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La sécurité routière chez les enfants : facteurs environnementaux : recension des écrits

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La sécurité routière chez les

enfants :

facteurs environnementaux

Recension des écrits

Marie-Sophie Banville

Étudiante à la maîtrise en urbanisme, Université de Montréal

Juan Torres

Professeur, Institut d’urbanisme, Université de Montréal

Dans le cadre du projet ESSAIM

Environnements scolaires sécuritaires : analyse des interventions municipales

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Introduction

1. Trafic et circulation routière (les aménagements routiers)

a. La vitesse

b. Le volume de la circulation c. Le sens de la circulation

2. Forme urbaine : la rue, les aménagements piétons

a. Les obstacles visuels

b. Les aménagements aux abords des écoles et des terrains de jeux

c. Le parcours

3. Forme urbaine : le quartier, l’apaisement de la circulation

a. Mesures (ponctuelles) d’apaisement de la circulation b. Schèmes d’apaisement de la circulation (approche

globale)

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Introduction

Depuis plus d’une décennie, une littérature scientifique s’est développée pour montrer l’influence de l’environnement sur le choix des modes de transport dits actifs (comme la marche et le vélo) comme modes de déplacement. Une littérature non moins riche explore les liens entre l’environnement et les conditions de sécurité des déplacements réalisés par les enfants. Il s’agit d’un domaine de recherche d’autant plus important que la marche est souvent considérée comme une forme d’activité physique, utile dans la lutte contre l’obésité, et qu’elle représente l’un des rares formes de déplacement indépendant des enfants (Casperson et al. 1985, dans OMS, 2002).

Dans le cadre d’une méta-analyse passant en revue 24 études publiées entre 1988 et 2010, Di Maggio et al., (2012) ont mis en évidence l’association existante entre l’environnement bâti et les risques d’accidents chez les piétons. En retenant uniquement les études s’étant intéressées aux enfants piétons, les auteurs concluent à une association significative entre les caractéristiques de l’environnement bâti (présence d’artères collectrices, de stationnement sur rue et de terrains de jeu, par exemple) et les risques de collisions impliquant des enfants piétons. L’étude conclut que des interventions, même modestes, sur le cadre bâti et la forme urbaine peuvent entrainer une réduction significative des risques encourus par les enfants piétons. Les interventions ayant pour but l’apaisement de la circulation, présentent d’ailleurs l’avantage d’être des mesures auto-applicables, ne demandant pas de surveillance extérieure pour être opérantes (Bellefleur et Gagnon 2011). De plus, de telles interventions permettent de réduire les inégalités sociales, les enfants issus de milieux défavorisés étant généralement surreprésentés dans les

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statistiques portant sur les accidents routiers impliquant des enfants piétons (Jones et al., 2005; Grundy et al., 2010). Enfin, les interventions sur l’environnement physique concurrent à une amélioration de la sécurité routière pour tous les usagers (indépendamment de leur âge) en évitant de s’appuyer uniquement sur les facultés cognitives de ces derniers (Mueller et al., 1990).

La présente section aborde, en premier lieu, les questions liées à la sécurité des enfants piétons en relation avec trois caractéristiques de la circulation routière : la vitesse, le volume et le sens. Ensuite, le propos se dirige vers des caractéristiques du cadre bâti proprement dit, ayant une influence sur la circulation. Nous nous pencherons particulièrement sur l’impact d’éléments tels que les obstacles visuels et les aménagements aux abords des écoles. En considérant une échelle urbaine un peu plus large, cette revue de littérature aborde en dernier lieu la questions des mesures d’apaisement de la circulation et de leurs impacts sur la sécurité des enfants piétons.

1.

Trafic et circulation routière : les aménagements

routiers

a. La vitesse

Si la vitesse de circulation est l’expression d’un comportement, il n’en demeure pas moins qu’elle fait partie de l’environnement piéton, et qu’elle n’est pas étrangère au cadre bâti. La vitesse des véhicules aurait une influence décisive sur les risques d’accidents impliquant des enfants piétons (Liu et Yang, 2003; Mueller et al., 1990; Roberts et al., 1995; Stevenson et al., 1995; Stevenson 1997; et Wazana et al., 1997). Ewing et Dumbaugh (2009) soulignent à ce titre que la vitesse est le

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déterminent principal de la sévérité des blessures lors des accidents routiers impliquant des piétons. Par ailleurs, la relation entre la vitesse et la sévérité d’un accident est non-linéaire : le taux de mortalité chute abruptement entre 64 km/h (40 mph) (85% de chance que l’accident soit fatal) et 48 km/h (30 mph) (45% de chance que l’accident soit fatal). À 40 km/h (20 mph), la mortalité d’un accident routier impliquant un piéton adulte avoisine 5% (Zegeer et al. 2002, cités dans Ewing et Dumbaugh 2009).

Les études cas-contrôle de Mueller et al. (1990), Roberts et al. (1995) et Stevenson (1997) arrivent à des conclusions similaires en affirmant qu’une limite de vitesse supérieure à 40 km/h est associée à une incidence plus élevée d’accident et que cette incidence se stabilise à des limites de vitesse supérieures. En mettant en relation 67 cas d’enfants piétons blessés lors d’un accident routier et 134 cas témoins d’enfants du même âge et du même sexe dans l’État de Washington, l’étude de Mueller et al. (1990) conclut qu’une vitesse maximale permise de 40 km/h diminue significativement les risques de blessures. À titre comparatif, les vitesses maximales permises allant de 45 à 55 km/h impliquent un risque d’accident 3 fois plus élevé, tandis qu’une vitesse affichée supérieure à 64 km/h (40 mph) implique un risque d’accident 6 fois plus élevé. Il est à noter que ces ratios internalisent plusieurs variables, notamment les revenus des cas témoins et contrôles.

L’étude de Roberts et al. (1995) a été menée à Auckland en Nouvelle-Zélande et comporte un échantillon plus large (190 cas d’enfants blessés pour 380 cas témoins, appariés selon l’âge et le sexe) et appuie les résultats obtenus par Mueller et al. (1990) en affirmant que des limites de vitesses affichées supérieures à 40 km/h sont associées à un risque plus élevé d’accident.

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L’étude de Stevenson et al. (1995) se distingue toutefois au niveau méthodologique puisqu’elle considère la vitesse réelle pratiquée dans les cas et les cas contrôle, plutôt que la vitesse affichée. En prenant en considération le volume de circulation sur une artère, les auteurs concluent que la proportion de véhicules excédant la limite affichée est associée à un risque accru de blessures chez les enfants piétons à hauteur de 1,04 pour chaque dépassement de 1% de la limite de vitesse permise.

Une étude (Liu et al., 2003) porte sur l’impact des collisions automobiles sur les enfants piétons en prenant en considération les caractéristiques physiques de deux enfants type de 6 ans et 15 ans. Les simulations menées à l’aide de modèles mathématiques démontrent que la gravité des blessures subies diminue drastiquement en fonction de la vitesse au moment de la collision lorsque celle-ci passe de 50 à 30 km/h. Les blessures crâniennes sont notamment moins fréquentes à cette vitesse. L’étude démontre que, dans des conditions similaires, les risques de blessures crâniennes sont plus élevés chez les enfants de 15 ans que ceux de 6 ans. Les enfants plus jeunes (6 ans) courent plus de risque de blessures dans la région pelvienne et dans la partie supérieure des jambes. Tout en prenant compte des limites de l’approche par simulation mathématique, les auteurs constatent néanmoins l’efficacité d’une limite de vitesse de 30 km/h pour diminuer les incidences de blessures crâniennes.

b. Le volume de la circulation

Les résultats présentés ci-haut, mettant en lien notamment la vitesse et la sévérité des accidents impliquant des enfants piétons doivent être compris à la lumière d’un autre facteur décisif : le volume de la

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circulation. Selon Ewing et Dumbaugh (2009), ce facteur est associé à la fréquence des accidents. L’étude de Mueller et al. (1990) affirme qu’une artère canalisant une circulation de 15 000 véhicules par jour correspond à un risque trois fois plus élevé d’accidents qu’une route ayant un débit de 5 000 véhicules par jour. Roberts et al. (1995) associent aussi fortement le risque d’accidents et le volume de la circulation. Selon leur étude, les risques d’accident encourus par les enfants piétons sont 14 fois plus grands sur les rues achalandées présentant un débit de plus de 750 véhicules à l’heure que sur les rues calmes présentant un débit de moins de 250 véhicules à l’heure.

L’étude de Stevenson et al. (1995) nuance ces résultats en montrant que le risque d’accidents double pour chaque augmentation de 100 véhicules par heure. La méthodologie prend en considération le volume de la circulation au jour de la semaine et à l’heure précise de la collision (plutôt qu’une mesure générale quotidienne), donnant ainsi des résultats plus fiables.

Ceci étant dit, il est important d’interpréter les résultats en considérant que les artères présentant un haut débit de circulation et plusieurs voies sont souvent évitées par les piétons, particulièrement par les enfants. Dannenberg et al. (2003) utilisent à ce sujet le terme de « hazard busing » pour faire référence au recours à des modes de transport motorisés pour assurer le transport d’enfants sur de courtes distances afin d’éviter les artères à risque. Stevenson et al. (1995) abondent dans le même sens en affirmant que les artères qui combinent des excès de vitesse et un fort volume de circulation sont relativement peu accidentogènes puisqu’elles sont tout simplement évitées par les enfants piétons.

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Nous avons répertorié une seule étude s’intéressant à l’impact du sens de la circulation sur les incidences d’accidents impliquant des enfants piétons. Il s’agit du travail de Wazana et al. (2000), qui conclut que le taux de blessures est 2,5 plus élevé dans les rues à sens unique que dans les rues à double sens. Les auteurs tempèrent ce résultat en précisant que les quartiers dans lesquels se retrouvent la majorité des voies à sens unique sur leur terrain (Hamilton, Ontario) sont des secteurs défavorisés mais maintiennent toutefois que le poids statistique de la variable « sens de la circulation » demeure suffisamment important pour qu’elle soit considérée comme un facteur indépendant. Les auteurs mentionnent aussi que le design des rues à sens unique tend parfois à « pardonner » plus facilement les erreurs d’inattention des conducteurs (forgiving design), rendant ces derniers moins alertes à la présence de piétons. Or, le détournement du sens de la circulation au profit d’une voie à sens unique est un outil souvent privilégié pour hiérarchiser un réseau routier et éviter ainsi la circulation de transit (Bellefleur et Gagnon, 2011). L’importance du sens de la circulation d’une voie doit donc être comprise la lumière de divers facteurs, surtout contextuels.

2.

Forme urbaine : la rue, les aménagements piétons

Sur le plan de la forme urbaine, la configuration d’une rue ainsi que de son cadre bâti ont une influence décisive sur la sécurité des enfants piétons. Étant en processus de développement à la fois cognitif et physique, les enfants sont des usagers de l’espace public exposés à des risques spécifiques qui exigent des aménagements adaptés.

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a. Les obstacles visuels

La présence d’obstacles visuels sur une rue détermine de manière importante le risque d’accident chez les enfants piétons (Mayr et al., 2003; Mueller et al., 1990; Roberts et al., 1995; Stevenson et al., 1995). Tout comme l’absence de trottoirs, l’obstruction du champ de vision des enfants causée par la présence de stationnement sur rue (notamment le stationnement de par et d’autre des intersections et des traverses piétonnes) augmente les risques d’accident de façon significative. Dans une étude rétrospective échelonnée sur 12 ans et analysant 217 cas d’enfants piétons impliqués dans un accident routier dans le compté de Styria (Allemagne), Mayr et al. (2003) concluent que 45% des accidents étaient attribuables au manque de visibilité du conducteur du véhicule et/ou de l’enfant piéton (39%). L’étude cas-contrôle menée à Perth en Australie par Stevenson et al. (1996) abonde dans le même sens tout en diminuant quelque peu la force de la relation entre la présence d’obstacles visuels et le risque d’accident. En appariant 100 cas d’enfants piétons blessés pour 400 cas contrôle sélectionnés de façon aléatoire et en fournissant une évaluation exhaustive (plus de 40 variables) de l’environnement urbain, les auteurs concluent que 20% des accidents sont associés à la présence d’obstacles visuels entravant le champ de vision de l’enfant piéton. À cet égard, les auteurs avancent qu’une réduction de 15% des obstacles visuels en bordure de route pourrait générer une baisse de 8% du nombre d’accidents impliquant des enfants. Les auteurs suggèrent donc de relocaliser les poubelles, cabines téléphoniques, panneaux publicitaires et végétation de façon à ne pas obstruer le champ de vision de l’enfant et du conducteur.

La question du stationnement sur rue est cependant plus complexe. D’une part les stationnements sur rue en épi exposeraient les piétons à

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un risque plus élevé que les stationnements parallèles au trottoir (McCoy et al., 2001 cité dans Ewing et Dumbaugh, 2009). D’autre part, le stationnement sur rue procure une barrière protectrice entre le trottoir et les piétons (Ewing et Dumbaugh, 2009). Ceci étant dit, l’implantation d’éléments en bord de route (stationnement, mobilier urbain, végétation, etc.) réduit le cône de vision du conducteur, induisant ainsi une réduction de la vitesse. C’est la conclusion à laquelle arrive Naderi (2003) lors de son étude sur l’impact des aménagements routiers et piétons sur le centre-ville de Toronto, qui se sont traduits par une réduction des accidents variant entre 5 et 20%. La question de la réduction des obstacles visuels afin de favoriser la sécurité des enfants piétons doit donc être envisagée avec circonspection afin de trouver un équilibre entre la sécurité des enfants piétons, l’attention suscité auprès des usagers de la rue et l’amélioration de l’expérience collective de l’espace public.

b. Les aménagements aux abords des écoles et terrains de jeux

Certains lieux publics sont essentiellement associés à une clientèle juvénile et exigent une attention particulière lorsqu’il est question de la sécurité des enfants piétons. Dans une étude cas-contrôle menée à Düsseldorf (Allemagne) présentant 170 cas d’enfants piétons blessés pour 168 cas contrôle, Von Kries et al. (1998) ont constaté que l’absence de terrains de jeux aux environs de la maison d’un enfant est associée à un risque accru d’accidents. En effet, les risques d’accident étaient 1,8 fois plus élevés dans un quartier présentant un seul terrain de jeu par rapport à un quartier présentant quatre terrains de jeu ou plus. Pour sa part, l’étude de Mueller et al. (1990) suggère que

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l’absence de clôtures autour d’un terrain de jeu ne constitue pas une donnée statistiquement signifiante en lien avec l’incidence d’accidents. Les résultats obtenus par l’équipe de Clifton et al. (2007) contrastent avec les conclusions de l’étude menée par Von Kries et al. (1998) : en s’intéressant plus spécifiquement aux terrains de jeu localisés aux abords des écoles, les auteurs concluent à une association positive entre la présence de ces équipements et le taux d’accident. Les auteurs expliquent cette situation par le fait que ces terrains de jeu attirent des enfants plus jeunes, notamment en dehors des heures d’ouverture des écoles. Ils soulignent aussi qu’une étude plus approfondie des habitudes de mobilité des enfants en lien avec l’accès à ces sites en dehors des heures d’ouverture des établissements scolaires serait nécessaire. Clifton et al. (2007) ont d’ailleurs associé la présence de débarcadères autour des écoles, indicateurs d’une mobilité motorisée pour le transport des jeunes, à une faible incidence d’accidents.

c. Le parcours

Peu d’études portent sur les activités auxquelles s’adonnaient les enfants piétons avant d’être impliqués dans un accident routier. L’étude de Posner et al. (2002) s’est appuyée sur un sondage mené auprès de 139 enfants âgés entre 4 et 15 ans et impliqués dans une collision avec un véhicule afin de dégager une relation entre les routines de mobilité des enfants et les risques d’accident. Au final, les auteurs n’établissent aucune corrélation entre le niveau d’exposition au risque et la nature des activités précédent l’accident. Autrement dit, en milieu urbain, les enfants auraient une vulnérabilité au trafic indépendante du motif de leur présence dans l’espace public, rendant impossible l’identification précise d’activités accidentogènes. Ce résultat suggère la difficulté d’établir une frontière nette entre le

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déplacement et le jeu chez l’enfant, donnée importante à prendre en compte lors de l’étude des pratiques de mobilité chez l’enfant (Torres 2010). Dans l’étude de Posner et al. (2002), 29% des enfants interrogés jouaient avant l’accident, alors que 71% ont été frappés durant un déplacement piétonnier. Il est à noter que seulement 15% de ces derniers ont été blessés lors d’un déplacement vers l’école, malgré le fait que 84% des enfants interrogés marchaient à l’école au moins une fois par semaine.

3.

Forme urbaine : le quartier, l’apaisement de la

circulation

Il est important de considérer, dans une perspective écologique, les complexes relations qui existent entre les différents facteurs environnementaux ayant un impact sur la sécurité des enfants piétons présentés plus haut. Prendre en considération l’interaction entre ces facteurs permet de dégager un portrait à la fois plus large et plus précis du quartier au sein duquel évolue un enfant piéton et des dynamiques urbaines qui l’animent. Cette interaction est précisément l’objet des schèmes d’apaisement de la circulation. Contrairement aux mesures ponctuelles et isolées d’apaisement de la circulation dans l’espace urbain, les schèmes d’apaisement de la circulation comportent plusieurs interventions, sur l’ensemble d’un secteur. Selon Bellefleur et Gagnon (2011), les stratégies globales prennent en compte trois facteurs importants : la dispersion des collisions, la migration des collisions et la réduction générale du volume de la circulation. En effet, une intervention sur un lieu accidentogène considéré comme névralgique peut résoudre une problématique locale mais ne permet pas d’intervenir sur des lieux qui présentent un bilan d’accidents plus modeste mais qui, cumulés, peuvent représenter une

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part significative des accidents. Une stratégie globale permet aussi d’éviter le phénomène de migration des collisions qui peut survenir lorsque des trajets alternatifs permettent aisément d’éviter les mesures d’apaisement de la circulation. De plus, l’efficacité des schémas d’apaisement de la circulation ne se mesure pas exclusivement en termes de sécurité routière. Ils ont aussi un impact en termes de réduction de la pollution de l’air et de la pollution sonore, ainsi que de la promotion des transports actifs. De façon générale, une stratégie globale d’apaisement de la circulation favorise une appropriation grandissante de l’espace urbain (Bellefleur et Gagnon, 2011).

Les différents dispositifs d’apaisement de la circulation (qui peuvent être combinés et échelonnés dans le cadre d’une intervention planifiée pour constituer un schéma d’apaisement de la circulation) n’ont pas tous la même efficacité tout dépendant de leur contexte d’implantation. Globalement, elles ont pour but la diminution de la vitesse et du volume de la circulation. Il est possible de distinguer 4 stratégies d’apaisement de la circulation (Ewing, 1999) :

1) Rétrécissement de la voie

L’élargissement des trottoirs, la diminution du nombre de voies (road

diet/régime routier), l’implantation de terrepleins et de refuges piétons

au centre des voies, la présence de goulots d’étranglement ainsi que les carrefours giratoires permettent de réduire à la fois la vitesse et le volume de la circulation.

2) Déviation verticale

Les dos d’âne et coussins berlinois, les intersections surélevées et les jeux de texture au sol, sont autant d’exemples de déviations verticales qui visent surtout un contrôle de la vitesse.

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Les chicanes et l’introduction d’obstacles physiques et visuels induisent un ralentissement chez l’automobiliste ainsi qu’un niveau d’attention plus élevé, favorisant un meilleur partage de la route entre les usagers.

4) Restriction d’accès

Demandant un niveau d’intervention plus élevé, ces mesures incluent les changements dans le sens des voies, l’introduction de culs-de-sac et la création d’espaces partagés (naked street, zone de rencontre, woonerf, etc.).

a. Mesures (ponctuelles) d’apaisement de la circulation

Plusieurs études portent sur l’efficacité des mesures d’apaisement de la circulation implantées de manière ponctuelle. Bellefleur et Gagnon (2011) soulignent cependant que plusieurs de ces études ont opté pour un devis de recherche avant-après qui « tend à surestimer systématiquement l’efficacité des mesures d’apaisement » (p. 18) ; il est donc important d’interpréter ces résultats avec prudence et de privilégier les études utilisant d’autres méthodes (la méthode empirique de Bayes étant citée en exemple1).

L’équipe de Tester et al. (2004) est l’une des seules s’étant directement intéressée à l’efficacité des mesures d’apaisement de la circulation sur la sécurité des enfants piétons. Leur démarche

1 Selon Bellefleur et Gagnon (2011) « cette méthode permet de prendre en compte les

changements de volume de circulation, la tendance générale concernant le nombre de collisions et l’effet de régression à la moyenne (Persaud et Lyon, 2007). Elle utilise des données provenant de sites de contrôle, le nombre et la gravité des collisions aux sites traités avant l’installation des mesures d’apaisement, ainsi que les données concernant l’évolution des volumes de circulation pour estimer, grâce à des modèles de régression, le nombre et la gravité des collisions auxquels il aurait été raisonnable de s’attendre sans l’installation des mesures d’apaisement. L’efficacité de l’intervention est ensuite obtenue en comparant le nombre et la gravité des collisions ayant eu lieu depuis l’intervention à ceux anticipés. » (p. 19-20).

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observationnelle de type cas-contrôle menées à Oakland (États-Unis) s’est appuyée sur 100 enfants impliqués dans une collision dans un rayon de 0,4 kilomètre de leur résidence, appariés à 200 enfants selon l’âge, le sexe et leur lieu de résidence (rue locale). Les résultats de l’étude confirment qu’une plus grande proximité d’un dos d’âne allongé du lieu de résidence d’un enfant diminue la probabilité que l’enfant soit hospitalisé suite à des blessures résultant d’un accident routier. Les chances de collision deviennent encore plus faibles lorsqu’un dos d’âne allongé est présent sur la rue où l’enfant réside. Les auteurs concluent ainsi que la présence de mesures d’apaisement de la circulation telles que les dos d’âne allongés ont un impact réel sur la sécurité des enfants piétons. À ce sujet, il est important de noter que les dos d’ânes allongés ont une efficacité plus grande que les simples dos d’ânes puisqu’ils favorisent une vitesse plus constante à l’approche et à la sortie (Ewing, 2009).

D’autres mesures d’apaisement comme les giratoires à une voie (Retting et al. 2001 cité dans Bellefleur et Gagnon, 2011) et les déviations verticales (Mountain et al., 2005 cité dans Bellefleur et Gagnon, 2011) ont prouvé leur efficacité pour réduire les collisions impliquant les piétons, sans spécification quant à l’utilité de ces mesures pour les enfants piétons. De plus, il a été prouvé que des interventions modestes sur le cadre bâti de la rue peuvent significativement réduire les incidences d’accidents impliquant des enfants. C’est le cas du travail de Retting et al., (2003), qui concluent que l’ajout de trottoirs, de ronds-points à sens unique, d’ilots et un meilleur éclairage permettent de diminuer les risques d’accidents.

b. Schèmes d’apaisement de la circulation (approche globale)

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Bien qu’il soit utile et nécessaire de mesurer individuellement l’efficacité des différentes mesures d’apaisement, une analyse plus globale de l’interaction entre ces différentes mesures dans le cadre d’une approche globale permet une meilleure évaluation de leur efficacité. Bellefleur et Gagnon (2011) identifient dans la littérature quatre effets principaux découlant de l’implantation d’une stratégie globale :

i. Réduction des collisions

La méta-analyse de Elvik (2001) portant sur 33 études évaluant l’efficacité des schèmes d’apaisement de la circulation suggère que l’introduction de ces mesures permet de réduire le nombre d’accidents dans une proportion de 15% ; cette réduction peut atteindre 25% sur les rues résidentielles et 10% sur les rues principales. L’auteur a cependant considéré des études présentant un devis simple « avant-après » qui, tel que mentionné plus haut, tend à surestimer l’efficacité des mesures. En isolant ces études de la méta-analyse, Bellefleur et Gagnon obtiennent un effet légèrement plus faible, mais toujours statistiquement significatif, avec une réduction des collisions avec blessures de 12%. L’étude de Grundy et al. (2010) porte sur l’impact de l’implantation de zones de 20 mph (32 km/h) à Londres sur la réduction des accidents impliquant des piétons. Les 399 zones implantées auraient engendré une baisse de 41.9% des collisions.

ii. Protection des usagers de la rue les plus vulnérables

L’étude de Grundy et al. (2010) citée plus haut mentionne par ailleurs que les schémas d’apaisement de la circulation implantés à Londres sont à l’origine d’une réduction de moitié des accidents sévères ou causant la mort et impliquant des enfants. Par ailleurs, ces réductions

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sont particulièrement importantes chez les très jeunes enfants (0-5 ans et 6-11 ans), de même que chez les enfants cyclistes âgés entre 0 et 15 ans. Toujours au Royaume-Uni, l’étude menée par Jones et al. (2005) établit aussi un lien fort entre l’implantation d’un schéma d’apaisement de la circulation et la protection des usagers les plus vulnérables comme les enfants. L’étude portait sur deux villes similaires au Royaume-Uni ayant introduit des mesures d’apaisement de la circulation et l’impact de ces mesures en termes de sécurité des enfants piétons au regard, notamment, du statut économique des quartiers. Dans la ville A, les secteurs défavorisés ont accueilli 4,80 fois plus de mesures d’apaisement que les secteurs mieux nantis, contrairement à un rapport de 1,88 dans la ville B. En chiffres absolus, la ville A introduit 891 mesures et la ville B, 553 mesures. Les résultats démontrent une corrélation positive entre la densité des mesures d’apaisement dans un quartier et la diminution du taux d’accident impliquant de jeunes piétons puisque la ville A affiche une chute jugée significative dans les incidences de collision.

iii. Réduction des inégalités

Dans le cadre de la même étude évoquée ci-haut, Jones et al. (2005) se sont intéressés à l’impact de l’implantation des mesures d’apaisement sur la réduction des inégalités sociales se traduisant par un taux de collisions chez les enfants issus de classes sociales défavorisées. Les résultats indiquent que les taux de collisions chez les enfants vivant dans les quartiers défavorisés présentant une forte densité de mesures d’apaisement dans la ville A ont significativement chuté (3.2 en 1992-1994 à 2.0 en 1998-2000). Bien que cette étude ne peut établir de lien clair entre la densité des mesures d’apaisement et la réduction des inégalités, les auteurs avancent tout de même que la densification des mesures d’apaisement dans les quartiers défavorisés

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présente le potentiel de réduire les inégalités sociales auxquelles sont confrontées les enfants.

iv. Évitement du phénomène de migration des collisions

Finalement, il appert que l’implantation d’une stratégie Globale (sur l’ensemble d’un secteur) d’apaisement de la circulation permet d’éviter un phénomène de migration des collisions (Elvik, 2001; Grundy

et al., 2010). Dans leur étude publiée en 2009, Grundy et al. (2010) ne

signalent pas de migration des collisions associées à l’implantation de 399 zones de 20 mph à Londres. Par ailleurs, les auteurs ont observé que l’effet des zones apaisées perdure même en périphérie de celles-ci en notant une baisse de 7,4% des collisions.

c. Forme urbaine et densité

La forme urbaine générale d’un secteur a une incidence non seulement sur la sécurité routière mais aussi sur les pratiques de mobilité active (Ewing, 2005). Ewing suggère en effet qu’il existe une association entre les formes urbaines et le développement urbain et le choix modal actif. L’auteur mentionne cependant que plusieurs avenues doivent encore être explorées relativement aux liens qui unissent forme urbaine et mobilité (liens entre l’environnement bâti et l’activité physique et la santé publique, par exemple). En ce qui a trait à la mobilité des enfants, l’étude produite par Clifton et al. (2007) suggère que les milieux caractérisés par une mixité des usages, un ratio important de population non-blanche et une densité élevée présentent un taux d’accidents sévères plus élevés impliquant des enfants piétons. Ceci s’expliquerait par un nombre d’accidents plus élevé en termes absolus (population plus élevée) mais l’étude ne parvient pas à démontrer pourquoi les accidents sont de nature plus sévère. Il est

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cependant important de nuancer ces résultats en précisant que, suivant un article publié par Ewing en 2009, les milieux urbains denses présentent plus de kilométrage per capita et une vitesse généralement plus modérée ce qui sous-entend un risque d’accident mortel plus faible. Dans le même ordre d’idées, Ewing ajoute que les rues dans les milieux urbains denses présentent un design plus restrictif pour les conducteurs (less forgiving design, pour reprendre le terme utilisé par Wazana et al. 2000) qui assure une plus grande sécurité pour les autres usagers de la route, notamment les enfants piétons.

Conclusion

Les écrits recensés mettent en évidence l’influence et la diversité des facteurs environnementaux de la sécurité routière chez les enfants. L’évidence empirique, à la base des études consultées, montre que certaines relations entre les accidents et les attributs du milieu sont fortes, alors que d’autres sont plutôt modestes, l’interprétation de données devant se faire avec prudence. Ceci étant dit, les écrits apportent déjà des repères utiles pour analyser des milieux scolaires québécois et pour orienter les interventions qui façonnent ces milieux. Ces constats doivent être mis en relation avec ceux que l’on peut faire sur la base d’études qui portent sur d’autres dimensions de la sécurité routière chez les enfants, notamment les facteurs individuels et sociaux.

Références

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circulation urbaine et santé : une revue de littérature / Version Préliminaire. Québec : Centre de collaboration nationale sur les

politiques publiques et la santé.

Clifton, K. J., & Kreamer-Fults, K. (January 01, 2007). An examination of the environmental attributes associated with pedestrian-vehicular crashes near public schools. Accident Analysis and Prevention, 39, 4,

(20)

708-715.

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