• Aucun résultat trouvé

Le roman d'aventures humoristique de Jean Martet

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Partager "Le roman d'aventures humoristique de Jean Martet"

Copied!
118
0
0

Texte intégral

(1)
(2)
(3)

A Thesis Presented to

the Faculty of the Department of French McGill University

In Partial Fulfillment

Of the Requirements for the Degree Master of Arts

by

Wilfred Philip Allard .ll>ril 1941

(4)

CHAPITRE PAGE I. LE ROMAN D1AVENTURES RENFERME DANS LE GRAND CADRE

DU ROMAN 1

II. L'EVOLUTION DU ROMAN D'AVENTURES III. LA VIE DE JEAN MARTET

IV • L' OEUVRE DE JEAN MARTET La roman historique Le roman exotique Le roman picaresque Le roman philosophiqua V. L1bRT DE CONTER VI. L'HUMOUR

VII. L'HUMOUR DE JEAN MARTET L'influence du Midi

L'ironie qui s•exarce sur autrui L'ironie qui s'exerce sur soi-mame Litotes

La philosophie de son humour L'esprit de Martet Le go1lt du peuple 6 18 32 33 42 50 56 70 83 92 93 97 9ti

(5)

Le eontraste impr~vu La conclusion

VIII. LA CONCLUSION

BIBLIOGRAPHIE

luo

103 105 lOo

(6)

Le vrai roman tiendra toujours de 1 1 ~pop~e qui l'a angendr~. C'est une 'histoira•. Il faut qu'elle soit vivante, h~rotque ou comiqueo Les personnages doivent exister, vivre dans laur action.l

Les premiers romans ~talent des romans d 1avantures.

L 1Iliade est un roman d'aventures guerrieres et l'Odyss~e

est un roman d'aventures maritimes. Peu importe s•ils soient en vars; la prose n' a cornmenc~ vraiment qu' avec 1' imprimerie quand on pouvait s•adresser

a

un seul lecteur en particulier. Done, le roman est aussi vieux que la litterature elle-m~me.

Cependant, le roman, le genre litteraire qui raconte une his to ire ou les personnages semblent vi vre, e. subi des

trans-formations complexes et inattendues

a

travers les siecles selon les ~v~nements et les caprices politiques, scientifiques, et religieux.

L'amour se male A l'aventure sensationnelle au moyen ~ge et comme r~sultat nous avons les romans chevaleresques uu

cycle d'Arthur et les romans byzantins comma Aucassin et

Nicolette. Pendant des si~cles antlers, les romans d•aventures

(7)

sont anim~s du m~me esprit et presque taus ecrits du m~ma

style. La description des personnages de cas romans manque d'originalit4--"les portraits de femmes, invaris_blement belles et blondes, de bons chevaliers, invariablement tendres et

1

vaillants. tt

Vers la fin du dix-septi~me siecle, le roman comma genre

litteraire fait qua1que progres avac la Princesse de C1eves.

ce roman nous fait oub11er 1es recits ou i1 y a toujours les

mftmes aventures, les m3mes galanteries, et·ou tous 1es

per-sonnages se ressemb1ent. !1 essaie de representer la vie

telle qute1le est.Ains~,le realisme fait son debut dans le

roman.

.

...

Ce n' as t qu • avec Rous se au cependant que le ·roman sera

eleve au niveau de la grande litterature. Jusqu1ic1, le

ro-man en France n'est pas admis ~ la dignite du genre regu1ier.

EVidammant, ne voulant que divertir, i1 est classifie comma

frivoleo Tout an animant et !'intrigue et les personnages,

Rous se au a voulu dans la Nouvelle Halo! se ~difial" et ins truire.

Le

roman d'aventures du moyan ~ge avec ses coups u'epees et

ses grands exploits deviant le roman d'amour, ce qu'il est

g~neralement reste.

1.

ae

Jul1evil1e, Petit, Histoire de la Langue et de la

(8)

De aorta que l'histoire du roman en

France est devenue l'histoire de l'~volution du sentiment de l•runour en m~me temps que celle de l•~volution de la societe. Les deux se 1 m~lent en realite d'une mani~re inextricable.

Le roman psychologique se rapporte aux manifestations de la societe--la societe telle que llecrivain l•envisage. c•ast la sorte de roman

a

J la_quelle s' adonnent les Fran~ais car ils sont particuli~rament un peupla de 11 soci~t~t·. Pour converser

avec les gens i l faut les co:n::--..a1tre. Pour cette raison, le Fran~ais pr~fere d'habitude un roman romantique et r~aliste tel que Madame Bovary de Flaubert ~ un roman dtaventures

ex-traordinaires et fantasques cormne Treasure Island de Stevenson. Le Fran~ais ne cherche pas una "evasion hors la vie". Il veut

approfondir sa connais sance de cette cr~Hture

complexe--1 'homme. C • est dans ea genre de romans--le roman d a moeurs, le roman pbilosophique, le roman realiste, le romari moraliste--que le Fran~ais tient le premier rang. Citons quelques noms pour en ~tra s1lrs: Georges Sand, Stendhal, Balzac, Flaubert, Zola, de Maupassant, Bourget, Barres, Homains, Gide, Holland, du Gard, etc ••

La Grande Guerre (1~14-l~lb) a donn6 une impulsion

.

etonnante au roman d•aventures. ces ouvrages d'imagination

dtapr~s-guerre refl~tent la joie de vivre qui s•est emparee

(9)

d•une generation maltraitee par le destin.

les jeunes gens une impatience

a

s'enrichir, un penchant vers

1' amusement tumultueux, un

de

sir vif de rompre avec lb.

tra-dition sans faire aucun cas des circonstances. Les romanciers

ne peuvent resister

a

la tentation de refleter dans leurs

liv-res toutes ces possibilites. La jeunesse litteraire demande

seulement

a

la vie de valoir la peine de vivre, et elle ne

peut trouver ce prix que dans 1' a venture s inL'-_liere, la

sensa-tion violente, la possession de l'excepsensa-tionnel. La genre

narratif, plain dtelan, cherche

a

plaire

a

tous les go~ts par

una vigueur et un pittorasque du style, par un entrain

imagin-atif, et par des intrigues audacieusement executees. Si nous

ajoutons

a

cette aisposition d'apres-guerre d'~chapper ~la

realite l'influence anglaise de Stevenson, Conrad, et Wells,

nous comprenons tout de suite cette attirance vers le roman

d'avent~res parru les modernes fran~ais.

:Jn a. tache de demontrer brievement que. 1 •origine illustre du roman ~-i e tue 1 et ai t le roman d' a van tu res. On a. pu voir le s

transformations nombreuses quta subies le genre original; ces

transformations sont d~es en grandes p&rtie

a

l•a.ddition des

elements d'amour, de satire, d'humour, de vraisemblance, de

sentiment, et de philosophie. A cause de ces changements

graduels, le roman s'est eleve au rang de la grande

(10)

roman ea qui n'a aucune histoire et qui n'est, en sornme, que l'axpression de sa propre philosophie de la vie, une ~tude des profondeurs de son ~.me. 0elon notre dafinition

au premier abord, ce n'est pas un roman. Decoues par la guerre de 19141 desillusionnes de la civilisation qu'ils auraient voulu sauver par la philosophie, les

e

cri vains d 1 apr~s-guerre se sont livres

a

un genre ancien--le roman d'aventuras. Ayant situe le roman u'aventures dans le grand cadre du ilromo..n", il nous resta

a

determiner les elements que contient le roman d'aventures actual, et les sources litteraires oui ont fait ~valuer ce genre en par-ticulier.

(11)

traits car~~cteri.st-tc_ues: l•exotisme, l'~vocation du passe, le picaresc:_ue et 1 r amour. On verra :.ue quel~_._ues romanciers

con-temporains comma Morand, Benoit, MacOrlBn, et Martet, s 1occupent

d•une fa(~on .. differente de ces traits essentials •

D'abord, il nous importe de savoir comment ce genre de

roman a atteint la forme qu'elle a aujourd•hui. Quelles oeuvres litteraires ont ete la source du romBn

u

1avsntures? Est-ce

~::.:ue ce genre est relativement nouveau? cuels romanciers de nos jours representent le plus avantageusement ce g8nre par.-ticulier du roman?

on a deja signale que la forme la plus ancienne du roman etait le roman d1aventures. Tous les deux l'Iliade et

l'Ody-see appuyaient sur ltexotisme pour interesser le lecteur. Les aventures sensationnelles avec un decor

a

l'etrsnger ont

d'ordinaire un plus grand attrait pour le lecteur c1ue celJes :.;;_ui ont lieu dans son propre pays. at-ace

a

l'ere d'expansion apres Jesus-Christ, le thettre des aventures couvre tout le pOUrtour de lE j,I/,ciiterranee. Ce SOnt presque touJours les

mAmas aventures: naufrages, pirates, sorcieres, infortunes et fortunes incroyables de jeunes personnes bien nees.

(12)

Le livre qui inaugure vraiment en France le roman d'aven-e

tures et qui sera le plus imite au XVII siecle c'est Polexandre de Gomberville. On y trouve des aventures assez puariles puis~ qu'il n'est question que des voyages d'un heros qui court le monde entier pour punir ceux qui osent soupirer pour la belle

Alcidiane. Au cours de ces peregrinations, la heres nous fait voir des combats de corsaires, des courses sur mer, des

tem-p~tes. Gomberville, en peignant l'aspect des pays lointains

comma le Mexique, les Iles canaries, las Antilles, enrichit par la nouveaute de ses descriptions le fond romanesque de ea genre naissant. pourtant, l'aventure ella-m~me n'a guere change

a

travers les sieclas.

Rousseau et son disciple Bernardin de Saint-Pierre ont eu recours au pittoresque dans leur description de paysagas. Le

cadre de Paul et Virginia est dans le pays tropical de Madagascar. Saint-Pierra a trouve que ce decor exotique etait essential au

succes de son livre. Chlteaubriand s'est tant passionne des pays lointains qu 1il a fait un voyage en Amerique dans

l'inten-tion d 1observer de ses propres yeux les merveilles de ce pays

sauvage. Atala en est le resultat. Par consequent, la fidelita de description et de decor pour mieux craer l•illusion d•exotisme date du lB~ siacle avec Rousdeau, Saint~Piarre, et plus tard,

(13)

Jules Verne est un vrai pionnier dans le genre litt~raire de "voyages imaginairesn. Ses romans qui ont le mieux reussi sont: Voyage ~ Centre de la Terre, De la Terre

!

la Lune, Vingt Mille Lieues sous les Mars et Voyage autour du Monde en

Quatre-Vingts Jours. Jules Verne ne se borne point aux voyages de pure fantaisie. Il a prevu les d~couvertes scientifiques du vingti~me siecle

a

une epoque ou m3me les plus temeraires n'auraient ose sty attendre. Il a ceci d'exceptionnel parmi les romanciers fran9ais--il subordonne toujours l•amour aux exploits aventuriers. Ses romans sont des r~ves ramen~s au

vrai, r~ves d'avions, de sousmarins, de television. Puisqu'ils se rapportent

a

l'avenir et non pas au passe, ce sont des ro-mans d' enfants.

Plus recemraent, la mania de chercher dans des pays loin-tains non seulement le cadre mais !'intrigue et les personnages en plus a possede completement les romanciers d'aventures ex-traordinairas. Las Franqais rompent avec la tradition--ils voyagentl

A

la suite de cas voyages, ils veulent donner leurs impressions. Il en advient que Pierre Loti nous laisse des livres exotiques comme-P~cheur d'Islande, Ramuntcho, les

De De

-senchant~es dan.s lesquels les personnages partici11ent du pays ou ils se meuvent. Lo~is Hemon,, auteur de Maria Chapdelaine, nous transporte dans les solitudes du Canada pour nous montrer

(14)

negres affoles de malefices dans Malaisie. An.toine de St. EXUpery est plutOt poete que romancier d 1aventures, le seul

poete qui cherche vroiment son chemin dans les etoiles. Il

s 1attache

a

la philosophie aussi bien qu'a l'action dans ses

ro-~ans d•aviation tels que Vol de Nuit et Terre des Hommes. On voyage avec }ierre ~ le heros du roman ouvert la Nui t de f aul

MorBnd, d1abord en Espagne, puis en TUrquie, en Italie, en

Hon-grie, et enfin en Norvege. Dans catte oeuvre et dans les autres du m~me auteur, Ferma la Nuit, !•Europe Galante, Lewis et Irene, on trouve "una ~e commune

a

tous les homrnes de tous les temps: le go'O.t de 1' aventure et des plaisirs singuliers, le melange de brutalite primitive et de curiosites raffinees qui a seduit,

a

toutes les epoques, ceux que tourmente l'ennui et que lassa la

~ 1

securite". ce sont, sans doute, les raisons pour lesquelles nos ecrivains fran~ais voyagent tant

a

ea moment. on peut dire, done, que l'exotisme a beaucoup influe sur le roman d'aventures et y

influe toujours.

La revolution litteraire contra le classicisme a secoue l'imagination des romantiques comma Vigny, Merimee, Hugo, et

1. Mornet, Daniel, Etude des Ecri,vains Fran)ais d'Aujourd'hui, Boivin et Cie, Paris, 1~~.

(15)

Dumas qui cherchaient leur inspire.tion non dans la gaographie mais dans l•histoire. Les romQns historiques ue cette premiere pariode romantique, Notre Dame de Paris en t~te, ont eta modeles

sur ceux de Walter Scott. L' a.nglomanie en :F1rance ~ cette epoque serval t

a

mettre

a

la portae de tous les F1ran~ais les li vres

ro-mantiques tels que Lorna Doone de Blackmore, Ivanhoe, Quentin Durwood de Sir Walter Scott. Considerons maintenant 1 1effet de

cette influence anglaise parmi les romanciers fran~ais. Victor Hugo dans Notre Dame de Paris nous offre una apopee du moyen ~ge. Avee Les Miserables, l'auteur lutte pour ceux que la societe maprisait du temps de la Revolution. Dans trois autres, les

Travailleurs de la Mer, l'Homme qui Rit, et Quatre-Vingt-treize,

-Victor Hugo est le poete qui stepand et se repand ~ 11aventure.

Malheureusement, en m~lant une these

a

une intrigue aventuri€n·e, Hugo deviant le jouet et la victime de sa prodigieuse imagination~

Pour Dumas pare, le romB.n histori4ue n•est qu'un roman ttde cape et d'~pae''• Dumas evoque le passe dans les Trois Mousquetaires, Vingt

ans

~r~s, Monte Cristo, et le Chevalier de la Maison

Rouge et ctest tout. Il prefere ne pas trop se documenter quant aux faits historiques d'une certaine epoque. Il interprete avec son parti pris la lutte entre Louis XV et le Cardinal Hichelieu dans' les Troi 8 Mous quet a.ires 0 Pour Dumas I le pas se fourni t le

(16)

se plaignent de 1• inexactitude du fond historique de ses romans 1

Les romans de Dumas nous intaressent, done, moins par 1 1evocation

d•une epoque glorieuse dans l'histoire de la France que par una verve, una bonne humeur, et une entf;nte d' action splendides.

Parmi les contemporains actuels, Benoit evoque un passe peu

e-loigne tout en exprimant ses reflexions personnelles

a

propos

des relations anglo-irlandaises dans la Chausses des G~ants et

de la cour allemande dans Koenigsmark. AVec MacOrlan, le roman

d'aventures ou passent toutes les angoisses de l'EUrope moderne prend un caractere apique ou legendaire surtout dans deux

ouv-rages appeles la cavaliere Elsa et la Venus Internationale. Je&.n Martet evoque le passe non pas en faisant agir ses personnages

dans un siecle depuis longtemps ecoule mais en montr&nt comment

le passe se ra.ttache inevitablement

a

la vie auotidienne

d'all-j ourd'hui.

c•est Le Sage qui, tout en peignant les caractares et les

moeurs de son tem±>s, etait le premier romancier h. nous divertir

par les aventures plearesques de ses heros. A cOte du moraliste,

s•apergoit 1 1auteur comique toujours soucieux de l'effet ~pro­

duire. Inutile de raconter les innombrables actions picaresques

qui adviennent

a

notre homme, Gil Blas de santillane. Par son

observation de la societe de son temps, Le Saga nous a laisse une veritable comedie humaine dans eas oeuvres; done, ctest Le

Sage qui est 1 1 anc~tre veridique du realisme dans le roman.

(17)

typique de l'oeuvre aventuriere de Voltaire, Zadig et Candida. Les Anglais, Fielding·et Sterna, favorisaient des r~cits pica-resquas dans leurs romans. Tom Jones, Joseph Andrews et

Tris-'

t.Y.amShandy exer~aient une influence sur des .Fra.n"ais comma

Diderot. Finalement, deux auteurs contemporains ont aussi sub1 cat attrait vers le picaresque dans un roman d 1aventures. Jules

Remains nous fait ~clater de rire par les bouffonneries dans son roman les Copains. Il s•~loigne de beaucoup du r~alisme de Le Sage dans cette oeuvre invraisemblable. Jean Martet nous pr~­

sente une action possible m~l~e

a

une ~e de picaro dans la per-senna de Paddy ortiz dans le .Phare de Hazard. Paddy est un

de-mon qui ne raisonne pas ses actes. un est singuli~rement attactH~

a

ea heros primitif et on suit avac grand inter~t ses peregrina-tions

a

la recherche de son amour. Dans ea roman-cl et dans ses autres, Me~tet ne nous inflige pas des personnages

a

grand cer-veau; au contraire, i l nous pr~sente des 3tres ordinaires qui vivent plus par leurs sensibilltes que par leur intelligence.

'

Jean Martet se moque de la psychologie; neanmoins, en peignant des personnages qui vivent plus par leur peau que par leur cer-velle, l•auteur nous rev~le sa propre psychologie. Bien que l•oeuvre de Martet soit tr~s impersonnelle, on trouve, en sui-vant les aventures de ses picaros, la philosophie de cat homme de la Provence--la vie simple et pas trop compliqu~e, la

(18)

re-cherche du bonheur. C'est un art fort subtil de rester hors du jeu et en m3me tamps d'Y inoulquar si gracieusement sa propre philosophial

L•amour fait partie des romans d'aventures depuis les ro-mans arthuriens, livres ou la chevalerie dominait l'intrigue.

A cette epoque les romanciers se rivalisaient

a

glorifier la femme,

a

la liberer de son asservissement coutumier. Quelques romans byzantins, Aucassin et Nicolette en t~te, ont les m~mes caracteres des autres romans de l•apopee courtoise mais restent en vogue

a

cause de l'ardeur de la passion das deux amants et ~ cause des sentiments qu 1eprouvait l'auteur inconnu. Encore au

XVIIe siecle dans Polexandre de Gomberville, le heros s 1expose lncessrua~ent

a

des perils pour l•amour de la belle princesse. Marianne de Marivaux est vraiment un roman d 1amour encadre dans

un roman d'aventures puisque l•hero!ne est .toujours en train d1 ~chapper aux dangers de la route et de deployer sa vaillance8 On y trouve una amelioration dans la finesse d'analyse des sen-timents. Le roman se fait tragique dans le chef-d'oeuvre de l'Abbe ~revost, Manon Lescaut. Si absurdes que paraissent les avantures de l'infortunee Manon et de ce pauvre Des Grieux, l'au-teur nous en fait voir 11authenticite. Il nous paint moyennant una serie de cotncidences caracteristiques, des rencontres

tumultueuses; si nous ajoutons les scenes violentes, la plus folle des passions, nous aurons le paradoxe d'un auteur qui

(19)

pr3che la moral en nous decouvrant la passion. Avec Rousseau

nous trouvons l'opposition de l 1amour entre amants et l'amour

conjugal.

11 Le roman d' a venture n r axiste pas an France. Qui mAle una

femme

a

l 1 BVenture, diminue l'aventure. Et nous autres, nous ne

1

pouvons pas faire de romans sans femme." Il serait impossiole,

ou peu s•en faut, de trouver dans ea genre de litterature fran-~aise una oeuvre ou la femme ne sercit pour rien dans le

develop-pement de l'intrigue. Cependant, deux romanciers d1aventure

am~!'icains, Nordoff et Hall, se tirent d'affaires sans amour

dans leur ouvrage, Mutiny

the Bounty. On peut lire

plu-sieurs recits de Kipling et Conrad sans rencontrar "la femme

fatRle ... Cas ecrivains anglo-sa.xons maintiennent 11inter§t du

lecteur par la violence et la rapidite des actions. Le

roman-cier anglo-saxon l'emporte sur l'ecrivain fr2n~ais dans una

qualite essentialle

a

ea genre litteraire--l'imagination. Faute

de cela, et

a

causa de la tradition et du temperament latins, le

FranC?ais ne saur2it ecrire una oeuvre ou la femme ne se m3le pas.

Tres peu nous resterait de l'oeuvre de M. Paul M0rand si on

en-levait le cynisme

a

11eg&rd de 1 1amour qui sty trouve. Dans Ouvert

la Nuit et Ferme la Nuit, l'aventure consiste d'une succession

(20)

d'amourettes. La Cavali~re Elsa de Pierre MacOrlan est un ro-man bizarre et fantaisiste qui raconte les aventures d 1Blsa,

inspiratrice de l'armee sovietique, envahisseur d'Allemagne et de France; ses exc~s de volupte se terminent par le suicide. Pour MacOrlan, l'aventure n'est pas un plaisir du corps, mais una sorte de r3ve. Il y a dans le Nagre L9onard 11attitude humoristique d'un po~te cubista qui se plait

a

jouar avec le -r~el at

a

1' animer

a

sa guise. Le heros part du , " r~va et 11

appara1t subitament dans le monde r~el. Le Chant de l'Equipage et A Bord de l'Etoile Matutine sont des r~cits de marins pour qui la mar est la seule realite, toute autre chose, l'imagina-tion. Ce sont des anecdotes de tresors ~-caches, de pirates, de Hollandais Volants, de superstitions maritimes, d'amours avec les negresses, et d'assassinats pour du rhum. L'amour chez MacOrlan n 1est pas, cartes, un sentiment pur et innocento

On trouvera dans tous les ouvrages de Pierre Benoit des per-sonnages qui sont £atigues de leurs petits bonheurs et de leurs petites sou£frances et qui cherchent la vie violente et

pathe-tique. Dans 11Atlantide, 11 est question de la sensualite feroce et divine qui jette dans le vartige, le crime, et la mort, les amants de la reine d'Atlantide. Dans le soleil de Minuit, Benoit expose la lutte interieure d'un certain F1orestier qui., aimant sa femme mais ~loigne d'elle, s'est epris d'une aventuri~re, la

(21)

Princesse Irenief.

TJt amour s' applique

a

tout, dit Forestier, Il couvre tout, depuis les tumultes les plus mysterieux de la chair et du sang, jusques

a

la gratitude que l•on a pour la compagne qui prepare votre cafe au lait et raccomraoda vos

chaussettas, ou le respect que vous inspire la mare de vos enfants.

L·1 amour figure dans tous les romans d' aventures de Jean Martet. Dans quelques romans comma le Recif de corail,

l'En-levement de Daphne, le Phare de Hazard, c'est un sentiment

idealiste qui fait courir au heros d'innombrables perils. Dans le Colonel Durand et le QUart d'Heure d'Anibal Bumbo, on baaine trop avec l'amour et les consequences qui en resultant font

renattre de meillaurs hommes. Les romans les cousins de Vaison et la Partie de Boules nous rappellent un peu les histoires de Peter Ibbettsen at de Berkeley Square

ou

il est question de ltamour par 11intermediaire du songe et ou l'amour reussit

a

aneantir les obstacles materials qui emp6chent deux amants de siecles differents de se joindre. Dans cas deux livres de Mar-tat, il s•agit d1une passion qui ne finira jamais heureusement

a

cause du lien surnaturel d•un des amoureux. En lisant les romans d•aventures de Jean Martet, on est temoin de la variete de manieres dont il traite de l'amour dans ses livres. L'auteur n 1est certainement pas un homme d 1un seul horizon.

(22)

11 Le m~ri te des romans de cat auteur, c' est qu' ils offrent

autant de v~rit~ que l•existence courante, tout en etant beau-1

coup plus smus ante." Si Martet voi t clairement, s ' i l ne com-pliqua pas les choses, e~ s•il sait ~1user le lecteur, i l doit

y avoir des raisons. Ainsi, avant de discuter

a

fond l'oeuvra de Jean ~;1artet, peut-~tre serai t-ee_ le moment d' approf'ondir

1 'hornme, la rr:ison d '~tre de tous ces romans d' aventures hurno-ristiy_ues.

1. Bourgat-Pailleron, Robert, "M. Jean Martettt. Revue des Deux

(23)

qui pour notre inexprimable deuil,

a

neuf heures l'autre matin,

a

la porta de la. maison de la rue de Beaune, 'apparut, deman-1

dant qu' on lui permtt d' entrer'."

Jean Martet n'avait que cinquante-trois ans quand il a ~t~ enleve par un mal foudroyant. sa carriere qui compranait una suite de livres sur Clemenceau intima et des romans d'un

succ~s continu s'est interrompue en pleine force cr~atrice. La litterature "personnelle" n'aura jamais tente M. Jean Martet. Dans "Un Entretien avec Jean Martet" qui a paru dans Les Annales le 25 septembre, 1938, Georges Champeaux a demand&

a

M. Martet l'argument de son dernier roman. "Il n'y a jamais

d'arguments dans mes livres. Et puis, quand il y en aurait

un ••• c•est si peu interessant, le schema d'une histoire. Tout est dans la fa~ on de la raconter. u

"Je ne sui a pas 'un romancier 1 • Les romanciers sont

plains de nobles ambitions. Ils pretendent augmenter la

conna.issance que nous avons de l'homme et fixer de fa~on dESfini-tive les traits des epoques ou evoluent leurs personnages. Ils

1. Benoit, Pierre, 11Jean Martat." Revue des Deux Mondes,

(24)

remuer le monde. Je n'accorde pas tant d'importance aux

petites histoires que je raconte. Car je suis conteur et rien de plus."

On ne saurai t ~valuer 1' oeuvre de Marcel Proust sans faire una ~tuda approfondie de l'~crivain car 11 n'y a que le "mol"

dans tous ses ouvrages. On peut tr~s facilement lire et

appr~cier le Colonel Durand de Jean Martet sans m~me penser ~ l'auteur. La raison, c'est qu'il n'y a pas de th~se dans

celui-ci, c•est que M. Martet reste hors du jeu: par cons~­ quent, 11 serait inutile d1etaler devant la lecteur las menus d~tails de la vie de M. Jean Martet; 11Et pourtant, j'en

connais bien peu qui auront mis autant d'eux-m~mes dans leur 1

oeuvre." A.fin de pouvoir expliquer ea paradoxe apparent, nous allons nous borner ~dire seulement les.faits saillants de la vie de Martet, surtout ceux qui ont eu una influence sur son oeuvre.

Jean Martet est ne A Angers, le 31 d~cembre, 1886. pour bien appr~cier son oeuvre litteraire, on dolt se rapyeler

tou-jours qutil est Proven~al. Quoiqu1il soit eloigne de son

(25)

vil.lage natal depuis plus de vingt ans, au fond il est reste Proven~al. L'influence de l'occupation romaine dans le Midi

se manifests dans maintes oeuvres. L'action des romans sui-vents se d~roule en Provence: la fartie de Boules, les .Passes

-de Khatber, les Cousins de Vaison.

Martet est curiaux du passe, depuis las survivances gallo-romaines jusquta la legende napol~onnienne. QUand ce n•est pas dans l'espaca, c•est dans le temps qu•il voyage. 11J'a.i

toujours subi l'attrait du passe. Il mtest impossible de con-siderer un Atre, de m'interasser A sa psychologie sans imaginer aussitOt la chaina qui le ralie ~ ses ancatres at mama jusqu'a

1

1' anti quite." Dans son roman., les cousins de Vaison, M. Martet nous montre comment se rattachaient

a

ses anc~tres rornains un

petit gr·oupe religieux secret de Vaison, les Implorants.

Un ancien arc de triomphe romain

a.

car-pentras rappelle

a

Charles et son oncle le peu d'interi~ entre aujourd1hui et l'~poque romaine.

--Dis-moi, Charles, combien comptes-tu ue g'nerations d1hommes en dix-neuf si~cles~

--Drune, lui dis-je, c'est bien ~imple. Il y a trois generations par si~cle. Multlpliez trois par dix-neuf ou vingt, vous voyez •••

--Je vois, dit-il. Je vois qu'entre les ma~ons qui ont b~ti cet arc at no~s, il y a

soixante ~ges d'homma.

1.

Bourget-.Pailleron, Robert,

••M.

Jean Ivlartet.u Revue des Deux Mondes, Tome 1-:r,--1~34.

(26)

Encore una ~vocation du pass~ se trouva dans la sc~ne

chaz le vieux cordonniar de carpantras. Celui-ci se rap~elait un des deux recits que son p~re lui avait racontes. son p~re,

avant lui,avait l~gu~

a

son fils quatre histoires de la vie

romaine, mais chaque g~n~ration en oubliait puisque c'etait une tradition orale. ea pauvre ignorant de cordonnier raconte une histoire d'assassinat de jeune fille d'il y a vingt siecles;

un Peuplion a ate sou~~onne, condamne et mis au sup~lice de bois an forme de fourche. L'anc~tre du cordonnier avait crie:

--Fort esto, amitchi sempre remembrerontJ

Et ce cordonnier, ne sachant mot de latin, n'avait aucune idee de la signification de cette phrasal

Cette fascination du pass~ at cat enthousiasme vis-a-vis dE la vieillerie se manifestent encore dans un conte de Martat,

Ir~ne, qui a paru dans l'Illustz-ation, edition de l'Jottl, le 2

,

dacambre, 1933. La sire Guibert le :fii~heut, seigneur de Cindes en Chypre, a herite toute la propriete de son p~re. I l est

triste, cependant, quand 11 songe que tout maurt, rien ne reste.

Un des jardiniers tendant une petite statuette de terre cuite lui parle:

--Messire Guibart, voilh ea qu•un de mes hommes vient de trouver en b~chant. C'est una

(27)

Le conte Ir~ne est la preuve que M. Martet fait ressortir d'un morceau de pierre antique une histoire de valeur. L'au-teur, arch~ologue amateur lui-m~me, donne le rOle du haros om1d son roman les Passes de Kha!ber

a

un certain Perrier, homme qui se passionne pour la prehistoire.

Martet ne se borne ni

a

l•antiquite romaine dans le

domaine du temps ni

a

la Provence dans le domaine de l'espace. L' attrai t du passe se rep and dans quelques romans comme 1rionse1-gneur, le Colonel Durand, Dolores, eti l'Enlevement de Daphne, mais la mise-en-sc~ne sera ailleurs.

M.onseigneur c'est le roman du roman de Louis XVII, 11 en-marge de cette extraordinaire litterature historico-polici~re

que la vie et la mort mysterieuse du fils Capat n'ont pas fini d' alimenter. M. Pi'etrefond, le professeur qui y dacouvre 1' eu.-thentique descendant du roi Louis XVI dans la personne d'un honn3te ouvrier serrurier, est tourmenta lui aussi par cette obsession du pass~.

--Mais je vous ennuie, dlt Pi~trefond, avec mes dissertations historiques. Excusez-moi,

(28)

l'histoire est un peu ma folie, mon vice •••• Je vis avec le passe beaucoup plus qu1avec le

pr~sent, ou, plutOt, je suis port~ a penser que le present est deja qualque chose comma du pass~.

M. 1viartet nous di t au sujet de ea roman Monseigneur:

Le titre et le milieu de l'action vous montrent qual genre d1exploration dans les

siecles ecoules j'y entreprands. C'est 1~ salon mol que reside l'inter3t de l'humain. Un personnage, quand je le considare, n 1est

jamais seul

a

mes yeux. Il n'est qu'un

ins-tant d 1une longue destinee dans laquelle son

pare, son grand-pare et toute une foule d'~tres disparus ont leur place. Ces racherches m1ont

m3me donne l'amour de la prehistoire.l

Le Colonel Durand renferme de m~me una plaism1te evoca-tion du pass~. C'est l'histoire d'un jeune officier de vingt-sept ans dans l'armee de Napoleon Premier. L'intrigue est

comblee d1aventures temeraires, d'amour, d'esprit, et d'actions

militairas. A la bataille d 1A.usterlitz, par exemple, le Colo-nel Durand, blesse, et A 1 1 aide de quinze de cas hommes, fait prisonniers cinquant& Prussiens et quatre officiers. A la

suite de cette manoeuvre herotque, l'Empereur le tutoie.

1. Bourget-Pailleron, Robert, nM. Jean Martet!' Revue des Deux Mondes, Tome

I3;-T934.

(29)

Dans Dolor~s, M. Martet nous transporte dans l'Amerique

du Sud au moment

ou

les p~ons souffraient sous le joug cruel

des gouverneurs malfaisants. l'Jous retrouvons en Hidalgo

Venga-dor, le 11 Robin Hoodn d 1 une r~publique sud- a.rnericaine. Lui et

sa bande essa.ient de se venger des torts que le gouvernement

a imposes sur la peuple. Il va sans dire que la vengeance se

r~alise effectivement.

La plupart du drama de l'Enl~vement de Daphne se passe

dans un chateau-fort en Andorra au v1ngti~meLa1~ole. -~ ___ [_, t: ...

Le Marquis de Peyrolles vit completement dans le passe tal

qu1i l etait pendant le regime de Louis XVI, le roi et le

bien-faiteur de son gP.anQ-pere.

Jean Martet pouvai t compter parmi ses amis intimas des personnes dont l'influenca sur la posterite sera mama plus que

la sienna. Il avait ~te le confident de M. George Clemenceau

au point que celui-ci ait cru devoir lui laisser par testament

tous ses papiers, avec latitude de les utiliser au mieux des

inter~ts de sa memoirel C1est la preuve que 1le Tigre' a bien

apprecie les travaux de son sacretaire et biographe, Jean Martet.

De temps an temps, Clemenceau interrogeait lAartet sur ses

(30)

--Pourquoi Gubbiah? --Je ne sais pas.

--Voil~ un homme gui raisonne ses actes.

A la bonne heureli

--Mettez de l'air dans vos romans. --Je feral mieux dans le prochain.2

Deux hommes qui ont souvent temoigne leur amitie ~our

Martet et qui en ont fait preuve en signalant ses oeuvres au grand public litteraire sont Messieurs Rene Doumic at fiarra Benoit.

Trois ou quatre mois avant la publication de les Cousins

-de Vaison dans la Revue -des Deux Mondes en 19321 Jean Martet

-

-confiait ~ quelqu'un avec sa bonne gr~ce pince-sans-rire: "Je

ne sals point du tout comment manoeuvrer avec Rene Doumic

3

pourqu' 11 me r~serve un tour dans la Revue." Qual que tamps

apre s, Marte t a

e

cri t au m~ me corre sp ondan t : "J 1 ai p orte m on

roman A Ren& Doumic, qui l'a lu et qui m'a dit que c1etait 'un roman charmant, original, et bien fait•. Et il le prend pour

le publier des qu'il aura de la place.n "Et c 1est la le

commencement d'une amiti~ de deux atres tr~s diff'erents 1 1un de l'autre, tous deux aujourd'hui disparus, et qui avaient,

1. Ma.rtat, Jean, Le Tigre, Albin Michal, Paris, 1~3u.

-2. ibid.

(31)

paratt-11, 111ntuition qu'il ne fallait pas trop longtemps

1 retarder le moment de se connattre, de s'appracier."

C'est Pierre Benoit qui a fait preuve de son amitie pour Jean Martet en ecrivant l'eloge post mortem de celui-ci dans la Revue des Deux Mondes, revue dont les deux etaient col-laborateurs.

Aux gens qui posaient A Banoi t la question ttsi vous aimez les livres de Martet, n•est-ce point parca qu'il est votre ami?" il trouvait agreable de r~pondre: "Oh nonl juste-ment ~ moins de mettre la charrue avant las boeufsl C'est, au

contraire, parce que j'aime sas livres que je me suis arrang~ pour qu'il devienne mon ami." Benoit ne cesse jamais de louer

le style lucida de son coll~gue, les soins de preparation, la conduite de l'intrigue, le souci de seduire et d'entratner le lecteur, et finalement l'impersonnalite dans ses romans.

Les deux ecrivains se connaissaient depuis 11automne de 192e et M. Benoit 'tait

a

cOte du mourant dans son

apparte-ment de la rue de Beaune en fevrier, 1940. Ce trepas rappelle ~ Benoit les mots acrits par Martet

a

11occasion du dec~s de C14manceau: "J'ad.mire cas peintres qui pauvent demeurer de

(32)

longues haures au pied du lit ou est mort, un ~tre cher, qui

cherchent de ~ualles couleurs sont faites les teintes livides,

violac~es de son visage. Cala, je ne le pourrais faire

au-jourd1hu1.u Et Benoit ajoute: ttNi ~ujourd'hui, ni demain non

1

plus, mon ami."

Nous avons d~ja remarque que Martet choisit une atmosphere

d'un pays etranger pour le fond de ses romans d' avent-ures. Voyage-t-11 comma Benoit pour se documenter personnellement

avant d'~crire un livre sur un pays quelconque? On trouvera la

reponse dans une confidence eXprim~e pendant un entretien: tton

i::,

voyage sur 1 a carte tout aus si bi en que dans 1 'his to ire. tt Il

avoue qu'il ne conna1t ni le Canada, ni l'Amerique du Sud, ni

l'Australie. (Pourtant, l'Illustration donnait un portrait de

Jean Martet, la 5 novembre, 1~32, ~ 1 1occasion de la publication

d'un roman sur l'Amerique espagnole, les Portes du Desert, et

-

-de son d~barquament d'un voyage en ~erique du sud.)

Ce dialogue s'est passe

a

un autre entretien:

--L'action du Anibal Bumbo se deroule au

Mexique vers 1850. ~uel beau pays que le Mexique1

--vous y ~tes alle?

--QUelle questionl L'auteur d'Electre a-t-il

1. Benoit, loc. cit.

(33)

commis des meurtras pour son propre compte~. Non, je ne suis pas alle au lrlexique, mais je vis depuis mon anfance dans l•intimit~ de

Raoussat-Boulbon.l

(n. b. Raoussat-Boulbon est un Fran"ais qui luttai t

a

f: ,

divarseB :reprises# pour li·b~rer le Mexiqua···de la~ tyrannie.)

--N'avez-vous pas envie d'aller voir le Canada, 1 1Amerique du Sud, l'Australie?

--Dieu nonl je n'ai qu•une idee, c•est de les quitter. Et puis, je me Mefie toujours des impressions de voyage.2

Il ne faut pas oublier que Martet est un vrai Meridional; la r~alite a moins d'attraits pour lui que les r~ves. A quoi bon aller chercher au loin une lumiere inconnue quand cella

qu1on porte en sa t3te y supplee si bien? Il pretend que sa connaissance purement th,orique du Canada, par example, lui per-met de decrire le paysage en lui fournissant un minimum de

de-tails utilas au sujet. Salon Martet, 11 auteur qui -a voyage se

trouYe g~ne devant le tas de souvenirs precis qu1il a en t~te;

par consequent, le narrateur s 1impose une opinion fallacieuse

des choses et ces chases l'emportent sur l'histo.}re;ce qui est de prime importance dans un roman. Cependant, Martet est

con-1. Champeaux, Georges, "Un Entretien avac Jean Martat~ les

Annales, 25 septembre,l~38. 2. Bourgat-Pailleron, loc. cit.

(34)

sciencieux. Il se documenta lo~guement '~.d' avanc9.

r.,as

sources g4o-graphiques qu' il emploie sont las cartes, los plans,

quel-ques livres bien faits sur les pays consid~r~s, des photogra-phies, una heure au cin~ma pour mettra las images en train.

On a souvent reproch6 ~ Martat, et aveo justice, le peu

/

de go~t pour les d~termihations g~ographiques de ses paysages. On verra dans les axtraits suivants combien sont ind6finis les tableaux des paysages qu1il paint at, par contra, oue 11

essen-tiel, c•est-~-dira l•impression, s'y trouve.

(1)

L'hiver

au Canada salon Jean Martet dans son premier roman Marion des Neiges, 1928.

Il faisait tr~s froid. Toute la cam-pagna 6tait eouverte de neige. una fois, en plain milieu du pont qui relie l 1une ~ 11autre

des deux rives tr~s escarp~es du Mandocino, le train s•arr~ta. or, la rivi~re, ~ oe mo-ment, charriait de gros gla~ons faits d1une

glace si pure et si transparente qu 1on

aperce-vai t les herbes au fond.

(2) L'hiver en Russia salon Jean Martet dens son roman le Palais de Timour, 1~34.

Le tratneau continuait

a

glisser, avec, de temps en temps, 11 est vrai, de sournoises pouss~es vers la droite ou vers la gauche qui me faisaient croire cette petite force allait

se terminer dans le foss~. La naige tombait ~ seaux; je la sentais s'amonceler sur les fourrures sur mes genoux et sur ma casquatte;

(35)

j'~tais fore~, toutas les dix secondas, de me secouer pour ~'en d~gager. Cela dura, ja

pense, una dami-heura.

(3) Sc~ne de village au Mexique salon Jean Martet dans

XXX

son roman le Coup d 1Etat du ,1925.

Don _Pablo et don Pascual suivaient la grande rue de ?opotla, laquelle n' etai t

gu~ra, d•ailleur.s, qu1un chemin defonce,

creuse en son milieu d 1une rigole sinueuse.

Des poulets, des chiens, des cochons, comma dans la cour de la venta, s'y ebatt~ient. Des Indiennes, sur le pas· de leur 1-'orte, eplucliaient leurs legumes.

Si Martet a choisi le Canada pour Marion ~ Neiges,

c•est parce que l'idee du froid lui occupait l 1es-p2it et qu'il

voulai t en faire le fond de son roman. Il part ainsi tres souvent d'une sensation puremen t physique. Il a chois 1 un pays chaud pour Dolor~s comma reaction contra le froid

excassif du Canada. Il prefera decrire les pays tropicaux

car ils sa pratant mieux

a

l'evocation de la couleur que les cOte aux mode res.

Martet est done un !vleridional "pareil aux hommes du M.idi qui sa rivalisent d'aloquence, d'imagination aussi, incredules quant aux histoires du voisin cornrne sur les laurs, fecond.sL en trouvailles verbales, mais dans leur for int~rieur,

(36)

com-tion qui l'aide

a

raconter des romans ex~iques sans -qu'il ait

jamais voyage. La Provence lui a donne l'amour de la pr~his­

toire et de la vie simple. Il possede un sans irme du recit.

On a le droit de s'attendre

a

trouver toutes cas qualitas de M. Jean Martet dans son oeuvre.

(37)

capable de toutes les r~ussites. Il a mis son art au service de sa volonta. Nul mieux que lui ne sait ce qu'il fait et ou il va.

C1est le romancier contemporain qui administre

son talent avec le plus d'intelligence~ celui

qui~

a

conquerir le lecteur~ d~pense peut-~tre

le plus d'ingeniosite et de soins. Il met un point d'honneur

a

fuir la facilitel

a

changer de climat

a

chaque ouvrage,

a

choisir les su-jets originaux.l

-..-~- . .i ... ...:.

Nous allons voir maintenant si Monsieur Martet m~rita cat

~loge persuasif d'un critique contemporain. L'oeuvre de Martet se d.i visa -commod£ment;:-tt. en quatre categories: le romen

his-torique ~ l_e roman exotique 1 le roman picaresque 1 et le reel t

ou

l'inter@t special se rattache

a

la philosophia de Martat. Ajoutons d'emblee qu'il y a parmi ses ouvrages qualquas-uns qui comprennent deux, voire trois, de ses categories.

D'ail-leurs,, nous assaierons de montrer comment 1' auteur se prend

a

m~ler l'wnour

a

l'intrigue de tous ses romans.

Ecrire, c•est mon seul plaisir. Qual charmant m~tierJ D'abord, on est seul. Et

dans cette solitude~ les murs s'eeartent

a

la fois sur le temps et sur 1 1espace. On

1. Lang, Andre~ "Revue de la Partie de Boules". Les Annales~ :_ :· 25Janvier ~ 1936.

(38)

1

r~gne sur un univers dont on est le ma1tre.

Les rom8ns ou le temps semble obs~der Martet seront: les cousins de Vaison (1932), le Colonel DUrand (1933), Monseigneur

(1934), et l'Enlevement de Daphne (lg3tS), Il faut noter en passant qu 1une fois etabli dans ea genre de roman historique,

Martet en restait fidele quelques arrr~ees de suite.

Les Cousins de Vaison est l•histoire singulierement atta-chante ou l•auteur parti d'un recit de la Provence moderne re-monte la cha1ne des siecles. En retrouvant les liens qu'une petite commune nommee vaucluse conserve avec l'antiquite ro-:q;~.aine, il nous donne

a

[Jenser combien est encore pres de nous

1 'epoque que nous imaginions tres ancienne.

Avant de preciser davantage le roman historique de Jean Martet, peut-3tre serPit-ce le moment propice de decider en

quo! 11 differe de celui d'autres romanciers de ea m3me genre. Deux romans anglais ayant tous les deux un decor de l'antiquite rome_ine sont The Last Days of Pompeii par Sir Bulwer- Lytton et Ben Hur paroc M.. Lew i'vallace. En lisant ces romans historiques, le lecteur se transporte dans le milieu antique; il se meut avec les personnages; il est spectateur de tout ce qui se passe dans la vie quotidienne de ces personn~,ges. P&r example, le

(39)

leeteur fait partie des d~bauches des familles riches de Rome; 11 partage les souffrances du peuple, qu'il s'agit du fouet ou d'une lutte contra les bAtes faroces dans l'ar~ne; 11 s'~meut quand las premiers ehretiens meurent plutOt que de designer aux autor1tes pa!ennes leurs lieux de rendez-vous, les cata-combes; 11 eprouva una j oie immense dans Ben Hur quand il vo1 t la Christ pour la premiere fois; 11 est accable dans The Last Days of Pompeii en voyant la mise re caus~e par 1' eruption du volcan Vesuve. Dans les romans historiques comma Ivanhoe et Quantin Durwood, le-·lacteur assiste

a

tous les evenements

chavaleresques paree que Sir w~alter Scott l'enleve ~ea monde actual pour lui raveler la vie du moyen ~ge. Il accompagne Sir Wilfred Ivanhoe dans ses combats contra les Normands

d'Angleterre at 11 est admis aux confidences de Rebecca et de Rowena.

Dans les ouvrages historiques de Jean Martet, l•auteur ne eherche pas A nous exposer

a

una epoque ancienne. Il ne s'y interesse pas. Ce qui pique la curiosite de Jean Martet, c 1est

le lien qui rattache le passe au present. Ainsi, la deesse des Implorants1 Dea Dia, est la personnification de ce

rattache-ment du passe au present; elle represents cat esclavage que le passe impose a.ux vi vants; elle varifie la. devise de 1' oncle Paul de Carpentras1 "la chair est moins fragile que le marbrett.

(40)

Par extension, le lecteur n'entrevoit l'antiquit~ que par les yeux des contemporains--Charles, Gaston, la vieux cordonnier, et D~a Dia; 11 s 1illusionne davantage par la proximit~ des choses antiques--l'arc de triomphe, l'amphith~atre, et la place romaina.

Ce m~me genre d'exploration dans les siacles ecoules se volt dans le roman intitule Monseigneur. Un professeur fait croire A Louis Mennechain qu'il est le seul heritier legitime du trOne de ¥ranee, que le sang de Louis XVI et de Marie

Antoinatte coule dans ses veines, et que le prince qui s•est evade de la prison est son arriare-grand-pare. Tout dans la via de Louis Mennechain porta ~ croira que l•histoire est vraisemblable. D'abord, la famille Mennechain habite ~aris,

quartier de la chapelle axpiatoire, depuis trois generations. Lui, son para, et son grand~pere s'appelaient Louis. Ils

etaient tous serruriers comma l•etait l•infortune roi Louis XVI. C 'est sur ea brave homrne de Louis Mennechain que Ma.rtet fait tomber quatre siecles d'histoire. L•explication de la fuita du fils Capet telle que fietrefond, vieux profasseur d'histoire, la donne, ne parait ni plus ni moins possible que toutes celles qui ont eta publiquement discutees. Mais, Louis Mennechain ne sera pas Louis XIX. Pietrefond avoue que c•est

(41)

en attendant d'~pouser sa petite fianc~e, Anna Bouaffre, qui ne sera pas reine de b~ance. Il s'est inclin~, mais lad'-ception est r~elle, un doute lui reste

a

l•esprit. M3me ses partisans ne sont pas s~rs. Le G~neral de Lormoy pr~sente son petit-fils

a

Louis Mennachain en tremblant lorsque celui-ci se

repose sur un banc de la place Louis XVI. Et ainsi Martet nous laisse voir comment 1 1histoire occasionne une serie d'~vene­

ments qui changeront la vie enti~re d'un ~ersonnage.

Dans son dernier roman historique l'Enl~vement de Daphne, Martet continue

a

surveiller le passe

a

travers les si~cles. Le personnaga qui sert de lien entre j ad.is et main tenant est le. Marquis de .Payrollas. Ce roman est typique du genre de i.1artet. L'action se meut au vingtieme siecle mais aussit~t que le heros, Bertrand; franchit le seuil du vieux ch~teau en Andorra, on a 1 'impression de s '~tre instBlle dans la cour de Louis XVI. Au d~but Bertrand a affaire aux contrebandiers qui l'aident

a

sur-monter des difficult~s comma des avalanches de neiges de sorte

qu•il arrive hors d'haleine, au ch~teau mysterieux du marquis. Ils 1 'aident par ·amour pour :;calui-~i. It parce que le grand-}I ere

du marquis actual, son pare, et lui-m~me sont rastes fio.~les

a

la memoira du roi Louis XVI, toute la region a fait de m~me. voila la rsison de l'animosite des habitants envers las r~gi­ cides. Done, le lectaur voit

a

qual point importe una

(42)

expli-cation du passe pour comprendre le present. Il n'y a rien dans le ch&teau qui puissa rap~eler au marquis qu'il vit au

ving-ti~me si~cle. Quand la tOte du roi atait tombee

a

g heuras ~3

minutes, le 21 janviar 1793, la vie au ch~teau de Peyrolles

s•~tait fix~e

a

jamais. Desormais, rien de nouveau en matiere

de li vre s, costumes, ou me.ubl.e.s ~"' n' a pu s 'introciuire dans le domaine. C1etait la mania du marquis. Bertrand aine la fille du marquis et veut 1 1epouser. Le marquis refuse sa _t)ermission parca que Bertrand est un regicide. (Il travaille pour la re-publique franctaisa 1) Alors Bertrand a·' arrange pour enlevar ~x;

Daphn&. Il rata son coup d'essai et il trouve uue cella ~u1 11

voulait epouser est maintanant dans les bras de son amant.

Daphn~ se servait de lui pour echapper du ch~teau. Ainsi, pour la troisiame fois, Martet nous prasante un reci t dont la base m@me se trouve dans un siecle passe mais ou les personnages se .., meuvent dans le monde actuel.

On aura una granda peine

a

distinguer nattement entre

1 t oeuvre axotique et 1 'oeuvre picaresque de Jean lviartet. Il y

a plusieurs de ses romans qui, par un decor etranger et par la nature des peregrinations du heres, peuvent s'inscrire aux deux classifications.

pour mol, le d~cor crest la chose primor-diale. Il ne m'est jamais arrive d'imaginer

(43)

une h1stoire et de me preoccuper ensuite du pays

ou

je la situerais. Je pars toujours d'une impression visuelle. Pour le Quart d'Heure d 1Anibal Bumbo (1~3e}, unJSaurt de couleurs exasperees. Le sultan de Foumban

(1939), la pluia qui tombe tout

droit at·

p~trit le sol. Pour la Chasse

a

l'Horame

( 1939), une riviere souterra~ne"; Un d~cor peut creer une affabulation, mais pas deux.1

M. Martet n 1est decidement pas un homme d'un seul horizon. Ses deux premiers livres sont situes dans des pays froids parce que 1 1 id~e du froid 1 1obsedait au moment. L'intrigue de Marion

des Neiges (1928}, se passe au Canada at cella de Gubbiah (192~)

-dans la vallee du fleuve lvloha.wk, 1 '~tat de New York. Des pays oordi.ques, Mlartet va aux climats trt1'picaux. Dolores ( 1~2~) et

les Partes du Desert (1932} ont comrne point de depart deux

pays indetermines dans l'Amerique du sud. Dans le Recif de corail (1933) on passe en Australia et dans -le Pacifique.

L'ann~e suivante avec le Falais de Timour (1934} on sera de re-tour dans un territoire naigeux, la Hussia. En 1~35, le

lec-xx.x

teur de le coup d'Etat du suivra les aventures du heros,

Don Pablo, au ~exique. Le 11exi.Jue sera encore le fond

..

du ro-man le ~art d'Heure d'Anibal ~wnbo (193ti). On voyage

a

la Haute knazone pour trouver la location du roman la Chasse

a

(44)

l 1Hor.1me (1~6~) at de

la,

on part pour le Cameroun et le sultan de F~oumban ( 1~3~). Enfin, pour apprecier le caractere de }laddy Ortiz, jauna "picarou de le .fhare de Hazard { 1~40) 11 faut aller

-

-an Am~rique du Nora Clans le s etats de J:l:lorida et de Georgia.

Calui qui lit /baaucoupt u•ouvrages exotiques de Jean Mar-tat est surpris de remarquer combien sont indeterrninees les situations de ses d~cors. Si l'auteur n•avait pas mentionne la Canada au debut du roman lVlarion des Neiges, le lecteur n•aurait jamais su ou i l etait, t8~t les descri~tions du pay-sage at des personnages sont indecises. Moi, qui demeure

de-puis ma naissance dans una villa situee dans la vallee ci.u Mohawk, ja ne reconnais aucun nom de village auquel 11auteur se rapporte

en Gubbiah. Itaction sa passe

a

1 1era moderne car Gubbiah voyage

an train et dans una Ford; capandant, Martet me donne 11

impres-sion que tout l 'et at de New York n I est peuple que d' Indians et Boh~miens, qu'il n•y a le que la for~t et le desert, et que tous lea habitants sont pauvres, miserables, at depouilles d1aucune

sympathie humaina. Un Russe engage Gubbiah comma bftcheron; celui-ci travaille

a.

cOte d 1un negre et d •un Chill en; Guboiah,

en fuyant le feu qui stempare de la for~t, est sauva par Nuage-Rouge, un sauvage; enfin, 11 apouse Trinidad, une Boh~mienne dans une c~remonie pa!ennel DrOles de types qui habitent New

YorkJ

(45)

un homme, essaie de fUir 1 1Australie. Il erre dans les rues et dans lea quais de Bif8bane; rien dans la description

jusqu'ici ne pourrait distinguer Brisbane de Marseille, par

example. 'l'rott r~ussit

a

s•evader sur un vieux bateau, dont la destination sera Cedros, au Mexique. On fait un arr3t

en

mi-route dans une !le quelconque que Martet se plait

a

nommer le R4cif de Corail. De retour en Australia, Trott se deplace con-tinuellement en fuyant la justice; partout on trouve des pay-sages qui ne sont pas naturels. On a l'impression que le cadre de ses aventures n'a aueune espeee d'importance. Trott aurait

pu voyager en Chine; les m~mes choses se seraient ~assees1

Est-ce qu'on ose dire que la precision geographique influe tres peu sur l'action de cas romans? Je le crois. Martet a trouve convenable de situer le mouvement de le Palais de Timour en Russia. Il est vrai que le heres s'appelle Vasili Petrovitch et qu'il y a des personnages qui repondent aux noms de Marianna Pakhtive, Natacha Mitukhive, Nadia Gidkov, Dorodnov, Barjansky, at Vanucha. Il est vrai aussi qu 111 y a de la neige 1 1hiver, et toujours de la neige, en Russia. M~me avec cas constatations peu savantes, on peut dire que cette oeuvre essaie de nous faire

croire que le decor y est essential quand 11 ne 1 1est pas. comma contraste

a

ltoeuvre de Martet no~s n'avons qu'a signaler la roman exotique de lVI. Fiauconnier, Malaisie. Peu

(46)

im-porta si 11action est n~gligeable, l'exotisme y figure

a

tout moment. On volt comment un Fran~ais deviant le Tuan ou chef

d'une plantation de caoutchouc an Malaisie et comment 11 s'a-dapte aux superstitions et aux moeurs de ce pays primitif. Il apprend, par example, qu'il faut fouetter les indigenes, mais apres, leur dire qu'ils ont de la chance d'~tre fouettes _par

un si brave Tuan.

Dans ea recit exotique de la Malaisie, Fauconnier t~che de cr,er non seulement una atmosphere atrange qui convient au pays aais una intrigue qui sort inexorablement de cette 1le myst~­

rieuse. Il veut nous faire voir les indig~nes tels qu1lls sont:

il veut nous exr,liquer les secrets des Orientaux. Il veut nous montrer 1' impossibi lit~ d~v. s' ad.:apterrl c.ompl.~tetnent;;a cettec.. r~gion.

De m3me que toutes les aventures de Robinson Crusos

de-pendent axclusivement du naufrage et de 1 11le deserte dans le

roman de Daniel Dafoe, ainsi la psychol~gie du romancier

Rua-yard Kip ling repose-t-alle sur la mer dans Captains' courageous. La mer ag1 t ci •una fag on imrnanquable sur le pati t enfant g~ta 1

Harvey. Celui-cl, tombant d'un paquebot, est p~che

a

moiti~ noy' par le nportuguee11

• Calui-ci se devoua

a

11enfant et le

prot~ge des mambres du bataau qui le detestent. Peu

a

pau, la vie paisible at aventuriere du p~cheur, le travail penible le

(47)

l''quipage, la philosophie na!ve et credule de son protecteur--en somme, la mer elle-m~me exerce son influence sur le petit qui change compl~tement de caract~re.

On pourrait mentionner d'autres romanciers co~e Herman Melvilla, Jack London, Jonath2n Swift, Nordhoff et Hall, tous renommes parce qu'ils appuient sur l'exotisme pour capturer le leeteur. Malhaureusement, il faudra chercher d'autres qualites chez Martet si notre autaur dolt survivra dans le sans litte-raire.

La mot "picarottest espagnol et veut dire nde coquinn en fran"ais. Don Quichotte de Cervantes est le roman picaresque par excellence de toute la litterature espagnole. Dans cette oeuvre Cervantes voulait satiriser l'epoque chevaleresque avec toutes ses prouesses d'armes entre chevaliers. C'est una satire amusante et gale qu'il m~le

a

des aventures fantaisistes. La

satire de Voltaire prend beaucoup de formes--elle est malicieuse, amere1 violente, cynique, plaisante; la fantaisie chez Voltaire est raisonnee1 done, fran"aise .• Candide1 c 1est la satire de

l'optimisme.

En

racontant les aventures picaresquas de Gil Blas, Le Sage satirise les medecins, la cour, et 11eglise. Il

rit des vices. Tout est raillerie avec Le Sage et cependant ea n•ast pas la mechanceta. J:..n satirisant les abus de son epoque,

(48)

dans le domaina fantastique avec La ~age et, ~ar cons~quent1 las personnages ne sont pas vraisemblables. Un autre d~t·aut de l•oeuvre picaresque de Le ~age c'est que l'amour y manque. La satire defend l'amour. Pour Gil Blas, l'amour c•est toujours avec la femme qu.!il sauva.

Done, en considarant 1 1oeuvre yicares

4ue des auteurs comma

Cervantes, Voltaire, Le Sage, et en ~ensant toujours aux ecri-vains anglais de ea genre, Jonathan Swift, Henry Fielding, a-t

Tobias Smollett, on dolt conclure que le roman picares~ue se

distingue par les traits caracteristiques sui vants: f'riponnarie, satire ou raillerie amusante, aventures f'Bntastiques, [;eregrina-·tions au hasard, heros temert<.ires et insouciants de la 1110rt, per-sonnagas invraisemblables, et amour peu sincere. L1oeuvre pica-resque de Martet contient toutes cas qualites en proportions diff'erentes.

Trois fripons qui nous interessent surtout sont Guboirul et le Colonel Dur&nd dans les romans du mama nom, et .taduy uans le Phare de Hazard. Gubbi ah qui tte sa femme et son enf~nt

parce qu'il les trouve cormnuns et i l s•enf'uit avec sa ma1tresse, Trinidad, et una bande de Bohemiens. i'lus tard, 11 tue re:t;e dens un acc~s de jalousie. Le Colonel Durnnd est un coquin ~ du prem-ier ordre: apras avoir donn~

a

Bertrand sa prornes;.:·.e u 11vrogne d' a1:1er voir rMne ponthierx et de la mettre au courant de son

(49)

soupirant timide (Bertrand), il s'empresse de faire la cour

a

madame pour son propre compte. Romanesquement dans 1~ nuit, il grimpe le mur de cl~ture, enj arnbe la balustrade du balcon, et penetre dans la chambre de la dame dont le mari est en Es~agnao.,

••• Il blesse sev~rement en duel le pauvre soupirant qui demanda justice. Madame Ponthierx, disgr~ciee, chassee hors la maison par son mari, entre dans un convent. Durand, ayant des soucis de conscience, demande

a

son ami s'il ne doit pas l•~pouser.

Celui-ci lui conseille d'attendre un mois avttilt d'agir. Le mois passe, le militaire a completament oublie l'affHirel Paddy

or-tiz c•est le Eras demoniaque qui donne des coups de poing

a

son fUtur beau-pare, qui enleve sa mignonne et manque d1en mourir,

et qui Se joint

a

deS COntrebandierS pOUr fRire SaUter Ull ~hare.

Martet ne rait point de morale. On verra plus tard ce

qu'il pense des romans

a

these et des romans psychologiques. Si Martet se sert d'ironie, ea n 1est pas pour satiriser les moeurs

et les abus; c•est plutOt un stratageme pour la delineation de caractere. Voici quelques examples de ·cette ironia·:

Je suis---a peu pres fait pour ~tre l'ami d•une femme comma pour 3tre cardinal.

Le Colonel Durand c•ast tres curieux cas femmes la, songeait

(50)

elle avait 11air d1Gtra

a

la veille de mourir,

et, maintenant qu'elle s'ast instsllee dans le

p~che, ella a retrouve ses couleurs. xxx

La Coup d1Etat du

--En tout cas, jurez-moi que vous ne partirez

plus comma ~a?

--Je vous le jural

Il ajoute tout de suite apres:

--Mais je vous signale que je n•attache pas aux serments une tres grande importance.

Gubbiah

On se rappelle que le Colonel Durand avait viola Mme

Pon-thierx et que celle-ci s'etait retiree dans un convant en

dis-gr~ce. La replique de Madame Patrizi dans le dialogue suivant

contient de l 1ironie, du sous-entendu, et du mepris pour 1 1

offi-cier qui avait ~te la cause de la honte de sa soeur.

--Il y a deux choses sur lesquelles

a

mon

avis un homme dolt rester muet. C'est la guerre

et l'amour, madame.

--pour l'amour vous avec raison, fit-elle. D'autant qu'il n'y a point toujours de quoi se vanter.

Voici un temoignaga amusant de la douce ironie de Martet;

le passage est amusant

a

cause de la conclusion imprevue et

a

cause du changement de caractere chez Fabian qui avait toujours au la nfrousse" de n'importe quoi auparavant.

Il vida la deuxieme bouteille de vin at fit

una chose que la veille 11 n•aurait certainement

pas faite parce que c•est defendu, strictement defendu; il jata la bouteille vide par la

(51)

fen~tre de la voitura.

Les Partes du D~sert

Puis que dans tout roman picaresy_ua, las aventures f'an-tastiques se m~lent inextricablement aux voyages, les deux di-visions ne figureront ici qutune fois. Gubbiah erre tout

a

fait ~ la bohemienne avec une bande de vagabonas dans Guboiah. En voulant accueillir son patron avec un bon feu dans la

che-min~e, i l met feu ~ la ca.ba.ne, et le feu se l .. epand ensui te

a

la forat. On le voi t ~ divarses reprises dBns une for~t an flammes, dans un d~sert, et dans les montagnes couvertes .de neiges.

Maintes fois, Nuage-Rouge, un Indian, le sauve de la mort. C1est toujours la _cotncidence qui met Nuage-Rouge sur sa route. Dans les Fortes du Desert Fabian Vasquez part

a

la. recherche a 1una villa de tra sor ·au del

a

du de sart dans 1 1 Am~rique du Sud. Il s•interesse au sort d 1une cartaina Inesilla et d~couvre qu'on

lui a vole toute sa propriat6. Seul, i l la protege contra de nombreux adversaires qui assiegent la maison du ranch. Juste au moment ou i l s•evanouit de sept blassures, la bande du bon Padre

arrive pour amprisonner les brigands qui restent. Dans Marion des Neiges, le haros fait fortune en trouvant de l'or dans les

-ruisseaux moiti~- galas du Canada. Il y a des assassinats,de la mis~ra, et des souffrances causaes par le froid; i l y a aussi le mystere d•une jeune fille qui a disparu.

Références

Documents relatifs

Pour se repérer sur une surface ou un plan, sur la Terre, dans une ville, sur un damier de jeu, sur une feuille de papier, on dispose d'une technique presque universelle : - On

Au début de mémoire, j’ai présenté la chronologie de la Grande Guerre dans une séquence chronologique, mais l’homme tel que décrit par Montherlant ne peut

Des sélections pour tous les goûts... Alors vous

Devenu directeur du Monde illustré avant la guerre, il se distingue avant tout en tant que journaliste bien qu’il ait publié, entre 1910 et 1922, quelques œuvres de fiction : au

Le roman est construit comme un conte (situation initiale, élément perturbateur, péripéties…), les péripéties surviennent grâce aux rencontres avec des personnages de contes

Isaure et Thomas, dont la femme d'origine polonaise est repartie vivre dans son pays, décident de vivre leur amour et se retrouvent en cachette sous le même vieux chêne que quand

Bien que reproduites par David contrefaisant les écritures de Marat et Corday, ces lettres apparaissent comme des preuves matérielles et vérifiables hors du tableau ; elles

On peut tout de suite remarquer, cela dit, que la fiction romanesque ne couvre pas toute la période. Certes, le narrateur n’évoque pas la naissance de Heßling, les premières lignes du