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Les collectivités territoriales et leurs musées : Recherches sur le développement et les modalités de gestion et de gouvernance d’un service public local

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Les collectivités territoriales et leurs musées :

Recherches sur le développement et les modalités de

gestion et de gouvernance d’un service public local

Claire Bosseboeuf

To cite this version:

Claire Bosseboeuf. Les collectivités territoriales et leurs musées : Recherches sur le développement et les modalités de gestion et de gouvernance d’un service public local. Droit. Université René Descartes - Paris V, 2012. Français. �NNT : 2012PA05D010�. �tel-00798306�

(2)

I

UNIVERSITÉ PARIS DESCARTES

ÉCOLE DOCTORALE ED262

Les collectivités territoriales et leurs musées

:

Recherches sur le développement et les modalités de gestion

et de gouvernance d’un service public local

Thèse pour l’obtention du titre de

DOCTEUR EN DROIT PUBLIC

Présentée et soutenue publiquement par

Claire BOSSEBOEUF

Le 1

er

décembre 2012

Composition du jury

- Madame Marie CORNU, Directrice de recherche au CNRS, rapporteur

- Monsieur Jean-Marie PONTIER, Professeur à l’Université d’Aix-Marseille III, rapporteur

- Monsieur Michel DEGOFFE, Professeur à l’Université Paris Descartes - Monsieur Arnaud HAQUET, Professeur à l’Université de Rouen

- Monsieur Xavier CABANNES, Professeur à l’Université Picardie Jules Verne, directeur de thèse

(3)

II L’Université n’entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions émises dans la présente thèse ; ces opinions doivent être considérées comme propres à leur auteur.

(4)

III

Remerciements

Je souhaite remercier sincèrement Monsieur le Professeur Xavier Cabannes, mon directeur de thèse, pour ses conseils et sa disponibilité à mon égard. Si un directeur de thèse ne dirige pas qu’un seul doctorant, j’ai toujours eu l’impression, pour ma part, d’être la seule, et je suis fière d’avoir accompli ce travail sous sa direction.

De même, je suis honorée que Madame Marie Cornu et Messieurs les Professeurs Jean-Marie Pontier, Arnaud Haquet et Michel Degoffe aient accepté de consacrer du temps à la lecture de mon travail.

Je remercie également Fréderic Poulard, Fabrice Thuriot, Anne Hertzog, Jean-Michel Tobelem et les autres membres du groupe de recherche sur les musées et le patrimoine qui m’ont accueillie avec bienveillance et qui ont été les premiers auditeurs de la présentation de mon travail.

Cette étude a été menée dans le cadre d’une convention industrielle de formation par la recherche, et je souhaite exprimer ma reconnaissance à toutes les personnes qui ont, au sein de la ville de Paris, contribué à la mise en œuvre de ce projet. Ma gratitude s’adresse particulièrement à Bénédicte Dussert, chef du bureau des musées, qui m’a accueillie dans son service et m’a permis d’utiliser les musées de la ville de Paris comme terrain de recherches et d’expertises pour cette étude, et Delphine Levy, chef de la mission de préfiguration de l’établissement public des musées de la ville de Paris. Je tiens à remercier également l’ensemble de mes collègues de la ville de Paris qui ont participé, de près ou de loin, à la rédaction de ce travail. Ils ont bien voulu me faire partager leur expérience des affaires juridiques et du monde des musées, et me donner accès à leurs informations et à leur documentation : je pense notamment à Yves Picot à la direction des affaires juridiques et à Jean-Baptiste Grassi, responsable de la sécurité des musées de la ville. Merci à Valérie Kozlowski et à Marie Monfort, conservatrices au bureau des musées, pour la finesse de leurs observations, que j’espère ne pas avoir dénaturées dans mon étude.

Ma gratitude s’adresse aussi à toutes les personnes que j’ai eu le plaisir de rencontrer dans le cadre de mes recherches. Ainsi, au ministère de la Culture et de la Communication, je remercie Messieurs Charles Clément, Laurent Manœuvre, Bertrand Galey, Charles Personnaz, Bruno Saunier d’avoir bien voulu me consacrer un peu de leur temps. Je remercie également Marie-France Cocheteux, secrétaire générale du musée national du Moyen-Âge, Brice Quentin, directeur des affaires juridiques du Centre des monuments nationaux, Sylvie Müller, conservatrice à la direction régionale des affaires culturelles d’Île-de-France, Bertrand Lapeyre, vice-président de la Fondation Calvet, Annick Notter, directrice des musées de La Rochelle, Stéphane Leng à la conservation départementale du Jura, Philippe Matthieu, directeur de la citadelle de Besançon, Stéphanie Demangeon-Massé, adjointe au directeur du développement culturel du département des Vosges, et Nicole Gourmand, à la direction des affaires culturelles de la ville de Lyon.

Enfin, merci à ceux qui m’ont accompagnée durant ces quatre années de recherche, et qui ont pris du temps pour m’aider et lire, relire et mettre en forme ce travail : mon père, ma mère et ma sœur, Pauline Rivalan, Julia Moreira, Coline Polverel, Fanny Salane, Cécile Aupetit. Merci à Joël Girod et Fred Louisy d’avoir bien voulu répondre à mes questions parfois intempestives ;

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IV à Frédéric Souterelle, qui a sacrifié son été pour une ultime relecture, et à Vanessa Barbé, qui m’accompagnée jusqu’au bout de ce travail.

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(7)

VI

Sommaire

INTRODUCTION

PARTIE I. LES MUSÉES TERRITORIAUX,

EXPRESSION DE LA DÉCENTRALISATION CULTURELLE

Titre I. Les relations entre les collectivités territoriales et l’État en matière de musées

Chapitre I. Les collectivités territoriales, principaux acteurs du développement des musées de France

Chapitre II. L’État et les musées territoriaux

Titre II. Les musées territoriaux : illustration des politiques de développement des territoires

Chapitre I. Les musées territoriaux, vitrines des collectivités territoriales

Chapitre II. Les musées territoriaux dans le contexte de la réforme des institutions locales

PARTIE II. LES MUSÉES TERRITORIAUX, EXPRESSION DE LA

DIVERSITÉ DES MODES DE GESTION

DES SERVICES PUBLICS LOCAUX

Titre I. Modalités de gestion des musées territoriaux : défaillance des méthodes traditionnelles ?

Chapitre I. La régie directe : un mode de gestion simple, stable et pérenne Chapitre II. L’application de la régie directe aux musées territoriaux Titre II. Quelles perspectives au-delà de la régie directe ?

Chapitre I. Les solutions développées par l’État pour améliorer le fonctionnement de ses musées en régie directe

Chapitre II. L’évolution possible vers la constitution d’une structure ad hoc CONCLUSION

(8)

VII

Table des abréviations

AGCCPF AJDA ATR BMO BO BOCP BOI CIADT CNFPT DATAR DEPS DGCL DMF DRAC DSP EDCE ENA EPCI FCTVA INSEE J. JCP A JCP G JORF LOLF LGDJ OCDE OCIM OPC RDP Rec. RFDA RGPP RMN TVA UNESCO

Association générale des conservateurs des collections publiques de France

Actualité juridique du droit administratif

Administration territoriale de la République (loi relative à) Bulletin municipal officiel

Bulletin officiel

Bulletin officiel de la comptabilité publique Bulletin officiel des impôts

Comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire

Centre national de la fonction publique territoriale

Délégation à l'aménagement du territoire et à l'action régionale Département des études, de la prospective et des statistiques Direction générale des collectivités locales

Direction des musées de France

Direction régionale des affaires culturelles Délégation de service public

Études et documents du Conseil d'État École nationale d’administration

Établissement public de coopération intercommunale Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée

Institut national de la statistique et du développement économique

Jurisprudence

La semaine juridique administration et collectivités territoriales La semaine juridique édition générale

Journal officiel de la République française Loi organique relative aux lois de finances Librairie générale de droit et de jurisprudence

Organisation de coopération et de développement économiques Offices de coopération et d’informations muséales

Observatoire des politiques culturelles Revue du droit public

Recueil des décisions

Revue française de droit administratif Réforme générale des politiques publiques Réunion des musées nationaux

Taxe sur la valeur ajoutée

Organisation des Nations Unies pour l’Éducation, la Science et la Culture

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(10)

1 MUSÉE, s. m. (Gram.) : lieu de la ville d’Alexandrie en Égypte, où l’on entretenoit aux dépens du public, un certain nombre de gens de lettres distingués par leur mérite, comme l’on entretenoit à Athènes dans le Prytane les personnes qui avoient rendu des services importans à la république. Le nom des Muses, déesses et protectrices des beaux Arts, étoit incontestablement la source de celui du musée.

(…) Le mot de musée a reçu depuis un sens plus étendu, et on l’applique aujourd’hui à tout endroit où sont renfermées des choses qui ont un rapport immédiat aux arts et aux muses. Voyez Cabinet.

Diderot et d’Alembert, Encyclopédie

Introduction

1. « Est considéré comme musée (…), toute collection permanente composée de biens dont la conservation et la préservation revêtent un intérêt public et organisée en vue de la connaissance, de l’éducation et du plaisir du public ». Par ces dispositions, l’article 1er de la loi du 4 janvier 2002 relative aux musées de France1 consacre la vocation de service public de l’institution. De fait, ce caractère avait déjà été admis par la doctrine2.

La loi du 4 janvier 2002 pose un fondement législatif à ce principe, en consacrant officiellement l’entrée du musée dans la catégorie des services publics culturels (I). À ce titre il se présente comme un outil de l’intervention culturelle des collectivités territoriales (II).

1Article 1er de la loi 2002-5 du 4 janvier 2002 relative aux musées de France, JORF du 5 janvier 2002, p. 305, codifié à l’article L. 410-1 du code du patrimoine.

2

FATÔME Étienne, « Les musées et l’idée de service public », in BONNEFOUS Édouard, PEUCHOT Éric, 2

FATÔME Étienne, « Les musées et l’idée de service public », in BONNEFOUS Édouard, PEUCHOT Éric, RICHER Laurent (dir.), Droit au musée, droits des musées, Dalloz, 1994, pp.15-42.

(11)

2

I. Le musée et la notion de service public culturel

2. « Raison d’être de l’administration »3, le service public consiste en une activité « assurée ou assumée par une personne publique en vue d’un intérêt public »4. L’existence d’un service public suppose donc la satisfaction d’un critère organique (le rattachement à une personne publique, ce rattachement pouvant être direct ou indirect) et d’un critère fonctionnel, la satisfaction d’un intérêt général5. La notion de service public est donc subjective, car elle dépend de l’intention de l’autorité chargée de gérer le service. Dans ce sens, Gaston Jèze a pu affirmer que le service public découlait du pouvoir et du devoir des gouvernants « d’édicter des règles en vue de donner le plus complètement possible satisfaction aux besoins d’intérêt général ressentis à un moment donné, dans un pays donné »6.

Donc « affirmer le caractère de service public d’une activité, c’est d’abord adopter une position de principe : c’est reconnaître que cette activité présente un intérêt général, que la puissance publique ne peut s’en désintéresser, que cette qualification entraîne nécessairement une certaine dépendance à l’égard de la personne publique (…) »7. Ainsi l’existence du service public culturel émane-t-elle de la reconnaissance, par les personnes publiques, de la nécessité et de l’intérêt général de certaines activités à caractère culturel (A). Malgré la consécration tardive de sa vocation de service public, le musée illustre parfaitement cette théorie (B).

A. La notion de service public culturel

3. L’existence d’un service public culturel suppose de présenter une définition de la culture. Mais l’opération est délicate car « lorsqu’on parle des affaires culturelles, la coutume veut que l’on s’abstienne d’entrée de jeu de définir ce que l’on entend par culture »8.

On assiste en effet aujourd’hui, et depuis la seconde moitié du XXème siècle, à une surabondance de l’emploi de la notion de culture, à tel point qu’il n’y a pas d’unanimité sur ce

3 CHAPUS René, Droit administratif général, Tome 1, Montchrétien, 15ème éd., 2001, p. 573. 4

Ibidem, p. 579. 5 Ibidem, p. 582-591.

6 JÈZE Gaston, Les principes généraux du droit administratif, tome 1, 3ème éd., Marcel Giard/ LGDJ, 1926, p. 5. 7 PONTIER Jean-Marie, RICCI Jean-Claude, BOURDON Jacques, Droit de la culture, Dalloz, 1996, p. 61. 8

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3 qu’elle est, ni sur les limites du champ culturel9 (1). Inscrite cependant dans le Préambule de la Constitution de 1946, la culture, ou plus précisément la reconnaissance d’un droit à la culture, permet notamment la mise en œuvre d’activités culturelles, tardivement érigées en services publics par la jurisprudence (2).

1. Définition de la culture

4. De manière générale, la culture peut être appréhendée dans un sens large, voir extensif, ou dans un sens plus restreint.

5. Le sens large englobe la culture au sens anthropologique du terme. Il s’oppose à tout ce qui relève de la nature, et consiste en un dérivé direct de la « culture » au sens propre, à savoir la référence au travail de la terre. C’est cette conception large de la culture qu’a adopté l’UNESCO dans sa déclaration de Mexico sur les politiques culturelles10 : « Dans son sens le plus large, la culture peut aujourd’hui être considérée comme l’ensemble des traits distinctifs, spirituels et matériels, intellectuels et affectifs, qui caractérisent une société ou un groupe social. Elle englobe, outre les arts et les lettres, les modes de vie, les droits fondamentaux de l’être humain, les systèmes de valeurs, les traditions et les croyances. (…) la culture donne à l’homme la capacité de réflexion sur lui-même. C’est elle qui fait de nous des êtres spécifiquement humains, rationnels, critiques et éthiquement engagés. C’est par elle que nous discernons des valeurs et effectuons des choix. C’est par elle que l’homme s’exprime, prend conscience de lui-même, se reconnaît comme un projet inachevé, remet en question ses propres réalisations, recherche inlassablement de nouvelles significations et crée des œuvres qui le transcendent ».

Cette définition s’explique par la préoccupation essentielle de l’UNESCO, qui vise notamment « le rapprochement des peuples et (…) une meilleure compréhension des hommes », ainsi que la préservation de l’identité culturelle des peuples autochtones.

6. Prise dans une acceptation aussi large, la culture peut intégrer de nombreuses pratiques sociales, telles que le sport par exemple. Par conséquent, « il n’y a pas de raison péremptoire,

9 PONTIER Jean-Marie, RICCI Jean-Claude, BOURDON Jacques, Droit de la culture, précité, pp. 5-6.

10 Déclaration adoptée à l’issue de la conférence mondiale sur les politiques culturelles tenue à Mexico du 26 juillet au 6 août 1982.

(13)

4 dans cette perspective, de ne pas y faire entrer également des activités telles que le bricolage ou les pratiques culinaires, qui n’expriment pas seulement le besoin de se nourrir (…). L’inconvénient d’une telle approche est qu’à la limite tout est absorbé par le « culturel », tout peut être considéré, peu ou prou, comme culturel, et cet aspect totalisant fait perdre alors toute valeur opératoire à la notion de culture »11.

Dans son sens restreint, la culture se limiterait à la seule création artistique ou intellectuelle. Outre que cela impliquerait alors de poser une définition de l’art et de la création, il conviendrait d’opérer une distinction entre la culture « léguée », la culture « agie », et la culture « active » : la première vise la gestion des œuvres du patrimoine. La deuxième concerne l’éducation et la démocratisation culturelle, et la troisième, les pratiques amateurs, la créativité individuelle et la création artistique12. Cette distinction peut également se résumer à différencier les biens culturels et l’acte de se cultiver.

7. Ces deux définitions de la culture restent dépendantes l’une de l’autre : « Le problème est d’une part, que le champ culturel au sens normatif du terme ne fait l’objet d’aucun consensus entre ceux qui le définissent et est éminemment mouvant et complexe et, par ailleurs, qu’il n’y a pas de cloison étanche entre les deux sens du mot culture, mais interaction : la culture anthropologique modèle et imprègne la culture cultivée ou légitimée, comme disent les sociologues, la culture façonne la culture »13.

8. Ainsi, « la qualification de « culturelle » accolée par un texte à une intervention, une compétence, une attribution, une politique, ne correspond à rien de précis dans l’esprit de l’auteur du texte, elle implique ou sous-entend seulement une reconnaissance de légitimité de l’intervention des personnes publiques dans un domaine dont on sait qu’il existe, à défaut de

11

PONTIER Jean-Marie, RICCI Jean-Claude, BOURDON Jacques, Droit de la culture, précité, p. 6. Cependant, l’UNESCO a adopté, à l’issue de la Conférence générale de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture qui s’est tenue à Paris du 29 septembre au 17 octobre 2003, une Convention pour la

sauvegarde du patrimoine culturel immatériel. Elle définit le patrimoine immatériel comme « les pratiques, représentations, expressions, connaissances et savoir-faire - ainsi que les instruments, objets, artefacts et espaces culturels qui leur sont associés - que les communautés, les groupes et, le cas échéant, les individus reconnaissent comme faisant partie de leur patrimoine culturel. Ce patrimoine culturel immatériel, transmis de génération en génération, est recréé en permanence par les communautés et groupes en fonction de leur milieu, de leur interaction avec la nature et de leur histoire, et leur procure un sentiment d’identité et de continuité, contribuant ainsi à promouvoir le respect de la diversité culturelle et la créativité humaine » (article 2 de la convention). Dans

ce cadre, le repas gastronomique français et l’équitation de tradition française ont récemment fait l’objet d’une inscription sur la liste du patrimoine immatériel (inscription en 2010 et 2011 à l’occasion des 5ème et 6ème sessions du Comité intergouvernemental pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel réuni à Nairobi - Kenya- du 15 au 19 novembre 2010 et à Bali - Indonésie - du 22 au 29 novembre 2011).

12 MAYOL Pierre, « L’enjeu culturel », Inter-Régions, n° 54, septembre 1992, p. 21, cité par MOULINIER Pierre,

Politique culturelle et décentralisation, précité, p. 23.

13

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5 pouvoir le délimiter précisément, le domaine culturel »14. Cette légitimité d’intervention des personnes publiques dans le domaine culturel a été reconnue par le constituant de 1946 : l’alinéa 13 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 dispose en effet que « la Nation garantit l’égal accès de l’enfant et de l’adulte à l’instruction, à la formation professionnelle et à la culture (…) ».

La reconnaissance, en 1946, d’un droit à la culture est en fait moins symbolique et moins politique qu’elle ne paraît, dès lors que les travaux préparatoires démontrent une forte implication du constituant en faveur de l’éducation, dont la culture se présente comme le prolongement15. Mais ces motivations sont finalement sans grande importance au regard de la façon dont la formule constitutionnelle a pu être interprétée par la suite. Sur ce point, l’alinéa 13 du Préambule de la Constitution de 1946 se pose comme le fondement de l’intervention culturelle des personnes publiques et du développement des politiques culturelles ; l’objectif étant, avant tout, la démocratisation culturelle, c’est-à-dire l’accès à la culture au plus grand nombre. Cette ambition apparaît notamment dans la création, en 1959, d’un ministère dédié à la culture16. Le décret du 24 juillet 1959 définit les missions de ce ministère, chargé « de rendre accessible les œuvres capitales de l’humanité, et d’abord de la France, au plus grand nombre possible de français ; d’assurer la plus vaste audience à notre patrimoine culturel et de favoriser la création des œuvres d’art et de l’esprit qui l’enrichissent »17

.

Le décret du 10 mai 1982 relatif à l’organisation du ministère de la Culture est un peu plus complet et précise que « le ministère chargé de la culture a pour mission : de permettre à tous les français de cultiver leur capacité d’inventer et de créer, d’exprimer librement leurs talents et de recevoir la formation artistique de leur choix, de préserver le patrimoine culturel national, régional ou des divers groupes sociaux pour le profit commun de la collectivité toute entière ; de favoriser la création des œuvres de l’art français dans le libre dialogue des cultures du monde » 18. Par la suite, les décrets d’attributions des ministres de la Culture successifs, et jusqu’au décret du 24 mai 2012 relatif aux attributions du ministre de la Culture et de la Communication19, poursuivent les mêmes objectifs. Ceux-ci mettent en avant quatre grands

14PONTIER Jean-Marie, « Les interventions culturelles des collectivités territoriales », Encyclopédie des

collectivités locales, Dalloz, 2009, fasc. n° 4170, §1.

15 PONTIER Jean-Marie, « Entre le local, le national et le supranational : les droits culturels », AJDA 2000, p. 50 ; et PONTIER Jean-Marie, RICCI Jean-Claude, BOURDON Jacques, Droit de la culture, précité, pp. 41-42. 16 Décret 59-212 du 3 février 1959 relatif aux attributions d’un ministre d’État, JORF du 4 février 1956, p. 1556. 17 Article 1er du décret 59-889 du 24 juillet 1959 portant organisation du ministère charge des affaires culturelles,

JORF du 26 juillet 1959, p. 7413

18Article 1er du décret 82-394 du 10 mai 1982 relatif à l’organisation du ministère de la culture, JORF du 11 mai 1982, p. 1346.

19 Décret 2012-776 du 24 mai 2012 relatif aux attributions du ministre de la Culture et de la Communication,

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6 aspects de la politique culturelle menée par le ministère : le développement des pratiques culturelles des citoyens français, la conservation et la mise en valeur du patrimoine, l’aide à la création contemporaine et sa diffusion, et enfin l’action internationale de la France20. La mise en œuvre de ces missions nécessite en partie la constitution et la gestion de services publics culturels.

2. La reconnaissance de la notion de service public culturel

9. Consacrée par la décision du Tribunal des conflits du 9 février 1873, Blanco, à propos de l’exploitation d’une manufacture de tabac exploitée en régie par l’État21, la notion de service public a progressivement été étendue à d’autres types d’activités. Mais la culture n’a pas immédiatement été considérée comme tel : dans une décision du 7 avril 1916 relative à l’inexécution d’une promesse de concession d’un terrain situé sur les Champs-Élysées pour la construction d’un théâtre philarmonique, le Conseil d’État s’est déclaré incompétent au motif que le théâtre ne constituait pas une activité de service public : « Si, à raison de l’emplacement que devait occuper le Palais projeté, le conseil municipal a inséré dans sa délibération du 12 juillet 1906 certaines prescriptions relatives aux dimensions de cet immeuble et à ses aménagements et si cet immeuble devait en fin de concession, dans le cas où celle-ci serait réalisée, devenir la propriété de la ville de Paris, le Palais dont s’agit n’était pas destiné à assurer un service public ni à pourvoir à un objet d’utilité publique »22. Le Conseil de préfecture, statuant en premier ressort, avait pourtant avancé que l’édification du « Palais philarmonique » avait lieu dans un but d’intérêt général artistique23.

Maurice Hauriou, dans une note approbatrice devenue célèbre, avait jugé que les services publics devaient être des entreprises « complètement bonnes et utiles pour la vie sociale, à moins qu’elles ne soient tellement nécessaires que cette nécessité même fasse passer par-dessus leurs inconvénients ». Selon lui, le théâtre, qui présentait la particularité « d’exalter l’imagination, d’habituer les esprits à une vie factice et fictive, au détriment de la vie sérieuse, et d’exciter les passions de l’amour, lesquelles sont aussi dangereuses que celles du jeu et de l’intempérance » ne présentait pas « cette nécessité publique qui forcerait de passer par-dessus

20

MOULINIER Pierre, Politique culturelle et décentralisation, précité, p. 24. 21 Tribunal des conflits, 9 février 1873, Blanco, Rec., p. 61.

22 Conseil d’État, 7 avril 1916, Astruc et Société du théâtre des Champs-Élysées c/ Ville de Paris, Rec., p. 164. 23 CORNEILLE, Conclusions sur Conseil d'État 7 avril 1916, Astruc et Société du théâtre des Champs-Élysées c/

(16)

7 les inconvénients »24. Par conséquent, il ne paraissait pas pertinent, selon lui, de l’ériger en service public, ni même de le subventionner.

10. Mais sur ce point, la jurisprudence administrative a rapidement évolué. Sans utiliser

explicitement le terme de service public culturel, le Conseil d’État a considéré, dans une décision du 7 juillet 1923, Sieur Gheusi, que le contrat conclu entre l’État et les personnes dirigeantes de l’Opéra comique présentait « le caractère d’une concession de service public »25. Dans cet arrêt, le Conseil d’État a énuméré les dispositions du contrat qui l’ont conduit à conclure sur sa compétence (la concession gratuite des locaux appartenant à l’État et promesse d’une subvention annuelle ; les dispositions précises et détaillées relatives aux engagements, aux programmes des spectacles, au nombre des représentations ; la fixation d’un tarif maximum des places et l’existence d’attribution à l’administration des Beaux-Arts de droits spéciaux tant en ce qui touche le contrôle de la gestion par l’intermédiaire d’un commissaire du gouvernement qu’en ce qui concerne, le retrait de l’« autorisation »). Il a déduit de l’ensemble de ces dispositions et stipulations qu’elles étaient destinées « à assurer dans un intérêt général, la qualité artistique et la continuité de l’exploitation ».

Le juge administratif est resté prudent sur la définition du service public, et n’a pas employé directement la notion de service public culturel. Pour autant, cette décision s’est posée comme un véritable revirement de la jurisprudence Astruc, prise seulement sept ans plus tôt. Plusieurs arguments peuvent être avancés pour expliquer cette évolution26. D’une part, les circonstances de guerre de l’époque peuvent expliquer la vocation « moralisatrice » de la décision de 1916. Par ailleurs, la décision de 1923 est représentative de la subjectivité de la notion de service public, qui évolue en même temps que les pratiques sociales et l’idéologie des gouvernants : « Ce ne sont pas, culturellement si l’on peut dire, sept années qui séparent Astruc de Gheusi, mais un siècle, parce que le vingtième siècle ne commence pas au 1er janvier 1901, comme la chronologie l’indique, mais quelque part dans cette guerre dans laquelle l’Europe s’abîma. En 1923, le monde n’était plus ce qu’il avait été en 1916, ce qui paraissait choquant alors devenait acceptable après la guerre, les conceptions avaient changé »27. De même, la décision de 1923 concernait un service public national et non pas local comme en 1916 : la reconnaissance d’un service public culturel de l’État pouvait apparaître plus légitime que la reconnaissance d’un

24

HAURIOU Maurice, note sous Conseil d'État, 7 avril 1916, Astruc et Société du théâtre des Champs-Élysées c/

Ville de Paris, Sirey 1916, III, p. 50.

25 Conseil d'État, 27 juillet 1923, Sieur Gheusi., Rec., p. 138.

26 PONTIER Jean-Marie, « Les interventions culturelles des collectivités territoriales », précité, §20. 27

(17)

8 service public culturel local. Enfin, si les nombreux indices de droit public relevés par le Conseil d’État pouvaient difficilement conduire à une autre solution, la vocation de service public de l’activité en cause peut être interprétée de manière restrictive, car l’Opéra comique reste une institution unique en son genre : « Il ne faut pas oublier que, de la part du juge, reconnaître qu’une activité est, dans des conditions données, à un moment donné, un service public, n’implique pas de reconnaître toute activité de même nature comme service public »28.

11. Aussi l’assimilation de certaines activités culturelles à la notion de service public

s’est-elle faite au cas par cas, le juge administratif ayant eu plus de facilité à l’adopter dans le cadre d’activités « classiques ». Néanmoins, il est longtemps resté réticent à employer directement et littéralement le terme même de « service public culturel », et a plutôt choisi d’explorer d’autres voies.

Il a ainsi pu faire une application rigoureuse de sa jurisprudence du 30 mai 1930, Chambre syndicale du commerce en détail de Nevers, pour admettre la gestion de certaines activités à vocation éducative (ou culturelle) par des personnes publiques : dans une décision du 16 février 1940 relative à la mise à disposition gratuite d’une salle de cinéma par une commune à une association en vue de la projection de films, le Conseil d’État a considéré que le conseil municipal avait entendu « affecter la salle (…) à des représentations de caractère éducatif, que cet objet correspond à un intérêt public local auquel il n’était pas satisfait par l’initiative privée »29. Cependant, un tel rapprochement avec le droit de concurrence ne semblait pas pertinent, car relier la culture et l’éducation à une activité économique peut paraître réducteur. Dans une décision de 1947, le Conseil d’État a estimé que l’Institut des Hautes Etudes Cinématographiques, pour lequel un immeuble avait été réquisitionné, devait être regardé, « en raison tant de l’objet de son activité que des règles de son organisation et de son fonctionnement, et notamment de l’étendue de la participation des agents de l’État à son administration et au contrôle de ses opérations, comme un établissement chargé de la gestion d’un service assimilable à un service public »30.

Dans deux décisions de 1944 et de 1948, il s’est référé au caractère artistique des activités théâtrales en cause. Ainsi, en 1948, à propos de la convention entre la société exploitante du théâtre de la Gaîté Lyrique et de la ville de Paris, le juge a déclaré que « eu égard aux clauses qu’elle contient, et qui sont notamment destinées à assurer, dans l’intérêt général, la qualité

28 PONTIER Jean-Marie, « Le service public existe-t-il ? » AJDA 2000, p. 18.

29 Conseil d’État, 16 février 1940, Sieur Capelle et Union syndicale des directeurs de spectacles de Lyon et de la

région du sud-est, Rec., p. 61.

30

(18)

9 artistique de l’exploitation, [cette convention] doit être regardée comme un contrat de concession de service public municipal »31. Mais « cette voie – justifier le service public culturel local par la qualité artistique de l’exploitation – ne pouvait être qu’une impasse parce que cette notion ne peut permettre, aujourd’hui, de définir le théâtre et, plus généralement, ce qui est artistique ou/et culturel »32 .

12. C’est finalement avec l’arrêt Dauphin du 11 mai 1959 que le Conseil d’État emploie pour

la première fois la notion de service public culturel. Cette décision visait l’aménagement en promenade touristique de l’Allée des Alycamps, située dans la ville d’Arles. L’entrée de cette allée avait été fermée par une chaîne pour assurer sa protection en tant que site classé : implantée sur une ancienne nécropole, l’allée des Alycamps a servi de modèles aux peintres du XIXème siècle, et notamment à Van Gogh, Gauguin et aux peintres nabis. Cette installation portait préjudice au Sieur Dauphin, qui a demandé réparation devant le conseil interdépartemental de préfecture. Celui-ci s’est estimé incompétent et le Sieur Dauphin a porté sa demande d’indemnisation devant le juge administratif.

Après avoir admis l’existence d’une servitude de passage au profit du requérant, le Conseil d’État s’est également estimé incompétent pour statuer sur cette demande de réparation, et il a renvoyé l’affaire devant le juge judiciaire. Toutefois, il a considéré, en suivant les conclusions de son commissaire de Gouvernement33, que l’allée des Alycamps avait été incorporée au domaine public communal en raison de son affectation « à un service public de caractère culturel et touristique » et des aménagements spéciaux dont elle a fait l’objet en vue de cet usage. Si cette décision est importante du point de vue de la détermination du domaine public, elle est également considérée comme « consacrant de façon explicite et définitive la notion de service public culturel »34, et ouvre le champ culturel à de nombreuses activités publiques.

13. Par la suite, le juge administratif a admis régulièrement l’existence de service public à

caractère culturel35, parfois même sans véritable justification : en 1988 par exemple, à propos

31 Conseil d’État, 19 mars 1948, Société « Les amis de l’opérette », Rec., p. 142. Voir également Conseil d’État, 21 janvier 1944, Léoni, Rec., p. 26.

32 PONTIER Jean-Marie, « Les interventions culturelles des collectivités territoriales », précité, §25.

33 MAYRAS, conclusions sur Conseil d’État, 11 mai 1959, Dauphin, Dalloz 1959, J., pp. 315-317 : « Les

Alycamps sont affectés, en effet, à un service public : celui de l’Éducation nationale au sens le plus large et peut-être aussi le plus complet de cette expression. Si vous déniez le caractère de service public à l’organisation des loisirs, au simple divertissement public, vous l’admettez lorsqu’en y pourvoyant une collectivité publique poursuit un but culturel et touristique » (p. 317).

34PONTIER Jean-Marie, RICCI Jean-Claude, BOURDON Jacques, Droit de la culture, précité, p. 63.

35 Conseil d’État, 18 mai 1979, Association Urbanisme judaïque Saint-Seurin, Rec. p. 218, à propos du fonctionnement d’un théâtre à Bordeaux ; Conseil d’État, 25 mars 1988, Commune d’Hyères, Rec., p. 668, à

(19)

10 de la qualification de l’exploitation du Palais des festivals de la ville de Cannes, le Tribunal des conflits a avancé que, en assurant la gestion de cet établissement, « la ville de Cannes [assurait] une mission de service public »36. On notera toutefois que les décisions mentionnant expressément et exclusivement le terme de service public culturel sont rares37, le juge préférant associer le service public culturel à d’autres services publics, tels que l’éducation ou le tourisme38. L’existence d’un service public culturel, qui participe à la mise en œuvre du droit à la culture, n’est cependant plus contestable aujourd’hui.

14. « Expression de la légitimité de l’intervention des pouvoirs publics dans le domaine

culturel »39, le service public culturel n’est pas exclusif de toute autre intervention publique en matière culturelle : il en est ainsi, par exemple, du classement des immeubles sur la liste des monuments historiques. Le classement ne constitue pas lui-même un service public culturel, mais celui-ci pourra naître, éventuellement de l’exploitation du monument historique40.

Il ne présente pas non plus de spécificité ou d’originalité par rapport aux autres catégories de services publics41. De ce fait, il est régi par les principes fondamentaux du droit administratif et de la comptabilité publique, et est soumis aux lois du service public. Il doit en effet respecter les principes d’égalité, de mutabilité et de continuité du service public. Par ailleurs, le service public culturel peut être géré par une personne publique ou par une personne privée. De plus, si de nombreux arguments peuvent plaider en faveur d’un service public culturel exclusivement administratif (la noblesse de l’activité concernée ou le principe de démocratisation culturelle notamment), le service public culturel n’est pas soustrait aux obligations de bonne gestion qui régissent l’action publique : « Dans le domaine des services publics culturels comme pour les autres services publics, ne pas chercher systématiquement des bénéfices n’équivaut pas à faire systématiquement des pertes et, plus encore, à ne pas se préoccuper d’une bonne gestion. Un service public culturel peut chercher à « rentabiliser », ou tout au moins à équilibrer ses propos d’un festival de bande dessinée ; Conseil d’État, 2 juin 1995, Ville de Nice, Rec., Tables, p. 1050, à propos de l’organisation d’un festival de jazz.

36

Tribunal des conflits, 19 décembre 1988, Ville de Cannes c/ Ponce, Rec., p. 497, à propos de l’organisation d’un festival d’art lyrique.

37 Association Maison des jeunes et de la culture de Saint-Maur Conseil d’État, 21 janvier 1983, Rec., p. 14. Voir également Conseil d’État, 6 avril 2007, Commune d’Aix-en-Provence, Rec., p. 155 ; et Conseil d’État, 26 mars 2012, Centre culturel Georges Sadoul, req. n° 353681, inédit au Recueil Lebon.

38 En 1990, dans une décision relative à une association chargée de la gestion de centres de loisirs, de garderies et d’ateliers municipaux, le juge fait référence à des activités culturelles et socio-éducatives (Conseil d’État, 20 juillet 1990, Ville de Melun et Association Melun-Culture-Loisirs c/ Vivien et autres Rec., p. 220 ). À propos d’un festival de jazz organisé par la ville de Nice, il est question d’une activité d’intérêt général d’ordre culturel et touristique (Conseil d’État, 2 juin 1995, Ville de Nice, précité).

39 PONTIER Jean-Marie, « Le service public culturel existe-t-il ? », précité, p.16. 40 Ibidem, p. 12.

41

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11 comptes par un certain nombre d’activités commerciales »42. Par conséquent, la recherche de « rentabilité » peut conduire à la constitution d’activités culturelles en service public industriel et commercial. Ainsi il n’y a pas de spécificité quant à la gestion des services publics culturels, et rien ne permet de distinguer le fonctionnement d’un tel service de celui d’un autre service public. Toutefois, « c’est plutôt entre les différents services publics culturels qu’il conviendrait d’instituer des distinctions : on ne gère pas un théâtre comme on gère un centre culturel »43 ou un musée.

B. Le musée et l’idée de service public

44

15. Si le caractère de service public du musée ne fait plus de doute depuis l’édiction de la loi

du 4 janvier 2002 relative aux musées de France, il avait déjà été mis en avant par le juge judiciaire, dans une décision du 2 avril 1963, Sieur Montagne c/ Réunion des Musées de France et autres45.

La loi du 4 janvier 2002 consacre cependant les grands principes qui fondent l’existence même du musée : la conservation des collections et leur présentation au public. Ces critères essentiels de la qualification du musée sont issus d’une tradition historique qui traduit le fait que dès son origine, le musée français s’est construit autour de la notion de service public, ou du service au public46 (1), principe que la loi du 4 janvier 2002 ne fait donc que confirmer (2).

42

PONTIER Jean-Marie, « Le service public culturel existe-t-il ? », précité, p. 13. 43 Ibidem, p. 14.

44 Titre d’un article du Professeur Étienne Fatôme : FATÔME Étienne, « Les musées et l’idée de service public »,

in BONNEFOUS Édouard, PEUCHOT Éric, RICHER Laurent (dir.), Droit au musée, droit des musées, Dalloz,

1994, pp. 15-40. 45

Cour de cassation, Ch. Civ. 1ère, 2 avril 1963, Sieur Montagne c/ Réunion des Musées de France et autres, Bull. civ., p. 173, AJDA 1963, pp. 486-487, note J. DUFAU. Voir également Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, 18 juin 2002, M. Lapie c/ Ville de Reims, req. n° 99-1780.

46 FUMAROLI Marc, « Les musées au service du public, les origines », in BONNEFOUS Édouard, PEUCHOT Éric, RICHER Laurent (dir.), Droit au musée, droit des musées, précité, pp. 5-12.

(21)

12

1. Les origines des musées en France : la consécration progressive d’un

service au public

16. Étymologiquement, le « musée » fait référence au temple des Muses, déesses des arts

dans la mythologie grecque et romaine, filles de la Mémoire. Le « mousaion » d’Alexandrie était ainsi constitué d’une communauté de savants pensionnés par le mécénat, et qui pouvaient ainsi se consacrer entièrement à l’étude47. Fortement lié au savoir, le musée est également indissociable de la notion de trésors et de collections, et son histoire est liée au développement du collectionnisme, qui prend son essor à la Renaissance.

17. Sans dresser ici de l’histoire et du développement des musées, il convient de voir sur quoi

repose, en France, la conception moderne du musée comme lieu de conservation et d’étude des collections. Celle-ci s’est développée à partir de la seconde moitié du XVIIIème siècle, au moment de l’avènement du néoclassicisme et de la volonté de renouer avec la pureté de l’art antique. L’art était alors remis en cause, de même que la participation de l’État dans la formation des artistes.

En 1747, dans un pamphlet publié en Hollande et intitulé Réflexions sur quelques causes de l’état présent de la peinture en France, le critique d’art La Font de Saint-Yenne (1688-1771) propose de « choisir dans le palais du Louvre un lieu propre pour y placer à demeure les chefs-d’œuvre des plus grands maîtres de l’Europe, (…) qui compose le cabinet de sa Majesté, entassés aujourd’hui et ensevelis dans de petites pièces mal éclairées (…), inconnus ou indifférents à la curiosité des étrangers qui sont dans l’impossibilité de les voir »48. Cette proposition va de pair avec, notamment, l’existence depuis 1683 du Ashmol Muséum à Oxford et les projets d’ouverture des collections royales au public dans toute l’Europe49. Aussi en

47 SCHAER Roland, L’invention des musées, Gallimard/ Réunion des musées nationaux, 2ème éd., 2007, pp. 15.

48

Étienne Laffont De Saint-Yenne (1688-1777) est un critique d’art français. Contemporain du philosophe Denis Diderot (1713-1784), de l’archéologue et historien Johann Joachim Winckelmann, (1717- 1768), du peintre Raphaël Mengs (1728-1779) ou du comte de Caylus (1692-1765), il a activement participé au débat relatif au renouvèlement de l’art contemporain en France dans un style plus pur et inspiré de l’art antique. Il est à l’origine d’ouvrages et de pamphlets relatifs à l’état de l’art en France, et préconisant l’ouverture au public des collections royales, principalement pour contribuer à l’éducation des artistes (voir notamment les Réflexions sur quelques

causes de l’état présent de la peinture en France, publié à La Haye en 1747, et réédité en 1752 sous le titre L’ombre du grand Colbert, dialogue entre le Louvre et la Ville de Paris).

49

En 1719, Pierre Legrand inaugure à Saint-Pétersbourg un cabinet public, constitué d’une collection de sciences naturelle. En 1737, la dernière héritière des Médicis, la princesse Anna Maria Ludovica, transfère l’ensemble des collections familiales à l’État de Toscane, qui ouvre au public la Galerie des Offices de Florence en 1780. Enfin, entre 1779 et 1780, les collections du grand électeur de Munich sont ouvertes au public (voir SCHAER Roland,

(22)

13 1750, Louis XV permet-il l’ouverture d’un musée dans les salles du Palais du Luxembourg. Outre la galerie Médicis, celui-ci présente un ensemble de 122 toiles des écoles diverses des XVIème, XVIIème et XVIIIème siècles, qui ont vocation à servir de manifestes et à contribuer à la formation des artistes. Le musée du Luxembourg, « premier » musée français, ferme en 1779, au moment de l’installation du comte de Provence, frère de Louis XVI, dans le palais du Luxembourg. Cependant, dès 1763, il est question de transférer les œuvres au Louvre, et la nomination en 1774 du marquis d’Angiviller à la direction des Bâtiments contribue au développement de ce projet. Le marquis souhaite en effet réformer les arts et ériger, dans les locaux du Louvre, un temple aux grands hommes de la Nation et à la monarchie française. Dans ce cadre, il enrichit les collections royales et passe de nombreuses commandes aux artistes. Ainsi, « à la veille de la Révolution, le musée public est devenu une institution nécessaire dont l’avènement semble, un peu partout, à peu près inéluctable »50. Surtout, l’expérience du Luxembourg consacre la première mission du musée : l’éducation et la formation. L’autre mission essentielle du musée - la protection et la conservation des collections - naît des ravages de la Révolution.

18. Dans la nuit du 4 août 1789, l’Assemblée constituante met fin au système féodal et abolit

les privilèges. Par la suite, sont décidées la nationalisation des biens du Clergé, de la Couronne, et des émigrés. Ces nationalisations entraînent de multiples confiscations, entreposées dans des bâtiments réquisitionnés pour l’occasion. Elles marquent le début d’une période confuse, à l’origine des concepts de conservation et de protection du patrimoine.

Les premières confiscations sont destinées à être vendues afin de combler le déficit public. Cependant, après la journée du 10 août 1792 et la prise des Tuileries, l’Assemblée législative prend un décret qui proclame que « les principes sacrés de la liberté et de l’égalité ne permettent point de laisser plus longtemps sous les yeux du peuple français les monuments élevés à l’orgueil, au préjugés et à la tyrannie »51. S’ensuivent alors de multiples destructions massives, et diverses crises iconoclastes qui se poursuivent jusqu’en 1793. En parallèle, se développe l’idée selon laquelle l’État doit se faire conservateur, afin de protéger ce qui risque d’être ainsi détruit. Cette protection intervient d’abord au nom de l’instruction publique, puis progressivement au nom d’une nouvelle idéologie selon laquelle la République doit conserver des traces de son passé, car ce serait revenir à la barbarie que de l’effacer. C’est à cette époque qu’apparaît la notion de « vandalisme », couramment attribuée à l’Abbé Grégoire (« j’ai créé le

50 SCHAER Roland, L’invention des musées, précité, p. 48. 51

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14 mot pour tuer la chose » 52), qui présente à la Convention le 31 août 1794 son Rapport sur le vandalisme et sur les moyens de le réprimer. Diverses mesures avaient déjà été prises depuis 1789 : le 20 mars 1791, l’Assemblée constituante avait ordonné que tous les monuments antérieurs à 1300 soient conservés et le 18 septembre 1793, la Convention avait décidé que tous les objets pouvant servir aux arts, à la science et à l’enseignement soient conservés. Ceux-ci étaient entreposés dans les différents dépôts révolutionnaires qui, logiquement, ont permis de concrétiser le musée : « À contre-courant des destructions et dilapidations, cet édifice institutionnel fit prévaloir l’intérêt général et à long terme sur les passions partisanes du moment, et il mit à l’abri, au service des sciences, des arts et de l’enseignement, les monuments légués par l’ancien régime »53. Ainsi la Convention crée le 27 septembre 1792 le Muséum central des arts, futur musée du Louvre, qui ouvre ses portes le 10 août 1793. Le même jour est inauguré le musée des Monuments français, à Paris, dans les locaux du couvent des Petits-Augustins. Ancien dépôt révolutionnaire, il était administré par l’artiste Alexandre Lenoir qui souhaitait en faire « un asile pour les monuments de notre histoire »54. Le Muséum national d’histoire naturelle est créé la même année, puis, plus tard, le Conservatoire des arts et métiers55. Aussi, le décret du 24 octobre 1793 pose le principe du transfert « au musée le plus voisin » « des monuments publics transportables, intéressant les arts ou l’histoire, qui portent quelques-uns des signes proscrits, qu’on ne pourrait faire disparaître sans leur causer un dommage réel (…) pour l’instruction nationale ».

Enfin, l’instruction de l’an II sur la manière d’inventorier et de conserver, adressée aux administrateurs de la République, marque la fin des vagues de destruction et développe l’idée d’une appropriation collective. Celle-ci confirme le caractère unitaire du corps politique, symbolise le pacte social qui a été prononcé au sein de la Nation et donne le gage de la transformation sociale et politique56 : « Vous n’êtes que les dépositaires d’un bien dont la grande famille a le droit de vous demander des comptes »57.

52 Cité par LENIAUD Jean-Michel, Les archipels du passé, le patrimoine et son histoire, Fayard, 2002, p. 95. 53

FUMAROLI Marc, « Les musées au service des publics : les origines », précité, p.6. 54 Cité par SCHAER Roland, L’invention des musées, précité, p. 63.

55 Le Muséum d’histoire naturelle est créé par le décret du 10 juin 1793 au lieu et place du Jardin des Plantes, et le Conservatoire des arts et métiers est institué par le décret du 10 octobre 1794.

56 LENIAUD Jean-Michel, Les archipels du passé, le patrimoine et son histoire, précité, p. 86. 57

Instruction sur la manière d’inventorier et de conserver, dans toute l’étendue de la République, tous les objets

qui peuvent servir aux arts, aux sciences et à l’enseignement, proposée par la commission temporaire des arts et adoptée par le Comité d’instruction publique de la Convention nationale du 25 ventôse an II (15 mars 1794). Elle

fait suite à quatre instructions publiées par la commission des monuments, instituée par l’Assemblée nationale constituante, entre 1790 et 1791, et relatives à la manière d’inventorier les objets et monuments nationalisés.

(24)

15

19. Les origines des musées français démontrent à quel point ceux-ci se sont construits autour

de l’intérêt public fondé sur la conservation et l’éducation. Le musée constitue également un symbole fort, un moyen d’asseoir politiquement et durablement les principes de la Révolution. Sur ce dernier point, l’expérience du musée du Louvre, dont les collections se sont considérablement accrues pendant la période napoléonienne constitue un exemple important. Dès 1794 la Révolution se lance dans le rapatriement des œuvres saisies dans les territoires nouvellement conquis. Des œuvres sont rapatriées de Bruxelles au mois de juillet 1794, mais ce sont surtout les campagnes d’Italie qui illustrent la volonté des révolutionnaires de constituer un musée universel. En mai 1796, le Directoire nomme une commission chargée de « faire passer en France tous les monuments des sciences et des arts qu’ils croiront dignes d’entrée dans nos musées et nos bibliothèques »58 ; et « lorsque arrivèrent à Paris les chariots transportant le butin de l’armée d’Italie en 1796, statues antiques, monnaies et médailles, livres rares, archives, l’interprétation officielle voulut qu’il s’agit du contraire du vandalisme : la capitale de la liberté devait devenir la capitale des arts et des sciences, et rassembler, pour le bénéfice de toute l’Europe, les sources du savoir et les modèles du goût jusque-là épars et stérilisés par la tyrannie »59.

Le musée du Louvre répondait ainsi à un vœu « aussi ancien que l’humaniste de la Renaissance : réunir les fragments épars, reconstituer l’unité encyclopédique du savoir enfouie jusque dans le passé, offrir à la connaissance et au goût moderne les ressources de leur croissance. La Grande Nation s’est donc pourvue d’une mémoire européenne pour faire franchir au savoir et au « génie » européen un nouveau seuil ». Dans cette optique, la Révolution est à l’origine de l’élaboration de grands principes muséologiques qui ont conduit au développement important des musées sur tout le territoire français : encyclopédisme des collections, liberté d’accès et équité géographique dans la distribution de l’héritage patrimonial. Il en ressort une volonté de répartition équitable des produits des confiscations sur tout le territoire de la République. Cette ambition, concrétisée par Napoléon et son ministre Chaptal, est considérée comme l’impulsion fondatrice des musées de province60.

58 SCHAER Roland, L’invention des musées, précité, p. 69.

59 FUMAROLI Marc, « Les musées au service des publics : les origines », précité, pp.10-11. 60

(25)

16

2. Définition et nature juridique du musée en France

20. En légitimant l’existence d’un intérêt général lié à la conservation des collections et à leur

présentation au public, la loi du 4 janvier 2002 relative aux musées de France pose une définition juridique du musée (a) et confirme le « caractère génétique du musée »61, ainsi que sa vocation de service public, celui-ci étant en principe de nature administrative (b).

a. Définition du musée en France

21. L’ordonnance du 13 juillet 1945 portant organisation provisoire des musées de

beaux-arts avait posé une définition juridique du musée. Ainsi, était « considéré comme musée, (…), toute collection permanente et ouverte au public d’œuvres présentant un intérêt artistique, historique ou archéologique »62.

Outre le fait que le législateur de 2002 ajoute l’aspect didactique et éducatif du musée, il remplace l’intérêt artistique, historique ou archéologique par l’intérêt public. Il permet ainsi au musée de conquérir de nouveaux territoires et d’aborder des thématiques nouvelles, différentes des matières « classiques ». D’un point de vue juridique, le musée n’est plus une institution centrée sur les beaux-arts. Entrent ainsi, par exemple, dans la catégorie des musées, les collections de sciences ou d’histoires naturelles, les arts appliqués ou encore les institutions liées à la conservation et à la préservation d’un patrimoine local telles que les écomusées ou les musées de société.

22. Fondée sur la notion de collection, la définition française du musée se distingue de celle,

plus large, posée par le Conseil international des musées63. Au titre de celle-ci, « un musée est

61

FUMAROLI Marc, « Les musées au service des publics : les origines », précité, p. 11.

62 Article 2 de l’ordonnance 45-1546 du 13 juillet 1945 portant organisation provisoire des musées des

beaux-arts, JORF du 14 juillet 1945, p. 4342.

63

Créée en 1946 par les professionnels des musées, le Conseil international des musées est une organisation non gouvernementale et internationale vouée « la conservation, à la pérennité et à la transmission à la société, du

patrimoine naturel et culturel mondial, présent et futur, matériel et immatériel ». Elle « établit des normes professionnelles et déontologiques applicables aux activités des musées, promeut la formation, fait progresser les connaissances, émet des recommandations sur ces sujets et sensibilise le public à la conservation du patrimoine, via des réseaux mondiaux et des programmes de coopération », et « entretient des relations formelles avec l’Organisation des Nations Unies pour la Science, l’Éducation et la Culture (UNESCO). Elle jouit d’un statut consultatif auprès du Conseil économique et social des Nations Unies » (articles 1 et 2 des statuts du Conseil

international des musées, adoptés en janvier 2007 lors de l’Assemblée générale tenue à Vienne, accessibles sur

(26)

17 une institution permanente sans but lucratif au service de la société et de son développement ouverte au public, qui acquiert, conserve, étudie, expose et transmet le patrimoine matériel et immatériel de l’humanité et de son environnement à des fins d’études, d’éducation et de délectation »64. On y retrouve toutefois le caractère permanent et durable de l’institution, ainsi que la vocation éducative du musée. Le musée a également une vocation à satisfaire le goût des visiteurs, et le Conseil international des musées recourt au terme de délectation, « plaisir [sensible ou intellectuel] que l’on savoure », lorsque la loi du 4 janvier 2002 utilise le terme plus courant de « plaisir », sans doute pour confirmer le rôle du musée au service du public.

23. Conservatoire d’œuvres, le musée français doit se distinguer alors d’autres institutions

qui, dans le langage courant, pourraient être également qualifiées de « muséales » : il en est ainsi, par exemple, des fonds régionaux d’art contemporain et des centres d’interprétation.

24. Créés en 198265, les fonds régionaux d’art contemporain avaient initialement pour objectif de diversifier le soutien public à la création artistique contemporaine. Il s’agit d’institutions facultatives dotées d’une structure juridique propre (le plus souvent constituées sous forme d’associations) mises en place dans le cadre d’un partenariat entre l’État et la région concernée. La circulaire du 23 juin 1982 relative à la création des fonds régionaux d’acquisition d’oeuvres d’art contemporain précise leurs missions : ceux-ci doivent, d’une part, assurer le développement et la diffusion de toutes les formes de la création contemporaine dans le cadre d’une politique d’acquisition originale, et d’autre part, sensibiliser les publics des régions à l’art contemporain dans le cadre de la diffusion de leurs collections (sous la forme d’expositions itinérantes, de prêts aux collectivités territoriales, ou d’animations)66. Plus de vingt ans après leur création, les fonds régionaux d’acquisition d’art contemporain « ont su constituer un patrimoine contemporain de haut niveau, représentatif de la création dans toute sa richesse, tout en favorisant l’émergence d’une jeune génération d’artistes »67.

Les fonds régionaux d’acquisition d’art contemporain doivent en principe être distingués des musées : ils « n’ont pas et n’ont guère de chance d’avoir à l’avenir les moyens d’un musée, non seulement pour des acquisitions, mais aussi en termes d’espaces d’exposition et pour la gestion même de leurs collections, surtout quand on pense à la fragilité physique, à l’extrême diversité

64 Définition adoptée lors de la 21ème conférence générale à Vienne (Autriche), en 2007. 65

Circulaire du ministre de la Culture et de la Communication du 23 juin 1982 relative à la création des fonds

régionaux d’acquisition d’oeuvres d’art contemporain, non publiée.

66 Ibidem.

67 Circulaire du ministre de la Culture et de la Communication 2002/006 du 28 février 2002 relative aux fonds

(27)

18

des formes et des modes d’expression artistiques de notre temps, et aux conséquences qui s’ensuivent, par exemple en termes de conservation préventive et d’assurances, sans parler de la complexité des formes et même des « scénarios » d’exposition des produits de la création contemporaine, bien différentes de celles qui consiste à planter un clou pour suspendre un tableau sur un mur. Devenues souvent « immatérielles », ces œuvres imposent, pour prendre tout leur sens et être comprises, des modes de présentation très sophistiqués et de ce fait souvent coûteux »68. Cependant, en tant qu’« OVNI juridiques »69, les fonds régionaux d’acquisition d’art contemporain ont tendance à se rapprocher des musées, et cela pour au moins deux raison.

La première est que tout fonds régional d’art contemporain doit organiser ses projets d’acquisitions dans le cadre d’un projet artistique et culturel, ceux-ci faisant d’ailleurs l’objet de l’approbation d’un comité technique composé de personnalités qualifiées. Les acquisitions doivent être conservées et inventoriées « selon les normes en vigueur applicables aux collections muséographiques »70. Sur ce point, dans ses Réflexions sur les possibilités pour les opérateurs publics d’aliéner des œuvres de leurs collections, Monsieur Jacques Rigaud souligne l’existence de fonds régionaux d’acquisition d’art contemporain de « deuxième génération » qui se sont constitués des locaux de mieux en mieux adaptés, « avec des espaces de réserves et d’exposition qui les font ressembler de plus en plus à des musées ou à des centres d’art contemporain, ouverts au public et sièges d’événements artistiques »71. Il se pose la question de savoir s’il ne faudrait pas alors prévoir un reversement des collections de certains fonds régionaux d’acquisition d’art contemporain à des musées d’art contemporain, pour éviter de voir se constituer des « musées de seconde zone ».

La seconde raison d’un rapprochement possible entre les fonds régionaux d’acquisition d’art contemporain et les musées tient au statut des collections. En principe, contrairement aux musées, les fonds régionaux d’acquisition d’art contemporain ne sont pas soumis aux principes d’inaliénabilité et d’imprescriptibilité des collections. Dans son rapport, Monsieur Jacques Rigaud souligne que la cession des collections des fonds régionaux d’acquisition d’art contemporain, si elle était rendue possible, devrait se faire avec l’approbation des artistes concernés, ceux-ci pouvant en effet être intéressés par la cotation de leurs œuvres. Sans adopter

68 RIGAUD Jacques, Réflexions sur les possibilités pour les opérateurs publics d’aliéner des œuvres de leurs

collections, Rapport au ministre de la Culture et de la Communication, 2008, p. 44.

69

Ibidem p. 42.

70 Circulaire du ministre de la Culture et de la Communication 2002/006 du 28 février 2002 relative aux Fonds

régionaux d’art contemporain, précitée, p. 59.

71 RIGAUD Jacques, Réflexions sur les possibilités pour les opérateurs publics d’aliéner des œuvres de leurs

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