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ARTheque - STEF - ENS Cachan | Notes bibliographiques : "L'innovation technique - Récents développements en sciences sociales - Vers une nouvelle théorie de l'innovation." de P. Flichy

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Academic year: 2021

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Texte intégral

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L'

INNOVATION TECHNIQUE

RECENTS DEVELOPPEMENTS EN SCIENCES SOCIALES

VERS UNE NOUVELLE THEORIE DE L'INNOVATION

Patrice FLICHY

*

Alain CRINDAL

Jean-Luc LAURENT

Patrice Flichy, chercheur au CNET (Centre national d'études des télécommunications) et au CNRS s'interroge sur la naissance de l'innovation technique. Pour ce faire, l'auteur met en évidence dans une description critique les différentes théories de l'innovation que les sciences humaines ont proposé. Il les présente au crible du lien qu'elles accordent entre technique et société. En alternative, il conçoit une approche unifiée de l'action socio-technique des différents acteurs de l'innovation.

LES THEORIES STANDARDS

De la technique ignorée au tout technique, le déterminisme technique et le déterminisme social.

CHEZ LES ECONOMISTES

Jusqu'à la moitié du vingtième siècle les néo-classiques, Smith, Schumpeter, mais aussi Marx ont une perspective internaliste. La technique est un facteur qui influe sur la rareté. La croissance technique n'est qu'un « résidu » issu de l'augmentation du rapport capital/travail. L'innovation appartient aux entreprenants tandis que l'invention, elle, provient d'un fonds inépuisable.

Mansfield propose, vers les années 60, un modèle standard de diffusion de l'innovation qui dans sa représentation graphique est une

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courbe en « S ». Ce modèle n'est remis en cause que vers les années 1980 par Rosenberg. Il reconsidère la technique comme un facteur endogène et situe l'innovation dans une conception dynamique. Freeman en 1988 sort les économistes du faux problème du « market pull » et du « technological push » en agréant une co-évolution de l'offre et de la demande.

CHEZ LES SOCIOLOGUES

La diffusion de l'innovation est dépendante de l'existence d'un réseau social d'influence dont les caractéristiques sont définies par Everett : prestige social, valeur économique, compatibilité avec les valeurs du groupe d'appartenance, complexité et visibilité de l'innovation. Le modèle graphique obtenu a aussi un profil en « S » marqué par des étapes : la connaissance, la persuasion, la décision, la mise en œuvre et la confirmation.

Au delà de la position marxiste qui considère la prégnance du déterminisme technique sur l'organisation du travail, les travaux de Gallie et de Durand renvoient technique et organisation du travail dans une dépendance commune aux pouvoirs économique et politique. Noble abandonne le paradigme d'une sociologie des effets en intégrant la technique et sa genèse et, avec les travaux de Freyssenet puis de Monjardet, il est admis que « les techniques productives sont conditionnées sociologiquement, économiquement, culturellement » et que « tout paradigme ne tenant compte que des relations entre technologie et organisation du travail serait nécessairement faux ».

CHEZ LES HISTORIENS

Au delà de l'hagiographie présente dans les descriptions qui associent les grands inventeurs à des héros, une histoire technique des techniques a vu le jour dans une perspective internaliste : Daumas, Fèbvre ont une vision encyclopédique tandis que Gilles décrit et analyse des systèmes techniques.

En marge, Ellul offre un point de vue « tout technique » : L'économie ne peut rien face au déterminisme technique, « puisque c'est possible [techniquement] c'est obligatoire ». La technique est alors un système sans contrôle dont la dynamique dévore l'ensemble de la société.

Eisenstein, dans ses recherches sur la révolution de l'imprimé, opte pour un point de vue d'histoire sociale de cette technique, elle quitte le paradigme de causalité pour une analyse plus fine où les rapports entre l'invention et la société constituent une chaîne de médiation.

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UNE APPROCHE SOCIO-TECHNIQUE UNE ANTHROPOLOGIE DE LA TECHNIQUE

Leroi-Gourhan place la technique comme résultat de l'interaction entre un groupe humain et son environnement. C'est un point de vue volontairement culturel. Mais les travaux de son école se sont limités à des approches taxonomiques sur les objets plus que sur le social. Les travaux de Kühn, remettant en cause le modèle de l'épistémologie des sciences qui reposait sur un système autonome de pensée lié à une méthode spécifique, engendrent le développement de controverses. Cette thèse du constructivisme social est appliquée dans le champ de la technique par Pinch et Bijker : à chaque objet technique correspond « un cadre technologique de référence » qui constitue l'environnement social et cognitif de la conception et de l'usage du dit objet. Les travaux de Latour montrent que les techno-sciences se construisent aussi par « les aléas des rencontres et le hasard des circonstances », en compagnie de Callon une théorie sociologique est définie, elle s'appuie sur le principe des associations d'humains et de non-humains et sur la métaphore du réseau (acteurs représentés ou porte parole, acteurs organisateurs et acteurs stratégiques). La boîte noire des techno-sciences est ouverte et le développement technique est analysé aussi bien dans des projets qui réussissent que dans ceux qui échouent ; mais l'intentionnalité n'a pas sa place dans le modèle qui se limite trop souvent à constater l'évolution de rapports de forces ou l'existence de coups tactiques.

ACTION SOCIO-TECHNIQUE ET CADRE DE REFERENCE

Le modèle d'analyse de l'auteur se situe au carrefour de l'ethnométhodologie et de la sociologie inter-actionniste. Toute action d'un sujet se déroule en interaction avec d'autres, celle-ci implique un but, des motifs, des agents et des circonstances spécifiques. Pour une action chacun se situe dans un monde social, « en définissant les objets, les autres personnes, le monde et lui-même en interaction avec les autres [dans un forum], chacun peut visualiser son projet d'action et anticiper les réactions des autres ».

Le cadre théorique de l'auteur répond ainsi à quatre exigences : • intégrer technique et société ;

• l'activité technique ne peut être dissociée de ses acteurs ;

• l'action technique, sa mise en projet et son déroulement sont plus importants que le fait technique ;

• les interactions entre acteurs doivent rendre compte de la prévisibilité de l'acte technique.

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d'organiser son action et sa coopération avec les autres. Il est constitué de savoirs, de savoir-faire et d'artefacts techniques. Il est articulé entre un cadre de fonctionnement et un cadre d'usage. Dans ce cadre de référence les acteurs peuvent être tour à tour stratèges (ils participent à la construction du cadre) ou tacticiens (ils subissent le cadre mais y saisissent des opportunités).

UNE HISTOIRE SOCIO-TECHNIQUE

Que l'évolution technique soit continue par modifications et transformations successives ou discontinue par ajouts cumulatifs, pour P. Flichy c'est le problème des choix technologiques qui est central. Mais qui décide du succès de ces choix ?

L'école de la compétition technologique s'intéresse aux interactions entre les agents, elle les met au cœur de la décision, un niveau local détermine les responsables des choix techniques qui sont au centre d'un cadre de référence spécifique à leur groupe social. Pour Arthur le choix est favorisé par l'attractivité croissante d'une technique, celle-ci étant d'ailleurs conditionnée par le parcours de la technique en cause. Les mécanismes qui interviennent sont liés à l'apprentissage par l'usage ou la connaissance, ils déterminent un rendement croissant de l'attractivité ce qui s'oppose à la théorie standard qui s'installait dans l'attente d'une technique constituée.

Des processus relevant du hasard ou, pour le moins, échappant à un quelconque point de vue technique, s'imposent parfois dans la mise en place de l'innovation (Cf. le clavier QWERTY conçu pour ralentir la frappe mais également pour qu'on puisse, sur une seule ligne, taper la marque du produit : « type writter »).

La démarche constitutive de l'innovation ou « choix dépendant du chemin parcouru » permet alors de comprendre comment le cadre de référence se fixe, se verrouille et finit par devenir une convention qui organise l'activité technique correspondante. Ainsi la « main évolutionniste » qui « sélectionne et organise la diversité générée par les changements techniques et institutionnels » joue le rôle de cadre de référence.

Si, comme Perrin l'affirme, « tout objet technique a une double face : une face technologique et une face organisationnelle [...] qui permet de retracer l'ensemble des relations et connexions [...] nécessaires à sa production », alors le caractère intrinsèque de la dimension sociale de tout objet technique ne peut être nié et le simple aspect historique de l'innovation ne peut rendre compte du découpage technique-social-économique.

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Au delà, la description du parcours de l'innovation ne peut faire l'impasse des « représentations de la technique » et des ressources que constitue l'imaginaire technique. En s'appuyant sur l'exemple de l'ordinateur P. Flichy détermine que :

∗ « le sentier dont une technique stable va dépendre n'est pas linéaire [...] ni même arborescent, [...] mais foisonnant » ;

∗ « l'innovation, au sens de production d'un cadre de référence, est une activité fondamentalement sociale » ;

∗ « l'imaginaire technique est bien une composante centrale du développement des techniques ».

Un environnement est associé à toute réalisation, « l'inventeur, pour s'acheminer vers une réalisation technique, doit positionner son projet dans un cadre de fonctionnement ». C'est à partir de ce cadre qu'il met en place son modèle d'analyse du processus innovant associant :

∗ histoires parallèles (avoir la capacité de lire sous plusieurs points de vue le processus) ;

∗ objet-valise (phase de l'imaginaire ou l'objet est un fourre-tout ne répondant pas encore à un cadre de référence unique et pour lequel les choix technologiques ne sont pas stabilisés) ;

∗ objet frontière (phase de stabilisation où les ambiguïtés vont être levées).

L'objet technique est donc considéré comme le résultat de trois composantes : l'activité des acteurs, le hasard et les contraintes socio-techniques. Dans cette conception la recherche en sciences sociales peut avoir la double fonction de déterminer les cadres de références et d'aider les concepteurs à comprendre les parcours innovants.

Au déterminisme du génial Eurêka, l'auteur oppose un processus complexe de confrontation, de négociation qui associe les acteurs techniques mais aussi les usagers. Sa démonstration le conduit à décrire une réadaptation du projet technique en fonction des variations de l'environnement il contribue ainsi à réduire l'incertitude de lecture qui subsiste dans tout parcours d'innovation.

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