par
Eric Nicod~me
A thesis submitted to the Faculty of Graduate Studies and
Research in partial fulfilment of the requirements for the degree of Master of Laws
c. Eric Nicod~me
INSTITUTE OF COMPARATIVE LA\J McGILL UNIVERSITY
MONTREAL
Je desire exprimer ma profonde reconnaissance et mes remerciements au professeur J.E.C. BRIERLEY pour ses
conseils, ses directives et sa disponibilite sans lesquels cette these n'eut pu voir le jour.
c
Apprenez la justice, apprenez que vos droits Ne sont point votre vain caprice •••
Cette these est pour nous !'occasion de d~livrer une s§ries d'opinions argument§es de caractere scientifique sur ce que pourrait ou devrait etre le droit international de !'adap-tation contractuelle par un tiers. La question est d'apporter une contribution
a
l'§laboration d'un droit international du commerce autonome et complet. L~ oO cet ordre juridique a d§velopp6 des concepts et des consid6rations personnels et propres, nous les exposerons: quand il reste muet surcertaines questions, nous ferons appel au droit compar§. Ensemble de regles pratiques et d6velopp6s pour la r~alit§ du commerce, ce droit international existe et fonc-tionne dans les ~changes quotidiens: c'est dans ce domaine du fonctionnement concret qu'il est le plus ~labor§ et c'est pourquoi notre premiere partie sera plus longue que la
seconde. Cette derniere, consacr§e
a
la nature des interven-tions de l'arbitre, montrera que les r§flexions des interna-tionalistes ne sont pas tres pouss§es et nous y ferons une analyse comparative destin6e ~ expliquer,a
analyser et ~ reduire le debat ~ des concepts simples et clairs afin de faciliter une reflexion dans ce domaine. Cette partie sera plus courte car peu foisonnante de th§ories et de regles sp§ciales au droit international qui n'a jamais vraiment abord§ cette matiere.-
0-This thesis is for us a way to deliver scientific and structured opinions on what the international law of contrac-tual adaptation by a third party could or should be. The
point is to make a contribution to the development of an
autonomous and complete international business legal order. Where this legal system has created its own specific concepts and considerations, we will explore them; where it remains
silent on certain questions, we will call upon comparative
law.
As a body of practical rules, developed for the reality
of commerce, this international law exists and functions in daily business exchanges. It is most developed in the field
of concrete functioning and this is why our first chapter will
be longer than the second. The latter, devoted to the nature
of the arbitrator's interventions, will show how the inter-nationalists' thoughts on the matter are not yet very
developed. We will make a comparative analysis to explain, analyse and bring the discussion down to simple and clear concepts in order to facilitate further reflexion in this area. This chapter will be less extensive than the first. This aspect of the topic is less rich in distinctive theories because the rules of international law have never really dealt with it.
-c
R:ES UME: • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • iABSTRACT • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • i i
LISTE DES ABREVIATIONS ••••••••••••••••••••••••••••••• vii
INTRODUCTION • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • 1
I. LES TECHNIQUES JURIDIQUES DES INTERVENTIONS DE
L'ARBITRE DANS LE PROCESSUS D'ADAPTATION DES
CONTRATS •••••••••••••••••••••••••••• - . . . 10
A. La r~g1e pacta sunt servanda ••••••••••••••••• 11
a. L'exemp1e du droit fran~ais •••••••••••••• 11
1. Le juge ne peut modifier le contrat ••• 13
2. Le j uge doi t interpr§ter le contrat • • • 14
3. Le droit positif de 1' interpr§tation • • 16
b. L'exemple du droit international... 16
1. Le droit international public... 16
2. Le droit commercial international ••••• 20
B. La clause d'adaptation expresse ou implicite • 24
a. L'exemple du droit fran~ais •••••••••••••• 25
1. La clause expresse de~r§vision •••••••• 25
2. La clause implicite de r§vision ••••••• 26
b. La lex mercatoria... 28
1. La clause expresse de Hardship... 28
• D~finition •••••••••••••••••••••••••• 28 • t-H~canisme • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • 29 i. Premi~re partie de ce m~canisme • 30
ii. Deuxi~me partie de ce mecanisme • 34
2. La clause implicite d'adaptation •••••• 41
c.
Les interventions de l'arbitre et la clauseg~n~rale de droit applicable... 46
a. Application d'un syst~me de droit national 47
1. Le droit fran~ais ••••••••••••••••••••• 47
• La th~orie de l'impr~vision dans
la doctrine civiliste ••••••••••••••• 48
• Les positions de la jurisprudence... 52
i. La jurisprudence c i v i l e . . . 52
i i. La jurisprudence administrative • 53
-• L'~volution du concept de cause ••••• i. evolution de la nature de la
58
cause • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • 58
ii. evolution possible du domaine
de la cause ••••••••••••••••••••• 60
2. Le droit anglais •••••••••••••••••••••• 63
• Fondements juridiques de la
"frustration" ••••••••••••••••••••••• 67 i. La th~orie des implied terms • • • 67 ii. Disparition du fondement du
contrat •••••••••••••••••••••••• 70
iii. "The true meaning of the
contrat" ••••••••••••••••••••••• 71 iv. "The just and reasonable
solution" •••••••••••••••••••••• 71 v. "The radical change in the
obligation" •••••••••••••••••••• 72 • Les conditions d'application de
la "frustration" •••••••••••••••••••• 72 3. Le droit allemand ••••••••••••••••••••• 75 • La doctrine dominante ••••••••••••••• 75 • Fondement juridique de la
Gesch~ftsgrundlage en jurisprudence • 80 • Les conditions d'application de la
Gesch~ftsgrundlage •••••••••••••••••• 82
i. La qualification des
circons-tances . . . . 82
ii. Les effets des circonstances •••• 83 • Le Wegfall de la Gach~ftsgrundlage •• 83 • Le risque . • • . . . • . . . • . . . • . 84
• Unzumutbarkeit ••••••••••••••••.••••• 85 b. Application de la lex mercatoria... 88 c. La situation au Canada... 95 1. Vue d'ensemble •••••••••••••••••••••••• 95 2. Les travaux pr~paratoires ~ la loi
cadre de la CNUDCI •••••••••••••••••••• 97 D. La clause d'amiable composition et
!'interven-tion de l'arbitre •••••••••••••••••••••••••••• 101 a. L'amiable composition en droit allemand
et anglais ••••••••••••••••••••••••••••••• 101 1. Le droit allemand ••••••••••••••••••••• 101 2. Le droit anglais •••••••••••••••••••••• 102
-c
c
1. L'amiable compositeur et le droit... 104 • La qualification de la clause
d'amiable composition... 106 • La possibilit~ pour !'amiable
composition d'appliquer le droit.... 107 • L'~viction du droit par !'amiable
compositeur ••••••••••••••••••••••••• 109 i. Le droit ~vingable •••••••••••••• 109 • Le droit suppl~tif •••••••••••• 110 • Les r~gles imp~ratives de
protection •••••••••••••••••••• Ill ~~. Le droit non ~vingable • • • • • • • • • • 114 • L'amiable compositeur et l'~quit~ ••• 117 i. L' ~quil ibre des prestations • • • • 119 i i. La r~parti tion des risques • • • • • 119 iii. La benne foi des parties... 119 2. L' amiable composi teur et le contrat • • • • • • 121 • Le pouvoir de mod~ration ••••••••••••••• 124 • Le pouvoir de r~vision ••••••••••••••••• 126 II. LA NATURE JURIDIQUE DES INTERVENTIONS DE L'ARBITRE
DANS LE PROCESSUS D'ADAPTATION DES CONTRATS •••••• 132 A. Les crit~res de l'arbitrage juridictionnel ••• 133
a. Les enjeux d'une distinction entre
arbitrage juridictionnel et contractuel • • 136 b. Le crit~re objectif de !'existence d'un
litige . . . • . . . • . . . . 137
1. Le droit frangais • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • 13 7 2. Le droit anglais •••••••••••••••••••••• 141 c. Le crit~re subjectif de la volent~ des
parties . . . . . • • . . . . . . . . . . . . 143
1. Le droit frangais ••••••••••••••••••••• 143 2. La common law • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • 14 8 d. Le crit~re de l'acte createur •••••••••••• 150 B. La specificite de la r~vision contractuelle en
tant qu'arbitrage contractuel •••••••••••••••• 155 a. La perfection contractuelle en droit
compar~ • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • 156
1. Le droit anglais •••••••••••••••••••••• 156 2. Le droit frangais ••••••••••••••••••••• 156
-c
c.
1. Expos~ de cette doctrine •••••••••••••• 2. La critique de cette doctrine ••••••••• • La critique de M. Kassis •••••••••••• • Critique additionnelle •••••••••••••• L'arbitrage contractuel est une expertise
obligatoire ••••••••••••••••••••••••••••••••••
a.
b.
L'expertise en droit compar~ ••••••••••••• 1. Le droit fran~ais ••••••••••••••••••••• 2. Le droit anglais •••••••••••••••••••••• Comment !'expertise acquiert force
obligatoire •••••••••••••••••••••••••••••• 1. La transaction •••••••••••••••••••••••• 2. Le mandat commun •••••••••••••••••••••• Expos~ de cette th~orie ••••••••••••• Critique de cette th~orie ••••••••••• CONCLUSION
.
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. . . .
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NOTES •••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• BIBLIOGRAPHIE •••••••••••••••••••••••••••••••••••••••• vi 158 160 160 163 166 166 166 168 169 170 171 171 174 178 187 205A. C. All E. R. All E. R. Rep. B & S Bau R. BGB BGH Bull. Civ. Cass. Civ. Cass. Corn. Cass. Crim. Cass. Req. C. C. I. C. I. J. C. P. D. D. B. D. IR. D. P.
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Bulletin des arr~ts de la Cour de Cassation fran9aise (chambres civiles)
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Recueil Dalloz-Sirey
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Recueil des Cours de l'Academie de Droit International
Revue Critique de Droit International Prive Recueil des arrets de la Cour supreme du Canada
-R.T.D. Civ. Rev. Trim. Dro. Corn.
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H. L. R. vl. r1.z.
P. 0.Zivilsachen (d~cisions de la Cour supreme de l'Empire, affaires civiles)
Revue Trimestrielle de Droit Civil
Revue Trimestrielle de Droit Commercial Recueil Sirey
Heekly Law Reports
~lertpapier-Mitteilungen (revue allemande) Zivil Prossesrechtliche Ordnung (Proc~dure civile allemande)
-c
Notre but est de d~crire les bases juridiques et les m~canismes qui permettent! l'arbitre d'intervenir dans le processus d'adaptation d'un contrat en cours d'ex~cution. Nous d~sirons §galement pr~senter le d~bat entourant la nature
juridique de ces interventions et exposer certaines contradic-tions et erreurs faites en ce domaine. En d'autres termes, nous allons analyser le fonctionnement des interventions de l'arbitre sur les obligations contractuelles boulevers§es par un changement de circonstances et la nature juridique de ces interventions. Notre d~marche peut sembler curieuse puisqu'en g~n~ral, lorsqu'on ~tudie un dispositif juridique quelconque, on d~bute par sa nature juridique avant de traiter de son r~gime. Nous en avons d~cid~ autrement car dans le domaine
international, la n~cessit§ ~conomique de !'adaptation est n§e de la pratique. Elle a ~t~ §labor~e, utilis§e et consacree par les praticiens du commerce international qui ont ainsi secret§ un ph§nom~ne n~cessaire et l'ont fait fonctionner avant meme de la conceptualiser, ! travers une r§flexion sur son essence. Le besoin de la pratique internationale, tendant vers plus de flexibilit~ et de souplesse contractuelles a une origine et des cons~quences tr~s importantes. La cause
profonde du d~veloppement des m~canismes juridiques interna-tionaux, analyses ici, est li~e au probl~me du long terme. La dur~e de certains contrats permet en effet de penser que leur
ex~cution soul~vera des difficult~s croissantes quant
a
leur but ou objet et quanta
l'~quilibre ~conomique des prestations r~ciproquesl.Les contrats s'ins~rent dans un environnement politique et industriel en mutation constante, g~n~rateur de lourdes incertitudes: conflits entre pays producteurs et pays consom-mateurs, changement dans les conditions du march~, innovations
techniques et variations de parit~ des unit~s mon~taires. Ces contrats
a
long terme pr~sentent selon certains auteurs des caract~ristiques propres que la th~orie juridique commencea
peinea
d~gager2. Les distinctions traditionnelles entre les diff~rentes cat~gories de contrat connaissent certes!'opposition entre les contrats
a
ex~cution instantan~e et les contratsa
execution successive, mais la th~orie classique est loin d'avoir d~couvert toutes les virtualites de cettedistinction. La pratique internationale, amenee
a
reflechir sur la question de !'adaptation en raison du facteur temps, a eu pour cons~quence un enrichissement considerable de la typologie des contrats internationaux3.Le nombre de figures contractuelles internationales peut se classer en trois cat~gories. Il y a tout d'abord les contrats d'echange qui ont ete longtemps les principaux
contrats et qui restent les mieux connus: ce sont les contrats ou on echange une prestation en nature, biens ou services, contre une somme d'argent et dont !'execution est instantanee ou se d~roule sur une courte periode de temps. Il y a ensuite
c
les contrats de production oQ on rencontre des prestations en nature mais ~galement des prestations financieres ou deservices. Ils se caract~risent par leur finalit~ qui est la creation d'une entreprise de production destinee ~ donner aux rapports des parties un caractere de permanence, done de
longue duree. Il y a finalement les contrats d'approvisionne-ment, il s'agit de vendre un produit consommable mais de fa~on repetitive et renouvelable de fa~on quasi-illimitee.
Pour les contrats d'echange, !'execution est instanta-nee et de courte duree, les parties sent presumees avoir accepte de supporter les risques de l'imprevu ou d'en benefi-cier. Ils sent en ce sens speculatifs. Quant aux contrats de de production et d'approvisionnement, !'intention d'un pari chez les cocontractants sur les aleas du futur est inconce-vable en raison meme de leur longue duree. Comme !'observe
n.
Khan, !'incidence du temps est une donnee essentielle qui oppose la premiere categorie aux deux autres, car une chose est certaine: "Le temps va modifier considerablement les conditions d'execution du contrat par rapport ~ celles qui sent envisagees au moment de sa conclusion. Et ce n'est sans doute pas le moindre paradoxe que l'on rencontre dans ces operations, que le contrat qui est destin~ ~ stabiliser les relations entre les parties pour la mattrise du temps soit condamne d'emblee ~ ne pouvoir remplir son r6le"4. On peut done affirmer que la nature meme de ces contrats non specula-tits commande que les prestations objets des obligations desc
parties et la cause subjective en vertu de laquelle chacun s'est engag~, restent ~quilibr~es et permanentes durant 11ex~cution comme lors de la formation. Nous nous situonsdone ici au niveau de l'ex~cution des obligations contrac-tuelles dans un contexte qui fait que le contrat va ~tre perturb~ par des ~v~nements extrins~ques g~n~ralement non pr§visibles, les parties d~sirant ardemment maintenir le lien ~conomique, la relation d'affaires en raison de l'int~r~t sup§rieur qui soutend le contrat. Devant cette situation oO des parties veulent maintenir un contrat en raison de son enjeu global mais ne peuvent plus accepter ses modalit~s, la solution id~ale n'est ni dans la continuit~, ni dans l'ex~cu-tion scrupuleuse et immuable de ces modalit§s, ni dans la r~solution.
La solution est la continuit~ dans le changement, ~ savoir, !'adaptation du contrat pour en r~tablir l'~quilibre et le but. Ne perdons pas de vue que, comme nous venons de le voir, certains contrats internationaux, ceux de longue dur~e en raison de l'op~ration commerciale particuli~re qu'ils organisent, ne sont que les maillons d'une relation plus
importante qui d~passe le droit et va jusqu'a la politique et aux relations diplomatiques. Le maintien du contrat sous une forme adapt~e est un besoin ~conomique qui s'impose au droit des contrats. Comme 11affirme M. Goldman "dans des contrats
relatifs a la production et peut-~tre m~me aussi dans les contrats d'approvisionnement ~ long terme, le maintien de
c
l'~quilibre des prestations est conforme aux besoins sp~ci fiques des relations ~conomiques internationales"S.L'arbitre va ainsi souvent se voir confront~ ~ une situation contractuelle ~ adapter. Que devra-t-il alors faire? Sa position est ~ priori tr~s claire: appel~ par les parties pour r~gler une contestation ou se prononcer sur une question relative
a
un contrat ~conomiquement boulevers~, il devra accomplir sa mission en se ref~rant ~ la volont~ de ces parties telle qu'elle s'exprime dans les compromis, la clause compromissoire oa la clause sp~ciale et particuli~re d'attri-bution de comp~tence. Certes, comme nous le verrons, cet arbitre peut exercer un pouvoir autonome variant selon la sp~cificit~ que les parties ont donn~e aux termes, conditions et limites de sa mission d'adaptation. La volont~ des parties prime sur les pouvoirs de l'arbitre et c'est pourquoi nous devrons contamment nous r~f~rer ~ cette volont~ expresse,implicite ou interpr~t~e pour d~c~ler si les parties ont voulu et pr~vu cette adaptation. Une fois que nous aurons d~crit et expos~ les diff~rentes formes que peut prendre !'intervention d'un arbitre dans le processus d'adaptation qui, nous le
rappellons, est le fruit de la pratique en tant que celle-ci enregistre et r~percute les besoins de la communaut~ commer-ciale internationale, nous nous interrogerons sur la nature de la mission de cet arbitre. Si nous savons
a
ce momenta
quel titre et comment cet arbitre va appr~hender un contratc
d~cision et celle-ci d~pend de la nature juridictionnelle ou contratuelle de sa mission. L'enjeu de cette question n'est pas th~orique mais tres concret: si l'arbitre agit contrac-tuellement, sa d~cision n'aura de force obligatoire qu'en tant qu'elle s'integre au contrat et pour ce faire !'accord des parties est n~cessaire sur le contenu de cette d~cision; s'il agit juridictionnellement, sa d~cision est une sentence et s'applique aux parties en vertu de l'autorit~ de la chose jug~e et si celles-ci possedent des recours contre cetted~cision, ils ne pourront la d~fier que par les voies !~gales trac~es par les conventions internationales ou les proc~dures nationales pertinentes et non en la refusant. Cette nature
juridique des actes arbitraux va ~galement d~finir l'~tendue de ces pouvoirs en matiere d'adaptation. Si l'interpr~tation d'un contrat, la constatation d'un bouleversement et
l'evic-tion d'un droit contractuel sont qualifiees d'activite
contractuelle ou juridictionnelle, ceci se fait par rapport au critere du litige et de la volonte des parties. Si par
contre, l'arbitre est appele
a
creer de nouvelles obligations,a
substituer de nouvelles clauses aux clauses bouleversees, alors le critere de l'acte cr~atif va rejeter cette activite dans la sphere contractuelle. La question ~tant que l'arbitre ne peut pas se substituer aux parties dans la creation d'obli-gation, tout le probleme sera de savoir si !'adaptation est vraiment une creation. Le critere de la fonction creative depasse la volonte des parties; il esta
la base de lac
,·_,
y
d~finition de l'acte de l'arbitre. Si un syst~me juridique donne interdit
a
tout organe juridictionnel de creer des obligations nouvelles, l'arbitre sera qualifie de mandataire et sa tache sera alors contractuelle. L'arbitre verra alors sa nature juridique varier selon l'acte qu'il a missiond'effectuer lors du processus d'adaptation contractuelle. Nos deux parties seront done consacr~es chacune
a
une desquestions que nous venons de presenter.
La premi~re exposera les techniques juridiques d'inter-vention de l'arbitre lors d'un bouleversernent de l'economie contractuelle. Elle sera principalement consacree au droit substantiel de !'adaptation tel que cree, voulu ou designe par les parties. Nous verrons successivement comment !'adaptation se situe par rapport au principe pacta sunt servanda de la force obligatoire des conventions, nous citerons des exemples de droit compare et de droit international etablissant la realite de cette r~gle. Nous verrons ensuite comment elle peut ~tre ou semble ~tre appliqu~e et fa9onnee
a
travers la volonte des parties telle qu'elle s'est exprimee dans uneclause expresse ou implicite d'adaptation, une clause generale de droit applicable et une clause d'amiable composition.
L'arbitre est lie
a
la volent~ des parties et doit suivre en mati~re d'adaptation contractuelle un chemin trace par les cocontractants et jalonne par le droit.Dans la seconde partie, nous essaierons de cerner la nature juridique des actes de l'arbitre lorsqu'il intervient dans le processus d'adaptation d'un contrat, en d'autres
c
termes, nous chercherons ~ approcher leurs qualifications intrins~ques. Nous verrons la distinction entre l'arbitrage contractual et l'arbitrage de proc~dure civile en passant en revue les crit~res du litige, de la volont~ des parties et de l'acte cr~ateur, en examinant leur valeur en droit compar~. Nous ~vacuerons la question des lacunes contractuelles en tant que li~e ~ la formation d'un contrat et objet de confusion doctrinale. · Nous essaierons de cerner la d~finition de la nature juridique d'une intervention arbitrale particuliere: la r~vision du contrat pour l'avenir et concluerons par voied'~limination qu'elle est un arbitrage contractual et non une perfection contractuelle. Nous verrons comment on peut
finalement conclure que l'arbitrage contractual peut @tre une expertise obligatoire.
Afin d'~viter toute confusion, nous d~sirons apporter l'~claircissement suivant: notre travail a pour but de contri-buer
a
l'~laboration du droit international. Le probleme de !'adaptation des contrats boulevers~s est central dans led~bat doctrinal sur le droit international des contrats. Nous
n'avons pas choisi de pr~senter et d'analyser les tenants et les aboutissants de ce probl~me, mais de nous limiter au r5le de l'arbitre dans ce processus. Comment se d~roulent, se
justifient et se qualifient les diff~rentes interventions de cet arbitre dans le m~canisme de renouvellement des clauses d'un contrat?
Comme tous les. secteurs du droit commercial interna-tional, celui que nous avons choisi est un ensemble het~rogene
c
'""""""'
~
de r~gles et de techniques, certaines ~tant cr~~es par les praticiens internationaux et d'autres emprunt~es aux droits nationaux par le biais du droit compar~. C'est pourquoi nous allons nous r~f~rer au droit compar~ 1! ou les op~rateurs du commerce international le d~sirent et 1! on les lacunes du droit international nous y obligent. Nous ferons des r~f~-rences constantes aux droits fran~ais, allemand et anglais. Nous verrons ~galement de fa~on br~ve mais synth~tique comment les droits canadien et qu~b~cois se positionnent sur certaines questions que nous allons d~velopper maintenant.
D€butons done la premi~re partie sur la pratique et les diff~rentes interventions que l'arbitre peut avoir
a
faire. Notons que notre champ d'investigation est celui de l'inter-vention d'un arbitre lorsque le· contrat est €conomiquement boulevers~. Le contrat a perdu sa viabilit€ mais doit conti-nuer, en raison d'un int~ret politico-~conomique sup€rieur,a
exister dans les rapports entre les parties. Ces parties peuvent opter pour !'adaptation des modalit€s contractuelles et ainsi maintenir le contrat tout en en changeant le contenu. Elles peuvent alors demandera
un arbitre d'intervenir,a
un degre ou un autre, dans ce processus. Ce sont ces interven-tions que nous voulons ici examiner. Nous verrons comment l'arbitre, en restant liea
la volont~ des parties, peutinterpr~ter un contrat dans le sens d'une reconnaissance de la volont~ des parties en faveur de !'adaptation, constater le bouleversement du contrat, renvoyer le contrat aux parties pour ren~gociation ou se livrer lui-meme
a
!'adaptation.c
I . LES TECHNIQUES JURIDIOUES DES INTERVENTIONS DEL'ARBITRE DAMS LE PROCESSUS D'ADAPTATION DES CONTRATS
Personne ne discute que l'arbitre tient ses pouvoirs d'une convention. Ce sont les parties qui fixent l'~tendue et le but de la mission de ce dernier. Une seule question vient d~ranger l'apparente simplicit~ de cette affirmation: que fait l'arbitre lorsqu'il n'a pas re~u de mandat expr~s? Autrement dit, est-ce que la volont~ des parties doit ~tre claire et exprim~e en d~tails pour conditionner !'intervention de l'arbitre?
Nous verrons que la clause qui institue cette interven-tion peut-~tre expresse et alors le travail du tiers est
r~duit ~ suivre les pr~cisions et les ordres des parties.
Nous verrons ~galement que cette clause peut ~tre implicite, ~ savoir que l'arbitre va interpr€ter le contrat et ~ travers lui, la volont€ supposement r€elle des parties. Nous verrons comment en dehors de toute r~f€rence expresse ou implicite ~ !'adaptation, l'arbitre peut trouver dans la clause contrac-tuelle de droit applicable, des references ~ des syst~mes et des ordres juridiques qui reconnaissent ~ !'adaptation le caract~re d'une r~gle de droit, d'une norme applicable sans ref~rence ~ la loi d'autonomie. Selon le systeme choisi,
l'arbitre pourra ou non appliquer la th€orie du bouleversement contractueli il pourra ou non intervenir dans le processus d'adaptation. Nous verrons ensuite comment le choix fait par les parties de confier ~ l'arbitre une mission d'amiable
composition peut s'interpr~ter comme une autorisation impli-cite donn~e ! l'amiable compositeur d'~carter les droits subjectifs l~gaux ou contractuels des parties, de mod~rer au nom de l'~quit~ !'application du contrat tel que form~. Ce choix entratne pour certains la reconnaissance d'un pouvoir d'adaptation du contrat pour l'avenir en faveur de l'arbitre.
Nous allons d~buter par un expos~ du principe pacta sunt servanda tel qu'il est forg~ par le droit frangais et les diff~rents secteurs du droit international. Cet expos~ est destin~ ! montrer comment le principe de la force obliga-toire des conventions form~es peut etre intangible et
apparemment en contradiction avec toute adaptation, surtout lorsque celle-ci fait intervenir un arbitre ~tranger au contrat. Nous verrons que si ce principe est une norme fondamentale, elle n'est pas d'ordre public et ne sert qu'~ assurer la s~curit~ des parties pour les prot~ger.
A. La r~gle pacta sunt servanda
Ce principe est tellement reconnu I travers les syst@mes juridiques nationaux que l'~tude du seul droit fran9ais nous semble suffire.
a. L•exemple du droit francais
Dans le droit fran9ais, il r~sulte de !'article 1165 du Code civil que les conventions ont effets entre les parties
c
contractantes et !'article 1134, renfor~ant cette id~e,dispose que les conventions l~galement form~es tiennent lieu de loi ~ ceux qui les ont faites. Il n'est pas possible de mieux exprimer la force des obligations n~es de !'accord des volont~s que ne le font ces mots: "tiennent lieu de loi". Cette formule ~nergique signifie que chaque contractant est li~ par le contrat comme il le serait si son obligation lui ~tait impos~e par la loi: les parties doivent s~ conformer aux contrats tout comme elles sont tenues de respecter les lois proprement dites. L'article 1134 exprime l'id~e que le contrat n'a effet qu'entre les parties alors que la loi qui ~mane de l'autorit~ publique a par d~finition une port~e
g~n~rale. Ceci signifie que le contrat peut l'emporter sur la loi l~gislative lorsque celle-ci est simplement interpr~tative ou suppl~tive et que le l~gislateur ne doit pas en principe modifier un contrat en cours, car !'obligation contractuelle modifi~e tirerait son autorit~ non plus de la volont~ des parties mais de cette loi. D'apr~s la doctrine classique ~ base individualiste et consensualiste, la r~gle de !'article 1134 a pour valeur fondamentale la volont~ individuelle comme source de droit. Cette doctrine en d~duit trois cons~quences: le contrat a force obligatoire pour les parties qui l'ont
conclu; le contrat a force obligatoire pour le juge charg~ de le faire appliquer et le contrat a m@me une force s'imposant
a
c
Ce principe entratne trois effets: !'obligationd'ex~cution avec les exceptions connues des articles 1147 et ll48J l'irr~vocabilit~ du contrat: de m@me qu'une loi ne peut @tre abrog~e que par une autre loi, de m@me les parties sont en principe li~es par leur contrat jusqu'a ce qu'un nouvel accord vienne d~truire le premier1 l'ex~cution de bonne foi des conventions, ceci impliquant une obligation da loyaut~ et de coop~ration excluant toute r~siliation non mutuelle ou unilat~rale sauf si pr~vu par le contrat lui-m@me. Ce
principe entratne aussi deux cons~quences: seules des regles d'ordre public et imp~ratives peuvent s'imposer ~ la volont~ des parties, le juge ne peut interpr6ter la convention que dans l'optique de rechercher quelle a ~t6 la commune intention des parties, donnant ainsi une interpr~tation restrictive a l'article 1135.
Si les parties n'ex~cutent pas volontairement le contrat, c'est au juge que le cr~ancier s'adressera pour obtenir l'ordre d'ex6cution fore~. Or le juge, intervenant pour donner force ex~cutoire aux obligations non assum~es, est li~ par le contrat, comme il le serait par la loi. Ceci
comporte deux cons6quences principales: le juge ne peut modifier le contrat et il doit l'interpr6ter.
1. Le juge ne peut modifier le contrat
Si la volont~ des parties est claire, le juge ne peut refuser de l'appliquer1 il ne peut 6carter les clauses d'un
contrat, ni les modifier sous pr~texte meme qu'elles seraient contraires
a
l'~quit~ ou a l'ordre public, car dans ce cas le contrat doit etre annul§ mais non adapt€.2. Le juge doit interpr6ter le contrat
Si une difficult€ surgit sur le sens d'un contrat, le juge doit trancher le diff~rend; il ne peut refuser de faire appliquer le contrat sous pr~texte d'obscurit§6. Cette
interpr€tation est l'oeuvre du juge du fond. Deux m~thodes antagonistes sent en pr~sence. La premi~re, inspir§e par la th~orie de l'autonomie de la volent§, fait du juge le servi-teur de la volent§ des parties. Interpr~ter, c'est d€terminer le contenu du contrat, et le contenu, c'est la volent§ des parties qui l'a er~~. Telle est d'ailleurs la r~gle pos~e par !'article 11567. La doctrine classique limite le plus
possible le rOle des diff~rents §l§ments d'interpr~tation que la loi elle-meme a donn€s au juge en dehors de· la volent~ des parties. Ainsi, !'article 1134, alin~a 3, aux termes duquel les conventions doivent etre ex§cut§es de bonne foi, n'est interpr€t~ qu•a travers !'intention des parties; la bonne foi n'est autre chose que le respect consciencieux de ce qu'elles ont voulu par le contrat. Cette doctrine amenuise encore plus !'article 1135 en vertu duquel les conventions obligent non seulement a ce qui est exprim~, mais encore
a
toutes lessuites que l'~quit~, l'usage ou la loi donnent
a
!'obligation d'apr~s sa nature. La loi, dit-on, c'est la loiinterpr€ta-tive, celle que les parties ont eu le pouvoir de modifier par
leur convention. L'usage est ~galement ! base
convention-nelle, il repose sur une convention tacite et enfin !'~quit~
se pr~sente comme la bonne foi vis~e par !'article 1134, comme
~tant elle-meme un prolongement de la volont~ des parties. La
m~thode classique a ~t~ affect~e par les critiques formul~es
contre la th~orie de l'autonomie de la volont~ qui est ! sa
baseS. On a fait remarquer combien il peut etre artificial
de rechercher syst~matiquement l'interpr~tation du contrat
dans la commune intention des parties. Les parties, tres
souvent, n'ont pas su ce qu'elles voulaient exactement, et
plus souvent encore, elles n'ont pas eu la moindre volont~ sur
quantit~ de points soulev~s par le contrat. Cette m~thode
aboutit! preter aux cocontractants des intentions qu'ils n'ont probablement pas eues.
La seconde m~thode, inspir~e par la doctrine sociale,
est favorable ! l'accroissement des pouvoirs du juge. Le
contrat ne doit pas etre interpr~t~ par lui en se fondant sur
une volont~ commune souvent hypoth~tique, mais se.lon la bonne
foi, l'~quit~, les usages, compris comme des notions
objec-tives, qui sont sup~rieures! !'intention des parties alors
que la doctrine classique considere que ces notions prolongent
en quelque sorte la volont~ des parties. Dans cette these
sociale, on ne nie pas le role de la volont~ lorsque celle-ci
peut etre clairement d~gag~e: on admet la volont~ tacite,
d'une commune entente possible entre elles, mais ce qu'on n'admet pas, c'est que le juge invente des volont~s fictives et attribue ~ la volont~ commune des parties des volont~s qui, en r~alit~, lui sont personnelles.
3. Le droit positif de l'interpr6tation
Lorsqu'une clause a ~t~ valablement accept~e par les deux parties et qu'elle est claire et precise, elle doit etre appliqu~e telle quelle. En principe, il n'y a pas de place pour l'interpr~tation d'un contrat r~velant par sa lettre et son esprit, la commune intention des parties. Nous verrons plus loin comment la mise en oeuvre de la th6orie classique d~bouche finalement sur la reconnaissance au juge d'un pouvoir de modification et de construction du contrat ~ travers le concept de clause implicite ou pr~sumee. Il n'en reste pas moins que le juge en droit fran9ais reste li~ ~ la volont~ des parties et au principe pacta sunt servanda; ce juge n'a pas de pouvoir g6n~ral et reconnu d'adaptation contractuelle. La r~f~rence proche ou lointaine, expresse ou pr~sum~e ~ la volont~ des 'parties et ~ la force de cette volont~ telle que fix~e par le contrat, est un imp§ratif absolu.
b. L'exemple du droit international 1. Le droit international public
Dans sa th~orie normativiste, Kelsen explique le
c
,-.
~
une loi dite "loi de normativit~". Formant un systeme, les normes juridiques sont ordonn~es et hi~rarchis~es. En vertu de cette hi~rarchie, chaque norme sert de fondement a une
norme inf~rieure, chaque norme tire sa force obligatoire d'une norme sup~rieure. D'~tage en ~tage on s'~leve jusqu•a une norme supr~me, fondamentale ou originaire, qui se situe au sommet de la hi~rarchie et qui est le fondement du systeme tout entier. Celui-ci est comparable
a
une pyramide: la pyramide juridique. Dans l'ordre interne, la norme fondamen-tale est la Constitution. Dans l'ordre international, le fondement de la force obligatoire des conventions repose sur le principe pacta sunt. servanda. Consid~rant que celui-ci est un principe du droit international coutumier, Kelsen admet que le droit conventionnel, dans la hi~rarchie des normes juri-diques internationales, est situ~ au-dessous du droit coutu-mier. Pacta sunt servanda est ainsi une regle s'imposant aux parties et a taus les intervenants, elle leur est sup~rieure par essence et s'applique comme une norme imp~rative. Cette th~orie qui s'oppose au volontarisme ~tatique suppose plus qu'elle ne prouve !'existence de cette norme sup~rieure. Nous sommes ici dans le domaine du postulat, de l'hypotheseind~montrable.
Avec Georges Scelle on passe
a
des theses positivistes. Le droit serait fond~ sur les n~cessit~s sociales desquelles d~riventa
la fois son contenu et son caractere obligatoire.La transformation de la norme sociale en norme juridique se r~alise quand la masse des individus qui composent le corps
social a conscience qu'elle est importante a la vie en groupe, tellement essentielle
a
la dafense de la solidarite sociale que !'intervention de la contrainte pour sanctionner saviolation devient socialement nacessaire. Ainsi, le droit est defini comme un imperatif social traduisant une necessite nee de la solidarite naturelle.
La doctrine positiviste reconnatt aux conventions une force obligatoire en tant qu'elles representent une necessite economique, commerciale ou sociale.
Nous avons presente deux theories differentes qui arrivent cependant au m~me resultat: !'existence et la force obligatoire du principe pacta sunt servanda. Les deux
exemples doctrinaux demontrent que ce principe est central dans la pensee internationale. Il ne nous appartenait pas bien sOr ici de prendre parti pour l'une ou !'autre de ces constructions theoriques, mais de montrer qu'elles posent la m@me r~gle juridique fondamentale.
Les auteurs ne sont pas les seuls a avoir reconnu la necessite du principe pacta sunt servanda comme element central du droit des conventions; la jurisprudence interna-tionale a egalement reconnu ce besoin9. Cette derni~re lie generalement etroitement le principe pacta sunt servanda et la r~gle de la bonne foi. La sentence de la CIJ du 2 fevrier 1973 declare que "dans le cas oQ un traite est partiellement execute et partiellement executoire et oQ l'une des parties a deja beneficie des dispositions executees, il serait
... ,-. ~
particulierement inadmissible d'autoriser cette partie ~ mettre fin ~ des obligations qu'elle a accept~es en vertu du
trait~"lO.
L'arr@t de la Cour d'Arbitrage du 7 septembre 1910 invoque "le principe du droit international selon lequel les conventions doivent @tre ex~cut~es avec une bonne foi
parfaite"ll.
L'ex~cution de bonne foi et le respect de la force obligatoire des conventions sont les deux aspects compl~men-taires du principe pacta sunt servanda. Dans son article 26 intitul~ Pacta sunt servanda, la Convention de Vienne sur le droit des trait~s dispose que "tout trait~ en vigueur lie les parties et doit @tre ex~cut~ par elles de bonne foi". Ce principe de bonne foi prend un relief particulier dans la formule g~n~rale de !'article 18 de la m@me convention qui le d~finit de,la fa9on suivante: "s'abstenir de tout acte visant ~ r~duire ~ n~ant l'objet et le but d'un trait~". L'article 56 consacre l'illic~it~ de la d~nonciation- r~pudiation ~ savoir !'extinction des obligations et l'exon~ration de son responsable sur simple d~cision unilat~rale. L'etat signa-taire se voit ainsi diminuer dans sa souverainet~ par la regle pacta sunt servanda. Que ce soient la doctrine, par le biais 'de la coutume ou de la n~cessit~ sociale, la jurisprudence
dans plusieurs arrets ou le droit international, tel que codifi~ par la Convention de Vienne, le droit international public reconna!t la valeur et l'autorit~ absolue du principe de la force obligatoire des Accords.
2. Le droit commercial international
Certains auteurs observent que les parties ~ un contrat international en respectent les clauses parce que chacune
estime non seulement que la loi €tatique dont elle rel~ve l'y contraint mais aussi qu'elle est li€e par .la conscience d'une r~gle commune du commerce international tr~s simplement
exprim€e dans l'adage pacta sunt servandal2.
On devrait logiquement inf€rer de ce raisonnement que les clauses des contrats types propres ~ certaines professions et des usages codifi€s ne sont pas en elles-memes des r~gles de droit, n'ayant pas de force obligatoire propre, mais que la r~gle de droit, celle qui leur conf~re la force obligatoire.de clauses devenues, une fois choisies, des clauses
contrac-tuelles, c'est la r~gle pacta sunt servanda, ~ supposer que celle-ci soit une r~gle sp€cifique du commerce international, diff€rente de ses homologues des droits €tatiques. Dans cette perspective, on devrait abandonner l'id€e que les contrats types et les usages sont des normes g€n€rales et formuler la
th~se que la lex mercatoria se r~duit
a
une seule r~gle danslaquelle se condense le droit transnational des contrats: pacta sunt servanda. Il serait contradictoire, en effet, que les contrats types et les usages scient des r~gles de droit jouissant d'une force obligatoire intrins~que et qu'ils aient besoin, en meme temps, une fois choisis, de tirer leur force obligatoire d'une autre r~gle de droit.
En ce qui concerne la nature et l'origine de cette r~gle, Goldman la situe dans le domaine de la lex mercatoria en tant que principe g~n~ral du droit proprement ditl3,
D'autres auteurs font la proposition suivante: ne serait-il pas plus en accord avec la r~alit~ et meme avec la psychologie des participants au commerce international de dire que pacta sunt servanda est tellement commune aux diff~rents syst~mes nationaux qu'elle est devenue un principe g~n~ral de tousles droits nationaux et du.droit international public, si bien qu'elle est admise comme une sorte d'~vidence juridique universelle et qu'on ne con9oit meme pas qu'elle puisse etre mise en doute sur un point de droit quelconque? De sorte que la question ne se pose meme pas dans !'esprit des praticiens du commer9e international de la d~tacher des droits
nationauxl4. Apr~s tout, pourquoi pacta sunt servanda,
cette r~gle du commerce international, ne serait-elle pas la r~gle commune des syst~mes juridiques connus plut8t que celle d'un syst~me nouveau et controvers~lS.
Tenir une telle ligne, c'est bien sOr nier la sp~cifi cit~ d'un ordre juridique propre au commerce international: c'est rattacher !'ensemble des activit~s de cette sph~re
a
des droits nationaux, niant ainsi toute intern~tionalisation~ventuelle du "contrat international".
Nous mettons pour !'instant de cat~ ces d~veloppements th~oriques et affirmons que le principe pacta sunt servanda
est, quelle que soit son origine, respect~ et r~affirm~ par les auteurs et les arbitres. Meme ceux qui contestent
!'existence d'un ordre transnational ne remettent pas en cause la port~e et le caract~re imp~ratif de ce principe dans le domaine des contrats internationauxl6.
Dans l'affaire Texaco c. Libye17, le juge unique
affirme que la r~gle pacta sunt servanda est la base meme de toute relation·contractuelle en d~clarant qu'il convient de voir dans cette maxime un principe fondamental du droit se r~f~rant explicitement au professeur Jessup. D'autres sentences arbitrales ont affirm~ de mani~re vigoureuse la
r~alit~ de ce principe et sa force dans le domaine contractuel international. Les tres c~lebres sentences Aramco et
Sapphirel8 affirment que c'est un principe fondamental du droit constamment proclam~ par les juridictions interna-tionales, que les engagements contractuels doivent etre respect~s et interpr~t~s strictement.
Nous voyons done que la volent~ des parties ~rig~e, dans le contexte du consensualisme, en principe absolu du droit des contrats imprime aux conventions priv~es la force obligatoire d'application. Cette force, bien r~sum~e dans le principe pacta sunt servanda, s'impose aux parties elles-rnemes mais ~galement au juge et ~ l'arbitre qui doivent en toutes circonstances s'y r~f~rer lorsqu'ils ~valuent ou interpretent un contrat.
Reposant sur la volent~ des parties, le contrat ne peut logiquement etre modifi~ ou adopt~ sans leur accord. Si cette volent~ s'exprime apr~s la conclusion du contrat, a travers une suppression de celui-ci ou une ren~gociation, il n'y a aucun problE!me. Toute la question est de savoir si les parties peuvent, et si oui comment, pr~voir ou laisser
entendre lors de la conclusion du contrat qu'a la survenance de certains ~v~nements d~stabilisant l'~quilibre ~conomique conventionnel, !'adaptation pourra etre r~clam~e et d~clench~e directement sur la base de la clause l'ayant organis~e, pr~vue ou inf~r~e. L'arbitre, ou le juge, va voir sa mission fix~e avec plus ou moins de pr€cisions, ses pouvoirs et son inter-vention sur le contrat pouvant etre contest€ lorsque l'adapta-tion n'a pas fait l'objet d'une clause expresse, il existe de nombreuses techniques diff€rentes de la clauses expresse,
claire et pr~cise, qu'un arbitre peut utiliser pour d€duire la volent~ d'adaptation des parties. La question est alors de savoir si ces d~ductions ne sont pas finalement des m~sinter-pr~tations et des extensions trop grandes de la recherche de la volent~ des parties. Nous allons passer trois types de clauses en revue: les clauses expresses ou implicites
d'adaptation, les clauses g~n~rales de droit applicable et la clause d'amiable composition. Le premier type de clause est celui ou les parties ont vis~ express~ment ou implicitement !'adaptation. Lorsqu'elle est expresse, la clause r~gle minutieusement le m~canisme de !'adaptation
a
travers ses. '
!
r
'-"·
.· ...second type de clauses est celui oQ les parties ont sou !'ensemble du contrat ! un syst~me juridique donn~. Unt adaptation pourra etre d~clench~e ou op~r~e par l'arbitr le syst~me choisi reconna!t !'adaptation judiciaire sur l
base du bouleversement contractual. Le troisi~me type de clauses est une clause d'arbitrage en amiable composition renon9ant ! !'application du droit subjectif, les parties demandent
a
l'arbitre de r~gler les probl~mes soulev~s parl'ex~cution du contrat selon l'~quit~. Cet arbitre, lib~r~ droit, est-il alors investi d'un pouvoir lui permettant
d'intervenir
a
un degr~ ~uelconque dans le processus d'adaptc tion du contrat?Quoi qu'il en soit, l'arbitre ne pourra intervenir dans le processus d'adaptation que sur la base d'une clause expri-mant la volent~ des parties. Dans tous les cas, il est li~ par la force obligatoire de ce pacte et ne peut agir en dehors de lui.
B. La clause d'adaptation expresse ou implicite
Nous allons analyser ici comment fonctionne cette clause expresse qualif~e en droit fran9ais de clause de r~vision et en droit international de clause de "Hardship". Nous verrons aussi comment l'arbitre peut interpr~ter la
volont~ des parties et la nature du contrat pour pr~sumer une telle clause.
a. L'exemple du droit francais
1. La clause expresse de r6vision
Les parties peuvent songer ~ se pr~munir elles-m~mes des cons~quences des changements de circonstances ~conomiques qui sont inh~rentes aux contrats non sp~culatifs de longue dur~e. C'est surtout en mati~re de d~pr~ciation mon~taire que de telles clauses interviennent. C'est en effet dans ce
domaine que s'est d~velopp~ le syst~me des clauses d'indexa-tion ou d'~chelle mobile: les parties tendent ~ pallier les cons~quences n~fastes de la d~pr~ciation mon~taire en ins~rant dans les contrats des clauses ·pr~voyant la variation des
prestations p~cuniaires. La r~vision et !'adaptation sont ainsi effectu~es par l'effet du contrat lui-m~mel9: le rnontant de !'obligation en sornme d'argent variera de plein droit, sans intervention du juge, en fonction de la variation des indices auxquels les contractants se sont r~f~r~s. Apres une p~riode d'h~sitation, un c~lebre arr~t de la Cour de
cassation a admis d'une rnani~re lib~rale la validit~ des indexations20. Ici, le r6le du juge ou de l'arbitre est r~duit ~ sa plus simple expression: forcer, en cas de refus, une partie r~calcitrante ~ op~rer !'indexation qui s'impose aux parties en vertu du principe pacta sunt servanda.
c
c
2. La clause implicite de rlvision
Le souci de faire pr~valoir la volont~ r~elle des
contractants conduit la jurisprudence
a
6carter ~·application litt~rale d'une clause, meme claire et pr8cise, qui parait le r6sultat d'une erreur manifeste et est en contradiction avec leur intention commune et certaine21. Un contrat, dont les clauses sont pourtant claires, peut devenir d6fectueux parce que certaines bases sur lesquelles les parties ont ~difi€ leur convention n'existent pas. Cette situation se pr6sente, par exemple,a
la suite de la cessation de la publication d'un indice dont €tait fonction une clause d'6chelle mobile. Le juge ou l'arbitre doit done red~finir un indice conforme au but et contenu de celui qui a disparu, pour ce faire, il interpr~te la volont~ des parties puisqu'il ne peut plus se bornera
l'appliquer litt6ralement. Techniquement, le juge ou l'arbitre qualifie la clause de r6vision et lui donne unnouveau contenu qui est alors d~duit de la volont€ des parties et done implicite. Une autre difficult€ d'interpr€tation
concerne les clauses obscures: certaines clauses peuvent etre douteuses ou confuses en elles-memes ou bien le doute peut provenir de ce que les clauses se contredisent. Dans ce cas, on constate que !'intention des parties, bien qu'on continue de s'y r~ferer en principe, n'est pas la seule et unique regle d'interpretation. On peut bien rattacher en une certaine
mesure la r~gle de !'article 1157 du Code civil
a
!'intention des parties: "Lorsqu'une clause est susceptible de deux sens,'~
\.r
on doit plut5t l'entendre dans celui avec lequel elle peut avoir quelque effet, que dans le sens avec lequel elle n'en pourrait produire aucun". On ne pr~sume pas que les gens ~crivent sans motifs, le juge re9oit de la loi le conseil de prendre celui des deux sens qui donne A la clause un effet22. Avec les dispositions de !'article 1158 du Code civil, il
n'est plus question seulement de !'intention des parties: "Les termes susceptibles de deux sens doivent @tre pris dans le sens qui convient la plus A la mati~re du contrat". La mati~re du contrat conduit l'interpr~te
a
faire appel au syst~me des cat~gories, c'est-a-dire des divisions entre les diff~rents types de contrat. On peut toujours affirmer que la classification du contrat en cause dans un des types existants d~pend de l'op~ration juridique envisag~e par les parties et qu'en tant que tel, cet outil d'interpr~tation est rattachablea
la volont~ des parties. Bien que ceci soit hypoth~tique et lointain, il reste exact que l'arbitre doit et peut construire une clause claire d'adaptation en restant attach~a
la r~gle pacta sunt servanda.La r~gle en mati~re de clause implicite est la d~duc-tion qui s'op~re au vu d'~l~ments comme la nature du contrat et son effet utile mais qui doit toujours conserver un contact avec la volont~ des parties. Un juge ou un arbitre se livre
a
l'interpr~tation de la volont~ d'adaptation des parties et reste li~ par celle-ci.b. La lex mercatoria
Nous allons tour
a
tour analyser la clause de"Hardship" et la construction interpr~tative de la clause implicite d'adaptation.
1. La clause expresse de •hardship•
Avant d'~tudier son m~canisme, il para!t int~ressant d'en donner ou de tenter d'en donner une d~finition pr~alabl
• 04Sfinition
On peut donner deux types de d~finition de cette
clause: L'une est une tentative positive qui d~finit directe-ment la clause, l'autre une tentative n~gative dans le sens oQ cette clause va ~tre compar~e
a
des notions proches et finale-ment plus circonscrites que v~ritablement d~finies.Adepte de la premi~re approche, un auteur donne la d~finition suivante: "la clause de "hardship" est celle aux termes de laquelle les parties pourront demander un r~am~nage ment du contrat qui les lie si un changement intervenu dans les donn~es initiales au regard desquelles elles s'~taient engag~es vient
a
modifier l'~quilibre de ce contrat au point de faire subir ~ l'une d'elles une rigueur (hardship)injuste" 23.
Favorable ~ une approche plus prudente, d'autres inter-nationalistes optent pour une m~thode comparative de d~duc tion24. Ils d~sirent "confronter la notion de "hardship"
c
avec des notions analogues ou voisines d'impr~vision, de frustration, de l~sion, de force majeure et de sujetionsimpr~vues". Les auteurs de ces articles arrivent ~ la conclu-sion que l'hypoth~se vis~e par la clause de "harship" corres-pond de tres pres en droit fran9ais ~la notion d'impr~vision ~labor~e par une doctrine minoritaire et refus~e par la juris-prudence, tellement pr~s que les deux concepts s'identifient et se superposent souvent. La th~orie de l'impr~vision, comme nous le verrons plus loin, concerne en effet les situations ou le rapport qui existait ~ la conclusion du contrat et fixait l'~quilibre des prestations r~ciproques est completement alt~r~ en raison de la survenance d'~v~nements impr~visibles au d~part. La clause de "hardship" peut etre consid~r~e comme un am~nagement conventionnel de l'impr~vision. Cette clause se d~marque de la force majeure dans sa conception classique et de la l~sion dans le sens oa la premiere empeche l'ex~cu-tion du contrat entratnant sa suspension ou sa r~siliation et la seconde entratne la nullit~ ou rescision du contrat d~s l'origine pour d~s~quilibre initial et non pour bouleversement ul t~rieur25.
• M5canisme
La clause de "hardship'' comporte en g~n~ral deux
parties principales. La premi~re partie d~finit l'hypothese ou la clause trouve ~ s'appliquer. Elle d~finit certaines circonstances plus ou moins pr~cises et envisage les cons~ quences qu'elles produisent sur les relations contractuelles.
c
La seconde partie expose le r~gime applicable en cas de r~alisation de l'hypothese: cela va du simple accord de
ren~gocier le contrat formul~ sans aucune autre pr~cision ~ !'organisation d'une proc~dure complexe impliquant notamment le recours ~ des arbitres ou experts.
i. Premiere partie de ce m6canisme
Commen9ons done logiquement par la premiere partie qui
d~termine l'hypothese on la clause trouve ~ s'appliquer26.
Il y est tout d'abord question de la survenance de certaines circonstances, ensuite des cons~quences de ces circonstances sur l'~conomie du contrat. Les circonstances tout d'abord.
Il en existe une grande vari~t~ mais des constantes apparaissent cependant ~ travers les id~es de changement et d'impr~visibilit~ ainsi que d'ext~riorit~ par rapport~ la volont~ des parties. Les circonstances entourant le contrat au d~part doivent done subir un changement. Celui-ci n'aura d'effet que s'il affecte gravement les relations entre les parties. La clause exige souvent que le changement soit substantiel27. Ces changements doivent avoir ~t~ impr~vi sibles lors de la conclusion du contrat. Une ~volution de circonstances pr~visible au d~part et dont les r~percussions sur la situation des parties peuvent etre ~valu~es a priori ne fait pas l'objet d'une clause de "hardship" mais d'une clause d'indexation. Le fait que l'on stipule une clause de
c
-conscientes de la possibilit~ d'un bouleversement futur des circonstances. Mais. elles ne sont pas en mesure d'en pr~voir ni la nature, ni la port~e et ni le moment28. Parfois la clause de "hardship" fait express~ment r~f~rence I certaines circonstances dont !'~volution est r~gie par une autre dispo-sition du contrat, pour les exclure de son champ d'applica-tion.
Certaines clauses se bornent I exiger que le changement soit impr~vu, parfois on substitue I ce crit~re celui d'ev~ne ment ~chappant I la volont~ des parties29.
Pourtant, les deux crit~res d'impr~visibilite et
d'exteriorite I la volont~ des parties ne sont pas interchan-geables. Ils expriment deux conditions diff~rentes qui
devraient ~tre appliquees cumulativement.
Quels types de circonstances prend-t-on en considera-tion? Ll aussi r~gne une grande diversite. Il y a des formu-lations tr~s larges30. La plupart des clauses cependant
visent la survenance de circonstances mieux d~finies, qu'elles scient qualifi~es de mani~re g~n~rale, qu'il·s•agisse de
circonstances specifiques ou que la clause proc~de encore I
une combinaison de ces deux derniers syst~mes.
Les formulations gen~rales visent le plus souvent !'~volution des circonstances ~conomiques, commerciales,
mon~taires ou politiques31. Certaines clauses precisent que les evenements vises peuvent ~tre "interieurs ou
c
sont probablement celles dont le bouleversement risque le plusd'affecter l'~quilibre du contrat. Il ressort cependant
qu'une clause de "hardship" pourrait viser dans certains cas la modification fondamentale des circonstances juridiques
ayant pr~sid~ a la conclusion du contrat comme un changement
de l~gislation32. Il semble que les formulations trop
larges donnent a la clause de ''hardship" une port~e trop
impr~cise. De nombreuses clauses au contraire se r~f~rent a des ~v~nements beaucoup plus sp~cifiques souvent propres au
secteur en cause33. On rel~vera que la sp~cificit~ n'est
pas toujours synomyme de pr~cision. Notons que la r~f~rence a
un ~v~nement sp~cifique n'enl~ve pas a cet ~v~nement son
caract~re d'impr~visibilit~, la circonstance de "hardship" se
reconna!t a !'incertitude r~gnant a priori quant aux r~per
cussions possibles sur le contrat de la survenance de
l'~v~ne-ment. Pr~voir la possibilit~ de la survenance d'un ~v~nement
n'est pas pr~voir sa r~alisation. Ainsi, cette sp~cificit~
dans la potentialit~ d'un bouleversement n'enl~ve rien au
caract~re impr~visible du moment et du degr~ de sa survenance.
Certaines clauses combinent des circonstances g~n~rales et
sp~cifiques. Ce type de formulation pr~sente des avantages. Il ~vite des discussions possibles quanta !'inclusion de
certaines circonstances sp~cifiques dans le champ ouvert par
la formule g~n~rale, tout en ~cartant les inconv~nients d'une
~num~ration limitative de circonstances sp~cifiques. Quelques
c
circonstances d~termin~es de !'application de la proc~dure de
"hardship", !'exclusion peut ~galement etre implicite, Les
~v~nements ~ l'origine du bouleversement et qui sont couverts
par la formule de la clause de "hardship" ne le sont qu'~
condition d'entra!ner certains effets d~termin~s sur
l'~conomie du contrat.
Que~les sont done ces cons~quences dont l'~tude de la pratique fournit les exemples?
L'expression la plus sobre des cons~quences consiste ~
dire que l'~conomie du contrat est modifi~e de mani~re ~
porter pr~judice ~ l'une des parties. Ces formulations non
qualifi~es sont de nature ~ conf~rer ~ la clause de "hardship" une port~e qui para!t dangereusement extensive. En g~n~ral,
les clauses examin~es ne se bornent pas ~ pr~voir !'existence
d'un pr~judice quelconque: elles pr~cisent que le d~s~quilibre
intervenu doit etre consid~rable34. Ce crit~re est
objec-tif et la g~n~ralit~ de cette qualification risque de susciter
de graves probl~mes d'appr~ciation lorsqu'une partie pr~tendra
invoquer la clause. C'est pourquoi certaines clauses ajoutent
ou substituent des crit~res subjectifs pour qualifier les
cons~quences sur le contrat des ~v~nements consid~r~s35
donnant ainsi une coloration morale qui n'est pas sans danger.
Apr~s avoir r~gl~ la question de la survenance de
certaines circonstances et qualifi~ la port~e des