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Le médecin généraliste face à la santé de ses propres parents, père et mère : son positionnement, ses difficultés, son ressenti

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Academic year: 2021

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Texte intégral

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UNIVERSITE DE PICARDIE JULES VERNE

UFR DE MEDECINE D’AMIENS

Années 2016 - 2017 N° 2017 - 25

LE MEDECIN GENERALISTE FACE A LA SANTE DE SES PROPRES

PARENTS, PERE ET MERE: SON POSITIONNEMENT, SES DIFFICULTES,

SON RESSENTI.

THESE POUR LE DOCTORAT DE MEDECINE GENERALE (DIPLOME D’ETAT)

PRESENTEE ET SOUTENUE PUBLIQUEMENT Le 30 mars 2017

Par Anne-Charlotte LEFRANC née le 22/11/1989

Président du jury : Monsieur le Professeur Bernard BOUDAILLIEZ Juges : Monsieur le Professeur Henri SEVESTRE

Madame le Professeur Claire ANDREJAK Monsieur le Docteur Maxime GIGNON Monsieur le Docteur Charles SABBAGH Directeur de thèse : Monsieur le Docteur Patrice NOUGEIN

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A mon président de jury,

Monsieur le Professeur Bernard BOUDAILLIEZ,

Professeur des Universités-Praticien Hospitalier (Pédiatrie)

Pôle "Femme - Couple - Enfant"

Officier dans l'Ordre des Palmes Académiques

Vous me faites l’honneur de présider le jury de ma thèse, et vous avez manifesté un intérêt certain au sujet de cette thèse.

C’est pour moi et mes parents, qui vous estiment beaucoup, avec beaucoup de sincérité que je vous adresse mes remerciements et mon profond respect.

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A mon juge,

Monsieur le Professeur Henri SEVESTRE,

Professeur d’Anatomie et de Cytologie Pathologiques à l’UFR de Médecine d’Amiens Chef de Service d’Anatomie et Cytologie Pathologiques du CHU d’Amiens Picardie Adjoint au chef de l’Oncopôle,

Vous me faites l’honneur d’examiner ce travail, recevez à cette occasion mes sincères remerciements.

(5)

A mon juge,

Madame le Professeur Claire ANDREJAK,

Professeur des Universités – Praticien Hospitalier (Pneumologie)

J’ai eu l’occasion de vous connaitre en stage, en cours, et aussi lors des consultations où j’accompagnais ma mère.

Vous avez manifesté un intérêt certain devant mon travail, justement peut être puisque je m’étais investie à l’époque dans l’arrêt du tabac de ma mère en l’accompagnant à votre consultation.

J’ai toujours été admirative de votre parcours et de votre écoute concernant les patients.

Je vous remercie d’avoir accepté de faire partie de mon jury de thèse malgré votre congé maternité. Veuillez trouver ici le témoignage de ma plus grande reconnaissance.

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A mon juge,

Monsieur le Docteur Maxime GIGNON,

Maître de Conférences des Universités – Praticien Hospitalier Epidémiologie, économie de la santé et prévention

(7)

A mon juge,

Monsieur le Docteur Charles SABBAGH,

Maître de Conférences des Universités – Praticien Hospitalier (Chirurgie digestive)

Vous m’avez fait l’honneur d’accepter d’être membre de mon jury, et je vous en remercie sincèrement.

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A mon directeur de thèse,

Monsieur le Docteur Patrice NOUGEIN,

Docteur en médecine, enseignant.

Vous avez été le premier médecin généraliste chez qui j’effectuais mon stage de premier niveau lors du DES de Médecine Générale; vous m’avez montré à travers ce stage que la médecine générale était passionnante et que sa pratique pouvait être réellement diversifiée à travers différents DU, DESC qui complètent nos connaissances sans cesse.

Vous m’avez alors confortée dans l’idée que la médecine générale était la spécialité qui me convenait le mieux et dans laquelle je m’épanouirais dans mon travail au quotidien.

(9)

A Madame le Professeur Boulnois,

J’ai réalisé chez vous aussi un de mes premiers stages de médecine générale, et vous m’avez alors mis devant le fait accompli en me laissant d’ores et déjà lors de mon second semestre d’internat, seule devant des patients à devoir les gérer, cela m’a permis d’être face à mes responsabilités, et aussi de confirmer mon intérêt pour ce métier.

A Monsieur le Docteur Albert Toussé,

Chez vous aussi, j’ai réalisé un de mes premiers stages de médecine générale, et vous m’avez vous aussi montré la diversité de notre pratique de médecin généraliste grâce à vos différentes spécialisations, que vous n’utilisez qu’à bon escient. Merci de m’avoir aussi montré que la médecine générale était la spécialité qui me convenait.

A Monsieur le Docteur Jean-Daniel Barraud de Lagerie,

J’ai passé à Friaucourt un excellent stage de médecine générale de niveau 2, vous m’avez appris ce qu’était le médecin de campagne et de famille, vous m’avez fait confiance pour mes premiers remplacements, vous m’avez redonné confiance en moi après un stage en pédiatrie qui m’avait décontenancée, vous m’avez montré que je serais un bon médecin généraliste, pour tout ça je vous dis un grand merci.

Et merci aussi pour la découverte de Ault et de ses magnifiques falaises ! Mille mercis !

A Monsieur le Docteur Gilles Dussart,

Merci pour cet excellent stage de médecine générale de niveau 2, merci pour nos longues discussions sur la vie et la médecine. Merci pour la découverte plus profonde du Crotoy et de ses habitants. Merci de m’avoir vous aussi donné confiance en moi, de m’avoir fait confiance lors de mes quelques remplacements. Merci de m’avoir appris cette phrase qui reste maintenant pour moi l’une des plus importantes que je me répète presque chaque jour « ce n’est pas parce que les choses sont difficiles qu’on n’ose pas, c’est parce qu’on n’ose pas qu’elles sont difficiles ». Mille mercis pour tout !

Et merci à votre épouse, Marie-Josephe avec qui j’ai pris plaisir de partager tous nos repas du midi.

A Monsieur le Docteur Christophe Devos,

Merci pour ce dernier stage en médecine générale, et des moments passés au cabinet.

Merci à tous les médecins que j’ai rencontrés au cours de mes stages hospitaliers, qui m’ont motivée, m’ont appris, m’ont aidée.

Merci à tous les médecins qui ont pris du temps pour répondre à mes entretiens sans qui mon travail n’aurait jamais pu avoir lieu.

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A mes parents,

Maman, Papa, je ne pourrais jamais assez vous remercier pour tout ce que vous avez fait depuis que nous sommes nés Thomas et moi. La vie n’est pas un long fleuve tranquille, mais vous m’avez appris à être ce que je suis aujourd’hui et m’avez donnée mes valeurs. C’est grâce à vous que j’en suis là aujourd’hui. Merci de m’avoir soutenue tout au long de mes études, et d’avoir été là à chaque fois, d’avoir supporté mes sautes d’humeur pendant les périodes d’examens ! Merci d’être là chaque jour, je vous aime. Et merci d’avoir été la source d’inspiration de cette thèse, ce n’était pas facile de trouver un sujet attrayant et travailler sur ce thème m’a beaucoup plu.

Merci maman pour tes précieuses relectures de mon travail et tous tes bons conseils.

A mon frère jumeau Thomas,

Mon Tchouchou, sans toi, je ne serais pas ce que je suis aujourd’hui, tu nous as appris à tous dans la famille l’amour de l’autre, dans sa différence. Tu m’as permis je pense d’être à l’écoute de mes patients, d’avoir l’empathie souvent dont on me qualifie. Je ne serais pas la même si nous n’étions pas sortis du ventre de maman le même jour, si tu n’avais pas été la surprise que personne n’attendait. Pour rien au monde, je n’aurais changé mon frère jumeau et tu restes et resteras la personne la plus importante de ma vie. Oui nous avons ce lien indescriptible qui nous unit nous les jumeaux ! Je te souhaite aussi bon vent où Dieu t’enverra, et sache que je serai toujours là pour toi quoiqu’il en soit.

A ma soeur Marie,

Merci Marie de m’avoir fait découvrir ton métier lors de mon stage en gynécologie, de m’avoir invitée chez vous pour que je puisse remplacer dans votre magnifique région qu’est la Baie de Somme. Merci d’être là et de me faire aussi découvrir une médecine un peu moins scientifique ! Même si je n’en suis pas toujours convaincue, je ne suis pas hostile à des pratiques dites naturelles. Merci aussi pour tous les bons moments partagés ensemble.

A ma soeur Emmanuelle,

Merci pour tout, merci d’avoir toujours été là, lors des examens, de mes études, pour tes ondes magiques, tes grigris porte-bonheur sur mes trousses, pour nos tea-time, nos sessions shopping ou bien m’apprendre comment me mettre en valeur avec mes premiers maquillages. Merci d’avoir été là et de m’avoir soutenue tout au long de mes études, et merci de m’avoir aidée dans la relecture de cette thèse. Ton avis m’est toujours précieux.

A mes autres frères, Pierre, Michel, Matthieu,

Merci pour tous les moments passés ensemble, que ça soit, en mer avec les sessions kitesurf pour certains ou lors de parties de jeux de société endiablées. Merci d’avoir partagé tous ces bons moments ensemble, et merci pour les prochains à venir !

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Merci Michel de m’avoir fait partager ta passion du métier de médecin, tu restes pour moi un modèle puisque malgré tous tes titres et premières mondiales, tu restes d’une humilité sans pareille.

A mes beaux-frères, Maxime, Nicolas, et mes belles-soeurs, Ségolène, Lucie, Merci d’être là et de rendre mes frères et soeurs heureux au sein de leur famille.

A mes petits neveux, Elouan, Henri, Martin, Baptiste, Théophile, Gaspard et à ma nièce Louise, Merci de nous avoir mis de la joie et de la bonne humeur pendant les réunions de famille.

A Nathan,

Mon Rondoudou d’amour, toi qui partages ma vie depuis presque 5 ans avec qui nous allons commencer notre nouvelle vie à la mer dans très peu de temps et avec qui nous allons fonder dans quelques mois une famille avec notre petit « baby » qui pousse dans mon ventre. Merci pour tous ces moments de bonheur que nous passons ensemble, désolée parfois d’être chiante (mais il faut dire aussi que tu n’es pas facile tous les jours!). Merci d’être là, de m’aimer comme je suis et maintenant plein de beaux projets arrivent en même temps, what' else ?

A mes presque beaux parents (Nathan on se marie quand?), Véronique et Dominique,

Merci d’être là, de m’avoir acceptée parmi les vôtres, de m’accueillir chez vous pendant cette période de transition Somme - Pas de Calais. Merci pour votre relecture à quatre yeux.

Au reste de ma belle famille, Hélène, Julien, Lison, Pia, Félix et Marion

Merci de m’avoir acceptée au sein de votre famille, merci pour tous les bons moments partagés ensemble.

A mes oncles et tantes,

Merci à Jean-Michel et Fédérico qui avez toujours été là et chez qui j’ai pu réviser ma première année de médecine au bon air des Flandres et du Mont Noir. Merci à Brigitte et « mon Oncle Luc » d’avoir toujours cru en moi, merci à Babar, Nicole et tous les autres d’avoir toujours été là pour nous et notre famille.

A mon parrain et sa femme, Bernard et Claude,

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Aux amis de mes parents,

Merci à Marie-Brigitte et Bertrand qui m’ont accueillie chez eux pour me faire réviser au bon air de la campagne de Welles-Perennes pendant ma première année de médecine, aux deux Marie-Christine, à Brigitte et Daniel qui avez été des amis fidèles de mes parents depuis notre naissance.

A mon amie d’enfance, Flore

Merci Bobylou d’être là depuis toujours, même si nous nous voyons peu, je sais que je peux toujours compter sur toi, et c’est toujours un plaisir de vous retrouver toi et ta petite famille.

A mes amis du lycée, Alix, Justine, Luc, Claire,

Merci pour tous ces bons moments passés ensemble au Sacré-Coeur, je prends toujours plaisir à vous retrouver dès que possible à Paris, à Lille, ou bientôt chez nous à la mer !

A mon amie du lycée, Coline

Merci Coline, pour toutes ces années passées ensemble, à papoter, à manger des kinder surprise, à refaire nos vies autour d’un bon cocktail au rétroviseur ou ailleurs, que tout cela continue encore et encore !

A tous mes amis de médecine, Flore, Eva, Clément, Alice, Ludo, Anaïs, Maxime, Hélène, Clément, Ophélie, Nicolas, Marion, Mahaut, Noémie, Margot, Clara, Suzanne

Merci pour toutes les soirées, et les moments passés ensemble, que ce soit au Niger, en Ecosse, à Budapest, au ski, à Amiens, à l’île de ré, à Nantes, à Lille et j’en passe, merci pour tous ces moments qui ont rendu agréables les études médicales.

Merci à mes co-internes grâce à qui j’ai pu passer de très bons stages hospitaliers, je pense notamment à Camille, Soumaya, Ornella, Marine, sans oublier Elodie mon externe de pharmacie préférée.

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TABLE DES MATIERES INTRODUCTION 15 MATERIEL ET METHODES 17 A. Choix de la méthode 17 B. Constitution de l’échantillon 17 1. Population étudiée 17

2. Recrutements des participants 17

C. Mode recueil des données 18

1. Les entretiens 18

2. Le script d’entretien 18

3. La retranscription des entretiens 19

D. Méthodes d’analyse des résultats 19

1. Analyse descriptive-interprétative 19

2. Triangulation des données 19

3. Saturation des données 19

RESULTATS 20

A. Présentation des participants de l’étude 20

B. Les médecins ayant fait le choix d’être médecin traitant de leurs parents 22

1. Pourquoi ? 23

2. Les différents degrés d’ implication 25

3. Les limites et difficultés rencontrées dans la prise en charge médicale de leurs parents 26

4. Les avantages d’être leur médecin traitant 27

5. Les inconvénients d’être leur médecin traitant 29

6. La prise en charge du reste de la famille 32

7. Leurs conseils 33

C. Les médecins ayant fait le choix de ne pas être médecin traitant de leurs parents 34

1. Pourquoi ? 34

2. Les avantages de ne pas être leur médecin traitant 40

3. Les inconvénients de ne pas être leur médecin traitant 41

4. Les différents degrés d’implication dans la prise en charge médicale de leurs parents malgré tout 41

5. Les limites ressenties s’ils devaient prendre en charge leurs parents 45

6. Leur regard par rapport à la santé du reste de leur famille 45

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DISCUSSION 48

A. Méthode de l’étude: intérêts et limites 48

1. Forces de l’étude 48

2. Biais 48

B. Les résultats 49

1. Les résultats qui se recoupent 49

2. Les autres idées qui ressortent 49

C. Comparaison avec les données de la littérature 51

1. Les études concernant les médecins 51

2. Les études concernant la famille du généraliste 53

3. Les études étrangères 54

D. Textes de loi et cadre réglementaire 55

E. Perspectives 55

CONCLUSION 56

ANNEXE 57

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INTRODUCTION:

Durant mes études de médecine, et encore aujourd’hui, je me suis posé plusieurs fois la question de la santé de mes proches. Faut-il s’impliquer, dans quelles mesures et quel est notre rôle en tant que médecin et proche auprès des siens ?

A l’occasion d’un cours de DES de médecine générale, un médecin généraliste faisait écho à une interrogation d’un étudiant et nous avait conseillés de ne pas soigner nos proches, que ce soit la famille ou les amis. Il argumentait par le fait que la situation était ambiguë et nous conseillait de bien cadrer les choses si nous étions amenés à le faire pour éviter des situations délicates.

Or, au fur et à mesure du temps, je me rends compte que je suis de plus en plus sollicitée par mes proches, pour un conseil, ou un dépannage d’ordonnance.

J’ai moi-même essayé de m’impliquer dans la santé de mes parents, mais je me suis rendue compte que ce n’était pas si facile et que la tâche de leur médecin généraliste n’était pas aisée.

Je ne souhaitais pas forcément les soigner pourtant j’aurais bien voulu leur faire bénéficier de mes connaissances en médecine.

Cependant j’ai toujours craint que ma perception ne soit un peu altérée, et cela quelque soit le membre de ma famille.

C’est ainsi que j’ai été amenée à faire cette thèse et que j’ai décidé d’interroger mes confrères pour savoir quelle était leur attitude face à la santé de leurs propres parents, quels étaient leur positionnement, leur implication, et voir ainsi leur ressenti, leurs difficultés face à la situation. L’objectif principal de cette thèse est d’étudier la position qu’occupe le médecin généraliste face à la santé de son propre parent. Est-il le médecin traitant de ses parents, quelle place occupe-t-il dans leur santé ?

Les objectifs secondaires sont d’évoquer le ressenti, les difficultés et les limites à prendre en charge médicalement soi-même ses propres parents (père et mère).

Rappelons avant de commencer quelques définitions de base.

D’après la WONCA [1], le médecin généraliste a la responsabilité de fournir des soins complets à toute personne qui en fait la demande et d’organiser l’accès aux soins auprès d’autres professionnels si besoin. Il doit accepter tous ceux qui cherchent à obtenir des soins quelque soit leur âge, leur sexe et leurs pathologies. De plus, il prend en charge la personne dans le contexte de sa famille et il assume la responsabilité de la continuité et de la globalité des soins à ses patients avec entre autre la réalisation d’actes de prévention. Il consigne toutes les informations du patient dans un dossier médical. Enfin, le médecin généraliste est aussi appelé médecin de famille puisqu’il accompagne généralement la famille dans son ensemble, et accompagne alors le patient lors d’évènements douloureux de la vie [2].

Le médecin généraliste assure donc une prise en charge globale du patient.

D’après le site du service public [3], les principales missions du médecin traitant sont d’assurer un premier niveau de recours aux soins et coordonner le suivi médical, d’orienter dans le parcours de

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soins coordonnés, de gérer le dossier médical, d’établir un protocole de soins pour une affection de longue durée et d’assurer une prévention personnalisée.

D’après ces deux définitions, un médecin a la possibilité de prendre son parent en tant que patient et on pourrait alors penser que le proche-soignant est le mieux placé pour la prise en charge étant donné qu’il connait très bien ses parents.

De plus, le serment d’Hippocrate [4] mentionne « je donnerai mes soins à l’indigent et à quiconque me les demandera », alors un enfant-médecin a t-il le droit de refuser de prendre en charge son parent s’il en fait la demande ? Dans quelle mesure peut-on refuser de soigner un patient ?

Comme le précise le site de l’assurance maladie [5], chaque patient a le libre choix de son médecin traitant, de la même façon que le médecin est libre d'accepter ou de refuser d'être le médecin traitant d'un patient.

On peut donc tout simplement refuser d’être le médecin traitant de son parent même si celui ci lui en faisait la demande, mais quelles raisons alors l’inciteraient à refuser de le prendre en charge ? Nous allons au travers cette étude essayer d’analyser les différents comportements des généralistes interrogés face à la santé de leurs propres parents. Nous séparerons donc ceux qui ont fait le choix de soigner leur parent et ceux qui ne l’ont pas souhaité, et nous nous attacherons à savoir quelles raisons ont poussé ces différents choix de ces « enfants-médecins ».

(17)

MATERIEL ET METHODE

A. Choix de la Méthode:

Ce travail repose sur une étude qualitative menée auprès de médecins généralistes, grâce à la réalisation d’entretiens semi dirigés.

La recherche qualitative a pour objectif d’étudier les représentations, comportements des fournisseurs et consommateurs de soins, elle permet également d’explorer l’expérience vécue par les acteurs du système de soins (soignants, patients, aidants). C’est cette méthode qu’on utilise pour aider à comprendre les phénomènes sociaux et ainsi de saisir le sens que les individus attribuent à leurs actions. [6]

En effet, l’étude qualitative est le type d’étude de choix dans l’évaluation des comportements psycho-sociaux et ainsi d’accéder à la sphère privée de l’interviewé.

La recherche qualitative est une démarche déductive et interprétative puisqu’elle génère une hypothèse à partir de faits observés.

Le chercheur transforme alors le monde empirique, brut et désordonné de l’expérience en un monde organisé d’idées et de concepts. [7]

Cette méthode nous paraissait la plus appropriée pour recueillir les informations portant sur le ressenti, le positionnement, les avis et expériences des médecins généralistes face à la santé de leurs propres parents.

B. Constitution de l’échantillon 1. Population étudiée

L’étude a été menée auprès de 14 médecins généralistes, et nous avons tenté de diversifier les participants selon leur sexe, leur âge, leur mode d’exercice (urbain, semi rural ou rural) et par leur situation d’être médecin traitant ou non de leurs propres parents.

Chaque médecin généraliste était diplômé d’un doctorat de médecine générale et exerçait la médecine générale en cabinet.

2. Recrutement des participants

Par un souci pratique et pour optimiser le nombre de réponses favorables, j’ai d’abord interrogé des médecins généralistes que je connaissais, que ce soit personnellement, ou bien par les différents stages ou remplacements effectués, et ensuite, l’échantillonnage s’est réalisé au hasard, et par effet boule de neige.

Les médecins ont alors été contactés par téléphone et le thème du sujet leur a été confié, à savoir « le médecin généraliste face à la santé de ses propres parents: père et mère ». Les médecins répondaient alors favorablement ou non pour qu’un rendez vous soit prévu pour réaliser l’entretien.

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Les différents médecins généralistes avaient été contactés par téléphone et un rendez-vous sur le lieu et l’heure de leur choix avait été convenu.

C. Mode de recueil des données: 1. Les entretiens

Dans ce cadre de l’étude qualitative, il existe deux types de recueil de données, soit l’observation indirecte ou directe, soit l’entretien qui peut alors soit être individuel ou en focus groupe.

Devant le thème personnel abordé, il est paru évident que chaque médecin interrogé devait s’exprimer le plus librement possible sans que sa pensée soit perturbée par un autre intervenant. C’est donc par entretien individuel dit « semi-dirigé » que les données ont été recueillies.

Dans l’entretien semi-dirigé, le chercheur utilise une grille pré-établie de questions ouvertes, appelée, canevas ou script d’entretien. [8]

Chaque question du script était posée une à une, et le but était de laisser parler l’enquêté, de l’encourager à développer ses idées et à citer des exemples. Chaque « blanc » était respecté, et parfois une reformulation était réalisée pour vérifier la bonne compréhension du discours.

Les entretiens se sont déroulés entre juin 2016 et novembre 2016.

Les entretiens avaient une durée moyenne de 30minutes, au minimum, un entretien avait duré 20min, au maximum, 49minutes.

Chaque entretien était enregistré à l’aide d’un dictaphone et était anonymisé.

Enfin, à la fin de chaque entretien était proposé aux participants un envoi par email de la thèse.

2. Le script d’entretien

Un script d’entretien avait été rédigé au mois d’avril 2016, validé par le DES de médecine générale d’Amiens. (annexe)

Ensuite, le script avait été testé auprès de deux volontaires, un médecin généraliste installé et un remplaçant en médecine générale pour évaluer la fluidité du script et la durée approximative d’un entretien.

Le script d’entretien était composé de 13 questions avec des questions de relance. Le script tenait compte du fait que le généraliste soit médecin traitant ou non de son parent et comprenait différentes parties: les caractéristiques du médecin généraliste et de sa relation avec ses parents, les choix qui l’avaient poussé ou non à être le médecin traitant de son parent, les degrés d’implication selon le contexte et son ressenti.

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3. La retranscription des entretiens

L’auteur a réalisé sur ordinateur une retranscription des données de type verbatim, c’est à dire mot à mot, sur le logiciel Pages de Mac avec retranscription des aspects non verbaux (rires, pleurs, attitude mal à l’aise si besoin), et des silences; ce qui est l’élément constituant la donnée-même pour l’analyse.

D. Méthode d’analyse des résultats

1. Analyse descriptive-interprétative, méthode phénoménologique [9][10]

Les entretiens ont été analysés au fur et à mesure, permettant alors de revoir si le script d’entretien était correct ou s’il fallait modifier la façon de poser certaines questions.

Chaque entretien a été transcrit mot à mot, puis lu et relu afin d’y mettre des annotations et au fur et à mesure faire ressortir les idées ou thèmes saillants puis de classer les idées par thématique.

Par choix personnel, l’analyse a été réalisée de façon manuelle, après impression papier de tous les entretiens, à l’aide de schéma colorisé, c’est ce qu’on appelle le codage ouvert [11][12]. On prend alors des fragments de phrase qui ont un sens et on regroupe ces fragments de phrase par catégorie. Chaque catégorie doit contenir des éléments pertinents, exhaustifs (tout le texte doit être codé), exclusifs (un même élément du contenu ne peut pas appartenir à 2 catégories) et objectifs.

Le codage s’intéresse donc aux mots, à leur contexte, à leur fréquence d’utilisation, à leur intensité. [6]

La démarche même avec les logiciels reste identique, le chercheur doit identifier le début et la fin des passages pertinents, les coder et les classer par thématique.

Les thèmes dégagés de l'analyse des verbatims ont servi de structure pour élaborer le plan de présentation des résultats.

2. Triangulation des données [13]

Enfin, afin d’assurer la validité de l’étude, une triangulation a été réalisée sur les trois premiers entretiens afin de vérifier si l’interprétation des données des entretiens était la même. Pour cela, il fallait que deux personnes analysent indépendamment les entretiens et confrontent ensuite leurs analyses, c’est ce qu’on appelle la triangulation des chercheurs. Malheureusement, nous n’avons pu le faire que pour les trois premiers entretiens.

3. Saturation des données

Un autre critère de validité de l’étude qualitative est la saturation des données. En effet, après réalisation et analyse des derniers entretiens, il est apparu qu’il n’y avait pas de nouveau concept supplémentaire à ceux qui avaient été recueillis lors des entretiens précédents. Il a donc été décidé d’arrêter les entretiens après le quatorzième.

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RESULTATS

A. Présentation des participants de l’étude

J’ai interrogé 8 hommes âgés de 29 à 61 ans et 6 femmes âgées de 28 à 56 ans.

Voici deux tableaux récapitulatifs concernant les caractéristiques des médecins interrogés et des caractéristiques des relations enfant-médecin-parent.

Caractéristiques de médecins interrogés : sexe lieu d’exercice type d’exercice âge situation familiale autre médecin dans la famille entretien 1 homme rural cabinet de

groupe

55 ans marié, 5 enfants

non

entretien 2 homme urbain cabinet de groupe + samu

58 ans marié, 4 enfants

non

entretien 3 homme urbain cabinet de groupe

50 ans marié, 3 enfants

non

entretien 5 homme urbain cabinet seul 61 ans marié, 3 enfants

non entretien 6 homme rural cabinet de

groupe

45 ans marié, 2 enfants

oui, frère en rééducation entretien 4 homme rural cabinet seul 51 ans marié, 3

enfants

non, fille interne entretien 7 homme semi rural cabinet de

groupe

31 ans marié, 1 enfant

non

entretien 8 homme semi rural cabinet de groupe

29 ans marié, pas d’enfants

non entretien 9 femme semi-rural cabinet de

groupe

28 ans mariée, 1 enfant

marraine radiologue entretien 10 femme rural cabinet de

groupe 31 ans mariée, 2 enfants dans belle famille uniquement entretien 11 femme semi rural cabinet de

groupe 38 ans mariée, 3 enfants belle famille uniquement, mère ancienne puér entretien 12 femme semi rural cabinet de

groupe

56 ans mariée, 3 enfants

un neveu entretien 13 femme semi rural cabinet de

groupe

54 ans mariée 4 enfants

(21)

Caractéristiques de la relation enfant-médecin-parents :

entretien 14 femme semi rural cabinet seul 47 ans mariée, 2 enfants non médecin traitant des parents ? distance géographiqu e fréquence des entretiens et type influence sur la carrière médicale âge des parents métiers des parents

entretien 1 non 130 km tél 1-2/sem visu 1/mois

aucune 87 et 87 ans chef entreprise / Prof entretien 2 oui 0-5 km, même ville très fréquent, visu 1 jour / semaine , 1 weekend sur 3

plutôt oui Père décédé à 82ans / mère 83 ans ouvrier / secrétaire entretien 3 non 0-10km même ville 2-3 fois par mois visu, rarement tel non mère décédée à 84 ans / père 87 ans mère au foyer / chef d’entreprise

entretien 5 oui même ville 2-3 fois en visu/sem appel 1 fois/ sem non mère décédée à 64 ans / père 92 ans mère au foyer/ comptable entretien 6 non mais

pourrait le devenir 120km tous les 3 mois en visu / min 1/ sem au tel non mère 67 ans / père 68 ans ouvriers * 2

entretien 4 oui 10 km village voisin

visu 2-3 fois/ mois tel 1 voire + /sem

non mère 75 ans/ père 80 ans

nourrice / chef de culture entretien 7 non 150km, 2h tél 1-2/sem

visu 1-2/mois

non mère 50ans/ père 56 ans

responsable logistique/ chef de chantier entretien 8 non 60km, 1h tél 1/sem

visu 1/mois non mère 56 ans / père 63 ans secrétaire / technicien retraité entretien 9 non 400km tél 1/j visu

1/15 jours

non 56 ans *2 mère prof / père ingénieur entretien 10 non 60km, une

heure

1-2/mois tél journalier

non, soutient 66 et 67 ans agriculteurs* 2

entretien 11 non mais oui 150km, 1h30 1-2 fois/sem , visu 1/mois

non 67 ans * 2 puéricultrice et ingénieur

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Tableau des durées de chaque entretiens et des durées de retranscription sur ordinateur mot à mot.

B. Les médecins qui ont fait le choix d’être médecin traitant de leurs parents

Parmi les médecins interrogés, il y avait 4 médecins traitants de leurs parents (3 hommes, médecins des entretiens 2, 3 et 5 et 1 femme, médecin de l’entretien 13), officiellement auprès de la sécurité sociale, et 2 femmes qui se considéraient comme être le médecin traitant de leurs parents sans l’être officiellement auprès de la sécurité sociale (les médecins des entretiens 11 et 14).

On parlera de ces médecins comme les médecins du groupe 1. entretien 12 oui même ville min 1/sem en

visu non père décédé à 72 ans, mère décédée à 77 ans mère travaillait en cuisine dans hôpital / père ouvrier entretien 13 non 45 km, 45min

de route tél 1/sem visu 2/mois non mère décédée quand fille avait 21 ans / père 83 ans agriculteurs * 2

entretien 14 non mais oui 100km, 1h voiture

tél 2/sem visu 1/mois

non mère 70ans / père 67 ans

secrétaire / représentant

durée de l’entretien durée de retranscription lieu de l’entretien

entretien 1 19min 12sec 2h domicile

entretien 2 39min 42sec 3h30 domicile

entretien 3 35min 3h15 cabinet

entretien 4 29min 03sec 2h30 cabinet

entretien 5 35min 3h cabinet

entretien 6 35min 32sec 2h45 cabinet

entretien 7 26min 56 sec 2h15 domicile

entretien 8 22min 53sec 2h domicile

entretien 9 24min 50sec 2h domicile

entretien 10 26min 33 sec 2h domicile

entretien 11 36min 59sec 3h domicile

entretien 12 49min 33sec 4h cabinet

entretien 13 27min 04sec 2h15 cabinet

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Le MG 11 dit « leur médecin est homéopathe alors c’est très homéopathique, peu allopathique, nous sommes complémentaires, c’est moi qui m’occupe de l’allopathie en l’occurrence, je fais toutes les prescriptions, la biologie, je ne suis pas officiellement médecin traitant mais c’est moi qui fait tout, j’ai prescrit une densitométrie osseuse, un bilan biologique, un bilan étiologique, un traitement, ma mère va voir son médecin dans l’année une à deux fois maximum, plutôt une, c’est moi qui gère tout »

Le MG 14 dit « je ne suis pas le médecin traitant parce qu’ils sont à 100km, et que la bobologie ils peuvent se débrouiller sans moi, mais si y’a un problème c’est moi le médecin » et elle est le médecin traitant de « mes beaux parents, oncles et tantes, beaux frères, belles-soeurs ». « quand il y a quelque chose de particulier, déjà ils me demandent mon avis et après, je les emmène en consultation (…) mais je ne suis pas le médecin traitant quand ils ont mal au petit doigt de pied, ça me saoule »

1. Pourquoi ?

Voici les différentes raisons ayant poussé les médecins du groupe 1 à être médecin traitant de leur propre parent.

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spontanément / naturellement:

« j’ai pris en charge pour x raisons et petit à petit en fait, leur médecin vieillissait, et plutôt que d’avoir à faire à d’autres médecins du coin avec qui ils n’étaient pas habitués, bah c’est moi qui ai pris la relève en fait, ça s’est fait naturellement » MG 4

« ça me parait normal d’intervenir dans la santé de ses proches parce que c’est un service rendu, parce qu’on donne à ses proches ce qu’on est capable de faire et puis parce qu’on leur veut du bien donc on veut qu’ils aient les meilleurs conseils »

« la situation s’est imposée d’elle même »

« c’est à dire que c’est beaucoup plus pratique quand on a une fille médecin de me demander au début une ampoule de vitamine D puis de dire « ah j’ai mal là » et soulever mon inquiétude et mon questionnement de médecin au point de m’impliquer à un moment et de dire « on va quand même faire un bilan de débrouillage », et au fur et à mesure d’être investie dans la tache sans l’avoir voulu spécialement » MG 11

« ça s’est fait tout seul, hmmm, quand ils ont un problème c’est moi qui le gère, après ça a dû commencer comme ça, je ne sais plus » MG 14

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désir / demande des parents / fierté des parents :

« ma mère quand j’ai fait ces études de médecine, elle a repris son travail et moi je leur ai rendu la pareille »

« dès que j’étais médecin mon père m’a dit « de toutes façons tu es médecin donc tu es mon médecin » de fil en aiguille ça s’est passé comme ça » MG 2

« non c’est à leur demande en fait, comme ils me demandaient d’intervenir pour ceci ou cela, naturellement j’ai glissé médecin traitant »

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« si leur médecin traitant était très bien, moi je n’aurai pas insisté pour être leur médecin traitant, c’est eux qui ont choisi » MG 4

« ça s’est fait naturellement, ma mère elle y tenait je crois » « c’est plus eux que moi qui l’ont souhaité » MG 5

« parce qu’ils me l’ont demandé je pense » « c’est plutôt eux qui l’ont voulu »

« à l’époque, j’ai dit oui (ndlr d’être leur médecin traitant), mais à posteriori je dirais non, mais c’est difficile de dire non à ses parents »

« ça aurait été difficile de leur dire non en même temps, en étant juste à coté, ils l’auraient mal vécu et ils n’auraient pas compris du tout » MG 13

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relai de l’ancien médecin traitant, départ à la retraite ancien MT

« ils avaient un médecin traitant auparavant quand je n’étais pas encore médecin et puis j’ai remplacé leur médecin traitant et petit à petit ils ont glissé vers moi, c’est moi qui les ai pris en charge naturellement » MG 4

« leur médecin généraliste a arrêté quand je me suis installé alors c’est pour ça ça s’est fait comme ça » MG 5

« je ne sais plus, leur médecin traitant était mon prédécesseur donc je pense que j’ai pris le relai puisque je suis revenue à ce moment là, je suis donc devenue naturellement leur médecin » MG 13

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du fait de la relation de confiance entre parents-enfants

« je crois qu’elle a du respect, de l’estime sur mes compétences et ma façon de juger les choses, elle me fait confiance »

« je pense qu’il n’y a pas de médecin qui connait aussi bien mes parents et leurs convictions que moi donc oui j’aurai plus confiance en moi » MG 11

« ça se passait bien en fait parce qu’ils me faisaient confiance » MG 13

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pour jouer son rôle d’enfant-médecin

« peut être qu’à l'époque j’avais l’impression que y’avait que moi qui savait bien faire, peut être aussi, un espèce d’ego surdimentionné, peut être, je ne sais pas, j’étais plutôt fier qu’ils me demandent » MG 2

« moi j’aime autant que ce soit moi qui le fasse qu’un autre » MG 3

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« ça me parait normal d’intervenir dans la santé de ses proches parce que c’est un service rendu, parce qu’on donne à ses proches ce qu’on est capable de faire » MG 11

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vouloir le meilleur pour ses parents

« forcément il y a des échecs, tu ne souhaites pas avoir d’échecs avec tes parents mais bon ça peut arriver, mais tu ne peux pas te le reprocher, si tu fais le maximum, tu ne pourras jamais te reprocher de n’avoir pas fait ce qu’il fallait et à la limite je préfère être en première ligne et faire mon travail du mieux que je peux et si ça passe pas, ça passe pas, mais un jour de toutes façons ça ne passera pas, c’est fort possible » MG 4

« et parce qu’on leur veut du bien et donc on veut qu’ils aient les meilleurs conseils » MG 11 « vous savez qu’un médecin ne fait confiance à personne (rires) (…) j’aime bien quand je connais les intervenants, j’ai besoin de voir le médecin, le spé » MG 14

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désir de ne pas interférer avec un autre médecin

« il y a des médecins qui n’aimeraient pas qu’on interfère avec leur prise en charge et toujours au détriment du patient parce que ça fait un intervenant de plus » «

« il faut que les choses soient claires, il y a un médecin référent c’est le médecin référent, tu le fais tu assumes, tu veux pas y être tu te dégages et puis tu laisses faire les choses, moi je ne me voyais pas me dégager et qu’on me demande sans arrêt mon avis pour ceci ou cela et puis d’interférer auprès d’un autre médecin » MG 4

« mais j’aime pas quand y’a un patient qui a un enfant médecin, ça me dérange un peu quoi (rires) » MG 14

2. Les différents degrés d’implication

Les médecins généralistes du groupe 1 avaient la même implication qu’avec un patient lambda, c’est à dire qu’ils prenaient en charge leurs parents de façon globale, telle que décrit par les critères de WONCA dans l’introduction.

Certains médecins trouvaient ça normal alors de s’impliquer quelque soit la pathologie (pathologie aigüe, chronique, renouvellement, orientation vers un confrère), et d’être présent du début à la fin (prise en charge de fin de vie).

« même à la limite, à la fin, en fin de vie, je préférais le faire, je m’en sentais capable, c’était mieux, je faisais mon travail jusqu’au bout, que je sois le médecin ou le fils » MG 5

« si je devais prendre en charge leur fin de vie, je prendrai en charge leur fin de vie, je le ferai » « oui ça sera difficile mais je serai capable de l’assumer, je suis capable de dire à un médecin « arrêtez la réanimation » » MG 11

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3. Les limites et difficultés rencontrées lors de la prise en charge médicale de leurs parents

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les pathologies touchant les parties intimes

« d’abord y'a beaucoup de clivages, par exemple, tout ce qui est gynécologue, c’est vrai que là tout de suite, devant un mur , donc ça moi j’ai délégué (…) oui parce que bon je pense qu’ils ne sont pas à l’aise » MG 2

« gynéco pour ma mère, je m’en suis jamais occupée (…) pour mon père, tout ce qui était problème de prostate, j’ai du gérer, enfin ça s’est fait avec l’urologue » MG 5

« si c’était la sphère uro-génital, hors de question que je prenne en charge des pathologies de prostate, contrôle de prostate ou examen gynéco, c’est niet, ou alors tout ce qui a trop de rapport à l’intimité » MG 11

« ça j’ai jamais examiné ma maman sur le plan gynécologique quoi, je l’envoyais chez le gynéco et mon père chez l’urologue » MG 13

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les pathologies psychiatriques

« s’il y avait eu un problème psychiatrique par exemple, je n’aurais pas pu gérer » MG 5

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annonce de pathologies grave, prise en charge de pathologies « lourdes »

« c’est facile de dire oui, mais après il faut assumer derrière, c’est dans le vécu qu’on s’aperçoit après que ce n’est pas si simple (…) pour tous les proches, ça a quand même rendu difficile la fin » Concernant l’annonce de pathologie grave : « souvent j’ai la plupart botté en touche, c’est à dire, j’ai fait une jolie lettre, j’appelle le spé je lui explique et en général il me dit « t’inquiète pas on va prendre en charge » c’est un peu trop difficile je pense qu’il faut se ménager un peu, sauf si on est piégé » MG 2

« quand ça va mal, c’est pas marrant, mais de toutes façons c’est pas marrant pour n’importe quel patient donc faut se dire que tu fais le maximum »

« c’est quand tu as de grosses pathologies que tu es mis à l’épreuve, mais que ce soit avec n’importe qui, un oncle, une tante, un parent, un patient (…) c’est plus difficile de soigner n’importe qui quand tu as de gros soucis de santé que quand c’est un traitement chronique, relativement stable » MG 4

« de toutes façons, tout ce qui était pathologie lourde, je ne m’en occupais pas vraiment (…) que ce soit cancero ou autre, on confie à un spécialiste; après oui les petites pathologies chroniques, ça c’était facile à gérer, c’est comme pour les autres patients »

« ça a été difficile peut être au moment où j’ai dit à ma mère qu’elle avait son cancer du sein, là, peut être un peu plus » MG 5

« bah oui un cancer j’aimerai pas (…) oui démence, oui (…) mais là, je deviendrai plus une fille dans ce cas là, on n’est pas soignant, on est enfant » MG 11

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« parce que là oui, cancer du poumon c’est pas facile, une fin de vie qui n’est pas facile (…) oui voilà, un rhume c’est pas gênant ça »

« c’était dur à vivre parce qu’il y avait eu des pathologies lourdes »

« oui c’est difficile d’avoir tout le poids du diagnostic, de l’annonce, du suivi, voilà, de devoir épauler tout le monde c’est difficile »

« tant qu’il n’y a pas de grosses pathologies, ça ne pose pas de difficultés, et je pense que plus l’âge avance, plus c’est compliqué, et il y aussi le restant de la famille qui compte beaucoup sur vous » MG 13

« on prend tout de plein fouet et c’est à nous de traduire, de faire l’annonce, donc ça c’est dur, et il y a les autres, les frères et soeurs, il faut tout expliquer, et vous pouvez pas dire le premier jour « bon de toutes façons elle est foutue » c’est un peu compliqué, par contre, je ne donnerai pas ma place, mais c’est pas facile quand même (larmes) et dire que ça va aller, et arriver tous les matins en souriant parce que voilà, ils sont là, ça c’est le plus dur je pense, l’annonce » MG 14

4. Les avantages d’être leur médecin traitant

« quand tout va bien c’est un avantage (…) les bons côtés c’est quand tu arrives à les soigner et que tout va bien » MG 4

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aucun

« non il y a pas d’avantage » MG 2

« pour moi ? alors là, je ne sais pas, je n’en vois pas, je pense que s’ils avaient pris quelqu’un d’autre, j’aurais fait confiance aussi, c’est vrai que j’aurais supervisé aussi, je pense qu’on a tendance à s’impliquer un peu je pense » MG 13

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côté pratique: au domicile du patient, n’importe quand, facilité d’accès aux soins

« ça avait quand même ce coté pratique pour eux puisqu’ils pouvaient m’appeler n’importe quand et j’y passais souvent » MG 5

« l’avantage ça serait lui rendre service, que ce soit plus facile pour elle (sa mère) » MG 11 « pour eux c’était pratique et plus simple » MG 13

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faire une prise en charge plus rapide, utiliser son réseau de professionnels, son carnet d’adresses, les orienter vers les spécialistes souhaités

« t’as un carnet d’adresses, tu peux faire jouer tes correspondants, comme avec tout patient, mais quand tu dis à une secrétaire que tu envoies ton père, elle se débrouille en général pour avoir un rendez vous rapidement (…) et ça peut éviter une hospitalisation »

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« et puis pour eux c’est un avantage, je téléphone, je débrouille tout quoi » « comme je téléphonais, ça permettait d’aller plus vite » MG 5

« de pouvoir avoir la personne que vous voulez aller voir rapidement et d’avoir les examens rapidement » MG 14

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développement du relationnel avec les parents, de la relation de confiance

« il y avait une relation de confiance, je dirai d’un coté comme de l’autre, on se faisait confiance (…) on s’écoute et puis s’ils sont pas d’accord, à la limite, ils le disent et on en discute »

« elle (la mère) était plus sereine puisque j’étais là et parce que c’est moi qui régissais tout ça » MG 5

« je pense que c’est un contrat de confiance, eux ça doit les rassurer un peu aussi je pense » MG 14

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sortir des recommandations

« je me permets avec eux de sortir des recommandations parfaitement officielles pour plus de bon sens et plus critique vis à vis de la médecine, chose que je ne me permets pas trop de faire avec mes patients » MG 11

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s’investir lors d’une pathologie grave ou lourde

« il n’y a pas de maladies qui m’empêcheraient de les soigner au contraire, plus ils sont malades, plus je m’en occuperai, comme pour n’importe quel patient, tu vas pas jeter un patient parce qu’il a une maladie que tu n’aimes pas, tu vois, donc t’es leur médecin, t’es leur médecin, t’assumes quoiqu’il se passe » MG 4

« je vois même à la fin, au moment de son décès, elle est restée à la maison en phase terminale du cancer, je m’occupais de lui prescrire les perfusions tout ça, d’y être » « à la fin elle était vraiment mal, on était soulagé quand ça s’est terminé, je l’ai mise sous morphinique (…) ça paraissait logique »

« non limite, même à la fin, en fin de vie, je préférais le faire (…) je m’en sentais capable (…) c’était mieux je faisais mon travail jusqu’au bout que je sois le médecin ou le fils »

« je vois pour ma mère, à la limite, d’avoir été comme ça, à la fin de vie, d’avoir tout fait et bien ça m’a plutôt enrichi qu’autre chose et je pense qu’elle était sereine puisque j’étais là parce que c’était moi qui régissais tout ça » MG 5

« si je devais prendre en charge leur fin de vie (…) oui c’est dur, mais oui je le ferai » MG 11 « je serai là surtout pour une pathologie grave, s’ils sont enrhumés, ils achètent une boite de kleenex et voilà, j’en ai un peu rien à faire, mais par contre, s’ils me disent pas ils savent que je vais râler, je ne peux pas m’empêcher »

« c’est quand ils ont besoin de nous qu’il faut être là, je pense que je ne laisserai pas ma place » « je prendrai le rôle de fille, de médecin, d’infirmier et d’aide-soignante » MG 14

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5. Les inconvénients d’être leur médecin traitant

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manque d’objectivité, minimiser ou en faire trop

« c’est à dire que quand c’est les siens, moi j’ai vécu ça avec mes enfants, ils font de la fièvre, c’est forcément une appendicite ou une méningite, donc à un moment donné on perd ses repères puisqu’on est trop impliqués dedans et je pense que le cerveau ne réagit pas de la même façon » « par exemple, quand j’ai à traiter un truc banal, une angine, mes patients je ne me pose jamais la question, ça vient d’un jet (…) avec mon petit fils je n’ai pas la même spontanéité, il y'a quelque chose qui est freinateur » MG 2

« parce que c’est difficile de soigner ses parents, on n’est pas aussi objectif qu’avec un patient lambda »

« l’inconvénient c’est surtout l’affect quoi, le manque d’objectivité, on a tendance à toujours voir tout en noir, plus que pour ses propres patients je pense, à imaginer le pire »

« on va s’imaginer tout de suite des trucs plus graves qui pourraient leur arriver » MG 13

« je pense que c’est les deux, c’est à dire que « jai mal à l’épaule, j’ai pas dormi de la nuit » on regarde vite fait entre deux portes mais à partir du moment où on a un truc qui nous parait un peu plus grave alors moi c’est plan orsec, c’est à dire qu’on fait une batterie, de toutes façons on ne peut pas être juge et partie donc on a beaucoup de mal à faire la part des choses, on perd de l’objectivité c’est sûr »

« je pense qu’on n’est pas objectif, parce que c’est tout ou rien, soit c’est pas grave, tu le feras après (…) et puis quand y’a une maladie grave on n’est plus du tout objectif parce qu’on ne voit que le pire » MG 14

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émotionnellement difficile

« non j’ai toujours senti qu’il y avait une grande ambiguïté, que ce n’était pas si simple que ça, et que moralement c’est difficile notamment quand ça se passe mal »

« les inconvénients c’est qu’on est trop impliqué, pfff, c’est difficile, c’est compliqué et c’est douloureux en fait, émotionnellement c’est une charge »

« c’est plus le coté humain, peine, diagnostic, la lourdeur de ce qui se passe, je pense que quand c’est nos parents, notre oncle avec lequel on a passé des tonnes de moments, on rajoute une peine, on n’a pas cette espèce de neutralité, c’est pas qu’on n’a pas d’empathie pour les autres, mais il y a quelque chose de plus »

« c’est dans le vécu qu’on s’aperçoit après que ce n’est pas si simple » MG 2

« il y a un peu plus d’affectif quand c’est la famille mais bon il faut rester à ta place (…) parce que tu les connais davantage, forcément tu connais vraiment leur parcours, un patient tu le vois mais tu ne connais pas sa vie privée » MG 3

« j’en fais moins parce que j’ai dit que j’étais moins carrée (…) minimiser oui pour mon père mais parce que je pense qu’il faut le faire parce qu’il est hypochondriaque et pour ma mère non, je m’inquiète à juste titre quand il faut, pas plus » MG 11

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« il y a quand même l’affect qui est présent, c’est difficile, très difficile de soigner ses parents je trouve, même ses proches en général à cause de l’affect et de l’implication »

« je pense qu’il y a trop d’affect, trop la peur de trouver quelque chose de grave, c’est difficile je pense »

« au niveau émotif, parce que c’est une implication 24h/24 » MG 13

« l’inconvénient c’est que vous prenez tout de plein fouet, et puis j’ai été confrontée à ça cet hiver, et vous voyez c’est encore un peu difficile (larmes) »

« affectivement c’est un peu lourd parfois »

« des fois on n’a pas la même patience avec quelqu’un de sa famille qu’avec un patient, parce que quand vous avez quelqu’un de malade chez vous, la première réaction c’est la colère, parce qu’ils n’ont pas besoin d’être malades, c’est chez les autres les malades (…) c’est que j’ai pas envie qu’ils soient malades (…) parce qu’on a peur pour ses proches » MG 14

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prise en charge moins carrée, formelle, examen de moins bonne qualité

« mon père était très embêtant la dessus parce qu’il voulait pas que je le vois au cabinet, par contre ma mère, mon beau-père venaient au cabinet, je pense qu’on fait du meilleur travail au cabinet que quand on va chez soi ou chez eux, c’est un lieu qui n’est pas assez neutre, en tout cas qui n’a pas une connotation médicale suffisante » MG 2

« je pense que je ne les suivrai pas comme mes patients, de façon hyper carrée (…) plus carrée avec mes patients, pour lesquels j’ai un dossier et pour lesquels je veille à ce que ça soit comme ça alors que pour eux bon… « ça sert à rien l’hémoccult je fais pas ça »

« je vais les relancer, tenter de les convaincre alors que tenter de convaincre ma mère c’est cuit d’avance »

« je pense qu’il y a des failles dans ce système là et que si c’était un médecin attitré qui les suit de A à Z, je pense que ça serait plus carré comme moi je le suis avec mes patients (…) là, oui ce ne l’est pas, c’est un coin de table » MG 11

« c’est pour ça que c’est mieux de les voir au cabinet, ou chez eux à la limite que chez soi le dimanche, c’est toujours un truc vite fait entre deux portes « bah t’as qu’à prendre ça » ça prend 3 minutes, c’est entre le café et le dessert et voilà, ça ça ne va pas »

« je les examine mais pas à 100%, à 80%, des fois faut forcer un peu parce qu’ils ne sont pas toujours, eux ils voudraient bien venir « oh donne moi un cachet et ne me déshabille pas » et voilà, ils sont un peu sur la défensive et des fois nous, à cette seconde là, on n’a pas forcément le temps ou c’est pas l’endroit et on fait aussi vite fait » MG 14

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spécialisation de la prise en charge

« il y a un autre inconvénient, du moins c’est comme ça que je l’ai vu, dès l’instant où les choses ont été un peu graves, j’ai totalement spécialisé les choses » MG 2

« je m’en occupais mais en réalité avec d’autres médecins (…) il y avait tout ce qui était spécialiste et il y avait régulièrement des consultations »

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« ça n’a jamais été compliqué et de toutes façons, quand il y avait quelque chose de compliqué, en réalité je passais par un spécialiste, je passais la main quand même »

« son problème cardiaque je faisais les renouvellements de traitement, et puis il a eu son cancer de prostate, ça ça a été vu par l’urologue, et puis il a eu de la gonarthrose, il a eu des prothèses de genoux, ça ça a été fait par le chirurgien » MG 5

« bah quand c’est chez nous, on ne sait plus grand chose, c’est un peu panique à bord, il faut concentrer ses idées, on va chez le spé, on va plus chez le spé que madame tout le monde je pense » MG 14

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se rassurer en demandant un 2ème avis

« j’ai tendance à spécialiser un peu plus les choses, quand je sais que c’est un peu limite, je m’entoure de quelque sorte d’un conseil autre (…) c’est comme si je demandais un 2ème avis pour conforter le mien »

« ça fait un peu doublon je trouve, doublon pas de façon négative mais on essaie de se réassurer par l’autre, c’est le spé qui donne le « ok Jean-Luc tu avais raison » »

« je trouve qu’on se réassure plus peut-être en disant « tu es un peu limite, je vais quand même demander un avis » en fait je demande plus d’avis spécialisé parce que je soigne ma famille que je ne le ferai ailleurs, pour les autres, je me contente du protocole » MG 2

« je l’oriente plutôt vers un spécialiste, plutôt pour ne pas prendre seule la décision de prendre en charge et de traiter et d’avoir aussi un autre avis » MG 11

« parce que le diagnostic on le fait mais on a besoin d’un avis extérieur au cas où on ne se serait pas trompé alors qu’on sait pertinemment qu’on ne s’est pas trompé » MG 13

« oui je pense, je vais avec eux chez le spé en général, mais je pense que c’est une façon de se protéger effectivement » MG 14

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morcellement de la prise en charge

« y’a beaucoup de clivages (…) parce qu’on est obligé de morceler et quand même je trouve que la médecine générale, c’est un métier total, y'a forcément des pertes d’informations, un ralentissement des réactions qu’on doit avoir »

« je suis plus médecin traitant tel qu’on peut le définir pour un patient lambda que pour mes parents, eux je les ai un peu morcelés » MG 2

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confusion des rôles, ne pas pouvoir enlever sa casquette de médecin en repos

« je les prends en charge, mais je ne suis plus le fils, je suis le médecin, j’estime que je ne suis plus le fils »

« mes parents je pense qu’ils considèrent quand même que je suis leur fils mais avec cette possibilité de »

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« les spécialistes qui me connaissaient m’on dit « tu t’en occupes plus, maintenant c’est moi qui prends en charge » sentant que c’était important de me ménager et du coup, j’ai retrouvé un peu mon rôle de fils, j’ai perdu un peu mon coté médecin même si je faisais des ordonnances, etc » MG 2

« les mauvais cotés c’est quand tu es invité quelque part et que tout le monde te parle de maladie » « je pense que quand tu es médecin, c’est un peu comme ça, systématiquement on va te parler d’un truc alors que t’en as rien à battre »

« ils arrivent pas à faire la différence entre le médecin et le fils, tu vois »

« quand j’ai besoin de mes parents, je vais les voir et quand c’est eux qui ont besoin du médecin, ils viennent, c’est une double personnalité quoi » MG 4

« être le médecin, le soignant, l’enfant, tout, c’est difficile tout en même temps, à gérer »

« et puis finalement ça change la relation (…) ils me voyaient avec les deux casquettes » MG 13

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regret, remise en question, culpabilité

« c’est des deuils difficiles dans ces cas là parce qu’on est impliqués, on se pose toujours la question (…) après il court dans notre tête des diagnostics, des « et si et si » » MG 2

« cet hiver, je n’étais quand même pas très satisfait, je me posais des questions quand même tu vois, je pense que quand tu as un problème de santé vis à vis de tes parents, tu t’inquiètes beaucoup plus que pour un patient, y'a 10% de plus tu vois » MG 4

« la culpabilité dans les choix, les décisions, voilà, les conséquences d’éventuelles décisions ou erreurs » MG 11

« il y a la peur de passer à coté de quelque chose » MG 14

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garder pour soi

« ba oui mais que ce soit ton père ou un patient qui n’est pas bien, t’es quand même pas bien quoi (…) toi tu ressens des choses mais tu ne dis pas aux autres, tu comprends, c’est ça en fait »

« tu sais des choses et t’essaies d’avoir des conduites d’évitement pour pas venir sur certains sujets (…) faut tout garder pour soi » MG 4

« tendance à aggraver les choses, sans leur montrer, leur dire, mais à y penser » MG 13

6. La prise en charge médicale des autres membres de la famille

Les médecins interrogés qui prenaient en charge leurs propres parents prenaient pour la plupart aussi en charge le reste de la famille proche (sauf MG 2), c’est à dire, époux ou épouse, enfants, beaux-parents, voire même oncles, tantes, cousins ou cousines, s’ils en faisaient la demande.

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Le MG 2 soigne toute sa famille (soeurs, oncles, tantes, cousins, beaux parents..) sauf « ma femme et mes enfants moi je ne veux pas, parce que là c’est encore trop, beaucoup trop proche et puis y’a pas de recul (…) d’emblée je me suis dit mon enfant, je ne vais pas le voir de la même façon, je risque d’en faire trop ou pas assez »

« mes enfants ils sont grands mais oui c’est moi qui les soignais et vaccinais, et ma femme aussi, mais ils sont rarement malades (…) ils sont en bonne santé donc je touche du bois, j’ai pas grand chose à faire » MG 4

« mon épouse je m’en occupe, ça ne pose pas de problème pourtant elle a quand même eu un cancer du sein (…) les enfants, je m’en suis occupée, pas de problèmes non plus (…) mes soeurs elles n’ont pas de gros problèmes de santé (…) pour moi c’est pareil, c’est au même niveau (pas de hiérarchie de difficulté) » MG 5

« je soigne mes enfants, mais bien sûr que c’est extrêmement difficile parce qu’on manque de distance, on ne peut pas être parent et soignant, pour ça, j’ai un pédiatre référent quand je sais que je peux être perturbé dans mon jugement, voilà c’est le fait d’être parent, ça interfère (…) mais les vaccinations je n’ai pas pris en charge, le fait d’être celui qui pique et qui fait mal à son enfant, c’est non »

« la peur de parents qui se mélange au jugement de médecin, une situation parfaitement identique, je la vois au cabinet parfaitement sereine sans aucune question, parent médecin ça devient n’importe quoi dans les idées diagnostics, enfin c’est pas cool »

« après je soigne mes beaux-parents aussi, ma belle-mère parce qu’il y a une distance, c’est une belle-mère (rires), c’est relationnel, c’est un mélange de relation belle-mère belle-fille, et donner un conseil médical en ayant des opinions de belle fille sur sa belle-mère c’est compliqué donc j’essaie de ne pas trop intervenir mais j’ai su être là quand ça n’allait pas, peut-être plus comme médecin plutôt que belle-fille, comme ferait un médecin pour son patient » MG 11

« je suis le médecin traitant de mes enfants, de mes filles encore, ça se passe bien puisqu’elles reviennent (…) je soigne mon mari, mes beaux-parents (…) mais ils sont venus vers moi (…) je pense que tout le monde est au même niveau quand même, à partir du moment où c’est un proche, c’est quand même plus difficile (…) je pense que c’est surtout l’affect, ce point là qui est difficile à gérer » MG 13

« le plus chiant à soigner, c’est mon mari je pense parce qu’il n’est pas compliant et que c’est un agriculteur (…) parce que ça l’arrange bien d’avoir un médecin à la maison et que sinon il n’irait pas voir le médecin » « et j’ai la chance aussi de n’avoir jamais été confronté à un enfant malade (…) vis à vis des enfants, je pense que personne ne peut dire ce qu’il ferait s’il avait un enfant malade, c’est sur le tas qu’on voit et on a de la chance quand ça nous arrive pas quoi quand on voit tout ce qu’on voit » MG 14

7. Leurs conseils

« si je peux simplement dire un conseil, je pense qu’il ne faut pas le faire » MG 2

« j’espère que tu soigneras tes parents ! s’ils sont proches de toi et qu’ils en font la demande, je pense qu’il ne faut pas leur dire non, mais je pense que la décision t’appartient, elle appartient au

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médecin, au fils ou à la fille de prendre en charge, je pense qu’il faut le sentir, si tu ne le sens pas, fais le pas » MG 4

« j’ai de la chance parce que mes parents sont pas difficiles, c’est pas des gens compliqués, mais je pense que selon les parents c’est pas possible (…) si ça se passe bien, il faut le faire, c’est pas plus mal hein, moi je trouve que ça permet de garder une bonne relation (…) mais ça ça peut dépendre d’autres personnes, pour d’autres c’est plus compliqué » MG 5

« qu’est ce que je pourrais dire en plus ? que je ne conseillerais pas de prendre en charge vos parents (…) à cause de l’implication affective et parce qu’on n’est pas suffisamment objective » MG 13

« faut pas soigner sa famille mais on ne peut pas s’empêcher (rires) donc voilà » MG 14

C. Les médecins qui ont fait le choix de ne pas être médecin traitant de leurs parents

Parmi les médecins interrogés, ils sont 8 à ne pas être médecin traitant de leur parents parce qu’ils ne le souhaitaient pas.

Ces médecins seront donc les médecins du groupe 2. 1. Pourquoi ?

Voici les raisons ayant incité les médecins du groupe 2 à ne pas être le médecin traitant de leur propre parent:

Raisons pratiques :

-

distance géographique

« de ne pas être le médecin traitant, bah pour deux raisons: l’éloignement géographique » « la situation géographique fait que je ne peux pas être leur médecin traitant » MG 1

« pourquoi ? au départ, c’était la distance, c’est tout de même à 120km de chez moi et ils ont leur médecin traitant qu’ils ont depuis longtemps » MG 6

« je leur ai toujours dit de garder leur médecin traitant de proximité » MG 8

« je pense que la distance géographique c’est peut être notre chance aussi mais bon, je dis ça mais mon mari quand ça ne va pas, je l’envoie chez son médecin donc » MG 9

« et puis on n’habite pas à coté ça joue aussi, mais même si j’habitais à coté, je ne voudrais quand même pas être leur médecin »

« forcément la distance fait que de toutes façons c’est compliqué » MG 10 « parce que je suis à distance » MG 12

Figure

Tableau des durées de chaque entretiens et des durées de retranscription sur ordinateur mot à mot

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