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ARTheque - STEF - ENS Cachan | Une culture de la biosphère pour la biosphère

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Academic year: 2021

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Texte intégral

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UNE CULTURE DE LA BIOSPHÈRE POUR LA BIOSPHÈRE

Bernard LANG ELLIER

Institut Universitaire de Fonnation des Maîtres, Académie de Caen, Centre d'Alençon

MOTSCLÉS: CULTURE SCIENTlFIQUE BIOSPHÈRE DÉCULTURATION -DÉNATURATION -ANTIIROPOCENTRISME

RÉSUMÉ: TI s'agitd'une réflexion sur l'efficacité en matière d'Education à IEnvironnementde l'enseignement, et plus paniculièrement de l'enseignement de la Biologie - Géologie. Comment compenser l'absence de "vécu naturel" chez certains élèves? La dénaturation de la planète peut entraîner une certaine déculturation. Une meilleure considération poUfles conceptions (bonnes ou mauvaises) des élèves, l'introduction dans l'enseignement d'une histoire de la biosphère, et une moindre valorisation de la "pureté scientifique" sont peut-être des solutions pour une reculturation naturaliste des hommes.

SU MMAR Y : Our tapie is a consideration on the efficiency ofteaching, more accurately, of biology and Geology teaching, in the field of environment education. How to cope with the fact that sorne students lack of actual experiences close to nature? The damage inflictedtaour planet may lead to a deficiency in cultural interest and implication. May be. we could, frrst, accept pupils'ideas (good or bad), then introduce, in our educational system, the history of the biosphere. and, at last, Dot overestimate "sçiemific purity".

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1.

INTRODUCTION

Lebulletin de l'APBG (Association des Professeurs de Biologie - Géologie) a publié en 1989 un article CQo.rédigé par un professeur de Sciences Naturelles et un statisticien (CI. Lafon et P. Auquier) qui ont réalisé "une enquête sur la culture scientifique" d'élèves de lycées et de classes préparatoires. Selon les auteurs, "16.1 %seulement en classes prépas (et 21.2 %dans le second cycle) om bien assimilé l'écologie ( 34,9%"plutôt mal" ou "très mal", et pour 42,2%elle n'a pasété enseignée). Ce n'est pas un hasard si le classement des différents domaines évoqués est pratiquement le même en classes préparatoires et dans le second cycle. En tête des questions les mieux connues: la reproduction et le corps humain, bien prises en charge par notre enseignement;àla traîne: le respect de la nature et l'évolution, plus délaissées (u.)" Les meilleurs acquis semblent donc être dans les domaines anthropocentrés.

L'intéret de l'homme pour l'homme, préoccupation toute naturelle, semble être un obstacle à une considération pour la diversité du vivant et à la compréhension du fonctionnement de la biosphère.

L'évolution des sciences biologiques s'est faite dans 2 directions: àpartir de la description des espèces (qui caractérise notamment le 18e S.), la biologie a évolué vers l'infiniment petit (l'ADN) d'une part et vers l'infiniment grand (la biosphère) de l'autre. La revuePourLa Science a publié, en décembre 1990, un article intitulé "une biologie dépassée? " :"Letravail des naturalistes est pénalisé par son ampleur C..)Lenaturaliste travaille avec des moyens d'observation classiques, ce qui semble déprécier la valeur des résultats; une recherche peuHlle être considérée corrune utile et moderne sans que ses moyens soient nouveaux et coûteux?"

L'auteur dénonce cette idée que seule la biologie moléculaire aurait de l'avenir et serait judicieuse. Ce tedmicisme, ici dénoncé, engendre spécialisation et

1

ou parceHisation des savoirs, ainsi qu'une artificialisation des moyens de connaissance au détriment d'une culture naturaliste. Culture naturaliste qui suppose une relation avec - un vécu dans - la biosphère.

2. LES MÉCANISMES DE DÉCULTURATION VIS.À.VIS DE LA BIOSPHÈRE Ces mécanismes peuvent être de 2 ordres, la façon de vivre et la façon d'enseigner.

2.I. Vivre : L'extension de la technosphère au détriment de la biosphère entraîne parfois une absence de vécu "naturel"."Ladénaturation de la planète, c'est aussi sa déculturation" (Ph. St

Marc,

1971). Absence de vécu renforcée par la télévision qui peut être considérée comme une "machineàne pas vivre" ("pendant ce temps là les enfants ne vont pas au bois").

L'apartheid de la nature, idée développéeparF. Terrasson dans"Lapeurde lanature"(1988) qui voudrait que la nature n'ait pas sa place dans les espaces humanisés (spécialisation de l'espace) peur être aussi une cause de déculturation; "Il y a donc des cultures qui font l'apartheid de la nature, qui ne la supponent pas, qui ont besoin de s'en séparer, de la dominer. Ily en a d'autres qui, sans renonceràmodifier le milieu, ont choisi la coopération, l'équilibre. Les premières sont fières de leurs terres nues et infinies. Les deuxièmes sont attachées sentimentalement

à

leurs chemins etàleurs bois. Ce sont les premières qui sont en train de gagner."

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surexploiter des agrosystèmes ultra-simplifiés et "retéguer"la nature.

2.2. Savoir : Une culture "biosphérique" suppose de pouvoir relier des savoirs facilement accessibles par le plus grand nombre, ce que ne pennetpas la tendance àlaspécialisation et

1

ou à la parcellisation des savoirs; ''La connaissance isolée n'a de valeur que dans le système théorique qui la réunità tout le reste..."(E.Morin, 1977).

L'enseignement de réseaux trophiques simplifiés permet de légitimer la destruction d'espèces: "Lapensée simplifiante, barbarie du réel"(E.Morin, 1977).

L'abus de scientificité, dénoncé par Schatzman dans l'Encyclopédie universelle (article Sciences), va égalementà l'encontre d'une culture scientifique et ne pennet pas forcément de "relier" : ''Tout le système éducatif est pénétré de cette idée que la fonnation scientifique est destinéeà cellX·là seuls qui en auront l'usage dans leur métier... "

Le dégoûl pour les Sciences naturelles, chez certains élèves, peut s'expliquer par cet abus de scientificité. Ainsi, en quoi l'AMPe (Adénosine Mono-Phosphate cyclique) rencontré dans un manuel de le

A

(section littérature) ou le

B

(sc.économiques) peut-il intéresser

les

élèves? Ce dégoût peut s'expliquer aussi par un mauvais choix de manipulations : ainsi les dissections d'oeil de boeuf laissent des souvenirs négatifs chez nombre d'élèves. Et c'est cene image des Sciences Naturelles qui reste dans leur tête.

Le déballage de connaissances par des enseignants trop enthousiastes, qui ne pennet pas à la logique des élèvesde rencontrer la leur, a été caricaturé par P. Desproges (1990) dans "Fonds de tiroirs" (p.55) et par G. Bedos (1989) dans" Petites drôlerieselautres méchancetés sans importance" (p.89). Cette exposition de connaissances va aussi

à

l'encontre d'une culture et engendre le rejet ou l'insignifiance (mémorisation de termes qui ne signifient rien).

Enfin l'artificialisation des conditions de découverte du vivant est dénoncéepar F. Terrasson (1988) : "Avec nos réserves pédagogiques, au lieu de donner le goût de l'étude de la nature, nous avons habitué nos compatriotesà être conduits."

3. LES MÉCANISMES DE DESTRUCTION DE LA NATURE:

Nous distinguerons des origines éducative, psychique et socio-économique.

3.1. Origine éducative: Les manuels (d'autrefois !)enseignent pourquoi et comment détruire les espèces.Ce sont des conceptions anthropocentristes et dualistes(l'hommes'opposeà la nature). Ici la

connaissance est un outil de destruction.

Inversement

la destruction peut être un outil de

connaissance. Ainsi les méthodes trawnatiques de découverte du vivant (prélèvements abusifs et répétitifs d'espèces, collections de papillons...) occasionnent des disparitions. Viennent s'ajouter à cela les collections lucratives d'espèces rares.

3.2. Origine psychique: Ainsi, la phannacopée ethnozoologique, plus importante, il est vrai. dans le passé qu'aujourd'hui, d'une efficacité douteuse, a occasionné des raréfactions. Les phobies sur lesquelles le raisonnement semble inefficace occasionnen t des destructions. Les traditions, telle la chasse ("traditionnelle" mais avec des moyens modernes) occasionnent des problèmes de ressources.

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3.3. Origine socio-économique: La démographie humaine, le productivisme sont des causes de destruction de la biosphère. En effet. l'humanité, qui est environ 10 fois plus nombreuse aujourd'hui qu'au 16 e siècle, n'a pas trouvé comment croître en nombre et comment produire des denrées sans simplifier cette biosphère. Liée à cette démographie, la transformation de plus en plus imponante d'espaces naturels considérés comme improductifs ou malsains.

Le

dictionnaire économique et sodalde Brémond (Ratier, 1981)à l'article "Patrimoine" disait: "Quand on assèche un marais, on rend habitable des régions infestées de moustiques et on enrichit parfois son patrimoine naturel." Notons cependant que ces propos ne se retrouvent plus dans les éditions récentes du même ouvrage.

4. DES

AMORCES DE SOLUTION POUR UNE AMÉLIORATION DE LA

CULTURE BIO SPHÉRIQUE DU CITOYEN DE LA PLANÈTE

Face à la dégradation de la biosphère, plusieurs remèdes pourraient être, ou ont été, envisagés: notamment des solutions juridiques (lois de protection, limitations et coercitions diverses) mais surtout des solutions éducatives. En effet, il semble difficile de protéger contre la volonté du public. Partons du principe que l'Éducationà l'Environnement est le moyen non seulement le plus efficace mais aussi le plus humain:

4.1. Le premier moyen me semble être la considération pour ceux qui apprennent: les conceptions des élèves qu'elles soient "bonnes" ou "mauvaises" s'ex:pliquent et il ne sert à rien de les négativer. Prendre conscience qu'il ne suffit pas de dire pour convaincre et qu'il ne suffit pas d'être convaincu pour changer: depuis 2 siècles les araignées et les taupes sont plutôt présentées positivement dans les manuels. Certains (Milne-Edwards, 1897) conseillaient même de multiplier les taupes, contrairement à ce qui se fait aujourd'hui.

Nous pouvons dire dans le même ordre d'idée que la construction des concepts est plus perfonnante que les simples acquisitions de vocabulaire.

4.2. L'histoire des conceptions sur le monde vivant pourrait être enseignée, ce qui développerait ridée de vérité provisoire et de complexité et iraità l'encontre des certitudes (qui sont d'ailleurs une façon de déconsidérer l'élève).

L 'histoire de la biosphère, comme par ex. l'évolution des végétations méditerranéennes au cours de l'histoire permettrait de réaliser les impacts imperceptibles (sur une durée de vie humaine) mais réels de la présence humaine. Occupés que nous sommes à retracer l'histoire événementielle de nos rois, nous oublions l'histoire essentielle de la biosphère: "Brûlante, l'histoire reste aveugle à la nature." (M. Serres, 1990).

4.3. L'interdisciplinarité et l'intégration aux: disciplines naturalistes des approches esthétiques, psychologiques.. permettraient aux: "non-scientifiques" de ne pas être rebutés. Une étudiante en IUFM (Institut Universitaire de Fonnatîon des Maîtres) disaÜà la rentrée 1991: "Pour moi les sc. nat. regardent de façon scientifique des choses qui m'intéressent par leur aspect esthétique."

11 faudrait démolir ce mythe de la pureté scientifique:

CI. Lévi-Strauss (1962) : "L'homme du néolithique ou de la proto-histoire...est l'héritier d'une longue tradition scientifique... "

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J.

P. Deléage (1991) :"Cette science (l'écologie) est parcourue d'interrogations métascientifiques qu'il serait vain d'écarter au nom d'une prétendue pureté scientifique..."

J.M, Drouin (1991) : "Achaque fois l'idée d'un déséquilibre créé par un manque de science et de conscience &:ologique est utilisé comme un avenissernent .. Lesmêmesincertitudes se retrouvent lorsqu'il s'agit de mesurer à l'aune de la science actuelle les savoirs traditionnels de la campagne...."

L'introduction de dessins humoristiques

dans les manuels

(Ex. :

Biologie - Géologie de 2nde. Hachette 1990. p.1l9, voir Fig.!) contribue aussiàlimiter la valorisation delascientificité pure.Malgrétom. ces dessins nécessitent, pour leur compréhension. l'utilisation de certains concepts et la compréhension de certains phénomènes écologiques, comme ici le cycle du carbone... Ils sont donc formateurs et éducatifs.

La

technique des

jeux

de

rôles où la classe est panagée en

2

groupes devant défendre des idées opJX)sées est unbonmoyen de réaliser la complexité et de relativiser les "vérités" ; un bon moyen de considérer lathèseadverse et de comprendresonfonctionnement argumentaire: "A chaque opposition,onne regarde pas si elle est juste, maisàtort ou à raison comment on s'en défera, au lieu d'y tendre le bras, nous y tendons les griffes." (Montaigne, vers 1580).

5. CONCLUSION

L'écologie et ['environnement ont beaucoupdesuccès en ce moment Les média, plus peut-être que l'enseignement, l'ont favorisé.Ilserait regrettable que par abus de scientificité (Schatzman). de fonnol et de dissections (effet "oeil de boeuf'), l'enseignant de biologie (qui enseigne aussi l'écologie) aille

à

l'encontredecet engouement.

C'est le rôle de l'enseignement de compenser les méfaits de l'extension de la technosphère au détriment de la biosphère ; faire en sorte que la dénaturation de la planète n'engendre pas une déculturation qui pourrait engendrer, à son tour, une plus grande dénaturation et ainsi casser cette spirale mortelle (Fig.2).

6. BIBLIOGRAPHIE :

BREMOND, 1981 ..Dictionnaire économique et social,Paris: Hatier. DELEAGE (J.-P.), 1991.-Histoire de l'écologie,Paris: La Découverte. DROUIN (J.-M.),1991. -Réinventer la nature,Paris : Desclée de Brouwer. GIOLITTO (P.), 1982.-Pédagogie de l'Environnement,Paris: PUF.

LAFON(C.),AUQUIER(P.), 1989. - Sciences naturelles et univers mental des élèves,Bulletin de l'APBG,4.

LEVI-S1RAUSS (C), 1962.-Lapenséesauvage,Paris: Plon.

MORIN (E.), 1977. -La méthode,1. La nature de la nature, Paris:LeSeuil. SAINT-'MARC (Ph.). 1971.·Socialisationde la nature,Paris: Stock.

SCHATZMANN

(E).

1980. -

Sciences: 1. Le statut de lascience,Encyclopaedia Unjversalis,T.

14.

SERRES (M.), 1990..Le

contrat naturel.

Paris:

F.

Bourin.

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