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Thérapie cognitive comportementale du trouble panique : effet d'un traitement combiné sur les symptômes de panique et d'insomnie

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Academic year: 2021

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(1)

Thérapie cognitive comportementale du trouble

panique

Effet d'un traitement combiné sur les symptômes de panique et

d'insomnie

Thèse

Alenka Potočnik

Doctorat en psychologie - Recherche et intervention

Philosophiae doctor (Ph. D.)

Québec, Canada

© Alenka Potočnik, 2017

(2)

Thérapie cognitive comportementale du trouble

panique

Effet d'un traitement combiné sur les symptômes de panique et

d'insomnie

Thèse

Alenka Potočnik

Sous la direction de :

(3)

Résumé

L’objectif de la présente thèse est de documenter les difficultés de sommeil chez les personnes souffrant d’un trouble panique ainsi que d’en étudier les variations lors de l’administration d’une thérapie cognitive comportementale du trouble panique (TCC-TP) suivie d’une thérapie cognitive comportementale de l’insomnie (TCC-I). La première étude consiste en une revue systématique de la littérature à propos des altérations du sommeil chez les personnes ayant un trouble panique. Des calculs de méta-analyse ont permis de documenter la présence de difficultés de sommeil significatives chez les personnes ayant un trouble panique en comparaison à des participants contrôles sains. Également, les résultats des analyses de la prévalence des attaques de panique nocturnes (APN) indiquent que 52,1% des participants ayant un trouble panique ont eu au moins une APN au cours de leur vie. Les altérations du sommeil identifiées dans la première étude pourraient être reliées à l’activité cognitive négative et à la sensibilité à l’anxiété. La seconde étude visait à explorer l’effet de l’administration séquentielle d’une TCC-TP et d’une TCC-I. Onze participants ayant un trouble panique avec APN et insomnie ont pris part à une TCC-PD suivie d’une TCC-I selon un protocole à cas unique à niveaux de base multiples. Durant la TCC-TP, quatre participants ont eu une diminution significative des symptômes de panique et deux ont eu une augmentation significative de l’efficacité du sommeil. Pour ces participants, ces améliorations se sont poursuivies durant la TCC-I. De plus, parmi les participants qui n’avaient pas connu de changements dans leurs symptômes de panique durant la TCC-TP, la majorité ont eu des gains significatifs durant la TCC-I. Il en est de même pour l’efficacité du sommeil. Ainsi, chez la plupart des participants, l’insomnie comorbide n’a pas diminué durant la TCC-TP, mais s’est résorbée avec une TCC-I subséquente. Également, les symptômes de panique se sont améliorés davantage durant la TCC-I que durant la TCC-TP, ce qui pourrait être expliqué, entre autres, par le rôle intégrateur du sommeil dans la consolidation et l’intégration des apprentissages effectués en thérapie.

(4)

Table des matières

Résumé ... III

Liste des tableaux ... VII

Liste des figures... VIII

Liste des abréviations ... IX

Dédicaces ... X

Remerciements ... XII

Avant-propos ... XIII

Chapitre 1. Introduction générale ... 1

Trouble panique avec ou sans agoraphobie ... 2

Critères diagnostiques ... 2

Prévalence ... 4

Comorbidités psychiatriques ... 5

Impacts fonctionnels ... 5

Évolution naturelle ... 6

Étiologie et modèle conceptuel cognitif comportemental ... 7

Difficultés de sommeil associées au trouble panique ... 11

Insomnie ... 12

Attaques de panique nocturnes ... 18

Interactions entre le trouble panique, l’insomnie et les attaques de panique nocturnes

... 21

Thérapie cognitive comportementale du trouble panique et des difficultés de

sommeil associées ... 22

Thérapie cognitive comportementale du trouble panique (TCC-TP) ... 22

Thérapie cognitive comportementale de l’insomnie (TCC-I) ... 24

Thérapie cognitive comportementale des attaques de panique nocturnes ... 25

Objectif de la thèse ... 26

Chapitre 2. A Meta-Analysis of Sleep Disturbances in Panic Disorder ... 28

Abstract ... 30

Résumé ... 31

Introduction ... 32

Insomnia in Patients with PD ... 32

Nocturnal Panic Attacks ... 32

Why Study Sleep in Panic Disorder? ... 33

Unresolved Issues Related to Insomnia in Patients with PD ... 34

Unresolved Issues Concerning the Prevalence of NPA in Patients with PD ... 35

The Need for a Systematic Literature Review and Meta-Analysis... 35

Method ... 35

Literature Research... 35

Article Selection ... 36

Data Extraction ... 37

Inter-Rater Agreement ... 37

Data Analysis ... 38

(5)

Results ... 38

Self-Report Sleep Data ... 39

Polysomnographic Sleep Data ... 40

Prevalence of NPA ... 41

Discussion ... 41

Self-Report Data ... 41

Objective Data ... 42

Why Is Sleep Altered in PD? ... 43

Nocturnal Panic Attacks ... 45

Limitations ... 45

Conclusion ... 47

References ... 49

Appendix A. Description of included studies ... 63

Appendix B. Effect sizes for each included study ... 68

Appendix C. References for studies included in the meta-analysis ... 74

Appendix D. Forrest Plots ... 76

Chapitre 3. Boosting CBT for Panic Disorder Efficacy by Treating Insomnia: An

exploratory study of a sequential treatment approach... 105

Abstract ... 107

Résumé ... 108

Introduction ... 109

Sleep Disturbances in PD ... 109

Treatment of Sleep Disturbances in Panic Disorder ... 110

Method ... 111

Recruitment and Participant Selection ... 111

Measures ... 113

Procedure ... 115

Data Analysis ... 118

Results ... 119

Changes During CBT-PD ... 120

Changes During CBT-I ... 121

Follow-Up ... 122

Clinical Improvement... 122

Discussion ... 122

Changes During CBT-PD ... 123

Changes During CBT-I ... 124

Clinical Improvement... 125

Clinical Implications... 126

Strengths and Limitations ... 126

Future Research Directions ... 127

Conclusion ... 127

References ... 128

Chapitre 4. Discussion générale et conclusion ... 141

(6)

Question 1. Quelle est l’origine des difficultés de sommeil chez les personnes ayant

un trouble panique? ... 143

Question 2. Pourquoi l’insomnie ne se résorbe-t-elle pas lors de l’administration de la

TCC-TP? ... 150

Question 3. Pourquoi la TCC-TP semble-t-elle avoir été sous-optimale pour les

symptômes de panique? ... 150

Question 4. Pourquoi y a-t-il eu amélioration de l’anxiété après la TCC-I? ... 152

Question 5. L’ordre dans lequel les traitements sont administrés aurait-il un impact

sur les changements observés? ... 153

Limites... 154

Avenues de recherche ... 157

Implications cliniques ... 158

Conclusion ... 159

Références ... 161

Annexe A. Manuel de cotation pour l’extraction des données de la méta-analyse ... 167

Annexe B. Agenda quotidien ... 179

(7)

Liste des tableaux

Table 1. Inter-Rater Agreement ... 58

Table 2. Meta-Analysis Results for Self-Report Data ... 59

Table 3. Meta-Analysis Results for Polysomnographic and Actigraphic Data ... 60

Table 4. Meta-analysis results for NPA prevalence ... 61

Table 5. Study Description - Studies with Self-Report Data ... 63

Table 6. Study Description - Studies with Polysomnographic/Actigraphic Data... 64

Table 7. Study Description - Studies with NPA Prevalence ... 66

Table 8. Effect Size for Individual Studies – Self-Report Sleep Data ... 68

Table 9. Effect Size for Individual Studies – Polysomnographic/Actigraphic Sleep Data ... 69

Table 10. Prevalence of NPA in Patients with Panic Disorder for Individual Studies ... 73

Table 11. Treatment Integrity ... 132

Table 12. Description of Participants ... 133

Table 13. Comparison of Treatment Phases on Mean Daily Panic Scores and Mean Daily Sleep Efficiency 135 Table 14. Analysis of Self-Report Questionnaires ... 136

(8)

Liste des figures

Figure 1. Study Selection Flow Chart. ... 62

Figure 2. PSQI - Component 1: Subjective Sleep Quality. ... 77

Figure 3. PSQI - Component 2: Sleep Latency. ... 78

Figure 4. PSQI - Component 3: Sleep Duration. ... 79

Figure 5. PSQI - Component 4: Sleep Efficiency. ... 80

Figure 6. PSQI - Component 5: Sleep Disturbances. ... 81

Figure 7. PSQI - Component 7: Daily Dysfunction. ... 82

Figure 8. PSQI – Global Score. ... 83

Figure 9. PSG – Sleep Latency. ... 84

Figure 10. PSG – Sleep Efficiency. ... 85

Figure 11. PSG – Number of Awakenings. ... 86

Figure 12. . PSG – Total Sleep Time. ... 87

Figure 13. PSG – Total Wake Time. ... 88

Figure 14. PSG – REM Sleep Duration. ... 89

Figure 15. PSG – REM Sleep Density. ... 90

Figure 16. PSG – Percentage of REM Sleep. ... 91

Figure 17. PSG –REM Sleep Latency. ... 92

Figure 18. PSG – Number of REM Periods. ... 93

Figure 19. PSG –Slow-wave Sleep Duration. ... 94

Figure 20. PSG –Percentage of Slow-wave Sleep. ... 95

Figure 21. PSG – Stage 1 Duration. ... 96

Figure 22. PSG – Stage 2 Duration. ... 97

Figure 23. PSG – Percentage of Stage 1 Sleep. ... 98

Figure 24. PSG – Percentage of Stage 2 Sleep. ... 99

Figure 25. PSG – Percentage of Stage 3 Sleep. ... 100

Figure 26. PSG – Percentage of Stage 4 Sleep. ... 101

Figure 27. Prevalence of NPA – At Least One NPA/Lifetime. ... 102

Figure 28. Prevalence of NPA – At Least One NPA in the Last Month. ... 103

Figure 29. Prevalence of NPA – At Least Two NPA in the Last Month or Two Months with Apprehension (Intensity of Apprehension ≥4/8) Since at Least Six Months... 104

Figure 30. Study Design and Flow-Chart. CBT-PD = Cognitive behavior therapy for panic disorder; CBT-I = Cognitive behavior therapy for insomnia. ... 137

Figure 31. Panic symptoms and sleep efficiency during baseline, CBT-PD and CBT-I for participants 1 to 4. 138 Figure 32. Panic symptoms and sleep efficiency during baseline, CBT-PD and CBT-I for participants 5 to 8. 139 Figure 33. Panic symptoms and sleep efficiency during baseline, CBT-PD and CBT-I for participants 9 to 11. ... 140

Figure 34. Modèle de l’insomnie selon Harvey (2002) (traduction libre). ... 164

Figure 35. Modèle de l’insomnie selon Harvey (2002) (traduction libre), appliqué au trouble panique avec APN récurrentes. ... 165

(9)

Liste des abréviations

ADIS-IV : Anxiety Disorders Interview Schedule for DSM-IV APN : Attaque de panique nocturne

ASI : Anxiety Sensitivity Index CBT : Cognitive behavioral therapy

CBT-I : Cognitive behavioral therapy for insomnia CBT-PD : Cognitive behavioral therapy for panic disorder CI : Confidence interval

DSM-(III, IV or 5): Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders (third, fourth or fifth edition); Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (troisième, quatrième ou cinquième édition)

EDI : Entrevue diagnostique de l’insomnie IC : Intervalle de confiance

IIS : Insomnia Interview Schedule IMA : Index de Mobilité de l’Agoraphobie ISA : Index de sensibilité à l’anxiété

ISI : Index de sévérité de l’insomnie - Insomnia Severity Index MIA : Mobility Inventory for Agoraphobia

NPA : Nocturnal panic attacks RC : Rapport de cotes RR : Risque relatif

PSG : Polysomnographie - Polysomnography PSQI : Pittsburgh Sleep Quality Inventory TCC : Thérapie cognitive comportementale

TCC-I : Thérapie cognitive comportementale de l’insomnie TCC-TP : Thérapie cognitive comportementale du trouble panique

(10)

Dédicaces

À mes parents et à mes ancêtres, qui

m’ont appris la valeur du travail

À mes familles, dont le support a été

si précieux

À mon mari

(11)
(12)

Remerciements

Durant les dernières années, mon expérience en recherche clinique a déboulonné chez moi le mythe du scientifique ermite. Une thèse est l’aboutissement d’un long processus et du travail acharné de nombreuses personnes. Le présent ouvrage est le fruit d’un travail d’équipe, de collaboration et d’entraide. Je tiens donc à souligner l’apport de ceux qui ont mis la main à la pâte dans l’accomplissement de ce projet.

Tout d’abord, je tiens à remercier ma directrice, Geneviève Belleville, sans qui ce projet n’aurait pas vu le jour. Mme Belleville a été, tout au long de mon cheminement, une coach de rédaction incroyable. Elle a su m’aiguiller dans mes travaux tout en me laissant la liberté de choisir la direction que je souhaitais donner à mon projet. Source intarissable de rigueur et de méthode, Mme Belleville m’a aidée à pousser davantage ma réflexion et à élaborer un projet suffisamment solide sur le plan scientifique pour pouvoir atteindre le stade de la thèse. Sa sensibilité, son écoute, son respect et sa dévotion pour ses étudiants m’ont profondément touchée.

La solidarité au sein du Laboratoire d’étude de l’anxiété m’a particulièrement marquée tout au long de l’accomplissement de ma thèse. Merci à toutes celles qui ont pris part de près ou de loin à mon projet : les bénévoles, les évaluatrices, les thérapeutes. Le temps que vous avez si généreusement donné m’a été d’une grande aide dans l’accomplissement de ce projet.

Tous mes remerciements à Louis Laplante du Service de Consultation de l’École de psychologie, qui a généreusement prêté les locaux et les équipements audiovisuels qui ont été utilisés pour le projet clinique. Je tiens également à remercier les membres de mon comité de thèse, qui m’ont accompagné depuis la naissance de ce projet : Annie Vallières, qui a d’ailleurs assuré la co-direction intérimaire de ma thèse durant un an, et Guillaume Foldès-Busque. À chaque séminaire, vous avez su cibler les points à améliorer afin que mon projet prenne forme et s’améliore de fois en fois.

En terminant, je ne peux passer sous silence la contribution de mes proches, qui, par leur présence et leur soutien, m’ont aidée à mener à bien ce projet.

(13)

Avant-propos

Les deux articles inclus dans la présente thèse ne sont actuellement soumis à aucun journal et n’ont jamais été publiés auparavant. Ils ont été rédigés par l’auteure de la présente thèse et première auteure des deux articles, Alenka Potocnik, étudiante au doctorat en psychologie, sous la direction de Geneviève Belleville. Mme Belleville a assisté Mme Potocnik dans la conception des deux études, dans leur réalisation ainsi que dans la rédaction des deux articles.

Outre son travail de rédaction, Mme Potocnik a été en charge de l’ensemble des travaux de recherche présentés dans cet ouvrage. Pour la première étude, l’étudiante a effectué la recension de littérature, l’évaluation de l’ensemble des articles, la compilation et l’analyse des données. Pour le second article, l’étudiante a mis sur pied et coordonné l’étude clinique. Elle a aussi effectué les suivis de plusieurs participants, une partie de la saisie de données et a mené les analyses statistiques avec l’assistance du service d’aide en statistiques. Tout au long de ses travaux, Mme Potocnik a reçu l’aide de bénévoles du baccalauréat en psychologie dans les tâches suivantes :

Article 1 :

 Évaluation de l’éligibilité des articles (2e juge pour l’évaluation de 30% des articles): Geneviève

Fournier-St-Amand

 Recherche de littérature grise: Amélie Beaudoin

 Cotation standardisée d’articles (2e juges pour la cotation): Amélie Beaudoin, Maria Côté, Marylou

Dufour, Geneviève Fournier-St-Amand  Résumé de l’accord inter-juges: Kathy Côté Article 2 :

 Entrevues de dépistage téléphonique: Geneviève Fournier-St-Amand, Manon Chevallier

 Saisie de données/vérification de la saisie de données: Geneviève Fournier-St-Amand, Marylou Dufour, Manon Chevallier, Kathy Côté

 Évaluation de l’intégrité du traitement: Cinthia Lacroix

 Thérapeutes (étudiantes au doctorat en psychologie): Leslie-Ann Boily, Mylène Dubé-Frenette, Mélanie Lavoie

 Évaluation pré et post-traitement (étudiantes au doctorat en psychologie): Leslie-Ann Boily, Mylène Dubé-Frenette, Joanie Pouliot, Flore Morneau-Sévigny, Andréanne Rousseau

(14)

Chapitre 1.

(15)

La définition du trouble panique telle que nous la connaissons aujourd’hui a vu le jour avec la publication du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux 3e édition (DSM-III) en 1980 (Craske &

Barlow, 2014). Depuis cette époque, le trouble panique a fait l’objet de nombreuses recherches. Celles-ci ont permis de développer une plus grande compréhension de cette condition et ont mené à l’élaboration des bases des traitements d’orientation cognitive comportementale du trouble panique utilisés aujourd’hui. Cette approche est d’ailleurs celle qui bénéficie du plus grand appui empirique dans le traitement du trouble panique (Katzman et al., 2014). L’avancement des connaissances à ce sujet a ensuite mené vers le traitement de cas plus complexes, notamment ceux des patients présentant des problématiques comorbides, fréquemment rencontrés en clinique. C’est dans ce contexte que s’inscrit la présente thèse, qui porte sur le trouble panique avec des difficultés de sommeil comorbides.

Trouble panique avec ou sans agoraphobie

Critères diagnostiques

DSM-IV

Selon le DSM-IV, le trouble panique avec ou sans agoraphobie est un trouble dit d’axe I qui appartient à la catégorie des troubles anxieux. Il est caractérisé par des épisodes récurrents d’anxiété intense nommées attaques de panique (American Psychiatric Association, 2000). Celles-ci sont marquées par la présence d’au moins quatre des symptômes physiques et psychologiques suivants : palpitations, transpiration, tremblements, sensation de souffle coupé, sensation d’étranglement, gêne thoracique, nausée/gêne abdominale, vertige, paresthésies, frissons ou bouffées de chaleur, déréalisation/dépersonnalisation, peur de perdre le contrôle de soi ou de devenir fou, peur de mourir. Les attaques de panique sont accompagnées de changements dans le comportement visant à éviter les situations dans lesquelles une attaque de panique pourrait survenir. Elles peuvent également être accompagnées d’une appréhension face à la survenue d’une éventuelle attaque de panique ou face aux conséquences que celle-ci pourrait engendrer (American Psychiatric Association, 2003). Dans 21,6% à 22,9% des cas, le trouble panique est accompagné d’agoraphobie (Grant et al., 2006; Kessler et al., 2006). Celle-ci est caractérisée par une anxiété face à certains lieux ou situations desquels il pourrait être difficile ou embarrassant de s’échapper, ou dans lesquels la personne pourrait se sentir paniquée (American Psychiatric Association, 2003).

Changements dans le DSM-5

Le DSM-5 (American Psychiatric Association, 2013) introduit un changement dans les catégories diagnostiques du trouble panique, de sorte que le trouble panique et l’agoraphobie deviennent deux catégories

(16)

diagnostiques distinctes, accentuant ainsi le fait qu’il s’agit de deux troubles qui peuvent exister indépendamment l’un de l’autre. Ainsi, il n’existe plus que deux catégories diagnostiques (trouble panique et agoraphobie) plutôt que trois comme dans le DSM-IV (trouble panique avec agoraphobie, sans agoraphobie et agoraphobie sans antécédents de trouble panique). Ce changement fait suite à des études relevant les trajectoires d’apparition et les caractéristiques démographiques distinctes de ces deux troubles, ainsi que la prévalence importante des cas d’agoraphobie sans symptômes de trouble panique (Asmundson, Taylor, & Smits, 2014; Wittchen et al., 2008).

Par ailleurs, les critères diagnostiques du trouble panique ont subi quelques modifications. D’abord, dans le critère B décrivant la réaction de l’individu face aux attaques de panique, les deux symptômes cognitifs (1) crainte d’une éventuelle attaque de panique et (2) préoccupations à propos des conséquences d’une éventuelle attaque de panique) ont été regroupés en un seul critère qui se lit comme suit : « Crainte persistante ou inquiétudes d’autres attaques de panique ou de leurs conséquences ». Ensuite, dans le critère décrivant les changements de comportements, le terme « changement de comportement important » a été reformulé avec davantage de précision et se lit maintenant comme suit : « Changement de comportement significatif et inadapté ». Tel que précisé dans le texte du DSM-5, il peut s’agir d’un comportement relié à l’évitement d’une attaque de panique, tel l’évitement d’exercices ou de situations non familières. Un autre changement dans le DSM-5 concerne le critère de durée entre le début d’une attaque de panique et son apogée, qui passe de 10 minutes dans le DSM-IV-TR à quelques minutes dans le DSM-5. Également, dans la description d’une attaque de panique, une note a été ajoutée concernant des symptômes spécifiques à une culture. En effet, certains symptômes additionnels peuvent être présents chez des individus selon leur culture, tels des acouphènes, des douleurs au cou, des céphalées ou des cris ou pleurs incontrôlables. Puisque ces symptômes ne peuvent être comptés dans les 4 symptômes minimaux requis pour poser le diagnostic, ce changement n’a pas d’impact sur les travaux de la présente thèse. Enfin, le DSM-5 inclut une modification dans la spécification du type d’attaques de panique. Ainsi, les termes « attaque de panique situationnellement liées (induites) » et « favorisées par des situations » sont regroupés sous l’appellation « attaques de panique attendues », par opposition à la catégorie « attaques de panique inattendues ». Puisque les attaques attendues ne sont pas obligatoires afin de pouvoir poser un diagnostic de trouble panique (American Psychiatric Association, 2013), cette modification n’a pas d’impact sur le contenu de la présente thèse.

Pour ce qui est de l’agoraphobie, l’ajout d’un critère de durée des symptômes de six mois accentue le caractère distinct de cette catégorie et lui donne davantage un statut de trouble anxieux à part entière (Asmundson et al., 2014). Également, les situations évitées dans l’agoraphobie sont dorénavant regroupées en cinq catégories. Ainsi, afin de recevoir ce diagnostic, un individu doit craindre des situations appartenant à au moins deux de ces cinq catégories. Ce nouveau critère permet de mieux distinguer l’agoraphobie de la

(17)

phobie spécifique, qui, elle, concerne une seule situation (p. ex., phobie des hauteurs) (Asmundson et al., 2014).

L’impact clinique de ces modifications est encore à déterminer, vu la parution récente du DSM-5 (2013). Néanmoins, sur le plan conceptuel, les changements apportés semblent n’avoir que peu d’impact sur l’attribution d’un diagnostic de trouble panique. Puisque les deux études relatées dans le présent ouvrage ont débuté avant la publication du DSM-5, la description du trouble panique utilisée est celle du DSM-IV-TR. Toutefois, considérant l’ensemble des éléments amenés précédemment, il est probable que les résultats rapportés dans le présent ouvrage s’appliquent également au trouble panique tel que décrit par le DSM-5. De plus, la présence d’agoraphobie n’étant ni un critère d’inclusion ni un critère d’exclusion, les changements touchant cette catégorie diagnostique n’impactent aucunement les résultats des deux études de la présente thèse. Donc, dans un souci de clarté et d’exactitude, le présent ouvrage utilisera les termes du DSM-IV-TR.

Prévalence

Selon le National Comorbidity Survey Replication aux États-Unis, la prévalence à vie du trouble panique sans agoraphobie dans la population générale est estimée à 3,7% (Kessler et al., 2006). Les données européennes indiquent, quant à elles, que le trouble panique avec ou sans agoraphobie aurait une prévalence médiane de 1,8% sur 12 mois au sein de la population générale (Goodwin et al., 2005; Wittchen & Jacobi, 2005). En comparaison aux données dans la population générale, des prévalences plus élevées ont été observées au sein de certains sous-groupes de la population, notamment dans les populations médicales. Par exemple, la prévalence à vie du trouble panique serait entre 9,1 à 11,2% chez les patients de cliniques médicales de première ligne (Barsky, Delamater, & Orav, 1999). Chez ces même patients, la prévalence du trouble panique au cours du dernier mois se situerait entre 6,7 et 8,3% (Barsky et al., 1999). Également, selon une récente méta-analyse, la prévalence actuelle du trouble panique, i.e. un diagnostic au moment de l’évaluation, serait de 6,8% parmi les patients ayant une maladie coronarienne (Tully, Cosh, & Baumeister, 2014). D’autres études rapportent une prévalence du trouble panique de 12% chez les patients atteints d’asthme (estimés combinés de la prévalence à vie et actuelle) (Weiser, 2007) et de 20 à 25% chez les personnes consultant à l’urgence pour des douleurs thoraciques (diagnostic actuel de trouble panique) (Fleet et al., 1996; Worthington et al., 1997). De plus, les personnes souffrant d’apnée du sommeil seraient 2,17 fois plus à risque de développer un trouble panique que les individus n’en souffrant pas (Risque relatif (RR) calculé sur une moyenne de 3,92 années) (Su et al., 2015).

(18)

Comorbidités psychiatriques

Le trouble panique se présente souvent en comorbidité avec d’autres troubles psychiatriques. Parmi l’échantillon recensé dans le cadre du National Comorbidity Survey Replication, 83,1% des personnes ayant un trouble panique présenteraient un autre diagnostic du DSM-IV-TR, toutes catégories confondues (Kessler et al., 2006). Une étude allemande a obtenu une prévalence similaire des troubles comorbides, soit 87% (Pané-Farré et al., 2013). Cette même étude décrit que les comorbidités les plus fréquemment rencontrées sont les troubles anxieux (58,4%) et de l’humeur (33,8%), ainsi que les troubles d’abus ou de dépendance à une substance (42,9%) (Pané-Farré et al., 2014). Lorsque comparées aux personnes n’ayant jamais eu d’attaques de panique, les personnes souffrant d’un trouble panique auraient un risque plus élevé de développer un second trouble psychiatrique tels un trouble anxieux (Rapport de cotes (RC) = 7,21; intervalle de confiance (IC) 95% [4,38 – 11,86]), un trouble de l’humeur (RC = 2,18; IC 95% [1,28 – 3,7]) ou un trouble d’abus de substance (RC = 2,10; IC 95% [1,28  3,44]) (Pané-Farré et al., 2013).

Impacts fonctionnels

Le trouble panique a des impacts fonctionnels et des conséquences négatives considérables dans la vie des personnes qui en sont atteintes. Kessler et al. (2006) dénombre que 56,2% des personnes qui ont un trouble panique auraient un niveau d’altération fonctionnelle sévère. Ce pourcentage s’élèverait à 84,7% chez les individus ayant un trouble panique avec agoraphobie (Kessler et al., 2006). L’altération du fonctionnement quotidien associée au trouble panique touche plusieurs sphères, dont le travail, les responsabilités familiales et la capacité à assumer son rôle au foyer (Rufer et al., 2010). Le trouble panique est également associé à une baisse significative de la qualité de vie et ce, autant dans le domaine de la santé physique que dans celui de la santé mentale (Candilis et al., 1999; Hollifield et al., 1997; Katon et al., 1995; Mendlowicz & Stein, 2000; Schonfeld et al., 1997).

Sur le plan de la productivité au travail, le trouble panique serait responsable d’importantes pertes économiques. Une récente étude a comparé les pertes de productivité des employés ayant un trouble panique à celles de travailleurs sains. Les résultats indiquent qu’en comparaison aux travailleurs sains, un travailleur ayant un trouble panique occasionnerait en moyenne des pertes de 25,6 heures de productivité de plus dû à l’absentéisme1 et de 30,2 heures de plus dû au présentéisme2 au cours d’un mois (Park et al., 2014).

Lorsqu’on compare les pertes financières découlant de l’absentéisme et du présentéisme, les pertes cumulées

1 Absentéisme : Réfère à l’absence d’un employé pour des raisons médicales. La personne malade peut être soit l’employé ou un de ses proches dont il doit prendre soin (Howard, Howard, & Smyth, 2012).

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par les travailleurs ayant un trouble panique s’avèrent significativement plus importantes que celles cumulées par les travailleurs sains (20 323$US/an pour les personnes ayant un trouble panique vs 7 033$US/an pour les contrôles sains) (Park et al., 2014). De plus, le pourcentage de personnes vivant de l’aide sociale ou d’une autre forme d’indemnité pour invalidité est supérieur chez les personnes ayant un diagnostic de trouble panique (27%) que chez celles n’en ayant pas (12%) (Mendlowicz & Stein, 2000).

Par ailleurs, les patients atteints de trouble panique feraient un plus grand usage des services médicaux (Barsky et al., 1999). En analysant un échantillon de personnes consultant dans des services de première ligne, des chercheurs ont noté que le nombre moyen de consultations médicales en clinique externe par année était significativement plus élevé chez les personnes qui avaient un trouble panique que chez celles qui n’en avaient pas (moyenne (ET) = 10,6 (12,2) visites vs 4,4 (3,0) visites, p = .0001) (Barsky et al., 1999). Il en était de même pour les consultations à l’urgence (moyenne (ET) = 2,0 (3,6) visites, vs 0,6 (0,9) visites, p = .0001) (Barsky et al., 1999). Pourtant, dans cette étude, les personnes ayant un trouble panique avaient moins de problèmes de santé majeurs que les patients sans trouble panique (moyenne (ET) = 0,31 (0,62) problèmes vs 0,92 (1,26) problèmes, p = .0001) (Barsky et al., 1999). Similairement, une autre étude rapporte qu’en comparaison à d’autres troubles anxieux, le trouble panique est celui qui affiche la plus grande utilisation des services de santé (Deacon, Lickel, & Abramowitz, 2008). Par exemple, les patients ayant un trouble panique ont eu plus de visites à l’urgence que les patients ayant un trouble obsessionnel compulsif (TOC), une phobie sociale ou une phobie spécifique. Ils cumulent davantage de visites chez le médecin de famille que les personnes ayant un TOC, une phobie sociale ou un trouble d’anxiété généralisée (TAG) et ont davantage d’examens en cardiologie que les personnes ayant une phobie sociale, une phobie spécifique, un TOC ou un TAG (Deacon et al., 2008).

Évolution naturelle

Le trouble panique apparaît généralement à la fin de l’adolescence ou au début de l’âge adulte, la majorité des cas se déclarant entre 13 et 26 ans (Wittchen et al., 2008). L’âge moyen d’apparition est de 23,6 ans (Kessler et al., 2006). Toutefois, le trouble panique avec agoraphobie tend à apparaître légèrement plus tôt, soit vers 22,9 ans (Kessler et al., 2006). Son apparition serait précédée de symptômes anxieux d’intensité sous-clinique, telles des préoccupations concernant la santé ou des inquiétudes (Cosci, 2012; Cosci & Fava, 2012). L’apparition des premières attaques de panique concorde souvent avec la survenue d’événements stressants (Klauke, Deckert, Reif, Pauli, & Domschke, 2010).

L’évolution longitudinale du trouble panique est caractérisée par une ou plusieurs périodes symptomatiques de durée et d’intensité variables (Nay, Brown, & Roberson-Nay, 2013). Une récente étude rapporte que 74,7% des personnes ayant un trouble panique et 66,7% de celles ayant également de

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l’agoraphobie ne répondent plus aux critères diagnostiques trois ans plus tard (Nay et al., 2013). Une seconde étude longitudinale effectuée sur une période de huit ans a estimé des taux de rémission (période de deux mois durant laquelle les symptômes sont occasionnels ou absents) du trouble panique sans agoraphobie de 69% pour les hommes et de 76% chez les femmes (Yonkers, Bruce, Dyck, & Keller, 2003). Ces taux de rémission élevés ne signifient toutefois pas que le trouble panique se résorbe de lui-même de façon définitive, mais plutôt que l’intensité des symptômes varie dans le temps. Par exemple, dans l’étude de Nay et al. (2013), 11,1% à 12,3% des participants répondant aux critères diagnostiques du trouble panique avec ou sans agoraphobie au temps 1 rapportaient des symptômes de panique d’intensité sous-clinique trois ans plus tard au temps 2. Parmi les participants ayant des antécédents de trouble panique et qui ne rapportaient pas de symptômes au temps 1, 11,9% ont eu un second épisode de trouble panique trois ans plus tard, au temps 2 (Nay et al., 2013). L’instabilité du diagnostic est cependant plus marquée dans le trouble panique seul que dans le trouble panique avec agoraphobie (Nay et al., 2013). Sur une période de huit ans, les taux de période de rémission pour le trouble panique sans agoraphobie s’élèveraient à 21% chez les hommes et à 64% chez les femmes (Yonkers et al., 2003). Le taux de période de rémission chez les personnes ayant un trouble panique avec agoraphobie est de 35% pour les hommes et de 39% pour les femmes (Yonkers et al., 2003). Le trouble panique serait également caractérisé par un taux élevé de rechutes. Effectivement, pour les personnes ayant un trouble panique sans agoraphobie, le taux de rechute rapporté est de 21% chez les hommes et de 64% chez les femmes (Yonkers et al., 2003). Pour ceux souffrant également d’agoraphobie, le taux de rechute rapporté est de 42% chez les hommes et de 50% chez les femmes (Yonkers et al., 2003). De plus, les personnes ayant des antécédents de trouble panique ont un risque accru d’avoir un second épisode de trouble panique ultérieurement, ce qui appuie l’hypothèse que le trouble panique tend à évoluer par rémission et rechutes (Nay et al., 2013).

Certains facteurs spécifiques seraient associés à davantage de rechutes et de chronicité. Par exemple, le fait d’être une femme, d’être jeune, d’avoir un TAG, d’être en couple ou de traverser une crise financière majeure sont associés à un plus haut risque de rechute (Nay et al., 2013). Également, la comorbidité avec la dépression (Roy-Byrne et al., 2000) ou le TAG (Nay et al., 2013) serait associée à un niveau plus élevé de chronicité, alors que la comorbidité avec une phobie sociale serait associée à davantage de rechutes (Yonkers et al., 2003).

Étiologie et modèle conceptuel cognitif comportemental

Étiologie : Modèle de la triple vulnérabilité

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l’interaction entre trois types de vulnérabilités: la vulnérabilité biologique générale, psychologique générale et psychologique spécifique (Barlow, 2000). Les deux premiers éléments sont qualifiés de vulnérabilités générales puisqu’ils englobent des facteurs de risque pour plusieurs troubles anxieux. Le troisième élément est, quant à lui, qualifié de vulnérabilité spécifique puisqu’il est composé de facteurs de risques propres à un trouble particulier, ici, le trouble panique (Barlow, 2000; Craske & Barlow, 2014).

Le premier type de vulnérabilité générale, soit la vulnérabilité biologique, comporte un ensemble de prédispositions génétiques. La vulnérabilité issue du patrimoine génétique s’exprime notamment à travers certaines dimensions du tempérament et certains traits de personnalité hérités, plus particulièrement le névrosisme (Hettema, Neale, Myers, Prescott, & Kendler, 2006; Khan, Jacobson, Gardner, Prescott, & Kendler, 2005; Longley, Watson, Noyes Jr, & Yoder, 2006), l’affectivité négative (Brown, Chorpita, & Barlow, 1998), l’inhibition comportementale et l’évitement du danger (Asselmann, Wittchen, Lieb, & Beesdo-Baum, 2016; Beesdo-Baum et al., 2015; Biederman et al., 1993; Rosenbaum et al., 1993). Puisque ces dimensions du tempérament et ces traits de personnalité constituent un facteur de vulnérabilité biologique général, ils sont associés à un plus grand risque de développer non seulement un trouble panique, mais également divers autres troubles anxieux et dépressifs.

Le second type de vulnérabilité, soit la vulnérabilité psychologique générale, serait acquis par les expériences précoces de l’enfance. Plus précisément, cette vulnérabilité se développerait lorsqu’un enfant est exposé à des expériences dans lesquelles il a un faible sentiment de contrôle perçu sur ce qui lui arrive (Barlow, 2000). Entre autres, un style parental contrôlant, laissant peu de place à l’autonomie de l’enfant, serait impliqué dans l’apparition d’une vulnérabilité générale à l’anxiété et aux troubles dépressifs (Barlow, 2000). Cette vulnérabilité agirait comme un médiateur entre l’anxiété et un éventuel événement stressant, de sorte à amplifier la réponse à face à cet événement (Chorpita, Brown, & Barlow, 1998).

Tout comme la vulnérabilité psychologique générale, la vulnérabilité psychologique spécifique (troisième type de vulnérabilité) est acquise durant l’enfance par un processus d’apprentissage. Lors de ses expériences précoces, l’enfant apprend ce qui est dangereux dans son environnement en observant les réactions de ses proches face à diverses situations. Donc, si l’enfant observe, par exemple, que sa mère réagit devant l’anxiété comme si celle-ci représentait un danger réel, il risque également de développer une telle crainte. Les recherches effectuées sur le sujet ont identifié plus particulièrement deux types de comportements qui, lorsque observés par des enfants, prédisposeraient ces derniers à développer un trouble panique ultérieurement. Il s’agit de la crainte de l’anxiété et du rôle de malade, qui seront détaillés dans les paragraphes suivants.

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Le premier comportement parental qui a été relié à l’apparition du trouble panique est la crainte de l’anxiété. Les recherches indiquent qu’un enfant qui observe chez ses proches des comportements de crainte ou d’évitement face aux sensations intéroceptives reliées à l’anxiété ou qui est directement renforcé à craindre ces sensations serait davantage enclin à développer lui-même cette peur (Clark & Ehlers, 1993; Ehlers, 1993). C’est par ce processus que se développerait la sensibilité à l’anxiété, qui se définit comme étant la peur des manifestations somatiques de l’anxiété, associée à la croyance que l’anxiété a des conséquences négatives sur le plan de la santé physique ou mentale, qu’elle cause de la gêne ou davantage d’anxiété (Reiss, Peterson, Gursky, & McNally, 1986; Sandin, Sánchez-Arribas, Chorot, & Valiente, 2015). Une étude récente a comparé des mères ayant un trouble panique à des mères sans trouble panique concernant leur réaction lorsque leurs enfants avaient des symptômes ressemblant à des symptômes de panique (de Albuquerque, Munsch, Margraf, & Schneider, 2013). Puis, ils comparaient les mères sur leur façon d’agir lorsqu’elles avaient des symptômes de panique. Les résultats indiquent qu’il n’y aurait pas de différence significative quant à la réaction qu’ont les mères avec ou sans trouble panique lorsque leurs enfants rapportent des symptômes (de Albuquerque et al., 2013). Par contre, les mères ayant un trouble panique étaient significativement plus enclines à avoir des comportements maintenant les symptômes de panique et à impliquer leurs enfants lorsqu’elles avaient de tels symptômes (p. ex. en demandant à l’enfant de l’aider avec certaines tâches lorsqu’elles avaient des symptômes de panique) (de Albuquerque et al., 2013). Donc, il est possible que les enfants acquièrent une réactivité face à l’anxiété par processus de modelage (de Albuquerque et al., 2013). Les personnes qui ont acquis un haut niveau de sensibilité à l’anxiété seraient davantage à risque d’attaques de panique que ceux ayant un faible niveau de sensibilité à l’anxiété (Maller & Reiss, 1992). Au cours d’une étude effectuée auprès d’étudiants du collégial, des chercheurs ont mesuré la sensibilité à l’anxiété à deux reprises, à trois ans d’intervalle. Les résultats indiquent que les étudiants qui avaient une sensibilité à l’anxiété élevée au temps 1 avaient tendance à rapporter davantage d’attaques de panique dans l’année précédant le temps 2 (Maller & Reiss, 1992). La sensibilité à l’anxiété au temps 1 prédisait à la fois le nombre, la fréquence et l’intensité des attaques de panique (Maller & Reiss, 1992). Similairement à ce qui a été observé chez les étudiants du collégial, une étude effectuée auprès de personnes ayant un trouble panique révèle que la sensibilité à l’anxiété serait directement reliée à la sévérité des symptômes de panique dans cette population (Bentley et al., 2013).

Le second comportement parental qui a été relié à l’apparition du trouble panique est l’adoption du rôle de malade par le parent, c’est-à-dire de demander des attentions spéciales ou d’éviter les efforts lorsque des symptômes d’anxiété ou de panique surviennent. En effet, les enfants qui ont vu leurs parents réagir de cette manière lorsque ces derniers éprouvaient des symptômes reliés à l’anxiété ou à la panique (étourdissements, nausées, rythme cardiaque accéléré, respiration difficile) seraient davantage à risque de

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contact avec la maladie pourrait avoir un effet similaire, puisque les enfants dont un membre de la famille souffre d’une maladie chronique seraient plus à risque de développer un trouble panique ultérieurement (Ehlers, 1993).

Attaque de panique initiale

Afin de mieux comprendre comment s’installe un trouble panique chez un individu à la suite d’une première attaque de panique, il convient d’aborder les concepts d’alarme, de fausse alarme et d’alarme apprise, tels que conceptualisés par Bouton, Mineka, and Barlow (2001). Le système nerveux humain est doté d’un système d’urgence qui a pour objectif de préserver l’organisme du danger par des réactions de fuite ou de combat (Cannon, 1929). Face à un danger, ce système s’active, entraînant des modifications physiologiques, émotives et cognitives qui servent à mobiliser le maximum de ressources pour survivre (Cannon, 1929). Par exemple, le cœur bat plus vite et augmente ainsi l’apport de nutriments aux muscles afin que l’individu puisse fuir ou combattre plus efficacement. C’est ce qu’on appelle une réaction d’alarme (Barlow, 2000). Il arrive toutefois que cette réaction d’alarme soit déclenchée en l’absence de danger : c’est la fausse alarme (Barlow, 2000). Cette réaction se caractérise par un début subit, une impression de désastre imminent accompagnée de symptômes physiques intenses à l’origine d’une détresse prononcée (Barlow, 2000). C’est ce qui se produit lors d’attaques de panique inattendues ou sporadiques (Bouton et al., 2001). D’ailleurs, celles-ci seraient fréquentes dans la population générale. En effet, selon les données épidémiologiques du National Comorbidity Survey Replication, 22,7% de la population auraient au moins une attaque de panique à vie alors que 3,7% développeraient un trouble panique (Kessler et al., 2006). Chez la plupart des personnes, une attaque de panique n’entraînera pas un trouble panique. Toutefois, lorsqu’une attaque de panique survient chez un individu présentant les vulnérabilités mentionnées précédemment, cette expérience est vécue avec une grande détresse et crée un premier conditionnement entre la peur, certaines sensations intéroceptives et, parfois, des caractéristiques de l’environnement (Bouton et al., 2001). L’individu se met à être plus vigilant à certaines sensations intéroceptives qui ressemblent à celles ressenties lors du premier épisode de panique (Clark & Ehlers, 1993). Celles-ci deviennent alors des précurseurs potentiels d’attaques de panique. Graduellement, il se crée un conditionnement intéroceptif qui fait que l’exposition à ces sensations provoque une réponse anxieuse automatique, qui, elle, peut mener vers une attaque de panique (Bouton et al., 2001). De plus, les lieux dans lesquels se produisent les symptômes de panique peuvent aussi devenir associés à une réponse anxieuse automatique (Bouton et al., 2001).

En plus des réponses anxieuses automatiques, la personne souffrant d’un trouble panique vit une importante anxiété d’appréhension face aux situations dans lesquelles elle pourrait avoir une attaque de panique (Bouton et al., 2001). Contrairement à la peur ressentie lors des attaques de panique, cette anxiété

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est définie comme étant une détresse diffuse, une appréhension accompagnée de tension, sans stimulus de danger précis et immédiat (Bouton et al., 2001; Lang, Davis, & Ohman, 2000). Elle génère une activation physiologique, mais celle-ci demeure moins intense et de plus longue durée que lors d’une réponse de peur ou d’alarme (Lang et al., 2000). De plus, elle n’aboutit pas systématiquement à un comportement d’évitement ou d’échappement (Lang et al., 2000).

Cercle vicieux de la panique

Chez les personnes souffrant de trouble panique, l’expérience de l’anxiété génère de l’anxiété. Tel que décrit précédemment, lors de la première attaque de panique, un conditionnement s’effectue entre les sensations physiques ressenties et l’anxiété (Acheson, Forsyth, & Moses, 2012; Craske, Sanderson, & Barlow, 1987). C’est ce que l’on nomme le conditionnement intéroceptif (Razran, 1961). Dès lors, le seul fait de ressentir ces sensations provoque de l’anxiété (Bouton et al., 2001). Or, cette anxiété a comme manifestations les mêmes sensations qui ont préalablement été associées à des épisodes de panique par conditionnement, ce qui génère encore davantage d’anxiété. Les sensations physiques accentuent donc l’anxiété, qui elle, accentue les sensations physiques (Craske & Barlow, 2014).

Ce cercle vicieux est également entretenu par les croyances dysfonctionnelles concernant les conséquences des sensations intéroceptives (Clark, 1986). Ainsi, lorsque l’anxiété est ressentie, il y a interprétation des sensations associées comme étant le signe d’une catastrophe ou d’un danger imminent (Clark, 1986). Par exemple, la personne qui entretient de telles croyances peut craindre que l’accélération de son rythme cardiaque soit la manifestation d’un grave problème de santé. Cette interprétation lui amène davantage d’anxiété, ce qui alimente encore une fois le cycle anxiété-sensations intéroceptives (Clark, 1986).

Afin de sortir de cette escalade d’anxiété, les personnes ayant un trouble panique ont comme réaction de s’échapper des situations anxiogènes ou d’éviter d’y être confrontées (Salkovskis, Clark, & Gelder, 1996). Néanmoins, ce comportement ne fait que maintenir le cycle de la panique. En évitant, l’individu ne soumet pas ses croyances à l’épreuve des faits. Il n’a donc pas la chance d’infirmer ces croyances, qui elles, continuent à alimenter l’anxiété (Salkovskis et al., 1996).

Difficultés de sommeil associées au trouble panique

Les personnes ayant un trouble panique rapportent fréquemment des difficultés de sommeil (Lijun et al., 2012). La littérature scientifique fait état de deux types de difficultés de sommeil chez les personnes ayant un trouble panique : l’insomnie et les attaques de panique nocturnes (APN). Certains auteurs mettent de

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l’avant que les difficultés de sommeil3 pourraient maintenir le trouble panique et, inversement, que le trouble

panique pourrait maintenir les difficultés de sommeil (Uhde, 1994). Compte tenu que de telles interactions pourraient nuire au traitement du trouble panique, la recherche sur ce sujet revêt une grande importance. C’est pourquoi la présente thèse porte sur les difficultés de sommeil associées au trouble panique, ainsi que sur leurs impacts sur la thérapie cognitive comportementale (TCC). Les paragraphes qui suivent sont consacrés à la description de l’insomnie et des APN, ainsi qu’à l’explication des interactions entre ces difficultés de sommeil et le trouble panique. Cette revue établira les bases théoriques pour les deux articles constituant le présent ouvrage, qui décriront les difficultés de sommeil associées au trouble panique et exploreront le traitement séquentiel du trouble panique et de l’insomnie.

Insomnie

Définition de l’insomnie

Malgré le fait que l’insomnie ait fait l’objet de nombreuses recherches, il n’existe actuellement pas de définition universelle de l’insomnie. Plusieurs systèmes de classification ont élaboré des critères diagnostiques dont le DSM-IV et 5, l’International Classification of Sleep Disorders (l’ICDS) et l’International Classification of Diseases (ICD-10). Il existe également divers critères utilisés dans le domaine de la recherche, dont ceux qui ont été employés dans le cadre de la présente thèse. Selon ces critères, l’insomnie se définit comme étant une difficulté à initier ou à maintenir le sommeil, ou des éveils matinaux précoces. Ces difficultés doivent être présentes au moins trois fois par semaine et doivent être à l’origine d’une détresse (préoccupation ou insatisfaction concernant le sommeil) ou d’un dysfonctionnement diurne significatifs. Cette définition de l’insomnie est semblable à celle du « trouble d’insomnie » du DSM-5, à l’exception du critère de durée des difficultés. En effet, le DSM-5 indique que les difficultés doivent durer depuis au moins trois mois, alors que les critères de recherche de Morin (1993) réfèrent plutôt à une durée minimale d’un mois. Tout au long du présent ouvrage, ces critères de recherche serviront de cadre de référence.

Prévalence et comorbidités

L’insomnie est très répandue dans la population générale. Une récente étude effectuée auprès de 2000 participants canadiens a révélé que 13,4% d’entre eux répondaient à l’ensemble des critères de recherche mentionnés précédemment (difficulté à initier ou à maintenir le sommeil ou des éveils précoces et la

3 Dans le présent ouvrage, le terme « difficultés de sommeil » englobe à la fois l’insomnie et les APN. Ainsi, pour désigner un seul des deux troubles, le terme spécifique (c.à.d. insomnie ou APN) est utilisé.

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fréquence de trois fois par semaine depuis au moins un mois avec dysfonctionnement ou détresse significative) (Morin et al., 2011). Lorsqu’on considère uniquement les critères de difficulté à initier ou à maintenir le sommeil ou des éveils précoces trois fois par semaine, ce pourcentage s’élève à 40,2% (Morin et al., 2011).

L’insomnie est fréquemment présente en comorbidité avec divers troubles de nature physique ou psychiatrique. En effet, 40% des personnes souffrant d’insomnie auraient également un trouble psychiatrique (Ford & Kamerow, 1989; McCall, 2001). L’insomnie serait souvent présente en comorbidité avec des maladies physiques chroniques telles l’arthrite, certaines maladies cardiaques (insuffisance cardiaque, maladie des artères coronaires), rénales, neurologiques (démence d’Alzheimer, maladie de Parkinson) et gastro-intestinales (reflux gastro-oesophagien) (Ancoli-Israel, 2006). De plus, il existerait chez les personnes souffrant d’insomnie une prévalence élevée des troubles du sommeil tels le syndrome des jambes sans repos (Phillips, Hening, Britz, & Mannino, 2006) et les troubles du sommeil liés à la respiration (Lavie, 2007). D’ailleurs, une revue de la littérature a recensé les études documentant la comorbidité entre l’apnée du sommeil et l’insomnie. Cette étude rapporte que 29% à 67% des patients souffrant d’insomnie auraient de l’apnée obstructive du sommeil (indice d’apnée-hypopnée > 5), et que 39% à 58% des personnes souffrant d’apnée obstructive du sommeil auraient également de l’insomnie (Luyster, Buysse, & Strollo, 2010). Cette forte prévalence de l’apnée, ainsi que des autres troubles comorbides mentionnés, souligne l’importance de considérer les troubles comorbides lors d’une évaluation clinique puisqu’ils pourraient constituer des déclencheurs de l’insomnie et pourraient entretenir celle-ci au long cours.

Modèle cognitif de l’insomnie

Bien que les comorbidités puissent jouer un rôle dans l’apparition et le maintien de l’insomnie, il existe des facteurs cognitifs et comportementaux qui alimentent l’insomnie et qui sont présents même en l’absence de causes externes (p.ex. comorbidités, événements stressants). Morin (1993) a développé un modèle explicatif de l’insomnie dans lequel il explique comment les pensées et comportements interagissent pour créer un cercle vicieux qui entretient les difficultés de sommeil. Selon ce modèle, les individus insomniaques entretiennent des croyances erronées à propos du sommeil. Celles-ci sont source d’inquiétudes, qui, elles, sont à l’origine d’une activation physiologique, cognitive et émotionnelle incompatible avec le sommeil. Au fil du temps, il se crée une association entre cet état d’activation et le contexte relié au sommeil (chambre à coucher, routine pré-sommeil, être dans son lit, etc.). En raison de cette association, le simple fait de se mettre au lit provoque déjà une activation qui est incompatible avec le sommeil. L’individu développe alors des stratégies dysfonctionnelles pour tenter de compenser le manque de sommeil. Par exemple, il peut tenter de se coucher trop tôt et passer beaucoup de temps au lit à tenter de s’endormir alors

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qu’il ne se sent pas encore somnolent. Ces stratégies renforcent à leur tour les croyances dysfonctionnelles à propos du sommeil. En effet, si l’individu croit qu’il est incapable de s’endormir rapidement, le fait d’aller se coucher tôt alors qu’il n’est pas encore somnolent fait en sorte qu’il ne s’endort pas rapidement, ce qui confirme sa croyance.

En s’inspirant des modèles cognitifs des troubles anxieux, Harvey (2002) a détaillé davantage l’aspect cognitif et comportemental de l’insomnie. Selon cette auteure, il existe des mécanismes qui maintiennent l’insomnie, en plus de sa cause initiale. Dans le prochain paragraphe, ces facteurs de maintien seront expliqués. La figure 34, résume de façon graphique les différentes composantes du modèle ainsi que leurs interactions.

Harvey (2002) stipule que les personnes souffrant d’insomnie seraient plus enclines à avoir une activité cognitive à valence négative avant d’aller au lit. Celles-ci anticiperaient les difficultés de sommeil à venir et s’inquiéteraient de façon excessive des effets d’un manque de sommeil, le tout alimenté par des croyances dysfonctionnelles à propos du sommeil (p. ex. « Si je ne dors pas cette nuit, je serai complètement incapable de fonctionner demain »). Cette activité cognitive serait liée à une activation physiologique et à une détresse sur le plan émotionnel qui seraient incompatibles avec l’endormissement. L’activation serait à l’origine d’un biais attentionnel envers tous les signes de menaces potentielles au sommeil. Concrètement, la personne se mettrait à scruter son environnement (p. ex. horloge) ainsi que ses sensations internes (rythme cardiaque, tensions musculaires) qui confirmeraient ses craintes de manquer de sommeil ou d’être affectée par son manque de sommeil. Elle détecterait alors des stimuli, qui sont, aux yeux d’un bon dormeur, imperceptibles ou non pertinents, et les interprèterait de façon erronée comme des signes d’insomnie ou de fatigue excessive. Par exemple, elle pourrait se dire : « Cela fait déjà plus de 15 minutes que je suis couchée et je me sens encore tendue, je suis incapable de m’endormir ce soir, je vais encore passer une nuit blanche! ». Le fait de scruter attentivement tous les signaux reliés au sommeil amènerait également une surestimation des difficultés de sommeil et une sous-estimation du temps réel dormi, ce qui alimenterait davantage les inquiétudes et ruminations à propos du sommeil. Tel que mentionné précédemment dans la description du modèle de Morin (1993), étant donné ses préoccupations face au sommeil, l’individu souffrant d’insomnie développerait des comportements qu’il croit aidants (p. ex. se coucher tôt pour s’assurer d’avoir assez de sommeil), mais qui, en réalité, nuisent à son sommeil tout en l’empêchant d’infirmer ses croyances et perceptions erronées (p. ex. se croire incapable de s’endormir rapidement).

Durant le jour, des processus similaires s’activeraient, notamment l’attention sélective envers les indices confirmant le manque de sommeil ainsi que l’effet délétère de celui-ci sur la performance ou sur la santé à long terme (Harvey, 2002). Il peut alors se développer d’autres comportements de sécurité qui, encore

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une fois, préservent les croyances dysfonctionnelles. Par exemple, à la suite d’une mauvaise nuit de sommeil, la personne pourrait décider d’annuler les activités qu’elle avait prévues parce qu’elle se croit incapable de les faire. Par contre, le fait qu’elle n’y participe pas lui enlève l’occasion de constater qu’elle pourrait probablement fonctionner normalement, même si elle n’est pas au sommet de sa forme. Le tout alimenterait davantage les inquiétudes et ruminations face à la nuit à venir et au sommeil en général. La personne peut en venir à croire en l’utilité de ces inquiétudes pour la protéger de l’impact de l’insomnie, ce qui les entretient davantage. Par ailleurs, certaines études indiquent que les personnes souffrant d’insomnie auraient davantage tendance à inhiber le traitement émotif et cognitif des événements de leur quotidien (Kales, Caldwell, Preston, Healey, & Kales, 1976; Kales, Caldwell, Soldatos, Bixler, & Kales, 1983). Ainsi, au moment du coucher, l’individu repenserait à ces événements, ce qui augmenterait l’activation émotionnelle, cognitive et physiologique (Bootzin & Rider, 1997; Harvey, 2000, 2001). La réaction de l’individu insomniaque serait alors de tenter de supprimer ces pensées, stratégie peu efficace et pouvant être à l’origine d’un effet rebond, donc d’une plus grande intrusion des pensées que la personne tente de supprimer.

L’ensemble des facteurs décrits s’articulerait à la manière d’un cycle qui s’entretient par lui-même. Malgré le fait qu’à l’origine, il pourrait ne pas y avoir de déficit important du sommeil, il semblerait qu’après un certain temps, il se créerait un déficit réel de sommeil4. Celui-ci aurait pour effet d’entretenir davantage

l’ensemble des facteurs de maintien de l’insomnie.

Insomnie chez les personnes ayant un trouble panique

Les données concernant l’insomnie, incluant celles associées au trouble panique, sont habituellement divisées en deux catégories selon le type d’instrument de mesure utilisé. La première catégorie est constituée des données dites subjectives, qui sont des données rapportées par la personne elle-même, le plus souvent par l’intermédiaire de questionnaires autorapportés ou d’une entrevue clinique. La seconde catégorie est celle

4 Le modèle cognitif de Harvey (2002) ne tient pas compte de récents résultats de recherche selon lesquels certains individus insomniaques n’ont pas de déficit de sommeil objectivé (Fernandez-Mendoza et al., 2011). Ces individus surestimeraient leur latence d’endormissement et sous-estimeraient leur temps de sommeil. Actuellement, il n’est pas encore clair comment ces résultats de recherche pourraient s’intégrer dans le modèle cognitif. Certaines explications sont été proposées, mais demeurent à confirmer (Harvey & Tang, 2012). Ainsi, dans le cadre du présent ouvrage, nous postulerons que la partie du modèle traitant de déficit du sommeil pourrait ne pas s’appliquer à certains individus.

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des données dites objectives, qui sont des données qui ont été enregistrées à l’aide d’instruments mesurant des paramètres physiques (p. ex. temps de mouvement) ou physiologiques (p. ex. fréquence respiratoire, activité électrique du cerveau). Elle comprend les mesures de polysomnographie et d’actigraphie. Les mesures subjectives et objectives rapportent des informations différentes et complémentaires. Les mesures subjectives peuvent fournir l’historique et la fréquence de l’insomnie, l’évaluation subjective de la qualité, de la durée du sommeil et du sentiment de repos au réveil ainsi que le degré de dysfonctionnement qui résulte de l’insomnie. Par contre, les estimations temporelles subjectives comprennent un certain degré d’imprécision dû au biais de rappel et à la sous-estimation du temps dormi que l’on retrouve fréquemment chez les personnes souffrant d’insomnie (Harvey & Tang, 2012). Les mesures objectives n’ont pas ce biais puisqu’elles sont issues de données physiques et physiologiques mesurées par des appareils. Elles fournissent donc des données plus exactes quant à la durée du sommeil et des éveils. De plus, elles apportent des informations concernant les divers stades du sommeil. Néanmoins, elles ne peuvent pas fournir une évaluation du dysfonctionnement diurne, de la qualité du sommeil et de la détresse causée par l’insomnie. De plus, leur coût, leur complexité et les ressources technologiques qu’elles nécessitent les rendent moins accessibles et moins pratiques pour estimer la fréquence de l’insomnie au long cours ou dans de grands échantillons. Ainsi, les limites des mesures objectives sont comblées par les forces des mesures subjectives et vice versa. Considérant que cette complémentarité permet de dresser un portrait plus complet de l’insomnie, les prochains paragraphes traiteront autant de mesures subjectives que de mesures objectives du sommeil chez les personnes ayant un trouble panique.

Données subjectives

Les personnes souffrant d’un trouble panique rapportent fréquemment de l’insomnie. Plusieurs études rapportent une diminution de la qualité générale du sommeil chez les personnes ayant un trouble panique (Hoge et al., 2011; Saletu-Zyhlarz et al., 2000; Stein, Chartier, & Walker, 1993; Todder & Baune, 2010). Les difficultés à initier (Arriaga, Lara, Matos-Pires, Cavaglia, & Bastos, 1995; Hranov, 2002; Lepola, Koponen, & Lienonen, 1994; Mellman & Uhde, 1989; Okasha et al., 1994) et à maintenir le sommeil (Lepola et al., 1994), ainsi qu’un sommeil fragmenté (Lepola et al., 1994) seraient très répandus chez ces individus. Ces difficultés auraient des conséquences diurnes, dont une somnolence excessive (Overbeek, van Diest, Schruers, Kruizinga, & Griez, 2005) ainsi qu’un manque d’énergie pour effectuer les activités quotidiennes (Saletu-Zyhlarz et al., 2000).

Les études traitant des altérations subjectives du sommeil chez les personnes ayant un trouble panique sont caractérisées par une grande diversité dans les mesures rapportées. Parmi ces mesures on retrouve notamment l’Index de Qualité du Sommeil de Pittsburgh (IQSP), qui a été cité par plusieurs auteurs

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(Hoge et al., 2011; Saletu-Zyhlarz et al., 2000; Stein, Chartier, et al., 1993; Todder & Baune, 2010), l’Échelle de Dépression de Hamilton (HAM-D) (Arriaga et al., 1995; Hranov, 2002; Mellman & Uhde, 1989; Okasha et al., 1994), le Questionnaire de Spiegel (Arriaga et al., 1995), ou même des questionnaires non-standardisés (Mellman & Uhde, 1989; Singareddy & Uhde, 2009). Chacun de ces questionnaires a une définition particulière de l’insomnie. Par exemple, l’IQSP se base sur un index global de qualité du sommeil alors que le HAM-D utilise les notions d’insomnie initiale, de maintien et terminale, ce qui rend ces données difficilement comparables entre elles. Pour cette raison, il devient difficile de dresser un portrait clair des altérations du sommeil que rapportent les personnes ayant un trouble panique.

Données objectives

Considérant les plaintes subjectives d’insomnie chez les personnes ayant un trouble panique, plusieurs chercheurs ont tenté d’objectiver ces difficultés de sommeil à l’aide d’études polysomnographiques ou actigraphiques. En comparant le sommeil des personnes souffrant d’un trouble panique à celui de participants sains, ces études ont permis de mettre en évidence une augmentation de la latence du sommeil (Arriaga et al., 1996; Lydiard et al., 1989; Mellman & Uhde, 1989), ainsi qu’une diminution du temps total de sommeil (Arriaga et al., 1996; Lydiard et al., 1989; Mellman & Uhde, 1989; Sloan et al., 1999) et de l’efficacité du sommeil (Arriaga et al., 1996; Saletu-Zyhlarz et al., 2000) chez les participants avec un trouble panique. Une diminution de la durée et du pourcentage de sommeil slow-wave (Arriaga et al., 1996; Stein, Enns, & Kryger, 1993) et une augmentation du pourcentage de sommeil de stade 2 (Stein, Enns, et al., 1993) ont également été objectivés. Bref, selon ces résultats, les personnes ayant un trouble panique prendraient plus de temps à s’endormir, se réveilleraient plus fréquemment durant la nuit et auraient moins de sommeil profond que des participants contrôles sains.

Néanmoins, plusieurs études polysomnographiques ont obtenu des résultats contraires à ceux exposés jusqu’ici. En effet, les données rapportées par certains auteurs indiquent qu’il n’y aurait aucune différence significative dans la latence d’endormissement (Arriaga et al., 1996; Saletu-Zyhlarz et al., 2000; Stein, Enns, et al., 1993), l’efficacité du sommeil (Stein, Enns, et al., 1993), la durée des éveils (Stein, Enns, et al., 1993) et le temps total de sommeil (Arriaga et al., 1996) des participants ayant un trouble panique en comparaison aux contrôles sains. Quant aux différents stades du sommeil, des chercheurs ont rapporté que le pourcentage de sommeil des stades 1 et 2 (Arriaga et al., 1996) ainsi que de sommeil des stades 3 et 4 (Arriaga et al., 1996; Hauri, Friedman, & Ravaris, 1989) chez les participants ayant un trouble panique étaient similaires à ceux des participants contrôles. Les discordances entre ces résultats et ceux présentés dans le paragraphe précédent pourraient être reliés à la petite taille des échantillons des études polysomnographiques. En effet, étant donné les ressources financières, la technologie et l’expertise

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Table 2. Meta-Analysis Results for Self-Report Data
Table 4. Meta-analysis results for NPA prevalence  Frequency criteria  Event rate
Table 5. Study Description - Studies with Self-Report Data
Table 6. Study Description - Studies with Polysomnographic/Actigraphic Data
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