MODELES DE LA LUMIERE : LES
CONCEPTIONS DES ETUDIANTS DE 1ERE
ANNEE UNIVERSITAIRE
Richard LEFEVRE André ESCAUT
Groupe d'Etudes et de Recherches Pédagogiques Université Paul Sabatier, Toulouse
["lots cles •'conceptlons, modèles, lum1t:re
Resume Au cours de l'enseignement secondaire, troIS mont:les ,Ji,-la lumière ont èté proposes aux eleves. les rayons lumIneux, le modele ondulatOIre et le modele corpusculaIre tJouS el<arnlnOns, } l'entrèe de l'UnIversIté, les conceptIOns des etudlants
VIS-a-I/l"-de ces modèles, la façon dont ils les utilIsent
Abstract: Ail along the french Secondary teacrHng level, H,re.,.
modelsof llght have been proposed to pupIls. llqt"lt ra,!3 model, waveiorm model and corpuscular model When enterlnt] Unl',erslT '::, '.Ne examIne ml5conceptIOnsof students about these nFJckls ar,'J how tI"',e,! won.: wlth
Dan~ le ç~dre d'une étude ~ur le~ tran~ition~ dan~ le ~y&teae
éducatif{~). nou& nou~ &OaRe& intére&~é& aux conception~ qu'ont le~ étudiant& &ur la Lumiere.
Plu~ieur& rai~on~ ont guidé ce choix :
1) C'e~t un doaaine peu étudié comparativement ~ d'autro8 (teapérature, chaleur, aécan1que, circuits électriques).
2) C'est un domaine où de~ difficultés ~érieu~es ont été relevées depuis plu8ieur~ ennées : ~i l'on évoque les interprétations données par le~ jeune~ élève~ pour de~ ~ituetion~ h.isant intervenir le courant électrique ou la chaleur. où il est que&tion de traD~fert
d'énergie, çeux-ci évoquent un médiateur entre une aource et un récepteur(2). Ce n'est pa~ le cas pour des situation8 mettant en jeu la Lumi~re. L'entité "Lumière" n'est pas reconnue pour elle-aêae elle n'e~~~te qu'en pré~enced'une source et/ou d'un récepteur
(l'oell){"')
1, LES IIIDg.ES DI L4. LImIJIlI
D1fférents .odèle~ explicatif~ ~ur la nature et le comportement de la Luaière ont été proposés aux élèves au cour~ de leur &colarité :
~) Le modele des "rUQn; lumineux"
En clas&e de Quatrième, bien qu'aucune étude de la notlon de rayon lumineux ne &oit fai te (on parle de tahceaux ...L ce modele e~t pré~ent dans le8 tigures relative& aux instruments d'Optique et dans les titres de certains paragraphes : "rayons" ultra-violets, "rayons" intre.-rouqes .... "rayons" solaires.
En classe de Première la
D&112n
de rayon lumineux e~t étudiée. Ce modèle e~t ut1li~é pour décr1re le. propagation rectiligne, pour exposer les lois de la réflexion et de la rétract10n.~) Le .0dOle ondulatoire
En classe de Pre.iere, ce .odèle per.et l'lnterprétation des phéno_ènes de diftraction et d'intertérence~par de~ fentes ou de~
ouvertures circulaire&. Il sert au~s1 ~ exposer la dispersion de la Lumière par un réseau.
~) Le modOle corDusculaire
ln classe de Terminale. c'est le mod~le utilisé pour exposer l'eftet photoélectrique, l'effet Co.pton et la résonance optique.
Le. question e~t de savoir s1, au ao.ent de leur entrée dans
l'Enseignement Supér1eur, le~ élèves ont ass1_11é l'un de ces aodèle~
et ~'il s'en ~ervent opérat10nelleaent ou bien s'ils passent de l'un l l'autre selon le3 circonstances, ou bien encore s'1l~ n'ont aucun .odèle de référence.
Z-IŒ'QI)DOLQGJI
Nous avons choisi de questionner les étudiants, par écrit, au courB des premiers jours de leur entr~e ~ l'Université. Un questionnaire a ainsi ét~ ~labor~, ~ partir de deux Béries d'entretienB :
a - une premi~re série d'entretienB (non directifs) de dix à quinze minutes chacun sur le th&me général de la Lumi~re : qu'eBt-ce que la
Luai~re ? Se propage-t-elle ? Comaent ? Qu'est-ce qui produit de la LumUu ?
b - une deuxi~ae série d'entretiens (seai-directifs) sur leB mod~les
de la Lumi~re, les sources, la viBion et la couleur deB objets. L'analyse de contenu de ces différents entretienB a servi de baBe à
l'élaboration d'un questionnaire testé dans le cadre du programae RAn!AU (Recherches sur l'Amélioration des Uéthodes d'Enseignement et d'Apprentissage à l'Université) regroupant leB UniversitéB
scientifiques de GR!NOBLl 1. LYON l, UONTPlLLIER II et TOULOUSE III. Ce questionnaire a été proposé ~ un échantillon de 176 ~tudiantB de Prem1&re Année de Prem1er Cycle Scientifique r~parti dans leB quatre universités.
Parmi leB 44 queBtionB, celles numérotées Q30 ~ Q36 portaient
particuli~rementsur les aod~les de la lumi&re. On trouvera ~ la page suivante leur libellé et leB réponses des étudiants
1) Cette sér1e de questions est caractérisée par un pourcentage élevé de non-r~ponse8 (de 16 ~ 36 ~ 1) révélateur des hésitations des 6tudiants.
2) Un pourcentage non négligeable. de l'ordre de 20 ~, répond
ayst6aatiqueaent "ondulatoire ~ corpusculaire", Ce sont ceux qu1 ont intégré la propriété de la Luai~re de manifester leB deux aspectB. 3) !n Q36 et Q37 et m6me en Q35. on voit augmenter le pourcentage de "ni ondulatoire, ni corpusculaire". Nous interpr~tons ce phénoa~ne
par l'intervention du mod~le des rayons lumineux, certainement mieux
adapt~ dans ces cas.
o
JOj 0 J8 OIJ deul! le comportel?7l3lJt de 13 IUfll/&ré' f?() COIJsld&r31J! SOIJ C3r3ct&rl3 OIJdul3!OIre ou corpuscuI31/'e 03IJS les5/!U3!IOIJS sulv.:m!es, r&jJoIJdez f?() U!/lJS3IJ! 1135 dlf(&rf?()!13s proposI!;(;ms .'
ondulatoire corpuscu- ondulatoire ni ondulatol non-seulement lalre seule et corpuscu re ni cor- reponses Les nombres e,pnment des'l ment lalre pusculaire
a.
1La lumière se propage48 Il 18 5 18
dans le vide Son 30 caractère est alors ..
a.
1La lumière transporte9 50 21 2 18
de l'énergie. Son 31 caractèr'e est alors
a.
La lumière est13 36 23 3 25
responsable de l'efiet 32 photo-électrique. Son
caractère est alon . La lumière change de
9 20 6 26
a.
vitesse de p,'opagation 39 33 Quand elle passe d'unmilieu transparentà un autre. Son caractère est alo"s '
a.
La lumlèr'e peut donnerlieu à des phénomènes 50 9 11 5 25 34 dïntel'férences Soncaractere est alors La lumiere Infra-rouge
17
a,
ou ultra-vIOlette est 39 9 Il 2435 InVISible pour l'œil humain Son caractère est alors
Q. Au Cinéma. on forme 14 15 20 17 34
36 sur l'hl'an l'Imaged'une scène Inscrrte sur un film. La lumlére utilisee a alors un caractère
a,
A laide de Jumelles, 16 7 21 18 3837 on peut observer l'Image d'un objet élOigne. La lumière a alors un carac tére
a.
La lumière 33 14 19 4 30monochromatique (une 38 seule couleur) a un
caractere
Parai le~ étudiant~ qui utili~ent ettectiveaent le~ aod6le~ de la Luai6re. on retrouve bien entendu le~ troi~ aod6les ettendu~ : le aod6le de~ rayon~ lu.ineux. le aod6le ondulatoire. et le aod6le
corpusculaire.
3. 1 le .oo61e dea IIlyooa luaiDeuz
Ce modèle est utilil)é prioritairement par certains étudiant3 quelle que soit la situation propos6e :
À propos d'une expérience où l'on crée une ombre I)ur un écran
"(. .. ). 1.4.. l4s raTons s'6ncastunt (sur l'écran) .: je pense qu'ils
s·'Jncastrent. Ils resttlnt contat l'écraD. (. .. ) .•
Si on les queationne I)ur lea modèles ondulatoire et corpusculaire. le modèle des rayons lumineux demeure prépondérant :
"En ,fait.. jtl S6lis pas si la LUllier4 4114 orxiu16 beaucoup lIoi.
j'illa"in6 plutot des rarons.. tous plus ou~oinsparal14lfls entre eux. /fBis J·4 ntl les Io"o.is pas 4n train d'oscillt1r 14s uns par rapport 8U.r autr4s.•
Et è propos des sources lumineuses :
L 'dn4r"~·tI c~'ndtiqutl d4s é14ctrons S4 trans,for~eer1 .taTons lUMiDeux"
En tait. dans l'Enseignement. ce modèle est constamment utilisé, même s'il n'est pas étudié en tant que tel: la léqende d'une tigure d'un livre de Quatrième laisse échapper :
"L4 So14~'1 dtant tres dlo~·"nd.. 14sHX~qui arrb'ent sur 1'6rr4 sont
.t pltU pres P8ralle16s. " 3.2 le .oo6le corpusculaire
Le modèle corpusculaire est tortement teinté d'un modèle mécaniste il est utilisé par des étudiants peu portés è l'abstraction; ce résultat a déjè été dgna16(4).
"(. .. ). LtI pbdno~en4corpuscu18ir4.. C'tlst pas llal .. C'tlst Moins 8bstrai t ( ... ). C'tlst plus pb.T,'siqult ( ... ). "
Le modèle corpusculaire. bien que connu des étudiants pose un problème quant è la nature de la particule porteuse : la particule élémentaire peut-être un photon. bien sûr. mais aussi un électron ou .Alle un proton 1
"Le ~ode14 corpuscu18~re.. une petite particu14 qui se dépl8c6 4 une certain4 ~'~·tItSStl.. ça ~4 tait p4ns4r of un canon .t d14ctrons (. .. )"
"La LUII.i4r6.. ... l'an dltrni4r.. on M'a dit qutl c'dtait d4s. . '.' ça .'8 étonné d'ail14urs.. dits particullts sans IlaSSIt .1 des pbotons. .. j'ai trouT·'t1 ~a bi.rarr4. . •o~· ça ~4 surpr4nd un truc COMMit ça. "
On reaarque aussi une tendance è considérer le modèle corpusculaire COaBe prépondérant dans les cas où il est question d'énergie
"si l'éDer"ilt Itst "randlt.. litpbdno~4nltcorpusculair4 tlst plus lIlportant qu4 si 4114 4st ,faiblit. M
"L'OMit.. C'4St qultlqu4 cbos6 d'i. .ttriÙ 4t le ,faU qu'on doU lui associflr unit CltrÙinlt tnu".1;. .. donc i l a fallu introduire le tait quit C'ltst corpusculairlt. "
3.3 le .0061. ODdulatolr.
Le aodèle ondulatoire est considéré cOmlle un aodèle abstrait.
L'onde lumineuse est vue cOllae une entité abstraite. se prêtant bien è des traitementa aatbéaatiquea. Elle eat décrite easentiellement par des tormules.
~<.'Iu'6st-c4qu4 C'ltst unit OMit? J4 pourrai tMoritlU6.4nt 18
caractlris4r.. lItJis .'ous dir4 C4 quit C'4St 1 JIt nit sais pas.. je ne sais J)4s. ..
La notion de longueur d'onde est très aal assiailée. À torce de lire ou d'entendre: " la longueur d'onde d'une radiation est de ... x nanomHres ... " sans précber : "dan; 10 yideM
donnent à À un ~tatut de con~tante phy~ique indépendante du milieu.
Ain~i, ce mod~le ondulatoire e~t peu opératoire pour expliquer de~ phéno.~ne~ tel~ que réfraction, di~per~ion, diffraction.
La propriété de aonochromaticité d'une onde reste a~sociéeau ~eul mod~le ondulatoire.
Ce .od~le e~t peu explicatif ; on lui préf~re le .od~le
corpusculaire, plu~ aécani~te.
Quelque~ étudiant~, conscient~ du double a~pect onde-corpuscule, prennent clairement position pour l'aspect corpusculaire
Nl" dwlitd j)llrticu18-ond8 8St 8n f""'8ur d6s jMrticu18.5N
Nle.5~ 1U11ineu.58s sont gO I«it d6s jMrticu18.5 de l/I4ti4r8 : 18.5
photonsIl
N14 lUlli4r8 est consti tU68 d8 ,U4Cticu18.f .5lQJports du Mqyv8M8nt
ondullltQi«N
OOJn.05IOII
Globalement, le~ étudiant~ de 1~re année univer~itaireraisonnent à
l'aide de .odèle~ de la Luaière. Le~ modèles ondulatoire et
corpusculaire ~ont souvent un ~ujet de doute et on préfère utiliaer le mod~le de~ rayon~ lumineux, plu~ familier.
On note une tendance pour le modèle ondulatoire à caractériser des
phénom~neaplutôt ab5trait~ du point de vue de l'étudiant:
propagation dana le T1.de. cbo.DlJeaent de rtteaae de propegation.
intert~rSDCea. Au contraire le .od~le corpusculaire caractérise des
phéno.~ne~plus concrets t~rt d·6Derv~e. effet photoélectrique,
Quoi qu'il en soit, les trois .od~le~ ~ont vus de mani~re très indépendante et on e~t loin d'un modèle unificateur intégrant lea troi, aspecta : ondulatoire, corpu~culaireet rayon luaineux.
Rét6rence, :
(1) ATP Recherche en Science de l'Education. "Les trQn;itiona dan,
~y'atOme édycotifM
. Miniat~re de l'Education Nationale,
Direction de, ln~eiqnement,Supérieurs, Pari" Juin 1983.
(2) E. GUESNE, A. TIBERGHIEN et G. DELACOTE Uéthodo~ et rO~ultet;
concernant l'anoly'~e de~ conce~tionsde; élbye, dan; différent; do;oine, de la Phy~ Revue Françai,e de Pédagogie n015, 1978
(3) E GUESNE. L4Ilère et Vi;ion de; ObJet;
un
exemp~ ~Rr6~eDtatloD~ de; rhÔno.bne, Phy~e; rréexi~tantèl'En~eig~ Physics Teachinq in school" GD!LECOTE Ed. 6ème ,éminaire du GIREP, Montpellier, sept.1976,
(1) R L!FEVRE, A ESCAUT Le~ conceRtion, des étudiant' à
l'entrée don; l'Un1yer;it6 à RL2p.o; de la LuaiOre feuillea d'Epi,témologie Appliquée et de Didactique de~ Science~, n07, A. GIORDAN, J, -L. nARTINAND Editeur~, 1986.