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La mise en musique d’un texte : un moyen d’améliorer la compréhension en lecture ?

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Academic year: 2021

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Année universitaire 2016-2017

Master Métiers de l’enseignement, de l’éducation et de la formation

Mention Premier degré

La mise en musique d’un texte :

un moyen d’améliorer la compréhension

en lecture ?

Présenté par Cécile Bertholier

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Table des matières

1.Introduction...1

2. État de l’art...1

2.1 Des points communs entre le langage et la musique...1

2.1.1 Des points communs au niveau conceptuel et structurel...1

2.1.2 Des points communs au niveau neurophysiologique...6

2.2 La lecture...12

2.2.1 Les compétences nécessaires à la lecture...13

2.2.2 Les textes résistants...14

2.2.3 Des entraînements musicaux pour améliorer les compétences de lecture...14

2.3 Musique et lecture : sources d’émotions...16

2.3.1 Dans la musique...16 2.3.2 Dans la lecture...17 2.4 Programmes cycle 3 2016...17 3. Problématique...18 4. Méthode...19 4.1 Participants...19 4.2 Matériel...19 4.3 Procédure...21 5. Résultats...25 5.1 Résultats globaux...25 5.2 Types de questions...28 5.3 Étude de cas...30 6. Discussion...32 7. Bibliographie...36 8. Annexes...1

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1. Introduction

La compréhension en lecture est un enjeu majeur. Elle est un des piliers du programme de français de cycle 3. Il nous est demandé de l’enseigner de manière explicite afin de transmettre aux élèves des stratégies de lecture efficaces.

Mais, elle reste une difficulté pour de nombreux élèves qui lisent des textes sans les comprendre. Il est donc crucial de développer des méthodes de travail améliorant la compréhension en lecture, pour permettre à tous de devenir des lecteurs autonomes.

Ma recherche est donc axée sur un moyen d’améliorer cette compréhension. J’ai opté pour la mise en lien de la lecture avec un autre domaine d’enseignement : la musique.

Nous allons donc voir si mettre en lien la musique et la lecture permet d’améliorer la compréhension d’un texte.

Dans une première partie, seront présentées les diverses théories appuyant la problématique choisie. La deuxième partie s’attachera à détailler la procédure expérimentale utilisée. La dernière partie sera consacrée à la présentation des résultats et à leur discussion.

2. État de l’art

Nous allons dans un premier temps établir des points communs entre le langage et la musique. Puis, nous ciblerons davantage en parlant de la lecture : les compétences nécessaires et le lien avec la musique. Ensuite, nous parlerons des émotions, présentes en musique et en lecture. Enfin, une référence aux programmes sera effectuée.

2.1 Des points communs entre le langage et la musique

2.1.1 Des points communs au niveau conceptuel et structurel

Sloboda (1985)1 (reconnu internationalement pour son travail sur la psychologie de la musique, professeur de musique à l'Université Royal Holloway de Londres), cité par Lowe (1998), pense que la musique et la langue parlée partagent des points communs au niveau conceptuel. Il considère que la langue et la musique répondent au même besoin : structurer 1 Lowe, A. S. (1998). L’intégration de la musique et du français au programme d’immersion française: avantages pour l’apprentissage de ces deux matières. Revue des sciences de l'éducation, 24(3), 621-646.

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l’information auditive et lui donner un sens. Ainsi, musique et langue étant tous deux des moyens de communication, ils feraient appel aux mêmes mécanismes auditifs et cognitifs. Selon Verdeau Paillès J (neuropsychiatre française, musicothérapeute, chargée de cours à l'université de Paris 5 René Descartes), Luban-Plozza B (médecin psychiatre, spécialisé en psychosomatique et médecine sociale), Delli Ponti M (un grand chef d’orchestre) (2000)2, il existe des analogies entre la structure de la pensée verbale et la structure de la pensée musicale. Pour ces auteurs, les éléments du langage musical sont élaborés de la même façon que les éléments de la pensée verbale. Langage et musique sont deux types de langages qui font en partie appel à des démarches identiques : établir des hiérarchies de valeurs (faire le tri entre ce qui est plus ou moins important), élaborer des hypothèses.

Deux auteurs se sont penchés plus précisément sur la structure du langage et de la musique : Chomsky et Schenker.

Chomsky (1965) (linguiste américain. Professeur émérite de linguistique au Massachusetts Institute of Technology)3, énonce que la langue peut se diviser en deux types de structures : la structure profonde et la structure de surface. Ces deux structures sont interdépendantes. Segui, J. (professeur à l’institut psychologique de l’université Paris Descartes), & Kail, M. (directrice de recherche au CNRS et du Laboratoire Cognition & Développement à l’Université Paris V), (1971)4 ont défini dans leur étude ces deux structures énoncées par Chomsky.

La structure profonde correspond aux indicateurs pragmatiques qui produisent le sens de la phrase (exemple : la fonction des groupes de mots). Cette structure renvoie à la sémantique, notamment en permettant de savoir quel est le lien qu’il existe entre les mots.

La structure de surface fait appel aux indicateurs syntagmatiques finaux, principalement l’ordre des mots et leur nature, et renvoie aux aspects liés à l’oral : identification phonétique, phonologie, prononciation.

J.L. Calvet (2003) 5, linguiste français, nous explique ce que sont la structure de surface et la structure profonde à l’aide d’un exemple.

2 Verdeau-Paillès, J, Luban-Plozza, B., Delli Ponti, M. (2000). La « troisième oreille » et la pensée musicale.

Collection Consonance, Editions J.M. Fuzeau Collection Consonance, Editions J.M. Fuzeau

3 Lowe, A. S. (1998). L’intégration de la musique et du français au programme d’immersion française: avantages pour l’apprentissage de ces deux matières. Revue des sciences de l'éducation, 24(3), 621-646.

4 Segui, J., & Kail, M. (1971). Rôle des caractéristiques syntaxiques du contexte sur la production verbale. L'année psychologique, 71(2), 429-438.

5 Calvet, L. J. (2003). Approche (socio) linguistique de l'œuvre de Noam Chomsky. Cahiers de sociolinguistique, (1), 11-29.

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Dans les deux phrases suivantes, les structures de surfaces sont identiques mais les structures profondes diffèrent.

1) Le boulanger travaille la nuit. -> structure profonde : sujet + verbe + complément de phrase (CC)

2) Le boulanger travaille la pâte. -> structure profonde : sujet + verbe + complément du verbe (COD)

On peut mettre à la forme passive la deuxième mais pas la première.

Pour ces deux phrases, la structure de surface est la suivante : article + nom + verbe + article + nom.

La structure profonde peut être représentée par un arbre de constituants, dans lequel les mots en étroite relation grammaticale appartiennent au même nœud.

exemple issu de l’Esprit Musicien

Schenker, musicologue, divise aussi la musique en une structure de surface et une structure profonde (l’Ursatz). Cette dernière est divisée en deux parties, « la ligne mélodique fondamentale (Urlinie) » et une « basse arpégée à l’intérieur de la même tonalité.» (57)6. La « basse arpégée » correspond à la suite d’accords jouée parallèlement à la mélodie.

6 Stan, L. (2009). Universaux de la psychologie cognitive et de la musique. Quelques réflexions à propos du livre l’Esprit Musicien de John Sloboda.. Studia Universitatis Babes-Bolyai-Musica, (2), 51-65

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exemple issu de l’Esprit Musicien

Ces phrases musicales ont la même structure profonde.

Dans les exemples ci-dessus, la ligne mélodique fondamentale (les notes avec un astérisque) correspond à progression 3 2 1 (do dièse, si, la) dans l’échelle de la majeur.

La basse arpégée correspond à une progression I V I, c’est-à-dire trois accords successifs construits à partir des notes la, mi, la.

Sloboda (1988) met en relation ces deux auteurs dans son ouvrage L’esprit musicien (Stan, 2009)7. Au préalable de cette comparaison, il divise le langage et la musique en trois composantes : phonologie, syntaxe et sémantique. La phonologie correspond au phonème. En musique, le phonème de base est la note et la phonologie est donc décrite en termes de fréquence et de durée. La syntaxe correspond à l’assemblage des phonèmes (notes ou phonèmes vocaux) pour former une séquence : suite de mots ou de notes. La sémantique correspond à « la manière dont le sens est véhiculé par les séquences » (p57)8. Sloboda nous montre donc que la théorie linguistique de Chomsky et la théorie musicale de Schenker mettent en avant les deux structures : de surface et profonde. Pour ces deux auteurs, la structure de surface est la « forme réelle d’un texte ou d’une musique (ce qu’on entend ou ce qu’on peut lire)» (57)9. Les structures profondes ont été préalablement décrites.

7 Stan, L. (2009). Universaux de la psychologie cognitive et de la musique. Quelques réflexions à propos du livre l’Esprit Musicien de John Sloboda.. Studia Universitatis Babes-Bolyai-Musica, (2), 51-65

8 idem

9Stan, L. (2009). Universaux de la psychologie cognitive et de la musique. Quelques réflexions à propos du livre l’Esprit Musicien de John Sloboda.. Studia Universitatis Babes-Bolyai-Musica, (2), 51-65

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Quant à Fiske (1993) (professeur émérite de sociologie de l’éducation, spécialiste de sociolinguistique) et Léonard Bernstein (1976) (compositeur et chef d’orchestre)10, ils soulignent la rencontre, au niveau de la construction, de la langue et de la musique. A cette échelle, apparaît « un mécanisme générateur et récepteur de patrons ». Pour la langue, ce mécanisme permet de produite et de comprendre des phrases. En musique, ce mécanisme générateur permet de produite des patrons mélodiques-rythmiques obéissant au règles du langage musical. Le tableau suivant issu de l’article de Lowe (1998) illustre cette notion.

Un autre point commun entre la musique et le langage est l’obéissance à des règles syntaxiques formant des systèmes hiérarchiques (Jackendoff, 2002 ; Lerdahl, 2001 ; Lerdahl & Jackendoff, 1983 ; Patel, 2008)11. Selon, Hoch, L, Tillman B et Poulin-Charonnat B (2008) (membres de l’équipe Cognition auditive et psychoacoustique au centre de recherche en neurosciences de Lyon dirigée par Tillman B.), les éléments de base, notes ou phonèmes, se

10 Lowe, A. S. (1998). L’intégration de la musique et du français au programme d’immersion française: avantages pour l’apprentissage de ces deux matières. Revue des sciences de l'éducation, 24(3), 621-646. 11Hoch, L., Tillmann, B., & Poulin-Charronnat, B. (2008). Musique, syntaxe et sémantique: des ressources d’intégration structurale et temporelle partagées?. Revue de Neuropsychologie, 18(1-2), 33-59.

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combinent pour former des unités plus complexes (accords et motifs mélodiques, mots). Ces unités se combinent pour former des phrases musicales ou linguistiques.

Un point commun supplémentaire est la création d’attentes lors de l’écoute du langage ou de la musique. Ces attentes sont provoquées par les connaissances de l’auditeur (connaissances syntaxiques et sémantiques, connaissances musicales implicites) et permettent de guider la compréhension ou la perception (Tillmann, 2005 cité par Hoch et al ; Hoch et al, 2008). En lecture, avant de lire, je me crée des attentes par rapport au genre (poésie, roman, théâtre). Si je lis un roman policier, je m’attends à qu’il se passe un « crime », qu’il y ait une enquête. Si l’histoire se passe dans un contexte particulier, par exemple sur un bateau, j’active mes connaissances liées aux thèmes de la marine, de la mer et celles-ci m’aideront à comprendre des situations évoquées dans le texte.

En musique, si je m’attends à écouter de la musique classique, j’attends une certaine rigueur, la musique classique obéissant à des règles de composition précises, je m’attends à entendre un orchestre composé des instruments à cordes frottées, des instruments à vent, des percussions. Si j’écoute de la musique orientale, je m’attends à certaines sonorités typiques de cette musique.

2.1.2 Des points communs au niveau neuro physiologique

L’avancée des technologies a permis de mettre en évidence des structures corticales et des processus neurophysiologiques communs entre la musique et le langage.

1) structures corticales

http://tpeinfluancemusique.webnode.fr/iii-le-traitement-du-son-par-le-cerveau/de-loreille-au cerveau/ https://fr.slideshare.net/GLADIADORVASCO/systme-nerveux-central-et-territoires vasculaires

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Diverses études en imagerie cérébrale ont révélé que l’aire de Broca et son homologue à droite sont sollicitées pour la perception du langage mais le sont aussi pour la perception musicale ((Koelsch, Gunter, von Cramon, Zysset, Lohmann, et al., 2002 ; Maess, Koelsch, Gunter, & Friederici, 2001 ; Tillmann, Janata, & Bharucha, 2003 ; Tillmann, Koelsch, Escoffier, Bigand, Lalitte, et al., 2006). 12

Deux études neurophysiologiques ont montré que les traitements musicaux et linguistiques partageraient des ressources neuronales. En effet, Platel (2003) a conclu dans son étude que les traitements des structures musicales seraient effectués dans les régions frontales inférieures mais aussi dans les régions temporales et pariétales droites. Or Friederici (2002) a mis en évidence pour le traitement du langage un réseau neuronal comparable : les régions temporales permettent l’identification des mots et les régions frontales permettent de construire les relations syntaxiques et sémantiques.

2) Processus neurophysiologique commun

Diverses études ont été menées en étudiant les ondes neurophysiologiques à travers le potentiel évoqué. Unpotentiel évoqué est une modification du potentiel électrique produit par le système nerveux, en réaction à une stimulation externe, généralement sensorielle. Les trois composantes du potentiel évoqué sont l’amplitude (la grandeur de l’onde), la latence (l'intervalle de temps entre un stimulus et une réaction) et la polarité (positive ou négative). L’onde N 400 a été décrite pour la première fois en 1980 par Kutas et Hilvard (Kuperberg, 2006)13. Cette onde négative arrivant 400ms après le stimulus apparait quand une anomalie sémantique se produit dans une phrase comme par exemple le mot « socks » dans la phrase “He spread the warm bread with socks.”

12 Hoch, L., Tillmann, B., & Poulin-Charronnat, B. (2008). Musique, syntaxe et sémantique: des ressources d’intégration structurale et temporelle partagées?. Revue de Neuropsychologie, 18(1-2), 33-59.

13 Kuperberg, G. R. (2007). Neural mechanisms of language comprehension: Challenges to syntax. Brain

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En 1992, Osterhout et Holcomb ont décrit une onde positive arrivant 600 ms après le stimulus, l’onde P600. Cette onde se produit quand une incongruité syntaxique se produit dans la phrase. 14

Le schéma suivant représente l’onde N400 et l’onde P600.

figure issue de l’article : Kuperberg, G. R. (2007). Neural mechanisms of language comprehension: Challenges to syntax.Brain research,1146, 23-49.

Hoch et al cite une étude de Mireille Besson et al (1998) (chercheuse au laboratoire Neurosciences Cognitive à l’université de Marseille) dans leur méta-analyse15. Ces chercheurs ont réalisé une expérimentation permettant de comparer le fonctionnement électrophysiologique du langage et de la musique. Les sujets devaient écouter des extraits d’opéra et juger de la cohérence sémantique et musicale. Ces extraits se terminaient par une dernière note ou un dernier mot, attendu on incongru. Voici un exemple de violation sémantique : Les étoffes flottaient au sang. L’incongruité musicale provoquait une onde P600 alors que l’incongruité langagière provoquait une onde N400. En cas de double incohérence, les deux ondes se produisaient successivement. Ces résultats montrent qu’ils existent des processus distincts dans le traitement sémantique du langage et de la musique.

Patel, Gibson, Ratner, Besson et Holcom (1998) ont montré qu’une onde électrophysiologique identique, l’onde P600, se produit à la perception d’une violation syntaxique (rendant la 14 Kuperberg, G. R. (2007). Neural mechanisms of language comprehension: Challenges to syntax. Brain

research, 1146, 23-49.

15 Hoch, L., Tillmann, B., & Poulin-Charronnat, B. (2008). Musique, syntaxe et sémantique: des ressources d’intégration structurale et temporelle partagées?. Revue de Neuropsychologie, 18(1-2), 33-59

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phrase incorrecte) et d’une violation musicale ( la séquence d’accords se terminait par un accord inattendu (non harmonique. Ceci suggère un mécanisme électrophysiologique commun entre traitement de la syntaxe en musique et en langage.

Hoch et al réalisent une conclusion intermédiaire en énonçant que les processus communs entre musique et langage ne seraient que de l’ordre syntaxique.

L’étude de Koelsch S., Gunter, T. C., Wittfoth, M., & Sammler, D (2005)16 confirme ce résultat. Ces auteurs ont étudié les interactions entre la musique et le langage au niveau syntaxique et sémantique. Des phrases se terminant par un mot relié ou non syntaxiquement ou sémantiquement à la phrase, étaient présentées visuellement aux participants. Parallèlement, des séquences musicales de cinq accords étaient présentées, avec le dernier accord musicalement syntaxique ou non. Les participants devaient juger de la cohérence du dernier mot.

Lorsque l’accord est régulier, et que le mot est irrégulier syntaxiquement, la violation syntaxique évoquait une onde neurophysiologique LAN (une onde Négative apparaissant dans la zone antérieure gauche du cerveau, et associée au traitement syntaxique) suivi d’une onde P600.

Lorsque l’accord est régulier et que le mot est sémantiquement inattendu, une onde N400 se produit.

16 Koelsch, S., Gunter, T. C., Wittfoth, M., & Sammler, D. (2005). Interaction between syntax processing in language and in music: an ERP study.Journal of cognitive neuroscience,17(10), 1565-1577.

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L’accord irrégulier évoquait une onde ERAN.

schéma issu de Koelsch, S., Gunter, T. C., Wittfoth, M., & Sammler, D. (2005). Interaction between syntax processing in language and in music: an ERP study.Journal of cognitive neuroscience,17(10), 1565-1577.

L’onde LAN était modifiée par la violation musicale : elle était plus faible quand la séquence musicale se terminait sur un accord inattendu plutôt que sur un accord attendu.

En revanche, l’onde N400 reflétant le traitement sémantique n’était pas influencée par la violation musicale. Cette étude suggère que le traitement musical et syntaxique partage des ressources communes, ce qui n’est pas le cas entre le traitement musical et sémantique.

schéma issu de Koelsch, S., Gunter, T. C., Wittfoth, M., & Sammler, D. (2005). Interaction between syntax processing in language and in music: an ERP study.Journal of cognitive neuroscience,17(10), 1565-1577.

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Ce lien neurophysiologique entre le traitement de la syntaxe langagière et de la musique peut être expliqué par des études en MEG (magnétoencéphalographie, une technique mesurant les champs magnétiques produit par l'activité électrique des neurones du cerveau). Celles-ci ont montré qu’un accord irrégulier activait la partie inférieure de l’aire de Brodmann, située dans le cortex frontolatéral inférieure. Cette zone cérébrale, appelée aire de Brocca est aussi impliquée dans le traitement de la syntaxe langagière. L’accord irrégulier activait les régions temporales postérieures, régions connues pour être impliquées dans le traitement du langage. 17

Mais des études ultérieures ont permis de nuancer ces propos.

L’article de Koelsch (2005) (professeur de psychologie de la musique et de neuropsychologie à l’Université de Bergen en Norvège) 18suggère un résultat différent. Dans le a) sont mis en évidence les neurones qui génèrent l’onde N400, produite lorsque le mot cible n’est pas relié aux mots précédents ou à des extraits musicaux. On peut voir qu’il n’y a pas de différence entre la condition musique et langage. Cela suggère un lien potentiel entre sémantique langagière et musique.

Les aires orange représentent les zones impliquées dans des procédés de syntaxes musicales. L’aire bleue est impliquée dans des procédés de sémantique musicale, et d’intégration des informations sémantiques et syntaxiques. Ceci explique les résultats illustrés en a).

17 Koelsch, S. (2005). Neural substrates of processing syntax and semantics in music. Current opinion in

neurobiology, 15(2), 207-212.

18 Koelsch, S. (2005). Neural substrates of processing syntax and semantics in music. Current opinion in

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Kuperberg (2007) (professeur de psychologie et psychiatre) a changé la nature de la violation sémantique. La relation verbe argument était modifiée et la phrase était sémantiquement incorrecte mais tous les mots appartenaient au même champ sémantique (ex : Au petit déjeuner l’œuf mange… ). Dans ces études on observe une onde P600 lors de la violation sémantique, onde qui reflète normalement le traitement syntaxique. Cela signifie que le traitement sémantique comme le traitement syntaxique utilise des processus communs.

Les chercheurs ont donc essayé de comprendre pourquoi il existe ce lien entre la musique, la syntaxe du langage et la sémantique du langage.

Platel (2003) a proposé la théorie suivante (SSIRH): « la musique et le langage partagent des ressources impliquées dans les processus d’intégration structurale des événements (musicaux ou linguistiques) » (Hoch, L., Tillmann, B., & Poulin-Charronnat, B. (2008).. P 7). Les processus d’intégration structurale sont des processus permettant de « relier les différents événements d’une séquence musicale ou d’une phrase » pour ensuite pouvoir créer du sens (Hoch, L., Tillmann, B., & Poulin-Charronnat, B. (2008).. P 7).

Pour construire le sens de la phrase, il faut que toutes les structures, syntaxiques comme sémantiques soient combinées entre elles par des processus d’intégration. Hagoort, 2005 ; Kintsch, 1988 ; van Dijk & Kintsch, 1983 montrent que le traitement d’une phrase correspond au mécanisme suivant : au fil de la lecture, les nouveaux éléments sont intégrés, ajoutés aux éléments précédents pour former un ensemble cohérent et ainsi créer un modèle de situation et arriver à la signification globale.

Le langage ou la musique, deux informations organisées temporellement, nécessiteraient les mêmes ressources neuronales qui permettent l’intégration dans une structure globale (Hoch et al, 2008).

2.2 La lecture

Selon Harvey et Goudvis, pour lire, deux aspects interviennent, « il faut déchiffrer le code alphabétique pour décoder les mots et réfléchir à ces mots pour construire le sens » (2000, p. 5)19

19 Goudvis, A., & Harvey, S. (2000). Strategies that work: Teaching comprehension to enhance understanding. York, ME: Stenhouse.

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2.2.1 Les compétences nécessaires à la lecture

2.2.1.1 Le décodage

Le décodage consiste à identifier des mots écrits. Selon Jean Emile Gombert (1991)20( psychologue et professeur d'université français, spécialiste en psychologie cognitive des apprentissages), le décodage est un préalable indispensable à la compréhension. Mais selon lui et Morais (1998), Colé et Sprenger-Charolles (2013), il est nécessaire aussi de l’automatiser, de sorte que ce processus ait un coût cognitif faible, laissant la majorité des ressources disponibles pour à la compréhension. C'est ce que fait un lecteur expert.

2.2.1.2 La compréhension

Selon Giasson, (1990) (Docteur en sciences de l'éducation et en psychologie, professeur au Département de psychopédagogie et des sciences de l'éducation de l'Université de Laval, Canada) cité par E. Falardeau (2003) 21, «La compréhension n’est pas la simple transposition du texte dans la tête du lecteur, mais une construction par ce dernier» (Giasson J.,. La

compréhension en lecture. Boucherville : Gaëtan Morin)

Pour réaliser cette construction, plusieurs compétences sont en jeu :

- être capable d’identifier les informations importantes du texte, les mémoriser , les synthétiser (Gear, 2007)22

- faire appel aux connaissances du lecteur sur le monde, « lexicales, syntaxiques, historiques, expérientielles, etc » (Falardeau, 2003, professeur et chercheur au département d'études sur l'enseignement et l'apprentissage)

- établir des conclusions (Gear , 2007)

- visualiser au cours de la lecture, c’est-à-dire de construire des images multisensorielles, des schémas pour mieux comprendre (Gear, 2007)

- vérifier sa compréhension, et lors d’une non compréhension, effectuer un retour en arrière (Gear, 2007).

Giasson (1990) citée par Falardeau définit deux types de compréhension.

20 Gombert, J. É. (1991). Le rôle des capacités métalinguisitques dans l'acquisition de la langue écrite. Repères, recherches en didactique du français langue maternelle, 3(1), 143-156.

21 Falardeau, É. (2003). Compréhension et interprétation: deux composantes complémentaires de la lecture littéraire. Revue des sciences de l'éducation, 29(3), 673-694.

22 Gear, A. (2007). Lecteurs engagés, cerveaux branchés: comment former des lecteurs efficaces. Groupe Modulo.

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La compréhension littérale fait appel à ce qui est explicite dans le texte.

La compréhension inférentielle permet au lecteur de combler l’implicite, ce que E. Falardeau nomme « contenu virtuel caché » (p 681, 2003). Pour trouver les informations manquantes, le lecteur doit lire entre les lignes, créer des liens entre les éléments du texte, tirer des conséquences. A. Gear, complète cette idée en énonce que le lecteur doit faire des liens entre

ses connaissances personnelles et les informations tirées du texte.

Ces deux types de compréhension interviennent de manière simultanée durant la lecture d’un texte.

2.2.2 Les textes résistants

Un type de texte nécessite que le lecteur mette en place des stratégies de lecture complexes, expertes. Ce sont les textes résistants. Selon C. Tauveron (1999) 23, un texte résistant est un texte pour lequel la signification symbolique ne se trouve pas facilement. La résistance peut provenir de la réticence du texte. Cette dernière se définit par une non utilisation des lois classiques de la communication : le message ne peut être saisi sans un travail du lecteur. Le texte peut être réticent de différentes manières :

- l’auteur disperse dans le texte des informations conduisant à une compréhension erronée - l’auteur empêche le lecteur de comprendre (un point de vue inattendu, des ellipses narratives, l’effacement de relations de cause à effet, un ordre chronologique perturbé,….) E. Falardeau complète cette définition en énonçant que le texte résistant est source d’obstacles. Le lecteur ne peut se servir de ses automatismes habituels.

2.2.3 Des entraînements musicaux pour améliorer les compétences de lecture

Bolduc J (directeur du laboratoire de recherche Mus-Alpha effectuant des recherches sur les liens entre l’éducation musicale et le développement du langage), Lavoie N. (professeure à la Faculté d’éducation de l’Université d’Ottawa) et Fleuret C.( professeure adjointe à la Faculté d’éducation de l’Université d’Ottawa, spécialiste de la littératie et de l’appropriation de la 23 Tauveron, C. (1999). Comprendre et interpréter le littéraire à l'école: du texte réticent au texte proliférant. Repères, recherches en didactique du français langue maternelle, 19(1), 9-38.

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langue écrite maternelle et seconde), (2009) 24 cite dans leur article l’expérimentation de Register, Darrow, Standley et Swedberge (2007). Il s’agissait de voir si un « programme intensif d’entrainement musical » (p 168, Bolduc et al, 2009) améliorait les capacités de lecture chez les élèves (reconnaissance et décodage de mots, compréhension). La classe témoin ne recevait que le programme de littératie. La classe expérimentale participait au programme de littératie mais aussi au programme d’entraînement musical (« tâches d’écoute, de chants, des composition musicales et des exercices rythmiques » (p 169, Bolduc et al, 2009). Un test de « connaissance de mots, de décodage de mots et de compréhension en lecture » a été passée avant et après le programme musical. Les résultats indiquent que les élèves du groupe expérimental ont des résultats significativement plus élevés au post-test en connaissance et décodage de mots. En revanche, la totalité des sujets (témoins et expérimentaux) ne se sont pas améliorés en compréhension en lecture. Mais en effectuant une analyse plus approfondie des résultats, ceux-ci montrent que les élèves de la classe expérimentale ont une progression plus élevée que ceux de la classe témoin dans les trois composantes testées. L’entrainement musical semble donc avoir amélioré la connaissance et le décodage de mots et la compréhension en lecture, avec une plus faible progression pour cette dernière compétence.

Une méta-analyse de Standley en 2008 montre que généralement, les interventions musicales auraient des effets significatifs sur le développement des capacités en lecture, même si les résultats sont variables selon les études. 25

24 Bolduc, J., Lavoie, N., & Fleuret, C. (2009). Les effets de la musique auprès d’élèves du début du primaire présentant des difficultés d’apprentissage en lecture et en écriture: recension des écrits. McGill Journal of Education/Revue des sciences de l'éducation de McGill, 44(2), 163-175.

25 Lessard, A., & Bolduc, J. (2016). Les effets d’un programme d’entraînement lecture-musique sur le

développement du vocabulaire et de la morphosyntaxe d’élèves francophones de 2ème année. McGill Journal of

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2.3 Musique et lecture : sources d’émotions

La musique et la lecture partage un but commun : provoquer des émotions. 2.3.1 Dans la musique

Comme nous l’indique, Lamorthe, I. (2006)26, (la musique a un pouvoir affectif, « La première perception de la musique est physique et émotionnelle ». Entendre n’est jamais passif. Sobloda (1988)27 , Pineau (docteur en psychologie et maître de Conférences en musique à l'Institut Universitaire de Formation des Maîtres de Dijon) et Tillman (2001)28, ( chercheuse en sciences cognitives, responsable de l’équipe Cognition auditive et psychoacoustique ) pensent que la musique suscite des émotions chez l’auditeur, réveillant l’ensemble des sentiments.

Plusieurs auteurs se rejoignent sur le pouvoir d’expression de la musique. Pour B. Soulas (2008)29 (docteur en sciences de l'éducation, membre du groupe de recherches Sciences de l'éducation de l'Office musical français), l'art permet d'exprimer l'émotionnel qui est en nous. La création d’œuvres d'art par les hommes, permet de combler leur besoin « d'exprimer l'inexprimable », « de communiquer notre monde ». (p. 18, 2008). Selon Verdeau Paillès (2000)30 , la musique « peut tout dire de la façon la plus spontanée et naturelle. » (p. 41). Heidegger et Adorno, repris par Boudinet en 2006, repris à son tour par B. Soulas en 2008, pensent que « l'œuvre fait apparaître ce que la raison ne veut pas ou ne peut pas voir, ce que notre logique ne pourra jamais comprendre » (p 19).

Lyotard, Snyders, Lapassade cité par Boudinet G. en 2006, puis par B. Soulas, pense que l'art peut rapprocher les personnes car chacune d'elles éprouve les mêmes émotions dérangeantes. Emotions dérangeantes, qui selon B. Soulas, naissent d’un conflit entre un ressenti étrange et l’envie de tout contrôler par la raison.

E. Bigand (2008)31 (enseignant-chercheur français, titulaire de la chaire Musique Cognition Cerveau) pense aussi que la musique est un moyen de rapprochement car elle peut faire naitre des émotions similaires chez une foule entière. Selon lui, la musique est donc un facteur de cohésion sociale.

26 Lamorthe, I. (2006). Enseigner la musique à l'école. Hachette éducation

27 Sloboda, J. A. (1988). L'esprit musicien: la psychologie cognitive de la musique (Vol. 177). Editions Mardaga. 28 Pineau M., Tillmann. B. (2001). Percevoir la musique : une activité cognitive. L’Harmattan

29 Soulas, B. (2008). L’éducation musicale, une pratique nécessaire au sein de l’école. L’Harmattan

30 Verdeau-Paillès, J, Luban-Plozza, B., Delli Ponti, M. (2000). La « troisième oreille » et la pensée musicale. Collection Consonance, Editions J.M. Fuzeau

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2.3.2 Dans la lecture

A. Gear (2007) a mis en évidence la capacité à visualiser. Il s’agit de mobiliser tous ses sens pour créer des images mentales. Le lecteur se fait un film à partir de l’histoire lue, il voit et entend les scènes, il ressent des émotions.

Isabelle Tapiero et Nathalie Blanc (2001) nous rapportent une étude de Gernsbacher, Glodsmith et Robertson (1992) sur les représentations par les lecteurs des états émotionnels des personnages. Les participants devaient lire un court récit décrivant l’action d’un personnage principal qui influençait la vie d’un second personnage. La dernière phrase du récit énonçait explicitement une émotion congruente à l’histoire ou incongruente. Les participants mettaient plus de temps à lire la phrase si l’émotion était incongruente. Les auteurs ont conclu que le lecteur se « représente mentalement les états émotionnels des personnages. »

Une étude de Vega, Leon et Diaz (1996) confirme ce phénomène. Les participants avaient pour consigne de lire des récits courts durant lesquels l’état émotionnel du personnage changeait. Les résultats révèlent que les participants se représentent l’état émotionnel des personnages mais aussi qu’ils sont capables de les changer au fur et à mesure de la lecture.

2.4 Programmes cycle 3 2016

Musique

Les émotions se retrouvent dans les programmes à la compétence « exprimer ses émotions, ses sentiments et ses préférences. » Les documents d’accompagnement mettent en avant le travail sur la sensibilité, les émotions, les sentiments. « Le plaisir de faire et d’explorer de l’élève se conforte dans le désir de pouvoir exprimer ses émotions. »

La mise en musique est en lien avec la compétence : « explorer, imaginer et créer. » Ils vont « imaginer l’organisation de différents éléments sonores, faire des propositions personnelles lors de moments de création, d’invention et d’interprétation. »

Français : lecture et compréhension de l’écrit

Les programmes mettent en avant l’enseignement explicite de la compréhension pour faire acquérir aux élèves des stratégies efficaces de lecture.

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Les programmes font référence aux émotions provoquées par les textes. « Les activités de lecture doivent permettre aux élèves de verbaliser, à l'oral ou à l'écrit, leur réception des textes et des œuvres : […], mise en relation avec son expérience et ses connaissances, […], expression d'émotions, de jugements, à l'égard des personnages notamment. »

Interdisciplinarité

Les programmes incitent à l’interdisciplinarité, à croiser les disciplines. Il est par exemple proposé d’associer des activités langagières et des pratiques artistiques. Il est cité l’exemple de projets de mise en voix de textes en français.

3. Problématique

Nous avons vu que la musique et le langage faisaient appel à des concepts et des processus cognitifs communs. De plus, la musique et le langage partagent des ressources physiologiques.

Des études ont montré que développer les compétences en musique permettrait d’améliorer les compétences en lecture. Lire un texte, c’est se créer un modèle de la situation décrite par le texte, modèle constitué de représentations mentales, des images visuelles mais aussi auditives. Sonoriser concrètement ses représentations en mettant en musique un texte peut être source d’une augmentation de la compréhension.

La lecture comme la musique est une puissante source d’émotions. Il s’agit donc à travers le pouvoir affectif de la musique de retranscrire les émotions ressenties à la lecture. Ainsi la nécessité de rendre explicites les émotions éprouvées pourrait améliorer la compréhension. La problématique est donc la suivante :

Dans quelle mesure la mise en musique d’un texte améliore-t-elle sa compréhension ? Les hypothèses sont les suivantes :

- mettre un texte en musique améliore sa compréhension davantage que de réaliser un débat interprétatif classique

- mettre un texte en musique améliore sa compréhension mais pas davantage que de réaliser un débat interprétatif classique

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4. Méthode

4.1 Participants

Présentation de la classe

Les participants sont des élèves d’une classe de CM1-CM2 composée de 10 CM2 et 16 CM1 de l’école Waldeck Rousseau de Chambéry. Ils ont entre 9 et 11 ans. Les élèves sont dans l’ensemble issus d’un milieu socioculturel de classe moyenne ou aisée. Ils sont dans l’ensemble des élèves avec un bon niveau scolaire et de bons lecteurs.

Choix du sujet

Les élèves sont pour la majorité de bons lecteurs. Ils parviennent à lire des textes longs. En revanche, la capacité de compréhension est plus hétérogène selon les élèves. Certains comprennent le texte dans sa totalité et savent parfaitement répondre à des questions complexes de compréhension. Pour quelques autres, la compréhension est difficile et il leur est compliqué de répondre à diverses questions. La majorité des élèves comprend le sens général des textes Ils répondent à des questions simples de compréhension, mais de manière plus difficile à des questions complexes.

Ce bilan nous montre que tous les élèves ont encore des progrès à faire, progrès plus ou moins importants selon les élèves.

J’ai donc choisi de travailler l’amélioration de la compréhension en lecture. Ce travail est ici abordé en utilisant l’apport d’une autre matière, la musique.

La procédure mise en place a pour but de voir quelle modalité de travail autour d’un texte est le plus efficace pour améliorer la compréhension des élèves.

4.2 Matériel

Le matériel est composé de textes et des questionnaires de compréhension associés. Les textes

Ils sont résistants, autant que possible de difficulté similaire, de même longueur, provoquant des émotions, des sensations (images visuelles, sonores).

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J’ai choisi des textes résistants car les élèves sont de bons lecteurs. Ils sont capables de comprendre, avec plus ou moins d’aisance, l’implicite d’un texte, d’associer les informations trouvées à divers endroits du texte et de mettre en lien le texte et leurs connaissances.

La longueur du texte qui est d’environ une page est adaptée à leur niveau. Tous les élèves lisent facilement une page de texte. Cette longueur, pas trop élevée, permet aux élèves de réaliser un travail de compréhension de qualité.

Les cinq textes utilisés sont les suivants

- extrait : Roald Dahl (1988), Matilda, Gallimard Jeunesse

- Bernard Friot (1988), Un Martien, Nouvelles histoires pressées, Milan Poche Junior - J.P. CHABROL (1971), Le plat du chien, Contes d’Outre-temps, Paris, Presse-Pocket - extrait : Pierre Gamarra (1977), 50 000 dollars de Chewing Gum, Paris, La Farandole - extrait : Eric Simard (2002), Je te sauverai !, Magnard

Ils sont en intégralité dans la partie annexe.

Les questions

Une typologie de questionnaire peut être la suivante. Elle est issue du travail de Pascale Mignot Vota 32 (qui s’est inspirée du modèle conceptuel de J. Cunningham (1987)) et du travail de Sylvie Cèbe, Roland Goigoux et Serge Thomazet.

Les questions peuvent impliquer trois types de réponses : - la réponse est explicite et textuelle :

- la réponse est « exactement » (littéralement) dans le texte

- la question n’emploie pas exactement les mots du texte mais il s’agit d’une simple reformulation du vocabulaire.

- la réponse nécessite la réalisation d’une inférence logique : le lecteur doit effectuer des raisonnements logiques pour faire des déductions, il raisonne à partir des informations du texte.

- la réponse nécessite de réaliser une inférence pragmatique : le lecteur doit se servir de ses connaissances du monde. La réponse sera probable mais non certaine.

32 Pascale Mignot Vota, Professeur des écoles spécialisée Circonscription de L’Arbresle , MEMOIRE DE CAFIPEMF

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Les questionnaires sont construits de manière identique et les types de question reprennent le travail cité ci-dessus. Chaque questionnaire comprend :

- quatre questions dont la réponse est explicite et textuelle : la réponse est dans le texte.

- quatre questions nécessitant des réaliser des inférences logiques : le lecteur doit mettre en lien des éléments du texte

- quatre questions dont la réponse nécessite de faire une inférence pragmatique : le lecteur doit mettre en lien le texte et ses connaissances

- trois questions sur les émotions ressenties par les personnages.

4.3 Procédure

Afin de voir si la mise en musique des textes lus permet d’améliorer la compréhension, la procédure suivante a été mise en place.

Les élèves répondent deux fois à un même questionnaire de compréhension sur un texte, à une semaine d’intervalle. Entre les deux passations, différentes modalités de travail sont expérimentées. La première passation du questionnaire constitue le pré-test et la seconde passation constitue le post-test.

Les différentes modalités de travail créent trois conditions expérimentales. Celles-ci nous permettent de tester nos hypothèses, en comparant l’effet sur la compréhension d’un texte d’un débat interprétatif par rapport à une mise en musique. La totalité des élèves effectue les trois conditions.

Les trois conditions sont les suivantes :

- aucun travail n’est effectué entre le pré-test et le post- test

- un débat interprétatif est effectué entre le pré-test et le post-test. Cette deuxième condition est réalisée avec deux textes et deux types de débat seront mis en place.

- une mise en musique du texte est réalisée entre le pré-test et le post-test. Cette troisième condition est réalisée avec deux textes et deux types de mises en musique seront mis en place.

(26)

Condition expérimentale

Texte Déroulement dans le temps

Pré test « Travail » autour du texte

Post test Neutre Extrait : Mathilda,

Roald Dahl

Lundi semaine 1

Rien Lundi semaine 2

Débat 1 Martien,

Bernard Friot

Mardi semaine 2

Débat mardi semaine 2

Lundi semaine 3 Débat 2 Le plat du chien,

J. P. Chabrol

Mardi semaine 3

Mardi semaine 3 Lundi semaine 4 Musique 1 50 000 dollars de Chewing Gum, Pierre Gamarra Mardi semaine 4 Mise en musique mardi et mercredi semaine 4 Lundi semaine 5 Musique 2 Extrait : Je te sauverai, Eric Simard Lundi semaine 5 Mise en musique lundi et mardi semaine 5 Lundi semaine 6

La mise en musique a été effectuée sur deux jours car ce travail prend du temps.

La comparaison des trois conditions permet de voir si le travail réalisé a permis d’améliorer la compréhension et donc de pouvoir répondre de façon plus pertinente aux questions.

L’indicateur relevé est le taux de réponses correctes.

Le taux de réponses correctes au pré-test est comparé au taux de réponses correctes du post-test. Si l’on observe une augmentation du taux de bonnes réponses, on peut en déduire que le travail réalisé a permis de mieux comprendre le texte car les élèves répondent plus justement aux questions.

La comparaison est effectuée :

- de façon générale pour la classe, en faisant une moyenne des notes obtenues par les élèves. - élève par élève, afin de constater combien d’élèves sont concernés par une augmentation. - entre les différents types de questions.

Détail des séances

1) condition contrôle « Texte : neutre », réalisé avec un texte extrait de Mathilda de Roald

Dahl : aucun travail n’est effectué entre la passation des deux questionnaires de compréhension.

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2) condition : débat (réalisé pour deux textes) : un débat interprétatif est réalisé entre les deux questionnaires

- avec le texte Martien de Bernard Friot :

Par écrit, les élèves répondent en binôme aux trois questions suivantes : Quel est le genre de ce texte ? Qui a écrit à qui ? Où se trouvait l'auteur de la lettre quand il a écrit ?

Ensuite, à l’oral en collectif, les différentes réponses des élèves sont mises en commun. Pour chaque réponse donnée, l’élève doit justifier en donnant un élément du texte, une connaissance personnelle.

- avec le texte Le plat du chien de J. P. Chabrol

Le débat est réalisé sous forme orale en collectif en trois étapes.

Les élèves reformulent l'histoire et construisent le schéma narratif ( quatre étapes : situation, marchandage pour acheter le chien, stratagème du touriste pour acheter le plat, épilogue) Ensuite, ils répondent à la question : quelles sont les intentions du père de famille et du vieux Breton, notamment dans la phase de marchandage et du stratagème du touriste ?

Pour terminer, ils réfléchissent à la question : Qui est le plus malin et pourquoi ?

3) condition : musique (avec deux textes) : une mise en musique du texte est réalisée entre les deux questionnaires.

- avec le texte 50 000 dollars de Chewing Gum, de Pierre Gamarra

Après la lecture du texte, je pose les questions suivantes aux élèves : « A votre avis comment pourrait-on mettre en musique le texte ? Quelles musiques et quels bruitages pourrait-on ajouter ? Pourquoi ? »

Les réponses sont données de manière orale en collectif.

Je diffuse diverses musiques, et de façon individuelle, les élèves notent le numéro des musiques qui pourraient convenir selon eux. Une liste de bruitages leur est aussi proposée. Ensuite, ils écrivent sur leur texte les endroits où ils pourraient insérer les musiques choisies. La deuxième partie est réalisée en groupe de cinq ou six. Ils mettent en commun leur travail individuel et se mettent d’accord sur une mise en musique. Chaque groupe écrit ses choix ainsi que les justifications de ces choix sur une feuille (musique, bruitage, répartition du texte) et sur un exemplaire du texte. Les élèves se répartissent les rôles (lecteurs, lancer la musique, réaliser les bruitages) et s’entraînent.

Une fois tous les groupes prêts, chaque groupe passe devant la classe. Un retour oral collectif sur les choix des musiques est effectué.

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- avec le texte extrait de Je te sauverai de Eric Simard

Après la lecture du texte, les élèves réfléchissent de façon individuelle à la manière de mettre en musique le texte et ils notent leurs idées sur leur cahier de brouillon : Quelle musique connue de leur répertoire pourrait convenir ? Quel bruitage pourraient-ils produire ?. Pour le lendemain, il leur est demandé dans la mesure du possible d’apporter du matériel, une musique sur clé USB. Dans un second temps, les élèves se mettent en groupe de 5/6 et mutualisent leurs idées. Comme pour la condition précédente, chaque groupe réalise les deux documents écrits, se répartit les rôles, s’entraine et passe devant la classe.

Les musiques choisies par les élèves sont des musiques qu’ils ont apportées de chez eux ou des musiques qu’ils m’ont proposées et que l’on a cherchées sur l’ordinateur. Les bruitages sont créés par les élèves avec le matériel apporté ou le matériel à disposition dans la classe. Un retour oral est effectué : les différents bruitages et musiques utilisés sont recensés, accompagnés à chaque fois d’une justification.

(29)

5. Résultats

Avant de donner les résultats, un point sur le nombre d’élèves va être effectué.

Les résultats d’un élève ont été écartés de l’analyse car ils étaient non significatifs (trop peu de réponses aux questions).

La variation du nombre d’élèves s’explique par des absences ou par quelques feuilles non ramassées au pré-test ou au post-test.

5.1 Résultats globaux

Moyenne au pré-test

(/13) Moyenne au post-test (/13) Différence entreles deux tests

Matilda (neutre) 9,5 9,909 + 0,409

Martien (débat 1) 9,25 9,792 + 0,542

Le plat du chien (débat 2 ) 7,652 9,174 + 1,522

50 000 dollars de Chewing Gum (musique 1)

6,875 8,417 + 1,542

Je te sauverai ! (musique 2) 7,318 9,181 + 1,863

Tableau 1 : moyennes aux pré-test et post-test pour l’ensemble des conditions expérimentales, obtenues en réalisant une moyenne du nombre de bonnes réponses obtenues par tous les élèves, sachant que treize questions étaient posées.

Matil da (n eutre ) Marti en (d ébat 1) Le pla t du c hien ( déba t 2 ) 50 00 0 doll ars d e Che wing Gum (mus ique 1 ) Je te sauv erai ! (mus ique 2 ) 0 2 4 6 8 10 12 Moyenne au pré-test (/13) Moyenne au post-test (/13)

(30)

Nous allons d’abord regarder les scores obtenus au pré-test pour discuter de la difficulté des textes.

Les deux premiers textes ont un taux de bonnes réponses plus élevé. Les textes semblent donc avoir été mieux compris en première lecture. Dans l’extrait de Matilda, la fin dévoile l’implicite qui est donc peu présent si l’élève comprend correctement la fin et la met en lien avec la partie précédente. L’implicite de la nouvelle Martien est aussi facilement décodable. Le taux de bonnes réponses pour la nouvelle Le plat du chien et l’extrait de Je te sauverai ! sont sensiblement identiques. Ces deux textes présentent le même type de difficulté. La nouvelle joue sur les non-dit. L’extrait de Je te sauverai ! ajoute un style poétique.

Le texte Harry Chewing Gum, utilisé pour la condition « musique » s’est avéré difficile de compréhension pour les élèves. Le score reste inférieur par rapport aux autres textes pour les deux passations. Les élèves ont eu du mal à comprendre le fait que Harry était un personnage de télévision, et que le narrateur racontait ce qu’il voyait sur l’écran. Ce score faible s’explique par le fait qu’il s’agit du texte le plus décalé, dans lequel apparaît du surréalisme. La difficulté et le type de texte influencent donc le nombre de bonnes réponses obtenues en pré-test et post-test.

Nous allons maintenant regarder les différences entre les deux passations.

Une faible différence est observée pour la condition « neutre » et la condition « débat 1 ». Cette faible différence s’explique en partie par la bonne compréhension du texte dès le pré-test, la marge de progression potentielle étant moins élevée.

D’autre part, pour la condition « neutre », la différence avec le post-test est faible car aucun travail n’a été effectué entre les deux passations.

La différence reste positive car dans les deux cas, les élèves ont tout de même relu le texte deux fois avec une semaine d’intervalle. Ceci peut permettre aux élèves de repérer d’autres éléments à la deuxième lecture, d’autant plus pour la nouvelle Martien pour lequel un débat a été réalisé.

Le débat sur Martien a influencé faiblement la compréhension du texte. Il portait sur le principal implicite du texte : la blague de Félicien, qui est en réalité dans le grenier. Lors de la discussion collective, les questions suivantes ont été posées à l’oral : Pourquoi Félicien ne pouvait-il pas être sur Mars ? Pourquoi demandait-il s’il pouvait revenir ? Les élèves devaient répondre en justifiant. Ainsi, la réponse aux questions 10 et 12 était donnée.

(31)

On peut noter une différence sensiblement identique entre la condition « débat 2 » et « la mise en musique 1 ».

La mise en musique semble donc être la condition qui a permis la plus grande progression dans la compréhension du texte.

La différence la plus élevée est observée pour la condition « mise en musique 2 ».

Pour la première mise en musique, la différence est moins élevée. Cela peut s’expliquer par le fait que les élèves avaient seulement à réaliser un choix parmi des musiques proposées, il y avait donc moins de réflexion. En revanche, pour la deuxième mise en musique, c’était à eux de trouver, sans aucune piste. La réflexion était donc plus poussée.

Le tableau suivant présente la proportion d’élèves dont le score a diminué, augmenté ou est resté stable, pour chaque texte.

diminution du score stabilité du score augmentation du score

Matilda 9,09 72,72 13,64 Martien 4,17 66,67 29,17 Plat du chien 0 52,17 47,83 50 000 dollars de Chewing Gum 4,17 45,83 50 Je te sauverai 0 40,91 59,09 tableau 2 0 10 20 30 40 50 60 70 80 diminution du score stabilité du score augmentation du score graphique 2

Titre et légende du tableau 2 et du graphique 2 : proportion d’élèves en pourcentage en fonction de l’évolution du nombre total de bonnes réponses entre le pré-test et le post-test - diminution : au moins 2 bonnes réponses en moins

- stabilité : pas de différence, une différence positive ou négative d’une réponse - augmentation : au moins 2 bonnes réponses supplémentaires

(32)

Les résultats montrent que dans l’avancement des conditions, la proportion d’élèves dont le score reste stable diminue et celle dont le score augmente s’accroît.

Ces résultats rejoignent ceux obtenus pour les différences de moyennes entre pré-test et post-test : une relative faible proportion d’augmentation pour Matilda et Martien, une forte et identique proportion d’augmentation pour Le plat du chien et 50 000 dollars de plus et un accroissement très élevé de la proportion d’augmentation pour Je te sauverai !.

La faible proportion d’élèves ayant augmenté pour Martien peut éventuellement s’expliquer par le fait que peu d’élèves ont su tirer partie du débat, ou que le débat ne leur a pas permis de répondre aux questions dont ils n’avaient pas la réponse.

La proportion d’élèves dont le score a augmenté au post-test est la plus importante pour la condition mise en musique 2.

Les deux mises en musique semblent avoir amélioré la compréhension d’un nombre plus élevé d’élèves que pour les autres conditions. Cela montre qu’ils ont été davantage réceptifs à cette modalité de travail. Ce travail était adapté à plus d’élèves.

Cela peut aussi s’expliquer par le fait que tout le monde participait activement pour la musique. Pour le débat, c’était une discussion collective, le taux d’écoute variait donc selon les élèves et les moments et certains étaient très actifs en prenant la parole.

5.2 Types de questions

Nous allons voir l’évolution du taux de bonnes réponses pour chaque type de questions. Chaque type ne comptabilise pas le même nombre de questions. Les moyennes ont donc été toutes rapportées à une moyenne sur 13 afin de pouvoir comparer l’ensemble des résultats.

Textuelles

(4 questions) (4 questions) Inférences Connaissances ( 3 questions) ( 2 questions ) Émotions

Matilda 10,23 10,5 9,681 9,546 6,364 7,636 7,362 7,362 Martien 10,626 10,875 7,374 8,001 6,332 7,832 10,002 9,252 Le plat du chien 11,349 11,478 4,956 7,173 5,564 6,784 4,956 7,824 50 000 dollars de plus 5,001 6,75 6,375 7,875 6,832 7,5 7,5 9,252 Je te sauverai 9,816 10,362 7,089 9,135 1,272 3,816 8,178 10,362 Tableau 3 : moyennes (sur 12) au post-test et au pré-test selon le type de question

en rouge : différence la plus importante

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-1 -0,5 0 0,5 1 1,5 2 2,5 3 3,5 Textuelles (4 questions) Inférences (4 questions) Connaissances ( 3 questions) Emotion ( 2 questions ) Gra phique 3 : différence entre les moyennes (sur 13) au post-test et au pré-test selon le type de question

Pour la condition « neutre » et « débat 1 », le type de question subissant l’augmentation la plus importante est celui nécessitant de faire des inférences pragmatiques (à partir des connaissances).

Pour l’extrait de 50 000 dollars de plus, le taux de bonnes réponses aux questions textuelles a subi aussi une augmentation importante. Cela peut s’expliquer par la compréhension difficile des élèves de la structure du récit en deux parties : la partie décrivant ce qui se passe à l’écran et la partie décrivant ce que font les narrateurs qui regardent la télévision.

La mise en musique peut permettre de comprendre la structure du texte. En effet, la majorité des groupes a choisi deux musiques différentes pour les deux parties du texte, les mettant ainsi en évidence.

Pour l’extrait Je te sauverai, le taux de bonnes réponses aux questions portant sur les connaissances a fortement augmenté. Ce résultat est cependant non significatif car le taux de bonnes réponses restent très bas : 1, 272 au pré-test (moins d’une bonne réponse sur 3), 3,816 au pos-test (aux alentours d’une bonne réponse sur 3). Malgré la mise en musique, les élèves n’ont pas fait le lien entre leurs connaissances et le texte. Il se peut aussi que les connaissances mobilisées étaient trop complexes et donc pas présentes chez les élèves. Pour la condition « débat 2 » et les deux conditions « mise en musique », le type de questions sur les émotions montre la différence la plus élevée. Le débat 2 et la mise en musique semblent avoir permis aux élèves de mieux répondre aux questions sur les émotions. Lors du débat 2, les questions sur les intentions des deux personnages principaux ( le touriste et le

(34)

vieux breton) et sur la malice du vieux breton permettent de souligner les émotions des personnages. Pour les mises en musique, les émotions provoquées par le texte et la musique doivent être en accord. Ces émotions doivent être verbalisées et discutées par les élèves. Cela est à nuancer car il n’y avait que deux questions sur les émotions, et donc les écarts deviennent vite élevés.

Pour la condition « débat 2 » et les deux conditions « mise en musique », le type de questions venant en second est celui nécessitant des inférences textuelles. Ces conditions semblent avoir permis aux élèves de réaliser un nombre plus important de liens entre les éléments du texte et de façon plus correcte et ainsi de faire les inférences pertinentes.

Les questions sur les émotions et les questions nécessitant des inférences textuelles ont subi toutes les deux une forte augmentation. Les questions sur les émotions des personnages dépendent en partie d’une réalisation correcte des inférences textuelles. Par exemple, dans le texte Le plat du chien, il est nécessaire d’avoir compris que le vieux Breton a dupé le touriste pour trouver l’état émotionnel du touriste. Une augmentation du taux de bonnes réponses sur les inférences textuelles entraîne donc une augmentation du taux de bonnes réponses sur les émotions.

5.3 Étude de cas

Justine : Martien

Elle est passée de 5 bonnes réponses sur 13 possibles à 9. Ses bonnes réponses supplémentaires sont issues de tous les types de questions. Durant le débat, Justine était très active. Elle a eu notamment une discussion très pertinente avec son partenaire de travail. Les deux élèves se justifiaient en recourant au texte, « Mais non, il est dans le grenier. Regarde

c’est écrit : « laisser le colis et la lettre devant la porte du grenier. » »

Ce travail lui a permis de comprendre davantage le texte. Par exemple, au pré-test, elle répond que l’enfant est sur Mars, alors qu’au post-test, elle répond que l’enfant est dans le grenier. Le débat lui a permis de comprendre le principal élément implicite du texte.

Cette nette augmentation ne se retrouve pas pour les autres textes. Le texte Le plat du chien n’a pas été compris, même après le débat. Pour l’extrait de 50 000 dollars de plus et Je te

sauverai ! le score reste stable, révélant une compréhension moyenne du texte (6 bonnes

réponses). La mise en musique et le débat collectif ne semble pas permettre à cette élève d’améliorer sa compréhension, contrairement au débat entre pairs.

(35)

Lucas : Le plat du chien

Il est passé de 5 bonnes réponses à 11. Il est passé d’une faible compréhension du texte à une excellente compréhension. Lors du débat, il était impliqué et attentif. Il a participé de façon très pertinente à l’oral. Ce travail de construction collective du sens du texte lui a été très bénéfique.

On peut noter chez lui une augmentation du taux de bonnes réponses pour Martien et l’extrait de 50 000 dollars de plus avec une très bonne compréhension des textes au post-test et une stabilité du score pour Je te sauverai !.

Lucas était investi pour l’ensemble des modalités de travail : débat et mise en musique, ce qui lui a permis d’augmenter sa compréhension pour la majorité des textes.

Mathieu : 50 000 dollars de plus et Je te sauverai !

Pour l’extrait de 50 000 dollars de plus, il est passé de 5 bonnes réponses à 10. Pour l’extrait de Je te sauverai, il est passé de 8 bonnes réponses à 11. Durant les mises en musique, il était très impliqué et motivé, cherchant précisément à quel endroit placer tel bruit, me demandant de chercher sur l’ordinateur une musique qu’il connaissait et qui allait bien avec le texte pour

Je te sauverai. Il était un élément moteur du groupe.

Pour Je te sauverai ! , les trois bonnes réponses supplémentaires relèvent des inférences textuelles et il n’avait pas du tout répondu à ces questions lors du pré-test. Ces trois bonnes réponses supplémentaires sont précises. Voici l’exemple pour la question 8 : A-t-il encore peur d’Alan ? Non, car il lui fait confiance.

Son investissement et donc son travail de qualité semblent lui avoir permis de faire davantage de lien entre les éléments du texte.

(36)

6. Discussion

L’objectif de notre étude était de voir si la mise en musique d’un texte améliorait sa compréhension. Pour cela, les élèves ont répondu deux fois à un même questionnaire de compréhension sur un texte. Entre les deux passations, ils ont réalisé trois conditions différentes : aucun travail, un débat, une mise en musique.

Les hypothèses étaient : la mise en musique d’un texte améliore sa compréhension, de façon plus importante qu’un débat ou non ; la mise en musique d’un texte n’améliore pas sa compréhension.

Les résultats montrent que mettre en musique un texte permet aux élèves de mieux comprendre.

Les élèves font plus de liens entre les éléments du texte et donc plus d’inférences.

Ils comprennent davantage les émotions ressenties par les personnages. Pour Harry Chewing

Gum, ils ont choisi des musiques rapides, créées pour des films de western, d’action. Ces

musiques évoquent la peur ressentie par Harry et le spectateur, et la rapidité de la poursuite. Pour l’extrait de Je te sauverai, ils choisissent une musique lente, avec peu d’instruments (un morceau de piano, de violon) qui évoque la tristesse d’Alan et la détresse de l’oiseau. L’élève ou les élèves qui ont compris ce lien entre musique et texte l’explique(nt) aux autres. Lorsque les groupes passent, les élèves spectateurs, peuvent mettre directement en lien la musique et le texte lu.

Le taux de bonnes réponses aux questions sur les inférences et les émotions n’augmente pas quand aucun travail n’est réalisé ou que la modalité de travail affecte la compréhension de peu d’élèves. Les inférences textuelles et la perception des émotions des personnages ne peuvent être davantage réalisées par les élèves si aucune aide extérieure ne leur est apportée. Il s’agit donc de travailler plus particulièrement les stratégies pour réaliser ces actions (inférences, prise de conscience des émotions des personnages) afin que leur compréhension dans ces domaines devienne de plus en plus autonome.

De plus, les élèves ont beaucoup apprécié de mettre en musique les textes et souhaitent refaire ce travail. Ce plaisir éprouvé pendant la mise en musique peut aussi avoir une influence sur la

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compréhension du texte. Les élèves peuvent par conséquent aimer davantage le texte et donc chercher à davantage le comprendre.

L’efficacité de la mise en musique peut aussi s’expliquer par l’adhésion d’un nombre maximal d’élèves, comparé à un travail de compréhension plus traditionnel. En effet, mettre en musique est une source importante de motivation, phénomène très visible durant les phases de travail collective où la grande majorité des élèves était très investie et enthousiaste.

Dans les conditions mises en musique, chaque groupe est venu présenter son travail. Les élèves ont donc entendu cinq fois ces textes, avec chaque fois une mise en musique différente, permettant d’ajouter des éléments de compréhension du texte.

Lors des mises en musique, les groupes avaient une présentation à réaliser devant les autres élèves. Cet objectif permet de donner un sens concret à l’activité. La présentation devant autrui les oblige à s’investir davantage dans leur travail.

Ce résultat est cependant à nuancer. La différence est faible entre la condition « mise en musique 1 » et la condition « débat 2 ».

Le débat 2 s’est révélé très efficace pour la compréhension des élèves. Il a permis aux élèves de comprendre les différentes étapes du texte.

La mise en musique semble avoir été efficace pour la majorité des élèves en améliorant leur compréhension. Mais pour quelques élèves, cette modalité de travail n’est pas efficace. Cette inefficacité peut provenir du fait que l’élève n’établit pas un lien entre la mise en musique et le texte. Il ne se pose pas précisément des questions sur le texte pour mettre en musique. Cela signifie qu’un travail de méthodologie est à réaliser avec ces élèves afin qu’ils relient la compréhension du texte et les musiques et bruitages.

Cela peut aussi provenir de la non implication de l’élève dans ce travail. L’implication de l’élève est une condition nécessaire pour que le travail réalisé soit efficace et lui permette d’améliorer sa compréhension.

Cela montre que tous les élèves réagissent différemment et ne sont pas tous sensibles à la même modalité de travail.

Ces résultats, s’accordent avec ceux des études antérieures. En effet, celles-ci ont montré que la musique et le langage faisaient intervenir des ressources, stratégies et processus cognitifs communs. Nos résultats rejoignent les études montrant que développer les compétences en musique permettrait d’améliorer les compétences en lecture (reconnaissance et décodage de

Figure

figure   issue   de   l’article   :  Kuperberg,   G.   R.   (2007).  Neural   mechanisms   of   language comprehension: Challenges to syntax
Graphique 1 : évolution des moyennes du nombre de bonnes réponses par tous les élèves

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