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Sol, terre, compost : quels enjeux pour l'agriculture urbaine

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Academic year: 2021

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Texte intégral

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SOL, TERRE, COMPOST;

QUELS ENJEUX POUR L'AGRICULTURE URBAINE

MÉMOIRE PRÉSENTÉ

COMME EXIGENCE PARTIELLE

DE LA MAÎTRISE EN SCIENCES DE L'ENVIRONNEMENT

PAR

EVELYNE BOISSO EAUL T

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UNIVERSITÉ DU QUÉBEC À MONTRÉAL Service des bibliothèques

Avertissement

La diffusion de ce mémoire se fait dans le respect des droits de son auteur, qui a signé le formulaire Autorisation de reproduire et de diffuser un travail de recherche de cycles supérieurs (SDU-522 - Rév.1 0-2015). Cette autorisation stipule que «conformément à l'article 11 du Règlement no 8 des études de cycles supérieurs, [l'auteur] concède à l'Université du Québec à Montréal une licence non exclusive d'utilisation et de publication de la totalité ou d'une partie importante de [son] travail de recherche pour des fins pédagogiques et non commerciales. Plus précisément, [l'auteur] autorise l'Université du Québec à Montréal à reproduire, diffuser, prêter, distribuer ou vendre des copies de [son] travail de recherche à des fins non commerciales sur quelque support que ce soit, y compris l'Internet. Cette licence et cette autorisation n'entraînent pas une renonciation de [la] part [de l'auteur] à [ses] droits moraux ni à [ses] droits de propriété intellectuelle. Sauf entente contraire, (l'auteur] conserve la liberté de diffuser et de commercialiser ou non ce travail dont [il] possède un exemplaire.»

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REMERCIEMENTS

Il y a lü ans, lorsque je suis arrivée à Montréal, l'agriculture urbaine a tout de suite pris pour moi une place importante, faisant le pont entre mes racines rurales et ma nouvelle vie urbaine. Je suis née sur une terre. Mes parents, des ruraux de naissance, n'auraient jamais pensé s'appeler agriculteurs puisqu'ils ne «vivaient» pas de la terre. Et pourtant, c'est bien cette terre qui nous a nourris pendant toutes ces années. À ma famille et surtout à mes parents, Nicole et Richard, pour m'avoir transmis l'amour de la terre, je vous écris: merci.

C'est avec ce bagage que j'ai fait une entrée dans le milieu de l'agriculture urbaine. Je m'y suis intéressée dans mes loisirs, dans mes emplois et dans mes études. J'ai eu la chance d'être accompagnée à la maîtrise par un professeur passionné. Pour avoir cnt en mon projet et en ma qualité de chercheuse, pour m'avoir soutenue de conseils et d'encouragements, et pour m'avoir offert de nombreuses occasiOns professionnelles, Éric, je te remercie du fond du cœur.

Au cours de ce mémoire, j'ai ausst eu la chance de rencontrer de nombreux passionnés de l'agriculture urbaine. Aux personnes que j'ai eu le privilège d'interviewer, aux chercheurs et surtout aux chercheuses, à Jeanne et Geneviève tout patiiculièrement pour leurs collaborations, ainsi qu'à toutes ces personnes qui ont rédigé des mémoires et fait des présentations dans le cadre de la Consultation publique sur l'état de l'agriculhtre urbaine à Montréal, je vous remercie pour votre générosité, votre temps précieux et vos réflexions inspirantes.

Les remerciements ne seraient pas complets sans souligner mes amies précieuses et qui ont fait preuve d'un amour et d'un soutien inconditionnel. Merci d'être à mes côtés.

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TABLE DES MATIÈRES

LISTE DES FIGURES ... ix

LISTE DES TABLEAUX ... xi

RÉSUMÉ ... xiii

POfNT D'fNFORMATION ... xv

fNTRODUCTION ... 1

La place du sol et des matières organiques dans la vie des citadins ... 2

Une nouvelle façon de concevoir la ville ... 5

Les multiples fonctions et formes de l'agriculture urbaine ... 10

L'agriculture urbaine dans le contexte montréalais ... 14

La question de recherche ... 16

CHAPITRE 1 LES SOLS ET L'AGRICULTURE URBAINE ... 19 1.1 Introduction ... 19

1.2 Définitions et importance des sols ... 21 1.3 Sols urbains et contraintes ... 23

1.3.1 Étalement urbain et minéralisation des sols ... 25

1.3.2 Sols urbains, contamination et agriculture urbaine ... 27

1.3 .2.1 Contamination des sols : sources et risques ... 27

1.3.2.2 Contamination et précautions ... 30

1.4 Agriculture urbaine « hors sol »; terreaux et substrats ... 32

1.5 Pratiques horticulturales et savoir lié au sol en agriculture urbaine ... 35

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1.5.2 Éducation et savoirs en matière de sol ... 37

CHAPITRE Il LE COMPOST ET LA GESTION DES MATIÈRES ORGANIQUES EN VILLE ... 41

2.1 Les déchets organiques et leur gestion ... 41 2.2 Les 3R-V et la hiérarchie du gaspillage alimentaire ... 43

2.3 La gestion des matières organiques par l'agriculture urbaine ... 46

2.4 Le compost, un amendement important pour l'agriculture urbaine ... 51 CHAPITRE III MÉTHODOLOGIE ... 55

3.1 Posture épistémologique de la recherche ... 55

3.2 La méthodologie générale de recherche ... 56

3.2.1 Analyse documentaire: Mémoires de la Con ultation publique sur l'état de 1 'agriculture urbaine à Montréal (20 12) ... 57

3.2.2 L'enquête: entrevues auprès de gestionnaires de projets en agriculture urbaine (2012-2013) ... 59

3.2.3 Analyse des données ... 62

3.3 Validité de la recherche ... 66 3.4 Règles éthiques ... 66 3.5 Consentement. ... 67 3.6 Confidentialité ... 68 3.7 Limites méthodologique ... 69 CHAPITRE IV RÉSULTATS ... 71 4.1 L'analyse documentaire : Mémoires de la Consultation publique sur l'état de l' agricultur urbaine à Montréal (20 12) ... 71

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VIl

4.2 L'enquête par entrevues ... 74

4.3 Analyses des thèmes pot1ant sur les sols, le compost et la gestion des matières organiques ... 76

4.3.1 La qualité du sol urbain, une contrainte ... 76

4.3.1.1 Contamination et décontamination des sols urbains; problèmes et recommandations ... 77

4.3.1.2 Pertinence de l'agriculture urbaine dans l'amélioration du sol urbain ... 80

4.3.2 La nécessaire gestion des matières organiques et l'opportunité qu'offre 1 'agriculture urbaine ... 82

4.3.3 Intrants, terreaux et substrats, des ressources indispensables ... 89

4.4 Autres thè1nes ... 94

4.4.1 Les terres agricoles périurbaines à protéger ... 95

4.4.2 Utilisation du sol et les enjeux d'espaces, entre contraintes et opportunités ... 96

Conclusion ... 96

CHAPITRE V DISCUSSION ... 99

5.1 Le référentiel environnemental des intervenants ... 99

5.2 Le sol: matière et vie, espace et temps ... 101 5.3 Le compostage ... 105

5.4 Les intrants en AU hors sol.. ... 108

5.5 La contamination des sols et la santé environnementale ... li 0 CONCLUSIO ... 113 ANNEXE A ... 115 ANNEXE B ... 1 19 ANNEXE C ... 123

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ANNEXE D ... 125 ANNEXEE ... 127 RÉFÉRENCES ... 131

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-LISTE DES FIGURES

Figure Page

0.1 Système alimentaire urbain selon le« Food Urbanism » 8 0.2 Multifonctionnalité de l'agriculture urbaine 14

2.1 La hiérarchie du gaspillage alimentaire 45

3.1 Schéma du processus d'analyse documentaire des mémoires et 64 présentations de la consultation publique (2012)

3.2 Schéma du processus d'analyse de l'enquête par entrevue semi- 66 dirigée

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Tableau l.l 1.2 4.1 4.2 4.3 4.4 4.5

LISTE DES TABLEAUX

Établir le niveau de risque de contamination d'un site

Actions recommandées selon le niveau de risques Division des mémoires selon le type d'acteurs

Profil type de l'intervenant à l'enquête

Récapitulatif des thèmes sur la qualité des sols urbains

Récapitulatif des thèmes sur la gestion des MO et le compost

Récapitulatif des thèmes sur les intrants, terreaux et substrats

Page 31 32 73 75 81 87-88 93

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RÉSUMÉ

La prémisse de ce mémoire est la question du sol dans les pratiques maraîchères en milieu urbain. Le sol qui est là, celui que 1 'on recouvre de béton, celui que 1 'on croit contaminé, celui qui est réellement contaminé et celui qui simplement est absent. Il s'agit également du sol que 1 'on achète dans les jardine1ies ou les quincailleries, celui avec lequel on remplit des contenants de culture ou qu'on étend sur une toiture. Et finalement, ce sol que l'on fabrique à partir de la matière organique que l'on retrouve en ville. Par la question des sols on touche nécessairement au compostage et à la gestion des matières organiques (MO). Quelle relation a-t-on avec ces sols? Quel discours tiennent les acteurs de 1 'agriculture urbaine au sujet de ce sols? Est-ce que le sol est une opportunité ou une contrainte? Qu'est-ce qu'un bon sol pour l'agriculture urbaine? Les enjeux liés au sol sont-ils importants pour les agiiculteurs urbains?

C'est donc pour comprendre l'importance qu'ont les sols pour les représentants du milieu de 1 'agriculture urbaine que nous avons effectué cette recherche. Pour ce faire, nous avons tàit ressortir les éléments du discours portant sur les sols et la gestion des matières organiques dans les mémoires de la consultation publique sur l'état de l'agriculture urba.ine à Montréal (2012). S'en est également suivi. une série d'entrevues avec des intervenants qui œuvrent en agriculture urbaine afin de creuser davantage la question. Ce sont ces réflexions et ces résultats que nous présentons dans ce mémoire.

Ce qui ressort de 1 'analyse des mémoires de la consultation publique et des entrevues c'est un discours des acteurs orienté vers des valeurs environnementales, notamment lorsqu'il est question du rôle que peut jouer l'AU dans la gestion des MO. Le sol urbain est principalement perçu comme une limite, notamment sur le plan de ses contaminations et du manque d'espace qu'il représente, alors que les pratiques en hors-sol sont considérées comme une alternative souhaitable aux problèmes rencontrés avec les sols urbains. Les enjeux des sols et de la gestion des MO sont intimement liés au manque d'accè aux ressources et à l'infonnation. Les intervenants appellent à une plus grande collaboration de la ville à cet effet.

Mots clés: agriculture urbaine, sols, compost, représentations ociales, consultation publique.

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POINT D'INFORMATION

L'auteure tient à préciser que le masculin est utilisé génériquement dans ce mémoire afin d'alléger le texte et non afin d'invisibiliser les femmes qui sont par ailleurs bien présentes et actives dans le mouvement de 1 'agriculture urbaine. De même, le point focal de ce mémoire est le contexte de Montréal, une ville «occidentale » ou «du nord », mais il n'est pas question ici de minimiser le travail qui se fait dans les villes «du sud ». La chercheuse de la présente recherche est consciente que l'agriculture urbaine notamment sous 1 'angle du recyclage des matières organiques et de l'accessibilité du sol est bien une problématique qui touche l'ensemble des réalités urbaines à travers le monde. En matière de gestion des matières organiques par l'agriculture urbaine, les villes «du sud » ont d'ailleurs fait l'objet d'un plus grand nombre d'études. Les problèmes vécus par les villes «du nord» et «du sud » ainsi que les solutions qui sont mises en place y sont sommes toute très différentes. C'est donc d'abord et avant tout dans un ·souci de cohérence que 1' accent sera mis sur les villes «du nord ». Nous ne visons aucunement, encore une fois, à invisibiliser le savoir et l'expérience des villes «du sud », et nous n'hésiterons pas à les valoriser lorsque ce sera approprié. Finalement, nous tenons à spécifier que 1 'agriculture urbaine peut viser à la fois l'élevage d'animaux et la production maraîchère ou fruitière. Dans ce mémoire, lorsque nous parlerons d'agriculture urbaine nous parlerons de production maraîchère. Si nous voulons parler d'élevage d'animaux, ce sera spécifié.

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INTRODUCTION

Depuis quelques années, 1 'agriculture urbaine (AU) est bien présente en Occident tant dans la diversité des initiatives sur le terrain, que dans la recherche scientifique ou dans les médias. De nombreux reportages et documentaires s'y intéressent', sans compter certaines émissions de télévision et de radio qui s'y consacrent pleinement2. L'AU est aussi bien présente dans le milieu de la recherche qui y consacre plusieurs éhtdes et publications chaque année. Nommons, par exemple, Sanyé Mengual et al. (2016) qui s'intéressaient au recyclage des eaux municipales en Namibie; Woltersdorf et al. (2016) pour leur article sur les perceptions en matière de toits verts et le rôle innovant de la production alimentaire ; Potter et Gretchen (20 15) pour la pollinisation en agriculture urbaine; ou encore Sharma et al. (20 14) qui étudiaient la relation entre sols contaminés et 1 'écosystème présent dans le sol. Sur le terrain, diverses initiatives communautaires, collectives, institutionnelles ou citoyennes émergent ici et là3. Du même souffle, de nouvelles écoles4 et ateliers éducatifs voient le jour pour répondre aux besoins de formation spécifiques aux jardiniers urbains.

L'AU est pour certains une activité de jardinage et de loisir, et pour d'autres un mouvement social engagé qui questionne 1 'aménagement urbain et le système

1

Notons, pour ne nommer que ceux-là, les documentaires « Une révolution agricole ... urbaine ! » à l'émission 1001 vies diffusé à la télévision de Radio-Canada en juillet 2015; «Les Villes du Futur -Les Fermes verticales» sur Arte en février 2015; «Des cultures et des villes, vers une agriculture urbaine » produit par l' AgroParisTech en 20 13; de même que le reportage « Montréal, ville agricole » à !"émission La Semaine verte à la télévision de Radio-Canada en 2012.

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Au Québec, il y a Montréal par la racine sur les ondes de la radio ClBL de septembre 2012 à avril 2016 ainsi que Le Fermier urbain diffusé à la télévision de Radio-Canada en 2013.

3 Le site www.agriculturemontreal.com répertorie les initiatives en agriculture urbaine à Montréal. 4

À Montréal, pensons notamment à l'École d'été sur l'agriculture organisé par le Laboratoire sur l'agriculture urbaine en partenariat avec le CRAPAUD et l'Institut des sciences de l'environnement de l'UQAM, ainsi qu'au City Fann School issu du Concordia Greenhouse Project de l'Université Concordia.

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alimentaire actuels. Ainsi, à l'instar du mouvement de l'alimentation locale, des circuits courts, de ses marchés fermiers et de son agriculture soutenue par la communauté (ASC), l'agriculture urbaine offre une autre occasion supplémentaire de mettre l'avant-scène la conscientisation des citoyens à leur alimentation, de façon à ce qu'ils se détachent du rôle unidimensionnel de consommateur (Levkoe, 2006). Les citadins sont donc ramenés au savoir alimentaire et agricole, c'est-à-dire d'où proviennent les carottes ou comment poussent les petits pois. Mais, qu'en est-il de la conscience du sol? Dans toute cette effervescence, où se situent les agriculteurs urbains par rapport au geste simple, mais essentiel, qu'est celui de travailler la terre, qui plus est une terre souvent bétonnée? L'agriculture urbaine pennet-elle réellement de reconnecter le citadin à la terre?

La place du sol et des matières organiques dans la vie des citadins

La question des sols est en effet d'actualité, alors qu'était décrété 2015 Année internationale des sols par 1 'ONU (F AO, 20 14), remettant de 1 'avant plan l'importance de préserver les sols et de préserver les sols en santé que ce soit pour l'alimentation ou pour les nombreuses fonctions que ceux-ci peuvent jouer. En 2020, le Québec vise l'interdiction de l'enfouissement des matières putrescibles (MDDEP, 2011). Les villes du Québec, comme de nombreuses villes occidentales d'ailleurs, effectuent ou effectueront donc dans les prochaines années un tournant significatif pour une gestion plus écologique de leurs matières organiques (M0).5 Elles pourront ainsi, en plus de réduire les émissions de gaz à effet de serre causées par leur enfouissement, permettre la production d'énergie par la biométhani ation ou la production d'un amendement de ol par le proces us de compostage. L'agriculture urbaine est pressentie par certains chercheurs en AU comme étant une des solutions à la gestion des matières organiques, en recyclant les éléments nutritifs qui y sont

5

Matières organiques (MO), déchets organiques et matières putrescibles seront utilisés dans ce texte comme synonyme.

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-3

présents, tels que le phosphore, le carbone, l'azote, etc. en faisant des villes et des jardiniers des producteurs consommateurs de compost (Smit et Nasr, 1992). La population mondiale s'urbanise à un rythme croissant. En effet, plus de 50% de la population mondiale vit actuellement en milieu urbain (UNFPA, s. d.), et ce taux atteint plus de 80% pour la population canadienne (Banque Mondiale, s. d.). C'est dans ce contexte que les villes doivent jouer un rôle environnemental de plus en plus important dans la lutte au changement climatique, ainsi que d'autres enjeux écologiques criants comme la diminution mondiale des terres arables ou la perte de biodiversité. L'ag~iculture en ville est donc un terrain de jeu idéal pour explorer la place que peut y jouer la gestion des MO et le rapport qu'entretiennent les urbains avec le sol.

Remettre à l'avant-scène les sols et les « déchets» organiques, c'est aussi donner une vitrine à la matière qui a été traitée de manière à être cachée, invisibilisée, éliminée, et ce, particulièrement dans le contexte urbain. En effet, les villes ont généralement été développées de manière à faire disparaître le sol, par exemple sous une couche de bitume, ce qu'on appelle plus généralement la minéralisation ou l'imperméabilisation des sols (Scalenghe et Marsan, 2009; Vrscaj et al., 2008). Outre les espaces imperméabilisés par les routes et les constructions, le sol restant est souvent stérilisé par sa compaction qui y limite la présence d'oxygène et donc d'organismes vivants, ou encore pollué. En ville, les principales sources de pollution du sol sont les retombées atmosphériques, causées notamment par le transport routier, mais il peut s'agir également d'activités spécifiques d'un site, tel que des activités industrielles (Schwartz, 20 15).

Les enjeux des sols urbains ont peu à voir avec ceux des sols ruraux ou périurbains, bien qu'ils soient tous menacés. Ainsi, lorsqu'on pense à la préservation des sols, on pense principalement à la préservation des terres arables en milieu rural ou

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périurbain. Or, il ne tàut pas oublier que les villes, comme Montréal, sont en grandes parties construites sur des terTes fertiles, et que l'étalement urbain menace celles-ci (Nizeyimana et al., 2001 dans Scalenghe et Marsan, op. cit.). S'intéresser au sol et à l'agriculture urbaine, c'est donc nécessairement s'intéresser au sol périurbain. Salomon Cavin (2012) souligne d'ailleurs une certaine ironie à ce sujet :

[ ... ] en même temps que l'agriculture subit la pression urbaine, un processus inverse voit la mise en culture du sol urbain (Ibid., p. a-29).

Par ailleurs, le sol urbain peut remplir de nombreuses fonctions écologiques (Vrscaj et al., op. cil.) et n'est pas seulement limité au rôle de supporter le bâti, d'où l'importance de s'y intéresser.

Dans le cas des matières orgamques, comme pour les ordures ménagères et les matières recyclables, leur gestion tend à éloigner le citoyen du «déchet » qui est en effet traité par une tierce partie (municipalité, compagnie privée, OBNL, etc.). Celle -ci l'achemine à un dépotoir loin des grands centres urbains ou le brûle dans un incinérateur. Au Canada, l'enfouissement des déchets est par ailleurs responsable de 22 % des émissions de méthane, un gaz 21 fois plus actif pour le réchauffement planétaire que le dioxyde de carbone (C02) (Statistique Canada, s. d.).· L'élément en cause ici est bel et bien l'enfouissement et la décomposition des MO qui peuvent créer des risques de contamination des nappes phréatiques puisque leur décomposition entraîne un écoulement de lixiviat. Bien sûr, c'est sans parler de la perte substantielle de re sources utiles pour l'amendement agricole et horticole. Il existe aussi des raisons sanitaires à cette gestion à distance, alors qu'historiquement la gestion publique des déchets visait à retirer toutes sources de substances potentiellement dangereuses des installations humaines (Papargyropoulou et al., 20 14). Ceci s'inscrit dans un paradigme de gestion orientée sur la prévention de la pollution et des risques sanitaires. Ce paradigme tend graduellement à changer vers

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une approche plus soutenable et holistique basée sur le pnnctpe de MO comme ressource plutôt que comme déchet ultime (Papargyropoulou et al., 2014). C'est d'ailleurs en s'éloignant de l'enjeu purement sanitaire de la gestion des MO qu'on peut envisager le rôle de 1 'agriculture urbaine comme agent de transformation de la relation et de la compréhension du citoyen envers la gestion de ses matières putrescibles (Metson et Bennett, 2015).

Une nouvelle façon de concevoir la ville

N'en demeure pas moins que tant dans le cas des sols que de la matière organique, la tendance a été de les éliminer du quotidien des citoyens. Ceci pourrait bien se renverser avec 1 'agriculture urbaine, ainsi qu'avec le virage vers 1 'aménagement de villes viables, la constmction de villes à échelle humaine, et le développement de systèmes alimentaires durables au sein des villes. On assiste en effet à travers le monde, depuis quelques années, à un virage dans l'aménagement urbain. Gestion des matières résiduelles, verdissement, biodiversité, et de façon générale, amélioration du cadre de vie sont des éléments à prendre en charge lors de la planification urbaine. Par ailleurs, avec les enjeux d'insécurité alimentaire et de déserts alimentaires, notamment dans les quartiers les plus pauvres, la refonte du système alimentaire est du même souffle mise de l'avant. De plus, à partir de 2008, le ratio de population ville-campagne a basculé, les villes hébergent désormais la plus grande partie de la population, et cette proportion étant en augmentation, elles doivent nécessairement faire partie de la solution globale contre les changements climatiques afin de réduire de façon substantielle leurs émissions de gaz à effet de serre. Aussi, dans un contexte où les terres arables disparaissent à un taux important, 40 % des terres actuellement utilisées par l'agriculture seraient classées comme menacées, et le World Economie Fomm allègue qu'il reste seulement 60 ans de terres arables sur la planète (World Economie Fomm, 2012), la constmction des villes doit être planifiée de manière à préserver le plus possible cette ressource non renouvelable. Par leur poids

1

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démographique et l'impact qu'elles peuvent avoir sur l'environnement, les villes doivent jouer un rôle de premier plan, notamment, pour la préservation des terres arables, pour la réduction des GES responsables des changements climatiques, ain i que pour l'accès de ses habitants à des aliments sains et en quantité suffisante. En ce sens, comme le mentionnent Deel tra et Girardet (2000):

«

There can be no sustainable world without sustainable cities ».

Le concept des villes viables est en fait une opérationnalisation des pnnctpes du développement durable (DO) ou développement soutenable. Le DO fait désormais partie du langage commun, mais nous allons quand même rappeler brièvement de quoi il en retourne. La crise pétrolière de 1973, suivie de plusieurs catastrophe environnementale et industrielles ont tàit prendre conscience aux habitants de la planète de l'épuisement des ressources et de l'impact du modèle économique sur le fragile équilibre de la planète. S'en suit en 1983 la Commission mondiale sur l'environnement et le développement piloté par l'Organisation des ations unies qui culminera par la publication du rapport Brundtland (1987) Noti-e avenir à tous. Ce lui-ci met par écrit les grandes lignes du développement durable. Il s'agit ainsi d'un développement qui allie les sphères environnementales, ociales et économiques, afin de créer un développement soutenable « Le développement soutenable est un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leur » (Brundtland, 1 987). Si ce concept peut être critiqué (Sauvé, 2007), il e t néanmoins omniprésent dans les discours sur l'environnement et on ne peut donc y faire abstraction. Le concept de ville viable a quant à lui émergé n 1992, au Sommet de Rio et consiste à intégrer et adapter les principes du développement durable aux divers éléments constituants d'une ville que ont l'urbanisme, l'aménagement du territoire, le design urbain, le développement socioéconomique, etc. (Vivre en Ville, 2004, p.20). Pour ce faire, elles doivent selon Emelianotf (2002) :

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• Se maintenir dans le temps, garder une identité, un sens collectif et un dynamisme à long terme

• Offrir une qualité de vie en tous lieux, et une mixité sociale et fonctionnelle, ainsi que favoriser la proximité

• Se constituer en développement équitable sur un plan écologique et social, à la fois d'un point de vue local et global, dans une temporalité actuelle et future (Ibid., adapté par Boissonneault, 20 16)

En prônant des villes plus écologiques et qui favorisent notamment les commerces de proximité et la mixité des usages, la ville viable remet en question le type de construction de la ville axé sur la voiture (Car Oriented Development), et donc sur 1 'imperméabilisation des sols par le développement d'infrastructures routières adaptées au transport individuel. Par ailleurs, les planificateurs urbains réfléchissent davantage à la densification urbaine, un outil pour éviter l'étalement urbain, ce qui nécessairement s'accompagne de réflexion par rapport à 1 'amélioration du cadre de vie pour assurer le maintien des familles dans les grands centres urbains. L'agriculture urbaine, en étant un outil d'amélioration du cadre de vie (Reybum, 2006) peut ainsi favoriser le maintien des familles~ tels que le mentionne plusieurs intervenants de la Consultation publique sur l'état de l'agriculture urbaine à Montréal (Mailhot-Leduc, 2014) et être un élément de plus qui favorise le développement durable des villes.

D'autres mouvements visent à remettre l'alimentation et 1 'agriculture au sein même de la ville. Il y a ainsi un ensemble de mouvements issus du «New Urbanism » qui proposent de remettre le système alimentaire au centre de la planification urbaine et s'opposent au «Car Oriented Developpment » (COD) qui amène la création de déserts alimentaires dans certains quartiers résidentiels. On pense notamment au « Food Urbanism » (Grimm, 2009), au « Continuous Productive Urban Landscapes » (Viljoen, 2005), à l' « Agricultural Urbanism » (De la Salle et Holland, 201 0), ainsi qu'au «Quartier Nourricier» (Duchemin, 2015). Ces mouvements réfléchissent à la

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place que peut prendre l'alimentation et l'agriculture dans la ville et ses infrastructures, afin de transformer 1 'expérience urbaine. Ils remettent en question le

système alimentaire actuel et ses impacts nocifs sur 1 'environnement, mais également

sur la dépendance des villes au pétrole, ils appellent à un changement d'un système linéaire à un modèle de ville viable fondée sur une circularité des ressources et de l'économie. La figure 0.1 montre un modèle de système alimentaire souhaité, selon le Food Urbanism de Gtimm (2009).

Figure 0.1 Système alimentaire urbain selon le Food Urbanism

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Ces écoles de pensées remettent de l'avant l'importance d'intégrer les ressources,

qu'elles soient humaines ou matérielles dans un continuum urbain. [1 est souvent mentionné l'importance de recycler les matières organiques au sein d'un système alimentaire ou agricole urbain, par contre il existe encore somme toute peu d'information sur l'opérationnalisation d'un tel système. En ce sens, il manque également d'information sur les besoins en sols ou substrats que nécessite

1 'agriculture urbaine, notamment lorsque celle-ci est faite sur des surfaces

minéralisées où le sol doit nécessairement être construit et importé. On retrouve également ce manque de détail sur la question des ressources (main d'œuvre, eau, sol, etc.) dans certaines études qui portent sur la modélisation de l'agriculture urbaine afin de répondre à la question du potentiel d'autonomie alimentaire des villes (MacRae et

al., 2010; Grewal et Grewal, 2012). C'est d'ailleurs pourquoi tout au long du mémoire nous serons guidés par la définition de 1 'AU suivante:

The most important distinguishing character of urban agriculture is not so

much its location [ ... ] but the fa ct that it is an integral part of the urban

economie, social and ecological system: urban agriculture uses urban resources (land, labour, urban organic wastes, water), produces for ur;-ban

citizens, is strongly influenced by urban conditions (policies, competition for

land, urban markets and priees) and impacts the urban system (effects on urban food security and poverty, ecological and health impacts) (Van Veenhuizen, 2006, p. 1 ).

Cette définition est centrale dans la compréhension des problématiques de 1' agriculture urbaine, car elle souligne à la fois les ressources nécessaires à la mise en place de l'agriculture en ville, le contexte social, économique et écologique qui en

favorise et défavorise l'émergence, mais aussi les impacts sur le milieu, qu'ils soient positifs ou négatifs. Ainsi, pour que la mise en place de l'agriculture urbaine soit

cohérente, elle doit à la fois répondre aux besoins des communautés d'où elle émerge et reposer sur les ressources de celles-ci. En ce sens, si, comme nous l'avons vu, l'agriculture urbaine s'intègre de façon théorique et pratique à divers courants

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d'aménagement de la ville, elle est d'abord et avant tout un mouvement de la société civile. Ainsi, de nombreux organismes communautaires, collectifs et citoyens travaillent à mettre en place une diversité d'initiatives qui remplissent diverses fonctions et prennent diverses formes.

Les multiples fonctions et formes de l'agriculture urbaine

Ruchers urbains, jardins communautaires ou collectifs, serres sur les toits, jardins en bacs de plantation à réserve d'eau pour le balcon, systèmes d'aquaponie, toits verts productifs; l'agriculture urbaine prend différentes formes (Duchemin, 20l3A). Elle est plurielle dans ses manifestations, dans ses pratiques, dans ses fonctions. Les agriculteurs urbains font preuve de beaucoup de créativité pour exploiter le peu d'espaces qu'ils peuvent s'approprier et de ressources qu'ils peuvent utiliser. lis font également preuve de créativité en matière d'organisation sociale. Bref, il y a une réelle effervescence des initiatives agricoles en ville et celles-ci sont caractérisées par beaucoup d'innovations sociales et techniques (Sanyé Mengual et al., 2016; Ba et

Aubry, 2011; Toussaint-Soulard et al., 201.1 ). À ce sujet, Metson (20 15) écrit:

«

cities are often centers of creativity and innovation» (Ibid., p. 2). li s'agit en effet d'un terreau fertile à l'expérimentation et à l'innovation, comme en fait foi l'exposition « Carrot City », une exposition itinérante qui se promène à travers le monde depuis 2009 et qui présente diverses idées conceptuelles ou appliquées sur 1 'intégration de l'agriculture urbaine au design urbain, à l'architecture, à l'aménagement urbain, etc.

Ce qut rend également 1 'AU intéressante est sa nature profondément multifonctionnelle (figure 0.2). On ne s'adonne pas uniquement à l'AU pour la production d'aliments (Duchemin et al., 2008). Ain i, l' U peut par exemple jouer un rôle important au niveau éducatif (Legault, 2011; Vermette, 2013; Bendt et al., 2013). La richesse de l'éducation par l'AU tient tant de la forme et des contextes de transmission des savoirs, de la diversité des sujets connexes à 1 'AU, et la diversité des

(28)

Il

intervenants qui y transmettent leurs savoirs et savoir-faire. L'AU intervient à la fois sur les plans teclmiques qui permettent une plus grande autonomisation alimentaire, mais également sur des plans plus politiques, en permettant un requestionnement du système alimentaire industriel, par exemple. Ainsi, Legault (2011) souligne 1 'apport éducatif des jardins collectifs :

Alliant autoproduction alimentaire biologique et locale en ville, travail en collectivité, engagement communautaire, remise en question du rapport à l'environnement et à la santé, valorisation du partage, de l'entraide et de la solidarité, le jardin collectif urbain est un projet d'éducation relative à l'écoalimentation qui contribue à revoir radicalement les relations personnes -société-environnement et à transformer la relation politique au monde. Vécue comme un processus continu, fluide et évolutif, l'éducation au jardin se distingue de la relation traditionnelle entre éducateur et éduqué. [ ... ] Cette structure éducative flexible favorise les apprentissages collectifs et coopératifs, souvent ancrés dans le lieu et l'action à travers des échanges, des discussions, des ateliers, des sorties de groupe ou des projets concrets liés aux activités de jardinage (Ibid., p.l97-198).

En effet, 1 'agriculture urbaine, de par sa nature multifonctionnelle, regroupe des acteurs de divers milieux, qu'ils soient par exemple du milieu de l'éducation, de 1 'aménagement urbain, ou encore du milieu agricole. La jonction des intérêts, des savoirs et des savoir-faire de ces différents acteurs en fait ainsi toute sa richesse et sa diversité. L'agriculture urbaine et ses ramifications plurielles peuvent être considérées comme un vecteur de changement social et culturel important. Certains auteurs reconnaissent d'ailleurs 1 'apport important de 1 'AU à 1 'éducation à l'environnement (Legault, 2011; Bendt et al., 2013). Nous pourrions ainsi anticiper que la perception qu'elle met de l'avant du sol et du compost et les savoirs qui y sont transmis pourraient avoir un impact sur les comportements des citoyens.

Parmi les autres fonctions qui peuvent nous intéresser lorsqu'on se penche sur la question des sols urbains et du compost, ce sont notamment ses implications au

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mveau de la santé. D'une part, l'agriculture urbaine peut fournir de nombreux bienfaits au niveau de la santé: exercice physique, réduction du stress et amélioration de l'état de bien-être, alimentation saine en produits frais et non transformés, etc. (Duchemin, 20138). D'autre part, il y a toujours les risques de contamination des aliments dus aux nombreuses sources possibles de polluants en milieu urbain, ce qui intéresse de nombreux chercheurs (McClintock, 20 12; Whitzling, et al., 201 0; Jackson, 20 Il; Bramwell et al., 2008).

Une autre fonction intimement liée à notre sujet est celle de l'aménagement urbain. Ainsi, l'agriculture urbaine permet aux citoyens de participer de la transformation de leur milieu de vie et de leur ville en s'appropriant, entre autres, des lieux publics. L'AU permet de transformer le cadre de vie et de transformer l'enveloppe minérale des villes.

L'agriculture urbaine est un créateur de paysages (Duvemoy et al., 2005), qui produit des espaces (biens) publics (De Bon et al.; 201 0) dans lesquels les usagers sont intrinsèquement impliqués. [ ... ] Grâce à l'agriculture urbaine, il est possible de transformer des surfaces inesthétiques en espaces verts et horticoles (Bryld, 2003), pennettant ainsi au citadin de bénéficier d'un contact avec la nature et à la terre (Duchemin, 20138, p. 98).

Si l'AU permet aux citoyens de reconnecter avec le sol et la nature, ce n'est pas sans défis, puisqu'elle doit se heurter à des enjeux d'accessibilité aux espaces, de contamination des terrains, d'accessibilité aux ressources, et de réglementations parfois contraignantes. La fonction aménagement peut également être entendue de façon plus large, soit la ville et les espaces qui l'entourent, particulièrement la relation entre la ville et le périurbain, les opportunités de liens, et les cassures.

l'agriculture urbaine est le lieu de nombreuses innovations techniques et organisationnelles, dont par exemple la diversification et l'évolution des formes de circuits courts d'approvisionnement alimentaire des villes

(30)

13

(Duvemoy, 2002 ; Aubry et Chiffoleau, 2009) créant ou recréant des liens matériels et sociaux entre la ville et sa périphérie agricole (Ba et Aubry, 2011, p. 12).

L'AU permettrait donc un meilleur continuum et une meilleure cohérence entre les deux réalités. Les liens tissés par l'agriculture urbaine et périurbaine permettraient, on peut le penser, de protéger cette dernière.

Et finalement, un élément central du présent mémoire est la fonction environnementale de l'AU. Plusieurs auteurs se sont penchés sur l'agriculture urbaine comme ou ti 1 de développement durable (Pearson et al., 20 10 ; McPherson, 201 1; De Bon, 2010; Lovell, 2010; Lam, 2007). Smit et Nasr (1992) a en ce sens dressé la table en répertoriant les principaux bénéfices environnementaux de l'agriculture urbaine: valorisation des eaux usées et des « déchets » organiques ; maximisation des espaces en milieu urbain ; conservation d'écosystèmes à l'extérieur de la ville ; et réduction de la consommation d'énergie liée au transport. et à 1 'entreposage. À cela devrait s'ajouter le potentiel de mitigation des effets liés aux changements climatiques, la biodiversité en ville et l'éducation relative à l'environnement. Tous ces éléments méritent d'être approfondis, étudiés et soutenus par des données empiriques afin de voir dans quelles mesures et sous quelles conditions 1 'agriculture urbaine peut en effet favoriser ou défavoriser ces bénéfices environnementaux, à la fois dans son contexte global et local. C'est ce qui reste encore largement à faire, étant donné 1 'engouement récent pour la recherche sur 1' agriculture urbaine.

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Figure 0.2 Multifonctionnalité de l'agriculture urbaine

lots de chaleur compostage

recyclage de l'eau 8iodi•;ers1te

Jl•ments en quantite

aliments en ua lité

Agriculture urbaine

Sens1bii1SaiiOn ;n.,powerment

(Duchemin, 20138 d'après Duchemin et al., 2008)

L'agriculture urbaine dans le contexte montréalais

S<)IS co t.~mmes At)propnailon aes esp,Kes esoaces v~rts

lrsert1on econom1aue Lt.lte contre IJ pauvre e

Detente

Contact avec la nature

Montréal est une ville dynamique en matière d'agriculture urbaine, autant par ses initiatives multiples et variées que par le mouvement social la soutenant. D'abord, on pense à Montréal pour son programme de jardins communautaires. Cette métropole s'est en effet construit un réseau de jardin communautaire enviable, qui compte aujourd'hui 97 jardins communautaires et 75 jardins collectifs (Agriculture Montréal, s. d.). Si un jardin communautaire est constitué d'un ensemble de parcelles gérées individuellement par les citoyens, un jardin collectif est quant à lui un espace géré par un groupe de jardiniers, le travail et les récoltes y sont alors mis en commun. On retrouve aussi à Montréal des collectifs de cueilleurs de fruits, des jardins

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15

pédagogiques dans différentes écoles, des jardins de rues de type «incroyables comestibles », des projets de permaculture, ainsi que des serres de semis pour alimenter les jardiniers urbains. Côté élevage, on y retrouve des entreprises privées et des collectifs d'apiculteurs urbains, des poulaillers démonstratifs et quelques expérimentations d'aquaponie.

Si les groupes associatifs sont très présents dans le paysage agricole montréalais, certaines entreprises privées sont également impliquées dans des «fermes urbaines», telles que les serres Lu fa, l'entreprise de champignons Blanc de gris, ou encore les entreprises de type «spin farming », tel que la coopérative Bioma. On y retrouve des jardins d'entreprises aménagés pour les employés ou pour les clients, on pense au Palais des congrès, à Aldo, à la Caisse populaire Desjardins du Plateau Mont-Royal, ou encore à certains jardins aménagés par des restaurateurs pour fournir les cuisines en fines herbes et légumes frais. Bref, les initiatives sont diverses, ainsi que les acteurs qui y sont impliqués.

Au-delà des initiatives, le milieu est dynamique aussi dans ses prises de paroles pour la reconnaissance du rôle de l'AU dans le paysage montréal ais, comme en fait état la consultation publique sur l'état de l'agriculture urbaine à Montréal (2012). Une coalition, le Groupe de Travail en Agriculture Urbaine (GTAU), avait ainsi été

formée préalablement pour permettre la concertation et la représentation politique des

divers groupes d'AU à Montréal.

Par ailleurs, si 1 'île de Montréal compte de multiples projets en agriculture intra -urbaine, tel que mentionné précédemment, elle a également encore sur son territoire

quelques entreprises agricoles périurbaines. L'agriculture intra-urbaine est une agriculture qui se retrouve dans le centre urbain où le bâti peut limiter les espaces

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pourtour du centre urbain et bien qu'elle soit moins impactée par le bâti, ses ten-es sont aussi convoitées pour d'autres usages économiquement plus rentables tels que le développement immobilier. On y retrouve entre autres plusieurs fermes en culture biologique, tel que la fenne Zephyr, la ferme du Santropol Roulant, Les Jardins Carya ou D3Pierres qui a également une vocation d'insertion professionnelle. On y retrouve aussi la Ferme du Bord du Lac à l'île Bizard qui est un incubateur de projets agricoles et comprend entre autres une pépinière d'arbres fruitiers (Verger pépinière Bo rd-du-Lac), ainsi qu'une fem1e de semences ance traies et rares (Terre Promise).

À noter, que dans le présent mémoire lorsqu'on parle d'agriculture urbaine, celle-ci est synonyme d'agriculture intra-urbaine, alors que nous préciserons agriculture périurbaine lorsque ce sera approprié.

La question de recherche

L'agriculture urbaines est multiples dans ses fonctions et dans les intérêts des intervenants qui la soutiennent et la développent. L'importance des ressources et des pratiques durables ou soutenables en agriculture urbaine sont indéniables. Dans le contexte où le ol urbain a été longtemps mis à mal et le traitement des matières organiques souvent éliminées de la gestion des citadins, ceci nous amène à la question de recherche suivante :

«Quel e t le di cour véhiculé par les acteurs de l'agriculture urbaine au sujet des

sols et de la gestion des matières organique ? »

Pour répondre à la question, le deux premters chapitres développent chacun la

problématique en lien avec un élément de la question de recherche, le tout en se fondant ur les recherches scientifique . Ainsi, le Chapitre 1 s'intéresse à l'enjeu des sols, alors que le Chapitre fi se concentre sur la ge tion des matière organiques. Par

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17

la suite, le Chapitre Ill expose la méthodologie utilisée pour la collecte et l'analyse des données, alors que le Chapitre IV présente les résultats de l'analyse des mémoires de la Consultation publique et des entrevues. Le Chapitre V quant à lui constitue la discussion des résultats. Par la suite, une conclusion reprend les différents éléments importants de la recherche, afin d'ouvrir une perspective sur ces enjeux cruciaux pour le développement durable des villes et de 1' agriculture urbaine.

(35)
(36)

CHAPITRE I

LES SOLS ET L'AGRICULTURE URBAINE

Ce chapitre résume les enjeux liés aux sols et à 1 'agriculture urbaine, par le biais de la revue de la littérature scientifique tout en détaillant le cas spécifique de Montréal. Les sujets abordés seront les suivants : la définition de ce qu'est un sol; la contamination des sols; la minéralisation en milieu urbain; l'étalement urbain; les terreaux et substrats en AU hors sol; les pratiques horticoles et les savoirs en lien avec le sol en agriculture urbaine.

l.l Introduction

Si l'agriculture urbaine, tout comme l'agriculture rurale ou périurbaine, ne vise pas toujours comme première fonction la productjon d'aliments, elle ne peut en être totalement dissociée non plus. Or, hormis pour les productions de type hydroponique, le sol et sa qualité sont des éléments centraux pour la culture d'aliments sains. Et si on y pense, qu'évoque-t-il ce sol en milieu urbain? Un sol prisonnier sous l'asphalte qu'il faut libérer et recréer? Un sol pollué qu'il faut décontaminer? Un sol qu'on achète à la quincaillerie pour cultiver en pots? Un sol incertain que les développeurs immobiliers ont dans la mire? Qu'est-ce qu'un sol urbain? Qu'est-ce qu'un sol propice à l'agriculture? Et finalement plus largement, pourquoi est-il si important de réfléchir au sol, qu'il soit urbain ou pas?

C'est justement afin de remettre à l'avant-scène l'importance des sols que l'année 2015 a été décrétée« Année internationale des sols » par l'ONU (FAO, 2014). Il est important de se pencher sur cette ressource non renouvelable, ou plutôt qui se renouvelle très lentement. Cette ressource offre, d'une part, de nombreux services

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écosystémiques (FAO et ITPS, 2015) et de l'autre, elle se dégrade et disparait à une

vitesse très impo1iante. Ce sont principalement les activités humaines qui sont la cause de la dégradation des sols :

Rapid growth of cities, industries, and industrialized agriculture has degraded increasingly wide areas by accelerating !osses of soi! organic carbon and biodiversity; contaminating soils with excess salt, acidity, and heavy metals; compacting them under heavy machinery; and sealing them permanently under asphalt and concrete (Ibid., p. 5).

Or, comme le soulèvent les auteurs du rappo11 « S ta tus of the W orld's Soi! Resources;

Main Report» il y a une grande ironie lorsqu'on pense au fait qu'on en connaît plus

sur le sol, scientifiquement parlant, que jamais auparavant. Cette ironie tient au tàit que la propo11ion de la population qui est dédiée au travail de la terre a continuellement diminué au cours du siècle passé (Ibid., 2015, p. 4). Le contact et

1' expérience directs du sol sont devenus beaucoup moins répandus, notamment du fait d'une forte migration de la population vers les villes. Cette connaissanct: et cette

expérience du sol pourraient par ailleurs être considérées comme un cordon de sécurité à la protection de cette précieuse ressource qu'est le sol.

Pour José Graziano da Silva, Directeur général de la F AO «Des sols sams sont indispensables pour la production alimentaire, mais nous n'accordons pas assez

d'attention à cet« allié silencieux »» (F AO, 20 14). Ainsi, dans ce contexte où de plus en plus de citoyens des villes occidentales tentent de reconnecter avec leur

alimentation, notamment par le biais de l'agriculture urbaine, et donc indirectement avec le sol, il semble qu'une grande opportunité s'ouvre pour en apprendre plus sur

(38)

- -- - - --

-21

1.2 Définitions et importance des sols

Avant de poursuivre sur l'agriculture urbaine et le sol, il serait nécessaire de faire un rappel de ce qu'est le sol et de quels fonctions et services écosystémiques, hormis la production d'aliments, il est amené à remplir. Les sols sont constitués d'un ensemble complexe d'éléments physiques, chimiques et biologiques qui interagissent entre eux et dont les propriétés peuvent être diverses. Le sol joue pour l'environnement, et pour 1 'humain, de nombreuses fonctions p1imordiales à la vie sur la Terre, mais il est menacé, notamment par un ensemble d'activités humaines, particulièrement l'urbanisme et l'agriculture industrielle: «Urban sprawl and land consumption is recognised as one ofthe major threats to sail in Europe» (Vrscaj et al., 2008, p. 81).

Le sol a de multiples fonctions. Pour Vrscaj et al. (2008) et Scalenghe et Marsan (2009), les fonctions du sol sont fondées sur ce qu'on attend de lui et donc nécessairement la qualité d'un sol est le reflet de sa capacité à remplir les dites fonctions. La F AO recense 7 fonctions du sol : 1) la production de biomasse, par exemple par 1 'agriculture ou par la foresterie; 2) le stockage, la filtration et la transformation des nutriments, substances et de l'eau; 3) le stockage de biodiversité; 4) l'environnement physique et culturel pour les humains et ses activités; 5) la source de matériel brut; 6) La réserve de carbone et 7) 1 'archivage géologique et archéologique (FAO et ITPS, 2015, p. 9). Ce qui amène également au concept de «sécurité des sols» (soi! security) qui permet de souligner l'importance de préserver les sols afin qu'ils puissent remplir leurs fonctions.

The connections between soils and societal issues - such as food security, sustainabili ty, climate change, carbon sequestration, greenhouse gas emissions, and degradation through erosion and Joss of organic matter and nutrients - are central to the recently developed concept of soi! security (McBratney, Field and Koch, 2014). Soi! security has been defined as the maintenance or improvement of the world's soi! resources so that they can provide sufficient food, fibre, and fresh water, contribute to energy sustainability and climate stability, maintain biodiversity, and deliver overall

(39)

cnviromnental protection and eco ystem servtces (Bouma and McBratney, 2013) (FAO et ITPS, op. cit., p.8).

Si on attribue aux sols urbains une fonction nourricière, alors il faut réfléchir à la

qualité qu'un sol doit avoir pour remplir cette fonction nourricière. Ainsi, pour Loïc

Dewavrin (20 15), agriculteur biologique québécois, un sol agricole en santé se définit

comme un sol vivant qui a une structure adéquate. Un sol agricole en santé est donc drainant et non compacté, ce qui permet à l'air d'y circuler. Ce sol est également tiche en matière organique, puisque celle-ci joue un rôle essentiel dans la rétention de

l'eau et la prévention des sécheresses et de inondations.

La vision fonctionnaliste du sol met en relief ce que celui-ci apporte aux écosystèmes,

mais certains auteurs y voient de possibles dérapages. Ainsi, dans un contexte de

productivité et d'efficacité, on pourrait perdre de vue le temps qui est propre au sol et la complexité de interactions qui le construit, et se tourner vers des technologies afin

de « remettre le sol en service» (Pvig de la Bellacasa, 2015, p. 700, traduction libre). Puig de la Bellacasa (20 15), qui travaille sur les connaissances et les représentations en sciences du sol, souligne l'importance de s'éloigner de la vision anthropocentrée du sol, qui crée des dérapages dans le contexte de sociétés qui

cherchent la productivité à tout prix. Les interventions auprès du sol risquent ainsi de

répondre au besoin des humains plus qu'à celui du sol à préserver:

re-conceptualizations of soil as living emphasize how productionist practices

ignore the complex diversity of soi! renewal process s in favour of linear

temporalities aimed at speeding up abundant output (Ibid. p. 702).

Cette vision se rapproche de celle de Vandana Shiva qui prétend que l'agriculture industrielle est une économie d'extraction, car elle extrait du sol tout ce qu'elle peut (Shiva, 20 15). Selon Puig de la Bellaca a (20 15), il est néce saire de ramener le sol à une échelle de temps qui lui est propre notamment en remettant le vivant au centre de

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- - - -- -- - -- - - -

-sa définition. D'ailleurs, selon cette auteure, ce qui était autrefois davantage associée aux mouvements de l'agriculture biologique et aux visions «radicales » de 1 'agriculture est devenue « mainstream » en sciences du sol (Ibid., p. 70 l ).

The noticeable trend is the increased significance of 'bi ota', from microbial to invertebrate fauna and of course plants, roots and fungi, in the very definition of soi!. Are living organisms part of soi!? We would include the phrase 'with its living organisms' in the general definition of soi!. Thus, from our viewpoint soi! is alive and is composed of living and nonliving components having many interactions ... When we view the soi! system as an environment for organisms, we must remember that the biota have been involved in its creation, as well as adapting to !ife within it. (Coleman et al., 2004: xvi, emphasis added) In this conception, soi! is not just a habitat or medium for plants and organisms, nor is it just decomposed material, the organic and mineral end-product of organism activity. Organisms are soi!. A lively soi! can only exist with and through a multispecies community ofbiota that makes it. (Ibid., p. 701)

S'il apparaît primordial de souligner 1 'importance du vivant, c'est que, comme l'écrit

. .

Puig de la Bella casa (20 15), notre perception de ce qu' e t le sol affecte notre façon d'en prendre soin, et vice versa (Ibid., p. 692). Ceci se voit en agriculture, où 1 'approche écologiste du sol amène à voir celui-ci comme une communauté vivante plutôt qu'un réceptacle, un support ou un substrat de culture (Ibid., p. 691) et se reconnaît dans les gestes posés à cet effet par l'agriculture écologique.

1.3 Sols urbains et contraintes

Deelstra et Girardet (2000) écrivent qu'il n'est pas difficile de créer des sols fertiles en milieux urbanisés. En effet, les villes recèlent d'une grande abondance de matière organique qui, une fois compostée et incorporée au sol, peuvent ramener vie et matière organique dans le sol.

Creating fertile soi! is not usually a problem in cities because, by definition, they are places where fertility accumulates in great abundance. [ ... ] A great

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variety of materials are available that can be composted and incorporated into garden soi! - crop residues, kitchen wastes, old newspapers, the leaves of city trees and even hum an faeces. [ ... ] Provided that organic amendments are not contaminated, the use of abundant fertile materials and the growing of trees, crops and other greenery in cities will help keep urban soils fertile. atural soils are 1ich in !ife; there are numerous "recycling" systems at work in the top layers of the earth. Through urban agriculture, soi! systems can be kept in balance (Ibid., p. 49).

Bien sûr, il s'agit d'un idéal. On peut se demander en effet dans quelle mesure l'agriculture urbaine améliore la qualité des sols. Schwartz (2013), par exemple, a identifié que le jardinage dans les jardins familiaux donne souvent lieu à une transformation importante du sol urbain et des caractéristiques diverses liées à la multitude d'approches : «La multiplicité des approches de gestion de la fertilité des sols de jardin conduit à dire que chaque jardin est « une île au milieu d'un océan». Contrairement aux pratiques agricoles professionnelles qui sont largement standardisées pour des raisons économiques, les modes de jardinage et de conduite de sols de jardins sont infinis » (Schwartz, 2013). La multiplicité des pratiques agricoles urbaines et le caractère foncièrement hétérogène des sols urbains, et donc difficile à étudier (Schwartz et al., 2015), pou1nient expliquer qu'il y ait encore peu de recherche sur le rôle que peut jouer 1 'agriculture urbaine ur 1 'amélioration de la fertilité des sols.

Or, le succès de 1 'agriculture urbaine dépend justement de la capacité à améliorer les sols pour y cultiver des végétaux.

Urban soils tend to have poor physical properties as weil as nutrient deficiencie . [ ... ] Common characteristics in urban soi! are high leve! of compaction and increased contamination by construction debris (De Kimpe and Morel, 2000). Degraded urban soi! will have to be substantially improved to support an increase in urban agriculture. (Mcivor, 20 Il, p. 5)

(42)

25

1.3.1 Étalement urbain et minéralisation des sols

Les causes de la disparition des terres arables sont multiples, allant de causes

naturelles aux causes humaines. Dans les causes de nature humaine, une nous

intéresse plus que les autres: l'étalement urbain. Les villes n'ont de cesse de prendre

du terrain d'un point de vue démographique, mais aussi d'un point de vue

géographique, par ce qu'on nomme l'étalement urbain. Ce dernier fait ress011ir l'enjeu de la perte graduelle de terres arables. Les villes en expansion sont en effet souvent construites sur les meilleures terres agricoles et poussent l'agriculture à se déplacer sur des terres moins propices (N izeyimana et al., 200 1 in Scalenghe et Marsan, 2009, p. 4). Ceci couplé à une détérioration des terres en milieu mral, causée

notamment par 1 'agriculture industrielle (Horrigan, et al., 2002) représente une

menace pour 1 'agriculture mondiale.

Ce phénomène de 1 'étalement urbain est caractérisé par un processus de dézonage

pour permettre la construction immobilière sur les terres agricoles, ce qui a pour effet

d'augmenter les prix des terres avoisinantes ainsi que leurs taxes foncières, ce qui

peut s'avérer problématique pour certaines entreprises agricoles (Direction de l'appui au développement des entreprises et de l'aménagement du territoire, 2012, p. 20).

Pour réduire les impacts de l'étalement urbain, plusieurs villes mettent en place des

mesures de densification urbaine. Dans ce contexte, l'agriculture urbaine fait

d'ailleurs face à une forte compétition des espaces. L'AU n'est souvent pas de taille, car le sol urbain est en effet davantage considéré pour sa valeur spatiale ou foncière (sol-surface), que pour sa valeur intrinsèque, c'est-à-dire de matière (sol-matière)6.

As soi! is an important component of urban ecosystems, its qua!ity must be

recognised and integrated into environmental quality management and

sustained at an appropriate level. Although other environmental factors have

been largely recognised as essential components of city ustainability (Ravetz,

6

(43)

2000) and quality of life (van Kamp et al., 2003), soi! quality information is generally overlooked at the time of land use planning. This is mainly due to the high social and economie pressure that makes soil only a consideration in

terms of being a surface for buildings or a space for development (Yrscaj et al., 2008, p. 83).

Au em de 1 'aménagement urbain, 1' agriculture urbaine pourrait-elle amener une sensibilisation à l'importance du sol et à ce qu'il peut amener aux écosystèmes urbains? Dans Scaling up Urban Agriculture in Toronto; Building the Infi-astructure,

Nasr et al. (2010) proposent de créer un système de récupération du «bon sol» lorsqu'il est prélevé pour de nouvelles constructions atin de l'acheminer vers les sites d'AU, par exemple.

When areas are graded for development, good soi! may be blllied under new buildings or shipped to distant landfills. o system exists for recuperating such soils and moving them to sites being cultivated in urbanized areas. So

il-saving systems cou1d be created that either match those removing soi! with those removing good soi! with those who need it, or that allow for «soi!

banking» (Nasr et al., 2010, p. 25).

Le développement urbain s'accompagne aussi de la minéralisation et de l'imperméabilisation des sols que ce soit pour y ériger du bâti ou des infrastructures routières. Il faut préciser que 1 'imperméabilisation des sols est un phénomène qui

peut être soit naturel ou artificiel (Scalenghe et Marsan, op. cit.). Le processus naturel

se caractérise par une perte de structure du sol causé par la pluie, le labourage, la compaction, alors que pour l'imperméabilisation artificielle il s'agit du recouvrement du sol par un scellant (Ibid.). En milieu urbain, il y a donc à la fois de l'imperméabilisation naturelle et de l'imperméabilisation artificielle qui s'opèrent.

Par contre, l'imperméabilisation artificielle est généralement permanente et entraîne

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- - -

-27

Les impacts de la minéralisation et de l'imperméabilisation des sols sont multiples, les risques d'inondation et l'impossibilité de recharger les nappes phréatiques, par exemple. La minéralisation des sols se traduit aussi nécessairement par une perte de biodiversité, c'est pourquoi 1 'urbanisation est considérée comme un facteur clé de 1 'homogénéisation biologique (Ibid.).

The impact of soi! sealing on a landscape is a function of the otiginal

composition of the natural soi! but it always results in biodiversity loss. Urbanization is in fact considered a key factor of biological homogenization. ative ecosystems, when sealed under cities, are replaced by pavement and buildings and what is left of the natural soi! is covered with green areas, which are often dominated by non-native omamental species (Pauchard et al., 2006 in ibid., p. 7).

Par ailleurs, comme le mentionne Vandana Shiva, le sol est le plus grand réservoir de vie et d'eau de la planète (Shiva, 2015), alors le recouvrir limite également les échanges que peut avoir ce milieu avec l'ensemble de l'écosystème urbain. Les impacts sont donc importants pour la biodiversité et 1 'équilibre hydtique mondial.

1.3.2 Sols urbains, contamination et agriculture urbaine 1.3.2.1 Contamination des sols : sources et risques

Les villes sont des territoires où il se fait de nombreuses activités susceptibles de polluer le milieu « naturel ». La contamination des sols est donc nécessairement un enjeu qui intéresse bon nombre de chercheurs en agriculture urbaine (McClintock, 2012; Whitzling, et al., 2010; Jackson, 2011). Les sources de contamination des sols sont multiples en raison des activités diversifiées qui caractérise le territoire urbain. On retrouve de la contamination biologique, par exemple si les aliments entrent en contact avec la faune urbaine. La contamination aux métaux lourds est quant à elle souvent due aux activités passées du site, que ce soit les activités d'une ancienne industrie, la proximité d'une voie ferrée, les résidus de matériaux contenant des

(45)

métaux lourds. Les dépôts d'hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP)

constituent également une autre contamination possible des sols, souvent associés au

transport des véhicules ou à la combustion des poêles à bois.

Mais les degrés de contamination au sein d'une ville, d'un quartier, d'un terrain ne

sont pas uniformes et dépendent de nombreux facteurs. Ainsi, des sites en hauteur,

tels que les toits, pourraient avoir un impact sur la diminution de la présence des

contaminants.

En plein centre de Paris, sur le toit d' Agroparistech, la présence de métaux lourds dans les légumes produits a été mesurée 10 et 100 fois en dessous des nonnes européennes. En etfet, dès lors qu'on s'élève un petit peu on s'abstrait

d'une partie de la pollution atmosphérique (Aubry et Consalès, 2014, p. 126).

Les sites qui ont un historique d'industrialisation lourde par exemple sont plus à tisques de contamination qu'un quartier résidentiel. Or, ces quartiers sont généralement constitués d'une population plus défavorisée. Il est ainsi intéressant de

penser que si l'agriculture urbaine peut s'inscrire dans un mouvement de justice sociale, notamment pour lutter contre les déserts alimentaires, elle peut aussi être le reflet des inégalités ociales et de 1' injustice environnementale. En effet, McClintock

(20 12) souligne que les personnes défavorisées ou marginalisées ont non seulement

plus de risques d'habiter dans des déserts alimentaires, mais également de faire de

1 'agriculture urbaine sur des sites contaminés.

the research reveals that soi! Pb concentrations are generally lower than federal screening levels of 400 ppm, but significantly higher in West Oakland, the city's olde t area and home to a predominantly low-income and African American population (Ibid., p.460).

(46)

29

Si les sources sont multiples, si la présence de contaminants dans les sols urbains est réelle, leur transposition dans les aliments qu'on y cultive dépend de nombreux facteurs.

li y a derrière ces questions des incertitudes scientifiques et des recherches à mener sur ce qu'on appelle la biodisponibilité, c'est-à-dire le passage d'une teneur dans un sol à une teneur dans une plante, et sur la bioaccessibilité c'es t-à-dire le passage d'une teneur dans une plante à une teneur dans une personne. Cela ne veut pas dire que le risque n'existe pas, ni que c'est forcément très dangereux s'il y a des résidus de pollution dans un sol (Aubry et Consalès, op. cit., p. 126).

Ainsi, Bramwell et al. (2008) ont analysé des échantillons de 28 sites d'agriculture urbaine et mesuré la biodisponibilité des contaminants (plomb et arsenic) dans les sols répertoriés, contaminants intimement liés à l'industrie du charbon. De ces sites, seulement trois ont dû être décontaminés. Les autres sites ont démontré une faible biodisponibilité des contaminants puisque ceux-ci ne s'accumulaient pas dans les plantes (Bramwell et al., 2008).

De 2006 à 2009, la Direction de la santé publique de Montréal pour le compte de la ville de Montréal a fait une étude afin d'évaluer les niveaux de contamination dans les jardins. S'en est suivi un rapport (Beausoleil et Priee, 2010) auquel la ville et les arrondissements de Montréal ont répondu en adoptant certaines mesures, telles que la fermeture de certains jardins, la décontamination des sites, ou le réaménagement des jardins en culture hors sol. L'étude a mesuré les niveaux de contaminants de plomb et d'hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) présents dans des laitues, carottes et tomates cultivées dans les jardins communautaires de Montréal. Le rapport (Ibid.) démontre que le niveau de contamination des sols a un impact sur le niveau de contamination des fruits et légumes qui y sont cultivés, bien que la relation ne soit pas forte et qu'elle soit variable. Cette étude constate que le type de légumes influence

Figure

Figure 0.1  S ys tème alimentaire  urbain selon  le  Food  Urbanism
Figure 0.2  Multifonctionnalité  de  l'agriculture urbaine
Tableau  1.1  Établir  le  niveau de risque de contamination d'un site
Tableau  1.2  Actions  recomm a nd ées  se lon  le niveau d e  risques
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