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ARTheque - STEF - ENS Cachan | Utilisation des mathématiques.

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(1)

L'UTILISATION DES MATHÉMATIQUES

Louis C O U I I I G N A L

Il y a un peu plus d'un an, un dernier hommage était rendu ici même à Louis Coufftgnal, par MM. François Perroux, professeur au Collège de France, Georges R. Boulanger, président de l'Association internationale de cybernétique, Louis Josserand et Léonce Peyrègne, inspecteurs généraux de l'Enseignement technique. Nous avons jugé bon, afin de mieux souligner cet anniversaire, de publier un texte posthume de celui qui honora tant la science et l'enseignement technique français. Ce texte n'est pas sans rapports avec celui que notre revue publia déjà en juin 1963(1 ) et nos lecteurs, les spécialistes de l'enseignement des mathématiques notamment, trouveront sans doute intérêt à confronter deux étapes d'une pensée. Nous tenons à exprimer notre très vive gratitude à M. P.-Ii. Couffignal, fils du disparu, qui a bien voulu porter interet a cette publication et nous donner une amicale autorisation.

P . S .

I. A N A L Y S E D ' U N E X E M P L E

L'exemple suivant montre comment on se sert des mathématiques dans l'étude des phénomènes naturels.

1, EXEMPLE : S U P E R P O S I T I O N D E D E U X V I B R A T I O N S Un son pur, tel qu'une note de la gamme, est représenté par la formule :

x = a sin cot (1)

où l'on désigne par :

x, l'élongation d'une molécule, mesure algébrique de sa distance à la position de repos ;

a, l'amplitude, élongation maxima ;

io, la pulsation, proportionnelle à la fréquence ; /,1e temps.

Si l'on fait entendre simultanément deux sons purs, deux notes de la gamme, représentées par

xl = a sin wj.

xa = a sin o>2t

la loi dite « de superposition des petits

mouve-ments » attribue à la vibration résultante

l'élongation :

x = x1 + x2 (2)

Une transformation trigonométrique classique donne

x = xt + x2 = a sin wtt + a sin o>2t

= a (sin W]/ -j- sin f>2t)

= 2ci cos — ? t sin — - t (3)

(1) Louis C O U F F I G N A L , L'utilisation des mathématiques dans

P 118 n 9 é l , i e u r' T e c h n i q u e A r t Science, n° 170, j u i n 1963,

Cette expression est celle d'une vibration

10, + tl)„

— "a t

de pulsation

et d'amplitude 2a cos

la pulsation est constante, l'amplitude varie pério-diquement avec le temps.

Toutefois, si l'on émet simultanément deux sons purs, do et sol par exemple, l'oreille entend dis-tinctement les deux notes do et sol, et non le son de pulsation égale à la demi somme des pulsations de do et de sol, qui est la note mi. C'est seulement dans le cas oii les pulsations o>L et io2 sont tellement

voisines que l'oreille ne peut plus distinguer les sons correspondants que l'on a l'impression de ne percevoir qu'une seule note dont l'amplitude varie lentement; ce phénomène, appelé « b a t t e m e n t s » , est utilisé par les accordeurs de pianos pour par-faire la justesse de chaque corde.

2 . A N A L Y S E D E S R A I S O N N E M E N T S E F F E C T U É S On trouve, dans cet exemple, quatre types d'activité mentale, nous dirons, quatre types de raisonnements.

a) On remplace des phénomènes observés, ici, au moyen du sens de l'ouïe, par une représentation abstraite : la relation x = a sin w/, spécifiée pour chacune des deux vibrations, et la relation

X = X1 -f- x2.

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phénomène. La première opération mentale, est donc de construire un modèle du phénomène ;

b) La suite d'opérations qui fait passer de l'expression (2) de l'élongation x à l'expression (3) est u n e transformation du modèle, p a r application des règles du calcul trigonométrique. Cette opé-ration est indifférente à l'objet physique représenté p a r le modèle, elle est p u r e m e n t m a t h é m a t i q u e ;

c) La troisième opération consiste à construire un être physique dont l'expression (3) soit un mo-dèle : on appellera cet être physique u n e réïfica-tion du modèle. C'est cette opéraréïfica-tion qui p e u t apporter la connaissance d ' u n a t t r i b u t n o u v e a u au milieu étudié.

Dans l'exemple présent, la réïfication c o m p o r te l'observation d ' u n e analogie entre les éléments du modèle (3) et les éléments du modèle (1) :

Dans le modèle (3) l'expression sin ^ 0)3 t

est analogue au sens premier et étymologique du terme (ana, logos) de l'expression sin ut du modèle

(1); et l'expression 2a cos 2 ^ t du modèle

(3) est analogue du t e r m e a du modèle (1), en ce

1 . co, -f- co„

sens que les termes sin — ^ — - t et sin ut a y a n t été acceptés pour analogues du fait de leur écri-ture, et considérés comme j o u a n t le mêm e rôle ; les

„ u>, -I- %

termes 2a cos ^—- t et a doivent à leur t o u r être considérés comme analogues, malgré u n e dif-férence d'écriture assez marquée , et comme j o u a n t le même rôle.

Mais quel est ce rôle ?

Dans la construction du modèle (1), sin vit est un modèle de la vibration, a de son amplitude. Un son p u r dont la vibration est représentée p a r

10, lil. ,., , „ (0, — w, ,

sin - 0— - t et 1 a m p l i t u de p a r 2a cos t

fait jouer à ces deux expressions du modèle (3) par rapport à ce son, qui constitue la réïfication du mo-dèle, le m ê m e rôle q u ' a u x expressions sin ut et a par r a p p o r t au son qui constitue l'original du modèle (1).

Or, l'original du modèle (1) a une existence physique, la réïfication du modèle (3) est u n être fictif, 1111 p r o d u i t de l'imagination, d ' a u t r e s ana-logies auraient pu jouer qui auraient construit u n a u t r e être fictif : ainsi, la troisième opération mentale intervenu e dans l'exemple, a suggéré une réïfication du modèle transformé .

E t cette réïfication est satisfaisante en t a n t que telle, si son existence est plausible;

cl) La quatrième opération est u n e vérification expérimentale. Elle fait connaître si la réïfication imaginée a, ou non, une existence réelle.

3 . E N R É S U M É

La résolution d ' u n problème relevant des sciences de la n a t u r e comprend :

a) La construction d'un modèle du comportement de l'être observé;

b) La transformation du modèle ;

c) L'imagination d ' u n e réïfication du modèle trans-formé;

d) La vérification expérimentale de l'existence de la réïfication du modèle.

On ne p e u t pas ne pas être f r a p p é de la part minime que j o u e n t les m a t h é m a t i q u e s dans cette suite d'opérations : c'est seulement dans la trans-f o r m a t i o n du modèle que sont utilisés le raisonne-ment m a t h é m a t i q u e et des théories mathématiques. Les autre s raisonnements : construction d'un modèle à p a r t i r des faits observés, d'une réïfication à p a r t i r du modèle transformé, raisonnements propres à la vérification expérimentale, sont d'autre espèce. Ce sont, généralement, des raisonnements analogiques, comme dans l'exemple.

I I . — B R È V E É T U D E D E S M O D È L E S Les m a t h é m a t i q u e s interviennent d'abord comme modèles du réel. Une analyse de la notion de modèle et de quelques notions connexes est donc justifiée.

4 . M O D È L E S . I M A G E S . F I N A L I T É Les modèles m a t h é m a t i q u e s qui apparaissent dans l'exemple cité sont u n e représentation men-tale d'êtres physiques.

On les distinguera des représentations mentales d'êtres physiques que donne l'usage des sens en réservant le nom de modèles a u x représentations construites pour entrer dans u n raisonnement. On appellera images les représentations qui ne satis-font pas à cette condition.

Un caractère essentiel d ' u n modèle est donc d'être lié à un processus de pensées finalistes. Cette finalité vise l'une ou l ' a u t r e de deux catégories de b u t s : la connaissance ou l'action. O11 distinguera donc d e u x catégories de modèles, d'après le but poursuivi dans les raisonnements où ils sont inclus. — Les modèles de recherche, construits pour servir à accroître le domaine des connaissances humaines, et, lorsqu'ils s'appliquent au milieu extérieur à la m e n t a l i t é de l'homme qui en use, à découvrir des lois naturelles;

— Les projets et programmes, qui servent à

organiser l'action de l ' h o m m e sur le milieu extérieur à sa mentalité, le terme de « projet » désignant le plus f r é q u e m m e n t un modèle du résultat de l'action, et le t e r m e de « p r o g r a m m e » u n modèle du dérou-lement de l'action.

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La notion de finalité ne saurait être dissociée de celle d'efficacité : une action a un b u t et elle est efficace si elle atteint le but.

Un modèle dont on use pour préparer ou pour guider une action est efficace s'il a permis d'atteindre le but de cette action.

Ainsi :

le critère de valeur primordial selon lequel on jugera un modèle est son efficacité.

Le premier problème que pose la notion de modèle, et le plus important, est donc la recherche des conditions d'efficacité d'un modèle. Avant de l'examiner, il sera utile de préciser encore quelques idées.

5 . F O N C T I O N E T S T R U C T U R E

Une action transforme le milieu sur lequel elle agit : cela est clair, s'il s'agit d'une action sur le monde matériel; s'il s'agit d'action psychologique exercée sur l'homme, la transformation porte sur sa mentalité, notamment sur sa mémoire; s'il s'agit de l'action d'un homme consistant dans l'acquisi-tion de connaissances, c'est sa propre mentalité qui se trouve transformée.

En outre, une action se déroule dans le temps. On désignera du terme de mécanisme, t o u t être ou ensemble d'êtres, matériels ou conceptuels, qui peut se transformer ou être transformé dans le temps. Cette définition, très générale, se justifie par l'usage courant du m ot mécanisme dans des locu-tions telles que : « le mécanisme d'une réaction chimique », « les mécanismes économiques », « le mécanisme d'une démonstration ».

Un mécanisme est dit finalisé, si on peut le consi-dérer comme conçu pour atteindre un b u t déter-miné, cette précaution de langage visant les méca-nismes biologiques auxquels il est d'usage de donner pour but ce que l'on observe qu'ils font.

Si le mécanisme finalisé est agent d'une action qu'il exerce sur son environnement, le but de son action est une modification de l'environnement. Si le mécanisme finalisé se transforme sans subir (l'action extérieure, le but de son action est sa propre transformation. E n général, même, lorsqu'il agit sur l'environnement, il se transforme, en même temps qu'il le transforme. De toute façon, on peut distinguer, la notion du temps intervenant :

— Un état initial et un état final du mécanisme; — Les données et le résultat de l'action accomplie ; — Le but a atteindre, qui est un état final Msiré, dont le résultat diffère souvent;

— La fonction du mécanisme qui est la relation entre les données et les résultats ;

— Le fonctionnement du mécanisme, qui est la

suite d'états par lesquels passe le mécanisme au

Murs de sa transformation.

A noter aussi que parfois les données se

confon-dent avec l'état initial, le résultat avec l'état final. A ces notions, s'ajoute la notion de la structure du mécanisme, indépendante du temps et étroite-ment liée aux précédentes. On peut la définir comme l'ensemble des éléments dont est constitué le mécanisme et de leurs relations mutuelles. Ces éléments sont les organes du mécanisme. Souvent la structure se conserve, au moins en partie, au cours d'une transformation du mécanisme.

Concernant la structure, on appellera :

— Mécanismes dicdectiques, les mécanismes dont les organes sont des êtres conceptuels ;

— Mécanismes physiques, les mécanismes qui ne possèdent pas cette propriété.

Quelques exemples achèveront d'éclairer ces notions.

Un tour façonne une pièce métallique. Il consti-tue un mécanisme physique. Sa structure, assez complexe, comprend des organes appelés : poupées, pour tenir la pièce, outil, pour entailler la pièce, chariot, pour tenir l'outil, banc, pour guider le mouvement du chariot, moteur, pour mouvoir le chariot le long du banc et faire tourner une poupée, tête de cheval, pour approprier la vitesse du moteur aux conditions de travail optima de l'outil, bâti pour supporter tous les organes et les maintenii dans des relations géométriques déterminées. Sa fonction est d'imposer à la pièce brute une forme déterminée. Son fonctionnement consiste à faire tourner la pièce à une vitesse déterminée, et à mouvoir l'outil le long de la pièce selon une loi déterminée. Les données sont : la pièce brute, le tour, de l'énergie électrique pour mouvoir les organes de la machine, qui sont des données physiques, la vitesse de rotation, la loi des posi-tions de l'outil dans le temps, qui sont des infor-mations, données conceptuelles. Le résultat est la pièce usinée, c'est-à-dire transformée par l'action du tour. L'état initial trouve la pièce brute entre pointes et le chariot à un bout du banc, l'état final trouve la pièce achevée et le chariot à l'autre bout du banc.

Autre exemple : une certaine quantité de gaz enfermée dans un cylindre muni d'un piston sur lequel on appuie est un mécanisme physique. Sa structure est qu'il est un gaz, son fonctionnement de diminuer de volume sous l'action de la force exercée sur le piston, l'état initial, le volume occupé par le gaz dans le cylindre avant que l'on appuie sur le piston, l'état final, le volume occupé par le gaz dans le cylindre lorsque l'on cesse de faire varier ce volume en donnant à la force exercée sur le piston une valeur appropriée. Mais la température du gaz varie aussi au cours de la trans-formation, et le but de l'action exercée sur le piston peut être de porter le gaz à une température

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déter-minée, et tel est le cas dans un cylindre de moteur Diesel au temps de la compression; le but ainsi précisé, les données sont le volume, la pression et la température initiales, ainsi que la température finale, les résultats le volume et la pression finale.

Dernier exemple : Grey Walter a défini des fonc-tions de perception, mémorisation, imagination, dé-cision — décomposables en d'autres fonctions — qui font correspondre soit des excitations extérieures à des informations, soit divers états ou combinai-sons d'informations les uns aux autres, et dont l'ensemble constitue la fonction de mentalité. Des mécanismes correspondant à cette fonction peuvent être décrits en leur fonctionnement ; notammen t les langages ou les mécanismes pavloviens ; mais 011 ne peut dire, dans l'état actuel des connaissances, quelle est la structure, quels sont les organes de ces mécanismes. Ils constituent des réïfications de la fonction de mentalité, des structures plausibles pour lesquelles les vérifications expérimentales ne sont encore que partielles et n ' o n t pas acquis Yuniversalis consursus qui en ferait des lois de la nature.

Le mécanisme de la mentalité correspond, poul-ie traitement de l'information, au mécanisme de l'assimilation, qui traite de la matière inerte, et dont les fonctions sont la digestion, la respiration, la glycogénie, etc.

E t cet exemple est aussi celui d'une analogie qui paraîtra peut-être audacieuse et nous conduit à quelques précisions sur l'analogie et le raisonnement analogique.

6 . A N A L O G I E . R A I S O N N E M E N T A N A L O G I Q U E L'exemple du paragraphe 1 conduit immmé-diatement à une définition de l'analogie.

Deux mécanismes sont analogues lorsque certains de leurs organes se correspondent deux à deux par la condition de remplir des fonctions identiques.

L'analogie peut porter sur la structure des deux mécanismes, c'est-à-dire sur les organes, ou sur les fonctions.

Le raisonnement analogique consiste, constatant que deux mécanismes présentent des analogies, à présumer que des fonctions que l'on peut observer dans l'un appartiennent aussi à l'autre.

La suggestion que comporte un raisonnement analogique est une opération mentale particulière qui se rattache à la fonction d'imagination. Elle peut sans doute être « expliquée » de diverses façons dans le cadre de théories admises. Mais le point à retenir pour le moment est qu'elle ne saurait en aucune façon être une forme de raisonnement déductif.

E t nous voici en mesure de préciser la notion de

modèle et d'en donner une définition qui nous conduira directement à ses conditions d'efficacité

Un modèle est un mécanisme finalisé artificiel (c'est-à-dire construit par l'homme) comportant certaines analogies avec un mécanisme donné en vue de faire paraître d'autres analogies.

De même que l'on distingue mécanismes phy-siques et mécanismes dialectiques, on distinguera modèles physiques et modèles dialectiques : le méca-nisme d'un échappement de montre de dame agrandi dans le rapport 50 /I pour mieux l'étudier, est un modèle physique; les dessins à grande échelle par lesquels 011 peut représenter ce méca-nisme en vue d'en étudier des modifications ou bien les formules de mécanique que l'on peut utiliser dans le même but, sont des modèles dia-lectiques.

7 . C O N D I T I O N S D ' E F F I C A C I T É D ' U N MODÈLE L'analyse de raisonnements analogiques fait appa-raître des conditions nécessaires d'efficacité d'un modèle.

a) Un modèle doit être fidèle. O11 veut entendre par là qu'il doit y avoir entre le modèle et l'origi-nal des al'origi-nalogies assez nombreuses pour que les suggestions faites par le fonctionnement du mo-dèle soient valables pour l'original.

Un exemple typique de modèle insuffisamment fidèle est fourni par le « canard » de Vaucanson. Cet animal artificiel bien connu n ' a pas été conçu, comme on le dit communément, comme un jouet de la lignée des automates de l'époque, mais bien, à la demande de médecins, comme un modèle pour servir à l'étude de la digestion. L'animal artificiel picore, broie des grains et les expulse, donnant une image des phénomènes mécaniques de la digestion. Mais la digestion est essentiellement faite de phénomènes chimiques, dont le « canard » ne donne aucune image. Modèle peu fidèle, il n'a rien suggéré.

Autre exemple : à l'époque où les machines élec-triques atteignirent des vitesses élevées, vers 1870, le problème des vibrations des arbres et de la résis-tance des paliers se posa avec une acuité croissante. On l'étudia à cette époque au moyen d'un modèle constitué par une tige élastique de masse et de dia-mètre négligeables, modèle de l'arbre et par une masse ponctuelle égale à celle du rotor et concen-trée au centre de gravité. L'étude fit apparaître une vitesse, la vitesse critique, où le centre de gravité s'éloignait jusqu'à l'infini. Or, on pouvait passer la vitesse critique sans que l'arbre casse. Les méca-niciens et les physiciens cherchèrent une expli-cation physique à ce phénomène, sans en trouver aucune de valable. La question f u t éclaircie vingt-cinq ans plus tard par Lecornu qui montra que le modèle n'était pas assez fidèle : en utilisant le

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mo-dèle constitué par l'ellipsoïde d'inertie du rotor, i] établit des conditions matériellement réalisables pour supprimer les vibrations. Mais, vers 1927, les rotors de turbines marines à vapeur de type Bré-guet brisèrent leurs ailettes mobiles contre les ai-lettes fixes du stator, bien qu'ils fussent équilibrés avec soin. Après deux réparations consécutives, on s'aperçut que le modèle constitué par l'ellipsoïde d'inertie, qui suppose le rotor indéformable, ne pouvait tenir compte de l'action des forces dites «de Coriolis» dues à un virage rapide du bateau ; on dut à nouveau changer de modèle.

Cet exemple, qui pourrait être multiplié, attire l'attention sur le point qu'un modèle fidèle se cons-truit à partir du problème concret posé.

b) Les analogies mises en jeu doivent être de pré-férence fonctionnelles.

L'exemple suivant paraît typique.

Norbert Wiener a appelé l'attention en 1951, au Congrès de Paris sur « les machines à calculer et la pensée humaine », sur l'analogie que présentent les circuits nerveux fermés et les circuits électroniques fermés des machines à calculer dans lesquels des impulsions tournent aussi longtemps qu'il est utile, et sont ainsi mises en mémoire; cette analogie sug-gérait que les circuits nerveux fermés étaient dans le cerveau le siège de la mémoire. Or, au même Congrès, Lorente de No a montré qu'il n'en était rien. L'analogie de N. Wiener portait sur les struc-tures des deux circuits.

Voici, par contre, une analogie fonctionnelle entre circuits nerveux et circuits électroniques qui s'est, montrée féconde : La courbe de réponse d'un nerf à une excitation (intensité en fonction du temps) et la courbe de réponse d'un filtre électrique ont la même forme générale ; le fonctionnement d'un nerf et le fonctionnement d'un filtre, sous une impulsion

sont donc analogues. L'analogie se conserve si l'on

remarque que les impulsions transmises dans un circuit nerveux ou clans un circuit électronique sont presque toujours porteuses d'informations. Dès lors le mécanisme formé par un ensemble d'émetteurs et de récepteurs où l'information est transmise à travers un milieu isolant, et le mécanisme formé par une population d'êtres humains où l'informa-tion est transmise par des moyens divers d'un indi-vidu à un autre, sont analogues au regard de la fonction de transmission de l'information; on peut présumer qu'ils ont la même courbe de réponse à une excitation. La vérification expérimentale a été laite sur la population constituée par la clientèle d'un grand magasin soumise à l'excitation men-tale d'une campagne publicitaire. Les courbes de réponses obtenues, débarrassées de l'influence des phénomènes contingents : périodicité de la semaine, nature de l'objet vendu,, prix, durée de la

vente-réclame, etc., sont superposables à quelques unitéî pour cent près.

Mais, on sait que la courbe de Lapicque ne donne qu'une image globale de la transmission de l'influx nerveux, et que la réponse d'un nerf à une exci-tation physique, même continue, est une volée d'impulsions électriques. L'observation montre que ces impulsions sont sensiblement de même ampli-tude et que l'intensité de la perception est liée à la fréquence de ces impulsions. L'information s'in-troduit par la voie de la perception. Le trend de pensée de l'exemple précédent suggère que les ré-pétitions nécessaires pour l'« accrochage» d'une ex-citation publicitaire, pour la mise en place d'un réflexe conditionné ou pour la fixation dans la mé-moire d'un concept abstrait doivent être liées en nombre et en fréquence aux caractères analogues des éléments du système nerveux de chaque indi-vidu. Ceci n'est qu'une suggestion, non encore sou-mise à l'expérience. Elle est rapportée pour contri-buer à l'analyse du raisonnement analogique et à éclairer la notion d'analogies fonctionnelles.

c) Pour être efficace un modèle doit être simple. On peut donner comme exemple les modèles phy-siques constitués par les machines à calculer ana-logiques, qui ont les mêmes fonctions que des modèles mathématiques dont le fonctionnement par des moyens dialectiques est hors de portée de l'homme : ainsi une équation de Laplace est rem-placée par une cuve rhéostatique qui tracera auto-matiquement les équipotentielles.

Cette notion de simplicité est souvent prise dans un sens relatif, étant entendu que de deux modèles fonctionnels comportant les mêmes analogies avec un original, il faut préférer le plus simple.

III. -— R E T O U R SUR LES MODÈLES MATHÉMATIQUES.

Les modèles mathématiques sont des modèles dialectiques : ils se présentent donc sous la forme d'un langage, qui est même, par comparaison avec la langue courante, un langage très particulier.

Le langage mathématique présente l'avantage précieux de permettre des transformations du mo-dèle au cours desquelles se conserve la vérité logique du modèle. La transformation d'un modèle mathé-matique se fait par un raisonnement déduclif.

On a vu, sur l'exemple du paragraphe 1, que le raisonnement déductif se situe dans l'étude d'un problème relatif à la connaissance de la nature, entre deux phases de raisonnement analogique, l'un pour construire le modèle mathématique, l'autre pour réïfier le modèle transformé.

(6)

On se propose, dans celte section, d'étudier briè vement le choix de modèles mathématiques au regard de leur efficacité, et corrélativement la na-ture du raisonnement déductif.

8 . F I D É L I T É

a) Condition pour qu'un modèle mathématique

soit fidèle.

Les êtres naturels, individus et ensembles, entrent dans la mentalité par des images, ensembles d'at-tributs résultant de perceptions, et de relations entre ces attributs : les phénomènes observés sont décrits par des attributs.

Pour les êtres mathématiques, attributs et re-lations prennent le nom de propriétés, et les êtres mathématiques sont des produits de l'imagination :

les phénomènes imaginés sont décrits par des

propriétés.

Un modèle mathématique d'un être naturel, pour être fidèle, doit avoir des propriétés analogues aux attributs de l'original.

Par exemple :

—• Pour évaluer le volume du tronc d'un arbre sur pied, on mesure la circonférence du tronc à 50 cm du sol, la circonférence à hauteur de bras, c'est-à-dire environ 2 m plus haut, et l'on applique une formule qui revient à celle qui exprime le vo-lume d'un tronc de cône : on a donc pris un tronc de cône comme modèle de la forme du tronc d'arbre — et l'étymologie le dit assez. — Ce modèle est fi-dèle pour les problèmes de commerce des bois en grumes à propos desquels on a besoin de calculer le volume d'un arbre sur pied ;

— Le modèle usuel d'une force est un vecteur. Un vecteur a des propriétés analogues aux attri-buts de définition d'une force, savoir : une origine analogue du point d'application, une direction et un sens analogues de la direction et du sens de la force, une longueur analogue de l'intensité de la force. E t les opérations élémentaires sur des vec-teurs sont des modèles des lois physiques d'action des forces. Ce modèle est très fidèle : la plupart des problèmes de dynamique peuvent être remplacés par un modèle vectoriel avec une forte présomption que les réïfications des solutions seront vérifiées par l'expérience. Toutefois Painlevé et Delassus ont donné des exemples de systèmes réels qui ne véri-fient pas le fonctionnement prévu par l'application des lois de la dynamique à un modèle vectoriel ;

— Le second exemple donné au paragraphe 7 a, p. 4, montre comment des attributs nouvel-lement découverts d'un phénomène concret condui-sent à changer de modèle pour en faire l'étude.

b) Classifications.

Les attributs des êtres, observés ou imaginés, sont groupés en ensembles qui sont les modèles

d'en-sembles d'être concrets correspondant. Ces ensem-bles d'êtres sont appelés des classes, les ensemensem-bles d'attributs qui permettent de distinguer des classes l'une de l'autre en constituent les définitions l'opération de grouper des êtres en classes est ap-pelée classification, ainsi que le résultat de cette opération. Enfin, les attributs de définition d'une classe, ou des catégories d'attributs auxquelles ils appartiennent constituent des critères de classi-fication, ou de définition, de cette classe.

Par exemple : les critères de classification des plantes sont la présence ou l'absence de fleurs, et pour la classe des phanérogames, la morphologie des organes de reproduction, étamines et pistils, la dé-coration des organes qui les entourent, la morpho-logie des ensembles de fleurs.

Ces points de terminologie rappelés, il faut noter que :

Une classification est appropriée au but d'une action déterminée.

La zoologie, en vue d'une connaissance attribu-tive, classe les poissons en familles, classes, espèces, variétés, etc., selon des critères structuraux. L'art culinaire distingue d'abord deux classes : les pois-sons comestibles et les autres, puis, dans la classe des poissons comestibles, les poissons maigres, les poissons gras et les poissons demi-gras.

c) Théories.

Dans chaque domaine de connaissances, on s'efforce, le plus possible, de structurer les clas-sifications en théories.

Un ensemble d'êtres conceptuels forme une théorie, si certains d'entre eux sont conséquences des autres. Cet état de subordination rationnelle peut-être dû à des lois naturelles ou à un raisonnement déductif.

Par exemple, les lois naturelles d'interaction des forces ont conduit à définir des concepts attachés à des combinaisons particulières des vecteurs qui les représentent : produit scalaire, produit vectos toriel, etc. qui constituent une première théorie de-vecteurs. D'autres combinaisons de vecteurs ont par la suite enrichi cette théorie : dérivée d'un vec-teur, champs de vecteurs, etc. qui ont été sug-gérées soit par des lois naturelles entre êtres autres que des forces auxquels l'on a choisi de donner des vecteurs pour modèles, soit par des opérations lo-giques valables.

Le mode d'élaboration d'une théorie à partir des phénomènes naturels évoqué dans cet exemple est général. Il conduit, pour l'utilisation des théories, à plusieurs remarques importantes rappelées briè-vement ci-après.

d) Technologie.

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Le phénomène concret représenté par ces modèles possède donc des a t t r i b u t s que ne possède pas le m o d è l e ; on dit que le modèle est abstrait de l'origi-nal, qu'une théorie est abstraite par r a p p o r t au réel.

Les attributs dont il f a u t compléter le modèle pour reconstituer l'original constituent la techno-logie de l'original p o u r le modèle considéré.

Pour l'action, et n o t a m m e n t pour une action effi-cace concernant l'original, on ne peut pas négliger la technologie.

C'est ainsi q u ' u n treuil de mine, correctement calculé, a cassé après quelques années d'usage parce que l'on avait oublié de remplacer les angles aigus rentrants par des arrondis. Cet accident a fait onze morts. L'ingénieur qui a dessiné le treuil connaissait certes, et, on p e u t le présumer, aussi bien que qui-conque, les théories de la mécanique, de l'élasticité et de la résistance des m a t é r i a u x , mais il ignorait ce point de technologie : q u ' u n angle r e n t r a n t dans une pièce soumise à des efforts est une amorce de rupture.

Ou encore, les chimistes n ' a y a n t pu faire appa-raître le mécanisme de la vulcanisation du latex par le soufre comme conséquence des théories chimiques convenues, l'industrie du caoutchouc s'est fondée et s'est développée sur des connaissances presque uniquement technologiques.

e) Domaine d'efficacité d'un modèle ou d'une théorie.

A un modèle ou une théorie s'associe donc un domaine d'efficacité, formé de l'ensemble des êtres auxquels le modèle ou la théorie s'applique effi-cacement.

Pour l'utilisation d ' u n e théorie, c'est-à-dire de modèles de types déterminés, il f a u t donc s'assurer que l'original a p p a r t i e n t au domaine d'efficacité de la théorie ; c'est une a u t r e façon de dire que la fidé-lité du modèle est suffisante.

Or, en général, les théories s'emboîtent les unes dans les autres, les concepts qu'elles relient deve-nant des originaux par r a p p o r t au x concepts qui en sont les modèles dans les théories nouvelles ; ces modèles sont abstraits par r a p p o r t à ceux des théories précédentes, et p a r suite moins fidèles par rapport aux originaux. On p e u t donc avancer que : Une théorie est d'autant moins efficace qu'elle est plus abstraite.

« De combien la théorie cinétique des gaz a-t-elle accru le r e n d e m e n t des machines thermiques ?, (lisions-nous, en 1956, à N a m u r . Quels progrès la théorie m a t h é m a t i q u e de l'élasticité a-t-elle fait faire à la résistance des m a t é r i a u x ? E t quelle sim-plification dans les calculs résulte-t-il de repré-senter par un tenseur l'éta t de contraint e d ' u n solide déformable en u n point ? »

Le docteur Pollack (U.S.A.) donnait de n o u v e a u x

exemples au congrès de l'O.E.C.E. de 1961, entre autres : « Un cours de variables complexes enseigné par des mathématicien s est t o u t à fait impropre à donner à l ' é t u d i a n t en physique ou dans l'ar t de l'ingénieur tous les moyens techniques dont il a besoin.»

Le docteur Meyer (Pays-Bas) a j o u t a i t : « Un physicien éprouve très rarement, s'il l'éprouve ja-mais, la nécessité de prouver l'existence de la solu-tion d ' u n e équasolu-tion différentielle car son intuisolu-tion physique ainsi que le résultat de certaines expé-riences font qu'il considère comme évident — par des méthodes qui sont complètement en dehors du domaine des m a t h é m a t i q u e s — q u ' u n e telle solu-tion existe. »

E t le professeur H.-A. K r a m e r s (Allemagne), dans la préface de son livre Les fondements de la mécanique quantique :

« Le m a n q u e évident de sens m a t h é m a t i q u e dont ce t e x t e témoigne en plusieurs occasions n'est pas seulement dû à l'incapacité des auteurs. Le sens phy-sique, même, ou spécialement, dans sa forme la plus pure, c'est-à-dire en dehors de t o u t e intention pédagogique, ne fait pas très bonne route avec le sens m a t h é m a t i q u e dans l'espace limité de l'es-prit h u m a i n . »

On rappellera encore pour terminer cette liste, non exhaustive, d'opinions concordantes de s a v a n t s et d'ingénieurs, l'article de E. Labien intitulé : «Nécessité d ' u n e m a t h é m a t i q u e imprécise.»

f) Domaine d'application d'un modèle ou d'une théorie.

Un modèle gagne presque t o u j o u r s en « généra-lité» à mesure qu'il gagne en abstraction, son exten-sion variant en sens contraire de sa compréhenexten-sion.

Cette observation conduit à distinguer domaine d'application et domaine d'efficacité d'un modèle ou d'un e théorie.

Le domaine d'application d'un modèle ou d'une théorie est constitué par l'ensemble des êtres dont il p e u t être le modèle. Il se confond avec l'exten-sion de ce modèle.

Le domaine d'efficacité d ' u n modèle ou d'une théorie a-t-on dit d'autre s façons paragraph e 8, cl, page 6 . est constitué par l'ensemble des êtres qu'il représente assez fidèlement pour que son fonc-tionnement soit suggestif.

Dans le second exemple donné au paragraphe 7, a, page 4 , les forces de profondeur appliquées à la pièce t o u r n a n t e sont représentées par des vecteurs glissants dans le cas où la pièce est réduite à l ' a r b r e et à une masse hors d e l ' a x e de rotation et dans le cas où la pièce est réduite à son ellipsoïde d'inertie; elles sont représentées par des vecteurs liés clans le der-nier cas. Un vecteur lié est un cas particulier de vecteur glissant : le modèle du vecteur glissant

(8)

peut donc s'appliquer dans le troisième cas, mais l'opération qu'il suggère qui est l'équilibrage dyna-mique, ne suffît pas à éviter les vibrations. Un rotor de turbine marine pendant un virage du bateau appartient au domaine d'application du modèle des forces de profondeur qui lui sont appliquées, constitué par un système de vecteurs glissants, mais non à son domaine d'efficacité.

C'est à cette notion également, qu'il faut rap-porter la question, de prime abord surprenante, que posait un jour Haeviside : « Comment se fait-il qu'un être physique représenté par u n vecteur n'ait pas toutes les propriétés des vecteurs ? »

On rejoint ainsi la notion de la réïfication d'un symbole ou d'une théorie. La réïfication d'un mo-dèle transformé d'un autre momo-dèle, même fimo-dèle, donne des êtres physiques appartenant au domaine d'application du modèle initial, mais non néces-sairement à son domaine d'efficacité.

En cela la science-fiction avoisine la physique ou la biologie théoriques.

E t c'est pour cela, encore, que les ingénieurs n'ayant reçu qu'une formation de théoriciens doivent être flanqués, pour ne point faire de sottises, d'ingé-nieurs ou de techniciens connaissant la technologie.

9 . L A D É D U C T I O N .

La transformation d'un modèle m a t h é m a t i q u e se fait par application de règles de la logique déduc-tive. L'analyse des moyens par lesquels on peut effectuer cette application est nécessaire, de nos jours, parce que des t r a v a u x récents montrent que l'homme peut y être suppléé par des machines, et que ce résultat, riche de conséquences en lui-même, influe fortement sur l'idée que l'on peut se faire de la simplicité d'un modèle mathématique.

a) Progression des modèles bio-psychologiques vers la mécanisation. Les étapes de l'explication des phénomènes biologiques par des phénomènes ne faisant pas intervenir d'à priori psychologique sont marquées par l'invention de modèles physiques à fonctionnement automatique. Au terme de cette progression se situe, pour le moment, la mécanisation des mathématiques;

— Marey a montré, vers 1880, q u ' un tube de caoutchouc se comportait comme une artère dans la transformation d'une suite de jets puisés en un courant continu : les physiologistes ont dès lors expliqué par des propriétés mécaniques le phéno-mène de régularisation du llux sanguin par les artères sans faire intervenir de commande spéciale du phénomène par le système nerveux;

— Lillie a montré, vers 1925, qu'un fil de fer pur plongé dans l'acide nitrique concentré, puis immergé dans un bain d'acide nitrique très dilué, se

compor-tait comme un filet nerveux, dans lequel naît une impulsion électrique qui se transmet de bout en bout lorsqu'on applique à une extrémité une excitation électrique, ou chimique, ou mécanique : les neuro-logues ont dès lors expliqué la transmission d'une excitation le long d ' u n nerf par des phénomènes électriques, sans faire intervenir un « influx nerveux» spécifique de l'être v i v a n t ;

— Grey Walter a montré, vers 1945, que l'on pouvait construire un mécanisme formé d'organes mécaniques et d'organes électriques qui se comporte comme un animal vivant placé dans les conditions de réalisation d'un réflexe conditionné : la psycho-biologie a dès lors cherché l'explication des phéno-mènes de réponse à des stimuli dans une combi-natoire des éléments du système nerveux, sans faire intervenir de phénomènes psychobiologiques; — Boole, vers 1840, a imaginé un modèle dialec-tique des opérations du raisonnement déductif qui a conduit à divers projets de réalisations méca-niques au moyen d'organes électroméca-niques; Louis Couffignal a montré, vers 1938, que l'on pouvait représenter les éléments et les opérations du rai-sonnement déductif par des modèles dialectiques dont les machines constituant les éléments d'un équipement à cartes perforées sont des modèles physiques, ce qui permet de résoudre au moyen de machines existantes les trois problèmes du raison-nement déductif, savoir, le problème de la déduc-tion, c'est-à-dire un système d'hypothèses étant donné en construire toutes les conséquences, le problème de la démonstration, c'est-à-dire un sys-tème d'hypothèses étant, donné, chercher si une proposition en est une conséquence, le problème de l'axiomatique, c'est-à-dire une proposition étant donnée chercher de quelles propositions, prises clans un ensemble de référence, elle est la consé-quence : les psychologues, comme les biologistes, doivent dès lors expliquer le raisonnement déductif par le fonctionnement d'un mécanisme mental, sans faire intervenir de «faculté de l'esprit» du genre de l'intelligence, à laquelle on rapporte de coutume l'aptitude aux mathématiques.

En d'autres termes :

Le fonctionnement des modèles mathématiques est une opération mécanique, qu'elle soit réalisée par des organes de machines ou par l'« esprit humain». La pathologie donne de ce résultat une confir-mation d'autre sorte. On sait en effet que, dans la paranoïa, le malade conserve la faculté d'utiliser correctement le raisonnement déductif et que son comportement est cependant tellement aberrant qu'on doit le considérer comme un aliéné et le traiter comme tel.

b) Le mécanisme du raisonnement mathématique. La partie proprement mathématique de la

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formation d'un modèle est donc une opération mécanique.

De nos jours, on la fait souvent traiter par des machines : intégration d'une équation différen-tielle, résolution d'un système d'équations linéaires^ analyse harmonique, en sont des exemples.

Souvent encore, la mécanisation de la trans-formation consiste à réduire les opérations de l ' e s p r i t à la mise en correspondance, par la lecture de la formule donnée et de la formule transformée. C'est ainsi que le calcul opérationnel consiste, pour l'utilisateur, à lire dans des tables de conversion les transformés de Laplace (ou de Fourier) des expressions écrites dans la notation de Fourier (ou de Laplace). On utilise de même des tables poul-ies fonctions de Bessel ou de la même famille, pour les fonctions elliptiques, pour l'algèbre de Boole où la table de conversion place au regard d'une expression booléenne compliquée une expres-sion booléenne plus simple.

Ce travail de lecture de tables, même effectué par l'esprit, reste un travail mécanique comme le montre l'existence de tables incluses dans la mé-moire des machines à calculer dont ces machines se servent automatiquement.

On peut encore placer des tables ou leur équi valent d'usage dans la mémoire humaine : tel est généralement le cas pour les tables de règles d'opé-rations algébriques, des tables de calcul de poly-nomes, de dérivées, de primitives, de transformations trigonométriques, et, selon la spécialisation de l'utilisateur, des tables de formules de trigonomé-trie sphérique pour les astronomes, géodésiens, navigateurs, de formules besseliennes pour les automaticiens, etc.

Et ces exemples, empruntés à l'algèbre, peuvent l'être aussi bien à la géométrie.

Dans tous les cas, le mécanisme du raisonnement déductif, et plus particulièrement mathématique , que ce raisonnement soit fait par l'esprit humain ou par une machine, consiste en ceci :

— Reconnaître que le modèle dont on dispose est d'une forme connue, et tirer des tables les formes transformées.

Par exemple :

— le modèle du phénomène observé étant une équation on reconnaît qu'il est de la forme du trinôme du second degré, dont on connaît de mé-moire les transformées :

b2 - 4 ac > 0 l - b + v/' b2 - 4'ac - b - y' ^ _ 4 ac ^ b2 - 4 ac ^ 0 { a (x - Xj) (x - x2) = 0 / b2 - 4 ac > 0 1I Xi Xo - - b / 1 2 a i I x x2 —

— ou encore, ayant cos o = 0,853 on lit sur une règle à calculs tp = 31°25 ; mais, si l'on a cos a — --on lit dans sa mémoire tp = 30°.

1 0 . L A S I M P L I C I T É .

L'utilisateur des mathématiques use donc de sa mentalité comme d'une machine. Dans l'état présent de la technique, il serait possible de faire établir par des machines la table complète des transformés de chaque modèle utilisé pour représenter la réalité et aussi des jeux de symboles que l'on peut imaginer sans souci qu'ils représentent quelque être réel. Les mathématiques se sont développées suivant cette voie au cours du temps : la suite des théorèmes établis peu à peu constitue une table de modèles, les hypothèses, accompagnées de leur transformés, les conclusions. E t cet édifice a été construit par l'effort persévérant de l'esprit humain.

Or, le développement de la plupart des théories s'arrête lorsque les modèles deviennent si compliqués que l'esprit ne peut plus les saisir. Par exemple, la

théorie des courbes algébriques, extrêmement

développée pour le deuxième degré, a tout au plus donné une classification des formes pour le troisième degré, et n'a porté que sur des cas particuliers pour les degrés supérieurs.

Il existe donc un niveau de complication que l'esprit humain ne peut dépasser. La machine peut le dépasser, certes, elle pourrait construire, en son langage, des théories mathématiques que les hommes ne pourraient pas comprendre. Mais, pour l'utilisateur, la possibilité d'une réïflcation du mo-dèle transformé est une condition d'efficacité de la transformation. Il ne paraît pas possible, pour le moment, qu'un homme puisse donner une inter-prétation physique d'un ensemble de symboles qu'il ne comprend pas. Le niveau de complication que l'esprit d'un homme déterminé ne peut pas dépasser, conditionne donc les mathématiques qu'il peut utiliser.

E t , ce niveau étant variable selon les individus : Une théorie est d'autant plus efficace qu'elle est plus simple.

Cet énoncé utilise le mot efficace dans un sens qui peut paraître spécial, et qu'il convient sans

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doute de préciser : il faut entendre que, l'utilisateur d'une théorie, ensemble de concepts abstraits, ne pouvant se faire que par l'intermédiaire d'un être humain qui en imagine une interprétation concrète, le domaine d'efficacité d'une théorie est d ' a u t a n t plus grand que plus d'êtres humains sont capables de l'assimiler. La notion d'efficacité et de domaine d'efficacité est reportée du domaine des êtres phy-siques au domaine des êtres conceptuels, l'agent de l'utilisation étant l'esprit humain.

Peut-être aussi le mot simple demande-t-il

commentaire. La complication dont il est fait état à propos des développements des théories mathé-matiques dans le temps vise le nombre des éléments, êtres ou relations, qui interviennent dans un énoncé. Cette notion se superpose à celle du degré d'abstrac-tion des concepts. On considère donc que :

Un modèle est plus simple qu'un autre s'il contient moins d'éléments ou si ces éléments sont moins abstraits.

1 1 . L E S M A T H É M A T I Q U E S U T I L I S A B L E S La simplicité d'un modèle comme condition de son efficacité reste subordonnée cependant à la condition de fidélité. Un examen des théories mathé-matiques établies au cours du temps montre que les théories qui n'ont point trouvé application ont disparu de la mémoire des savants et des traités de mathématiques. Cela est particulièrement aisé à vérifier pour les deux cents dernières années où tout ce qui a été publié a été conservé.

C'est ainsi que :

— M. H a d a m a r d a retrouvé dans sa thèse une règle de convergence des séries qui figurait déjà dans les œuvres de Cauchy;

— Les coordonnées parallèles dont Maurice d'Ocagne a fait le fondement de la théorie des abaques à points alignés avaient été imaginées par Michel Chasles;

— Les tenseurs utilisés par Minkowski pour formaliser la théorie physique de la relativité d'Einstein portent le nom de Rieman et Christofel; — La théorie des variables complexes, qui représente très efficacement des phénomènes d'écou-lements des fluides et des phénomènes dus aux courants électriques est, d'un siècle, antérieur à ces applications ;

— Le calcul matriciel, récemment utilisé dans diverses théories mécaniques et physiques, notam-ment la théorie des mouvenotam-ments vibratoires, est dû à Cayley.

Toutes ces théories ont été tirées de l'oubli par des physiciens ou des ingénieurs au moment où ils ont eu à construire des modèles efficaces de nouveaux problèmes.

E t lorsqu'ils n'ont pas trouvé de modèle conve-nable dans la littérature mathématique, ils en ont imaginé de nouveaux, développement des théories mathématiques appropriées à leurs besoins. Newton a créé la théorie des flexions, Lord Kelvin la théorie du potentiel, et les noms de Képler, Laplace Ampère, Maxwell, et d'autres sont attachés à des équations représentant des phénomènes physiques. L'impossibilité d'application d'une théorie a donc suffi, dans certains cas, à en provoquer l'oubli. Si l'on regarde de plus près la naissance et l'évolu-tion des théories qui ont été non seulement appli-quées, mais encore appliquées avec efficacité à des phénomènes physiques, on retrouve l'observation bien connue qu'il n'y a de science que du mesurable, et l'on est conduit à caractériser, parmi les notions et théories mathématiques, celles qui sont propres à construire des modèles de phénomènes mesurables et à donner par transformation des modèles réïfiables sous la forme d ' u n ensemble de nombres interprétables comme les mesures de grandeurs physiques. Faisant apparaître dans la notion d'efficacité le temps nécessaire à la transformation, on définit les mathématiques utilisables, formées par les notions, théories et méthodes qui permettent de représenter fidèlement des phénomènes et des faits concrets par des nombres et de répondre numéri-quement, dans un délai raisonnable, à une question

numériquement posée.

I V . — L A Q U E S T I O N D U B O U R B A K I 1 2 . A S P E C T E X T É R I E U R

On propose de nos jours une façon de présenter les mathématiques, que l'on appelle «moderne», « ensembliste », « axiomatique », ou, du pseudonyme des auteurs qui, les premiers en France, ont pris à tâche de construire cet édifice, le « Bourbaki ».

Ces théories évolueront selon le schéma histo-rique que nous avons esquissé, c'est-à-dire qu'il s'en conservera ce qui est efficace pour le traitement des problèmes que pose l'étude des phénomènes naturels, le reste s'oubliant dans le vieillissement des livres.

Il n ' y aurait donc pas à leur accorder une atten-tion particulière si les mathématiciens qui les éla-borent laissaient, comme le firent leurs prédé-cesseurs de tous temps, les utilisateurs, physiciens et ingénieurs, en faire usage ou non, selon leurs besoins : le phénomène social de la naissance, la croissance et la mort des théories mathématiques ne serait pas troublé.

Mais une propagande intense veut en imposer l'enseignement à tous les niveaux. E t cette propa-gande se développe sous une forme, inaccoutumée

(11)

dans le monde des hommes de science, qui s'appa-rente au lancement d'une plage à la mode, d'un parti politique ou d'un produit détersif. L'un, de hauts titres universitaires, clame dans un congrès inter-national : «A bas E u c l i d e ! » Un autre, enréponseà plusieurs témoignages que les étudiants ne parvien-nent pas à se servir correctement du symbolisme Bourbaki, écrit : «Vive les quantificateurs! » Euler, Gauss, Henri Poincaré faisaient des mathématiques «naïves». Et, pour paraître dessalés, nombre de professeurs proclament qu'il faut être « moderne » et acceptent qu'on leur dise, même en termes insolents, qu'ils sont vieillots et démodés.

Le physicien et l'ingénieur, utilisateurs des mathématiques, ont un jugement à porter sur ces mathématiques nouvelles, et leur valeur d'usage.

L'analyse de l'utilisation des mathématiques qui vient d'être faite, permet de porter un juge-ment de raison. Dans la terminologie proposée dans la présente étude, ce jugement s'exprime simplement :

— L'efficacité du Bourbaki est nulle :

— Parce que les critères de classification des êtres mathématiques que retient le Bourbcdd sont les opé-rations que l'on peut imaginer à propos de ces êtres, et non des analogues des attributs que l'on observe sur des êtres naturels ;

— Parce que le langage Bourbaki est d'une

complication extrême, inutile pour l'expression des propriétés des êtres réels.

1 3 . M O D E R N I S M E E T B O U R B A K I

Il faut d'abord ne pas se laisser surprendre par la confusion qui porte sur le ternie de « mathéma-tiques modernes » où l'on inclut des théories : matrices, fonctions de variables complexes, calcul opérationnel, algèbre de Boole, etc., qui ne sont «modernes» que parce qu'elles ont trouvé application dans les arts ce dernier demi-siècle seulement, alors qu'elles ont toutes été imaginées près de cent ans plus tôt.

C'est le mode de présentation des mathéma-tiques comme une sorte d'herbier des opérations que l'on peut imaginer à propos des éléments d'un ensemble qui est en cause et qui est caractéristique du Bourbaki.

1 4 . L E B O U R B A K I E S T I N E F F I C A C E P A R C E Q U E P E U F I D È L E

Ce mode de présentation des mathématiques est inefficace parce qu'il donne des modèles peu fidèles, les modèles des êtres réels étant des ensembles d'attributs. Les opérations que l'on peut faire sur ces attributs au cours d'une transformation du

modèle sous la condition d'efficacité que le trans-formé soit suggestif d'une réïfication vérifiable expé-rimentalement, sont définies par la nature physique de ces attributs. Des opérations définies par l'ima-gination du mathématicien et une classification de ces opérations, sans considération des attribut physiques des éléments auxquels on les applique ne peuvent être un analogue fidèle de ces éléments, parce qu'elles ne sont un modèle que des opérations et non des attributs eux-mêmes.

A cette justification de l'ordre du raisonnement nous ajouterons celle d'un exemple précis, vécu. A la réunion du Comité international des marées de décembre 1961, l'un des membres montra que les transformations de Labrouste pour la recherche des périodes d'une vibration avaient une structure d'an-neau. Nous avons posé la question si la propriété d'être une structure d'anneau avait influé sur le choix des combinaisons de transformations de Labrouste que l'auteur proposait pour l'étude d'un cas particulier : il reconnut immédiatement qu'il n'en était rien. Dans la même séance, un autre membre montra comment le choix de la transfor~ mation de Labrouste la plus efficace pouvait être fait à partir des caractères morphologiques de la courbe d'observation des marées, et non de la place dans la classification bourbakiste des opéra-tions mathématiques utilisées.

Sur la thèse générale, on ne saurait oublier cette opinion de M. Henri Cartan, l'un des rédacteurs du Bourbaki : « Le miracle de la science, c'est qu'on puisse édifier une mathématique abstraite, capable de s'appliquer ensuite avec efficacité aux lois de la nature. »

Analysons ce qui se passe dans le cas, le plus fréquent, où le « miracle » ne se produit pas.

1 5 . A N A L Y S E D ' U N E X E M P L E

Dans un ouvrage récemment paru pour la classe de seconde, la structure de groupe est introduite avec beaucoup de clarté, à propos de l'ensemble des nombres rationnels, par la définition :

« Soit E un ensemble et dans celui-ci une opération interne définie pour t o u t couple d'éléments de E. « On dit que l'opération confère à E une structure de groupe et que E est un groupe pour cette opé-ration, lorsque les hypothèses suivantes sont vé-rifiées :

1° L'opération est associative ; 2° Elle possède un élément neutre ;

3° A chaque élément de E on peut en associer un autre tel qu'en les composant on obtienne l'élément neutre.

« Lorsque l'opération est de plus commutative on dit que le groupe est commutatif.

(12)

« La notion du groupe étant acquise, on peut résumer en trois théorèmes les propriétés opératoires des nombres rationnels.

1. — L'ensemble des nombres rationnels (0 compris) est u n groupe commutatif pour l'ad-dition.

IL — L'ensemble des nombres rationnels

(0 exclu) est un groupe commutatif pour la multi-plication.

III. — La multiplication des nombres rationnels est distributive par rapport à leur addition. » Il a été précédemment établi, bien entendu, que l'addition et la multiplication, possèdent les pro-priétés qui constituent la définition de la structure du groupe.

Le caractère de la notion de « groupe » d'être une rubrique d'une classification des opérations que l'on peut imaginer pour les nombres rationnels est particulièrement marqu é dans cet exposé.

a) La structure de groupe est ensuite utilisée pour résoudre conjointement l'équation de la sous-traction, x + b = a, et l'équation de la division, x . b = a. La solution s'écrit x = a + opp. b pour la première, X = a x inv. b pour la seconde, opp. b désignant l'opposé de b, inv. b, l'inverse de b. Toutefois, si l'on cherche quelque autre utili-sation de la structure de groupe des nombres rationnels, on n'en trouve aucune. Les propriétés de l'addition ou de la multiplication sont souvent utilisées séparément ou autrement réunies, mais aucun autre problème ne nécessite l'emploi de toutes les propriétés qui figurent dans la définition de la structure de groupe.

En outre, ce sont ces propriétés elles-mêmes qui, successivement et dans un ordre déterminé, inter-viennent pour transformer la relation x + b = a en x = a + opp. b : la mémorisation du mot « groupe » et de sa définition ne dispense pas de mémo-riser aussi le mécanisme de la transformation.

En conséquence de quoi, pour construire la théorie des nombres rationnels, la notion de groupe est superflue, donc inefficace.

b) Mais, toujours pour la classe de seconde, on montre aussi que l'addition des monômes semblables confère à l'ensemble des monômes semblables à un monôme donné une structure de groupe, que l'addition des polynômes d'une variable confère à l'ensemble de ces polynômes une structure de groupe et l'on en déduit une solution de l'équation X + B = A, où A et B désignent des monômes semblables à un monôme donné ou des polynômes. On accroît ainsi l'extension de la catégorie «groupe» dans la classification des opérations sur les ensembles, et aussi celle du raisonnement standard de résolution d'une équation de la forme x + b = a.

A-t-on accru l'utilité de la notion de groupe ? Aucunement car le mouvement de pensée par lequel on a résolu les équations x + b = a x . b = a, X + B = A, est un simple raison-nement analogique. La liste des analogies consta-tées entre ces diverses équations constitue la défi-nition de la «structure de groupe», qui apparaît dès lors comme un modèle de l'addition et de la multiplication des nombres rationnels, ainsi que de l'addition des monômes semblables ou des polynômes.

Que le raisonnement analogique soit utilisé en mathématiques n'est pas une surprise : et le pro-fesseur Polya a montré qu'il a été l'instrument de découverte des mathématiciens pré-Cantoriens y compris les plus grands. La surprise est que les bourbakiens ne se soient pas aperçu qu'ils rai-sonnent comme les méprisables « naïfs » qui les ont précédés.

C'est le raisonnement analogique, codifié ou non par des notions telles que la notion de groupe, qui est efficace ; ce n'est pas la classification bour-bakiste de ces notions.

1 6 . I N C O N V É N I E N T S D E L ' U S A G E D E LA C L A S S I F I C A T I O N B O U B B A K I S T E Mais cette codification des modèles, qui consiste à leur donner un nom particulier, ne va pas sans inconvénients.

a) Confiance en l'abstraction. Le plus grave est une confiance excessive dans l'abstraction, qui fait négliger ou minimiser des conditions élémentaires de validité des analogies.

Dans l'énoncé II, la condition que b ne soit pas nul, qui est capitale et pour la validité du calcul et pour la pédagogie, se glisse dans une petite parenthèse, dans le souci évident de faire ressortir l'analogie de rédaction entre les énoncés I et II que permet le mot « groupe».

Un exemple plus f r a p p a n t est donné par l'impor-tance démesurée que Bourbaki accorde à la relation de réflexivité.

Une relation a 51 b est réflexive si elle est vraie quand on remplace b par a.

Un ouvrage, toujours pour la classe de seconde, donne une idée de l'extension d'une telle notion par l'exercice suivant : « Les relations définies par les mots « ami » et « ennemi » sont-elles réflexives ? »

II f a u t sans doute répondre affirmativement pour la première, et négativement pour la seconde : « Paul est ami de lui-même » étant vrai, « Paul est ennemi de lui-même» étant faux. Mais on a explique, clans un colloque tenu l'an dernier à Paris, que, au moyen d'un graphe reliant, dans une classe, les élèves qui étaient soeurs, Ernestine, cons-t a cons-t a n cons-t q'une flèche allaicons-t d'elle-même à sa sœur

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