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La mixité sociale dans les politiques de répartition et d'attribution des logements sociaux

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Academic year: 2021

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HAL Id: dumas-01610967

https://dumas.ccsd.cnrs.fr/dumas-01610967

Submitted on 7 Dec 2017

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La mixité sociale dans les politiques de répartition et

d’attribution des logements sociaux

Magali Busseuil

To cite this version:

Magali Busseuil. La mixité sociale dans les politiques de répartition et d’attribution des logements sociaux. Droit. 2017. �dumas-01610967�

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UNIVERSITE D’AIX-MARSEILLE

FACULTE DE DROIT ET DE SCIENCE POLITIQUE

I

NSTITUT D

URBANISME ET D

AMENAGEMENT REGIONAL

M

ASTER

D

ROIT ET

M

ETIERS DE L

URBANISME

LA

MIXITE

SOCIALE

DANS

LES

POLITIQUES

DE

REPARTITION

ET

D’ATTRIBUTION

DES

LOGEMENTS

SOCIAUX

MEMOI

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MAST

ER 2

Mémoire pour le Master

Mention : Droit patrimonial, immobilier et notarial Spécialité : Droit et Métiers de l’Urbanisme

soutenu par

Mme Magali BUSSEUIL

Mme Magali BUSSEUIL

DIRECTEUR DU MEMOIRE

Françoise Zitouni

Maître de conférences - HDR

Juriste

2016 - 2017

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La mixité sociale dans les politiques de répartition et d’attribution des

logements sociaux

Résumé

Parfois contestée, souvent encensée, la mixité sociale est au cœur du droit positif français. Sa traduction dans la mise en œuvre des politiques de répartition et d’attribution des logements sociaux met en lumière les interactions complexes entre acteurs de l’habitat et dispositifs juridiques. La réalisation de l’objectif de mixité sociale révèle ainsi les contradictions liées aux interventions en faveur du logement social.

MASTER DROIT ET METIERS DE L’URBANISME Site : 2 av. Henri Poncet, 13090 Aix-en-Provence Adresse postale : 3 av. Robert Schuman 13628 Aix-en-Provence

Tél. 04 42 64 62 18/ Fax. 04 42 64 61 91 Secrétariat pédagogique : s.barbotin@univ-amu.fr

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UNIVERSITE D’AIX-MARSEILLE

FACULTE DE DROIT ET DE SCIENCE POLITIQUE

I

NSTITUT D

URBANISME ET D

AMENAGEMENT REGIONAL

M

ASTER

D

ROIT ET

M

ETIERS DE L

URBANISME

L

A MIXITE SOCIALE DANS LES POLITIQUES DE

REPARTITION ET D

'

ATTRIBUTION DES LOGEMENTS

SOCIAUX

Mémoire pour le Master

Mention : Droit patrimonial, immobilier et notarial Spécialité : Droit et Métiers de l’Urbanisme

soutenu par

Mme Magali BUSSEUIL

DIRECTEUR DU MEMOIRE

Françoise Zitouni

Maître de conférence - HDR

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2016-2017

L'université d’Aix-Marseille n'entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions émises dans ce document ; ces opinions doivent être considérées comme propres à leurs auteurs.

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Remerciements

Merci à Madame Françoise Zitouni pour les précieux conseils donnés durant toute l’élaboration de ce mémoire.

Merci à Kévin Michot et Axel Bonnardel pour m’avoir permis d’organiser mon temps de travail de manière à faciliter la réalisation de ce mémoire.

Merci à Marie-Josée Caceres et Laure Cam pour le temps et l’énergie mis à disposition dans la relecture de mes travaux.

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SOMMAIRE

Liste des abréviations……….………...7

Introduction ... 10

Partie 1. ... . Les limites des politiques de production et de répartition des logements sociaux comme unique variable d’ajustement au service de la mixité sociale ... 16

A. Une difficile équation entre offre et demande de logement social non favorable à la mixité………18

1. Un déséquilibre entre offre et demande source de limites des interventions en faveur du logement ... 18

2. Une inégalité d'attractivité des territoires non palliée par ces interventions ... 23

B. Une diversité des acteurs et dispositifs non favorable à une politique cohérente de l’habitat au service de la mixité ... 27

1. Un objectif dénaturé par la multiplicité d'acteurs aux objectifs contradictoires…….…27

2. Les documents de planification : manifestation des jeux d'acteurs en présence ... 32

Partie 2. ... .. Un droit à la mixité au détriment d'un droit à l'habitat : une apparente contradiction au cœur des politiques d'attribution des logements ... 36

A. Entre complémentarité et contradiction des concepts de Droit au Logement et Mixité sociale ... 38

1. Mixité sociale et Droit au logement : un antagonisme accepté ? ... 38

2. La mobilité dans le parc social au service des deux objectifs………...42

B. Entre intervention inégale des différents acteurs et multiplicité des intérêts en jeu : une politique d'attribution au détriment du droit au logement et de la mixité ... 46

1. Une concurrence légale des critères d'attribution ... 46

2.Les acteurs du logement social : un rôle inégal dans l'application des critères ... 48

Conclusion générale ... 57

Bibliographie ... 59

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ANAH Agence Nationale pour l'Amélioration de l'Habitat ANCOLS Agence Nationale de Contrôle du Logement Social ANRU Agence Nationale pour la Rénovation Urbaine APL Aides pour le Logement

CAL Commission d'Attribution Logements CIL Comités Interprofessionnels du Logement CIV Comité Interministériel des Villes

CNV Conseil National pour la Ville DALO Droit au Logement Opposable DIV Délégation Interministérielle à la Ville DOO Document d'Orientations et d'Objectifs

DREAL Direction Régionale de l'Environnement, l'Aménagement et du Logement DSQ Développement Social des Quartiers

DSU Développement Social Urbain

EPCI Établissements Publics de Coopération Intercommunale GPU Grands Projets Urbains

GPV Grands Projets de Ville HLM Habitations à Loyer Modéré

INSEE Institut National de la Statistique et des Études Économiques LOV Loi d'Orientation pour la Ville

NPNRU Nouveau Programme National pour le Renouvellement Urbain OAP Orientations d'Aménagement et de Programmation

PADD Projet d'Aménagement et de Développement Durable

PDALHPD Plan Départemental d'Action pour le Logement et l'Hébergement des Personnes Défavorisées

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PLAI Prêt Locatif Aidé d'Intégration PLH Programme Local de l'Habitat PLS Prêt Locatif Social

PLU Plan Local d'Urbanisme PLUS Prêt Locatif à Usage Social

PNRU Programme National pour la Rénovation Urbaine SCOT Schéma de Cohérence Territoriale

SRU Loi Solidarité et Renouvellement Urbain ZAC Zone d'Aménagement Concerté

ZEP Zone d’Éducation Prioritaire ZFU Zone Franche Urbaine

ZRU Zone de Revitalisation Urbaine ZUP Zone à Urbaniser en Priorité

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« Un urbanisme qui concentre les populations les plus pauvres dans les territoires les moins

attractifs en termes d'emplois, de desserte et d'équipements culturels ne peut que mettre en cause la cohésion sociale de la France et les valeurs de la République, au premier rang desquelles l'égalité et la fraternité. La politique du logement doit être l'un des leviers privilégiés pour organiser la mixité sociale indispensable au bien-vivre ensemble.1 »

Omniprésent dans les discours politiques et le droit positif, le concept de mixité sociale est au cœur des politiques d'aménagement du territoire. Le droit s’empare tardivement de cette notion puisqu’il faut attendre 1991 pour que la Loi d'Orientation pour la Ville (LOV) évoque un droit à la ville dont le respect passe par des « conditions de vie et d’habitat favorisant la

cohésion sociale et de nature à éviter et faire disparaître les phénomènes de ségrégation. »

La notion de ségrégation, bien plus ancienne que celle de mixité, renvoie à une forme d'exclusion des individus au regard de multiples dimensions, mais touchant l'ensemble de son cadre de vie. Par l'exclusion vis-à-vis des équipements, des infrastructures, des centres de vie et de l'emploi, la ségrégation renvoie à des dynamiques économiques, sociales, et territoriales, ne pouvant être traitées isolément. En retenant une définition négative de la mixité, cette situation se caractérise donc par « une absence de mixité sociale dans la mesure où la

pauvreté est concentrée (...).2 »

La loi Solidarité et Renouvellement Urbains (SRU) du 13 décembre 2000 définit la mixité sociale comme une véritable mission d’intérêt général, alors même que le cadre juridique demeure peu précis sur cette notion et ce à quoi elle renvoie. Cette imprécision soulevée par les députés et sénateurs devant le Conseil Constitutionnel en 20003 est perçue comme une atteinte à la libre administration des collectivités territoriales. Ces requêtes ont néanmoins été rejetées par le juge suprême, laissant la notion de mixité sociale sans définition juridique. Il est toutefois communément accepté que la mixité représenterait un état idéal d'organisation territoriale où les différentes catégories socio-économiques cohabiteraient harmonieusement au sein d'une ville, d'un quartier et d'un immeuble, sans cohérence économique, ethnique, religieuse ou sociale.

1Exposé des motifs du projet de loi Égalité et citoyenneté, n°3679, enregistré à la Présidence de l’Assemblée

nationale le 13 avril 2016.

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BUGNON, C. « La mixité sociale, définition, échelle et conséquence. » 2007.

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Si le concept de mixité recouvre des réalités différentes que les acteurs de l'aménagement peuvent interpréter à des fins variées, force est de constater que les politiques d'aménagement du territoire poursuivent ce même objectif. En effet, ségrégation et mixité renvoient au cadre de vie des individus, donc à des enjeux multiples relevant de législations différentes : droit de l'urbanisme, droit de l'environnement, politiques de l'habitat, politiques de la ville, etc... L'ensemble de ces politiques compose le droit de l'urbanisme au sens global de l'aménagement du territoire.

En mêlant les questions de transport, de logement et d’environnement, le droit de l'urbanisme s’est enrichi d’enjeux transdisciplinaires qui lui permettent de répondre à des objectifs communs en matière d’aménagement durable, en adoptant une approche cohérente et complémentaire. Il ne s’agit pas seulement d’aménager le territoire de façon rationnelle et cohérente, mais de le faire dans le respect des grands objectifs des politiques publiques tels que l’égalité et la cohésion.

La politique de l’habitat est donc une composante de l’urbanisme dans son sens le plus large. Elle s’intéresse au logement, cadre de vie, transport, réseaux, commerces. Ces différentes composantes de la notion « d’habitat » semblent reliées par un fil conducteur : la mixité sociale est au cœur de toutes les politiques d’intervention en la matière.

La politique de l’habitat, c’est d’abord la politique de production massive des logements sociaux. Il s’agit de reconstruire le pays, d’accueillir les populations locales et immigrées, et de proposer des loyers abordables à une main d’œuvre en difficulté. En déficit de 4 millions de logements4, la France voit se dégrader les logements et se multiplier les bidonvilles, faute de moyens suffisants pour subvenir à la demande de la population. Cette pénurie immobilière prend cependant sa source avant la guerre pour plusieurs raisons.

Tout d'abord, le moratoire des loyers dans l’entre-deux-guerres et la crise économique des années 1930 ont engendré une forte diminution de l’investissement immobilier, devenu moins rentable. Sur le plan politico-économique, le libéralisme, dominant avant la 2nde guerre mondiale, n’est pas favorable à l’intervention de l’État dans ce domaine non régalien. Enfin, le contexte international de guerre et de gestion des colonies explique le défaut d’intervention dans la production de logement.

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MADORE François. Ségrégation sociale et habitat, Collection Géographie sociale – Presses Universitaires de Rennes, 2004. p. 111

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C’est donc tardivement, suite à l’intervention de certaines figures emblématiques du mouvement associatif en faveur de l’habitat comme l’Abbé Pierre et à l’urgence en termes de salubrité publique, que l’État s’engage dans la production de logements par le biais des sociétés d'habitations à loyer modéré (HLM) et à plusieurs niveaux.

Sur le plan financier, par un investissement massif dans la production de logements via les aides à la pierre, sous la forme de prêts avantageux pour les HLM et de prêts aidés pour l’accession à la propriété. La France passe de 100 000 logements mis en chantier après-guerre à 555 000 en 1972.

Sur le plan foncier, les pouvoirs publics accélèrent la création de grands ensembles via la création des zones à urbaniser en priorité, les ZUP.

En favorisant le regroupement de constructions à usage d’habitation très denses en vue de réaliser des économies d’échelle, et accessoirement, de rationaliser la consommation de l’espace, les pouvoirs publics ont privilégié la spécialisation et l’isolement de ces habitations hors des centres villes en entraînant une « séparation fonctionnelle dans la ville » au détriment de la mixité. Les documents de planification suivent cette logique en favorisant une urbanisation sauvage guidée par les fluctuations des marchés fonciers et une spécialisation des territoires, plus rentable.

L’aménagement peu qualitatif des grands ensembles ainsi que l’absence de réseaux et d’infrastructures suffisants dans ces espaces ont nécessairement conduit à leur dégradation et à leur isolement. Les classes moyennes les moins précaires fuient ces grands ensembles dès les années 1970 au profit des centres ville ou de la périphérie correspondant pour cette dernière à l'idéal pavillonnaire français. Entre ségrégation et ghettoïsation5, le lexique peu valorisant attribué aux « quartiers » où se concentrent misère et chômage témoigne de l’inévitable prise en compte de ces enjeux par les pouvoirs publics.

À travers la politique de l’habitat et la politique de la ville, la question de la ségrégation et son antagonisme, la mixité, font leur apparition dans le débat public et sur la scène juridique. Il ne s’agit pas seulement d’agir pour aménager le territoire, mais de s’attaquer à une des sources de la reproduction de classe, donc de la misère, le lieu d’habitat.

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La précarisation du marché de l’emploi et la montée du chômage dans les années 1980 touchant essentiellement les ouvriers et les professions les moins qualifiées fragilisent encore davantage la légitimité et l’attractivité de ces quartiers qui concentrent grands ensembles et misère économique. En parallèle, cette précarisation d’une partie de la population et la distanciation avec les ouvriers plus qualifiés (classes moyennes et supérieures) favorisent l’éclatement du mouvement ouvrier organisé. Or, la fin de cette organisation ouvrière qui prenait place également sur le lieu d’habitat participe à l’isolement et au repli des populations précaires désormais stigmatisées, et qui peinent à formuler des revendications en faveur de l’amélioration de leurs conditions de vie.

L'accélération des réformes de la politique de la ville et de l'habitat à partir des années 1990/2000 témoigne à la fois de l'échec des pouvoirs publics à enrayer le processus de ségrégation qui persiste sur le territoire, et à corriger les déséquilibres entre offre et demande de logements sociaux dans les secteurs où le marché est tendu. La pénurie de logements dans un contexte de forte précarisation des ménages nécessite de concilier l'accès au logement, notamment des plus précaires, avec les exigences de mixité sociale.

Si les réformes progressives offrent un cadre aux interventions en faveur de la production d'une offre suffisante et diversifiée de logement, leur impact apparaît faible sur les phénomènes de ségrégation. Souvent menées de manière isolée et en inadéquation avec les réalités de la demande de logements sociaux sur le territoire, les politiques d'offre et de répartition territoriale des logements ont montré leurs limites. Ces politiques apparaissent de surcroît déconnectées des politiques d'attribution de logements menées en aval par des acteurs aux intérêts parfois contradictoires.

En adoptant une approche plus coercitive de la mixité sociale, la loi Égalité et Citoyenneté entend se saisir de cet objectif de mixité sociale à travers les politiques d'attribution de logements, pour mener une politique cohérente et des actions complémentaires entre acteurs compétents, sur un territoire plus pertinent que celui de la commune.

Toutefois, la pénurie de logements dans les secteurs tendus et la forte précarisation des ménages a conduit à l'élargissement juridique des critères de priorité des demandeurs face à l'accès au logement social. La multiplication de ces situations de précarité soulève des interrogations quant à la légitimité d'un critère de mixité sociale qui renforcerait la cohésion, au détriment d'un droit au logement effectif au profit des plus précaires.

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Ainsi, dans quelle mesure les politiques d’attribution et de répartition des logements sociaux peuvent et doivent-elles répondre efficacement à l'objectif de mixité sociale ?

Il s'agira d'analyser les limites des politiques d'offre et de répartition des logements sociaux comme unique variable d'ajustement de la mixité sociale (I), puis de traiter l'efficacité et la légitimité des politiques d'attribution des logements sociaux sous l'angle des contradictions entre droit au logement et mixité sociale (II).

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Partie 1.

Les limites des politiques de

production et de répartition des

logements sociaux comme unique

variable d’ajustement au service de

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Il s'agira tout d'abord d'analyser les corrélations entre offre et demande de logements sociaux pour évaluer leur impact sur la mixité sociale (A). Une fois ces enjeux identifiés et appréhendés, il conviendra d'évoquer les limites à l'efficacité des politiques de mixité sociale résultant de la pluralité des intervenants et des dispositifs (B).

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A. Une difficile équation entre offre et demande de

logement social non favorable à la mixité

1. Un déséquilibre entre offre et demande source de limites des interventions en faveur du logement

La mixité sociale a longtemps été davantage pensée à travers les politiques d'offre de logements. Derrière cette notion se cachait surtout une volonté de permettre et faciliter l'accès au logement des personnes défavorisées. Or, la production massive de logements souvent inadaptés à la demande et concentrée dans certaines parties du territoire témoigne de la nécessaire combinaison des interventions sur l'offre et la demande pour permettre une mixité sociale effective.

Le marché du logement, comme tout marché, trouve son équilibre dans le croisement de l'offre et la demande. La crise du logement qui se manifeste par une demande supérieure à l'offre appelle l'intervention des pouvoirs publics et des opérateurs privés pour corriger les déséquilibres du marché en agissant à la fois sur l'offre et la demande. La mise en œuvre d'outils pour rétablir cet équilibre repose sur les interactions ci-dessous.

Source : Ernst et Young

La Loi d'Orientation pour la Ville, en accompagnant cet objectif de mixité d’outils opérationnels et de planification tels que le Programme Local de l'Habitat (PLH) et l’obligation de réalisation de logements sociaux offre un cadre, bien qu’inabouti, à la création d'une offre sociale.

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En 1998, la loi de lutte contre l’exclusion consacre la mixité sociale comme un objectif de politique publique au même titre que le droit au logement et l’égalité des chances des demandeurs de logement social. Davantage axée sur une politique de demande de logement social et non d’offre, la loi prévoit l’élaboration d’un schéma d’orientation visant à harmoniser les politiques d'offre et de répartition des logements sociaux.

La loi SRU consacre véritablement une politique d’offre de logement social contraignante via son illustre article 55 qui rend plus opérationnelle l'obligation de réalisation de logements sociaux pour les communes, de 20 à 25% selon la tension du marché. Fortement contestée en raison des conséquences financières du non-respect de l'obligation et de son caractère inadapté selon certains acteurs, l'obligation peut aujourd'hui être modulée à l'échelle du territoire intercommunal par les EPCI ayant un PLH afin d'assurer une meilleure correspondance entre l'offre et la demande.

Néanmoins, la construction de logements ne répond que partiellement à la demande en raison de sa mise en œuvre à plus long terme et des problématiques liées à la disponibilité du foncier tout en limitant l'étalement urbain. L'offre doit par conséquent être également axée sur la réhabilitation des immeubles existants (logements du parc privé, logements vacants) dans les centres attractifs, et dans les quartiers en difficultés où se concentrent les poches de pauvreté. Ces politiques d'offre reposent sur des interventions dont le cadre dépasse la seule politique de l'habitat. Il s'agit de combiner les politiques d'aménagement du territoire : politique de la ville, et planification d'urbanisme. En effet, les tensions du marché du logement ne peuvent être traitées séparément des difficultés liées au parc existant et à la maîtrise du foncier. L'atteinte des objectifs de mixité sociale implique à la fois de proposer une offre neuve adaptée sur l'ensemble du territoire, mais également d'agir sur les espaces où se concentre la misère. En 2003, la loi d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine dite « loi Borloo » crée l'Agence Nationale pour la Rénovation Urbaine (ANRU) dont le rôle est de piloter le Programme National pour la Rénovation Urbaine (PNRU) pour s’attaquer aux quartiers en difficultés. Les problématiques sont multiples : insalubrité, obsolescence, ségrégation, déficit d’équipements publics. Le PNRU tente de répondre à ces objectifs par le biais d'interventions dans l’offre de logements, de mobilité résidentielle, de meilleure distribution spatiale pour réduire la concentration des difficultés économiques et sociales. Or, 10 ans plus tard, le président du Comité d’évaluation et de suivi (CES) de l’ANRU, Yazid Sabeg, s’exprime au sujet de la mixité sociale : Il s’agit d’une des limites qui fait obstacle à la

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20

réalisation du PNRU. Opter pour la stratégie de l’offre de logement social, celle de la production de logements, sans l’associer à une stratégie d’action efficace sur la demande de logement social, n’est pas pertinent.

C’est également là que se trouve la limite de la loi SRU : imposer un quota de logements sociaux ne permet pas à lui seul de créer de la mixité sociale si ces logements sont implantés dans les quartiers excentrés de la commune. Dans le même ordre d’idées, si les politiques de l’ANRU ont veillé à promouvoir l’attractivité résidentielle des quartiers en difficulté, les effets sur les typologies des demandeurs ont été très limités.

Il convient toutefois d'analyser plus en profondeur les effets du dispositif PNRU après 10 ans de politique de rénovation urbaine afin d'évaluer l'impact de la transformation urbaine sur la ségrégation.

Les opérations de rénovation engagées dans le cadre du PNRU ont permis d'améliorer l'offre en matière d'équipements et de logements, en privilégiant des formes urbaines plus cohérentes avec les objectifs d'urbanisme actuels (îlots denses mais aérés, petits immeubles, etc...). Cependant, la mise en œuvre du PNRU a été limitée à un nombre réduit de quartiers, réduisant de fait ses effets.

Si l'on s'en tient à l'objectif de mixité sociale qui nous intéresse, un des effets escomptés de ces politiques de rénovation tenait à l'augmentation de l'attractivité résidentielle de ces espaces, notamment à destination des classes moyennes. En proposant une nouvelle offre de logements diversifiée (meilleure répartition entre les types de logements sociaux : PLAI, PLUS et PLS ; accession libre ou sociale), les acteurs du logement entendaient modifier la morphologie de ces quartiers. Si la construction d'une offre diversifiée de logements a nécessairement engendré une modification du « paysage » des quartiers et de ses habitants, les effets ont été inégaux en fonction des territoires.

Il a été constaté qu'une grande partie des accédants aux nouveaux logements (en propriété ou en location) est issue des grands ensembles, souhaitant accéder à une offre plus qualitative de logements tout en se maintenant dans le même quartier. Par conséquent, les impacts de cette restructuration se mesurent davantage en termes de mixité des formes urbaines et d'accroissement de la mobilité que de mixité sociale. Ce constat revient à s’interroger sur la pertinence des politiques de mixité sociale. En effet, cette dernière apparaîtrait davantage comme une conséquence des politiques de restructuration urbaine dont le premier effet serait de rendre des territoires plus attractifs. Il faudrait alors forcer la mixité en attribuant les

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21

logements situés dans les quartiers les plus attractifs aux populations les plus précaires, alors même que le problème ne semble pas être lié au territoire en lui-même, en témoigne la volonté des habitants de se maintenir dans les quartiers où ils ont tissé des liens sociaux. Le sentiment d'appartenance à un territoire n'a pas été anticipé par les politiques d'aménagement. Par ailleurs, les effets très limités du PNRU se manifestent dans l'évolution du taux de pauvreté de ces quartiers. Leurs habitants se sont appauvris, accroissant la ségrégation des quartiers face aux centres urbains. Par ailleurs, cette nouvelle offre de logements n'a pas été accompagnée par un effort de construction de logements sociaux dans un contexte de paupérisation des ménages, accentuant encore davantage les tensions du marché. Ainsi, dans la ville de Chanteloup-Les-Vignes, dans les Yvelines, les populations précaires auraient été remplacées par « des populations encore plus précaires6 », alors même que la part de logements sociaux dans la commune serait tombée de 80 à 50%.

En outre, la paupérisation des occupants du parc social et la reconstitution limitée du parc dans ces espaces ont annulé les faibles effets que cette diversification de l'offre a engendré sur la mixité sociale.

Une des critiques formulées à l'encontre de ces opérations de rénovation est celle de l'absence totale de concertation avec les habitants, là où le lien social présent entre ces habitants et leur quartier est fort.

Néanmoins, une étude a pu démontrer la satisfaction globale des habitants suite à la réhabilitation des logements et à l'amélioration du cadre de vie7. La limite à cette satisfaction résulte des difficultés liées à l'accès à l'emploi, sur lequel le PNRU n'a eu que des impacts très limités.

Si l'objectif de mixité sociale tend à rendre attractif les quartiers prioritaires de la ville, il doit également permettre aux populations les plus pauvres d'accéder aux quartiers les plus attractifs. Or, une des limites du PNRU tient au fait que l'offre sociale est restée majoritaire dans les quartiers en difficultés, les nouveaux logements étant sensiblement situés aux mêmes endroits.

6ARENOU Catherine, maire de la commune. Propos recueillis par : COUVELAIRE, L. « La difficile équation de

la mixité sociale dans les cités. » Le Monde, 30 juil. 2017.

7

CES de l'ANRU. « Mon quartier a changé ! Ce que disent les habitants de la rénovation urbaine ». La

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22

Dans le cadre du PNRU et aujourd'hui, du Nouveau Programme National de Renouvellement Urbain (NPNRU), une partie de l'offre de logements est reconstituée hors des quartiers prioritaires de la ville. Cet objectif nécessite de mobiliser tout le foncier disponible en dehors de ces quartiers, ce qui présente un certain nombre de difficultés :

● Tout d'abord, et bien que le rôle des intercommunalités soit renforcé comme échelon stratégique dans la mise en œuvre de la politique de l'habitat, les communes bénéficient d'une importante marge de manœuvre de par leur compétence en matière foncière et de planification d'urbanisme. Il s'agit alors de composer avec les réalités territoriales et les orientations politiques et stratégiques des communes sur un territoire plus large que la seule échelle d'une commune ou d'un quartier.

● L'objectif préconisé par l'ANRU dans le cadre du PNRU était la reconstitution d'un logement social pour un logement social détruit. Or, l'ANRU a assoupli ce principe en admettant, sur certains territoires, une reconstitution bien inférieure au nombre de logements détruits, justifiée par l'inadéquation entre l'offre et la demande et le manque de foncier.

Par ailleurs, les territoires dans lesquels s'appliquent le principe du « 1 logement détruit = 1 logement reconstitué » peinent à voir l'offre se reconstituer de manière équilibrée sur l'ensemble du territoire. Ainsi, à Angers, les 688 logements détruits dans le cadre du PNRU ont été reconstitués à 63% sur site, et à seulement 14% dans les autres quartiers de la commune. Les 23% restants ont été localisés dans d'autres communes de l'agglomération. A Chanteloup, dans les Yvelines, les opérations de rénovation ont entraîné une diversification de l'offre mais les logements ont été implantés en bordure des quartiers en difficultés, « repoussant la ghettoïsation juste un peu plus loin8. »

On constate donc que les effets de cette règle du 1 pour 1 sur la répartition spatiale équilibrée du parc social, donc sur la mixité, sont limités en partie en raison de la rareté du foncier dans les centres urbains, bien qu'elle ait indéniablement pour effet positif de recréer du logement en quantité suffisante lorsqu'elle est effectivement appliquée.

Cette règle doit être associée à l'obligation de réalisation de logements sociaux prévue initialement par l'article 55 de la loi SRU, et implique donc la responsabilisation de tous les acteurs de l'habitat, et plus globalement de l'aménagement du territoire. Or, la prise en charge de la problématique de la répartition spatiale de l'offre de logement relève autant d'enjeux en

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23

termes financiers et fonciers que d'une volonté politique de voir se constituer une offre sociale sur l'ensemble du territoire. En outre, les enjeux économiques liés à la valorisation d'un foncier devenu rare ne coïncident pas toujours avec la vocation sociale qui pourrait être affectée à ce foncier.

2. Une inégalité d'attractivité des territoires non palliée par ces interventions

Le manque de foncier disponible dans les quartiers attractifs nécessite la mobilisation du parc privé à des fins sociales.

Selon l'Agence Nationale pour l'Amélioration de l'Habitat (ANAH), sur la période 2007-2015, 117 631 logements auraient fait l'objet d'une signature de convention à loyer maîtrisé dans le parc privé, contre une moyenne de 13,5 millions de locations sur la même période, ce qui représente un taux extrêmement faible. Par ailleurs, le nombre de logements conventionnés n'a cessé de diminuer durant cette période9.

Le rapport de la Fondation Abbé Pierre réalisé en novembre 2016 sur la mobilisation du parc

privé à des fins sociales souligne le manque d'investissement déployé dans la mobilisation de ce parc. Pour répondre à cet enjeu, la communication de l'existence de ces dispositifs auprès des propriétaires, associations et bailleurs est essentielle. De même, l’État et les collectivités sont des acteurs indispensables à sa mise en œuvre, en permettant par exemple des avantages fiscaux aux propriétaires en difficultés qui signeraient une convention à loyers modérés ou qui auraient recours au dispositif d'intermédiation locative.

Associés à ces outils, les dispositifs de lutte contre la vacance des logements par la taxe ou la réquisition peuvent être mis en œuvre pour mobiliser des logements. Toutefois, leur caractère très coercitif perçu comme punitif en fait des dispositifs sous-utilisés par les pouvoirs publics. Pourtant, il est essentiel que la reconstitution de l'offre de logement social dans les centres urbains attractifs s'articule avec les politiques de l'habitat définies par les documents de planification et les outils contractuels existants. Il s'agit de définir une stratégie cohérente dans l'offre et la répartition de logements là où les acteurs sont multiples et poursuivent des objectifs parfois différents.

L'offre de logements dans les quartiers les plus attractifs demeure donc insuffisante malgré les interventions sur le parc social et privé. Si ces outils sont mis en œuvre dans le but de produire

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24

du logement, ils restent limités en raison du manque d'investissement public et des réalités foncières et financières. En effet, l'offre de logements requiert de plus en plus d'apports privés là où les systèmes d'incitations fiscales et de conventionnement de loyers sont coûteux ou/et sous-utilisés.

La réforme emblématique de la loi Égalité et Citoyenneté consistant à diriger les 25% des demandeurs les plus pauvres dans le parc social situé hors des quartiers prioritaires de la ville entend agir de manière plus coercitive, en intervenant sur les politiques d'attribution pour « forcer » une mixité sociale que les politiques d'offre ne suffisent pas à instaurer.

Une des limites majeures de cette réforme tient au fait qu’elle force la répartition spatiale en imposant un quota. Il existe pourtant plusieurs constats.

Tout d'abord, il a été démontré plus haut que les populations vivant dans ces quartiers n’ont, en majorité, pas envie de partir. Inversement, pour attirer les ménages moins précaires dans les quartiers prioritaires, l’offre de logements adaptés, variés et de qualité ne suffit pas. C’est davantage l’accessibilité de ces espaces, la présence d’infrastructures suffisantes et de services publics qui vont conditionner l’attractivité de ces quartiers. L’offre doit être calibrée à ce niveau-là, pilotée par les différentes composantes de l’aménagement du territoire : le droit de l’urbanisme pour veiller à assurer une mixité fonctionnelle et des règles adaptées à l’accueil d’infrastructures et de services, ainsi que pour mettre en œuvre les outils fonciers nécessaires à la maîtrise de l’implantation et la répartition de logements ; le droit de l’habitat pour planifier les politiques d’offre et d’attribution, etc... Or, ces quartiers sont « marqués par des

séparations physiques créées par l'aménagement urbain10 » : grands axes routiers, chemins de fer, grands ensembles, qui constituent davantage une rupture symbolique avec le reste du territoire.

En outre, la conception libérale de la société n’est pas sans conséquence sur l’aménagement de l’espace. Il est difficile de rendre de tels espaces attractifs alors même que le faible niveau de rentabilité ne justifie pas d’investissement majeur par les opérateurs privés, et que l'implantation d'infrastructures représente un coût élevé pour les opérateurs publics. Difficile donc, là où le service public recule partout, de forcer des populations à s’excentrer dans des lieux où les équipements publics sont insuffisants ou inexistants.

10

MAURIN L. « Où vivent les pauvres en France ? » Urbanisme : une nouvelle géographie de l'exclusion ? Hiver 2013, n° 391, p.32.

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Les politiques de rigueur budgétaire actuelles ne sont en outre pas favorables aux investissements publics. À travers des incitations fiscales à destination des entreprises (ZFU, ZRU...), les pouvoirs publics entendent encourager les opérateurs privés à s'installer dans les espaces les moins attractifs, tout en leur laissant la charge d'organiser la mobilité et l'accès aux emplois et services. Il appartiendrait aux entreprises de prévoir les moyens nécessaires (navettes, organisation du temps de travail adaptée aux contraintes de mobilité, etc.…) pour rendre accessible le lieu de travail.

Cela appelle plusieurs observations évidentes :

- Les incitations fiscales ne permettent pas forcément de couvrir les frais des entreprises pour qu'il soit rentable de s'installer dans ces quartiers.

- Pour les entreprises qui s’installent sans mettre en œuvre ce type de dispositifs, cela écarte une grande partie de la population privée de moyens de mobilité.

Ce problème de mobilité est très marqué à Marseille, où il constitue un frein évident au développement et à la création d’emplois. Ainsi, la question de l'accès à l'emploi est perçue comme un échec de la réforme de 2003, malgré la création d'un nombre limité d'entreprises, et un bilan qui reste inégal selon les territoires. Entre 2004 et 2013, le nombre d'établissements économiques a augmenté de seulement 6% à Lorient, contre 40% à Montauban selon l'INSEE. Ces contrastes s'expliquent en partie par les investissements réalisés en parallèle dans l'amélioration de l'accessibilité des quartiers et la mise en œuvre d'outils incitatifs tels que les exonérations fiscales.

L'analyse du parcours résidentiel des ménages est essentielle pour apprécier les relations entre offre et demande de logements sociaux, puisqu'elle traduit « la capacité des ménages à adapter leur situation de logement à leur besoin. » Or, il est primordial de se demander si les nombreuses interventions destinées à créer et diversifier l'offre de logement ont été traitées au regard de la demande existante. En effet, la promotion d'une nouvelle offre diversifiée doit être cohérente avec la typologie des demandeurs, et accompagnée d'une solvabilité effective des ménages et d'une maîtrise des prix. La mobilité des ménages est un vecteur essentiel de l'équilibre entre offre et demande de logements.

L'enjeu de cet équilibre repose avant tout sur un diagnostic efficace du marché du logement, des caractéristiques de l'offre et de la demande. C'est le rôle des documents de planification

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26

que d'élaborer ce diagnostic dans le but de proposer les orientations et objectifs cohérents sur le territoire concerné.

Les politiques d’attribution des logements doivent compléter ces dispositifs en assurant une répartition des demandeurs sur la base des types de logement adéquats, des revenus, et des besoins des ménages, en créant du logement accessible.

Agir sur la solvabilité de la demande de logements par les aides au logement et l'encadrement des loyers n'est cependant pas une priorité dans le contexte de rigueur budgétaire, en témoigne la baisse annoncée des Aides Pour le Logement (APL) par le gouvernement actuel.

La planification des politiques d’offre et de répartition des logements est également limitée par la pluralité d'acteurs et de dispositifs existant, impactant de fait la réalisation des objectifs de mixité sociale.

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27

B. Une diversité des acteurs et dispositifs non

favorable à une politique cohérente de l’habitat au

service de la mixité

1. Un objectif dénaturé par la multiplicité d'acteurs aux objectifs contradictoires

La crise du logement et la concentration de la misère dans certains quartiers ont conduit les pouvoirs publics à identifier ces quartiers afin d’y mener des politiques « thématiques » :

 Une politique foncière : A travers des outils tels que le droit de préemption, ou des outils urbanistiques comme la ZAC, qui permettent accessoirement de moduler la pression immobilière.

 Une politique de rénovation : Les très contestées politiques de « démolition-reconstruction » sont une des réponses apportées par l’État pour venir à bout des grands ensembles et renforcer l’attractivité des quartiers qui les concentrent, en substituant à ces édifices des logements sociaux s'intégrant mieux dans l'environnement, plus accueillants. L'investissement dans les équipements publics a cependant été trop limité pour produire de réels effets sur l'attractivité de ces quartiers.

 Une politique fiscale : Par le biais des zones franches urbaines (ZFU) et des Zones de Revitalisation Urbaine (ZRU), les pouvoirs publics entendent renforcer l'attractivité économique en créant de l'emploi dans les quartiers en difficulté, à destination des populations au chômage.

 Une politique sociale : La création des Zones d’Éducation Prioritaire qui concentrent davantage de crédits que les autres établissements scolaires. Ces zones, souvent contestées pour leur nature contradictoire avec le principe d'égalité du système éducatif français sur l'ensemble du territoire, sont toutefois remises en cause aujourd'hui. A nouveau, il semble que la rigueur budgétaire justifie la fin de certaines politiques pourtant indispensables pour enrayer la concentration de misère dans les quartiers sensibles.

L’intervention à l’échelle des quartiers en difficulté apparaît alors très diversifiée. Néanmoins, le Développement Social des Quartiers (DSQ) montre ses limites à travers l'échelle peu

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pertinente des interventions, leur manque de coordination et la dilution, voire parfois la superposition des crédits attribués. La politique de la ville doit être mise en œuvre à une échelle plus cohérente, dans un premier temps via le Développement Social Urbain (DSU). Le contrat de ville est, depuis 1991, le nouvel outil censé répondre aux enjeux de mixité sociale sur le territoire en regroupant à la fois les politiques menées à l'échelle du quartier, du territoire communal et intercommunal autour de trois piliers : le développement de l'activité économique et de l'emploi, la cohésion sociale et l'amélioration du cadre de vie des habitants. Il s'agit d'assurer une meilleure coordination des dispositifs en évitant l'émiettement des crédits ou les doublons, et de penser l'habitat à travers toutes ses composantes : les transports, l'accès au service public, l'accès à l'emploi, etc...

Au même moment, les grands projets urbains (GPU), qui deviendront les grands projets de ville (GPV) sont lancés pour les quartiers les plus en difficulté.

En parallèle, la création du Conseil National pour la Ville (CNV), de Comité Interministériel des Villes (CIV), de Délégation Interministérielle à la Ville (DIV) puis d’un ministère de la ville témoigne de l’ancrage de la politique de la ville comme enjeu majeur des politiques publiques et paradoxalement, du rôle recouvré par l’État en plein processus de décentralisation. On voit apparaître alors la naissance du couple « État – collectivités locales » dans la gestion de la politique de la ville et de l’habitat, et avec elle, les premières contradictions entre orientations nationales et enjeux locaux. En outre, le transfert de la compétence « urbanisme » aux collectivités décentralisées leur confère la maîtrise des politiques urbaines, ce qui va sensiblement complexifier la donne en matière de cohérence des interventions.

La multiplication des structures et des dispositifs complexifie la politique de la ville, bien que la nouvelle géographie prioritaire mise en œuvre dans le cadre de la loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine entende la rendre moins complexe et plus lisible en définissant un critère unique de définition des quartiers prioritaires, celui du revenu. Il s'agit en outre d'éviter l'émiettement des crédits, la concurrence entre quartiers dans l'attribution des aides publiques, en concentrant ces crédits dans les quartiers les plus en difficultés.

La mise en œuvre de l'objectif de mixité sociale relève, conformément à la Loi d'Orientation pour la Ville, de compétences partagées entre les communes, les autres collectivités territoriales et leurs groupements, l’État et ses établissements publics, et les établissements

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publics locaux. Il s'agit d'une responsabilité collective qui implique une intervention cohérente à différentes échelles dans la limite des compétences de chacun.

L’État est chargé de faire respecter l'application effective des objectifs de mixité sociale et dispose d'un pouvoir de sanction lié à l'obligation de réalisation de logements sociaux. En outre, il intervient dans l'élaboration des documents intercommunaux tels que le PLH et le SCOT aux côtés des EPCI. L'effacement progressif de l’État dans ses interventions en matière de politique de l'habitat le place comme garant de l'application de la loi et des objectifs de politique publique. Toutefois, la mauvaise gestion des contingents par leurs réservataires dans les politiques d'attribution et la réticence des communes à appliquer l'obligation de réalisation de logements sociaux a conduit à un renouveau du rôle de l’État permis par la loi Égalité et citoyenneté.

Les EPCI ont des compétences renforcées par la loi Égalité et Citoyenneté, et doivent assurer l'équilibre social de l'habitat sur le territoire intercommunal. En effet, les politiques de l'habitat territorialisées menées à l'échelle du quartier ont montré leur limite : la recherche de la mixité se manifeste à plusieurs niveaux : obligation de réalisation de logements sociaux, mobilisation du parc privé, cohérence des politiques d’attribution, modulation des loyers du parc social...

La question de l’échelon territorial pertinent pour intervenir est régulièrement posée. La loi Égalité et citoyenneté rappelle la nécessité de mener une politique d’attribution des logements à l'échelle des bassins de vie, plus larges et plus cohérents qu'une intervention à l'échelle communale, là où les flux économiques, les déplacements liés à l'emploi et aux loisirs, etc.… s'inscrivent dans un territoire plus vaste que le seul territoire communal.

L'élaboration du PLH par les EPCI, en association avec l’État, permet à la fois de planifier une politique de l'habitat à une échelle plus pertinente pour répartir l'offre de logement social, tout en faisant supporter une partie du coût de cette politique par les intercommunalités. La loi Égalité et citoyenneté entend responsabiliser les EPCI dans les objectifs d’attribution en faveur de la mixité. Si les EPCI voient leur rôle encore renforcé par la législation, ils n'ont pas un rôle déterminant dans les instances d'attribution des logements. Peu influents dans les commissions d'attribution de logements, ils ne siègent pas dans les commissions de médiation se réunissant dans le cadre de la procédure du Droit au Logement Opposable (DALO).

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La possibilité donnée à l’État de déléguer les aides à la pierre aux EPCI ayant la compétence PLH lui permet d'amoindrir ses coûts de fonctionnement liés à la gestion de ces aides. Elle permet en outre à un seul acteur de définir les orientations en matière d'habitat sur le territoire intercommunal, en y associant les crédits nécessaires. Enfin, les EPCI ont la responsabilité du pilotage des contrats de ville.

Si la tendance actuelle est à l'édification des EPCI en « chef de file » de la politique de l'habitat, certains acteurs occupent une place de moins en moins importante mais demeurent des échelons de cette politique. Le département, dépossédé d'une large partie de ses compétences conserve toutefois la possibilité de gérer les aides à la pierre sur le territoire non couvert par un EPCI délégataire des aides à la pierre. La gestion de ces aides à plusieurs niveaux engendrée par les contrastes entre limites territoriales et administratives conduit à la superposition du système de délégation sur un territoire. Les objectifs poursuivis par les EPCI et les départements pouvant être en partie différents, ce système complexifie la répartition cohérente des crédits et fragilise la mise en œuvre de stratégies unies et complémentaires. Néanmoins, la suprématie des intercommunalités entraîne plusieurs conséquences. Tout d'abord, leur intervention dans des domaines et des dispositifs de plus en plus nombreux soulève des interrogations quant au financement des politiques publiques en matière d'habitat. En effet, les EPCI interviennent dans tous les documents de la politique de l'habitat. Outre les documents cités plus haut (SCOT, PLH, PLU et contrats de ville), les EPCI sont associés à l'élaboration des plans départementaux que sont les Plans Départementaux d'Action pour le Logement et l'Hébergement des Personnes Défavorisées (PDALHPD) et les Plans Départementaux de l'Habitat (PDH), ayant une dimension surtout sociale, conformément aux compétences départementales.

Les EPCI sont ainsi impliqués dans toutes les dimensions de la politique de l'habitat : la répartition équilibrée et diversifiée de l'offre de logement, les questions d'accessibilité au logement, le renouvellement urbain et la mixité sociale, les besoins en logement et en hébergement, ou encore les politiques d'attribution.

Or, si la multitude d'acteurs présents dans la définition et l'application des politiques de l'habitat entraîne des incohérences et un émiettement des financements, la gestion de ces politiques par un acteur unique pourrait soulever d'autres problématiques.

Dans cette hypothèse, certains acteurs, pour ne pas citer le département, qui se verraient dépossédés de leurs compétences ne disposeraient plus des crédits affectés à celles-ci. Les

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EPCI bénéficieraient donc a priori de la même enveloppe pour gérer ces compétences supplémentaires. Toutefois, les politiques en matière d'habitat n'échappent pas au processus de rationalisation budgétaire entamé par le gouvernement. Il s'agira alors pour les intercommunalités de trouver d'autres sources de financement.

Dans un second temps, la gestion de la politique de l'habitat dans toutes ses dimensions par un seul acteur offre une grande marge de manœuvre à cet acteur dans l'attribution des crédits à tel ou tel secteur. A titre d'exemple, là où les départements ont une vocation sociale dans les politiques de l'habitat, la gestion de cette dimension sociale par les EPCI pourrait être très secondaire en termes de définition des objectifs et d'attribution de crédits.

Pour simplifier, cela reviendrait à diluer les crédits face à de trop nombreux objectifs, et à « sous-alimenter » les domaines les plus sensibles, notamment ceux liés à la vocation très sociale de l'habitat.

Les communes soumises à l'obligation de réalisation de 20 à 25 % de logements sociaux se doivent également d'assurer une répartition équilibrée des logements sur le territoire en privilégiant la construction de logements sociaux hors des quartiers prioritaires de la ville. Enfin, les bailleurs sociaux sont des acteurs essentiels de la politique de l'habitat. Si les politiques d'offre de logement sont largement définies par les collectivités publiques et les documents de planification, les réalités du marché du logement impactent directement les bailleurs dans leur choix d'aménagement. En outre, les économies d'échelle résultant de la concentration des logements dans les zones les moins tendues ont favorisé la construction de tours à l'après-guerre, avant que ces dérives ne soient encadrées par les pouvoirs publics à travers la réglementation d'urbanisme et les outils de maîtrise foncière tels que le droit de préemption.

De même, les logiques de financement du logement social déterminant directement le type de logement social (PLUS, PLAI, PLS) ont eu pour effet de concentrer les logements à bas prix dans les quartiers excentrés, entraînant des conséquences immédiates sur la mixité sociale. Néanmoins, il apparaît que la réelle marge de manœuvre dont bénéficient les bailleurs sociaux se manifeste davantage lors de l'attribution des logements. Si les bailleurs sociaux ont a priori intérêt à diversifier leur parc afin d'équilibrer leur budget, le manque de transparence et la souplesse dont ils bénéficient dans l'appréciation des critères d'attribution soulève des interrogations quant à l'application des objectifs de mixité sociale.

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Son application rendue plus effective par la réforme visant à attribuer 25% des logements situés dans les territoires attractifs aux ménages les plus précaires, issue de la loi Égalité et Citoyenneté, suppose une meilleure efficacité de cet objectif. Or, au jour où la précarisation des conditions de travail et d'habitat des ménages ne cesse de croître, la légitimité d'un tel objectif peut être contestée. Les déséquilibres entre offre et demande de logements sociaux dans les secteurs les plus tendus complexifient les politiques d'attribution de logements, là où la loi élargit progressivement les critères de priorité des demandeurs.

Ces acteurs sont donc censés mener des actions complémentaires pour permettre la mise en œuvre effective de la mixité sociale sur le territoire.

Pourtant, si la mixité sociale est un objectif clairement défini nationalement et juridiquement, force est de constater qu'il n'est qu’incomplètement mis en œuvre sur certains territoires.

2. Les documents de planification : manifestation des jeux d'acteurs en présence

L'analyse des documents de planification témoigne d'une hétérogénéité dans la prise en compte des objectifs de mixité sociale. Tandis que le SCOT d’Angers évoque la mixité sociale à 14 reprises, celui du Grand Rovaltain ne l’évoque qu’une seule fois. Or, la politique de l'habitat est un des domaines majeurs de l'élaboration du SCOT. Le document d'orientations et d'objectifs fixe en effet des objectifs en matière d'offre et de répartition de logements sur le territoire sur la base d'un diagnostic détaillé de celui-ci. Or, si des outils sont mis à disposition du SCOT pour planifier une répartition équilibrée des logements, les EPCI n'entendent pas toujours se saisir de la dimension sociale de la mixité. Il est évident que les élus communaux siégeant à l’intercommunalité n’ont pas intérêt à élaborer un document qui viendrait les contraindre dans l’élaboration des documents locaux tels que le PLH et le PLU. Si le SCOT s'écarte en vertu du principe de compatibilité limitée à la seule norme supérieure lorsqu'il n'intègre pas les orientations définies au-dessus de lui (telles celles de l'article L.101-2 consacrant le principe de mixité sociale), ce constat permet de s'interroger. Au-delà de la souplesse recherchée dans les rapports de compatibilité, la question qui se pose est de savoir si les élus ont réellement envie de voir s'appliquer le principe de mixité sociale sur leur territoire.

La mise en œuvre des objectifs de mixité sociale relève également de la compétence PLU. A travers le PADD, les communes identifient leurs orientations en matière de logement. Cependant, force est de constater que la mixité sociale n'est pas une priorité pour toutes les

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communes, ou le cas échéant, elle est abordée dans des dimensions très peu sociales. Il s'agit davantage de diversifier le parc ou d'assurer une mixité des fonctions urbaines plutôt que de poursuivre un objectif d'offre de logements accessibles dans les quartiers les plus attractifs. Dans la même idée, les Orientations d'Aménagement et de Programmation du PLU retiennent davantage une approche fonctionnelle de la mixité plutôt que sociale.

Cependant, le règlement du PLU reste le document offrant le plus de marge de manœuvre aux communes pour définir des règles contraignantes à destination des opérateurs. Par la mise en œuvre de servitudes de mixité sociale, les communes peuvent imposer un quota de logements sociaux dans certaines zones du territoire conformément à l'article L.123-1-5 du Code de l'urbanisme.

Par ailleurs, la commune peut favoriser la mixité à l'échelle du territoire en retenant une approche souple des destinations de construction autorisées dans les zones. Ainsi, sous réserve qu'elles ne subissent pas de nuisances induites par les activités situées à proximité, les constructions à usage d'habitation ont intérêt à être permises dans les différentes zones urbaines pour éviter la spécialisation fonctionnelle du territoire et assurer une répartition plus équilibrée des logements sur le territoire. Associé à la procédure de servitude de mixité sociale, cet outil permettrait également de concourir à l'obligation de réalisation de 20 à 25% de logements sociaux pour les communes concernées.

Dans la même idée, la majoration de constructibilité pouvant aller jusqu'à 50 % du volume constructible dans certains secteurs des zones urbaines tend à favoriser la réalisation de logements sociaux en plus de satisfaire aux objectifs de densification des secteurs urbanisés. Enfin, les communes peuvent réserver des emplacements pour le logement, en totalité ou en partie destinés à du logement social en combinant les exigences de mixité sociale et les réalités liées aux caractéristiques d'implantation, de volumétrie et de densité du secteur.

Il existe donc une multitude d'outils pouvant être combinés ou non en fonction des réalités du territoire et des stratégies retenues par la commune, notamment budgétaires. En effet, l'acquisition de terrains représente une atteinte au droit de propriété des particuliers et un coût pour la commune en cas de mise en œuvre du droit de délaissement. En outre, cet outil ne peut être systématisé, et se doit d'être associé aux servitudes de mixité sociale qui s'inscrivent dans un périmètre plus large et laissent plus de souplesse aux opérateurs, contraints par cette mesure dans la seule hypothèse où ils décideraient de réaliser le programme de logements.

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Par ailleurs, les communes disposent d'un droit de préemption leur permettant, à plus ou moins long terme, de planifier la répartition territoriale de l'offre de logement sur le territoire. Si la mise en œuvre de ces outils devrait faciliter la réalisation de logements sociaux en permettant une certaine mixité sociale, le taux de logements dans les communes où le marché est le plus tendu demeure largement insuffisant pour répondre à la demande, et les populations les plus pauvres restent concentrées dans les quartiers prioritaires de la ville. Ce constat appelle une interrogation : les communes se saisissent-elles réellement de ces outils permis dans le cadre du PLU ?

Si les communes les plus réfractaires à la réalisation de logements sociaux ne s'en saisissent pas, la mise en œuvre de ces mesures par d'autres communes est confrontée à des réalités plus complexes. Tout d'abord, il s'agit d'objectifs dont la réalisation s'apprécie à moyen et long terme dans la mesure où la commune ne peut imposer aux opérateurs de construire contre leur volonté. Il s'agit alors de planification à long terme, où des secteurs et des parcelles sont réservés à la réalisation d'un certain nombre de logements et de typologies de logements dont l'échéance est difficilement anticipable.

Dans le cas où le programme de logements est effectivement mis en œuvre, il est difficile de mesurer les effets à court terme de l'application de tels outils dans la mesure où il faut alors prendre en compte la durée de la réalisation de ces programmes.

Enfin, dans l'hypothèse où ces outils sont effectivement mis en œuvre par les communes, il convient de se demander si la réalisation de logements est vectrice de davantage de mixité sociale sur le territoire, par une politique d'attribution favorable à la diversification des typologies de ménage dans le parc social.

Les corrélations entre le PLU et les autres documents de planification (SCOT, PLH et contrats de ville) s'apprécient en termes de compatibilité. A terme, le PLU intercommunal intégrant le PLH apparaît comme l'aboutissement d'une gestion intercommunale des politiques de l'habitat et d'urbanisme. L'objectif est de lier directement les buts poursuivis en matière d'habitat par le PLH et les outils opérationnels du PLU permettant d'y répondre. Toutefois, les effets d'un tel processus ne peuvent s'analyser à court terme pour plusieurs raisons.

Tout d'abord, la réticence des communes à transférer leur compétence d'urbanisme aux EPCI représente un frein à la gestion intercommunale.

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En parallèle, la répartition des compétences entre les EPCI eux-mêmes donne lieu à des situations complexes peu favorables à la définition cohérente d'une stratégie globale en matière d'habitat, là où leurs intérêts, notamment financiers, divergent. Ainsi, la situation dans le département témoigne de ce mille-feuille administratif. Les PLU de chaque commune chapeautés par un PLUi intercommunal métropolitain représentent une situation transitoire, là où toutes les communes ne disposent pas d'un PLH. Les rivalités résultant d'inégalités territoriales en termes financiers, économiques et démographiques témoignent à la fois de la nécessité de définir des politiques visant à rééquilibrer les disparités sur le territoire, et de la réticence des collectivités publiques à perdre une part de leur libre arbitre.

Par conséquent, la mixité sociale, qui représente une forme de ce rééquilibrage territorial, reste contestée dans la mesure où les communes les plus riches n'ont pas intérêt à mutualiser leurs objectifs et crédits avec les communes plus pauvres. A l'inverse, ces dernières, comme Marseille, y voient une aubaine financière et une façon d'attirer des populations plus aisées sur leur territoire. C'est donc une forme de mixité à sens unique qui est recherchée par les communes.

Si les contradictions entre offre et demande de logements relèvent tant d’une organisation territoriale et administrative complexe que de réalités foncières et financières, la question de l'accès au logement des plus précaires paraît se heurter à l'objectif de plus long terme qu'est la mixité. Ainsi, l'objectif principal du projet de loi Égalité et citoyenneté est de « casser les

logiques de ségrégation, de ne plus ajouter de la pauvreté à la pauvreté et de favoriser la mixité sociale11. » L'enjeu de ce projet de loi repose alors en partie sur la conciliation entre

droit au logement et mixité sociale.

Il convient également de s'interroger sur leur coexistence concrète dans les stratégies des acteurs impliqués dans les politiques d'attribution.

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Exposé des motifs du projet de loi Égalité et citoyenneté, n°3679, enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 13 avril 2016.

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Partie 2.

Un droit à la mixité au détriment d'un

droit à l'habitat : une apparente

contradiction au cœur des politiques

d'attribution des logements

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Avant d'analyser les relations entre politiques d'attribution des logements et mixité sociale, il convient de s'interroger sur la compatibilité des objectifs de mixité sociale et de droit au logement (A). Leur coexistence reste cependant fortement limitée par les contradictions engendrées par la multiplicité des acteurs et des dispositifs investis dans les politiques d'attribution (B).

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A. Entre complémentarité et contradiction des

concepts de Droit au Logement et Mixité Sociale

1. Mixité sociale et Droit au logement : un antagonisme accepté ?

La France a adopté une conception de la politique d’attribution de logements sociaux à la fois « universelle », tel est le cas dans certains pays scandinaves, et s’adressant « aux seuls publics défavorisés », à l’image de la politique appliquée au Royaume-Uni. À ce titre, il appartient aux acteurs du logement de mettre en œuvre une politique tournée vers les ménages prioritaires, mais dans le respect de la mixité sociale. La fixation de plafonds de revenus qui conditionnent l’accès au logement permet en principe de mener une politique de mixité entre les différentes situations (le plafond pour les PLUS pouvant être hauts). Pour certains, il serait en effet « impensable de transformer le logement locatif social en logement résiduel pour les

seuls ménages défavorisés12. »

Ainsi, la rédaction de l’article L.441 du Code de la construction et de l'habitation issue de la loi du 27 janvier 2017 témoigne de la nécessaire prise en compte de ces deux objectifs : « L'attribution des logements locatifs sociaux participe à la mise en œuvre du droit au

logement, afin de satisfaire les besoins des personnes de ressources modestes et des personnes défavorisées (...) et doit notamment prendre en compte la diversité de la demande constatée localement ; elle doit favoriser l'égalité des chances des demandeurs et la mixité sociale des villes et des quartiers (...). »

Or, le logement des personnes prioritaires procède d’une politique catégorielle, tandis que l’approche via la mixité sociale correspond à une politique d’organisation et de répartition territoriale. En outre, l’accès au logement des ménages se trouvant en situation précaire et urgente procède d’une logique de court terme, qui implique la mise en œuvre d’outils mobilisables dans l’immédiat.

En revanche, la mixité sociale correspond à un idéal d’organisation et de répartition spatiale applicable à plus long terme. Cet antagonisme entre droit au logement et mixité sociale rend

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