeles-Londres, 1976.

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l’étude de la constitution du vocabulaire philosophique dans le monde latin médiéval, et le glossaire arabo-latin établi par Travaglia ne peut être considéré que comme une loin­ taine ébauche du véritable index raisonné qui serait nécessaire. Mais pour établir ce dernier, il faudrait disposer d’une édition très fiable, exigence qu’une simple «édition de travail » ne peut pas satisfaire. En effet, le texte du ms. de la B.N.F. latin 13951 est souvent incompréhensible ou fautif, et cela saute aux yeux dès lors qu’on entreprend de le traduire ou de comparer la version latine avec le texte arabe (je me suis fondé sur les traductions partielles existantes du texte arabe pour effectuer un sondage). En voici un exemple. Dans le prologue (p. 23), le texte inscrit sur la statue multicolore d’Hermès érigée sur une colonne de verre dit : Ego Hermes hoc in publico construxi simulacrum,

a d quod tarnen ex mei opificis decreto nullus accedere présumât nisi philosophus ego

(«Moi, Hermès, j ’ai édifié cette statue en [un lieu] public, à laquelle cependant, par le décret de mon artisan, personne ne pourra accéder sinon moi, le philosophe »). La formule ex mei opificis decreto nous fait entrevoir Dieu décrétant que nul autre qu’Hermès ne pourrait accéder à sa propre statue, ce qui est déjà un peu bizarre, d’au­ tant plus que, quelques lignes plus loin, un mystérieux vieillard apparaît en songe à Apollonius pour lui indiquer la façon d’entrer dans la crypte située sous la colonne. Il y a donc manifestement une erreur dans la transcription du texte, qui ne devrait pas se référer à la statue elle-même, mais à la construction souterraine dont elle marque l’em­ placement. Et en effet, le texte arabe, queje cite ici d’après la traduction de Silvestre de Sacy, nous dit: «Je suis Hermès à qui la science a été donnée ; j ’ai fait cet ouvrage merveilleux [la crypte] en public, mais ensuite je l’ai caché par les secrets de mon art, en sorte qu’il ne puisse être découvert que par un homme aussi savant que moi. » Ainsi, tout s’éclaire: le traducteur a pris 1’« ouvrage merveilleux» construit par Hermès pour la statue, d’où ce simulacrum qui rend le texte latin incohérent ; en revanche, l’étrange

ex mei opificis decreto, « par le décret de mon artisan », est une erreur de copiste pour

ex mei opificii secreto, « par le secret de mon art » ; quant au pataquès final (nisi philo­

sophus ego), il résulte de nouveau d’une traduction fautive, car si l’omission du compa­

ratif avait été le fait du copiste, on aurait me et non ego. Les innombrables exemples du même type que l’on pourrait apporter montrent que l’édition quasi-diplomatique du manuscrit de la B.N.F. ne constitue qu’un premier pas vers une véritable édition critique, qui ne pourra être menée qu’en ayant sous les yeux le texte arabe.

L’éditrice souligne à juste titre dans son introduction qu’Hugues emploie «un latin soutenu, recherché (chimolea, emploi d'inquio pour inquam, toujours de necne pour

necnon), inventif (raditio, deica)». On peut y ajouter qu’il recourt volontiers à l’ampli­

fication rhétorique. Prenons par exemple ce passage du prologue, très court dans le texte arabe traduit par Silvestre de Sacy : «Je vais maintenant [c’est Apollonius qui parle] vous apprendre ce qui me concerne en particulier [« mes origines et ma lignée », dans la traduction de Pappacena] : j ’étais orphelin du peuple de Tyane4, dans une entière indi­ gence et dénué de tout ». Il devient dans la version latine (p. 23) : Nunc vero generationis

seriem sanguinisque prosapiam nec omnino tacendam nec prorsus dicendam - posset

enim cena absque his transduci -, satis congruum autumo. Unde ad earn quam res et

locus exigit cognitionem, id solum videtur sujficere quod cum uterque parens adversis

4 Dans le manuscrit utilisé par Silvestre de Sacy, daté de 1551 (cf. le Catalogue des manuscrits arabes de la Bibliothèque nationale, Paris, 1883, p. 403), on a Tuaya au lieu de Tuana. « Cette différence », explique Silvestre de Sacy (op. cit., p. 110), «ne consiste que dans les points diacri­ tiques de l’avant-dernière lettre de ce mot : avec deux points dessous, c’est un ye ; avec un seul point dessus, c’est un noun. Toutes les personnes qui ont tant soit peu fait usage des manuscrits arabes savent combien ces erreurs sont fréquentes, surtout dans les noms propres. »

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fortune incursibus raperetur mortisque avidissim a ingluvies utriusque adhuc necessa- rium adem isset solatium, me, de fam ilia Athawaca progenitum, tanquam qui opibus careat, facultatibus egeat, copias abesse defleat, gemine tandem orbitatis urgente incom-

modo humane sortis ritibus egenum et inconsulte victurum exposuit (« Mais maintenant,

je crois qu’il ne convient ni de taire entièrement ni de déclarer tout au long - car le dîner peut se dérouler sans cela5 - ma lignée et la série de mes ancêtres. C’est pourquoi, pour la connaissance qu’exigent la matière et le lieu, il paraît suffisant de dire que, mes deux parents ayant été emportés par les assauts d’une fortune adverse, et l’insatiable avidité de la mort m’ayant ôté la consolation, encore si nécessaire, de leur présence, moi, engendré de la famille de Tyane, comme quelqu’un qui, dépourvu de richesses, privé de ressources, déplore son manque de biens, le désagrément pressant d’un double orpheli- nage m’a donc conduit à être abandonné, selon les rites de la destinée humaine, [en étant] pauvre et appelé à vivre sans être respecté»). Les sèches indications du texte original deviennent un discours fleuve, écrit par Hugues dans un style antiquisant et raffiné (on notera en particulier l’emploi des termes prosapia, ingluvies, órbitas, et l’al­ lusion à l’expo sitio des enfants abandonnés).

F. Hudry croit déceler (p. 16) dans le texte du manuscrit «une origine espagnole, proche du traducteur », à cause de «la confusion constante sur les consonnes doubles, ainsi que, peut-être, les couleurs utilisées » dans les rubriques. Mais elle n’épilogue pas sur le fait que la forme Athawaca employée par Hugues, dans l’extrait qui vient d’être cité, pour rendre l’arabe Tuana («Tyane»), est étonnante. Elle déclare certes (p. 3) que «le problème des noms propres » tels qu’ils apparaissent dans la traduction « reste entier » et que, « déjà très difficile à résoudre pour l’édition arabe, la conversion en caractères latins ne lui apporte rien». Mais on lit dans l’étude autrefois consacrée par Ruska à la Table d ’ém eraude6 que «la défiguration du nom de “Tyane” en latin {Atha­

waca) » pourrait s’expliquer par une influence de la forme hébraïque de ce nom. Hudry

elle-même cite en note (p. 23) le vieil article de Nau auquel renvoyait Ruska7, sans en tirer la moindre conséquence. Dans cet article, au milieu d’un certain nombre d’affir­ mations fantaisistes, l’auteur écrivait (p. 99) : «Il semble qu’[Hugues de S.] a traduit sur l ’hébreu et non sur l’arabe, car Tuanah est devenu Thawaca (ou Tuaca), et ce change­ ment de n en c ne s’explique ni par une faute d’arabe ni par une faute de latin, mais seulement par une mauvaise lecture de l’hébreu (ca f pour noun) », et il ajoutait que cette forme se retrouve dans le ms. hébreu 1016 de l’actuelle B.N.F., contenant un texte égale­ ment imputé à Apollonius de Tyane8. L’argument est paléographiquement valable en hébreu mais, contrairement à ce que proclamait Nau, la confusion entre noun et q â f n’est

5 Hugues ajoute ici au texte arabe une référence à la «fiction du banquet philosophique antique », comme le relève F. Hudry.

6 Julius R u s k a , Tabula smaragdina : ein Beitrag zur Geschichte der Hermetischen Literatur, Heidelberg, 1926, p. 177.

7 François N a u , « Une ancienne traduction latine du Bélinous arabe (Apollonius de Tyane) », Revue de l ’Orient chrétien, 2e s., 12, 1907, p. 99-106.

8 Nau s’égarait ensuite complètement en croyant voir dans ce texte une traduction hébraïque du Kitâb sirr al-halîqa, alors que le Catalogue des manuscrits hébreux et samaritains de la Biblio­ thèque impériale (Paris, 1866, p. 183) indiquait sans ambiguïté que le ms. Hebr. 1016 comprend une « Introduction de Balianus, ou traité d’astrologie judiciaire, attribué à Apollonius de Thyane », et précisait que «cet ouvrage, divisé en cinq livres et traduit en hébreu sur la version arabe de Honaïn-Ben-Ishâq, traite principalement de l’influence des figures des astres ». Il y a bien dans le De secretis naturœ une partie consacrée à « la composition des cercles célestes et des étoiles » {De compositione celestium circulorum et stellarum, p. 56-64 de l’édition H u d r y ) , mais il y est exclu­ sivement question d’astronomie, ou plus exactement de physique, et non d’astrologie judiciaire.

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pas impossible en arabe, particulièrement dans l’écriture du Maghreb. Il semble donc inutile de spéculer sur l’éventuelle présence d’une version intermédiaire en langue hébraïque entre le texte arabe et son traducteur ; il n’était toutefois pas inutile de se pencher sur cette question.

Un mot pour finir sur la Table d ’émeraude, sur laquelle s’achève le De secretis

naturœ. Ce n’est pas un hasard si l’édition de ce dernier est publiée dans une revue

consacrée à l’histoire de l’alchimie9. La Table d'émeraude a, en effet, rapidement été annexée par les alchimistes, arabes puis latins, qui y ont reconnu (à tort ou à raison) un résumé de leur art, si bien qu’elle a fini par être considérée comme le texte alchimique par excellence. Hudry relève pertinemment que «la Tabula smaragdina ne s’est pas diffusée à partir du D e secretis nature », car la version qu’en donne Hugues n’est jamais citée par les alchimistes médiévaux. Elle précise que la diffusion de ce court texte s’est effectuée « à partir du Secretum secretorum attribué à Aristote », mais elle confond la traduction de la Table d ’émeraude qui figure effectivement dans ce dernier (traduit par Philippe de Tripoli vers 1230-1240 ; la version de Jean de Séville, antérieure d’un siècle, ne comprenait pas la partie alchimique) avec la version latine la plus répandue, habi­ tuellement désignée comme la « vulgate », qui apparaît dans une compilation alchimique traduite au xne siècle et connue sous divers titres (Liber Hermetis de alchimia, Liber

d abessi, Liber rebis, etc.). Cette méprise était excusable, car les alchimistes médiévaux,

suivis en cela par les historiens de l’alchimie et les bibliographes, n’ont pas clairement distingué ces deux versions10. En tout cas, l’intérêt du De secretis naturœ est loin de se limiter à l’alchimie, qui n’est, encore une fois, qu’un élément parmi tous ceux qui composent l’ouvrage, vaste synthèse décrivant l’ensemble des « causes cachées» du monde physique u . Dans les limites qui sont les siennes, 1’« édition de travail» de Fran­ çoise Hudry offre aux historiens de la philosophie et de la langue latine un matériau d’une grande richesse, qu’il leur échoit maintenant de faire fructifier.

Jean-Marc M a n d o s io

9 Ce même numéro de Chrysopœia, intitulé Cinq traités alchimiques médiévaux, contient également : Sylvain M a t t o n , « Avant-propos : éditer des traités alchimiques médiévaux », p. v-xn ;

A n t o i n e Calvet (éd.), «Le De secretis naturœ du pseudo-Arnaud de Villeneuve », p. 155-206 ;

A. C a l v e t et S. M a t t o n (éd.), « Quelques versions de la [sic] Flos florum du pseudo-Arnaud de Villeneuve », p. 207-271 ; Renan C r o u v i z i e r et S. M a t t o n (éd.), « Deux traités de Valerand Du Bois-Robert, alchimiste français de la fin du Moyen Âge : YÉpître à Madame de Bourgogne et VÉpître à Maître Abraham», p. 274-343.

10 Pour une information plus complète sur les différentes versions latines de la Table d ’éme­ raude et leur diffusion, voir Irene C a i a z z o et Jean-Marc M a n d o s io , « La Tabula smaragdina nel medioevo latino », dans Hermetism from Late Antiquity to Humanism / La tradizione ermetica dal mondo tardo-antico alTumanesimo. Atti del convegno internazionale di studi (Napoli, 20-24 novembre 2001), Tumhout, 2004, p. 681-711.

11 II n’était donc pas justifié de le présenter, au sommaire de la revue, comme un « traité alchi­ mique médiéval ».

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