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Le rapport des élèves au théâtre : un lieu d'ambivalences

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Academic year: 2021

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HAL Id: dumas-02080142

https://dumas.ccsd.cnrs.fr/dumas-02080142

Submitted on 21 Sep 2020

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Le rapport des élèves au théâtre : un lieu d’ambivalences

Claire Flauss

To cite this version:

Claire Flauss. Le rapport des élèves au théâtre : un lieu d’ambivalences. Education. 2018. �dumas-02080142�

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Année universitaire 2017-2018

Master Métiers de l’enseignement, de l’éducation et de la formation

Mention Second degré

Le rapport des élèves au théâtre :

un lieu d'ambivalences

Présenté par Claire Flauss

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SOMMAIRE

PRÉAMBULE ... 1

ÉTAT DE L'ART ... 2

Qu'appelle-t-on les inégalités scolaires ? ... 2

Des rapports à l'école déterminés et déterminants ... 4

Les malentendus sociocognitifs au cœur des inégalités ... 5

Une politique de remédiation culturelle paradoxale ... 9

Des objectifs qui contournent le cadre scolaire ... 12

Le théâtre : une solution miracle ? ... 14

PROTOCOLE ... 16

Les élèves participants ... 16

Dispositif et procédure ... 18

PRÉSENTATION DES RÉSULTATS ... 21

Généralités ... 21 Voir du théâtre ... 24 Lire du théâtre ... 26 Faire du théâtre ... 28 DISCUSSION ... 30 Recontextualisation ... 30

Analyse des données ... 30

Limites et perspectives ... 35

PISTES DIDACTIQUES ... 38

BIBLIOGRAPHIE ... 41

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PRÉAMBULE

Population vieillissante et aisée, « lettrée » ou « bourgeoise », le théâtre souffre encore assez de son image élitiste et ronflante pour être vu comme un art qui ne concerne pas les plus jeunes et qui serait déconnecté de la réalité vécue. Quoi qu'il en soit, la mixité sociale et générationnelle n'est pas des plus marquée. Pourtant, à en croire les nombreux films optimistes portant sur le métier d'enseignant, le théâtre semble être la clef d'une cohabitation entre enseignants et élèves, ainsi que le lieu de l'émancipation.

L'Esquive (Kechiche, 2014), Les Grands esprits (Ayache-Vidal, 2017), Le Cercle des poètes disparus (Weir, 1989), Entre les murs (Cantet, 2008), Le Plus beau métier du monde (Lauzier,

1996), Nous, Princesses de Clèves (Sauder, 2009), À nous de jouer ! (Fromental, 2017),... les films sur l'enseignement sont nombreux. Cette liste n'est pas exhaustive, mais elle montre de nombreuses convergences. Les enseignants de français y sont particulièrement montrés. Mutés pour la plupart dans des établissements de banlieues difficiles, ils se voient dotés d'une mission civilisatrice : jetés dans la gueule des fauves, ils vont devoir les dompter. Pour mener à bien cette mission, ils sont pourvus d'une arme infaillible : le théâtre. Grâce à des œuvres « classiques » - Roméo et Juliette, Les Jeux de l'amour et du hasard, Le Songe d'une nuit d'été ou encore La Princesse de Clèves - et aux « expériences novatrices » de leurs enseignants, les élèves vont découvrir et accepter leurs premiers émois car comme le dit l'intervenante théâtre d'À nous de jouer !, le théâtre est « un endroit où la matière que vous allez étudier c'est vous-mêmes ».

Malgré la mission de ces films - donner une image plus humaine de ces populations - qui peut sembler noble, l'optimisme qui en ressort est le fruit d'un constat condescendant : ces élèves sont « comme nous », capables d'avoir des sentiments et, comme le dit François (Entre les

murs) « de faire des choses qui sont pas mal du tout ». La critique de ces films est facile, mais

les jugements portés sur ces élèves et leur culture sont autant de raccourcis qui omettent des questions primordiales : d'où viennent les inégalités scolaires qui sont notamment à l'origine de ces comportements ? quel rapport entretiennent les élèves avec les savoirs et savoir-faire scolaires ? pourquoi ? qu'est-ce qui fait du théâtre un enseignement particulier ?

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ÉTAT DE L'ART

Questions des capacités cognitives, des origines socioculturelles, des zones géographiques, de l'éducation parentale… autant de thèmes montrés à l'écran que de zones complexes à exploiter.

Qu'appelle-t-on les inégalités scolaires ?

 Le système éducatif français : un système contradictoire

Dans la seconde moitié du XXe siècle, la France généralise l'accès au collège et l'ouverture des lycées. Cependant derrière ce pas important vers l'égalité des chances, les inégalités scolaires restent conséquentes, et l'on peut se demander s'il s'agit plutôt d'une « démocratisation ou [d'une] massification de l'enseignement secondaire ». En effet, les « inégalités sociales sont partout présentes dès le niveau primaire et s'accroissent et se cumulent au fur et à mesure que l'on s'élève dans le cursus » ; la France étant l'un des pays de l'OCDE où « l'influence de l'origine sociale sur la performance scolaire est la plus importante » (Rochex, 2013, 12). À la différence d'autres pays de niveau économique équivalent, les « effets de structure » rencontrés en France sont néfastes pour les orientations des élèves, notamment des plus défavorisés : orientations précoces, filières différenciées, redoublement, classe de niveau… Les établissements et les académies manquent de mixités sociale et genrée. (Rochex, 2013).

Le système éducatif français est un système contradictoire. En termes d'accessibilité, les inégalités scolaires se sont estompées au cours de ces dernières décennies ; cependant les inégalités cognitives et culturelles, plus difficiles à percevoir et à objectiviser, se sont imposées (Rochex et Bautier, 1997) et de plus en plus d'élèves sortent non diplômés du système scolaire (Bonnéry et Renard, 2013).

 Une égalité genrée ?

Les inégalités scolaires issues des différences sociales rencontrent également la question du genre des élèves. Les filles prennent l'avantage sur les garçons dès l'école primaire, et celui-ci

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s'accroît tout au long de leur scolarité dans le secondaire, particulièrement en France pour les raisons énoncées ci-dessus, avec un taux différenciel d'obtention du bac de près de 10 % (Rochex, 2013).

Cette meilleure réussite des filles est d’autant plus importante que l’on se situe dans les milieux sociaux les plus touchés par l’inégalité scolaire, et l’on peut ainsi considérer que les filles de milieux populaires ont plus profité de la démocratisation de l’accès aux enseignements secondaire et supérieur que leurs homologues masculins qui demeurent la "cible" privilégiée de la grande difficulté scolaire et des sorties non ou faiblement qualifiées. Rochex, 2013, 18

Ce positionnement favorable est cependant entravé par les stéréotypes scolaires et familiaux du marché du travail ; « des stéréotypes de genre favorables à la réussite des filles à l'école mais à la domination masculine dans l'espace socioéconomique ». Les filières apparaissant comme peu mixtes conduisent les filles à faire des choix d'orientation les menant à des formations et des carrières moins prestigieuses et « moins rentables » que les garçons, à un niveau de formation équivalent. (Rochex ,2013, 18). Ces dernières années, de nouveaux facteurs peuvent intervenir pour basculer ou nuancer cette tendance : l'importance de la scolarisation des mères et, de façon plus globale, les nouveaux modes de vie, les pratiques éducatives, sociales et professionnelles des femmes.

 Des écarts de niveaux de performance de plus en plus conséquents

De plus en plus de chercheurs interrogent le rapport entre le niveau de formation des élèves et leur acquisition de savoirs et de compétences ; un rapport de plus en plus sensible aux « effets de contexte » (Rochex, 2013, 19). Si les performances des élèves sont plutôt stables, la proportion d'élèves en difficulté s'accroît, et c'est dans les établissement qui accueillent les élèves les plus faibles scolairement que les compétences scolaires sont les plus en baisse : la compréhension de l'écrit est touchée pour un élève sur cinq, soit une augmentation allant de 50 à 100 % selon les enquêtes, les compétences langagières et les compétences d'interprétation et d'évaluation du contenu de textes baissent jusqu'à 50 % dans les établissements classés REP.

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L'augmentation de la durée de la scolarité pour tous rend cette dégradation des acquis plus difficile à percevoir et donc à mesurer. En effet, les difficultés des élèves les plus défavorisés sont de plus en plus importantes, les résultats aux évaluations sont moins bons que ceux des élèves des années 1970-1980 et pourtant leur carrière scolaire est plus fluide (Rochex, 2013, 20-21). L'opacité des performances scolaires est renforcée par la différenciation territoriale. Dans les établissements qui condensent le plus d'élèves en difficulté, la tendance est à la surnotation, et les bons élèves sont encouragés pour accéder au lycée général. Mais ceux qu'on appelle « les bons élèves » dans ces deux types d'établissement n'ont pas reçu la même formation. Alors que nombre d'entre eux aurait été orientés vers des filières technologiques dans un établissement non classé REP, ceux-ci, moins bien préparés que d'autres, rencontrent rapidement plus de difficultés (Rochex, 2013, 21).

L'accessibilité à l'enseignement secondaire n'a pas estompé les inégalités scolaires - sociales comme genrées - qui sont aussi profondes que sourdes. Mais comment expliquer une telle influence de la catégorie sociale sur la performance d'un élève ?

Des rapports à l'école déterminés et déterminants

En fonction des classes sociales, les rapports à la culture et à la scolarité diffèrent. C'est notamment la relation entretenue par les parents avec les éléments culturels et scolaires et leur degré de préoccupation pour ces derniers qui influence la relation qu'entretient l'enfant puis l'adolescent avec eux. La famille a un rôle crucial « dans la transmission du capital culturel et du système de disposition » (Rochex et Bautier, 1997, 1). Bien que le « rapport à » soit une notion complexe dont les origines sont multiples, les réussites et les échecs scolaires sont souvent fruit de l'habitus du groupe social auquel appartient l'élève face à celui de classes dominantes, représentées notamment par l'institution scolaire.

C'est entre la « logique de cheminement et métier d'élève » et la « logique d'apprentissage et travail d'apprenant » que le fossé se creuse (Rochex et Bautier, 1997, 3). Alors que les « bons élèves » comprennent la nécessité du cadre scolaire pour se développer en tant qu'individu et en tant qu'apprenant de connaissances et de méthodes réflexives, les élèves les plus en difficultés et ceux des milieux populaires vont quant à eux à l'école pour « avoir un bon

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métier » et échapper ainsi à une situation socio-économique compliquée. Au fil des ans, ces derniers vont donc à l'école comme ils feraient une course d'obstacles, cette course ne pouvant « conférer de sens cognitif et culturel aux activités d'apprentissage et à leurs contenus qui deviennent des obligations scolaires sans légitimité propre » (Rochex et Bautier, 1997).

On n'entre donc pas à l'école avec les mêmes aptitudes à comprendre fondamentalement ses enjeux, on n'a pas tous une attitude vis-à-vis d'elle qui permettra des apprentissages efficaces.

Les malentendus sociocognitifs au cœur des inégalités

Selon leur environnement, les adolescents comprennent plus ou moins les démarches d'apprentissage telles qu'elles sont présentées dans les programmes, les manuels et par les enseignants. Plus les milieux sont populaires, plus ces malentendus sont visibles. Ils résultent donc d'une confrontation de milieux socioculturels : celle des classes populaires avec les classes dominantes, qui ont un rapport littéracié au monde et au langage et qui sont représentées par les institutions.

 Les élèves et leur rapport au langage et au savoir

Certains élèves, appartenant généralement aux classes dominantes, ont « une maîtrise symbolique seconde, réflexive, explicite et consciente » du langage (Rochex et Bautier, 1997, 5). Ils parviennent ainsi, plus ou moins aisément, à différencier l'activité proposée des enjeux cognitifs qu'elle vise à mettre en œuvre ; la consigne n'étant pour eux qu'une étape pour comprendre le fonctionnement global d'un raisonnement. Ils sont donc à même de s'approprier les savoirs dont elle est vectrice et de les exploiter lors de différentes situations scolaires comme extrascolaires.

D'autres élèves, appartenant généralement aux classes populaires, n'en ont une encore qu'« une maîtrise pratique et préréflexive » (Bautier et Goigoux, 2004, 93). Pour eux, le langage est un outil communicationnel servant à répondre aux attentes d'une situation

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définie. Ainsi, ils ne s'approprient pas les compétences développées lors d'une tâche puisqu'ils distinguent mal les unes de l'autre. Aucune transférabilité n'opérera avec d'autres situations d'apprentissage et de développement. Leur rapport aux savoirs ne s'émancipe pas des situations d'application.

C'est dans cette aptitude ou non à transférer le savoir que les écarts entre ces deux types d'élèves va se creuser, car la réussite scolaire exige une maîtrise du langage qui dépasse sa fonction de communication et la seule application de règles (Rochex et Bautier, 1997). Les élèves en difficultés se contentent de réaliser les tâches pour s'en acquitter, sans en saisir la signification. Ils sont dans la logique du faire et de la réussite immédiate (Bautier et Goigoux, 2004, 90). Or, pour les réussir, il faudrait en comprendre les enjeux cognitifs afin que le savoir puisse circuler d'une tâche à une autre dans une même matière, mais aussi entre les disciplines scolaires, et permette à l'élève comme à l'individu de se construire. C'est ce que Bautier et Goigoux (2004) appellent « l'attitude de secondarisation » : être capable de décontextualiser un savoir pour s'en emparer. Le rapport au langage, au savoir et aux tâches scolaires de ces élèves leur fait barrage pour que les situations scolaires soient porteuses d'apprentissages. La même activité intellectuelle n'est donc pas mobilisée et ne produit pas « les mêmes effets en termes d'apprentissage, d'acquisitions cognitives et de rapport à l'école et à ses professionnels » (Rochex et Bautier, 1997, 4).

Tous les élèves n'entrent pas à l'école avec les mêmes aptitudes langagières, et ceux qui s'en sortent le mieux ont un atout majeur : les habitus de leur catégorie sociale correspondent plus ou moins à ceux des institutions scolaires. Comme le rappellent Rochex et Bautier (1997), c'est Bourdieu et Passeron qui les premiers énoncent l'idée de « privilèges culturels » :

C'est que le rapport à la culture que [notre système d'enseignement] reconnaît n'est complètement maîtrisé que lorsque la culture qu'il inculpe a été acquise par familiarisation […]. On voit en premier lieu que, en ne donnant pas explicitement ce qu'il exige, il exige uniformément de tous ceux qu'il accueille qu'ils aient ce qu'il ne donne pas.

P. Bourdieu et J.-C. Passeron, La Reproduction. Éléments pour une théorie du système

d'enseignement, Paris, Éditions du Minuit, 1970.

Deux faits majeurs sont mentionnés comme responsables des difficultés scolaires : les dispositions sociolangagières et sociocognitives avec lesquelles les élèves entament leur

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scolarité et qui dépendent en grande partie des origines sociales, ainsi que le caractère implicite et obscur des attentes scolaires et de ce fait des pratiques des professionnels qui ignorent le plus souvent les difficultés liées à ce rapport à la langue et au savoir. Cette idée est énoncée par Rochex et Bautier en 1997, et reprise en 2004 par Bautier et Goigoux sous le nom d' « hypothèse relationnelle ».

 Rôle joué par l'institution scolaire

Les membres du gouvernement en charge des programmes scolaires et les enseignants, acculturés à un rapport réflexif au langage et au savoir à un tel point qu'il leur semble évident, omettent d'en prévoir l'enseignement dans leurs démarches pédagogiques. Or, pour remédier aux inégalités scolaires, il est primordial d'étudier les difficultés scolaires, actuelles et à venir, en mettant en relation « les préconisations ou prescriptions institutionnelles explicites ou qui circulent à l'état de doxas » (Bautier et Goigoux, 2004, 96) ainsi que les pratiques d'enseignement avec les contextes sociogéographiques des élèves et les dispositions et représentations qu'elles sous-tendent.

Repérer l'information, l'identifier, l'opérer sont des modalités que les enseignants négligent fréquemment d'expliciter, celles-ci allant de soi pour eux (Bautier et Goigoux, 2004). Bien que les différentes étapes de ce type de raisonnement soient fréquemment rappelées à l'ensemble des élèves, celles-ci demeurent opaques pour un certain nombre d'entre eux qui reste focalisé sur ces micros-tâches sans en comprendre l'enjeu global ou qui surgénéralisent la méthode sans en mesurer la pertinence ; la transférabilité échoue alors. Le malentendu est donc aussi important entre les élèves et ce qu'ils présument être les attentes de leurs enseignants qu'entre les enseignants et la représentation qu'ils se font des réquisits de leurs élèves.

Il a une nécessité d'accompagner davantage les élèves dans leur relation avec la langue, et ce dès l'apprentissage de la lecture en primaire. L'écrit tient une place considérable dans l'enseignement en France et nombreux élèves des classes populaires ont un rapport à la langue passant davantage par l'oralité. La carence du système éducatif est double sur ce point : non seulement de nombreuses productions orales sont jugées à l'aune de critères

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formels propres à l'écrit - l'entrée privilégiée par ces élèves étant ainsi entravée alors qu'elle peut également témoigner d'un rapport réflexif au langage (Rochex et Bautier, 1997) - mais aussi car trop peu de passerelles sont érigées entre la langue écrite et la langue orale, un lien qui n'est pas évident pour tous. Pour qu'un élève puisse secondariser un savoir, il faut d'abord attirer son attention vers le fait, repérer la procédure pour enfin la comprendre (Bautier et Goigoux, 2004). Ces mêmes auteurs insistent sur une des missions de l'école : favoriser « l'émergence d'une conscience métalinguistique » (Bautier et Goigoux, 2004, 93). Pour mener à bien cette entreprise de théorisation du langage, ils signalent la nécessité de passer par la langue écrite. Les élèves vont ainsi devoir s'engager activement dans les tâches scolaires : manipuler la langue, comparer, distinguer, mettre en relation les chaînes linguistiques parlée et écrite.

Comment davantage expliciter les enjeux des processus langagiers et des activités scolaires tout en renforçant la secondarisation des pratiques langagières ? Il est nécessaire « d'interrog[er] […] les pratiques des professionnels du système éducatif, les modalités de mise en forme scolaire des savoirs pour les enseigner » (Rochex et Bautier, 1997, 2) pour pallier les inégalités scolaires. Mais ces ajustements demandent du temps - de recherche, de lecture, d'appropriation, en somme de formation professionnelle - et face à l'hétérogénéité de la plus grande partie des classes, les enseignants ne peuvent malheureusement faire des miracles ; certains élèves restent ainsi à la marge du système éducatif.

 « Hors jeu »

Malgré leur ténacité, certains élèves ne parviennent pas à contenter les exigences scolaires. Quel sens donner alors à son travail et comment échapper à la sensation de rejet ? Comment ne pas « doute[r] sur le sens de l'école, de ce qu'on y apprend et de ce que l'on peut en attendre et en espérer, sur le sens des mobilisations personnelles et familiales qu'elle requiert » ( Rochex, 2013, 17). Les difficultés se cumulent et, arrivés au cycle 4, les obstacles deviennent insurmontables : les élèves se sentent « hors du jeu scolaire » (Bautier et Goigoux, 2004, 98).

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Les malentendus sociocognitifs - c'est-à-dire le décalage existant entre les exigences implicites des professionnels de l'éducation et la manière dont elles sont comprises par les élèves et leur famille - sont importants, mais le désir de démocratiser l'accès au savoir est bien réel pour la majorité des enseignants (Rochex et Bautier, 1997, 2-3). Ainsi de nouvelles pédagogies voient le jour, qui font de la culture un des moteurs des apprentissages.

Une politique de remédiation culturelle paradoxale

Dans le but d'éviter d'exclure certains élèves des circuits scolaires, des formes d'éducation détournant les modalités classiques de l'école sont expérimentées. Elles visent à masquer l'aspect scolaire des apprentissages pour mieux les appréhender ; ce qui, nous le verrons, est le plus souvent une fausse solution. L'aspect culturel et artistique est celui privilégié par la pédagogie du détour.

 Motiver les élèves

Il s'agit de réconcilier les élèves en difficultés voire décrocheurs avec l'école et pour cela masquer l'aspect scolaire des attentes des programmes institutionnels en exploitant des approches matérielles et ludiques. Les dispositifs de camouflage sont nombreux. Ils peuvent être minimes - cocher des cases, relier des informations, faire le puzzle d'une histoire… - ou plus conséquents ; le point d'apogée étant « la pédagogie de projet », officialisée par la loi d'orientation de 1989. Les enseignants sont ainsi encouragés à collaborer pour proposer une production commune ; le but étant de faire circuler les savoirs disciplinaires, de légitimer l'intérêt de chacun d'eux, tout en proposant aux élèves des enseignements plus concrets. Dès les années 1980, pour remédier aux difficultés rencontrées par les élèves des classes populaires, les activités culturelles et artistiques sont encouragées, dans les établissements comme lors des activités périscolaires. Ce sont elles que l'on retrouve le plus dans les projets de détour (Bonnéry et Renard, 2013). Mêler la culture populaire aux « œuvres de référence » pour que les élèves se forgent une culture commune à l'ensemble de la communauté éducative et se constituent une disposition esthétique, tels sont les enjeux du détour éducatif. Alors que de tels dispositifs voient le jour depuis une quarantaine d'années, sous

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différentes formes, les inégalités scolaires et culturelles persistent (Bonnéry et Renard, 2013). Supposés être plus accessibles, ces dispositifs n'obscurcissent-ils pas les enjeux scolaires ?

 Entre plaisir et enjeux réels, un positionnement flou

Le problème est de taille. Comme nous l'avons vu précédemment, les malentendus sociocognitifs sont en grande partie responsables des difficultés rencontrées par certains élèves. Or, en camouflant la tâche scolaire pour que celle-ci soit méconnaissable et donc abordée plus sereinement par ces élèves, ceux-ci « s'égarent dans le traitement de contenus non pertinents par rapport à l'objectif » (Bautier et Goigoux, 2004, 96) et sont incapables de lier la tâche aux enjeux réels visés. Autrement dit, au lieu d'impulser les apprentissages, ces projets « dress[ent] des obstacles supplémentaires au travail cognitif requis par l'appropriation des savoirs par les élèves » (Rochex et Bautier, 1997, 7). Allant de soi pour les enseignants, ceux-ci ont du mal à expliciter les savoirs en je. Ils les dévoilent « lorsque les adolescents contestent des activités jugées peu aidantes pour leur scolarité » (Bonnéry et Renard, 2013, 141). Remédier aux difficultés est une tâche des plus complexes : il faut motiver les élèves à se mettre en activité cognitive tout en étant clair dans ses objectifs sans quoi les élèves refusent l'activité pour son manque d'intérêt.

Les enseignants peinent à « encadrer la construction de prérequis, à la fois cognitifs et esthétiques » (Bonnéry et Renard, 2013, 140) et tendent à s'effacer et à effacer les savoirs scolaires derrière la pratique ludique. Comment les élèves peuvent-ils donc savoir comment appréhender les œuvres, alors qu'ils n'ont pas forcément connaissance de ce qui est scolairement admis et apprécié ?

L'adhésion des enseignants aux activités et aux œuvres […] rend [effectivement] difficile l'explicitation des critères d'appréciation des œuvres et des principes de hiérarchies culturelles comme l'encadrement de la construction juvénile d'une appréhension esthétique et scolastique.

Bonnery et Renard, 2013, 142.

L'accès à la culture n'est peut-être pas aussi facilité que ces projets le laissent espérer. Le cheminement est complexe : les enseignants libèrent de l'espace pour que les élèves puissent s'approprier les connaissances et apprendre à affiner leur jugement. Cependant, les valeurs et

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représentations des élèves ne sont pas celles des classes moyennes et supérieures, représentées ici par les enseignants. Comment comprendre ce dont on n'a pas conscience ? Pourquoi les élèves imagineraient-ils que ce qu'on leur propose est avant tout une manière de les appâter vers des savoirs jugés, par l'école, plus « nobles » ?

 Des leurres pour les élèves

C'est d'abord la nature de ce type de tâches qui leurre les élèves. Que l'activité consiste en un morcellement de tâches à accomplir ou qu'elle soit un projet global plus ambitieux, les élèves risquent de se laisser aller à l'aspect ludique de ces tâches qu'ils peuvent accomplir sans faute. Mais, alors qu'ils « ont […] l'impression de satisfaire aux demandes scolaires, […] leur rapport aux savoirs et aux apprentissages est inchangé » (Rochex et Bautier, 1997, 8) puisqu'ils manquent de critères pour en saisir les enjeux. De plus, la place occupée par l'écriture dans ces dispositifs est problématique. Celle-ci est généralement minorée voire inexistante car elle est un frein à la réalisation des tâches pour ceux rencontrant des difficultés mais c'est sans compter que sans elle, les élèves ne peuvent pas élaborer le rapport au monde et à eux-mêmes propre à la culture écrite (Rochex et Bautier, 1997, 5).

De plus, en voulant s'approcher d'une culture plus connue et appréciée des élèves - rap, séries télévisées, blockbusters, … - ils les éloignent encore un peu des objectifs visés. En effet, sans réel travail pour aider les élèves à secondariser ces supports et à affuter leur esprit critique, ces derniers les appréhendent avant tout comme des activités de loisir. Ne pouvant percevoir la différence entre la pluralité des objets et les clefs d'analyse qui finalement ne les mettent pas tous à l'honneur, restent enfermés dans « ce qu'ils sont, ce qu'ils savent ou ce qu'ils aiment » (Rochex et Bautier, 1997, 7) et qui sont finalement loin des réquisits scolaires. De ce fait, ce sont les élèves qui ont le plus besoin de s'acculturer scolairement qui, en suivant de trop près les sentiers dessinés par ces activités, cheminent en dehors. Les bons élèves, quant à eux, peuvent appréhender ces univers en les liant et en les déliant pour mieux en apprécier le registre (Rochex et Bautier, 1997).

Ces pédagogies de détour sont à l'origine d'un important paradoxe : rendre le savoir accessible en l'enseignant de manière plus alléchante tout en masquant les objectifs

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pédagogiques réels, ce qui leurre d'autant plus les élèves en difficultés quant aux apprentissages effectifs auxquels elles conduisent. Dans leur conclusion à l'article écrit en 1997, Rochex et Bautier vont encore plus loin en disant qu'« il faut décaper le vif des concepts, des savoirs et des pratiques intellectuelles, et du travail de création dont ils sont issus et qu'ils permettent de poursuivre » car la démocratisation culturelle a tout autant à perdre d'« un relativisme empirique ou de méthodologies sans contenus, qu'à l'installation satisfaite dans les formes consacrées à la culture scolaire et de sa transmission, données comme éternelles et indépassables. » Bien que d'une efficacité surestimée, la persistance de ces pédagogies, notamment dans les établissement accueillant le plus d'élèves en difficultés, est preuve de son intérêt pour les élèves comme pour les enseignants. Il faudrait donc réfléchir à nouveau ces pédagogies de façon à ce que les enjeux de savoir soient rendus perceptibles aux élèves et que l'acquisition en soit étayée.

Des objectifs qui contournent le cadre scolaire

 Du leurre au sentiment d'injustice

Alors que les élèves ne rencontrant pas de difficultés particulières dans leurs apprentissages gagnent rapidement en autonomie dans la mobilisation de leurs savoirs pour faire de leurs expériences et d'eux-mêmes des objets de réflexion (Rochex et Bautier, 1997), certains se sentent leurrer de ne pouvoir dépasser le cadre scolaire. Il s'agit notamment des élèves encore motivés et mobilisés dans leur réussite scolaire qui se rendent compte qu'ils n'ont malgré tout pas les clefs pour cela. Certains s'en aperçoivent dès le collège, d'autres au lycée ou même lors de leurs études supérieures, généralement lorsque les malentendus ont pris une telle ampleur qu'ils se sentent au bout d'une impasse : ils voient qu'ils ne réussissent pas mais sans pouvoir identifier les sources du malentendu. C'est alors que « le manque de clarté cognitive sur la nature des activités intellectuelles requises par les apprentissages se paye d'une exacerbation de la dépendance à l'égard de la personne de l'enseignant » (Rochex et Bautier, 1997, 5). N'ayant pas les clefs pour comprendre ce gouffre entre leurs efforts et leurs résultats, l'affect et le relationnel domine les liens qu'ils créent avec l'école et les échecs qu'ils essuient s'accompagnent d'un puissant « sentiment d'injustice, [de] rancœur et ressentiment à l'égard de l'école et de ses agents et/ou d'[eux]-mêmes » (Bautier et Goigoux, 2004, 98).

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Toutes ces incompréhensions se transforment en perte d'assurance et/ou sentiment de rejet pour l'univers scolaire, ceci les conduisant à se retirer d'eux-mêmes du système scolaire. Ces cas de figures étant plus ou moins fréquents selon les types d'établissements, les personnels de l'éducation doivent agir.

 Panser les plaies

Les projets scolaires sont un temps où les blessures liées aux expériences des élèves, personnelles et scolaires, peuvent être atténuées. Aurélie Filipetti, alors ministre de la Culture, l'a rappelé lors de l'installation du comité de pilotage de la consultation nationale sur l'éducation artistique et culturelle :

Je n'ai pas à vous convaincre du rôle que peuvent avoir l'art et la culture dans la construction de la personnalité, dans l'ouverture de l'imaginaire, dans la réconciliation avec le goût et le désir d'apprendre.

Si davantage d'accompagnement et d'étayage sont nécessaires pour mener à bien ces pédagogies, elles semblent d'autant plus intéressantes qu'il est primordial de canaliser ces « personnalité[s] tant fragile[s] que débordante[s] supposée[s] construite[s] dans des familles populaires » (Bonnéry et Renard, 2013, 143) tout en leur redonnant de l'estime. Les activités culturelles et artistiques, ayant pour objectif une meilleure connaissance et du monde, permettent de sublimer des pulsions jusqu'alors présentes sous forme de colère (Bonnéry et Renard, 2013). De plus, la concrétisation de projets permet à ces élèves d'être reconnus par d'autres et par ceux les encadrant dans leurs apprentissages lors d'expositions ou de représentations, et peut-être même de leur donner le goût de l'art dans une acceptation sémantique globale.

Il serait donc bon de conserver les bienfaits symboliques de ces pédagogies, en termes d'estime de soi, sans oublier leur but premier : réduire les inégalités scolaires en permettant à chacun d'accéder à des apprentissages efficaces. En s'adaptant aux publics constituant les différents établissements scolaires, les enseignants doivent veiller à suffisamment accompagner les élèves dans ces projets, en s'assurant qu'ils en identifient les réels enjeux d'apprentissage, afin que ceux-ci ne se réduisent pas à des ateliers de survie.

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Le théâtre : une solution miracle ?

Claire Lemêtre le rappelle dans son article publié en 2007 : le théâtre, à la différence d'autres arts comme le musique et les arts-plastiques, n'est matière à part entière que depuis 1989 et sous la forme d'option au lycée ou de classes profilées au collège. Cependant, il est l'un des trois grands genres littéraires étudiés en cours de français, au collège comme au lycée, et s'il est généralement plus étudié sous sa forme écrite ou utilisé comme point de départ à l'apprentissage d'être spectateur - les programmes insistent particulièrement sur le théâtre comme représentation et non seulement comme texte -, les pièces sont aussi écrites pour être jouées. Lecture, écriture, jeu, spectacle… ses ressources sont extrêmement riches et « le système de valeurs propre à l'institution scolaire [semble] ne s'accommode[r] pas si mal des choses de [cet] art » (Claire Lemêtre, 2007, 652).

Dans « Le Théâtre : une nouvelle discipline scolaire » publié en 2007, Claire Lemêtre étudie les mises en place et les attitudes des élèves lors d'ateliers dispensés pour ceux ayant choisi la spécialité théâtre en classe de seconde. Les résultats, en termes d'inégalités scolaires, sont proches de ceux notés plus haut : les élèves des classes populaires sont généralement « un peu perdus » par « l'ascèse ludique ». Ces derniers ont du mal à associer le plaisir à l'apprentissage et se trouvent déconcertés par ce type d'atelier. Néanmoins, comme elle l'indique et comme nous pouvons le voir dans les films ayant pour protagoniste un enseignant de français, le lexique du théâtre n'est finalement pas si éloigné de celui d'une classe : « rôles », « espace », « rituels », « codes », « écoute », « exercices »… Sans amalgamer complètement conventions théâtrales et conventions scolaires, non seulement pour d'éviter de flouter les objectifs pédagogiques par un nombre trop important d'interférences mais en plus car cette étude porte sur l'enseignement du français au cycle 4 et non sur des projets profilés, ce terrain semble tout de même particulièrement fertile aux apprentissages en tout genre et chacun pourrait y trouver satisfaction. En effet, les modalités du théâtre sont nombreuses - le voir, le lire, l'écrire, le jouer, le mettre en scène - et ses bienfaits multiples : découvrir son corps, ses émotions, sa personnalité, s'exprimer et se réguler, accepter l'autre, son univers, porter un regard sur la société… Pour résumer, on pourrait dire que le théâtre au collège permettrait d'apprendre à « être soi autrement et spontanément » (Bonnéry et

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Renard, 2013, 147) ; c'est-à-dire qu'il pourrait les mener vers une meilleure connaissance d'eux-mêmes et de leur environnement mais par des enseignements explicites.

Entre le plaisir de s'y investir et la diversité des apprentissages qu'il permet, oraux comme écrits, le théâtre semble être un lieu privilégié pour apprendre. Mais, quoi qu'il en soit, il semble primordial d'interroger les rapports effectifs qu'ont les élèves avec le théâtre pour proposer des solutions appropriées à chacun. À l'échelle d'un premier court travail de recherche sociodidactique, j'interrogerai les points suivants : Les élèves de quatrième ont-ils tous le même rapport au théâtre ? Quelles « images », « attentes », « opinions » et « valeurs » attribuent-ils à ses différentes modalités (Barré de Miniac, 2000) ? Quelles incidences ont leurs parcours socioculturels sur la façon dont ils se le représentent ? Quelles répercutions ont-elles sur leur travail scolaire ? Quels sont les risques de malentendus lors de la scolarisation du théâtre ? Quelles pistes didactiques les enseignants de lettres peuvent-ils envisager pour les pallier ?

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PROTOCOLE

Les élèves participants

Le collège Les Balmettes, situé à Annecy, est à la lisière du centre-ville et des faubourgs. L'hétérogénéité des élèves est ainsi fortement marquée : nombre d'entre eux ont une situation très favorisée et beaucoup appartiennent à des classes populaires. Les élèves issus de l'immigration et les gens du voyage sont très présents dans ce collège, d'où l'ouverture de classes d'adaptation FLS pour les élèves allophones. Le partenariat actif avec la Croix Rouge et les liens étroits tissés avec les associations travaillant sur le territoire permettent de prévenir au mieux le décrochage des élèves en difficultés et/ou démotivés. Afin d'apprendre à vivre ensemble, l'inclusion des élèves à besoins particuliers est de mise dans l'ensemble des classes de l'établissement et la différenciation encouragée dans les différentes pratiques pédagogiques.

L'ouverture culturelle et artistique est l'une des voies ouvertes par le collège pour permettre à tous de réussir : impulser de nouvelles pratiques et développer des compétences collectives. Ainsi, à côté des CHAM et des CHAD, des ateliers de créations artistiques sont proposés à l'ensemble des élèves : chorale pour les 6e et 5e, cinéma d'animation et théâtre pour les 4e et 3e. Les collègues de lettres se sont mis d'accord pour que toutes les classes de 5e voient une pièce de théâtre afin de s'assurer que tous les élèves en aient au moins vu une avant de quitter le collège. Les élèves de cet échantillon ont été voir 1, 2, 3 Scapin l'année précédente. C'est dans cette voie que s'engage notre étude.

Il s'agira en effet de voir si certains éléments du parcours socioculturel des élèves interviennent de manière discriminante dans leur rapport au théâtre. Les informations personnelles des élèves en libre consultation sont nombreuses : nom, prénom, date de naissance, sexe, division, nationalité, commune et pays de naissance, date de sortie du pays, type de bourse et échelon de chaque élève, nom, prénom, commune de résidence, code postal, lien de parenté, profession et adresse complète du responsable légal 1 puis 2.

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Comme le font de nombreuses études sociodidactiques depuis les années 1970-90, nous nous focaliserons plus particulièrement pour cette première réflexion sur les catégories socioprofessionnelles des parents, variable exploitée depuis 1972, et le genre des adolescents, étudié à partir de 1985 (Rochex, 2013).

 Des groupes constitués en fonction du genre de l'élève

La première classe de quatrième, qu'on appellera classe A, comporte 20 élèves présents lors du questionnaire, dont 9 garçons et 11 filles. La seconde classe, appelée classe B, est quant à elle composée de 18 élèves présents au moment du questionnaire, dont 7 garçons et 11 filles. Sept élèves, au total, étaient absents : 2 garçons et 5 filles. Pour résumer, 38 élèves sur 45 ont répondu à ce questionnaire : 22 filles et 16 garçons.

Pour voir si les résultats obtenus en fonction de ce critère étaient ou non notables, j'ai dans premier temps comparé les résultats d'un même groupe dans chacune des deux classes. En effet, la réduction des effectifs peut poser problème et il m'a semblé important de m'assurer une certaine stabilité1.

 Des groupes basés sur la catégorie sociale des parents

Afin de faire ressortir au mieux les différences entre catégories sociales dans la question du rapport au théâtre, s'il y en a, j'ai pris le parti de réduire les huit groupes des professions et catégories socioprofessionnelles à quatre2, afin que chacune des catégories comporte un nombre suffisant d'élèves.

Correspondront à la catégorie A « les cadres et professions intellectuelles supérieures », à la catégorie B « les professions intermédiaires » ainsi que « les artisans, commerçants et chefs d'entreprise » (ne sont représentés dans les résultats suivants que les artisans et les commerçants et assimilés ; aucun chef d'entreprise de dix salariés ou plus n'est représenté dans mes échantillons). La catégorie C sera constituée des « employés » et la catégorie D des

1

Par manque de place, ces tableaux complémentaires figurent en annexes (ANNEXE 5).

2 Le lecteur trouvera en annexes (ANNEXE 2) la liste des professions et catégories socioprofessionnelles à

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« ouvriers ». Notons qu'aucun des parents d'élèves des échantillons concernés n'appartient aux catégories « agriculteurs exploitants » et « retraités ».

Afin d'affecter chaque élève à l'une de ces quatre catégories, j'ai comparé les CSP des deux responsables légaux. En cas d'hésitation entre les catégories A et B et entre les catégories B et C j'ai choisi de conserver la plus élevée qui, après plusieurs essais de catégorisation, m'a semblé la plus représentative des élèves concernés. Pour les catégories C et D, j'ai regardé si l'élève était ou non boursier ; s'il l'était j'ai opté pour la catégorie D, au cas contraire pour la catégorie C. Parmi les cinq élèves ayant les deux parents dans la catégorie « autres personnes sans activité professionnelle », seule une était présente le jour du questionnaire ; j'ai donc fait le choix, certainement discutable, de la joindre à la catégorie D.

Pour pallier l'hétérogénéité de ces catégories, les entretiens individuels - seconde partie de l'expérimentation - seront l'occasion de cerner les indices les plus probants des inégalités scolaires : le niveau d'étude de la mère ainsi que le rapport à l'école et plus généralement à la culture des parents.

Contrairement à l'analyse des résultats en fonction du genre des élèves, j'ai ici décidé d'additionner sans les différencier les élèves des deux classes. L'échantillon étant réduit et les catégories au nombre de quatre, il me semble que les résultats seront ainsi plus marqués. Sur les 45 élèves, 6 appartiennent à la catégorie A, 12 à la catégorie B (dont 3 absents), 13 à la catégorie C (dont 1 absent) et 13 à la catégorie D (dont 3 absents). Au total, sur les 38 élèves présents, 6 sont représentants des élèves de la catégorie A, 9 de la catégorie B, 12 de la catégorie B et 10 de la catégorie D.

Dispositif et procédure

 Étape 1 : un questionnaire3

Pour établir ce questionnaire, je suis partie de mes principales interrogations concernant l'ambigüité du terme « théâtre ». Assez rapidement j'ai arrêté trois entrées principales : voir

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du théâtre (en y allant ou non), lire du théâtre et faire du théâtre (le jouer, l'écrire, le mettre en scène). Avant d'engager les élèves à réfléchir sur ces trois entrées, j'ai souhaité écouter ce qui était le plus signifiant pour eux, d'où une première partie intitulée « généralités ».

Cette première section a soulevé de nombreuses interrogations concernant l'ordre des termes ou encore les connotations de ceux-ci. Afin de privilégier la neutralité, je n'ai expliqué aucun terme aux élèves auxquels j'avais en revanche laissé libre accès à des dictionnaires pour qu'ils puissent avoir une définition du terme incompris dépourvue de connotation. Ayant deux classes d'un même niveau et les deux ayant un effectif d'élèves réduit, j'ai fait le choix d'interroger l'ensemble de mes élèves. La première classe, qu'on appellera classe A, est composée de 23 élèves dont 3 étaient absents le jour du questionnaire, la seconde classe, appelée classe B, contient elle 22 élèves dont 4 absents le jour du questionnaire, soit un total de 45 élèves avec 38 participants à cette enquête.

Ce questionnaire a été distribué la semaine précédent les vacances de février, soit au milieu de l'année scolaire. Il m'a semblé important que les élèves me connaissent suffisamment pour qu'ils aient confiance en moi et qu'ils y répondent en toute sérénité. Afin d'influencer le moins possible les réponses des élèves, j'ai distribué ce questionnaire juste avant la séquence sur le théâtre. Avant de leur distribuer le document, j'ai pris le temps de leur expliquer le but de l'enquête sans pour autant leur donner les critères analysés afin qu'ils ne se sentent pas discriminés. Ils l'ont complété en classe sans limite de temps, bien qu'au bout d'une petite trentaine de minutes, tous avaient terminé.

 Étape 2 : des entretiens individuels

Afin d'affiner les résultats des questionnaires, des entretiens individuels ont été mis en place. Dans l'idéal il aurait fallu multiplier le nombre d'élèves par le nombre de critères analysés, soit huit élèves : une fille et un garçon appartenant aux quatre catégories sociales établies. Cependant, étant donné l'ampleur de ce travail et afin de privilégier la qualité à la quantité, j'ai choisi de voir uniquement quatre élèves. Les réponses du groupe social privilégié et celles du groupe social le plus populaire m'ayant semblée plus simples à interpréter, j'ai pris le parti d'uniquement rencontrer des élèves des catégories moyennes B et C.

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Idéalement j'aurai aimé faire ces entretiens peu de temps après que les élèves aient complété le questionnaire. Je me suis cependant rendue compte que pour les mener avec pertinence il fallait également que les analyses des premiers résultats soient à un stade relativement avancé. L'importance est que l'élève se sente à l'aise, sans avoir l'impression d'être stigmatisé ou face à un enquêteur, afin qu'il réponde avec sincérité et intérêt.

Une fois le choix des élèves effectué, j'ai rencontré chacun d'eux pour leur expliquer brièvement les enjeux de ces entretiens, sans mentionner les éléments discriminants observés, et leur ai demandé s'ils étaient d'accord pour participer à cette deuxième partie de l'enquête. J'ai également rencontré la chef de l'établissement pour lui exposer mon sujet et ma démarche. Chaque élève retenu s'est ensuite vu remis une demande d'autorisation parentale4.

Les élèves participants sont exceptionnellement sortis de leur cours, environ 30 minutes, afin que ces entretiens n'empiètent pas sur leur temps libre. Toutes les discussions ont été enregistrées sur un dictaphone et retranscrites par bribes dans la partie discussion de ce travail. Pour que les discussions avec ces élèves soient les plus naturelles et objectives possibles, j'avais comme principal support les questionnaires remplis ainsi qu'une grille succincte afin de m'adapter au mieux aux propos des élèves sans pour autant perdre de vue les objectifs de ces rencontres.

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PRÉSENTATION DES RÉSULTATS

Les parties suivantes sont celles présentes dans le questionnaire. Dans l'ordre, les élèves ont dû interroger les « généralités » du théâtre, avant de renseigner des rubriques plus spécifiques : « Voir le théâtre », « Lire le théâtre » et « Faire du théâtre ». Les résultats des questionnaires figurent sous formes de tableaux et de graphiques. Afin de pouvoir les comparer, les nombres effectifs apparaissent fréquemment sous forme de pourcentages. Pour des questions de mise en pages, les catégories socioprofessionnelles de parents sont nommées cat. A, cat. B, cat. C et cat. D. Un certain nombre de tableaux complémentaires figurent en annexes.

Généralités

1. Comment définirais-tu le théâtre ? Surligne les thermes qui te semblent les plus justes. Le théâtre, c'est : Totaux 38 % jouer 34 89,5% lire 18 47,4% écrire 19 50,0%

s'exposer aux autres 24 63,2%

s'ennuyer 8 21,1%

être assis dans un fauteuil 6 15,8%

regarder 22 57,9% difficile 14 36,8% effrayant 2 5,3% excitant 10 26,3% scolaire 8 21,1% amusant 13 34,2% stressant 3 7,9% libérateur 1 2,6% dormir 1 2,6% distinction scène/salle 1 2,6%

Le graphique de ci-contre présente le total des réponses de l'ensemble des élèves pour que nous puissions avoir la répartition la plus précise possible des choix. Afin de mieux observer les différences entre les deux éléments potentiellement discriminants, nous allons les regrouper en sept thèmes : la difficulté du théâtre (s'exposer aux autres, effrayant, stressant, difficile), l'ennui auquel il conduit (s'ennuyer, être assis dans un fauteuil, scolaire, dormir), le plaisir qu'il procure (excitant, amusant, libérateur). À cela s'ajoutent les distinctions jouer, lire, écrire et regarder le théâtre.

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Fig. 3

Fig.4

2. Penses-tu que le théâtre est réservé à un certain type de public ? Si oui, complète ta réponse en répondant aux questions suivantes :

Filles Garçons Totaux Cat. A Cat. B Cat. C Cat. D Non 86,4 % 81,3 % 84,2 % 66,7 % 100 % 83,3 % 80 % Oui 13,6 % 18,7 % 15,8 % 33,3 % 0 % 16,7 % 20 % Âges spécifiques ? Jeunes 4,5 % 12,5 % 5,3 % 0 % 10 % 8,3 % 10 % Vieux 13,6 % 25 % 10,5 % 16,7 % 10 % 8,3 % 10 % Milieux sociaux particuliers ? Bourgeois 9,1 % 18,8 % 7,9 % 0 % 10 % 8,3 % 10 % populaires 9,1 % 31,2 % 13,2 % 16,7 % 10 % 17,7 % 30 % Deux filles de la classe A ont coché « non » mais ont tout de même justifié, ce qui explique le nombre supérieur de justifications par rapport à celles qui étaient attendues.

0,0% 10,0% 20,0% 30,0% 40,0% 50,0% 60,0% 70,0% 80,0% 90,0% 100,0%

Jouer Lire Écrire Regarder Difficulté Ennui Plaisir filles garçons 0,0% 20,0% 40,0% 60,0% 80,0% 100,0% 120,0% cat. A cat. B cat. C cat. D Fig. 2

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Fig.5

Fig.6

3. Quelles pièces de théâtre t'ont marqué ? Les as-tu lues, vues au théâtre, à la télé, jouées ?

Afin d'y voir plus clair, nous pouvons regrouper ces résultats en trois lignes : rien (aucune réponse mentionnée ou la mention « aucun souvenir »), expérience positive, et expérience négative. J'ai choisi de conserver les chiffres réels pour les expériences, positives comme négatives, car nombreux élèves en ont mentionné des positives comme des négatives, et nombreux sont ceux à ne pas avoir précisé.

Filles Garçons Totaux Cat. A Cat. B Cat. C Cat. D Rien 40,9 % 50 % 44,7 % 16,7 % 60 % 33,3 % 60 % Exp. + 7 2 9 3 0 4 2 Exp. - 2 3 5 2 2 1 0 Totaux Aucune réponse 7 Aucun souvenir 10

Simbad le marin (vu au théâtre) 10

1, 2, 3 Scapin (vu au théâtre) 2

Roméo et Juliette (vu à la télé) 1

Les Fourberies de Scapin (vu au théâtre) 2

Bonobo (vu au théâtre) ? 1

Tocs ? 1

Le Malade imaginaire (vu au théâtre) 1

Le Malade imaginaire (vu à la télé) 1

Les Dalton (vu au théâtre) 1

L'Avare 1

La Petite fille aux allumettes 1

Le Cirque du soleil, Ovo 1

Les Trois mousquetaires 1 Pièce jouée dans une salle municipale 1

Le sujet est un crime 1

Jean-Marc Pastron / Les pleureuses : NI 1

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24 Fig.7 Fig.8 Fig.9 Fig.5 Fig. 8 Fig.9

Voir du théâtre

4. a. Es-tu déjà allé au théâtre ? Si oui, complète ta réponse.

Filles Garçons Total Cat. A Cat. B Cat. C Cat. D

Non 9,1% 12,5% 10,5% 0,0% 0,0% 16,7% 20,0% Oui 90,9% 87,5% 89,5% 100,0% 100,0% 83,3% 80,0% Nombre ? 1 seule fois 10,0% 14,3% 11,8% 0,0% 0,0% 20,0% 20,0% < 5 fois 75,0% 71,4% 73,5% 83,3% 90,0% 70,0% 70,0% > 5 fois 10,0% 14,3% 11,8% 16,7% 10,0% 10,0% 10,0% Lieu ? Salle réservée 85,0% 85,7% 85,3% 100,0% 10,0% 90,0% 90,0% Extérieur 0,0% 85,7% 5,9% 0,0% 10,0% 0,0% 0,0% Autres 20,0% 0,0% 11,8% 16,7% 0,0% 20,0% 20,0% Avec qui ? Seul.e 0,0% 0,0% 0,0% 0,0% 0,0% 0,0% 0,0% Entre amis 0,0% 0,0% 0,0% 0,0% 0,0% 0,0% 0,0% En famille 35,0% 35,7% 35,3% 83,3% 30,0% 40,0% 40,0% Ac la classe 100,0% 92,9% 97,1% 100,0% 100,0% 90,0% 90,0%

4. b. Si tu y as déjà été, souhaites-tu y retourner ? Si tu n'y as jamais été, souhaites-tu y aller ?

Deux élèves ont répondu « oui et non » à cette dernière question ; ils ne sont de ce fait pas comptabilisés dans cette figure. Il s'agit d'une fille de la catégorie D et d'un garçon de la catégorie C. 0,0% 10,0% 20,0% 30,0% 40,0% 50,0% 60,0% 70,0% 80,0% 90,0% Oui Non 0,00% 10,00% 20,00% 30,00% 40,00% 50,00% 60,00% 70,00% 80,00% 90,00%

Cat. A Cat. B Cat. C Cat. D

Oui Non

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Fig. 10 Fig. 11

Fig. 12

Au total, 35 élèves sur 38 ont justifié leur réponse, soit 21 filles et 14 garçons, ou 6 élèves de la catégorie A, 10 de la catégorie B, 10 de la catégorie C et 9 de la catégorie D. Voici un tableau indiquant le nombre de résultats positifs et négatifs pour chaque groupe.

Regroupons désormais les justifications pour comprendre plus clairement ces résultats. Pour les résultats négatifs nous pouvons discerner deux arguments majeurs : le manque d'attirance (« Je n'aime pas le théâtre / cet univers », « Ҫa ne m'attire pas », « Je préfère lire ») et l'ennui (« Je trouve ça ennuyeux », « Parfois je m'endors »). On voit clairement que les justifications positives sont bien plus diversifiées que les négatives. Nous pouvons cependant noter certains regroupements : l'ambiance collective (« J'aime l'ambiance des théâtres », « On passe de bons moments en famille ou entre amis »), l'aspect vivant (« C'est amusant », « C'est vivant », « C'est excitant », « J'aime voir des acteurs jouer des rôles en direct », « J'aime écouter les pièces »), l'idée d'un art total (« Le travail de mise en scène, costumes, décors, me plaît », « C'est un art spécial et diversifié ») et autres (« Je trouve ça mieux que le cinéma », « Ҫa fait passer le temps »). 0 5 10 15 20 Filles Garçons Rés. Négatifs Rés. positifs 0 5 10 15

Cat. A Cat. B Cat. C Cat. D

Rés. Négatifs Rés. positifs

Totaux Filles Garçons Cat. A Cat. B Cat. C Cat. D Justifications négatives Manque d'attirance 28,6% 23,8% 35,7% 0,0% 40,0% 20,0% 44,4% Ennui 14,3% 14,3% 42,9% 16,7% 10,0% 20,0% 11,1% Justifications positives Ambiance collective 11,4% 14,3% 7,1% 16,7% 10,0% 20,0% 0,0% Aspect vivant 42,9% 42,9% 42,9% 66,7% 30,0% 60,0% 22,2% Art total 8,6% 9,5% 7,1% 33,3% 0,0% 10,0% 0,0% Autres 5,7% 9,5% 0,0% 0,0% 10,0% 10,0% 0,0%

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26 Fig. 11 Fig. 11 Fig.13 Fig.14 Fig.15

Lire du théâtre

Ici commence le verso du questionnaire. Une fille de la catégorie D et un garçon de la catégorie B ne l'ont pas renseigné, d'où le changement d'effectifs.

5. a. As-tu déjà lu du théâtre ? Si tu as répondu oui, complète ta réponse.

Filles Garçons Totaux Cat. A Cat. B Cat. C Cat. D Non 23,8% 53,3% 36,1% 0,0% 33,3% 41,7% 55,6% Oui 76,2% 46,7% 63,9% 100,0% 66,7% 58,3% 44,4% Cadre Ecole 87,5% 85,7% 87,0% 66,7% 100,0% 85,7% 100,0%

Maison 12,5% 14,3% 13,0% 16,7% 0,0% 14,3% 25,0% Autres 6,3% 0,0% 4,3% 16,7% 0,0% 0,0% 0,0%

5. b. Si tu en as déjà lu, as-tu aimé ? Si tu n'en as jamais lu, aimerais-tu en lire ?

Sur les 36 élèves restants, certains n'ont pas répondu à cette question : 2 garçons de la catégorie B et 1 garçon et 1 fille de la catégorie C.

Au total, 28 élèves sur 36 ont justifié leur réponse, soit 18 filles et 10 garçons, ou 6 élèves de la catégorie A, 6 de la catégorie B, 9 de la catégorie C et 7 de la catégorie D. Voici un tableau indiquant le nombre de résultats positifs et négatifs pour chaque groupe :

0,0% 10,0% 20,0% 30,0% 40,0% 50,0% 60,0% 70,0% 80,0% Oui Non 0,0% 10,0% 20,0% 30,0% 40,0% 50,0% 60,0% 70,0% 80,0%

Cat. A Cat. B Cat. C Cat. D

Oui Non

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Fig.16 Fig.17

Fig.18

Cette fois, les élèves ont autant varié les justifications négatives que les justifications positives. On peut regrouper chacune d'elles en trois thèmes dominants : le désamour de la lecture (« Je n'aime pas lire »), le désamour de la lecture de pièces (« Je n'aime pas lire du théâtre », « Ҫa n'a aucun intérêt », « C'est ennuyeux ») et la difficulté (« Le vocabulaire est trop soutenu », « On ne sait pas qui parle », « Je n'aime pas la mise en page ») en ce qui concerne les justifications négatives, et l'attrait du changement (« Ҫa change des romans habituels », « J'aime bien la mise en page »), la scénarisation (« J'aime les scénarios ») et l'amusement (« J'aime bien la façon de lire », « C'est marrant ») en ce qui concerne les justifications positives. Certaines associations peuvent être discutables : j'ai cependant essayé de voir dans les réponses des élèves ce qui semblait être le plus juste. Par exemple, la question de la mise en page était systématiquement associée à la difficulté.

Totaux Filles Garçons Cat. A Cat. B Cat. C Cat. D Justifications négatives Désamour de la lecture 14,3% 11,1% 20,0% 0,0% 16,7% 33,3% 0,0% Désamour de la lecture de pièces 35,7% 38,9% 30,0% 33,3% 33,3% 11,1% 57,1% Difficultés 7,1% 5,6% 10,0% 16,7% 16,7% 0,0% 0,0% Justifications positives Attrait du changement 7,1% 11,1% 0,0% 0,0% 16,7% 11,1% 0,0% Scénarisation 10,7% 0,0% 30,0% 16,7% 0,0% 22,2% 0,0% Amusement 10,7% 16,7% 0,0% 0,0% 0,0% 11,1% 28,6% 0,00% 10,00% 20,00% 30,00% 40,00% 50,00% 60,00% 70,00% Filles Garçons Rés. Négatifs Rés. positifs 0,00% 20,00% 40,00% 60,00% 80,00% 100,00% Cat. A Cat. B Cat. C Cat. D Rés. Négatifs Rés. positifs

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Fig.19

Fig.18

Fig.20 Fig.21

Faire du théâtre

6. a. As-tu déjà fait du théâtre ? Si tu as répondu oui, complète ta réponse.

Filles Garçons Totaux Cat. A Cat. B Cat. C Cat. D Non 28,6% 60,0% 41,7% 33,3% 33,3% 41,7% 55,6% Oui 71,4% 40,0% 58,3% 66,7% 66,7% 58,3% 44,4% Où ? Ecole 66,7% 40,0% 55,6% 50,0% 66,7% 58,3% 44,4% Clubs 0,0% 0,0% 0,0% 0,0% 0,0% 0,0% 0,0% Vacances 4,8% 0,0% 2,8% 16,7% 0,0% 0,0% 0,0% Autres 4,8% 0,0% 2,8% 16,7% 0,0% 0,0% 0,0% Combien de temps ? 1 seule fois 28,6% 13,3% 22,2% 0,0% 22,2% 33,3% 22,2% 1 semaine 23,8% 20,0% 22,2% 50,0% 22,2% 16,7% 11,1% 1 an 14,3% 6,7% 11,1% 0,0% 22,2% 8,3% 11,1% > un an 0,0% 0,0% 0,0% 0,0% 0,0% 0,0% 0,0%

6. b. Si tu y as déjà fait, souhaites-tu en refaire ? Si tu n'y as jamais fait, souhaites-tu en jouer ?

Les élèves n'ayant rien répondu ou écrit « oui et non » ou « bof » ne figurent pas dans ces tableaux : il s'agit d'une fille de la catégorie A, d'une fille et de deux garçons de la catégorie B et d'une fille et deux garçons de la catégorie C.

Sur les 29 élèves ayant répondu à cette question, seuls 26 ont justifié leur réponse, soit 18 filles et 8 garçons ou 6 élèves de la catégorie A, 6 de la catégorie B, 9 de la catégorie C et 5 de la catégorie D. 0,0% 10,0% 20,0% 30,0% 40,0% 50,0% 60,0% 70,0% 80,0% 90,0% Oui Non 0,0% 10,0% 20,0% 30,0% 40,0% 50,0% 60,0% 70,0%

Cat. A Cat. B Cat. C Cat. D

Oui Non

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29

Fig.21

Fig.22 Fig.23

Fig.24

Nous pouvons regrouper ces réponses en trois arguments défavorables au jeu : le désamour du jeu théâtral (« Je n'aime pas jouer du théâtre »), la peur du jeu (« J'ai peur de m'exposer aux autres », « Je suis trop stressé.e », « Je suis beaucoup trop timide », « Je n'arrive pas à jouer un personnage ») et l'apprentissage de textes (« je n'aime pas apprendre des textes »). Nous pouvons regrouper les arguments favorables au jeu théâtral en deux arguments principaux : le plaisir du jeu (« J'aime jouer un rôle », « C'est amusant », « On peut s'exprimer ») et le goût de mettre en scène (« J'aime organiser la mise en scène »). Notons que la peur des autres est fréquemment associée au plaisir du jeu, ce premier argument témoignant plutôt d'un frein au jeu que d'un désintéressement pour celui-ci.

Totaux Filles Garçons Cat. A Cat. B Cat. C Cat. D Justifications négatives Désamour du jeu théâtral 19,2% 5,6% 50,0% 16,7% 16,7% 11,1% 60,0% La peur des autres 42,3% 44,4% 37,5% 50,0% 50,0% 44,4% 20,0% L'apprentissage des textes 7,7% 11,1% 0,0% 16,7% 0,0% 11,1% 0,0% Justifications positives Le plaisir du jeu 34,6% 44,4% 12,5% 50,0% 33,3% 33,3% 20,0% Le goût de mettre en scène 7,7% 5,6% 12,5% 0,0% 0,0% 22,2% 0,0% 0 2 4 6 8 10 12 Filles Garçons Rés. Négatifs Rés. positifs 0 1 2 3 4 5 6 7

Cat. A Cat. B Cat. C Cat. D

Rés. Négatifs Rés. positifs

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30

DISCUSSION

Recontextualisation

Il est donc question de savoir si oui ou non certains éléments du parcours socioculturel des élèves de quatrième entrent en compte de façon discriminante dans le rapport que ces derniers entretiennent avec le théâtre. Après avoir fait part des résultats du questionnaire distribué aux élèves interrogeant l'ambigüité du terme « théâtre », il s'agit de les analyser en étant particulièrement attentif à deux indicateurs : le genre de l'élève et la catégorie socioprofessionnelle des parents. Les entretiens individuels menés avec certains d'entre eux viennent éclaircir ces premières analyses.

Analyse des données

 Observations générales sur les résultats

Les élèves ont été invités à définir le théâtre sans consigne stricte. Lors des entretiens individuels je me suis aperçue que certains l'avaient envisagé exclusivement en tant que spectateurs, d'autres en tant qu'acteurs. Dans tous les cas, le jeu prend une place considérable ; près de 90 % des élèves l'ont entouré, ce qui justifierait des projets tels que ceux évoqués dans les films du préambule et analysés par de nombreux chercheurs. Les trois autres grandes modalités du théâtre - « lire », « écrire » et « regarder » - ont été notées par la moitié des élèves, légèrement moins pour « lire » qui a été relevé par 47,4 % des élèves et légèrement plus pour « regarder » que 57,9 % des élèves ont relevé. L'exposition aux autres fait partie intégrante de leur rapport au théâtre, 63,2 % des élèves l'ont sélectionné. Lors des entrevues, certains m'ont dit que cette idée était pour eux proche de termes comme « effrayant » ou encore « stressant » et pour d'autres de l'excitation ; les regroupements que j'ai effectués dans les résultats sont ainsi à prendre avec précautions puisque j'ai choisi d'amalgamer ce terme avec d'autres relevant de la difficulté du théâtre. Le plaisir et l'ennui ont tous les deux rencontré un succès équivalent. J'ai été agréablement surprise de voir que pour 84,2 % des élèves, le théâtre n'est pas consacré à un certain type de public. Est-ce un effet des relations entre eux et leur enseignante ou les nouvelles générations n'ont-elles plus

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31

le préjugé que le théâtre est réservé à un public bourgeois et vieillissant ? La tranche d'âge vieillissante reste présente dans la représentation de certains élèves mais ce sont les milieux populaires qui sont, selon eux, les plus ciblés. On voit clairement que ce qui a marqué les élèves, ce sont les pièces vues, au théâtre comme à la télé. Peu ont noté de souvenir marquant de pièces lues ou de pièces jouées. Cela résulte-t-il de l'habitude de citer ce que l'on a vu ? d'un oubli réel de ce qui a été lu ou joué ? d'un moindre plaisir ou déplaisir ? Certains ont du mal à définir le terme « pièce de théâtre » ; une élève a noté le titre d'un film et celui ayant vu un spectacle du Cirque du Soleil m'a fait part de son interrogation. L'étayage concernant ce genre aux frontières floues est ainsi nécessaire.

En moyenne, près de 90 % des élèves ont déjà vu du théâtre. Sur les 38 interrogés, un peu plus de la moitié souhaite y aller ou y retourner et seuls trois élèves n'ont pas justifié leur réponse. Le manque d'attirance est le premier facteur du refus de certains élèves à aller ou retourner voir du théâtre. Manque d'habitude ? Manière de justifier le fait de ne pas y aller en famille ? On peut voir que nombre d'élèves ayant répondu positivement sont ceux ayant parlé de l'ambiance des théâtres, ce qui montre bien qu'ils sont aussi les plus habitués à fréquenter ces lieux. La lecture de pièces de théâtre rencontre moins de succès auprès des adolescents. Sur les 38 interrogés, 64,9 % se souviennent en avoir déjà lu et 59,4 % des élèves ne souhaitent pas ou plus en lire. Les justifications sont bien moins nombreuses que pour la partie précédente du questionnaire puisque huit élèves n'ont pas désiré justifier leur réponse. D'une manière générale, il semble plus simple de justifier ce que les élèves aiment que ce qu'ils n'aiment pas. Le manque de goût pour la lecture et la difficulté de lire le théâtre semblent expliquer ce rejet de la lecture de pièces de théâtre. Les problèmes liés à la compréhension sont un des facteurs de discrimination majeurs dans le rapport des élèves à la lecture de pièces et donc une des sources d'inégalités scolaires. Le plaisir de jouer la lecture explique le goût des pièces de théâtre pour d'autres, de même que la rareté de cette pratique. Enfin, 58,3 % des élèves disent avoir déjà fait du théâtre. Les élèves rencontrés lors des entretiens ont entendu faire du théâtre comme synonyme de jouer du théâtre. Le faible taux d'élèves reconnaissant en avoir joué peut s'expliquer par ce qu'ils reconnaissent comme du jeu théâtral qui nécessite, selon les dires d'une élève : une histoire construite, un décor, un vrai travail de jeu et un dispositif frontal, « au moins qu'on voit que c'est du théâtre ». Un détour par une présentation du métier d'acteur semble intéressant en ce qu'il légitimerait

Figure

Fig. 10  Fig. 11
Tab. 11  Lire du théâtre
Tab. 14 Faire du théâtre

Références

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