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Le bouillonnant silence de l'être : interdépendance ontologique et processus d'individuation

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Academic year: 2021

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(1)

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Le bouillonnant silence de l’être : interdépendance

ontologique et processus d’individuation

Serge Added

To cite this version:

Serge Added. Le bouillonnant silence de l’être : interdépendance ontologique et processus d’individuation. Philosophie. Université Toulouse le Mirail - Toulouse II, 2016. Français. �NNT : 2016TOU20033�. �tel-01715294�

(2)

&OWVFEFMPCUFOUJPOEV

%0$503"5%&-6/*7&34*5²%&506-064&

%ÏMJWSÏQBS

1SÏTFOUÏFFUTPVUFOVFQBS

5JUSF

²DPMF

EPDUPSBMF et discipline ou spécialité







6OJUÏEFSFDIFSDIF

%JSFDUFVSUSJDF TEFʾÒTF

Jury

:



5)µ4&

le

Université Toulouse - Jean Jaurès

Serge ADDED

29 juin 2016

Le bouillonnant silence de l’être :

interdépendance ontologique et processus d’individuation

ED ALLPH@ : Philosophie

ERRAPHIS (EA 3051)

Monsieur le Professeur Didier Debaise (rapporteur)

Monsieur le Professeur Pierre Montebello

Madame la Maître de Conférences Létitia Mouze

Monsieur le Professeur Jean-Michel Salanskis (rapporteur)

Monsieur le Professeur Pierre Montebello

Madame la Maître de Conférences Létitia Mouze

(3)

Doctorat
de
l’Université
de
Toulouse

délivré
par
l’Université
Toulouses
2
Jean-Jaurès Serge
 Added

Le
bouillonnant
silence
de
l’être
:

interdépendance
ontologique
et
processus
d’individuation

Directeurs
de
recherche
: Monsieur
le
Professeur
Pierre
Montebello Madame
la
Maître
de
Conférences
Létitia
Mouze Également
membres
du
jury
: Monsieur
le
Professeur
Didier
Debaise Monsieur
le
Professeur
Jean-Michel
Salanskis thèse
de
Doctorat
de
Philosophie Université
de
Toulouse
2
-
Jean
Jaurès Juin
2016

(4)

à
 celles
 et
 ceux
 dont
 l’amour
 m’a
 construit,

à
 celles
et
 ceux
 dont
 la
violence
 m’a
 façonné.

Remerciements

Plusieurs
 années
 de
 travail
 de
 philosophie
 constituent
 un
 parcours
 de
 vie
 semé
 de
 joies
 profondes,
 parfois
 de
doutes,
 de
 ténacité,
 de
quotidienneté
 laborieuse.
 J’ai
 plaisir
à
 remercier
 ici
 ceux
qui
 m’ont
 accompagné
 sur
ce
 chemin.
Monsieur
 Pierre
Montebello
 dont
 la
confiance
 m’a
honoré,
 dont
les
 cours
 furent
des
 ouvertures
de
portes
mentales,
 et
dont
les
remarques
 m’ont
tracé
des
voies
 de
travail.
Ma-dame
Létitia
 Mouze
dont
le
regard
 à
la
fois
 exigeant,
attentif
et
 bienveillant
fut
un
compagnon
 de
tous
 les
 instants,
 un
chaleureux
 soutien
autorisant
mes
 petites
audaces
et
 dont
les
 remarques
pertinentes
 et
les
conseils
avisés
furent
féconds
 ;
ce
travail
lui
doit
bien
plus
qu’elle
ne
le
 sait.
Mon
ami
Daniel
Gi-guet
qui
m’a
ouvert
sa
 large
bibliothèque
de
philosophie
et
qui
a
accepté
de
 relire
ce
texte.
Ma
compa-gne
et
épouse
 Isabelle
Adamczyk
qui
partagea
ce
 quotidien
de
recherche.
Ma
fille
 Jeanne
Added
dont
 les
 envolées
m’ont
 parfois
 montré
le
 chemin.
 Tous
 mes
amis
 dont
 les
questions
 et
 l’attention
ont
 été
 des
points
 d’appui.
Les
 auteurs
dont
les
 livres
ont
nourri
 et
sollicité
 ma
pensée.
Sans
 oublier
l’Univer-sité
Toulouse
2
 Le
Mirail,
aujourd’hui
Jean
Jaurès,
 les
enseignants
et
le
personnel
 administratif
du
Dé-partement
de
 Philosophie
et
de
 l’École
Doctorale
qui,
 depuis
huit
ans,
m’ont
 permis
de
réaliser
 ce
par-cours
 intellectuel,
 ainsi
que
 Messieurs
 Didier
Debaise
et
 Jean-Michel
 Salanskis
 qui
me
font
 l’honneur
 de
me
lire
et
de
discuter
cet
écrit.
Merci.

(5)

Introduction

La
question
 de
l’être
 est
une
des
 plus
discutée
 de
l’histoire
de
 la
philosophie.
 Martin
Hei-degger
l’a
renouvelée
au
vingtième
siècle
en
insistant
 sur
la
verbalité
du
mot
et
en
le
distin-guant
de
l’étant
au
point
qu’il
considérait
en
 1969
dans
Temps
et
Être
que
“La
tentative
de
 penser
 l’être
 sans
 l’étant
 devient
 une
 nécessité”1.
C’est
dans
cette
lignée
que
s’inscrit
le


présent
 travail
qui
 tentera
de
 mettre
 en
œuvre
 cette
 “nécessité”.
Toute
 l’œuvre
de
 Heideg-ger
traite
de
la
question
 de
l’être
;
dans
Être
et
Temps
[1927]
il
aborde
la
 question
du
sens
 de
 l’être,
et
 dans
Apports
 à
la
 philosophie
 :
 de
 l’avenance
[1936-1938]
 celle
 de
 sa
 vérité.
 L’ambition
 de
 notre
 texte
 est
 de
 donner
 à
 penser
 son
 mode
 de
 fonctionnement
 en
 tant
 qu’il
est
 distinct
(sans
être
indépendant)
 de
celui
de
l’étant.
 L’étant
est
ce
qui
 entre
en
pré-sence
;
ce
qu’est
l’être
est
l’objet
même
 de
cette
recherche.
La
tradition
occidentale
nous
a
 habitués
 à
appeler
 “être”
les
choses
 présentes
là-devant
 (un
 homme,
un
 chat,
une
 chaise
 ou
un
 texte)
;
le
lecteur
 sera
par
conséquent
peut-être
 surpris
de
constater
que
 cet
être
tel
 qu’il
est
 conçu
 habituellement
 est
 ici
nommé
 :
 étant.
 La
 définition
 de
 ce
 qu’est
 l’être
 est
 l’objet
 même
de
 cette
thèse.
 Disons
néanmoins
 d’emblée,
et
 dans
une
 première
approche
 susceptible
 de
 rendre
 le
 propos
 compréhensible,
 que
 l’être
 est
 plutôt
 conçu
 ici
comme
le
 mode
 de
 fonctionnement
 de
 l’étant
 (ce
qui
 le
 distingue
 de
 la
 conception
 heideggérienne
 sur
laquelle
 nous
 nous
 appuierons
 nénanmoins),
comme
 une
 activité,
 comme
l’énergie
 vi-bratoire
 ou
 le
 processus
qui
 amène
 l’étant
 à
 la
 présence.
 Ce
 texte
conçoit
 l’être
 et
 l’étant
 comme
indissociables
 l’un
 de
 l’autre,
 mais
comme
 ayant
 néanmoins
 une
 “vie”
autonome.
 Les
 étants
 rencontrent
 des
 étants
 (lors
d’une
 collision
par
 exemple),
 tandis
 que
 les
 êtres
 sont
 en
 contact
 avec
 d’autres
 êtres
 sans
 pour
 autant
 lâcher
 l’étant
 dont
 ils
 sont
 l’être.
 L’être
de
l’étant
 “homme”
sera,
parce
que
le
 plus
facilement
pensable,
le
 centre
du
propos,
 mais
c’est
bien
 de
tous
 les
êtres
 qu’il
sera
 question.
L’être,
 écrit
au
 singulier,
peut
 dès
lors
 tout
 aussi
 bien
 désigner
 l’être
de
 tel
 étant
 que
 l’activité
 de
 cet
 être,
voire
 l’activité
 de
 tout
 être
(s’il
s’agit
d’évoquer
la
généralité
d’un
mode
de
fonctionnement).
Le
rassemblement
en
 un
même
 terme,
par
 la
langue
française,
 du
verbe
 et
du
substantif,
 s’il
engendre
 une
 opa-cité
 avec
laquelle
 nous
nous
 débattrons,
crée
 un
 flou
et
 une
ambiguïté
 dynamiques
et
 fé-conds
qu’il
nous
faudra
tenter
de
penser.

L’intuition
de
départ
 est
donc
que
l’être
est
 une
activité
et
que
c’est
au
 travers
du
proces-sus
 d’individuation
 que
 peut
 se
 saisir
le
mode
 de
 fonctionnement
 de
 l’être ;
 la
 problémati-que
générale
de
cet
ouvrage
sera,
au
travers
 du
processus
sans
fin
de
construction
de
soi,
 de
 questionner
 :
 qu’est-ce
 que,
du
 point
 de
 vue
 de
 
l’être,
 être
soi ?
 La
 relation
 entre
 les
 êtres,
 leur
 interdépendance,
 devient
 par
 là
 le
 point
 de
 départ
 de
 l’analyse.
 Nous


(6)

tons
 partir
de
 la
 relation
 (entre
 les
 êtres)
 et
 non
 de
 la
 chose
 ou
 de
 la
 conscience.
 L’être
 n’est
rien
d’étant.
 Il
s’agit,
si
ce
n’est
de
 décrire
(comment
décrire
ce
qui
n’est
 pas
de
l’ordre
 de
l’étantité
 ?),
du
 moins
de
 donner
à
 penser
l’activité
insatiable
 de
ce
 rien.
En
 effet,
l’acti-vité
d’être
 apparaîtra
à
 la
fois
 comme
invisible
 et
silencieuse,
 et
comme
 tumultueuse,
multi-directionnelle
 et
incessante.
 La
tension
 entre
cette
 hyper-active
 interdépendance
 ontologi-que,
et
 les
processus
d’individuation
 des
êtres
sera
 non
seulement
 le
moteur
de
 notre
pro-pos,
 mais
 la
 façon
 de
 penser
 le
 mode
 de
 fonctionnement
 de
 ce
 bouillonnant
 silence
 de
 l’être.
 L’ambition
 de
 ce
 texte
 sera,
 à
 partir
 de
 là,
 de
 tenter
 de
 poser
 à
 nouveaux
 frais
la
 question
de
savoir
ce
qu’est
l’être.
Qu’est-ce
qu’être
?
Qu’est-ce
que
l’être
?

points
 de
 départ

Le
 premier
point
 de
 départ
 pour
 notre
 cheminement
 de
 pensée
 est
 par
 conséquent
 ce
 que
Heidegger
 appelle
la
“différence
ontologique”
 qui
distingue
l’être
de
 l’étant.
L’ontologie
 n’est
plus,
 sous
notre
 plume,
le
discours
 sur
l’étant,
 mais
devient
donc
 le
discours
 sur
l’être
 en
ce
qu’il
est
distinct
de
l’étant.
Non
pas
que
l’être
(ou
les
êtres)
flotterai(en)t
au-dessus
du
 monde
dans
 un
ciel
 éternel
des
 idées
tandis
que
 les
étants
 s’ébroueraient
dans
 le
devenir
 matériel
 de
 la
 réalité
 concrète
 ;
 nous
 concevons,
 au
 contraire,
 l’être-étant
 comme
formant
 une
unité
;
mais
nous
envisageons
de
dédoubler
 cet
être-étant
unifié
afin
de,
par
l’analyse,
 donner
 à
 penser
 le
mode
 de
 fonctionnement
 de
 chacune
 des
 deux
 faces
de
 ce
 que
 Hei-degger
 (dans
 la
 traduction
 d’André
 Préau)
 appelle
 le
 Pli2.
Comment
comprendre
cette


“différence”
 ?
 Alors
même
que
 cette
 expression
 passe
 pour
 être
 au
centre
 de
 sa
 pensée,
 Heidegger
lui-même
 ne
l’explicite
pas
 vraiment
et
ne
 l’évoque
que
 lorsqu’il
la
met
en
œuvre
 dans
 son
 analyse,
 sans
 en
 faire
 l’objet
 d’une
 analyse
 particulière.
 Il
ne
 l’utilise
 pas
 dans
 Être
 et
 temps
;
 elle
 apparaît
 dans
 son
 cours
 de
 l’été
 1927
 intitulé
 Les
 problèmes
 fonda-mentaux
 de
 la
 phénoménologie
où
 il
évoque
 “…
la
 différence
 ontologique,
 c’est-à-dire
la
 scission
 entre
l’être
 et
 l’étant”3

,
c’est-à-dire
la
réaffirmation
d’une
distinction.
Tentons
néan-moins
de
nous
en
approcher.

La
 première
 approche
 pour
 s'efforcer
 de
 la
 saisir
 est
 celle
 que
 nous
 venons
 déjà
 d’employer :
 énoncer
 ce
 qu’elle
n’est
 pas.
 L’être
 n’est
 pas
 l’intelligible
dont
 l’étant
 serait
 le
 sensible.
 La
 distinction
être/étant
 telle
 que
 nous
la
 mettons
 en
 œuvre
ne
reconduit
 pas
 la
 distinction
 intelligible/sensible.
 L’intelligible
 d’un
 sensible
 particulier
 ne
 se
 s’auto-construit
 pas,
 n’entre
 pas
 en
 relation
 avec
 d’autres
 intelligibles
 en
 vue
 de
 sa
 propre
 construction.
 Alors
que
 pour
nous
 -
c’est
 la
thèse
 que
 nous
 entendons
 défendre
 -
être,
 c’est
le
 proces-sus
 d’individuation
 lui-même.
Être
 n’est
 donc
 pas
 une
 intelligibilité
 stable
 et
 indépendante


2
Martin
Heidegger
.-
Essais
et
conférences
[1954],
Paris,
Gallimard
(Tel),
1958,
p289

3
Pascal
David
in
Le
Dictionnaire
Martin
Heidegger,
sous
la
direction
de
Philippe
Arjakovsky,
François
Fédier,


(7)

des
 accidents.
 Être
 est
 une
 activité
 qui
 consiste
 non
 seulement
 à
 pousser
 l’étant
 dans
 la
 présence,
mais
également
à
 se
construire.
Comment
?
En
absorbant
 de
l’être,
en
involuant
 de
l’être
 et
en
 exprimant
l’être
 qu’il
tente
d’être.
 L’explication
de
 ces
trois
 termes
(absorber,
 exprimer
et
involuer)
et
la
description
de
ce
dont
ils
rendent
compte,
sera
l’objet
de
nos
trois
 premières
parties.
 L’interdépendance
 des
 êtres
 les
uns
vis-à-vis
des
 autres
est
le
 milieu
qui
 permet
 à
 ces
trois
 activités
 d’être
 de
 se
réaliser.
 La
 tension
 principale
 est
donc
 bien
 entre
 cette
interdépendance
et
le
processus
d’individuation.

L’être
en
 tant
qu’il
 est
distinct
 de
l’étant
 n’est
donc
 pas
l’idée
 générale
et
 abstraite
 atten-dant
son
incarnation
dans
la
réalisation
particulière
de
 ce
qu’elle
est.
Dans
la
différence
on-tologique
 telle
que
 nous
 la
comprenons
 et
 la
mettons
 en
 œuvre,
l’être
 n’est
 pas
dans
 l’es-prit
de
 celui
 qui
 conçoit
 avant
 de
 produire
 ou
 dans
 la
 conscience
 analytique
 de
 celui
 qui
 observe.
 La
 différence
 ontologique
 n’est
 pas
 la
 distinction
 entre
 la
 chose
 matérielle
 et
 sa
 représentation
 conceptuelle.
 L’être
 n’est
 pas
 non
 plus
 une
 “essence”
 de
 la
 chose
 dont
 la
 chose
 particulière
 serait
 une
 réalisation
 en
 substance.
 La
 différence
 ontologique
 ne
 nous
 paraît
 donc
pas
 être
 la
différence
 entre
 l’
“essence”
et
 la
 substance,
ou
 entre
 l’être
qui
 ne
 se
donne
 pas
à
 voir
et
ce
 qui
apparaît
de
 manière
multiple
 (les
phénomènes),
entre
 ce
qui
 ne
 change
 pas
 et
 ce
 qui
 est
 en
 changement
 constant
 et
 par
 là
 même
divers
 ;
 ce
 qui
 est
 une
 autre
 façon
 de
 distinguer
 l’intelligible
 immuable
 du
 sensible
 soumis
 au
 devenir,
 avec,
 cette
 fois,
 non
 plus
 le
 concept
 dans
 l’esprit
constructeur
 ou
 observateur,
 mais
 l’essence
 flottant
 dans
les
 limbes
au-dessus
du
 monde
 matériel.
Plutôt
 que
 de
distinguer
 l’intelligible
 du
sensible
 et
de
 donner,
selon
nos
 options
 philosophiques,
 la
préséance
à
 l’un
ou
 à
l’au-tre
(idéalisme
ou
 matérialisme
;
dichotomie
que
 nous
entendons
dépasser),
il
 s’agit,
tout
en
 distinguant
 l’être
 de
 l’étant
 pour
 les
 mieux
 étudier
 et
 concevoir
 leurs
 activités
 propres,
 de
 penser
la
vivante
co-appartenance
et
l’entrelacement
des
deux
faces
du
Pli.


Une
deuxième
 approche
possible
pour
tenter
 de
se
représenter
cette
 différence
 ontologi-que,
serait
l’analogie.
Je
vais
prendre
l’exemple
de
ce
qui
dans
mon
cursus
universitaire
(en
 licence
lors
 d’un
premier
cours
sur
 Heidegger)
m’a
ouvert
 le
chemin
vers
une
 première
com-préhension
 de
 ce
 qu’est
 la
 différence
 ontologique
 (compréhension,
 certes
 erronée,
 mais
 qui
 constitua
 pour
 moi
une
 première
 étape).
 Pour
 saisir
cette
 idée
 de
 différence
 ontologi-que,
qui
me
 semblait
très
abstraite,
je
l’avais
 plaquée
sur
ce
qui
était
alors
 mon
activité
pro-fessionnelle
 :
 le
 théâtre
 (la
compréhension
 emploie
 toujours
 ce
 premier
stade
 qui
 ramène
 l’inconnu
 au
 déjà
 connu).
 Lorsque
 nous
 voyons
 un
 spectacle,
 nous
 percevons
 les
 corps
 des
 comédiens,
 les
mots
 de
 l’auteur,
 des
 costumes,
des
 éclairages,
 un
 type
 de
jeu,
 etc.
 ;
 mais
 où
 se
 trouve
 la
 mise
 en
 scène
 ?
 La
 mise
 en
 scène
 proprement
 dite,
 nous
 ne
 la
 voyons
 pas.
 Nous
 ne
voyons
 que
 des
manifestations
de
 la
 mise
en
 scène
 au
 travers
 des
 éléments
 du
 spectacle.
 Par
ailleurs
 qu’est-ce
 qui
 est
 premier
?
 le
spectacle,
 qui
 nous


(8)

per-met
 de
 sentir
 la
 mise
en
 scène
 au
 travers
 de
 ce
 qu’il
est
 ?
 ou
 bien
 la
 mise
en
 scène
 qui
 permet
l’apparition
du
spectacle
 ?
Je
faisais
ainsi
l’apprentissage,
malaisé
 pour
un
occiden-tal,
d’une
pensée
circulaire
 où
chaque
élément
est
engendré
par
l’autre
 dont
il
est
pourtant
 la
 source.
Et
 voilà
 que
les
 choses
 s’éclairaient
 :
dans
 cette
 analogie,
la
 mise
en
scène
 re-présentait
 l’être
dont
 l’étant
était
 le
 spectacle.
Mais
 la
métaphore
 a
 ses
limites.
La
mise
 en
 scène,
 avant
d’être
 ce
 qui
anime
 le
spectacle
 de
 l’intérieur,
est
 d’abord
 une
idée,
 suscitée
 par
 un
texte,
 née
dans
 l’esprit
de
celui
 ou
de
 celle
qui
 la
 conçoit
et
 rassemble
une
 équipe
 en
 vue
 de
la
 mettre
 en
 œuvre
;
elle
 est
 fabriquée
 ;
 elle
est
 elle-même
un
 étant
 (il
y
a
 des
 étants
 immatériels).
La
 mise
en
 scène,
 dans
 cette
 logique
 de
production,
 est
 spécifique
 à
 chaque
 spectacle
et
 comme
son
 moteur
intérieur
 ;
 elle
est
 aussi
l’idée
 du
spectacle
 précé-dant
 l’existence
du
 spectacle,
tout
 comme
dans
 l’esprit
du
 menuisier
l’idée
 de
table
 à
réali-ser
précède
 l’existence
 de
 la
 table
 qu’il
va
 fabriquer.
 Peut-être
 pourrait-on
 considérer
 que
 telle
 mise
 en
 scène
 est
 l’essence
 du
 spectacle
 qu’elle
 fait
 être,
 mais
peut-on
 dire
 que
 la
 mise
en
 scène
(en
tant
 qu’idée
générale)
est
 l’essence
du
 spectacle
?
L’essence
 est
répu-tée
 fixe
et
 immuable,
 or
une
mise
 en
 scène
 est
non
 seulement
 spécifique
 à
un
 spectacle,
 mais
évolue
avec
 lui.
D’aucuns
 pouvant
d’ailleurs
 avancer
 qu’il
y
aurait
 une
 essence
de
 la
 mise
en
scène
 présente
dans
 chacune
d’elles
 et
 qui
relèverait
 par
exemple
 de
la
 théâtrali-té,
 la
 théâtralité
 serait
 alors
 l’essence
 de
 l’essence
 du
 spectacle.
 Et
 dans
 ce
 cas,
 où
 est
 l’être
et
où
est
l’étant
tels
que
l’analogie
les
avait
envisagés
?
De
toute
façon,
l’être
ne
peut
 pas
être
pensé
comme
 essence
de
la
chose
(Heidegger
l’énonce
 très
clairement).
Nous
fai-sons
 face
 à
 une
 impasse,
 l’analogie
 nous
 a
 fourvoyés.
 Si
elle
 fut
 une
 béquille
 pour
 l’étu-diant
 de
licence,
 l’analogie
 ne
nous
 permet
pas
 de
 cerner
ce
 qu’est
 la
différence
 ontologi-que
 parce
 ontologi-que
 par
 définition
 elle
 nous
 installe
 dans
 la
 seule
 étantité.
 Or
 aucun
 étant
 ne
 peut
être
analogue
à
l’être.

L’énonciation
 de
 ce
 qu’elle
 n’est
 pas,
 ou
 l’analogie,
 si
 elles
 sont
 comme
 une
 approche
 précautionneuse
 et
 lointaine,
 ne
 nous
 autorisent
 pas
 à
 l’aborder
 frontalement
 ;
 nous
 bu-tons
toujours
 sur
la
question
de
 ce
qu’est
l’être
 dans
cette
différence
 et
en
quoi
il
 se
distin-gue
de
 l’étant.
Serait-ce
possible
de
 s’approcher
par
la
perception
 et
le
constat
de
 ses
limi-tes
 ?
 Grâce
à
 nos
 cinq
 sens,
 nous
 pouvons
 décrire
 ce
 que
 nous
percevons
 d’une
 chose,
 mais
nous
n’en
percevons
 chaque
fois
qu’une
partie
et
c’est
notre
 conscience
qui
unifie
les
 éléments
 perçus
 à
 ceux
 qui
 ne
 le
 sont
 pas
 pour
 appréhender
 une
 unité
 (Husserl
donne
 l’exemple
 du
 cube
 dont
 nous
 ne
 pouvons
 jamais
 voir
les
 six
 côtés
 en
 même
 temps
 mais
 que
 nous
concevons
 d’emblée
comme
 une
unité).
 Sans
 compter
que
 nous
n’avons
 jamais
 accès
à
une
perception
de
l’intérieur
de
la
 matière
considérée
(le
bois
de
la
belle
charpente
 est-il
solide
 ou
travaillé
 par
les
termites
 ?),
et
 encore
moins
à
 son
mode
 de
 fonctionnement
 intérieur
 autonome
(le
 devenir
 naturel
 indépendant
 des
accidents).
 Nul
apparaître
ne
 peut


(9)

nous
révéler
 la
chose
 en
entier.
 Même
la
 matérialité
de
la
 chose
ne
 peut
être
 perçue
dans
 son
entièreté.
 Et
même
si
nous
 multiplions
les
angles
de
 perception
et
accédons
à
 une
sé-rie
de
 facettes
 et
 d’aspects
 différents,
 l’intériorité
en
 mouvement
 est
 hors
 de
 portée
 de
 la
 perception.
 De
 surcroît,
 la
 perception
 fige
 ;
 elle
 nous
 donne
 accès
 à
 un
 moment
 de
 la
 chose
 mais
laisse
hors
 d’atteinte
son
 évolution,
son
 devenir.
 L’être
serait-il
 ce
 à
quoi
 nous
 n’avons
pas
accès
par
la
perception ?
Penser
la
 dynamique
interne
de
la
chose
nous
auto-rise,
au
 moins,
 à
 passer
 du
 substantif
 “être”
à
 la
 verbalité
 du
 même
mot.
 Il
demeure
 que,
 même
 sans
 mettre
 en
 doute
 la
 pertinence
 de
 la
 perception
 (le
doute
 cartésien),
 celle-ci
 saucissonne
l’apparaître
de
la
 chose
;
c’est
la
conscience
de
 l’observateur
qui
la
rassemble
 en
 une
unité,
 et
 ce
 rassemblement
fige
 ce
 qui
est
 perçu.
 Il
semble
 que
 l’être
 relève
de
 ce
 qui
 ne
 peut
 se
 thématiser
 au
 sens
 d’une
 description
 complète.
 Dès
 lors,
ce
 qui
 n’est
 pas
 accessible
 de
 l’extérieur
 par
 la
 perception
 des
 cinq
sens,
 serait-ce
 l’être
 de
 la
 chose
 ?
 La
 non-accessibilité
 semblerait,
en
 tout
cas,
 être
 l’une
des
 caractéristiques
 de
l’être,
 et
la
 per-ception,
 en
 faisant
 intervenir
 de
 manière
 décisive
 la
 conscience
 de
 l’observateur
 semble
 bien
nous
 éloigner
de
l’être
 de
la
chose.
 Il
semble
que
la
 perception
directe
des
 cinq
sens,
 ne
 nous
 donne
 pas
 accès
 à
 l’être.
 La
 poésie,
 la
 musique
 ou
 des
 expériences
 non
 théti-ques
seraient
 peut-être
des
voies
qui
 se
révéleraient
plus
 propices.
En
fait,
en
 passant
par
 la
 perception,
 même
si
c’est
pour
 en
 percevoir
 les
 limites
ou
 en
abstraire
 le
 caractère
 utili-taire
 premier,
c’est
 toujours
 au
 sujet
 percevant
 et
 à
 son
 vécu
 que
 nous
 avons
 affaire.
 Ce
 seraient
alors
les
limites
de
la
perception
qui
 donneraient
à
sentir
ce
que
pourrait
être
l’être.
 Nous
risquons
 ainsi
de
 déboucher
sur
 la
distinction
kantienne
 entre
la
 chose
que
 l’on
peut
 connaître
par
 la
raison
 et
la
chose
 “en
soi”
inaccessible
;
 et
si
l’
“en-soi”
est
 inaccessible
ce
 travail
 peut
paraître
 vain.
 Cela
peut
 donner
 en
effet
 à
 penser
que
 le
 mode
de
 fonctionne-ment
de
 l’étant,
sa
 façon
d’être
 en
relation
 avec
ce
 qui
l’environne
 et
son
 mode
 d’apparaî-tre
 sont
un
 “quelque
chose”
 qui
 pourrait
êd’apparaî-tre
 son
être,
 mais
cela
 ne
 nous
y
 donne
 pas
 ac-cès.
L’accès
 à
l’être
 semble
bouché
à
 l’intellection
descriptive
 et
déductive.
 Pour
envisager
 que
 nous
 puissions
 en
 avoir
 une
 “connaissance”
 autre
 qu’intellective
 (laquelle
 connais-sance
 pourrait
 peut-être,
 dans
 un
 second
 temps,
 être
 mise
en
 mots),
 il
semble
 qu’il
nous
 faille
faire
ce
que
Heidegger
appelle
un
“saut”.


Ce
n’est
donc
pas
non
plus
par
la
 perception
des
cinq
sens
que
la
différence
ontologique
 peut
être
appréhendée.
Pour
bien
saisir
ce
 qu’est
la
différence
ontologique,
il
nous
faudrait
 en
réalité
 définir
ce
 qu’est
l’être.
 Si
bien
 que
nous
 sommes
devant
 une
impasse
 que
seule
 une
 pensée
 circulaire
permet
 de
dépasser
 :
la
différence
 ontologique
 est
 un
des
 points
de
 départ
 indispensables
 de
 ce
 travail,
 dont
 il
 nous
 faudrait,
 pour
 la
 bien
 appréhender,
 naître
 déjà
les
 conclusions.
 Nous
pouvons
 néanmoins,
dans
 une
 première
approche,
 con-sidérer
 que
 la
 scission
 entre
 l’être
 et
 l’étant
 distingue
 le
 résultat
 du
 processus
 qui
 le
 rend


(10)

possible
 (et
 c’est
 pourquoi
 notre
 analogie
recelait
 une
 ombre
 de
 justification),
 tout
 comme
 Husserl
distingue
l’apparaissant
de
l’apparaître
de
cet
apparaissant
en
son
apparition.


En
 fait,
 l’être
 et
 l’étant
 ne
 sont
 pas
 sur
 le
 même
plan.
 Ils
 se
 conditionnent
 l’un
 l’autre
 (nous
verrons
 que
Heidegger
 utilise
le
 terme
de
 “fondamentation”,
 dans
Apports
à
 la
philo-sophie
 :
 de
 l’avenance),
 mais
 évoluent
 sur
 des
 plans
 différents.
 Et
 l’on
 soupçonne
 que
 c’est
peut-être
 dans
cette
distinction
 que
se
situe
le
 travail
philosophique
lui-même,
 et
c’est
 pourquoi
 elle
nous
 est
 ici
tellement
 précieuse.
 Le
plan
 ontologique,
 le
plan
 de
 l’être
en
 ce
 qu’il
est
distinct
 du
plan
de
l’étant,
 est
en
tout
cas
celui
 sur
lequel
se
placera
 ce
travail
(son
 plan
 d’immanence
 diraient
 Deleuze
 et
 Guattari4),
le
plan
d’où
sourdent
tous
les
concepts


que
 nous
 tenterons
 de
 mettre
 en
 place
 (création
 de
 concepts
 qui
 est,
 toujours
 pour
 De-leuze
et
Guattari,
l’activité
philosophique
elle-même).

Il
 reste
 qu’en
 séparant,
 par
 le
 discours
 de
 l’analyse,
 par
 un
 langage
 humain,
 l’être
 de
 l’étant
 nous
 encourons
 le
 risque
 d’étantifier
 l’être
 dont
 nous
 prétendons
 qu’il
 n’est
 rien
 d’étant.
 Après
 avoir
été
 impliqué
 dans
 l’expérience
 ontologique5


(première
étape
indispen-sable
 à
 défaut
 de
 laquelle
 le
 propos
 risque
 de
 n’être
 que
 fantaisie
 intellectuelle)
 et
 avoir
 tenté
 de
 l’appréhender
directement
 dans
 une
 intuition
 spéculative6


(deuxième
étape
indis-pensable),
 il
s’agira
 donc
 d’une
 part
 d’en
 saisir
les
 manifestations
 dans
 l’étant,
 et
 d’autre
 part,
 et
 surtout,
 de
 le
 penser
 en
 termes
de
 processus
 et
 non
 de
 stabilité
 descriptible.
 Par
 ailleurs,
 le
fait
 de
 faire
 de
l’être
 un
 objet
d’étude
 est
 en
soi
 une
 réification.
 Et
cette
 réifica-tion
est
le
précipice
que
nous
serons
tenus
de
 côtoyer
tout
au
long
de
ce
travail.
Il
convien-dra
de
ne
pas
l’oublier,
au
risque
d’y
choir.


Le
deuxième
 point
de
départ,
 nous
venons
de
 le
mentionner
:
c’est
 le
saut
que
 nous
 de-vons
 opérer.
 Les
 trois
 modes
 d’approche
 de
 la
 différence
 ontologique
 que
 nous
 ade-vons
 évoqués
ne
 pouvaient
pas
 nous
permettre
 de
la
 concevoir
réellement
 car
ils
tentaient
 tous
 trois
de
 concevoir
 l’être
 en
 partant
 du
discours
 de
 l’observateur
 et
 non
 de
 l’être
 lui-même.
 Certes,
la
notion
 de
différence
ontologique
est
elle-même
 un
concept
qui
loge
 dans
la
con-science
 de
 celui
 qui
 l’emploie,
 mais
s’il
s’agit
d’accéder
 à
 l’être,
 partir
de
 la
 condans
la
con-science
 de


4
Gilles
Deleuze,
Felix
Guattari
.-
Qu’est-ce
que
la
philosophie
?,
Paris,
Éditions
de
Minuit,
1991,
voir
aussi


Pierre
Montebello
.-
Méthodologie
de
l’histoire
de
la
philosophie,
Université
de
Toulouse-Le
Mirail,
Cours
SED,
 2009/2010,
qui
analyse
le
livre
de
Deleuze
et
Guattari

5
L’expérience
ontologique
est
ce
que
chacun
vit
tous
les
jours
sans
que
cela
vienne
à
la
conscience
;
une


perception
 en-deçà
de
 la
perception
 sensible,
une
 perception
qui
 ne
passe
 pas
par
 les
cinq
 sens,
ou
 plutôt
 qui
ne
 passe
par
 eux,
comme
 nous
le
 verrons,
que
 “par
excès”,
 par
débordement
 de
leur
 fonction
première,
 perception
 infra-sensible
qui
 n’est
pas
 mesurable
et
 qui
relève
 peut-être
de
 ce
que
 Lévinas
appelle
 la
proxi-mité
 (nous
y
 reviendrons).
Lorsque
 cette
expérience
 vient
 bousculer
la
 routine
de
 l’habitude,
elle
 enclenche
 une
 transformation
 de
 soi.
 C’est
 ce
 type
 d’expérience
 qu’est
 la
 traversé
 d’un
 “moment-sujet”
 tel
 que
 nous
 l’aborderons
dans
la
quatrième
partie
qui
fut
le
point
de
départ
indispensable
à
notre
travail.

6
La
transformation
de
soi
opère
lors
des
moments
d’involution
(troisième
partie)
qui
inventent
une
nouvelle


manière
pour
le
 soi
de
 se
rassembler.
 Ce
travail
 inventif
de
 l’être
a
 parfois
des
 manifestations
ontiques
 que
 sont
l’inspiration
ou
l’intuition
(qu’il
faudra
ensuite
“construire”
intellectuellement).

(11)

celui
 qui
 observe
 paraît
 être
 une
 impasse,
 puisque
 nous
 demeurons
 ainsi
 dans
 l’étantité
 des
 choses
 considérées
 ou
 dans
 l’aperception
 de
 celui
 qui
 y
fait
 face.
 Il
convient
 d’effec-tuer
alors
un
saut
qui
nous
place
directement
dans
l’être.
Comment
est-ce
possible
?

Heidegger
 considère
qu’il
 ne
faut
 plus
 partir
de
 l’étant
comme
 l’a
fait
toute
 l’histoire
de
 la
 métaphysique,
 puisque
 “…
aucune
 pensée
 de
 l’être,
 aucune
 philosophie
 ne
 peut
jamais
 être
 confirmée
«factuellement»,
 autrement
 dit
par
 l’étant.”7
L’être
ne
doit
pas
être
pensé
à


partir
de
l’étant
 ;
dès
 lors,
comment
opérer
 ?
“…
cet
 estre
ne
 peut
 plus
être
 pensé
à
 partir
 de
 l’étant
 :
 il
faut
 bien
 qu’il
vienne
 à
la
 pensée
 à
 partir
de
 lui-même.”8
et
par
conséquent,


“La
question
de
l’être
est
le
saut
au
cœur
de
l’estre,
saut
qu’accomplit
 l’être
humain
en
qua-lité
de
celui
qui
 est
en
quête
de
l’estre,
dans
 la
mesure
où
son
travail
est
 un
travail
pensif.”9

Il
y
va
donc
d’une
expérience
 d’être
du
penseur
qui
 doit
être
première,
en
 amont
du
conte-nu
même
 de
sa
pensée,
mais
 aussi
à
l’intérieur
de
 sa
pensée,
et
 dont
la
mise
en
 mot
sem-ble
alors
seconde,
signant
 ainsi
une
indissoluble
congruence
du
penseur
 et
du
monde
qu’il
 tente
 de
 penser.
 L’ontologie
 devient
 l’étude
 de
 l’être,
 étude
 qui
 tente
 de
 s’exonérer
 du
 passage
 par
le
 point
 de
vue
 de
l’étant.
 Penser
 l’être
relève
 donc
 alors
de
 ce
contact
 avec
 l’être
 que
Heidegger
 nommera
 “Ereignis”
(traduit
par
 “avenance”).
 Heidegger
en
 parle
pour
 sa
part
en
termes
de
libération
:

“Arriver
à
penser
 l’estre
 ne
s’invente
 pas
 quelque
 concept,
 mais
lutte
 pour
 se
libérer
 du
 seulement
étant
-
libération
 qui
rend
la
pensée
propre
à
se
déterminer
 à
partir
de
l’estre,
 et
bel
et
bien
avenue
pour
recevoir
de
l’estre
son
ton.”10

La
 tentative
 de
 contact
 direct
 avec
 l’être
(que
 Heidegger
 nomme
 “seyn”
pour
 le
 distinguer
 de
sein
et
 pour
 signifier
 que
 l’être
n’est
 plus
 pensé
 métaphysiquement
 ;
 et
 qui
 est
 traduit
 par
 “estre”11

)
permet
selon
lui
à
la
pensée
de
recevoir,
de
l’être
lui-même,
une
tonalité
pro-pre
 ;
perception
 qui
vient
 à
la
 pensée
par
 l’avenance
(Ereignis
-
nous
 étudierons
cette
 no-tion
 qui
est
 évoquée
ici
 par
le
 terme
 “avenue”,
et
 qui
est
 congruence,
 co-appropriation,
 de
 l’estre
 et
 du
Dasein).
Nous
 ne
 sommes
 plus
 alors
dans
 la
 pure
 spéculation
 intellectuelle,
 mais
dans
une
 perception
infra-sensitive
dont
nous
 tâcherons,
tout
au
cours
 du
propos,
de
 voir
en
 quoi
elle
 consiste.
 La
mise
en
 mot
de
 ce
contact
 dont
 l’être
humain
 a
 l’expérience
 (et
dont,
selon
nous,
et
contrairement
à
ce
qu’en
dit
Heidegger,
tout
être
a
l’expérience)
est
 tout
d’abord
l’œuvre
des
 poètes,
mais
aussi
celle
des
penseurs
;
cette
 mise
en
mots
relève-ra
peut-être
de
l’intuition
(comme
nous
l’allons
 voir
dans
le
propos
méthodologique)
mais
en
 7
Martin
Heidegger
.-
Apports
à
la
philosophie
:
de
l’avenance
[écrit
en
1936-1938,
publié
en
allemand
en
 1989],
Paris,
Gallimard,
2013,
(traduction
François
Fédier),
p495
(souligné
par
Heidegger). 8
Ibid.,
p21 9
Ibid.,
p25
(souligné
par
Heidegger) 10
Ibid.,
p525 11 
N’étant
pas
germaniste
et
ne
faisant
pas
une
thèse
sur
Heidegger,
nous
nous
appuierons
sur
les
traduc-tions.
(Nous
discuterons,
pour
la
contester,
cette
orthographe
qui
semble
substantialiser
l’être).

(12)

s’appuyant
sur
 une
expérience
d’être.
 La
mise
en
mot
 de
cette
expérience
 ontologique
 est
 peut-être
ce
qu’est
le
fait
même
de
penser
philosophiquement.
En
effet,
pour
Heidegger,


“…
c’est
bien
 la
 tonalité
 fondamentale
 qui
met
 au
 diapason
être
le
 là,
 et,
lui
 donnant
le
 ton,
 du
même
 coup
accorde
penser,
à
titre
 de
ce
 qui
projette
 la
vérité
 de
l’estre,
 en
pa-role
et
en
concept.”12

C’est
donc
 bien
ce
 contact
 avec
 l’être,
qui
 n’est
 autre
 selon
nous
 que
 le
 contact
entre
 les
 êtres
 qu’est
 l’interdépendance
 ontologique
 elle-même,
qu’il
convient
de
faire
venir
 à
la
pen-sée.

Si
 nous
 ne
 pouvons
 étudier
 l’être
 à
 partir
de
 l’étant
 qui
 se
 présente
 de
 manière
 figée
 dans
la
présence,
peut-être
est-ce
aussi
(c’est
 en
tout
cas
l’hypothèse
que
nous
formulons)
 du
au
fait
que
l’être
relève
du
mouvement,
 du
processus
qui
jamais
ne
s’arrête.
L’être
serait
 peut-être
 alors
 à
 capter,
après
 en
 avoir
 fait
 l’expérience,
 par
 la
 pensée
 au
 travers
 du
 pro-cessus
d’individuation
 dont
l’étant
n’est
que
 la
manifestation
momentanée
figée
 par
l’appa-raître.
 Partir
 de
 l’étant
 revient
 à
 étudier
 l’individu
 constitué
 dans
 sa
 manifestation
 spatiali-sée,
alors
que
 partir
de
l’être
envisage
de
 penser
le
processus
d’individuation
 dans
sa
tem-poralité.13

Faire
un
tel
 “saut”,
étudier
 l’être
sans
 passer
 par
l’étant,
 n’est-ce
pas
 quitter
la
 phénomé-nologie
dont
Heidegger
est
 pourtant
le
plus
éminent
continuateur
?
 Si.
La
perspective
phé-noménologique
 se
 situe
toujours
 du
 côté
 de
la
 conscience
 qui
 perçoit
 le
phénomène
 ;
 du
 côté
 du
 phénomène
 lui-même
en
 tant
 qu’il
apparaît
 à
 la
conscience
 (c’est-à-dire
dans
 une
 relation
avec
une
 conscience
qui
le
capte
 et
le
fait
apparaître
 à
elle
même).
Or
il
s’agirait
ici
 de
 n’étudier
 ni
 l’étant
 ni
 l’apparaître
 de
 l’étant
 dans
 la
 conscience,
 mais
 l’être
 lui-même.
 Dans
 cette
optique
 l’être
 se
 situe
clairement
 en
 dehors
 de
la
 conscience
 que
 l’on
peut
 en
 avoir.
 Nous
 verrons
 que
 la
 conscience
 n’est
 qu’un
effet
 de
 seuil
 de
 la
 construction
 du
 soi
 par
 accumulation
 de
 relations
 à
 l’altérité,
 c’est-à-dire
 effet
 de
 seuil
 d’une
 accumulation
 d’être(s).
 L’être
n’est
 pas
 constitué
 par
la
 conscience,
 c’est
le
 contraire
 :
 la
conscience
 est
 constituée
d’être(s).
Cela
semble
 impliquer
d’étudier
l’être
non
seulement
en
 tant
que
mode
 de
 fonctionnement
 (à
la
manière,
 par
 exemple,
 dont
 Heidegger
 étudie
le
Dasein
à
 travers
 les
 existentiaux),
 mais
également,
 et
 comme
conséquence
 de
 ces
 modes
 de


fonctionne-12


Ibid.,
p37
(souligné
par
Heidegger)
[“être
le
là”
est
la
traduction
en
français
de
Dasein
proposée
par
Hei-degger
lui-même]

13
Notons
qu’un
tel
saut
implique
en
quelque
sorte
de
lâcher
la
notion
de
différence
ontologique
dont
il
est


pourtant
 issu,
 comme
le
 soulignait
 Heidegger
lui-même
qui
 considérait
 que
 la
 différence
 ontologique
 perpé-tuait
d’une
 certaine
manière
l’étude
à
 partir
de
l’étant
(et
 en
cela
demeurait
 dans
la
métaphysique)
:
 “Le
con-cept
de
«différence
ontologique»
n’est
que
préparatoire,
 comme
transition
de
la
question
directrice
[qu’est-ce
 que
 l’étant
 ?]
 à
 la
 question
 fondamentale
 [la
 vérité
 de
 l’être,
 ou
 “comment
 l’estre
 déploie-t-il
 sa
 pleine
 es-sence
?”].”
in
Apports…
op
cité
p296.
 (C’est
moi
qui
commente
 entre
crochets).
Il
va
 même
jusqu’à
considé-rer
 (Ibid.,
 p287)
 que
 “cette
 distinction
 devient
 vite
 à
 proprement
 parler
 l’obstacle
 qui
 empêche
 de
 poser
 la
 question
de
l’estre…”.
Le
saut
étant
ce
qui
permet
de
franchir
l’obstacle
(Ibid.,
p288).

(13)

ment,
 en
ce
 qu’il
est
 mouvement
vers…,
 et,
par
 là,
constitué
 de
relations
 avec
ce
 qui
n’est
 pas
lui
;
il
serait
alors
cette
constitution
même.
Il
ne
s’agit
plus
d’étudier
le
phénomène
dans
 l’apparaître
 de
sa
 présence
 réelle
(l’étant
 apparaissant
 à
la
 conscience),
 en
 quelque
 sorte
 dans
sa
substantialité
originaire,
 mais
de
concevoir
l’être
d’une
chose
 comme
un
processus
 d’individuation,
 comme
 sortie
 du
 chaos,
 comme
 rassemblement
 d’êtres,
 rassemblement
 spécifique
en
perpétuelle
évolution.
En
effet,
il
 nous
semble
qu’étudier
le
phénomène
en
le
 séparant
 (dans
la
 conscience
 qui
capte
 son
apparaître)
 des
 autres
 phénomènes,
 consiste
 pour
une
part
à
 faire
effectuer
le
travail
d’individuation
par
la
conscience
 qui
le
perçoit,
con-science
qui
construit
l’unicité
individuante
de
la
 chose
qu’elle
prétend
recevoir
dans
son
ob-jectivité
même,
 alors
que
c’est
 la
perception
qui
 l’a,
pour
 ainsi
dire,
objectivé.
 Nous
essaye-rons
de
 voir
comment
l’individuation
 s’opère
non
dans
 la
conscience
d’un
 observateur
mais
 dans
le
processus
d’être
qu’est
l‘être
lui-même
 à
partir
du
magma
chaotique
qu’est
l’interdé-pendance
 ontologique.
 Et
 comme
nous
ne
pouvons
 pas
décrire
la
“chose”
 que
serait
l’être,
 puisque
par
définition
 l’être
n’est
pas
une
chose,
 il
nous
faudra
tenter
de
 penser
son
activi-té.
Par
 conséquent,
c’est
 par
les
relations
 qu’ils
entretiennent
entre
 eux
que
 nous
viserons
 à
appréhender
les
êtres
 ;
ce
sont
les
liens
d’interdépendance
 ontologique
qui
seront
l’objet
 de
 notre
 cheminement.
 Envisager
 la
 réflexion
 à
 partir
 de
 la
relation
 est
 par
 conséquent
 (après
la
différence
ontologique
et
le
saut)
notre
troisième
point
de
départ.


L’être
et
l’étant
forment
un
pli,
une
 unité
indissoluble.
Nous
prétendons
pourtant
traiter
de
 l’être
indépendamment
 de
l’étant.
De
surcroît
 nous
envisageons
de
partir
 des
relations
que
 les
êtres
entretiennent
entre
eux.
L’unité
que
l’être
 forme
avec
son
étant
nous
amène
donc
 à
envisager
d’étudier
les
 relations
entre
les
êtres-étants.
Nous
ne
partirons
 pas
de
la
chose
 transformée
 en
 objet
 comme
le
 fait
 la
 science,
il
 ne
 s’agit
 pas
 d’un
 travail
 scientifique
 régi
 par
la
démonstration
 liée
à
la
causalité.
Nous
 ne
partirons
pas
davantage
 de
la
conscience
 de
l’observateur
qui
 permet
l’apparaître
des
phénomènes
comme
le
 fait
la
phénoménologie
 dans
une
 démarche
qui,
 en
dépit
 de
l’intentionnalité
qui
 relie
la
conscience
au
 monde,
 de-meure
solipsiste14

.
Nous
ne
développerons
pas
une
philosophie
de
la
conscience.
Une
phi-losophie
 de
 la
 conscience
 aboutit
 à
 nous
 exclure
 du
 monde
 pour
 tenter
 de
 concevoir
 les
 processus
 qui
 nous
 conduisent
 à
 sa
 perception.
 Pourtant,
 c’est
 bien
 une
 conscience,
 la


14
Ce
qui
est
premier
ce
n’est
pas
non
plus
le
monde
dont
la
conscience
serait
exclue,
ce
qui
est
premier


c’est
 l’interdépendance
 ontologique,
 c’est-à-dire
 les
 relations
 qui
 engagent
 le
 monde
et
 l’être
 s’individuant
 (dont
la
 conscience
 n’est
 qu’un
exsudat)
dans
 une
perpétuelle
transformation.
 La
conscience
 n’est
seconde
 qu’en
 tant
qu’elle
 est
 un
effet
 de
 seuil
de
 l’être
 s’individuant.
C’est
 la
 relation
qui
 est
 première
puisque
 tout
 est
 relation.
 La
 connaissance
 elle-même
 est
 relation
 comme
le
 défend
 Pierre
 Montebello
 “Connaître,
 c’est
 être
engagé
 dans
une
relation
 qui
ne
laisse
 pas
les
termes
identiques.
 La
primauté
de
 la
relation
sur
 les
ter-mes
 se
 démarque
 ainsi
 d’une
 antériorité
 logique
 ou
 transcendantale
 […]
 connaître
 n’est
 plus
 dissociable
 d’une
participation
 complète
à
 l’être
qui
ne
 laisse
plus
 subsister
aucune
 distance.”
(Pierre
 Montebello
.-
 Mé-taphysiques
cosmomorphes
 :
la
 fin
du
monde
 humain,
Dijon,
Les
presses
 du
réel
(Drama),
2015,
p82
 -
c’est
 Pierre
Montebello
qui
souligne).

(14)

mienne,
qui
ambitionne
d’accéder
à
l’être
;
peut-on
 faire
comme
si
l’accès
était
direct
et
que
 cette
 conscience
 n’influait
 pas
 sur
cet
 accès
 ?
Ou
 peut-on
 faire
 comme
si
c’était
 l’être
 qui
 décidait
de
lui-même
de
venir
à
notre
pensée
 comme
semble
nous
le
dire
Heidegger
(“…cet
 estre
ne
peut
plus
être
pensé
à
partir
de
l’étant
:
il
faut
bien
qu’il
vienne
à
la
pensée
à
partir
 de
lui-même.”)
qui
dut
faire
face
à
la
même
impasse
?
Ricœur
résume
sa
démarche
:

“On
ne
part
pas
 du
cogito,
mais
de
la
 question
de
l’être
;
et
on
 va
de
l’être
qui
engendre
 la
 question
 à
 l’être
 qui
 questionne
 ;
 cet
 ordre
 implique
 que
 la
 conscience
 n’est
 pas
 la
 mesure
 de
 toute
 chose
 ;
 l’homme
ne
 sera
 pas
 désigné
 par
 cette
 conscience,
 mais
par
 l’être
même
qui
lui
donne
d’être
le
questionnant
 de
l’être
;
c’est
pourquoi
le
questionnant
 lui-même
est
désigné
 par
 un
terme
 ontologique
 :
Dasein,
être
le
 lieu,
 le
“là”
de
 la
 ques-tion
de
 l’être.
L’analytique
du
Dasein
[…]
 dit
l’apparaître
d’un
“étant”
 dont
toute
la
 condi-tion
est
d’être
ouvert
à
la
question
de
l’être.”15

Le
 congé
 donné
 par
Heidegger
 au
primat
 de
 la
conscience
 (datant
de
 Descartes)

 débou-che
 sur
le
 primat
de
 l’être
 sur
la
connaissance.
 C’est
une
 transformation
 décisive
 dans
 la-quelle
 nous
 nous
 inscrivons.
 Ce
 n’est
 plus
la
 conscience
 et
 le
 langage
 qu’elle
 génère
 qui
 se
trouvent
 en
première
 ligne,
mais
 le
couple
“se
 trouver
en
 situation”
(être
 enchâssé
dans
 l’interdépendance
 ontologique)
 et
 “s’y
 orienter
 par
 projet”.
 Être
 dans
 le
 monde
 n’est
 plus
 une
relation
d’inclusion
 que
la
conscience
peut
 dominer,
mais
une
relation
 de
familiarité
qui
 relève
de
 l’
“habiter”.
Nous
sommes
 engagés,
 nous
 sommes
embarqués,
 et
le
 monde
n’est
 pas
un
objet
 qui
nous
fait
face
mais
un
 milieu
qui
nous
englobe,
qui
nous
 constitue
et
dont
 nous
 dépendons
 pour
 être.
 Nous
 ne
 sommes
 pas
 dans
 le
 monde,
 nous
 sommes
 au
 monde ;
locution
 où
le
terme
 “au”
implique
non
 seulement
la
notion
 heideggérienne
 d’habi-tation,
 mais
aussi
 la
 notion
 d’appartenance
 (nous
 habitons
 le
 monde
 et
 nous
 lui
apparte-nons)
 :
 notion
 double
 qui
 signe
 l’interdépendance.
 Nous
 ajouterons
 que
 l’expérience
 des
 relations
que
nous
 avons
avec
le
monde
nous
 constitue.
Il
ne
s’agit
plus
 d’avoir
une
“vision
 du
monde”
 (relation
au
monde
par
 le
savoir),
mais
d’
“être
au
monde”
dans
 une
relation
on-tologique
constitutive
de
soi.


Nous
 prétendons
partir
 de
 la
 relation.
Comment
 est-ce
 possible
?
 En
 voulant
 partir
de
 la
 relation,
nous
partons
en
 fait
d’une
expérience
d’être
que
nous
tentons
 de
penser.
La
con-science
 est
bien
 à
 sa
place
 questionnante
 sur
 cette
 expérience
 ontologique
 qui
 est
la
 nô-tre,
elle
 n’est
pas
 l’objet
de
la
 question,
elle
arrive
 dans
un
 second
temps.
La
 thèse
 défen-due
est
 au
fond
 la
description
de
 l’expérience
de
l’auteur
 au
moment
 où
il
tente
 de
penser
 ce
 qu’il
devient
 :
le
 moment-sujet
que
 nous
 évoquerons
 dans
 la
quatrième
 partie
(la
 néga-tion
de
soi
qui
engendre
l’invention
de
soi
suite
à
un
choc
ontologique,
un
onto-choc)
est
la


15
Paul
Ricœur
notice
“Ontologie”
dans
le
Dictionnaire
de
la
Philosophie,
Paris,
Universalis
et
Albin
Michel,
vol


(15)

traversée
 même
qui
 fut
la
 mienne
lors
 de
ce
 travail
de
 recherche.
Il
 sera
pourtant
 question
 d’étudier
les
 relations
qu’entretiennent
les
 êtres
en
amont
de
 toute
réflexivité,
en
 amont
de
 la
 conscience
 qu’ils
peuvent
 en
 avoir.
 La
 réflexivité
 dont
 ce
travail
 témoigne
 est
 l’obstinée
 tentative
de
comprendre
la
transformation
de
soi
qui
 opérait
en
amont
de
cette
réflexivité
et
 dont
 cette
 réflexivité
 (en
 tant
 qu’activité
 d’être,
 bien
 davantage
 qu’en
 tant
 que
 contenu)
 était
par
 là
même
partie
 prenante.
La
spéculation
intellectuelle
 dont
témoigne
ce
 travail
est
 par
conséquent
ancrée
 dans
l’être
que
j’étais,
dans
 l’être
que
je
suis,
dans
l’être
 que
je
de-viens,
 auquel
 ce
travail
 lui-même
participe.
 L’onto-choc
a
 créé
 la
situation
dans
 laquelle
je
 me
trouvais
 et
 cette
 thèse
 fut
 le
projet,
le
 “se
jeter
 en
 avant
 de
 soi
pour
 devenir
 soi”,
qui
 orienta
le
soi
en
devenir.


L’interdépendance
 ontologique
 se
 situe
 en
 amont
 de
 l’individuation,
 elle
 est
 ce
 qui
 per-met
 le
processus
 d’individuation
lui-même.
 Et
c’est
 le
mode
 de
 fonctionnement
 de
cette
 in-terdépendance
 ontologique
 que
 nous
 ambitionnons
 de
 penser.
 Les
 philosophies
 de
 la
 conscience
étudient
un
“objet”
 déjà
constitué
:
la
conscience
de
l’individu
 ;
notre
travail
vise
 à
 s’interroger
sur
 son
mode
 de
constitution,
 sur
son
 individuation.
Le
 point
de
 départ
(d’où
 naîtront
 les
 questionnements)
 est
 la
 relation,
 le
 lieu
 dynamique,
 la
 composition,
 l’assem-blage,
la
circulation,
 les
échanges
;
nous
sommes
 là
dans
une
problématique
 de
la
plastici-té,
du
 perpétuel
devenir
 qui
par
conséquent
 s’oppose
à
 l’étude
de
la
 fixité
de
 l’étantité,
de
 l’identité,
 du
sujet
 ou
de
 l’essence.
L’être
 a
pu
 être
pensé
 comme
fixe
 et
opposé
 au
 deve-nir,
“rebattu
dans
la
vérité
de
l’étant,
dans
la
 justesse
de
la
représentation”16
;
il
s’agira
de
le


penser
comme
plastique
et
mouvant,
en
perpétuelle
construction.


Les
relations
 que
les
êtres
entretiennent
 entre
eux
seront
alors
 pensées
comme
 constitu-tives
de
ce
qu’ils
sont.
Descartes
avait,
avec
 le
cogito,
centré
l’individu
sur
son
insularité.
Le
 dix-neuvième
siècle
avait
intégré
l’idée
de
relation
:
l’individu
n’était
plus
simplement
une
île,
 cette
île
était
en
 contact
avec
d’autres
sur
le
mode
 de
la
volonté
:
le
volo,
dans
le
cadre
 de
 l’intersubjectivité.
 L’intersubjectivité
 est
 la
 relation
 psychologique
 qu’entretiennent
 des
 su-jets
 ;
c’est
 une
relation
 ontique
 (qui
relève
 de
 l’étantité)
entre
 individus
humains
 constitués
 en
“sujets”
(nous
remettrons
 en
question
cette
notion),
une
relation
 entre
des
identités
con-çues
comme
 fixes
à
 qui
il
arrive
des
 accidents.
Notre
 thèse
consistera
 à
affirmer,
 en
amont
 de
 toute
intersubjectivité,
 le
 caractère
constitutif
de
la
 relation
 ontologique
 laquelle
 est
 ab-sorbée
 en
 vue
 de
 cette
 constitution,
 c’est
 l’absorbo.
 Nous
 tenterons
 ainsi
 d’affirmer
que
 l’être
 est
fait
 des
relations
 qu’il
entretient
 avec
les
 autres
êtres,
 relations
qu’il
 absorbe,
qu’il
 rassemble,
 c’est-à-dire
 qu’il
 involue,
 rassemblement
 qu’il
 exprime
 en
 vue
 d’être
 absorbé.
 Être
au
monde
 c’est,
pour
l’être
(et
en
liaison
 avec
l’étant
qui
le
porte
et
 qu’il
anime),
absor-ber
les
 relations
qu’il
entretient
avec
 ce
qui
l’environne,
les
 involuer
pour
devenir
soi,
 un
soi


(16)

qu’il
exprime
 en
 vue
 d’être
 absorbé
 par
 le
 même
monde
 où
 il
a
 puisé
 ce
 qu’il
est.
 Il
s’agit
 donc
 non
 seulement
 de
 considérer
 que
 la
 relation
 a
 valeur
 d’être,
 mais
 que
 l’être
 n’est
 constitué
 que
de
 relations
 aux
autres
 êtres.
Être,
 c’est
 absorber
de
 la
 relation,
involuer
 de
 la
 relation
 et
 exprimer
de
 la
 relation
 :
 de
 bout
 en
 bout
 l’être
 barbotte
 dans
 l’interdépen-dance
 ontologique,
 et
 ces
 trois
 activités
 que
 sont
 l’absorption,
 l’involution
 et
 l’expression
 n’en
sont
en
fait
qu’une
seule
:
le
 processus
d’individuation.
L’altérité
devient
le
cœur
de
ce
 que
je
suis,
et
le
“je
suis”
est
un
“je
deviens”
dépendant
en
permanence
de
l’altérité.


Notons
encore
 que
la
relation
 qui
s’instaure
entre
 les
êtres,
et
 que
chacun
des
 êtres
par-ticipant
 de
 cette
 relation
 est
 en
 capacité
 d’absorber,
 est
 non
 seulement
 constitutive
 des
 êtres
considérés,
 mais
aussi
productrice
 d’un
être
collectif.
 Nous
avions
rencontré
 cette
no-tion
d’être
collectif
dans
 l’étude
de
la
réception
au
théâtre17
:
les
spectateurs
qui
se
rendent


individuellement
 au
théâtre,
 deviennent
 une
unité
 appelée
public
 lors
de
la
 représentation
 par
cette
activité
commune
 de
participation
à
la
réception
de
ce
qui
 leur
est
présenté.
Nous
 avions
 parlé
 alors
 avec
 Bergson
 d’une
 synchronicité
 des
 consciences
 qui
 par
 un
 phéno-mène
 d’endosmose
 rassemble
 les
 individus
 éparpillés
 en
 une
 entité
 commune
 que
 nous
 avions
 nommé
 :
 être
 collectif.
 Les
 processus
 d’individuation
 des
 êtres
 collectifs
 (lesquels
 peuvent
 être
 plus
 petits
 -
la
famille
-,
ou
 bien
 plus
 larges
 -
la
 société
-,
 que
 ceux
 que
 l’on
 rencontre
lors
d’une
représentation
théâtrale)
feront
 également
l’objet
de
notre
étude
(dans
 la
 cinquième
 partie)
puisqu’ils
 sont
 les
 mondes
communs
 que
 l’individu
 se
doit
 d’habiter
 et
 dont
 l’individuation
 d’individu-collectif
 préside
 à
 l’individuation
 des
 individus-personnes.
 La
 question
 éthique
 deviendra
 ainsi
 logiquement
 l’ultime
 question
 qu’il
 nous
 faudra
 traiter.
 Voyons
comment
nous
comptons
nous
y
prendre.

m é t h o d o l o g i e

Le
 cheminement
 procède
 de
trois
 étapes
 :
 l’intuition,
 la
 mise
à
l’épreuve
 et
 la
 réception.
 Ce
 travail
 démarre
(première
 étape)
 sur
la
base
 d’une
 intuition
 (enclenchée
par
 une
 expé-rience
d’être)
sur
 le
mode
de
fonctionnement
de
 l’être.
Qu’est-ce
à
dire
?
 Chez
Husserl,
l’in-tuition
 catégoriale
 est
 la
 saisie
 intuitive,
 par
 la
 conscience,
 de
 la
 notion
 d’être.
 L’inChez
Husserl,
l’in-tuition
 dont
 nous
 parlons
 serait-elle
 une
 “intuition
 catégoriale
 “
 ?
 Pour
 Heidegger,
 cette
 notion
 husserlienne
est
 une
 évacuation
 de
l’épaisseur
propre
 à
l’être
qui
 est
alors
 compris
comme
 simple
 corrélat
 d’un
 acte
 de
 conscience18,
c’est-à-dire
qu’elle
est
une
position
purement


idéaliste
où
la
 conscience
fonctionnant
“hors
sol”
 produit
l’être
comme
corrélat
 de
sa
propre
 activité.
 L’intuition
 dont
 nous
 parlons
 n’est
 pas
 l’intuition
 catégoriale
 husserlienne
 ;
 nous
 verrons
 que
 l’involution
 (l’activité
circulante
 rassembleuse
 des
 relations
 d’être
 constitutives


17


Serge
Added
.-
Habiter
le
théâtre
:
métaphysique
de
la
réception,
mémoire
de
Master
1,
Université
de
Tou-louse,
2010

(17)

du
 soi)
est
 un
processus
 capable
d’inventer,
 et
l’intuition
 est
un
 des
fruits
 possibles
de
 l’in-vention
 d’un
 soi
 devenant
 autre.
 Il
 ne
 s’agit
 donc
 pas
 d’un
 produit
 de
 la
 conscience
 (laquelle
 est
une
 expérience
d’être
 seconde
par
 rapport
aux
 expériences
d’être
 de
premier
 rang
 qui
sont
 l’objet
de
 notre
travail
 :
 absorption,
involution,
 expression),
mais
 d’un
fruit
 du
 processus
 d’être
qui
 arrive,
dans
 un
second
 temps,
 à
 la
conscience
 et
 que
 celle-ci
est
ca-pable
de
formuler.


Il
s’agit
 ensuite
 (deuxième
 étape)
 de
soumettre
 l’intuition
 à
 la
 question.
 Peut-on
 démon-trer
ce
 que
 notre
 intuition
 prétend
 ?
 L’idée
 de
 démonstration
 a
 d’emblée
 le
 handicap
 de
 considérer
 que
 l’intuition
se
 donne
 tout
 de
go
 dans
 l’entièreté
 d’un
 propos
conçu
 de
 bout
 en
 bout.
 Il
 n’en
 est
 rien.
 L’intuition
 est
 une
 impulsion
 qu’il
 faut
 ensuite
construire.
 Distin-guons
trois
 façons
de
 concevoir.
La
 démonstration
relève
 fondamentalement
 de
 l’objet,
de
 l’étant
 qui
 est
 là-devant
 et
 qui
 est
 constitué
 en
 objet
 par
 la
 pensée
 démonstrative
 ;
 objet
 qui
 est
 mesurable
 et,
 partant,
 relève
 de
 la
 mathématisation
 du
 monde.
 A
 l’opposé,
 la
 croyance
 est
une
 façon
de
 concevoir
 qui
s’est
 autonomisée
 (nous
pouvons
 croire
aux
 mé-tamorphoses
de
 Zeus,
à
la
possibilité
 d’enfanter
en
étant
 vierge,
à
la
résurrection
 de
 Laza-re,
 ou
 à
 la
 métempsycose,
 etc.,
 chacun
 trouvera
 ses
 exemples).
 Entre
 les
 deux,
 il
 y
a
 la
 pensée.
 En
 quoi
la
 pensée,
 si
elle
n’est
 pas
 “démontrable”,
 n’est-elle
 pas
une
 croyance
 ?
 Tout
comme
la
croyance,
elle
commence
par
 affirmer,
sous
forme
de
thèse
ou
d’hypothèse.
 Puis
 elle
 fournit
 un
 raisonnement
 qui
 est
 construction,
 qui
 n’est
 pas
 une
 démonstration
 mais
qui
 doit
néanmoins
 être
rigoureux
 et
cohérent,
 c’est-à-dire
répondre
 à
une
 logique
in-terne
 (ne
pas
 se
contredire)
 et
exlogique
in-terne
 (être
compatible
 avec
l’expérience
 que
nous
 avons
 du
monde).
 Est-ce
suffisant
 ?
Non
pas.
 Le
véritable
critère
 est
la
 capacité
de
la
 thèse
 sou-tenue
 à
 donner
 à
 penser
 et
 à
 éclairer
 le
 monde
 (ou
 plus
 modestement
 une
 partie
 du
 monde)
et,
par
là,
à
convaincre
ses
lecteurs
(ou
auditeurs).


La
 pensée
 se
 mettra
 donc
 à
 l’épreuve
 dans
 l’avancée
 même
de
 son
 cheminement,
 et
 cela
de
quatre
 manières.
L’énonciation
est
donc
 la
première
phase.
C’est
 un
chemin
kéryg-matique
 (qui
 proclame).
 Il
s’agit
 de
dévoiler
 par
 l’énonciation.
 La
 forme
 énonciatrice
 prend
 sa
 part
 d’activation
 de
 la
 pensée
 qui
 n’est
 pas
 de
 l’ordre
 de
 la
 démonstration
 mais
 du
 “donner
à
 voir”.
Il
ne
s’agit
pas
ici
 de
connaître
 (il
n’y
a
de
connaissance
au
 sens
classique
 que
 celle
 des
 étants)
 mais
de
 penser.
L’origine
 de
 la
 pensée
 se
 trouve
 dans
 l’expérience
 d’être,
 dans
 l’affect
 né
 de
 l’absorption19.
Il
s’agit
par
conséquent
de
faire
ce
que
propose


19
Ce
qui
manque
aux
machines
pour
penser,
ce
n’est
pas
une
puissance
supérieure
de
calcul
et
de
mise
en


connexion,
 c’est
l’animalité
 :
ce
 sont
les
 émotions
liées
 à
 l’absorption
qui
 sont
la
 source
de
 la
pensée.
 Une
 machine
peut
calculer,
elle
peut
même
désormais
apprendre
(sous
forme
d’accumulation
nouvelle
de
données
 lors
 de
son
 activité),
elle
 ne
peut
 pas
 absorber
;
 elle
est
 la
trace
 de
 l’être
de
 l’homme
(la
matière
ayant
 ab-sorbé
le
 travail
et
 la
pensée
 de
l’homme),
elle
ne
 peut
pas
 être
par
 elle-même
(autrement
que
sous
 la
forme
 de
l’inertie
de
la
matière
dont
elle
est
fabriquée).


(18)

Bergson
dans
Matière
et
mémoire
:

“…
aller
chercher
l’expérience
à
sa
source
ou
plutôt
au-dessus
de
ce
tournant
décisif
où,
 s’infléchissant
 dans
 le
 sens
 de
 notre
 utilité,
 elle
 devient
 proprement
 l’expérience
 humaine.”20

Et
 cette
 expérience
 d’être
 lorsqu’elle
 s’énonce
 sous
 la
 forme
 d’une
 affirmation,
 lorsqu’elle
 se
proclame,
 se
construit
sous
 la
forme
de
 concepts.
Cette
 construction
est
la
 pensée
elle-même.
 Pour
étayer
 cette
proclamation,
 nous
nous
 appuierons
 sur
un
 certain
nombre
 d’au-teurs.
 Il
nous
 faut
 donc
 dire
un
 mot
 du
statut
 revêtu
 par
ces
 citations
 à
 l’intérieur
de
 notre
 texte.
Il
 ne
s’agit
pas
 d’étudier
les
auteurs
 cités.
Il
s’agit
de
 les
faire
contribuer
 au
chemine-ment
 de
 notre
 pensée
 ;
 par
 étai,
 par
 frotteau
chemine-ment
 ou
 par
 opposition,
 mais
toujours
 dans
 le
 but
 de
 faire
avancer
 notre
 propre
 propos.
L’exposition
 de
 leurs
 pensées
sera
 donc
 fatale-ment
 partielle
 (et,
 partant,
 parfois
 défectueuse),
 mais
le
 critère
de
 validité
 de
 la
 présence
 des
citations
sera
toujours
l’avancée
de
l’énonciation.


Il
ne
 s’agit
 donc
 pas
 de
 la
 description
 (réalisée
 de
 l’extérieur
 par
 le
 locuteur)
 d’une
 es-sence
 ou
 d’une
 généralisation
 visant
 une
 loi
 d’organisation
 de
 l’étantité
 (il
 ne
 s’agit
 pas
 d’une
démarche
inductive),
mais
 de
la
construction
d’un
éclairage
(comme
 sur
le
théâtre
les
 lumières
ne
 donnent
 à
 voir
les
 comédiens
 et
 le
 décor
 que
 d’une
 certaine
 façon,
 laquelle
 changera
à
la
scène
suivante
ou
à
l’instant
 d’après).
Il
s’agit
donc
d’énoncer
ce
qui
ne
peut
 se
voir
et
ne
peut
 que
se
penser.
Comment,
dès
lors,
ne
pas
 verser
dans
la
pure
fantaisie?
 C’est
la
deuxième
manière
 d’interroger
notre
propos
:
ce
qui
donne
la
 validité
n’est
pas
une
 démonstration
 de
 type
 mathématique,
 ou
 des
 “preuves”
 apportées
 qui
 ancreraient
 le
 pro-pos
dans
 l’empirique
d’une
 enquête
 de
 genre
policier,
mais
 la
capacité
 à
convaincre
 par
la
 clarté
de
compréhension
que
les
concepts
forgés
 sont
capables
de
répandre
sur
le
monde.
 La
 question
 de
 l’éclairage
 (efficace
 ou
 non)
 a
 l’avantage
 de
 reconduire
 l’énonciation
 (qui
 fatalement
 se
présente
 comme
un
savoir)
 à
 l’expérience
dans
 laquelle
 elle
s’enracine.
 Elle
 permet
de
quitter
 le
pur
ciel
de
l’idéalité
 (qui
pourrait
être
celui
de
la
 fantaisie)
pour
confron-ter
 la
 pensée
 à
 ce
 dont
 elle
 est
 censée
 rendre
 compte.
 La
 démarche
 ne
 renonce
 pas
 à
 l’ambition
 de
 l’universalité
 (qui
 est
 toujours
 tapie
 dans
 tout
 propos
 philosophique),
 mais
 veille
à
 ce
 que
 l’ancrage
 dans
 le
 réel
 soit
 saisi
par
 l’éclairage
 que
 la
 pensée
 (fût-elle
 très
 abstraite)
apporte
 sur
celui-ci.
L’éclairage
apporté
a
 ainsi
cette
 caractéristique
d’être
 à
che-val
sur
sa
 source
(la
pensée)
et
 sur
ce
qui
est
éclairé
 (le
réel)
sans
prétendre
 être
la
totalité
 de
ce
qu’il
éclaire
ni
 de
tout
éclairage
possible.
Se
posera
alors
la
 question
de
la
vérité
qu’il
 nous
 faudra
 traiter,
 qui
 ne
 sera
 vraisemblablement
 plus
 une
 vérité
 (intellectuelle
 et
 langa-gière)
 d’adéquation
 du
 propos
a
 la
chose
 mais
une
 vérité
vivante
 d’authenticité
d’être
 telle
 que
 l’envisage
Heidegger
 quand
elle
 est
partagée
 par
 autrui
et,
 par
là,
 comme
le
souligne


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