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Analyse du déplacement du bénéficiaire en assistance totale chez les techniciens ambulanciers-paramédics lors de situations réelles de travail

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Academic year: 2021

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Analyse du déplacement du bénéficiaire en assistance

totale chez les techniciens ambulanciers-paramédics

lors de situations réelles de travail

Mémoire

Dominique Larouche

Maîtrise en Kinésiologie

Maître ès sciences (M. Sc.)

Québec, Canada

© Dominique Larouche, 2013

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III

Résumé

La prévalence des troubles musculo-squelettiques chez les techniciens ambulanciers paramédics (TAP) est élevée. Le risque de blessures est présent lors de déplacement où le poids du bénéficiaire est complètement pris en charge par les TAP. L’objectif est de décrire la variabilité du déplacement d’assistance totale en situation réelle de travail et de comparer les observations avec les protocoles du document de formation sur les principes de déplacement sécuritaire des bénéficiaires (PDSB-TAP). Cinquante-huit TAP canadiens ont été observés durant leur quart de travail totalisant soixante-quatre déplacements. Une division en neuf familles a été faite selon la hauteur d’assise des bénéficiaires et les équipements utilisés. Les méthodes de travail des TAP varient selon leur positionnement et le positionnement des équipements autour du bénéficiaire. Il y a une faible application des protocoles de déplacement suggérés par le PDSB-TAP. Certaines familles n’apparaissent pas dans le PDSB-TAP et d’autres n’ont pas été observées.

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Table des matières

Résumé ... III Table des matières ... V Liste des tableaux ... VII Liste des figures ... IX Remerciements ... XI Avant-propos ... XIII

Chapitre 1 : Introduction générale ... 1

Chapitre 2 : Recension des écrits ... 5

2.1- Modèles ... 5 2.1.1- Modèle de lésions ... 5 2.1.2- Équation du NIOSH ... 6 2.2- Approches ... 10 2.2.1- Approches biomécaniques ... 10 2.2.2- Approche ergonomique ... 14 2.3- Charges inertes ... 15 2.3.1- Variabilité de la tâche ... 15

2.3.1.1- Position de squat (dos droit, genoux fléchis) ... 15

2.3.1.2- Position de stoop (dos fléchi, genoux droits) ... 17

2.3.1.3- Position libre ... 18

2.3.2- Principes de manutention pour charges inertes... 19

2.3.2.1- Productif-sécuritaire ... 20

2.4- Charges non inertes (bénéficiaires) ... 21

2.4.1- Variabilité de la tâche ... 21

2.4.1.1- Chez le personnel infirmier ... 21

2.4.1.2- Chez les techniciens ambulanciers-paramédics (TAP) ... 22

2.5- Principes de manutention dans les formations ... 23

2.5.1- Principes de déplacement sécuritaire des bénéficiaires (PDSB) ... 23

2.5.1.1- Principes enseignés ... 24

2.5.1.2- Applications en situation de travail réel ... 25

2.5.2- Principes de déplacement sécuritaire des bénéficiaires pour techniciens ambulanciers-paramédics (PDSB-TAP) ... 26

2.5.2.1- Principes enseignés ... 26

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VI Chapitre 3 ... 29 3.1 Résumé ... 30 3.2 Introduction ... 31 3.3 Matériel et méthodes ... 33 3.3.1. Participants ... 33

3.3.2. Protocole d’observation de l’activité réelle de travail ... 34

3.3.3. Découpage de l’activité de travail ... 36

3.3.4. Création de la grille d’analyse ... 40

3.3.5. Validation de la grille ... 42

3.3.6. Choix des variables de la grille ... 42

3.3.7. Traitement et analyse des données ... 43

3.4 Résultats ... 44 3.4.1. Conditions d’observations ... 44 3.4.2. Variabilité de la tâche ... 50 3.5 Discussion ... 67 3.6 Conclusion ... 83 Liste de références ... 84

Chapitre 4 : Conclusion générale ... 87

Bibliographie ... 91

Annexes ... 95

Annexe 1 – Description des familles d’activités ... 95

Annexe 2 – Grille d’analyse ... 97

Annexe 3 - Équipements ... 132

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VII

Liste des tableaux

Tableau 1 : Facteurs en faveur ou en défaveur des soulèvements en position de squat (lorsque la charge est près du corps) ... 16 Tableau 2 : Facteurs en faveur ou en défaveur des soulèvements en position de stoop (lorsque la charge est éloignée du corps) ... 18 Tableau 3 : Répartition des 64 déplacements de bénéficiaires en assistance totale selon la famille et les moyens utilisés pour le transfert. ... 41 Tableau 4 : Répartition et données démographiques des TAP qui ont participé à l’étude selon les observations totales (311) et les observations des déplacements en assistance totale (83). ... 44 Tableau 5 : Caractéristiques des 311 interventions selon la composition des binômes (équipes) .... 45 Tableau 6 : Caractéristiques des 311 observations en fonction de la saison ... 46 Tableau 9 : Caractéristiques des sept familles d’activités pour les 311 interventions préhospitalières et les 64 interventions préhospitalières nécessitant un déplacement en assistance totale du

bénéficiaire ... 49 Tableau 10 : Distribution des 74 interventions préhospitalières selon le code d’appel de la centrale d’appels. ... 51 Tableau 11 : Données descriptives des phases de préparation, de positionnement, de transfert, de déplacement transitoire et de repositionnement pour les 9 familles de déplacement... 53

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IX

Liste des figures

Figure 1 : Principaux facteurs influençant les exigences du travail et la capacité du travailleur selon le modèle de Dempsey (1998)... 6 Figure 2 : Principaux facteurs influençant les exigences du travail et la capacité du travailleur selon le modèle de Dempsey (1998) et l’équation du NIOSH (termes soulignés). ... 9 Figure 3 : Force de compression et de cisaillement sur une vertèbre lombaire. ... 10 Figure 4 : Effet de la longueur du bras de résistance sur le moment de force à la colonne lombaire 11 Figure 5 : Techniques « squat », « stoop » et libre... 16 Figure 6 : Diagramme du recrutement de participants à l’étude. ... 33 Figure 7 : Déroulement typique d’un quart de travail de 8 à 12 heures ... 35 Figure 8 : Découpage des captures vidéo de l’intervention préhospitalière en sept familles d’activité ... 36 Figure 9 : Découpage en phase du déplacement (transfert) d’un bénéficiaire en assistance totale ... 39 Figure 10 : Cadran de référence de position ... 40 Figure 11 : Orientation de l’équipement ... 42 Figure 12 : Déplacement en assistance totale d'un bénéficiaire en position assise au sol vers la civière ... 55 Figure 13 : Déplacement en assistance totale d’un bénéficiaire en position assise sur du mobilier vers la civière ... 57 Figure 14 : Déplacement en assistance totale de la civière-chaise vers la civière ... 60 Figure 15 : Déplacement en assistance totale d’un bénéficiaire en position couché au sol vers la civière ... 63 Figure 16 : Déplacement en assistance totale d’un bénéficiaire en position couché sur du mobilier vers la civière ... 66

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XI

Remerciements

Je tiens à remercier mon directeur de recherche Philippe Corbeil d’avoir cru en moi. Il m’a offert des opportunités qui ont façonné mon cheminement académique. Il est aussi important de remercier ma codirectrice, Marie Authier, mes collègues Jérôme Prairie et Sandrine Hegg-Deloye, Marie-Hélène Proulx d’Urgences-santé et tous les ambulanciers de Québec et Montréal, tous pour leur implication dans le projet. Sans eux, celui-ci n’aurait pas pu se réaliser.

Merci à l’Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et en sécurité du travail pour son soutien financier et le prêt du dosimètre de posture. Merci à Christian Larue et Sirard pour leur soutien technique.

Merci à Christian Dumais. Une amitié sincère nous lie. C’est toujours une immense joie de se voir. Ces rencontres nous permettent de prendre une pause de ce tourbillon infernal de la vie. Un jour, tu m’as dit une phrase : « les gens très occupés sont souvent les mieux organisés, si t’as besoin d’aide, c’est vers eux que tu dois te tourner ». Tu es une inspiration pour moi. Je me considère chanceuse de faire partie de ton cercle d’amis.

Merci à mes parents de m’offrir votre amour inconditionnel. Vous avez toujours été disponibles pour moi, même dans les moments les plus durs. Merci à Julie et Pascale, mes sœurs adorées.

Merci à Cynthia, ma colocataire, qui a supporté mes humeurs. Nous avons été si proches et si loin en même temps. La suite ne peut être que meilleure.

J’ai l’habitude de grimper des montagnes, que ce soit en marchant, en courant, en roulant ou en montant des escaliers; j’arrive toujours au sommet. Cette montagne est celle dont je suis la plus fière. Je crois que sans entraînement cela n’aurait pas été possible. L’activité physique me permet de relâcher les tensions, de faire le vide, de vivre le moment présent et de me dépasser.

Merci à ma gang de « coureurs », merci à mes amis de « La Poc » et merci, à toi qui lis mon mémoire!

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XIII

Avant-propos

CHAPITRE 3 : L’analyse de déplacement du bénéficiaire en assistance totale chez les techniciens ambulanciers-paramédics lors de situations réelles de travail

Auteurs : Dominique Larouche, Marie Authier, Jérôme Prairie, Sandrine Hegg-Deloye et Philippe Corbeil.

Status : à être soumis

Contribution des auteurs : P. Corbeil, S. Hegg-Deloye, D. Larouche et J. Prairie ont conçu l’étude. S. Hegg-Deloye, D. Larouche et J. Prairie ont participé à la collecte de données. D. Larouche a rédigé la recension des écrits et Mme Authier et P. Corbeil ont donné leur approbation finale. P. Corbeil et D. Larouche ont rédigé le manuscrit. Tous les auteurs ont révisé le manuscrit et donné leur approbation. Aucun des auteurs n’avait de conflits d’intérêts.

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Chapitre 1 : Introduction générale

On a souvent associé la posture dos droit, genoux fléchis comme étant « la bonne technique de soulèvement ». Bien qu’elle se retrouve encore dans les formations en manutention, certains chercheurs ont démontré qu’il n’y avait pas d’évidence claire de ce qu’est la bonne technique de soulèvement [10, 33, 41, 50, 51]. Il semble exister plusieurs façons de soulever une charge inerte ou un bénéficiaire pour éviter les risques de blessures : mettre un pied devant l’autre pour rapprocher la charge du corps, ajuster sa technique de soulèvement en fonction de ses mesures anthropométriques, conserver une continuité dans le mouvement, adopter une ouverture des pieds vers la prise et le dépôt de la charge, etc. [3, 19, 41].

Les troubles musculo-squelettiques (TMS) associés aux déplacements des bénéficiaires sont très présents dans le domaine des soins de santé [21]. La population des techniciens ambulanciers-paramédics (TAP) a une prévalence de TMS plus élevée que celle des autres travailleurs du système de santé [31, 48]. Ils ont un taux plus élevé d’accidents causant une blessure et plusieurs d’entre eux quittent leur emploi pour des tâches moins exigeantes à mesure qu'ils vieillissent [16, 49]. L’analyse des données de la Commission de la Santé et de la Sécurité du travail du Québec (CSST, 2013) indique que plus de 47 % des accidents de travail chez les TAP résultent d’un effort excessif (en soulevant, tirant, tenant, etc.) ou d’une réaction du corps (se pencher, grimper, glisser, trébucher, etc.). Les principaux sites touchés sont le dos et la colonne vertébrale (88 %), et les épaules (4 %).

Le soulèvement et le déplacement du bénéficiaire représentent deux des activités de travail que les TAP jugent les plus difficiles physiquement [20, 34, 35, 43]. Aux États-Unis, une étude rapporte que 62.4 % des blessures au dos des TAP sont survenues sur les lieux de l’intervention lors d’un soulèvement de charge [31]. Les activités de soulèvement et de déplacement représentent donc des tâches à risque de TMS.

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Plusieurs « principes » de manutention sécuritaires et efficients ont été proposés par différents chercheurs. La plupart de ces principes sont basés sur des notions de biomécanique, de physiologie et de psychophysiologie. À titre d’exemple, certains principes visent, à adopter une posture favorisant une colonne alignée, à maintenir la charge la plus près possible du corps et le moins longtemps possible, à utiliser les propriétés physiques de la charge, à utiliser l’ensemble de son corps, à adopter le bon rythme, etc. Plusieurs chercheurs croient que ces principes favorisent de bonnes techniques de soulèvement [19, 23, 45].

Des moyens fondés sur ces principes sont déjà en place pour tenter de diminuer les risques associés aux tâches de déplacement de bénéficiaires. En ce qui concerne les TAP, une formation obligatoire sur les déplacements sécuritaires de bénéficiaires1 a été mise sur pied

par l’Association paritaire sectorielle pour la santé et la sécurité du travail du secteur affaires sociales (ASSTSAS). Cette formation met de l’avant les principaux principes associés à la manutention de charge mentionnés précédemment et fait la promotion de l’utilisation de certains équipements facilitant les déplacements (p. ex. la planchette de transfert). Il y a encore beaucoup d’inconnu en lien avec cette formation : d’une part, il faut savoir si ces principes sont réellement appliqués par les TAP en situation de travail; et d’autre part si ces principes permettent réellement de réduire les risques de TMS dans les différents contextes de travail. Le but de cette étude est de documenter de façon détaillée l’activité de déplacement du bénéficiaire en assistance totale et d’identifier les déterminants qui influencent cette tâche. L’intérêt étant d’analyser la variabilité de la tâche et de comparer les situations à celle du PDSB-TAP. Le tout permettra de vérifier si les principes enseignés dans cette formation sont appliqués dans la réalité et permettra de contribuer à enrichir les formations données aux TAP ou du moins, de mieux outiller les travailleurs face aux difficultés de ces tâches.

1 Principes de déplacement sécuritaire des bénéficiaires pour les techniciens ambulanciers-paramédics

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Ce mémoire sera divisé en quatre chapitres. Le chapitre 2 sera consacré à la recension des écrits. Les sujets abordés seront, dans les deux premières sections, les liens entre les phénomènes de lésions au dos et les principes biomécaniques, physiologiques, psychophysiologiques et ergonomiques en manutention de charges. Dans la troisième section, des principes de manutention, provenant principalement d’études réalisées avec des charges inertes, seront présentés. Dans la quatrième section, il sera question de la manutention (ou déplacement) du bénéficiaire. La dernière section portera sur les principes de déplacement du bénéficiaire enseignés dans des formations adaptées aux TAP en milieu pré hospitalier et pour le personnel soignant en milieu hospitalier. Le chapitre 3 de ce mémoire contient un article scientifique intitulé : « L’analyse du transfert du bénéficiaire en assistance totale par les techniciens ambulanciers-paramédics lors de situations réelles de travail ». Cet article fait état de la variabilité des transferts en assistance totale et de l’étendue des stratégies empruntées selon la position du bénéficiaire, la hauteur de celui-ci et le type d’équipement utilisé. Finalement, la conclusion de ce mémoire se retrouvera au chapitre 4.

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Chapitre 2 : Recension des écrits

L’étude des maux de dos est complexe puisqu’il est impossible de mesurer directement les effets engendrés lors d’un soulèvement de charge sur les structures musculo-squelettiques d’un corps vivant sans être invasif. Pour faciliter cette tâche, des chercheurs ont créé des modèles de lésions. Ces modèles servent à simplifier une situation pour favoriser une meilleure compréhension du phénomène de lésions associé. Lorsqu’une démarche est entreprise pour modifier un environnement à risque de TMS, il faut déterminer le modèle à utiliser et les critères à modifier dans la situation de travail. Ces critères serviront ensuite à modifier les composantes du modèle afin de réduire les risques de blessures. Dans la manutention de charges, il existe une relation évidente entre les lésions au dos et la charge mécanique [2]. Le poids de la charge à soulever peut être, par exemple, un critère à diminuer pour adapter la tâche aux capacités du travailleur et diminuer le risque de lésions au dos.

2.1 — Modèles

Certains modèles permettent d’estimer les charges engendrées sur la colonne vertébrale au niveau de l’articulation L4/L5 et de l’articulation L5/S1 [1, 4, 13]. Tandis que d’autres modèles, comme l’équation du NIOSH, estiment le poids de la charge admissible [52, 53] selon les limites de trois principaux champs de recherche (biomécanique, physiologique et psychophysiologique). Pour bien comprendre ces concepts, une description du modèle de lésions de Dempsey et une description de l’équation du National Institute of Occupational

Safety and health (NIOSH) seront faites dans cette section.

2.1.1 — Modèle de lésions

Le modèle de Dempsey (1998) sert à comprendre les lésions lors de la manutention de charges selon les causes mécaniques au dos (figure 1). Il possède deux composantes : les exigences du travail et les capacités du travailleur. C’est l’équilibre de ces deux composantes qui assure la santé du travailleur. Cet équilibre est influencé par : le ratio entre la production, la qualité du produit, la performance, mais aussi la fatigue, l’inconfort et les

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blessures. La plus grande difficulté à utiliser ce modèle est de déterminer ce qui est admissible en tant qu’exigences et de définir les limites acceptables.

Exigences du travail

Capacité du travailleur

Caractéristiques du matériel : - Poids - Dimension - Symétrie Caractéristiques de la tâche : - Fréquence - Distance de transfert - Hauteur de travail - Obstruction Caractéristiques personnelles : - Anthropométrie - Blessures antérieures - Habitudes de vie Capacité physiologique : - Capacité physique - Conditionnement Organisation du travail : - Rythme de travail - Autonomie Caractéristiques environnementales : - Chaleur - Froid - Vibration Capacité psychologique : - Coordination - Perception psychosociale Capacité biomécanique :

- Forces des tissus • Vertébraux • Articulaires

Équilibre

Production Qualité du produit Performance Fatigue Inconfort Blessure

Figure 1 : Principaux facteurs influençant les exigences du travail et la capacité du travailleur selon le modèle de Dempsey (1998).

Pour déterminer ce qui est admissible en tant qu’exigences et définir les limites acceptables, il faut se référer à des critères établis en biomécanique, en physiologie et en psychophysiologie. Le National Institute of Occupational Safety and health (NIOSH) a créé une équation pour définir les limites acceptables [52, 53].

2.1.2 — Équation du NIOSH

L’approche du National Institute of Occupational Safety and health (NIOSH) intègre des critères des trois principaux champs de recherche et son équation inclut sept variables servant à établir un poids recommandé à soulever [52, 53].

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En 1991, le groupe de chercheurs a statué sur les critères des trois principaux champs de recherche. Les membres du comité ont conclu que, selon les critères biomécaniques (1) l’articulation L5/S1 subissait le plus grand stress lors d’un soulèvement de charge; (2) que le vecteur de la force de compression provoquait davantage de stress et que; (3) au-delà de la limite de 3400 Newton (N), la force de compression augmente les risques de blessures. Ils ont conclu que, selon les critères physiologiques (1) au-delà de la limite de 9.5 kcal/min, le soulèvement dépasse les capacités des travailleurs que; (2) la limite de dépense d’énergie pour les soulèvements qui exigent surtout le travail des bras serait de 70 % de la capacité maximale aérobie et que (3) les limites de dépense d’énergie pour les tâches qui durent 1 h, 1 h à 2 h, et 2 h à 8 h seraient de 50 %, 40 % et 33 % respectivement. Ces critères sont influencés par les sept variables de l’équation.

Variables :

− LC = Poids de l’objet (23 kg ou 51 lbs) : constante établie pour que le soulèvement en conditions idéales (dans le plan sagittal, occasionnel, avec une bonne prise, moins de 25 cm de déplacement total, etc.) soit acceptable pour 75 % des femmes et 99 % des hommes travailleurs sans que la force de compression exercée sur la colonne vertébrale ne dépasse 3 400 N.

− HM = Distance horizontale des mains : le stress de la compression axiale sur le disque intervertébral est généralement proportionnel à la distance horizontale entre la charge et la colonne.

− VM = Distance verticale des mains : des données biomécaniques suggèrent que le stress lombaire est augmenté lors des soulèvements près du sol (Chaffin, 1969; Bean et al., 1988 cités par Waters et al., 1993); des données épidémiologiques indiquent que les soulèvements près du sol sont associés à un grand pourcentage de blessures lombaires (Snook, 1978; Punnett et al., 1991 cités par Waters et al., 1993); des données physiologiques indiquent que de soulever un objet à partir du sol demande plus d’énergie (Fredrick, 1959; Garg et al., 1978 cités par Waters et al., 1993).

− DM = Distance totale parcourue : des données psychophysiologiques suggèrent une diminution d’environ 15 % du poids acceptable à soulever lorsque la charge

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parcourt la distance du plancher jusqu’au-dessus des épaules; des données physiologiques indiquent une augmentation significative de la demande physiologique proportionnellement à l’augmentation de la distance verticale de soulèvement.

− AM = Asymétrie : représente une torsion (rotation axiale) du tronc par rapport au bassin. Un nombre limité de données provient du champ de la psychophysiologie et rapporte une diminution du poids maximum acceptable à soulever (entre 8 % et 22 %) et une diminution de la force isométrique (39 %).

− CM = Qualité de la prise : des données psychophysiologiques suggèrent que la capacité de soulèvement est diminuée avec des charges possédant une mauvaise prise (environ entre 7 % et 11 %). Une mauvaise ou une absence de prise requière une force de préhension élevée et est associée à une possibilité d’échapper la charge (charges irrégulières, fragiles, volumineuses, avec des surfaces glissantes ou tranchantes, et un centre de masse excentré).

− FM = Fréquence de manutention : un tableau de coefficients de multiplicateur de la fréquence a été créé par le NIOSH pour les fréquences allant jusqu’à quatre manutentions à la minute et pour les fréquences plus grandes que quatre à la minute. Les données psychophysiologiques de Snook et Ciriello (1991) et l’équation de prédiction de la dépense énergétique de Garg (1976) ont été utilisées respectivement pour établir les multiplicateurs.

Lorsque ces limites sont dépassées, la prévalence de blessures musculo-squelettiques augmente. Un indice de gravité (lifting index = LI) facilite l’identification des tâches à risque lorsqu’elles se situent entre le poids limite recommandé (recommanded weight limit : RWL = LC x HM x VM x DM x AM x CM x FM) et une limite maximale à ne jamais dépasser qui est trois fois le RWL.

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En reprenant le modèle de Dempsey, il est possible de constater que l’équation du NIOSH permet de mesurer la différence entre les exigences du travail et les capacités nécessaires. Si les limites recommandées sont dépassées, il faut ajuster les caractéristiques du travail (caractéristiques du matériel, de la tâche, de l’organisation, et environnementales) pour que les exigences soient diminuées.

Exigences du travail

Capacité du travailleur

Caractéristiques du matériel : - Poids - Dimension - Symétrie Caractéristiques de la tâche : - Fréquence - Distance de transfert - Hauteur de travail - Obstruction Caractéristiques personnelles : - Anthropométrie - Blessures antérieures - Habitudes de vie Capacité physiologique : - Capacité physique - Conditionnement Organisation du travail : - Rythme de travail - Autonomie Caractéristiques environnementales : - Chaleur - Froid - Vibration Capacité psychologique : - Coordination - Perception psychosociale Capacité biomécanique :

- Forces des tissus • Vertébraux • Articulaires

Équilibre

Production Qualité du produit Performance Fatigue Inconfort Blessure

Figure 2 : Principaux facteurs influençant les exigences du travail et la capacité du travailleur selon le modèle de Dempsey (1998) et l’équation du NIOSH (termes soulignés).

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2.2 — Approches

2.2.1 — Approches biomécaniques

Les blessures au dos sont très fréquentes chez les manutentionnaires et plus précisément, celles de l’articulation sacro-lombaire (L5/S1) [25, 26, 28, 36, 42]. Le disque entre les vertèbres L5 et S1 peut potentiellement subir le plus grand moment de force lors d’une flexion antérieure puisque, tout comme l’articulation L4/L5, ce sont deux articulations où il y a le plus d’amplitude de mouvements comparativement aux autres articulations de la colonne vertébrale (amplitudes de mouvement pour la flexion : L1-L2 = 5.8°; L2-L3 = 6.5°; L3-L4 = 7.5°; L4-L5 = 8.9°; L5-S1 = 10.0° [54]). Lorsqu’une personne a le tronc fléchi et qu’elle adopte une posture érigée (tronc relevé), les muscles extenseurs de la colonne sont activés pour exécuter le mouvement, une rotation autour de l’axe L5-S1. Cette rotation est possible grâce au moment de force. L’application de ce moment de force permettra d’exécuter une extension du tronc. Plus l’extension est grande, plus le moment de force doit être grand pour exécuter le mouvement.

L’activation des muscles extenseurs de la colonne, de par leur origine et leur insertion, crée une ligne d’action (vecteur force) dont l’orientation a aussi un impact direct sur la force de contact entre les disques intervertébraux. Cette force agit en compression sur les structures lombaires (perpendiculaire à la surface des vertèbres). La force de compression serait responsable de fracture du plateau vertébral, de hernies discales et d’irritation de racines nerveuses [14]. La force gravitationnelle et la force exercée par ces muscles peuvent également provoquer un glissement entre deux vertèbres successives lorsque le tronc est incliné. Il s’agit de la force de cisaillement (figure 3) [53].

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Les blessures à l’articulation L5/S1 peuvent être expliquées par le fait que le disque intervertébral de cette articulation est fortement sollicité par le moment de force, et les forces de compression et de cisaillement [53]. Le moment de force et la force de compression dépendent du positionnement de la charge ou du bras de résistance et sont proportionnels à la longueur du bras de résistance. Le bras de résistance est la distance perpendiculaire entre la ligne d’action de la charge (centre de masse de la charge) et l’axe de rotation (disque intervertébral L5/S1) (LP, figure 4). Lorsque la charge s’éloigne de l’axe

de rotation, le moment de force et la force de compression augmentent (figure 4). L’articulation L5/S1 supporte aussi le poids du haut du corps et celui de la charge (37,5 kg représente environ 61,5 % du poids du corps entier, selon Dempster et Gaughran, 1967), ainsi que la dynamique du mouvement (l’accélération). Le poids de la charge est un facteur relié à la sévérité de la tâche. Une augmentation du poids à manipuler est associée à une augmentation de l’activité musculaire des muscles érecteurs du rachis [25]. Cette augmentation de l’activité musculaire est proportionnellement reliée à l’augmentation du moment de force et de la force de compression. D’après Bush-Joseph et al. (1988), un mécanisme de contrôle du moment de force pourrait exister et aurait tendance à limiter l’amplitude maximale du moment de force. Une augmentation de la vitesse d’exécution du soulèvement serait associée à une augmentation du moment de force puisque ce mécanisme de contrôle serait moins efficace qu’à une vitesse lente [11]. Par conséquent, le disque intervertébral L5/S1 est un tissu vulnérable aux blessures pouvant être provoquées par une force excessive, subite ou même normale.

Figure 4 : Effet de la longueur du bras de résistance sur le moment de force à la colonne lombaire

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D’autres facteurs ont une influence sur les charges au niveau du dos. Le soulèvement asymétrique en fait partie. C’est lorsque la charge s’éloigne du plan sagittal et engendre un mouvement de rotation axiale du tronc par rapport au bassin (peut être accompagné d’une flexion latérale). Ce mouvement pourrait entraîner une diminution de la stabilité posturale et des débalancements musculaires. Les débalancements musculaires pourraient créer un stress et résulter en blessures à la colonne [27]. Actuellement, peu d’études sur les soulèvements asymétriques ont mesuré la charge au niveau du dos. Les études psychophysiologiques s’entendent sur le fait que le poids limite acceptable diminue de 8 % à 22 % comparativement à un soulèvement symétrique [53]. Ces mesures subjectives (basées sur la tolérance et la perception de l’effort) n’informent pas sur la force de compression, la résistance des tissus, les moments de force, etc. [4]. Arjmand et al. (2012), ont calculé que, lors d’un soulèvement d’une charge de 20 kg avec une flexion latérale droite de 7° et une rotation axiale de 34°, la force de compression à l’articulation L4/L5 était de 2 626 N [4].

Aussi, la hauteur de prise et de dépôt de la charge est un facteur important dans l’évaluation des contraintes à la colonne [18]. Gagnon et Smyth (1991) considèrent qu’il s’agit d’un des facteurs les plus importants à examiner dans l’évaluation des risques puisqu’ils ont observé que la hauteur la plus exigeante lors du soulèvement est celle à partir du sol (une charge de 3,3 kg soulevée à partir du sol demande 282 Joules (J) de travail total ajusté comparativement à 234 J pour une charge de 22,0 kg soulevée à partir de la hauteur des genoux) [25].

La prise fait aussi partie des facteurs qui influencent l’exigence du soulèvement. L’observation de six experts en manutention a permis de constater que dans 47 % du temps ils utilisent une prise en diagonale et 45 % du temps, une prise asymétrique [6]. La prise en diagonale offre une bonne stabilité, et diminue la fréquence cardiaque et la perception de l’effort [17]. Une bonne prise prévient le risque de perdre contrôle ou d’échapper la charge.

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Les dimensions de la charge ont aussi des répercussions sur la tâche de soulèvement. Idéalement, la charge doit être la plus rapprochée du corps pour diminuer le bras de résistance de la charge. Lorsque les dimensions de la charge empêchent de la rapprocher du corps, la force de compression moyenne à l’articulation L5/S1, pour une charge de 222 N, varie de 2 179 N à 4 911 N pour une charge compacte et de 3 147 N à 4 932 N pour une charge volumineuse dépendamment de la technique de soulèvement (incluant le stoop et le squat) [3].

Le prochain principe est d’ordre physiologique puisqu’il s’agit du coût énergétique que l’action exige au corps. Le coût énergétique d’une action peut être mesuré à l’aide de la consommation d’oxygène. La demande en oxygène des muscles extenseurs du dos, lors de manutention de charge, augmente tout au long de la journée pour atteindre un sommet à la fin de celle-ci [55]. La fréquence des manutentions influence le coût énergétique. Elle peut mener à une fatigue généralisée ou localisée et serait une cause potentielle des lombalgies [30]. Une altération des capacités musculaires causée par la fatigue réduirait la qualité de l’action mécanique et entraînerait de l’instabilité lombaire.

Ensuite, il faut également tenir compte de la cinétique des mouvements. Les facteurs dynamiques du soulèvement influencent la charge articulaire. Effectivement, le moment articulaire à L5/S1 augmente linéairement avec l’augmentation de la vitesse d’exécution de la tâche [11]. Le fait de soulever avec une vitesse relativement lente et contrôlée permet au travailleur de réduire le moment provoqué par l’inertie, donc d’avoir un meilleur contrôle sur son corps et de mieux réagir en cas d’imprévu (p. ex. : surface glissante) [3]. Les travailleurs doivent, tant bien que mal, manipuler les charges au bon rythme, c’est-à-dire dans un mouvement régulier et fluide sans secousses et à une vitesse adapter à la tâche [45].

(28)

14

2.2.2 — Approche ergonomique

Les notions de travail prescrit et de travail réel sont des notions bien présentes en ergonomie. Ces deux concepts proviennent de, ce qu’on demande de faire aux travailleurs pour exécuter une tâche (prescrit), et ce que la tâche demande réellement (réel) [47]. En manutention, il est possible de transposer cette notion de travail prescrit et de travail réel dans, la technique recommandée (genoux fléchis, dos droit) pour soulever une charge (prescrit) et ce qui est réellement exécuté (réel). La technique prescrite est très sécuritaire lorsqu’elle peut être exécutée dans des conditions favorables, c’est-à-dire lorsque la charge peut être rapprochée du corps ou placée entre les genoux [28, 39]. Cette stratégie posturale pourrait favoriser la sécurité physique, mais pourrait également entraîner un coût physiologique supérieur pour le travailleur contrairement à celui causé par une flexion du tronc sans flexion des genoux. Plusieurs facteurs viennent modifier l’exécution de la tâche de soulèvement : les conditions et les moyens techniques offerts par le milieu, l’exigence de la tâche, l’environnement social, la sécurité physique et mentale, et la quantité et qualité de production [47]. Connaître les déterminants, les différences entre les notions enseignées, et ce qui est réellement exécuté permet d’offrir aux travailleurs différentes options à appliquer. L’idéal est de moduler leur façon de faire en fonction du contexte de travail [45].

Les connaissances scientifiques, du fonctionnement de l’humain et de l’humain dans son travail, progressent. L’ergonomie a comme objectif « d’améliorer le travail pour le rendre compatible avec ce fonctionnement humain » [47]. L’intervention ergonomique centrée sur la personne est une approche ergonomique en effervescence au Québec. Elle exige de bien connaître l’activité de la personne pour la relier aux exigences de la tâche. Voici une ressemblance avec le modèle de Dempsey (1998) dont les deux composantes sont les exigences du travail et les capacités du travailleur. Les déterminants tels que les tâches et les exigences, les conditions et moyens offerts par le milieu de travail, et l’environnement social sont les éléments sur lesquels il est possible d’agir. L’identification du problème parmi ces déterminants permet de transformer le travail pour l’améliorer. L’amélioration du travail pourra se faire sentir autant sur le plan de la santé physique et mentale du travailleur que sur le plan de la production et des services de l’entreprise.

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15

2.3 — Charges inertes

Les connaissances liées à la manutention de charges inertes sont présentées dans cette section. Le thème de la variabilité de la tâche de soulèvement est approfondi selon trois positions : dos droit, genoux fléchis communément appelée « squat », dos incliné, genoux droits ou « stoop », et finalement, de la position libre. Aussi, les principes de production et de sécurité sont présentés en fonction de la comparaison de travailleurs experts et de travailleurs novices.

2.3.1 — Variabilité de la tâche

Les données des études sur la manutention montrent une importante variabilité [42]. Les manutentionnaires varient leurs façons de faire pour un même contexte. Des boîtes plus lourdes, une vitesse imposée plus rapide, des hauteurs différentes, sont des éléments qui démontrent que les manutentionnaires s’adaptent au contexte qui leur est présenté et ne font pas que reproduire des façons de faire standards.

2.3.1.1 — Position de squat (dos droit, genoux fléchis)

Les constats par rapport au soulèvement de charge en position dos droit genoux fléchis (figure 5) favorisent cette position à celle de la position dos incliné genoux droits lorsque la charge peut être rapprochée du corps. Effectivement, lorsque la charge peut être rapprochée entre les genoux, le moment de force aux bras est diminué [39] et les ligaments du bas du dos sont exposés à une tension maximale plus faible [3, 28]. Aussi, lors du squat, les chevilles, les genoux et les hanches contribuent davantage au mouvement [40]. D’après certains chercheurs, le fait que ces articulations contribuent davantage au mouvement est relié à un aspect sécuritaire puisque les jambes sont généralement plus fortes que le dos. Il est donc préférable de forcer avec celles-ci surtout lorsqu’il s’agit de lourdes charges [3, 39]. Cependant, l’utilisation de ces grosses masses musculaires exige un coût physiologique et un volume de ventilation supérieurs aux autres positions à l’étude (le squat exige 850 calories de plus pour les femmes et 880 calories de plus pour les hommes que le stoop) [32].

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D’autres chercheurs ont obtenu des constats plus négatifs par rapport au soulèvement en position dos droit genoux fléchis lorsque la charge ne pouvait pas être rapprochée du corps. Il s’agit d’une question d’angulation du tronc. D’après les principes biomécaniques de levier, la force imposée sur les vertèbres lombaires augmente avec l’angulation du tronc : plus le tronc est fléchi plus la force sur les vertèbres est augmentée [28]. À l’opposé, si l’angulation au tronc n’est pas augmentée, il y aura une implication significative des épaules dans le déplacement horizontal des mains [40].

Tableau 1 : Facteurs en faveur ou en défaveur des soulèvements en position de squat

(lorsque la charge est près du corps)

Chercheurs Pour Contre Raisons

Park et Chaffin (1974) X Le moment de force aux épaules est réduit. Park et Chaffin (1974) X Les forces de compression à L5/S1 sont réduites. Anderson et Chaffin

(1986)

Garg et Herrin (1979)

X X

La tension des ligaments et des muscles érecteurs du rachis est diminuée

Anderson et Chaffin

(1986) X

La charge est répartie principalement aux jambes qui sont plus fortes que le dos (idéal pour les lourdes charges)

Giat et Pike (1992) X Le moment de force maximal aux genoux est augmenté. Giat et Pike (1992) X Le niveau d'activation EMG des cuisses est 2 fois plus grand lors du squat que lors du stoop Giat et Pike (1992) X L'énergie potentielle incluse dans le travail mécanique est supérieure

(31)

17

2.3.1.2 — Position de stoop (dos fléchi, genoux droits)

Certains chercheurs s’entendent pour dire que la position dos fléchi genoux droits (figure 5) est la technique de soulèvement la plus fréquemment utilisée malgré la présence de risques associés à cette technique [29, 44]. Lorsque la charge ne peut pas être rapprochée du corps (condition non favorable : distance supérieure à 38 cm des chevilles), cette technique minimise le bras de résistance de la charge puisque la flexion des hanches dans cette position amène l’angle du sacrum pratiquement perpendiculaire par rapport à l’horizontale. Les forces de compression laissent la place aux forces de cisaillement qui restent, malgré tout assez faibles (1 735 N) [3]. Ce constat a été observé lorsque les manutentionnaires gardent le bas du dos plat (lordose normale), mais qu’en ait-il lorsque les manutentionnaires courbent le bas du dos (cyphose lombaire)? Il est possible de supposer que la pression sur la surface du disque n’est pas distribuée uniformément et qu’à ce moment, une petite force de compression pourrait entraîner une rupture du disque intervertébral [28]. Aussi, la tension dans les muscles érecteurs du rachis est plus grande en position de stoop ce qui peut contribuer à l’apparition de douleur. D’autant plus s’il y a rotation du tronc, le risque de blessure des facettes articulaires est augmenté [28]. Cependant, la pression intra abdominale contrebalance la force des muscles érecteurs du rachis ce qui réduit les forces de compression du disque à l’articulation L5/S1 [28]. Certains chercheurs croient que la principale raison de l’utilisation de cette technique est le faible moment au genou (jusqu’à 7 fois plus élevé pour le squat) [29]. D’autres ont obtenu des données sur la rotation angulaire des genoux qui indiquent que le rôle de ces articulations serait assez variable (un écart de -30 % à 43 %), mais que leur contribution serait significative dans le déplacement vertical des mains [40]. En ce qui concerne le coût physiologique de cette méthode de soulèvement, il est moindre que celui du squat : 64 % de moins pour les hommes et 60 % pour les femmes (pour une charge de 10 kg) [28, 32]. En considérant l’aspect physiologique, il serait préférable de soulever des charges plus lourdes moins souvent pour réduire la dépense énergétique [28] tandis que selon l’aspect biomécanique il serait préférable de soulever des charges moins lourdes plus souvent pour réduire le stress mécanique [28, 53].

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Tableau 2 : Facteurs en faveur ou en défaveur des soulèvements en position de stoop

(lorsque la charge est éloignée du corps)

Chercheurs Pour Contre Raisons

Garg et Herrin (1979)

Kumar (1984) X X Minimise le coût énergétique et métabolique Garg et Herrin (1979) X Pour les charges supérieures à 5 kg, les forces de compression à L5/S1 sont légèrement plus

faibles.

Park et Chaffin (1974) X Dans cette position, il y a davantage de forces de cisaillement supportées par les facettes vertébrales (structure relativement forte).

Giat et Pike (1992) X Le moment de force maximal aux genoux est diminué Bush-Joseph et al.

(1988) X

À vitesse lente et normale, le moment articulaire à L5/S1 est 15-20 % plus petit en stoop qu'en squat et 20-25 % plus petit en stoop qu’en libre. Garg et Herrin (1979) X Lorsque le dos est courbé, risque de rupture du disque intervertébral par une pression non

uniforme.

Garg et Herrin (1979) X Risque de douleur causée par l’augmentation de la tension dans les muscles érecteurs du rachis. Garg et Herrin (1979) X Risque de blessures accru s’il y a rotation du tronc conjointement.

2.3.1.3 — Position libre

En ce qui concerne les analyses faites selon une position libre de manutention (figure 5), il est difficile de comparer les différentes études puisque le terme « libre » ne représente pas la même position pour chaque étude. Par exemple, pour obtenir une position libre, les chercheurs Plamondon et al. (2010) donnaient l’instruction aux manutentionnaires qu’ils devaient être « les professeurs » et qu’ils devaient répliquer ce qu’ils faisaient dans leur travail. Avec cette instruction, la posture observée possédait les mêmes caractéristiques qu’un squat « dos droit, genoux fléchis ». Pour d’autres, il s’agissait d’une posture sans contraintes [32] définies comme étant la meilleure combinaison du sens du mouvement, d’une faible tension musculaire, et d’une économie de temps et d’énergie [39]. Cette difficulté reliée au terme « libre » est principalement causée par une limitation technique dans le protocole expérimental. Les protocoles imposent des conditions expérimentales rigides et donnent des instructions sur la façon dont la tâche doit être exécutée. Les

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19

instructions réfèrent généralement à une technique de « squat » ou de « stoop », ou alors, les pieds et/ou les mains doivent rester fixes ce qui s’éloigne des stratégies empruntées dans la réalité. Par exemple, dans les études biomécaniques, le mouvement des pieds peut être limité par l’utilisation d’une plate-forme de force [6, 42].

Lorsque la charge peut être près du corps, il serait plus sécuritaire pour le manutentionnaire d’utiliser le squat à moins que la cadence imposée par le travail soit élevée et que pour éviter la fatigue, le travailleur doive opter pour une technique demandant une dépense énergétique plus faible. À ce moment, il serait préférable pour le travailleur d’utiliser le stoop. D’une façon ou d’une autre, il y aura toujours des avantages et des inconvénients. C’est le jugement du travailleur, selon le contexte de travail, qui influencera la décision d’utiliser le squat, le stoop ou une technique propre à lui (libre).

2.3.2 — Principes de manutention pour charges inertes

Dans les années 2000, certaines règles de base étaient bien établies : approcher la charge près du corps, élever la hauteur initiale, éviter les postures extrêmes, les mouvements de flexion latérale et de torsion du tronc, éviter d’accélérer trop rapidement la charge, éviter de soulever des charges tôt le matin ou après une période prolongée de flexion avant. Aussi, de nouveaux principes de bonne technique sont apparus : la prise d’information avant le soulèvement, le placement/déplacement des pieds, la réduction du poids de la charge et de sa trajectoire, les prémanœuvres sur les boîtes (prises et inclinaisons), la prise asymétrique, la réduction de la durée du transfert, la continuité, la régularité de l’effort, le fait de faire travailler la charge pour soi, et l’équilibre [18, 23, 36, 45]. Ces nombreux principes démontrent la progression faite depuis les années 80 où les principes enseignés étaient rassemblés en quatre points distincts soient : le placement des pieds, la posture des genoux (droits ou fléchis), la posture du dos (plat ou courbé) et le placement des mains sur la charge [3]. Il est possible de constater que les principes d’aujourd’hui portent également sur ces quatre éléments, mais qu’ils sont devenus plus précis et plus détaillés.

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2.3.2.1 — Productif-sécuritaire

Dans les paragraphes précédents, il a été démontré que la manutention de charge implique du stress sur les structures musculo-squelettiques. Ce stress ne peut pas être complètement éliminé de la tâche [3], mais certaines stratégies peuvent en réduire les effets et cela passe par une évaluation individuelle de chaque tâche de soulèvement [41]. Les objets à manutentionner, le contexte spatial, l’environnement et des capacités de l’individu peuvent changer constamment ce qui fait varier les situations dans lesquelles les travailleurs réalisent la tâche. Or, pour s’adapter à ces variations, ils doivent prendre des décisions en fonction des informations qu’ils recueillent en cours d’exécution du travail. Ensuite, en fonction des informations prélevées, une action va suivre. Ceci démontre bien que la manutention demande de bonnes compétences motrices et gestuelles, mais également une compétence cognitive importante à la prise de décision. Notamment, la prise de décision n’est pas la même pour tous les experts en manutention [5]. Aussi, il a été observé que certains manutentionnaires experts étaient capables de soulever des charges beaucoup plus lourdes que les novices sans se blesser [38]. Cela porte à croire que ces travailleurs ont développé des stratégies efficaces pour éviter de se blesser. Or, pour obtenir une représentation plus authentique de la tâche de manutention, il est possible de se tourner vers l’étude des modes opératoires des travailleurs experts comparativement aux travailleurs novices. L’étude des modes opératoires permet de comprendre comment le travailleur s’y prend pour exécuter son activité de travail en termes de stratégies, d’actions, de choix de priorité, de postures et d’équipement empruntés par celui-ci [47]. Les différents modes opératoires observés sont le reflet de façons de faire complexes et différentes de celles recommandées ou généralement étudiées. C’est une façon de comprendre les exigences d’une activité de travail pour trouver des mesures préventives ou mettre sur pied des formations efficaces [42]. Les manutentionnaires expérimentés choisissent des modes opératoires différents des novices [5, 6, 19, 42]. Ils favorisent différentes stratégies en fonction du contexte dans lequel est réalisé le transfert et en fonction de leurs propres priorités. Même d’un expert à un autre, le même facteur peut être évalué différemment. Par exemple, l’effort perçu au niveau du dos est associé à la durée du mouvement pour certains et à l’intensité de l’effort (poids de la charge) pour d’autres. Or, ce qu’il faut comprendre de tout cela est que chaque méthode qui semble la meilleure pour les travailleurs experts est en

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21

fait un ensemble de compromis, une capacité d’analyser chaque situation et de choisir la solution adéquate. Pour exécuter le soulèvement tout en satisfaisant aux facteurs les plus importants du travail, en fonction de leurs propres caractéristiques et habiletés. Tous ces besoins doivent être bien dosés dans un contexte de travail productif et sécuritaire [33].

2.4 — Charges non inertes (bénéficiaires)

2.4.1 — Variabilité de la tâche

Il est possible de décrire la manutention de charges inertes comme étant de la « manutention-port de charge », tandis que la description de la manutention de bénéficiaires est une « manutention-soin » [37]. Cette manutention implique différentes actions telles que les changements de position, les déplacements, les repositionnements, etc. [37]. Dans les deux prochaines sections, il sera question de la « manutention-soin » selon deux types de travailleurs soient le personnel infirmier en milieu hospitalier et les techniciens ambulanciers-paramédics en milieu préhospitalier.

2.4.1.1 — Chez le personnel infirmier

La position caractérisée par le tronc fléchi et les genoux droits et la position libre sont très utilisées lors de soulèvement de bénéficiaires [24, 46]. Les résultats obtenus par l’observation de 1400 manipulations (transferts, semi-transferts, positionnements) du personnel soignant durant leurs tâches habituelles de travail auprès des bénéficiaires montrent que dans la majorité des cas, la tâche était exécutée les genoux en extension, les pieds parallèles et rapprochés, et le tronc légèrement fléchis. Durant l’effort, le tronc bougeait, la plupart du temps, dans le plan sagittal, mais des flexions latérales et des torsions étaient observées dans certaines catégories d’opérations (transfert du lit à la chaise ou de la chaise au lit) [46]. Lors de la tâche consistant à soulever un bénéficiaire (mannequin de 72.6 kg) à partir d’une chaise selon trois manières différentes : (a) en positionnant ses mains sous les aisselles du bénéficiaire; (b) en positionnant ses avant-bras sous les aisselles du bénéficiaire; (c) et en maintenant une ceinture positionner à la taille du bénéficiaire, la méthode à proscrire était celle avec la ceinture selon les forces de

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compression à l’articulation L5/S1 (5744 N, 6284 N et 7951 N respectivement) et le travail mécanique (452 J, 459 J et 535 J respectivement) [24].

2.4.1.2 — Chez les techniciens ambulanciers-paramédics (TAP)

Sur le terrain, une très grande variabilité de scénarios, de mouvements et de stratégies de travail a été observée [15, 20]. Le déplacement (du lit à la civière, du sol à la civière et du lit au fauteuil roulant) et le soulèvement du bénéficiaire sont considérés des tâches exigeant une demande physique plus élevée et qui dépassent les normes de compression de 3400 N du NIOSH (jusqu’à 5476 N, observé lors du transfert du lit à la civière pour le TAP au sol) [20, 34, 35]. Lorsqu’une équipe de TAP expérimentés devait transférer un mannequin de 48 kg (471 N) du lit à la civière (lit double de 1.93 m de long, 1.52 m de large et 0.53 m de haut), avec leur méthode régulière, les constations selon les rôles des TAP (celui qui tire et celui qui pousse), les postures empruntées, les efforts et les stress biomécaniques engendrés, sont les suivants. L’individu debout sur le plancher doit atteindre le drap placé sous le bénéficiaire. À l’aide de celui-ci, il tire le bénéficiaire sur la civière (qui se trouve entre lui et le lit). En tirant vers lui, il doit appliquer une force de 268 N (à composante verticale et horizontale). Il se tient le tronc fléchi (position stoop). Lors de l’initiation du mouvement, l’angle au tronc moyen est de 54°. Pour ne pas que la civière bouge, ce TAP retient celle-ci avec ses membres inférieurs. Cet élément restreint celui-ci dans les postures qu’il pourrait emprunter pour exécuter cette tâche [35]. Ce mouvement entraîne des forces moyennes de compression, à l’articulation L4/L5, de 5476 N qui dépassent largement les normes NIOSH de 3400 N [34]. De l’autre côté, agenouillé ou debout sur le lit, le partenaire assiste celui qui tire et doit appliquer une force de 204 N pour soulever suffisamment le bénéficiaire pour réduire les forces de friction. Cette position entraîne une flexion importante du tronc. Les écarts types obtenus pour les angles de flexion du tronc sont assez importants. Cette variation pourrait s’expliquer par les différentes mesures anthropométriques, l’utilisation de différents modèles d’équipement et la présence de fatigue [35]. Les participants qui s’agenouillent sur le lit le font pour une meilleure stabilité, mais terminent avec une flexion du tronc de 49° ce qui entraîne un moment de force important à la colonne. Tandis que ceux qui se tiennent debout sur le lit bénéficient de la force de leurs jambes pour soulever et termine la tâche avec un bras de résistance plus

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court que ceux agenouillés. Cependant, leur stabilité est compromise à cause de l’instabilité du matelas sous leurs pieds [35]. Néanmoins, que ce soit agenouillé ou debout, les forces de compression à L4/L5 sont 45 % inférieures à celles du TAP à côté de la civière (celui qui tire) [34]. Ce type de transfert (lit à civière) est considéré un transfert d’assistance totale, c’est-à-dire qu’il n’y a aucune mise en charge du bénéficiaire et que les TAP supportent complètement le poids du bénéficiaire (voir section 5.1). La quantité d’écrits scientifiques concernant ce type de transfert dans la littérature est très faible. Lavender et al. (2000a et 2000 b) s’est penché sur un type de situation soit du lit à la civière, mais il existe plusieurs autres situations : du sol à la civière en position couché (avec planche, avec matelas), du sol à la civière en position assise (avec ou sans sac de transfert), de la civière-chaise à la civière (avec drap, avec planchette). Cette analyse a été simulée en laboratoire et non en situation réelle de travail.

2.5 — Principes de manutention dans les formations

Au Québec, la formation présente dans les milieux hospitaliers et préhospitaliers est celle du Principes de Déplacement Sécuritaire des Bénéficiaires (PDSB et PDSB-TAP respectivement) [7, 12]. Les sections 5.1 et 5.2 exposeront les principes présents dans ces formations.

2.5.1 — Principes de déplacement sécuritaire des bénéficiaires (PDSB)

Des programmes de prévention des blessures et des maux de dos étaient présents dans les hôpitaux avant les années 90. Cependant, aucune organisation ne chapeautait ce dossier. Les principes enseignés provenaient principalement du milieu industriel [46]. C’est en 1983 que le programme de Principes pour le Déplacement Sécuritaire des Bénéficiaires (PDSB) a été créé par l’Association pour la santé et la sécurité du travail du secteur affaires sociales (ASSTSAS)2. Cette association paritaire est composée de représentants patronaux et

syndicaux. Elle fait partie des douze organisations créées dans le cadre de la Loi sur la santé et la sécurité du travail3 pour offrir des services de formation, de conseil et de

recherche aux organisations du Québec [7]. En 2000, l’ASSTSAS réalise un changement

2ASSTSAS (1991), Guide de références PDSB 3 L.R.Q., c.S-2.1, 1979

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majeur. Il s’agit d’enseigner le programme par service ce qui signifie que tous les employés d’une même unité recevront la formation en même temps, par une approche globale4. Même si la formation est une exigence d’embauche, les enquêtes d’accidents de travail montraient des discordances entre les techniques qu’utilisaient les travailleurs par rapport aux principes qui étaient enseignés. Une réactualisation du PDSB a été faite en 2003 pour être de nouveau enseignée, dans la mesure du possible, une unité à la fois [9]5.

2.5.1.1 — Principes enseignés

Le contenu du PDSB serait commun à la plupart des programmes de formation qui visent à prévenir les lésions musculo-squelettiques [7] et est axé sur les principes de santé et sécurité selon la biomécanique du corps humain lors des tâches de déplacement des bénéficiaires. L’objectif ultime étant de réduire l’incidence des maux de dos chez le personnel soignant [7].

Avant les années 90, six principes majeurs étaient enseignés [46] : 1- Travailler avec le dos droit;

2- Avoir une flexion marquée des genoux;

3- Garder les pieds très éloignés les uns des autres; 4- Pointer les pieds dans la direction du mouvement;

5- Conserver la position du dos tout au long du mouvement durant l’effort; 6- Exécuter le soulèvement en utilisant exclusivement les membres inférieurs.

La version de l’année 2000 du PDSB mettait l’accent sur l’adoption de principes universels et celle de l’année 2003, sur des principes orientés vers l’acquisition d’habiletés à combiner les divers principes appris. Voici des principes communs aux deux versions :

1- les principes de préparation des manœuvres de déplacement (analyse de la situation par la cueillette d’informations et la prise de décisions stratégiques);

2- les principes biomécaniques/physiologiques (positionnement, prises et mouvements);

3- les séquences de la manœuvre sécuritaire (choix de stratégie, communication et mouvement synchronisé) [7].

4ASSTSAS (2000), Guide de gestion du programme de formation PDSB par l’établissement 5ASSTSAS (2003), Réactualisation du PDSB

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25

Les principes de la biomécanique du positionnement et des postures à adopter pour conserver l’équilibre lors du déplacement des bénéficiaires sont : d’avoir le dos non voûté et sans torsion, les genoux fléchis, les pieds écartés, orientés dans la direction du mouvement, bougeant avec le corps, et les épaules alignées avec les hanches. En ce qui concerne la prise, celle-ci devrait être solide et douce favorisant un contact étroit et sécurisant pour le bénéficiaire. Pour le personnel soignant, cela facilite le déplacement et réduit les efforts du dos et des bras. Enfin, les principes de mouvement sont : les transferts de poids latéraux, transfert de poids avant-arrière, contrepoids ou la combinaison de ces mouvements. Ceux-ci peuvent se combiner à un roulement, glissement ou pivotement du bénéficiaire [7].

Ces catégories de principes s’articulent autour de trois types d’assistance en fonction des capacités du bénéficiaire : la supervision, l’assistance partielle et l’assistance totale. Ces trois types d’assistance font référence respectivement à l’autonomie du bénéficiaire soit : autonome, partiellement autonome et non autonome.

2.5.1.2 — Applications en situation de travail réel

Le personnel soignant ayant reçu une formation de principes posturaux démontrait que les principes enseignés (dos droit, genoux fléchis) n’étaient pas sous-utilisés, mais plutôt, dans certaines situations de travail, impossible à appliquer en raison de contraintes présentes (physiques, contextes de travail, travail rapide, etc.) [46]. Finalement, la tâche était contrôlée par deux principales composantes motrices soient les bras et le dos (91 % lors d’un soulèvement à partir d’une chaise). Compte tenu de ces observations, l’emphase mise sur l’utilisation des jambes, dans le cadre des formations offertes en milieu hospitalier, est questionnable; les jambes sont une composante motrice peu utilisée (56 % lors d’un soulèvement à partir d’une chaise) [46]. D’un autre point de vue, des résultats étaient à l’avantage des formations puisqu’en observant un groupe d’infirmières ayant reçu une formation de manutention de bénéficiaires et un groupe n’ayant pas reçu de formation il a été démontré que chez les infirmières entraînées, la tâche demandait moins d’effort et ces

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infirmières tenaient la charge plus près de leur corps que les infirmières du groupe n’ayant pas reçu de formation [8].

2.5.2 — Principes de déplacement sécuritaire des bénéficiaires pour

techniciens ambulanciers-paramédics (PDSB-TAP)

La formation du Principes de Déplacement Sécuritaire des Bénéficiaires pour techniciens ambulanciers-paramédics (PDSB-TAP) est offerte aux TAP depuis 2000. C’est l’ASSTSAS qui a mis sur pied cette formation. Elle propose aux TAP des stratégies de manutention des bénéficiaires afin de réduire les risques de blessures et de lésions musculo-squelettiques principalement au dos et aux membres supérieurs. Cette formation est adaptée au milieu du travail des TAP et à leurs outils/équipements en plus de respecter autant les besoins des bénéficiaires que les principes biomécaniques appliqués aux tâches de manutention [22].

2.5.2.1 — Principes enseignés

Les séquences du transfert selon le PDSB-TAP sont les suivantes : 1. apprécier la condition clinique et les capacités du bénéficiaire

2. convenir du niveau d’assistance approprié6 (la supervision, l’assistance partielle et

l’assistance totale)

3. réaliser les étapes du transfert

Les étapes du transfert seront réalisées en tenant compte du positionnement (pieds écartés, genoux fléchis, et dos sans torsion et non voûté), de la prise (solide, douce, coudes fléchis, près du corps, et prise pouce) et du mouvement (transfert de poids, contrepoids, mouvement mixte, faire rouler, glisser, pivoter le bénéficiaire, tirer plutôt que pousser, et donner un code de synchronisation). Ces principes sont divisés en deux catégories soient : diminuer l’usure à long terme et économiser son énergie. Ils ont été basés sur des objectifs visant l’intégrité physique des TAP et ont comme mot d’ordre de « respecter son corps ». Concrètement, pour diminuer l’usure à long terme, les chercheurs recommandent d’éviter les postures extrêmes (travail à bout de bras, dos en torsion, postures extrêmes de flexion et

6 « Superviser = guider le bénéficiaire

Assister partiellement = collaborer, suppléer à son manque de force

(41)

27

de torsion, mouvements des bras de grande amplitude, etc.) et d’utiliser les muscles de ses cuisses ou le poids de son corps en exécutant des contrepoids et/ou transfert de poids. Ils considèrent le poids des charges à manipuler, les postures extrêmes et défavorables, la répétition des efforts durant une journée et l’accumulation des postures à risque sur la semaine, comme étant des facteurs de risque de l’usure des structures. En ce qui concerne l’économie d’énergie, il s’agit de trouver des tactiques favorisant la participation du bénéficiaire selon ses capacités physiques et cliniques. Aussi, il faut diminuer, dans la mesure du possible, les soulèvements du bénéficiaire en favorisant des mouvements de rouler, glisser et pivoter. Les chercheurs considèrent une posture sécuritaire et naturelle comme étant le maintien de l’équilibre par une base de support confortable, des genoux fléchis lorsque les efforts demandent d’être penchés, des membres supérieurs rapprochés du corps et un dos droit sans torsion (éviter d’avoir le dos voûté). L’économie d’énergie apparaît également lors du travail en binôme soit par le partage du « quoi et comment faire » et un code de synchronisation pour coordonner les efforts lors des manœuvres [22].

2.6 — Constat

Les principes de manutention de charges inertes les plus actuels sont l’exécution de prémanœuvres sur les boîtes, les placements/déplacement des pieds, la prise asymétrique et l’alignement de la colonne. Les conséquences des stratégies de prémanœuvres et de prise sont entre autres, d’approcher la charge du corps ce qui contribue à un meilleur équilibre, de diminuer les postures extrêmes, de réduire la durée du transfert par une réduction de sa trajectoire, donc de sa dépense énergétique, et de diminuer le chargement au dos. Le placement/déplacement des pieds permet de diminuer l’asymétrie du corps lorsque les pieds ne sont pas fixés, donc de conserver l’alignement de la colonne [23]. Les principes de manutention de bénéficiaires les plus actuels sont de conserver son équilibre par une base de support pieds larges et stables, de diminuer le bras de résistance en gardant le bénéficiaire le plus près possible de soi, d’ajuster la hauteur de travail, lorsque possible, et de favoriser un alignement de la colonne en gardant l’effort directement devant soi.

(42)

28

Une bonne compréhension des façons de faire permettrait d’entraîner des novices à la recherche de solutions optimales par l’observation des stratégies propres aux experts. De cette façon, les novices adoptent de nouvelles façons de manipuler les charges qui semblent plus sécuritaires par rapport aux principes biomécanique et aux chargements du dos. Cette observation porte à croire qu’il serait avantageux d’élaborer les formations sur la base des connaissances des travailleurs et de leur observation plutôt que sur la théorie [23].

Actuellement, les formations sur la manutention de bénéficiaires sont plutôt dirigées vers la théorie. Ce constat s’applique pour le PDSB et le PDSB-TAP. Or, il reste encore beaucoup de connaissances à acquérir dans ce domaine pour favoriser l’enseignement de principes davantage orientés vers la recherche de solutions optimales en fonction des contextes très changeants.

(43)

29

Chapitre 3

L’analyse du déplacement du bénéficiaire en assistance totale chez les techniciens ambulanciers-paramédics lors de situations réelles de travail

Larouche, Dominique1-2, Authier, Marie3, Praire, Jérôme1-2, Hegg-Deloye, Sandrine1, 4-5 et

Corbeil, Philippe1-2

1 Département de kinésiologie, Faculté de médecine, Université Laval, Québec, QC,

Canada.

2 Centre de recherche FRSQ du centre hospitalier universitaire de Québec, Québec, QC,

Canada.

3 Ergonome

4 Institut Universitaire de Cardiologie et de Pneumologie, Hôpital Laval, Université Laval,

Québec, QC, Canada.

5 Équipe RIPOST, CSSS De la Vieille Capitale (CAU), Quebec, QC, Canada.

Adresses de correspondance : Dominique Larouche, M.Sc. Kinésiologie, Université Laval 2300, rue de la Terrasse

Québec, Québec, Canada, G1V 0A6 Téléphone : 418.656.2131 poste 4920

Adresse électronique : dominique.larouche.2@ulaval.ca et

Philippe Corbeil, Ph. D. Kinésiologie, Université Laval 2300, rue de la Terrasse

Québec, Québec, Canada, G1V 0A6 Téléphone : 418.656.2131 poste 5604 Télécopieur : 418.656.2441

(44)

30

3.1 Résumé

Le déplacement du bénéficiaire d’une surface à une autre représente une tâche du métier du TAP à risque de troubles musculo-squelettiques. Ceci est particulièrement vrai lorsque le déplacement du bénéficiaire est effectué en assistance totale. L’objectif de cette étude était de décrire la variabilité en situation réelle des déplacements en assistance totale. Ces déplacements ont été exécutés par 44 des 59 TAP qui ont participé aux observations. Au total, 64 déplacements ont été filmés et analysés.

Les résultats de cette étude montrent clairement que les méthodes de travail des TAP lors d’un déplacement en assistance totale varient substantiellement selon la position du bénéficiaire (assis ou couché), selon la hauteur à laquelle il se trouve (au sol ou surélevé) et selon la destination finale (civière, sol ou autre). Au total, 11 % des déplacements ont été effectués sans l’aide d’équipement de déplacement et une forte majorité de déplacements ont favorisé un soulèvement plutôt qu’un glissement d’une surface à une autre.

Une utilisation judicieuse des équipements, notamment ceux visant à réduire la force de friction lors des glissements du bénéficiaire d’une surface à une autre, est fortement recommandée.

Figure

Figure 3 : Force de compression et de cisaillement sur une vertèbre lombaire.
Figure 4 : Effet de la longueur du bras de résistance sur le moment de force à la colonne  lombaire
Tableau  1 : Facteurs en faveur ou en défaveur des soulèvements en position de squat  (lorsque la charge est près du corps)
Tableau  2 : Facteurs en faveur ou en défaveur des soulèvements en position de stoop  (lorsque la charge est éloignée du corps)
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