Journalfrançaisd’ophtalmologie(2020)43,e21—e22
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ScienceDirect
www.sciencedirect.comLETTRE
À
L’ÉDITEUR
Conjonctivite
à
chlamydia
trachomatis
Chlamydiatrachomatisconjunctivitis
Unhomme de22ansse présenteauxurgences
ophtalmo-logiques pour la présence, depuis 3 semaines, d’un œil
gaucherougeaccompagnéd’unesensationdecorps
étran-geretdesécrétionscollantes.L’acuitévisuelleestchiffrée
à10/10auxdeuxyeuxavecuneimportantecorrectionde
myopie.
L’examen biomicroscopique met en évidence de
nom-breux follicules (hyperplasie du tissu lymphoïde de la
conjonctive)situésauniveaudelaconjonctivepalpébrale,
présents en plus grands nombres à gauche. Il n’y a pas
d’atteintecornéennenidesigned’uvéite.Undiagnosticde
conjonctiviteviraleestposéetuntraitementparDeIcol®
collyre(chloramphénicol+dexaméthasone)estinitié.
Cinqsemainesplustard,aprèsdeuxmoisd’évolution,il
revient auxurgences. La situations’est nettement
aggra-véeavecdes folliculesgéants (Fig.1)etuneadénopathie
prétragienneàgauche.
Desprélèvementsconjonctivauxsurécouvillonssont
réa-lisés pour rechercher par PCR le Chlamydia Trachomatis
(résultat positif, sans spécifier le sérotype) et le
Neisse-riaGonorrhea(résultatnégatif).D’autresprélèvementssont
faitsauniveaudel’oropharynx,del’anusetdanslesurines.
Lebilanestcomplétépardessérologiesvirales(VIH,
hépa-titeA/B/C)etbactérienne(syphilis).Touscesexamenssont
négatifs.
Un diagnostic de conjonctivite à Chlamydia
Tracho-matis est posé et un traitement par une prise unique
d’azythromycine1gperosetdel’Azyter® (azythromycine
collyreàprendre2×/jourdurant3jours)estinitié.
Endeuxsemaines,onconstateuneaméliorationquiest
plus lente les mois suivants. De la cortisone topique est
utiliséetransitoirementpourdiminuerlesplaintesetla
fol-liculoseréactionnelle.
Noustotalisons 8 cas deconjonctivites àchlamydia en
6moisdansnotreservice.Selonlesstatistiquesnationales
belges,lesinfectionsàchlamydiatrachomatissonten
aug-mentation[1].
Différentes entités cliniques existent en fonction du
sérotype. Les sérotypes A, B ou C causent le trachome,
une conjonctivite à chlamydia sévissant dans les pays
en voie de développement et entraînant des lésions
cor-néennesirréversibles.LessérotypesDàKsontresponsables
de la conjonctivite du nouveau-né et de la conjonctivite
folliculaire (à inclusion) de l’adulte qui est le cas nous
concernant[2,3].
Aucunélémentn’estpathognomoniquemaisla
conjonc-tion d’éléments anamnestiques et cliniques rend le cas
suspectetdoitpousserleclinicienàréaliserunePCR[2,3].
Parmiceux-ci, nouspouvonsretenir,sur leplan
anamnes-tique,uneinefficacitédutraitementclassique,uneerrance
diagnostiqueetlecaractèrechronique[3,4].Surleplan
cli-nique,retenonslecaractèreunilatéralouasymétriqueetla
présencedefolliculesgéants[5].
Il s’agit d’une infection sexuellement transmissible. Il
convientde s’assurer de l’absence de signes présents ou
passésd’infectionurinaireougénitale[5,6].
Lemode detransmissionpeut êtrevariable[2,3,7].La
formela plusclassiqueestlatransmissionparlesmainsà
partirdesécrétionsgénitales[7].Uneinfectionàchlamydia
nesignifiepasforcémentunrapportextra-conjugal.Ilpeut
s’agird’unportage parfois anciende plusieursannées.La
transmissiond’œilàœilouàpartirdesurfacescontaminées
estégalementpossible[7].Enfin,lacontamination,dansdes
piscinesinsuffisammentdésinfectées,estpossible[2].
Pour ce cas, ainsi que pour les autres cas rencontrés
dans le service, aucuneinfection urinaire ougénitale n’a
étéretrouvée[7].
Lediagnosticdifférentielestceluidesconjonctivites
fol-liculaires.Laconjonctiviteàadénovirusestlacauselaplus
fréquented’œilrouge.Elleestaussiplusfulminante,
hau-tementcontagieuse(bilatéralisationrapide)etpeutlaisser
descicatricescornéennes[4,8].Uneatteintecornéennede
typekératiteponctuéesuperficielleouinfiltratssous
épithé-liauxpeut être associéepouvant alors mimerlesnumules
retrouvéesdans la conjonctivitevirale classiqueà
adéno-virus[7]. L’herpèsestàévoqueretà nepasmanquer, au
vu de sa fréquence, et de ses complications
potentielle-ment cécitantes. Le gonocoque donne des conjonctivites
fulminantesen24havecdessécrétionstrèspurulentes.La
réactionfolliculairepeutêtresiimportanteenenvahissant
laconjonctivebulbairepériphériquequ’ellepeutmimerle
lymphomeconjonctival.
Pourconfirmerlediagnostic,nousavonsutiliséla
tech-niquedePCRsurunécouvillonpourgermesatypiques.
Le traitement est important pour limiter les
consé-quences systémiques (salpingo-ovarite, infertilité) et la
contagion[3]. Le dépistage, pour d’autres IST (infections
sexuellementtransmissibles),pourlepatientetses
parte-nairessexuels,est recommandé[3].La prise uniqued’1g
d’azythromycinesuffit[3,7,9].Ladoxycycline,100mgdeux
fois par jour durant7jours, est une alternative. Tous les
e22 Lettreàl’éditeur
Figure1. Folliculesgéantsauniveaudesconjonctivestarsalesetbulbaires.
Uneconjonctivitetrainanteetrésistanteauxtraitements
habituelsestsuspecteetdoitpousserleclinicienàréaliser
unePCRàlarecherchedechlamydiatrachomatis[4].
Déclarationdeliensd’intérêts
Lesauteursdéclarentnepasavoirdeliensd’intérêts.
Références
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M.Terlinchamp∗,B.Duchesne
Serviced’ophtalmologie,CHUdeliège,avenuede L’Hòpital1,4000Liège,Belgique
∗Auteurcorrespondant.
Adressee-mail:matthieu.terlinchamp@gmail.com
(M.Terlinchamp) DisponiblesurInternetle18novembre2019
https://doi.org/10.1016/j.jfo.2019.03.036