Expériences d’écoutes : IMAPI

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Julien FERRANDO

Aix Marseille Univ

PRISM « Perception, Représentations, Image, Son, Musique », UMR 7061 Marseille, France

Comprendre le geste musical patrimonial dans un environnement

numérique :

Le projet I.M.A.P.I

.

Expérience d’écoute :

L’expérience sonore proposée à travers ce billet1_{a pour objectif de faire prendre conscience}

au lecteur / auditeur, de l’importance de l’acoustique et des différents points d’écoutes dans l’interprétation d’un corpus musical médiéval. Pour cet exemple il s’agissait de prendre en considération de deux situations d’écoutes historiquement informées : l’écoute papale et l’écoute de l’assemblée (autour des premiers rangées). Nous rappelons qu’à ce stade il n’était pas encore question de simuler l’acoustique médiévale (qui peut prendre en compte les tentures, les mobiliers, une proposition du Parcum Cantorum et le lutrin), mais d’utiliser l’acoustique d’aujourd’hui pour simplement poser les premières pierres d’un projet d’acoustique patrimoniale plus ambitieux. L’hypothèse première était donc de déterminer les différences de perception entre les deux localisations choisies en prenant comme lieu d’émission la place hypothétique des chantres à la troisième travée et surélevé de deux marches par rapport à la nef accueillant le public. Il s’agissait également de faire le point autour de la qualité de la définition de l’œuvre pour l’auditeur.

Pour situer au mieux l’expérience nous proposons deux extraits de deux œuvres interprétées par l’ensemble Diabolus in Musica 2_{: Le motet Firmissime fidem teneamus / Adesto, sancta}

trinitas / Alleluya, Benedictus ainsi que l’Agnus Dei d’Apt (Manuscrit 16 bis d’Apt, fol.12). Ces extraits ont été traités avec une réponse impulsionnelle recueilli à la troisième travée avec un décalage de quatre mètres vers le centre par rapport au mur sud de la chapelle. Cette situation prenait en compte les stalles et une rangée supplémentaire de tabouret3_{ainsi qu’un décalage}

suffisant pour placer le lutrin tel qu’il était supposé être au XIVe siècle4_{. Le micro de relevé}

acoustique a été placé à environ 1’80 à hauteur d’homme.

Lors des relevés de la chapelle les réponses impulsionnelles ont fait apparaître une résonnance longue de près de 10 secondes avant extinction totale (écouter la fin de l’extrait Agnus dei). Ce contexte n’était pas celui du XIVe siècle si nous prenons en compte le mobilier qui habillait les

1_{Ce billet se réfère en particulier à la partie « UNE PREMIÈRE EXPÉRIMENTATION DE L’ACOUSTIQUE :}

Reproduire deux points d’écoutes stratégiques » de l’article Comprendre le geste musical patrimonial dans un environnement

numérique : le projet IMAPI ,

2_{https://diabolusinmusica.fr}

3_{G. Colombe, « Au Palais des Papes : La Chapelle Clémentine », Mémoires de l’Académie de Vaucluse, seconde Série n° 35,}

1935., notes 13-14-15

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parois et le sol de la chapelle et autour des chantres. Nous avons donc ici une représentation contemporaine de la chapelle.

Guide d’écoute :

Pour une expérience efficiente il est important d’écouter les extraits avec un casque fermé, un lieu silencieux.

Etape 1 : Ecouter les extraits dans leur intégralité. Vous remarquerez lors de la première écoute (écoute papale) que le message semble brouillé. Cette sensation est due principalement au fait que la chapelle provoque une réponse réverbérante, par l’absence de mobilier. Avec l’écoute de l’assemblée vous vous rendrez compte d’une perte de définition dans les saisies des paroles du motet ou de l’Agnus Dei mais également du manque de définition entre les chanteurs placés à gauche des micros et ceux placés à droite. La comparaison est encore plus claire avec l’extrait Agnus Dei.

Etape 2 : Afin de bien saisir à ce stade les différences d’écoutes des œuvres dû au positionnement pape ou des premiers rangs de l’assemblée, il est important de réaliser une écoute comparative entre les deux sources d’un même morceau. Ecouter autour de 10’ l’extrait 1 et basculer immédiatement à l’extrait 2. Vous devriez détecter la réponse impulsionnelle papale comme plus définie, avec des voix plus présentes. Pour le second extrait vous devriez détecter un chœur lointain comme « un bloc sonore », sans pouvoir déterminer les voix séparément. Si vous n’arrivez pas à déterminer la différence lors de cette expérience, n’hésitez pas à passer de l’écoute 2 à l’écoute 1 des deux morceaux.

Afin de vous donner l’idée réelle de l’acoustique, je vous propose pour conclure un extrait d’une pièce pour orgue médiéval enregistrée par moi-même lors du festival de musique ancienne d’Avignon, dans la chapelle papale, troisième travée. Cette pièce, Luccente Stella est une pièce médiévale monodique : une ballata, issue du codex Rossi (XIVe). La prise de son a été réalisé

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avec quatre microphones mixées (Schoeps MK2 en deux Couples Stéréos). Un premier couple en premier plan à deux mètres de l’orgue en couple ORTF et un second à 8 mètres devant le public pour récupérer l’ambiance. Cet extrait vous permettra d’apprécier les délais naturels de résonnance qui apparaissent clairement dans le relevé virtuel des réponses impulsionnelles. Du fait du positionnement proche de la source la définition pourra paraître moins réverbérante. Dans le cas des relevés impulsionnels la source sonore (HP) et le microphone sont placés à une grande distance comme on peut le voir sur la photo suivante.

La monodie implique une grande liberté malgré le rythme. C’est une mélodie qui est organisée en phrase. C’est phrase amène une respiration entre elle. Des silences sont notés, d’autres sont implicites souvent un rythme long / bref. L’interprétation de cette musique s’est beaucoup nourri des apports des musiques de tradition orale dans l’apport de l’interprétation des musiques anciennes. Le silence agit comme un séparateur de bloc mélodique, c’est également comme le nommée François Decarsin un silence interstitiel un propagateur d’énergie qui se nourri ici de la résonance5_.

Cette expérience est donc une étape initiale dans le cheminement d’une reconstitution patrimoniale. À travers cette mise en son, j’ai donc cherché à démontrer l’importance des situations d’écoutes qui apparaissent dans l’usage de l’espace cérémonial de la chapelle. Malgré l’acoustique moderne, caractérisée par un temps de réverbération certainement bien plus long que ce qu’il devait être en 1362, l’auditeur pourra apprécie les différences claires entre la perception d’une polyphonie depuis la place de la chaire papale, ainsi que depuis les premiers bancs de l’assemblée au début de la quatrième travée.

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ECOUTES

Pour situer avec précision les extraits sonores, voici une représentation d’un plan au sol de la chapelle. Les points d’écoutes sont en jaune. Pour chaque point deux extraits sont disponibles (cliquer sur le lien plus bas).

. ECOUTE DU PAPE DEPUIS LA CHAIRE TRAVEE AUTEL CANCEL / Grille de séparation