• Aucun résultat trouvé

Penurie d'emploi et discrimination à l'endroit des femmes sur le marche du travail

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Partager "Penurie d'emploi et discrimination à l'endroit des femmes sur le marche du travail"

Copied!
417
0
0

Texte intégral

(1)

(

(

SUR LE MARCHE DU TRA VAl L

PAR SYL VIE MOREL

ESSAI

SOUMIS EN VUE DE SATISFAIRE PARTIELLEMENT AUX EXIGENCES REQUISES POUR L'OCTROI DU

DIPLOME DE MAITRISE EN

ECONOMIQUE

A LA

F ACUL TE DES ETUDES GRADUEES ET DE LA RECHERCHE DE

L'UNI VERSITE McGILL, MONTREAL

MARS 1987

(2)

c: ;v ... m o m 7 ' =6 r o ... m -! o ... VI (""') ;:0 ... 3: ... ::2 :t:> -1 ... o :z

(3)

"

\

(

(

ABSTRACT

ThIS thesls analyses the re lat IOn between the phenomenon of Job 5carclty and dISCriminatIon agalnst women ln the labour market. Job scarclty, thal

,' IS the Inadequate quantlty of avallable jobs relatIve to the number of persons able to hold them, Whlch 15 a chronlc problem, has played an Important role 1\'1 the

development of dlscrlmmatlon The hypothesls of the thesls 15 that a Pos\tlve relat IOn eXIsts between dl5crlmmat Ion agalnst women and job SC arc 1 ty as employment opportunltles deterl0rate dIscrIminatIOn intenSIfIes

The thesI5 verifIes the dlscrlmlnatory effects of job scarclty by examlnlng the pro cess of Job allocat ion ln the economy. An hlstorlcal study coverlng the end of the last century to the crlsis of the 1930's IS the vehlcle used to examine the employment ratlOnlng mechamsms that consolldated dlscrlmlnatory pract lces

j

l

1

(4)

Ce mémoIre analyse la relatIon eXIstant entre le phenomene de la penurie d'emplOI et la discrlmmatlOn exercée à l'endroIt des femmes sur le marche du travaIl. La pénurIe d'emplol, SOIt l'insuffIsance de la quantlte d'enl. lOIS en regard du nombre d'mdivldus susceptibles de les occuper, se révèle un facteur qUl, en raison de sa chronlclté, a actIvement contribué au développement de la dlscrlmmatlon L'hypothèse de cet essaI consIste donc à soutemr QU'Il eXIste une relatlOn posltlVe entre ces deux termes, c'est-à-dIre Que plus la sItuatIOn de l'emploi se détérlOre, plus s'mtenslfle la dlscrlmmatlOn

C'est en examinant le processus d'allocatIon des postes de travaIl dans l'économIe que nous avons pu vérIfIer l'Impact dlscrlmmatolre de la pénurle d'emplo1. Au moyen d'une étude hIstOrique couvrant la fln du sIècle dernIer a la crIse des années trente, nous avons m1S en lumIère les mecanlsmes de rationnement QUI ont consolIdé la discrlmmatlOn

(5)

(

(

(

tr

REMERC 1 EMENTS

,-Je tIens à remercIer tout partIculièrement mon dIrecteur de thèse, le professeur SIdney Ingerman, dont la patIence, pourtant îudement rnlse à

J'épreuve, n'a JamaIs faIblI Les conseIls pertinents qu'II m'a prodIgués tout au long de cette démarche de recherche de même que la rigueur mtellectuelle qUI le caractérise m'ont été d'un précIeux apport pour mener

à

terme cette étude.

Egalement, le soutIen de mesdames DIane Bellemare et LIse Poulin-SImon mérIte d'être soulIgné Tout d'abord, Je remercIe la premIère qui, en qualIté de seconde lectrIce, a bIen voulu se rendre dIsponIble pour assurer une telle supervIsIon EnsuIte, c'est à elles deux que J'adresse mes smcères remercIe-ments pour la confIance et la sympathie qu'elles m'ont témOIgnées aux moremercIe-ments dIffIcIles de cette longue entrepnse

EnsUIte, Je remercIe tous ces êtres chers qUI m'entourent, ceux et celles qUI ne savent pas eux-mêmes combIen leur présence a pu, en certaines périodes, faIre la dIfférence Finalement, Je remercIe mon amIe Carole Lemay pour le profeSSIOnnalIsme et la dIspOnibIlIté dont elle a constamment faIt preuve dans le travaIl de dactylographie du manuscrIt

(6)

Madame DIane Bellemare de l'UniversIte du Ouebec a rvlontreal et par r1Jdame LIse

(7)

TABLE DES MATIERES

ABSTPA.CT Il

RESUME. .... ... ... ... ... .... . .. ... ... . III REMERCIEMENTS. . . . . ... . 1 V A.VANT-PROPOS ... ., ... . ... ... . ... ... .... ... .. ... V

T ABLE DES MATIERES .. ... .. ... ... ... .. .. ... ... ... .. ... . . .... . VI LISTE DES TABLEAUX ... ." ... ... . . .... . ... .. ... ... IX LISTE DES GRAPHIQUES ... ... ... ... X

INTRODUCTION .... ... '" ... , ... .

Pénurie d'emploi et discrlmlnation.... ... ... ... ... ... ... ... 4

(

Descrlpt Ion. ... . ... .. ... . ... ... .. ... ... ... ... . . .... ... .. ... 6

PREMIERE PARTIE.... ... ... . ... ... ... ... ... . ... ... ... . Il CHAPITRE 1 REVUE DE LA LITTERATURE.... ... ... ... ... .... 13

1 1 Des indIVIdus autonomes dans un univers de plein emplOI... .... . ... 14

1 2 Le marché du travaIl un espace à reconsIdérer .... ... 19

CHAPITRE 2 LE PHENOMENE DE PENURE D'EMPLOI UN AUTRE REGARD SUR LE FONCTIONNEMENT DU MARCHE DU TRAVAIL... ... ... ... 37

2.1 Une contrainte à intégrer . .. ... ... ... .... .. ... 40

22 L'allocatIon des emplOIS coordmatlOn et ratIonnement ... 42

23 La relat1()n de marché une relatIon de pouvoIr. . ... ... ... 49

2.4 Des mesures instItutIOnnelles de ratIonnement ... ... . ... 59

25 En conformIté avec la nature du problème. la dIscrIminatIOn systèmlQue. .... .... ... ... ... ... ... ... 72

(

,

, , , '5 ,

(8)

TABLE DES MATIERES (suIte)

DEUXIEME PARTIE... .... .... ... ... ... .. .. . .. . . 83

CHAPITRE 3... .... .. ... . ... .. 85 Les pénurIes d'emploI au Canada survol hIstorIque 86

CHAPITRE

4.

Le XIXe sIècle.... . ... .. 101

4 1 La révolutlOn lndustrlelle femmes

à

l'uslne.. .. 103

4 1 1 SubstltutlOn et concurrence 103

4. 1 2 Les secteurs d'emp 101 lndustrle ls lOS

4.2 t 873-1876 l~ "Grande DépressIOn" 111 4.2.1 Les effets sur remploI des femmes 1 J 3

42.2 La légIslatIOn les débuts de l'ère protectIOnnIste 1~9

4.2.3 La CommIsSIon royale d'enquête sur les relatIons

du travaIl avec le capItal' le sIlence moralIsateur 142 424 L'option de la dénonclat ion l'exclusIOn ou la segrégat Ion. 149 SommaIre.. .... . .. . .. ... . ... . .. ... ... . 162

CHAPITRE 5 1900-1930 OU L'ENTRE-DEUX - CRISES. . 183

5 1 La pérIode d'avant-guerre 185

5 1.1 La ségrégatIon et la cautIOn de l'ambIvalence 185 5. 1 2 Nouve Il es avenues. nouve 11 es embûches 190 5 1 3 Epoque nouve Ile . ancIen contextel 196

5.2 La premIère guerre mondIale 21 1

5.2.1 Un pssor qUI se faIt attendre. .. ... 213 5.2.2 La mobIlIsatIOn étendue et SIgnifIcatIOn 222 5.2.3 Les secousses de l'après-guerre

femmes "démIssIonnées", femmes "protégées" 231

(9)

CHAPITRE 6. LA CRISE ... ... .. ... ... 279

6 1 Les effets sur J'emploI des femmes.. ... ... ... ... ... 281

62 Un éventaIl de réact10ns .... , ... .. ... 287

62 1 Des mesures d'exc!uslOr.... . ... , ... '" 291 622 .. aux tentat Ives de réorl entat 1On... ... . ... ... ... 309

623 Sans oublIer pour autant le protectlOnnlSme ... ... . ... 322

63 L'envers de la médaIlle ... '" ... 342

631 Leparadoxedelaréallté. .. ... 342

632 Des nuances qUI s'Imposent 349

SommaIre 360 CONCLUSION BIBL10GRAPHIE. .. ANNEXE . 375 383 401

(10)

LISTE DES TABLEAUX

ChapItre 3

Tableau 3.1 Taux de chômage annuels moyens au Canada. 90

ChapItre 6

Tableau 6.1 EvolutlOn des taux d'activIté féminin et masculin

- 1891 à 1941- ... ... .. ... .. .... .. . 283 Tab leau 62 RépartItIOn (en %) de la main-d'œuvre fémlnlnP selon les

princIpaux secteurs occupatlOnnels, Montréal, 1911-1941 . 284 T"bleau 6.3 PrestatlOns et salaIres mInimums hebdomadaIres 337 Tab!cau 64 Employment and unemployment, by sex and occupatlOnal

group, US, 1930 346

Annexe

Tableau 1 Particip~tion à la populatlOn actIve, emploi et chômage,

Canada, 1966-1980... ... . . . . . ... .. 403 Tableau 2 Personnes actives par occupatlOn et par sexe, Canada,

1975 et 1980 .. . ... . . . .... 404

Tableau 3 FéminisatIon par branche d'actIvIté et par occupatIOn,

Canada, 1 980 ... ... ... ... ... . 405 Tableau 4 ConcentratIOn professIOnnelle par sexe et branche d'actIvIté,

Canada, 1980.. ... .... . ... ... . . ... ... .... .. 406 Tableau 5 EmploI à temps plein et à temps partiel, Canada,

1966-1 980... ... ... ... ... . .. . 408 Tableau 6 Répar't!tlOn de tous les emploIs créés à temps plein et à temps

partiel selon l'occupation et le sexe, Canada, 1975-1980 . 409 Tableau 7 ComparatIve table of minImum wages ln Canada. 410

(11)

ChapItre 4

Graphique 4.1 Pourcentage de la main-d'œuvre féminine dans certains

secteurs industriels

à

Montréal, 1871, 1881 et 1891... 117

Annexe

Schéma hIstorIque du syndIcal isme ouvrier au Canada 1873-1964... 414

(12)

"

En cette décennie des années quatre-vingt, la questIon de remploI faIt couler beaucoup d'encre. L'histoire se répète, a-t-on dit L'observation ne saurait être plus juste en ce qui a trait à ce problème QUI n'a, pour amsi dIre, JamaIs cessé d'être au cœur des grands débats socIaux marquant l'évolutIOn de nos sociétés industrielles.

S'il en est ainsi, c'est tout d'abord parce que le marché du travaIl est une institution de premier plan dans un mode d'organisation économIque tel Que le nôtre. Car dans une économie de type industriel, la réalIsatIon de l'autonomIe financière indispensable au respect de l'intégrité humaine passe, pour la majOrité des individus, par l'exercice de l'emploi. C'est essent ie Ilement la raison pour laquelle la question de l'emploi est si déterminante. C'est aussI pourquoI on s'en préoccupe tant car, encore et toujours, la caractérIstIque premIère du marché du travail reste bel et bien t'insuffisance des emplois qU'II génère.

Or, qui dit emploi et marché du travai 1 dit également, pour les femmes discrimination. Ceci signifie que dans le partage de l'emploi, ces dernières sont, de loin les grandes perdantes.

Ainsi, en premier lieu, n'oublions jamais que la moitié d'entre elles sont toujours exclues du salariat même si elles réalIsent, sans compensatIOn monétaire donc, une production qui exige un nombre impreSSionnant d'heures de travaIl 1,

(13)

-Ensuite, pour ce qUl est des femmes qui ont déjà gagné les rangs de la mam-d'œuvre, leur sltuatlOn ne fait que réfléter, dans l'unlvers de l'emplol, cette même margmallsation que connaissent les femmes dans la sphère domestique.

En effet, de nombreuses recherches démontrent sans éQulvoque Que la discrlmination sur le marché du travail est depuis longtemps le lot des travailleuses, celles-ci étant coincées dans des créneaux d'occupatlOns déqualifiées et dévalorisées. Pour ne citer que quelques auteurs, Pat et Hugh Armstrong (1978), à partlr de données recueillies pour la pérl('d~ allant de 19(~1 à 1971, ont parlé de "ghettos" d'emploi pour les femmes. Au même moment, Patricia Connelly (1978.36) établIssaIt que, entre 1901 et 1971, "no less than

65~ of the female labour force were in occupatIOns where the maJority of

workers were women and no less than 43~ were in occupations which were 70% or more female. It appears, then, that over the seventy year period the maJority of women have been and stiJl are in "female occupatlOns" ". Toujours en 1971, alors Qu'au Québec, une femme sur 1 0 était sténographe ou secrétaire, un homme sur 500 se retrouvait dans une même profession (Dussault, 1983: 8). En 1980, la répartitIon des femmes se ventilaIt comme suit. plus de 60 pour cent d'entre elles étaient regroupées sous trois catégories profeSSionnelles, soit le travaIl de bureau, les services et la vente. Une travailleuse rémunérée sur trois est alors

employée de bureau, de un cmQUlème

à

un sIxIème de la main-d'œuvre féminme

travaille dans le secteur des services tandis Que celui de la vente en réunit 10,4 pour cent (Armstrong, Armstrong, 1983: 9-11 )2.

Quant

à

la dévalorlsatlon des activités Qui accompagne la discrimination occupationnelle des femmes, elle se manifeste par l'important écart qui persiste

(14)

entre les revenus d'emploI masculms et féminins: en 1982, les canadIennes ont retiré du marché du travaIl des revenus s'établissant en moyenne à 63,9 pour cent de ceux des hommes (CommisslOn Abel1a, 1984' 73)3. Et l'on n'a pas parlé de la forte incidence du chômage sur les femmes QUI, sauf ces dernIères années, s'est toujours maintenue4, ni du sous-emploI masqué par le temps partIel QUI vIse près du quart de la main-d'œuvre féminme, cecI relativement à environ 6 pour cent des travailleurs5. On n'a rien dit non plus des autres politIques d'embauche qUI entretiennent le statut précaire des groupes les pius désavantagés sur le marché du travai 1 (Legault, 1985) et, par conséquent, de la pauvreté tant des avantages marginaux Que des possibilités de carrière marquant les emplois féminins. "for the most part, these occupations are such that they provlde horIzontal rather th an vertical career patterns for women" (Connel1y, 1978: 42).

Ainsi, lorsque l'intégration des femmes au marché du travail se rattache à une telle réalité, faisant en sorte que "40~ des Québécoises déclarant un revenu en 1 980, vivaient sous ce Qui est considéré comme le seui 1 de la pauvreté pour une personne" (Vandelac, Gauthier, 1985: 24)6, on ne peut sérieusement soutenir qu'elles reçolVent leur part éqUItable des privilèges relIés à l'emplOI CecI surtout, comme nous venons de le mentIonner, Quand 50~ des femmes en âge de se trouver sur le marché en sont absentes

Nous avons, pour notre part, ChOISI d'examiner certaines des forces à l'œuvre dans la perpétuatlOn de la dIscrImination en emploi en prenant pour CIble le marché du travaIl Que nous aborderons sous l'angle de la pénune d'emplOI CecI parce Que nous prétendons que ce phenomene se repercute sur 1't}volutlOn et le

(15)

(

Parce que S'lI nous apparaît Juste de croire que le rôle des femmes dans la sphère domestique Influe directement sur leur posltion en emplol, tout en se posant comme un facteur explIcatIf détermmant de la discrlmination que la caractérIse, inversement, le mode d'intégration des femmes au marché du travall ne va pas sans agir sur leur vie famlliaie. Ces deu)( espaces dans lesquels se réalise le

travaIl femmm sont

en

constante mteractlon

AUSS1, tenter de mieux saIsir les conditIOns qui prévalent dans J'un ou J'autre de ces lieux, amsl d'allJeurs que les prinCIpes de leur artlculatlon, ajoute à la r.ompréhension de J'ensemble des facettes de la dlscnmination systémIque.

De plus, même Sl, v1s-à-vis le marché du trav?11, on attache aUJourd'huI à ce phénomène beaucoup d'intérêt et dans l'orIentatIon de la recherche et dans la formulatIon des politIques gouvernementales, ce dernier recèle toujours de

nombreux mystères De nombreux mystère qUI entachent nécessairement les

résultats des efforts mIs en branle pour modifIer la POSItIon inégalltalre des

femmes. C'est pourqu01 la m1se en évidence des lIens qu'entretiennent les

problèmes de pénurle d'emploi et de discriminatIOn nous apparaît importante, éclaIrant en soi une dynamique trop souvent négligée.

PENURIE D'EMPLOI ET DISCRIMINATION

Le prOblème de la pénurie d'emploi sur le marché du travail, c'est-à-dire l'Insuffisance des postes face à J'ensemble des indivldus dlsponibles pour les occuper, se présente selon nous comme un des facteurs contrIbuant au mamtien de la dlscrlmmatlOn L'hypothèse centrale de la problématlQue Que nous allons

(16)

développer plus 1010 dans ce mémolre conslste donc à soutenlr QU'II e:rlste untJ

relatIOn posItIve entre la penune d'emploI et lu dlscnmmat/(ln e/rercee j l'eg.:Jrd

des femmes sur le marche du travail. c'est-à-c.1lre Que plus la sltuatlOn de

l'emploi se détériore, plus s'aggrave et s'envenime la discrimlnat lOn En ce sens il s'agIra d'évaluer l'hypothèse de pénUrie d'emploi comme un des facteurs exp11cat1fs de l'évolution de la discnmmatlOn, phénomène QUI non seulement perdure mais, de plus, s'est progress1Vement mst1tutlOnnallsé de sorte QU'Il se présente aujourd'hui sous la forme de la dlscrlmmatlOn systemIque

Si la pénurie d'emploi exacerbe la discrlmmatlOn, c'est avant tout, en raison du lien qui existe entre l'état du marché du travail et la positIOn des femmes en emplO1. Car le premIer tra1t qU1 caractér1se ce dernier est sans contred1t la chronicité de l'msuffisance de la demande de travaIl. Tout au long de l'hIstoIre, comme nous le verrons dans la seconde part1e, le marché du travail a le plus souvent été mcapable de répondre adéquatement à l'offre de travaIl QUI s'y déclaraIt. Et encore, nous ne prenons pas en compte la main-d'œuvre potentIelle, soit l'ensemble des individus qUI auraIent rejoint la populatIOn actIve SI le marché du travail avaIt pu rencontrer leurs efforts d'intégratIOn CelUI-CI présente donc la smgularité d'afficher régulièrement des surplus Importants de mam-d'œuvre ou, en d'autres termes, de fonet IOnner avec un niveau de chômage notablement élevé. AUSSI une telle sltuat1on, vu le rôle central Qu'occupe l'emplOI dans notre système économ1que, ne peut aller sans se répercuter sur l'ensemble des phénomènes SOC1aux qUI modèlent l'exIstence et auxquels appartient bIen sûr la discriminatIOn.

(17)

(

C'est au sein des instItutIOns qUI régissent l'organisatIOn du marché du travaIl que se matér12,lise le rapport qu'entretIennent pénurIe d'emploi et dIscriminatIOn. Plus exactement, c'est à travers les mécanismes régulant la répartItIOn des postes de travaIl, les mecanismes d'allocatIon des emploIs, Que

se mettent en place les règles discrlmmatolres qUI défavorisent les femmes sur le marché CecI parce que la pénurie d'emplOI contrIbue à Intégrer à ces derniers une fonctIOn de ratIonnement des postes disponibles de sorte que s'ajoutent dans le processus qUI en assure la distrlbut1on, des règles de prIOrIté dont bénéficient.

les catégorles de mam-d'œuvre les plus avantagées. L'allocatlOn de l'ensemble des emplOIS eXIstants s'opère dès lors sur la base de mecanlsmes de ratIOnnement QUI sanctlOnnent 1'mtégratlOn des différents groupes

démogra-phIques au marché du travail AUSSI est-ce le jeu de ces mécanismes QUI contribue à perpétuer l'exclusion des femmes des bons emplOIS, de l'emploi par le chômage ou encore carrément du marché.

DESCRIPTION

Cet essaI se compose de deux parties. La première, de nature théorique, s'attachera en premIer lieu à décrire les princIpales contributIOns Que la théOrie économique a apporté à J'étude du phénomène de la dISCrimination Cette revue de la lIttérature portera prinCIpalement sur les théorIes de la segmentation que traversent à leur tour deux principaux courants: J'approche Institutionnaliste et l'approche marxiste. C'e~t au second chapItre que sera développé le cadre théorIque où seront préCIsés chacun des concepts Que nous venons tout juste d'identIfier. Nous y examinerons donc plus avant l'hypothèse de la pénUrie d'emplOI ainSI Que la notIon de dISCriminatIon systémique.

(18)

<Ii'

Puisque cette dermère représente un phénomène évolutif et, Qu'à ce tItre, on doit la voir comme "dlscrlmlnatlOn h1storlque", appellatlOn sous laquelle, de faIt, on la désigne quelquefois, nous avons opté pour une méthodologIe de recherche du même ordre. La démonstratlOn, objet de la seconde partie, couvre ainSI troIs périodes hIstoriques majeures qUI vont de la fln du siècle dermer à la crise des années trente inclUSIVement, et qUI comptent pour autant de chapItres Préalablement, toujours dans la deux1ème partle, nous aurons présente en gUIse de chapitre mtroductlf un survol des périOdes de pénurIe d'emplOI permettant au lecteur de mieux mesurer l'ampleur de ce problème.

La description des événements majeurs qUI, au long de plus d'un demI-sIècle d'histOIre, marquent l'évolution et de l'emplOI et du travaIl féminin, offre un éclaIrage sans contredit utile et nécessaIre pour l'examen des formes actuelles de la discrimination systémique. Comme notre échant11lon renferme des unités d'observations qUI représentent des moments sigmficatifs en regard de notre hypothèse, c'est-à-d1re Qu'elles comprennent aUSS1 bIen des pérlOdes de penurie d'emploi Qui ont profondément marqué la mémOIre collectIVe (la Grande Dépression, la Crlse des années trente) que celles qUI sont généralement mOins connues (les récesslOns d'avant et d'après-guerre), nous avons pu vérifIer la mIse en œuvre de ces mécamsmes de ratlOnnement qUI intervIennent dans le processus d'allocat1on des emplOls. AUSS1, puisque ces dermers ont prIs part à l'lnStltU-tionnallsation progressive de la d1scrlmlnatlOn, ce sont leurs effets qUI se manifestent encore

à

travers les rouages du système. D'où l'Intérêt d'en prendre connaissance et ceCI, dans le contexte QUI les a vu naître

(19)

(

(

L'lnVest1gatlOn s'est donc prlnc1palement or1entée sur l'identif1catlon de ce

type de mécanIsmes dont l'lnterférence se solde par le traItement

dIscriminatOIre des femmes, ainSI que sur le scénarlO de leur avènement basé, dans tous les cas, sur une formulatIon explicite ou plus ambiguë du prOblème de la concurrence sur le marché du travaIl et, partant, de la nécessité de distribuer l'emplOI sUIvant des règles préférentIelles. En plus, dans la mesure où nous couvrons aussI des épIsodes d'expansIon économique, comme la mIse en place du mode de productIOn industrIel et la première guerre mondiale en sont des exemples, nous pouvons également, quoiqu'à un degré momdre, observer comment se modifient les règles économiques de l'allocation des emplois en période

d'ouverture du marché du travail. l'ensemble de ces constats expliquent

clairement pourquoI l'approche historique constituaIt la meilleure manière d'éprouver notre hypothèse et d'en confirmer la valIdité.

j i

i

)

~

i

!

j

(20)

NOTES

,. En France, par exemple, "(le) travail domestique représente plus d'heures que l'ensemble du travall rémunéré, soit [",1 48 millIards d'heures de travaIl non productif contre 41 mIlliards d'heures de travaIl dIt productIf" (Vandelac, GauthIer, '985: 23). Ces informatIOns provIennent de A Chadeau, A Fouquet, "Peut-on mesurer le traval1 domestIque?", Econom1e et stat1stlque, no 136, Institut natIOnal de statistIque et des études économ1Ques,

Pans,

sept. 1982, pp. 29-42.

2. Pour un meilleur aperçu de la partiCIpatIOn des femmes à la mam-d'œuvre et de la djscrjmij~~tion occupationnelle dont elles font J'objet, vOIr en annexe, les tableaux 1 à 4.

3. Il s'agit des revenus calculés pour des emplOIS occupés toute J'année, a temps plein; selon Ginette Dussault (1983: '4-15), "(a)lors Qu'au nIveau agrégé, les écarts de salaire s'explIqueraIent surtout par le faIt que les hommes et les femmes n'occupent pas les mêmes emplOIS, au nIveau de chacun de ces emplOIS l'explication se trouveraIt surtout dans le faIt Qu'Ils ne travat lient pas pour les mêmes employeurs"

4. Tableau 1.

5. Voir à ce sUjet les tableaux 5 et 6.

6. Forum. Les femmes; une force économique insouoçonnée, PalaIS des congres de Montréal, 29 et 30 octobre 1983, p. 17.

(21)

(

(

PREMIERE PARTIE

j

1

l

(22)

CHAPITRE 1

REVUE DE LA LITTERATURE

Le phénomène de la dIscrimination sur le marché du travaIl a été abordé de multiples manières par les économIstes. Amsl a-t-on pUIsé de dIfférents corpus conceptuels les outIls théorIques susceptIbles d'explIquer la pOSItIOn éc\ iomlQue de certames catégOries de main-d'œuvre désavantagées face à l'emploI. Compte tenu toutefOIS des limItes mhérentes à une entreprlse comme celle-CI, nous avons crû bon de nous concentrer sur les modèles d'analyse QUI sont d'un véritable apport pour l'examen de cette Question.

C'est pourquoi l'approche orthodoxe en économIque, celle QUI est le plus couramment utIlIsée, ne fera pas l'objet ICI de longs developpements Car, en raIson des prémIsses sur lesquelles elle s'élabore, celles de la théorIe néO-ClaSSIque QUI prétend Que tout phénomène économIque résulte nécessaIrement des déCISIons indIVIduelles d'agents optImIsant leur bIen-être, elle ne réUSSIt pas à tradUIre la dImenSIOn collectIve amsl Que la nature dynamique du phénomène de la dISCrIminatIon Après avoIr plus largement étaye ce pomt de vue (1 1), nous nous pencherons plutôt sur certains des courants qUI

(23)

-Justement se posent comme alternatlVes à cette dernière approche: les courants mstltutlOnnallste et marxiste que rejOIgnent les théories dites de la segmentatIOn (\ 2). Ce sont ces dernières que nous avons retenues parce qu'elles se polarisent sur J'examen du marché du travaIl dont elles mettent en relief les structures de fonctIonnement. Il est à noter toutefois, en ce qUI concerne la théorIe néo-classique, Que nous y reVIendrons dans le ChapItre suivant. Ceci pour dresser les grandes IIÇlnes de la représentation orthodoxe du marché du travail en parallèle avec notre prOblématIque.

1.1 Des IndiVIdus Autonomes Dans un Univers de Plem EmplOI

Différentes recherches (Blau, Jusemus, 1976; Dussault, 1983; Kor,en, Bremlch, ShIelds, 1975, Lloyd, Nleml, 1979; Sokoloff, 1980) ont faIt état de la mamère dont les économIstes néO-ClaSSIques ont incorporé la QuestlOn de la dISCriminatIon

à

leur cadre de référence. Ces revues de la littérature mettent un aspect en éV1dence même SI J'exercIce a généré de nombreuses formulatIOns des raIsons pour lesquelles certams groupes, dont les femmes, s'intégraient dIstinctement des autres au marché du travaIl, de façon unanime, elles relient la présence de la "dlSCrlmmatlOn"

à

un prOblème de préférences personnelles s'exerçant dans un unIvers de plein emplOI.

"L] chacun des modèles [ ... ] poursuit une démarche analogue. Après aVOIr Identifié la ou les partIcularités s'appliquant aux

(24)

femmes, Ils mettent en branle leur appareIl analytIque pour caractériser la situation d'équIlIbre QUl s'établlra sur le marché. L'appareil analytIque est la vIsIon tréorlQue du fonctionnement du marché du travail qUI dOIt mener à la réalisation du plein emplol" (Dussault, 1983: 63).

IS

le sens de la démarche qu'adoptent les économIstes néo-classlQues est donc de toute première Importance pour saIsir les conclusions de leurs analyses sur IJ discriminatIOn. Car ce dernier phénomène doit pouvoIr être enVIsagé à partIr d'une représentatIOn des relatIOns économIques déjà entIèrement structurée et complète en SOI Dès lors, 11 s'agit de fournir une expllcatlOn ad/JOc qUI respecte l'agencement des éléments d'un système clos et qUI sache se conformer ()UX prescrIptions de base d'un modèle parfaitement Imperméable à la compleXIté des rapport s soc i aux:

'les théories du marché du travail de l'économie "standard" se contentent d'hypothèses très slmpllficatrlces. C'est à une "totalité" qu'elles se rapportent, mécanique et autoréglée le

réductionnisme auquel elles consentent les condamne à

J'échec dès lors qu'i

1

s'agi t de procéder

à

J'ana lyse de phénomènes multidlmenSlOnnels" (Sartoll, 1981' VI)

En regard de la question de la discrimmation, on peut ranger les dIfférentes variantes du courant néO-ClaSSIque en deux catégories: les travaux qUI forment un ensemble hétérogène d'interprétations se regroupant sous J'appellatIOn de "théories de la discrimination" et ceux qUI s'mscrlvent dans la perspectIve de la "théorie du capItal humam" (Kohen, Brelnlch, ShIelds, 1975.57) La tIJéone du

(25)

capital humain, celle qui occupe actuellement une position dommante au sein des modèles orthodoxes, "prédit effectivement des choix occupatlonnels différents

pour les hommes et pour les femmes sans faire aucune référence à la

discrIminatIOn" (Dussault, 1983: 18). Ses principaux artisans 1 se sont en effet appliqués à démontrer que la distribution occupatlonnelle différencIée de ces

deux groupes rencontrait le postulat de la rationalité économique. C'est ce

concept fondamental de la théorie néo-Classique qui établit que les

comportements des agents économiques sont dictés par les règles de maximIsation de leur "utilité" et, par conséquent, que leurs actions sont le produit de Ch01X ratIonnels. Adaptant la théarie de l'investissement

à

l'analyse de J'offre de travaIl, les tenants de la théorie du capltal humain en viennent ainSI

à

soutenir que la positlOn des femmes en emploi découle de leur volonté. Ces dermères ont préféré se spéciallser dans les occupations domestiques, elles ont moins "mvest i" dans leur capital de connaIssances et c'est pourquoi leur faible productivité leur procure une rémunération moindre:

"'n the extreme, this approach seems to be formulated to demonstrate that observed sex differences are the result of

differences in productivity between males :?nd females, of

sex dlfferentiation in socializatlon WhlCh occurs pnor ta

labor market entrance, and/or of sex differentiatlon in the household dlvlsion of labor. The essence of the theoretlcal

argument lS that women have different expectatlons from

males about labor force part1cipation over a lifetime and,

therefore, women make dlfferent decisians from men about

investment in their own human capital, both durtng and after formaI schooling" (Kohen, Breinich, Shields, 1975: 60-61)2.

(26)

Dans la perspectlVe des théories de la discrtmmatlon, amsl qualIfIées

parce que, dans une certame mesure, les comportements discriminatoIres

viennent s'additionner aux varIables explicatives habItuelles, l'argumentatIOn

s'est développée dans différentes dIrectIOns. La formulatIOn la plus connue est celle qui rend compte des différences salariales entre travaIlleurs de même productivité par l'existence d'un "goût pour la dlscnminatlon" que manIfestent les hommes (employeurs, employés, consommateurs) à l'endrOIt des femmes. On concilIe ainsi l'existence,

à

rendement égal, des écarts de rémunératIon avec le schéma néO-Classique du fonctionnement du marché du travail, lequel postule pourtant que chaque "facteur de production" obtIent une rémunératIOn équlValentc

à

sa participation

à

la productIon, c'est-à-dire à sa productiVIté. Dans ce caS-CI, il s'agit simplement de ramener la "discrimmation" à une donnée exogene qUI,

à

ce tItre, ne mérIte aucun commentaIre. Il n'y a plus dès lors qu'à en dértver les conséquences économiques selon les prédictions qu'établIt le modèle pour "un monde où les producteurs maxImIsent leurs profIts, les consommateurs, leur utilité et où les mécanismes de marché établissent l'éqUilIbre" (Oussault,

1983: 36):

"Ce tour de force est accompl1 en définissant la discrimI-nation comme suit: un agent économique diSCrimine quand il est prêt à payer (en termes de revenus perdus) pour éviter d'avoir des contacts avec le facteur discrimmé ou dOIt être compensé si on lui impose de te ls contacts. Aux mot Ivat IOns habituelles des agents économiques, Il suffIt de rajouter un "goût pour la discrimmat Ion" pour expl iquer la sltuat IOn des femmes ou des autres groupes mmOrltalres dlscrtmmés sur le marché du travail sans avoir à modIfier la VISIon du fonctionnement de ce marché. De plus, comme les goûts ne

(27)

(

(

.,

sont pas à discuter à l'intérieur de la SClence économique, on dOlt se llmlter

à

en analyser les conséquences économiques"

(- 36-37).

On ne s'étonne pas dès lors Que les résultats que produit ce modèle représentent une description à tout le moins boiteuse de la position des femmes en emploi. D'ai lieurs, les autres contrlbut ions néo-classiques qui portent sur la discrimination se révèlent tout aussi impuissantes à intégrer l'ensemble des aspects qUI traduisent l'inégalité des femmes sur le marché du travan 4. Ou bien l'on ramène cette question à un prOblème d'information imparfaite, explication sur laquelle se basent les modèles de

discrimination statistiqueS,

ou encore on reprend l'Idée d'une productivité féminine inférieure (et des salaires plus bas) qui sera1t due

à

l'excès de l'offre sur la demande de travail dans les occupations où les femmes sont concentrées. Cette dernière formalisation relève de la versIOn moderne de l'hypothèse d'

overcrowdmg

d'un marché datant du début du slècle6. Fmalement, d'aucuns empruntent

à

la perspective post-keynésienne l'idée des ImperfectIons de marché. Et la discrimmation. avec le

modele de monopsone

donc, devient la manifestation du pouvoIr des employeurs de catégoriser les femmes en un groupe distinct 7.

En somme, on envisage toujours la situation des femmes en emploi d'un point de vue partiel, en focal1sant sur les différences salariales ou la distri-bution occupationnel1e sans jamais considérer que l'ensemble des carac-ténstiques se rattachant

à

la main-d'œuvre féminine forme une totaHté bien intégrée. Ensuite, ou l'on nie la présence de la dIscriminatIOn, ou on la ramène à

(28)

pièce manquante du puzzle. Et le tout s'harmonise de nouveau à la mécanique générale où l'équilibre se rémstaure en prenant pour données mdiscutables plusieurs des facteurs qui préservent la d1Vision actuelle du travall entre les hommes et les femmes dans la société. QUl plus est, "le marché du travaIl" apparaît toujours comme un espace unique dont la structure n'est JamaIs véritablement questionnée. C'est préclsément sur ce pomt que les théorles de la segmentation marquent une rupture et s'avèrent mventlves.

1.2 Le Marché du Travall : Un Espace à Reconsidérer

Les théorIes de la segmentation sont nées aux Etats-UniS de l'insatIsfaction Qu'éprouvaient différents théoricIens devant le démentl formel de l'hypothèse d'un marché du travail décloisonné, démenti qu'offralt surtout l'observatlOn de la position en emploi de la communauté noire. Car le sort mférieur que connaIssaIt celle-ci semblaIt deV01r être interprété comme partIe mtégrante du fonctionnement même du marché du travail et non pas comme le pur résultat des caractéristiques spécifiques des membres de ce groupe.

Les théories de la segmentation se sont donc attachées à défmlr un cadre conceptuel servant

à

l'analyse de la structuration de l'espace du marché. AUSSI, malgré leur diversité, elles ont néanmoins pour dénominateur commun de rompre avec le postulat de base des analyses traditionnelles voulant que le processus d'allocation des emploIs dans l'économle s'opère de façon flulde et homogène. Au contraire, cette nouvelle approche défmit le marché du travaIl comme structuré

(29)

(

(

en sous-systèmes, détermmant des "espaces de mobilité" distincts, parmi lesquels sont répartis de façon discrimmatoire, les différents groupes démographiques (Silvestre, 1978). Quoiqu'on puisse classifier ces théories de

plusieurs mamères (Agl1etta, 1978; Cain, 1976; Harrison, Sum, 1977,

Loverldge, Mok, 1980; Silvestre, 1978), on s'entend généralement pour distmguer

deux prmclpaux courants: l'approche institutionnaliste et l'approche marxiste.

L'hypothèse de la segmentation du marché du travail est davantage connue selon la présentation qu'en ont faite Michel J. Piore et Peter B. Doeringer, participant du

courant institutionna/Iste.

Leurs travaux sont en drOIte ligne avec l'analyse du marché du travail "balkanisé", présentée par C. Kerr8.

"les règles instItutionnelles du marché du travail

L..1

établissent et rendent plus nettes et plus difficiles

à

traverser celles qui existent déjà. Elles définissent les points de concurrence, les groupes qu; ont le droit d'entrer en concurrence, et les conditions dans lesque11es ils peuvent y participer"

En concentrant ainsi l'attention sur les cloisonnements de toute nature Qui marquent les échanges sur le marché du travail, C. Kerr est le premier

à

conceptualiser un modèle de

marcl7é inteme

du

travail

(loveridge, Mok, 1978). Toutefois, l'expression de marché interne du travail ne sera véritablement

définie que par Dunlop en 19669: "an administrative unit, such as a

manufacturing plant, withm WhlCh the pricing and allocation of labor 1S governed by a set of administrative rules and procedures"

, "

(30)

C'est

à

partir de cette notIOn que M. J. Piore et P. B. Doermger (1971) élaborent la "théorie duale du marché du travail", diVisant J'économie en

un

marené primaire et lin marcne secondaIre.

Le marché primaire consiste en une série de marchés internes qUI se distmguent par le fait que la formatIOn et le recrutement des salariés de même que la détermmation des salaIres sont dIctés par l'entreprise ou la profession (Oaublgney, 1978).

A

J'abri des fluctuat IOns du marché, les emplOIS du secteur primaire garantissent

à

leurs occupants de bons

sala~res, des chances de promotlOn et une sécurité d'emplo1:

"These entreprises belong to the most stable and

admims-tratively well organized segment of the economy The

better-educated and skilled worker customarily fmd

employment m such markets. There are, however, a group of low-wage, and often margmal, entreprises and a set of casual, unstructured work opportumtles where workers wlth employment disadvantages tend to find work" (PlOre, Doeringer, 1971. 163).

Ainsi est infériorisée une large partie de la main-d'œuvre qui se retrouve confinée aux emplois du secteur secondaire. Ce dernier, à J'inverse du marché primaire, fait plutôt appel au concept de "marché externe". Se distinguant par une absence totale de protection, les emplois du marché secondaire sont régiS par les forces du marché et, par conséquent, soumis aux aléas conjoncturels. Par opposition aux précédents, ces emplois sont mal rémunérés, peu intéressants et n'offrent pas de chance de promotion et de sécurité de travail (Plore, Doeringer, 1971). Le marché secondaire est ainsi marqué par un fort taux de roulement des

(31)

(

(

indivIdus qUI le composent, contrIbuant largement à l'accentuation du niveau de chômage, non seulement dans ce secteur, maIs dans l'ensemble de l'économie (PlOre, 1979).

L'hypothèse dualiste peut être élargie par une classification plus fine des emploIs et des travailleurs du marché primaire (Piore, 1972): sont réservés au

primaire supérieur les emplois de professionnels et de cadres administratifs,

alors qu'est associé au primaIre mférieur ce qui jusque-là était attribué au

secteur prImaIre. Les emplOIS du prlmaire supérieur ont un statut et une

rémunératIOn plus élevés Que ceux du primaire inférieur mais,

à

l'inverse de ces derniers, Il n'y a pas d'ensemble élaboré de règles de travail et de procédés

administratifs formels: un code internalisé de comportement semble les

remplacer Piore (1973) en déduit deux types de "caractéristiques" pour les membres de ces sous-secteurs: les "caractéristIques générales" que confère l'éducatIon formelle universitaire, nécessaires à la polyvalence des emplois du primaire supérieur, et "les caractérist iques spécifiques", associ~es à "J'appren-tissage sur le tas", suffIsantes pour l'exécution du travail dans le primaIre inférIeur. Les développements ultérieurs de la théorie (Piore, 1979) consistent en une typologie des schémas de comportement des travailleurs, Que détermine la nature des contrôles auxquels ces derniers sont soumIs. La marge d'initiative

permIse au prlmaJre supérieur définit un comportement instrumental par

oppo-SItion au comportement coutlJmier (customary) résultant de la spécIalisation des

tâches et des procédures routinières du primaire inférieur. Finalement, le

, secteur secondaIre, où le travaIl est à la fois spécialisé et instable, induit un j

comportement de slJbordination (command).

1

1 , , 1 1

~

j

(32)

23 La théorie dualiste du marché du travaIl est aussI relIée, de façon plus globale, à la structure mdustrlelle des économIes. AinSI, Appelbaum ( 1979), dans

une perspectIve post-keynésienne, assocIe le marché pnmalre au noyau centr.J/

des entreprises ol1gopolistlques alors que la pérlpIJerie, constItuée des petItes

nrmes privées de tout pouv01r, forme le marché secondaIre. Certains théoricIens

d'inspiration mifrxiste (Edwards, ReIch, Gordon, 1973), plus préCIsément de

l'école radIcale amérlcame, établlssent aussI un rapprochement entre 1;)

structure duale du marché du travail et la concentratIOn industrielle. Ces

auteurs adoptent d'a1lleurs la classificatlOn des structures d'emplOI de PlOre (secteur primaire-inférieur/supérieur et secteur secondaire).

Parallèlement, d'autres auteurs ont présenté des conceptions différentes de la segmentation du marché du travai l. H. Braverman 10 a développé l'OPPOSl t IOn

entre personnel d'exécut1on et d'encadrement B. Bluestone 11, quant

à

lUI, a identifié le marché du travail, non pas en termes de dualisme, filais de tripartisme, avec le "cœur", la "périphérie" et "l'économie souterraine" (Irregular

economy). L'intérêt de ces théOries ne réSIde pas tant dans les multIples

variantes qu'elles offrent comme dans l'éclaIrage qu'elles Jettent sur les phénomènes de discriminatIon:

"[...) dual is shortland for balkanized or segmented. 1 t is a powerful way of emphasizing an Important dialectical tension" (Harrison, Sum, 1979: 698).

(33)

L'exIstence d'une zone d'emploi de deuxième ordre, le marché secondaire du travaIl, complètement séparée des emploIs intéressants, bIen rémunérés et stables qUI composent le marché prImaIre, est claIrement mIse en évidence par la théorIe dual1ste. Cette dermère permet ainsi d'intégrer les recherches qUI confirment l'état chronique d'inférionté dans lequel se retrouvent certains groupes cIbles dont les femmes sur le marché du travail.

ToutefoIs, le modèle du marché dual achoppe sur un point parce qu' "il ne présente pas d'expl1catlOn théorique globale du fonctionnement du marché du travai

1"

(Dussault, 1983: 64). La tlJéorie dualiste reste donc fondamentalement

deSCriptIve La démarche de Plore et Doeringer, qui en sont les principaux art Isans, en témOIgne:

"Cette critique part d'une description des phénomènes Qui diffère de celle des classiques. elle s'efforce ensuite de conceptualiser cette nouvelle description afin d'expliquer" (Vmcens. 1978: 24).

En effet. les efforts de P;ore surtout, depuis le début de ses travaux, ont tendu

à

préciser progressivement le contenu des concepts du marché du travai 1 dual ToutefoIs, cette élaboration Kn'a pas permis d'atteindre

à

une élucidation théorique sat isfaisante. Elle a procédé par approximat ions successives déplaçant l'accent, au fil du temps, sur les déterminants du dualisme" (Azouvi, 1981: 4). Ont ainsi été successivement placés au premier plan les contraintes technologiques (Piore, Doeringer, 1971; Piore. 1972; Piore, 1973), l'action des syndicats (PlOre, 1978), les comportements des individus (Piore, 1979).

(34)

25

Selon la premIère Interprétation, l'existence d'un double marché du travaIl provIent du processus de développement industriel qui requIert une technologIe avancée, de vastes unités de productlOn et une précIse dlVlSlOn du travaIl En raison de l'Importance des capItaux qu'Il faut investir dans les éqUIpements fIxes indispensables à la technologie moderne, il Importe d'assurer aux unités de production une grande stabIlIté de fonctionnement. Ces unités tendent donc à

instltuter leurs propres marchés du travaIl. Là où l'évolutlOn de la demande est incertaine, des méthodes mOins intenslVes auront cours. AUSSI est-ce dans les plus petites unités de productIOn, SItuées à la pénphéne des fIrmes à forte intensité de capItal, qu'elles s'appliqueront. C'est en ce sens que l'on conSIdère que le marché primaIre stable et le marché secondaIre précaIre sont Int Imement lIés au progrès technologique:

"[...] role of institutional forces and of labour forces characteristic in determining market structure are played out within a set of technological forces wi'lich constraln and channel their impact and

LI

there is probably an elementary technological core to the economy whtch ts Impervlous to assault by alien institutions and workers and WIll mold the latter to ,ts own image before it gives way" (Piore, '973: 4).

Le phénomène de segmentatIon peut aussi être compris, selon cet auteur, en

relation avec l'actIon collectIVe et organIsée des syndicats:

"Taken together <ltaly, france, U 5.>, the three cases suggest that it is possible to understand dual labor market structures in national economies as a response ta natlOnal waves of sudden, spontaneous worker mIl itancy" (Piore,

(35)

(

PUIsque certaines catégories de travaIlleurs, les mieux organisés, parvIennent à instItutIonnalIser leur protectIon par le bIais de la légIslatIon, on assIste à une "rlgldlf1catl0n" progressIVe de la gestIon de la main-d'œuvre dans

les entreprIses les plus

fortes

ainsi Que dans les secteurs de pointe de

l'économie Cette perte de flexlbl11té, Ma decrease, keenly felt byemployers, in thelr freedom to deploy labor in the accustomed manner" (: 38), conduit les employeurs à déplacer les segments de la demande mstable vers les secteurs faIbles, du moms les plus souples "It IS from these efforts that the dual1ty in French labor market arises", conclut cet auteur (. 38).

A

partir des enseignements de la psychologie cognitIVe, Piore (1979) avance un troiSIème type d'argumentatIon:

"In essence, the argument is that the behavior of the crltical economic variables changes systematically as one moves across market segments and that this variat ion is a reflectlon of dlfferences 10 the behavioral patterns of workers and thelr employers" (Piore, 1979: xi ii).

TrOIS types de

comportement économique -

instrumental, coutumier, de

subordination ou d'ajustement - définissent en dernière analyse chacun des marchés, reflétant SImultanément la partltlon de l'orgamsation du travail en autant de sous-ensembles. Selon le degré de spécialisation et de stabilité Que néceSSItent les dIfférentes fonctions retrouvées dans chacun des sous-secteurs du marché (prImaIre-inférieur/supérieur, secondaIre), des types de contrôle dlstmcts s'établIssent, créant par conséquent dIfférents comportements chez les

(36)

travailleurs de ces marchés. Cette explication est étroitement reliée à la première. D'ailleurs, on remarque qu'à travers les développements théoriques de Pi ore, se superposent chaque fOIs différents types d'explicatIOn de sorte Que ses analyses se distinguent surtout par l'importance Que revêt, selon le cas, chacun des déterminants.

L'hypothèse dualiste est envisagée plus globalement lorsqu'elle est Intégree au corpus conceptuel marxiste, les premières et les plus connues des contributions de cet ordre étant celles de l'école radIcale améncame M Reich, D, Gordon et

R. C.

Edwards (1973) voient dans le phénomène de segmentatIon J'expression d'un processus lJistorique mettant en Jeu des forces polItIques et

économiques. Politiquement, la segmentation est fonctlOnnelle pour le maintIen

des institutions en ce qu'elle entretient des divisions au sem des travailleurs Elle a été rendue nécessaire au début du siècle pour contrer les risques de l'homogénéisation des salariés, elle-même Issue de la prolétarlsation massIve de la force de travail accompagnant la révolution mdustrielle. On estime Que cette politIque du "diviser pour régner" découle d'une strCltégle "consciente" des employeurs, c'est-à-dire que:

"Capltallst faced immediate problems and events and devised strategies to meet them. Successful strategIes survlVed and were copied" (ReIch, Gordon, Edwards, 1973' 361).

De plus, économIquement, le dualIsme a satisfaIt aux eXIgences de stab111té des secteurs concentrés de l'économie'

(37)

control of thelr product markets led to a dlchotomlzatlOn of the mdustrial structure whlch had the mdlrect and unmtended, though not undeslred, effect of remforcmg thelr consclous strategIes" (Reich, Gordon, Edwards, 1973: 361).

Le questionnement des théoriciens de la segmentation consiste donc essentiellement en la recherche d'une explicatIon structurée des causes du dualIsme Or, même cette question trouve dlfficllement une issue satisfaIsante: la réponse mstltutlOnnallste est à la fOlS versatIle et équivoque et celle des radIcaux passe sous SIlence les dIvisions qUI surviennent parmi les trava1l1eurs. Dans les deux cas donc, le champ reste ouvert à l'investIgation et, pour raffermIr un corps théorique qUI SOIt propre au phénomène de la segmentation, Il ya lIeu de poursulVre les recherches.

"The segmented labor markets theones are st ronger in their crlticisms of neoclassical theory than they are in advancing a coherent self -contained theory as a repiacement" (Cain,

1976: 1224).

L'mdéterminatlOn qui subsiste encore quant à J'ongine de la segmentation explIque sans doute pour une large part la remarquable imprécision qui entoure la question des mécanismes d'allocation des groupes CIbles déjà identifIés sur le marché secondaire du travai 1 Même SI J'origmal ité du concept de segmentation se fonde sur J'existence de processus par lesquels cette stratification se produIt (Silvestre, 1978), la dynamique qui fait en sorte que, systématiquement, ce sont les femmes, les Jeunes, les gens âgés et les ImmIgrants qUI se retrouvent

(38)

cloIsonnés dans les mauvais emplOIS est toujours dans J'ombre. Pourtant, cette question est de toute première Importance pour l'élaboration des pOlItIques

économiques vIsant

à

contrer la dlscrlmmation.

les quelques interprétations qui, jusqu'à présent, ont été avancées dans

cette direction sont plus tautologIques que vérItablement explicatIVes M J

PlOre (1971: 166) déclare.

"Disadvantaged workers, the theory asserts, are confined to the secondary market by resldence inadequate skills, pOOl'

work histories, and discrimination".

Ailleurs,

à

l'endroit des mmorités ethniques et raciales, il ajoute (PlOre, 1979: xxi):

"[".1 it is apparent that the presence of the se groups ln the secondary sector is the historlcal outgrowth of a process ln

which a parental generatlOn is deJlberately recrulted to perform economic functions which the primary labor force wi Il not accept, and produces a second generat Ion wIJo feel

trapped in tIJeir parent 's jobs"

Les arguments invoqués, soit un mIlIeu défavorIsé, de faIbles antécédents professionnels, une discrimination à l'embauche, à la promotIOn ou encore la "discrimination statistique" (Piore, 1971), représentent plus une descrIptIOn générale de ce que vivent les travaIlleurs du marché seconda 1re qu'une

(39)

(

(

explicatIOn s'attachant aux pratiques qUI conditIOnnent ce vécu. Ces différents éléments sont d'ailleurs interrellés et si, dans une certaine mesure, ils peuvent rendre compte du maintien de la situation, Ils sont insuffisants pour 1'identlflcation des mécanismes institutionnels qui contribuent

à

marginaliser les groupes cibles dans te partage des emplois.

Soul ignon5, de plus, que pour éclaircir cette question, M. J. Piore (1972: 12)

fait aussi référence aux comportements des individus:

"Ll

in order to get people who are wi11ing to accept the menial, 10w-wage jobs involved, one has to cal1 upon groups with a marginal attachment to the labor market and these groups tend to have high rates of movement into and out of the labor force".

Une fois encore, on semble prendre un effet pour une cause. Car c'est le peu d'attrait des emplois du secteur secondaire qui est générateur des faibles taux de rétention du personnel alors qu'on laisse entendre ici que les comportements d'instabilité sont le trait particulier de catégories bien définies de la main-d'œuvre. Comme le soul igne G. Dussault (1983: 48), pour ce QUI est du cas des femmes, il est faux de prétendre Que dans des conditions similaires à leurs collègues masculins, celles-ci font preuve d'une plus grande Irrégularité au niveau de leur implication en emploi:

"L'observation de la réalité

[",1

ne permet pas de confirmer que les hommes et les femmes de même groupe d'âge, de formation éqUivalente et employés dans des emplois similaires ont des taux de roulement différents" 12

(40)

De plus, on ne saurait oublier que malgré le manque d'intérêt que les groupes

cibles démontrent

à

l'égard des emploIs qUI leur sont réservés, lequel se

comprend aisément, II est depui~, longtemps étab II que ces lOdlvldus travaIllent

par nécessité économique. Par conséquent, les mouvements fréquents Que

ceux-ci enregistrent représentent plus souvent un chômage involontaIre mdult par la précanté des emplois Qu'une instabIlité proprement dIte. C'est donc une voie dangereuse que trace PlOrr lorsqu'Il se réfère aux "comportements d'instabilité" pour expllquer l'assIgnation de ces groupes au secteur secondaIre .. the instability appears to be a characterlstic of both Jobs and workers" (PlOre,

1971: 166), "the norms for these jobs tend to be mternallzed by lOdlvldüal workers; workers in these jobs have a greatly reduced commltment ta the work group" (Piore, 1979: 141) et ailleurs, "(employers) have preferred for thls labor marginal groups who do not impose long-term employment commltments who can be counted on to qUIt before too long, and if necessary can be fired" (- xXIIi)

Les auteurs radicaux, quant à eux, tout en invoquant des arguments

différents, soit la faIblesse du pouvoir économIque et politIque de ces catégories, en restent néanmoins au même pomt.

"L'étude des formes concrètes prises par la segmentation du marché reste largement descrIptive

L ..

1.

Le fait que la construction d'un secteur pérIphérique se développe

à

partIr de tel ou tel groupe social peut être décrit à partIr de certains états de faits" (Silvestre, 1978: 264).

(41)

-En outre, spécIfiquement vIs-à-VIS les femmes, ces modèles échouent à rendre compte du faIt Que la dISCriminatIon puisse également se retrouver à l'intérteur du marché prllnalre:

"It 1S likely that a higher proportion of women than men are in secondary jobs, and the dual labor market analysis i5 useful in understanding the causes and consequences of th15 distinction. However, this approach does not explain the further sex segregat ion which certain ly eXlsts in each sector. Nor does il do justice to the range of characterlstics of predominantly female jobs, that is, the differentiation which occurs witl1in the female sector. Furlher

[",1

it is not helpful in elucldating the differential treatment accorded to women and men witl1in the primary sector, that

15,

within reasonably highly developed internaI labor markets" Œlau, Jusenius, 1976: 197).

C'est qu'en fait, une fois de plus, les théories de la segmentation n'ont pas été élaborées en fonction de la réalité spécifique du travail féminin. Dès lors, l'unique prise en condidération du marché du travail masque la multiplicité des phénomènes se répercutant sur la position des femmes en emploi:

"[. .. ] dual labor market theory focuses only on those who work in the labor market per se [...) ln short, this approach is severely Iimited on the basis that the totality of forces affecting one's relations in the market is not clearly understood, creat ing inadequate frameworks by which to Interpret women's activity in the tabor force.

L..l

(it) may be crit lcized for fail ing to integrate women's ro le in the home with their labor market participation in general" (Soko loff, 1980: 64) 13.

(42)

Eu égard

à

ce dermer aspect, malgré le fait que les théorIes de la segmentation représentent les seules tentatives qUI ont amené les économIstes à reconsidérer J'organisation structurel1e du marché du travaIl, il faut de toute évidence éVIter de s'y enfermer. L'utilité de cet appareil conceptuel résIde plutôt dans le fait qu'il permet d'appréhender directement le processus dIscriminatOIre

d'allocation des emplois, ceci en raison des cloisonnements du marché sur

lesquels il met l'emphase. Aussi, puisqu'un phénomène comme celUI de la ségrégation ne saurait être envisagé en l'absence de tels paramètres, les théOries de la segmentatIon contiennent des éléments essentiels

à

J'analyse de la discrimination des femmes en emploi. Et justement sous cet angle, leur pouvo\r explicatif est loin d'être épUisé car plUSieurs questIons sont toujours pendantes:

.. AU-delà de ce constat (existence d'un mode part 1culler de mobilisatIon et de gestIon de la mam-d'œuvre) peut-on expllquer pourquoi telle catégorie de mam-d'œuvre ou tel groupe social se trouve en quelque sorte voué au marché primaire ou au marché secondaire? Les théorIes de la segmentation restent muettes sur ce plan" (Maurlsson, Merle,

(43)

,. Ce courant s'est constitué au début des années soixante

à

partir des travaux de T. W. Schultz ("Investment in human capital", American Economie Review, vol. 51,1961, pp. 1-17) et de G S. Becker (Hum an CapItal. A theoretical and empirical analysis, wlth special reference to educatIon, Columbia University Press, 1964) (Oussault, 1983: 19). Les auteurs qu'on assocIe le plus souvent

à

cette tendance sont· J. Mincer et S. Polachek (J. Mincer, 5. Polachek, "Famlly Investments m Human CapItal . Earnmgs of Women", Journal of Politlcal Economy, March-Apr. 1974, pp. 576-S 1 08; S. Polachek, "Dlscontlnuous Labor Force PartIcipation and Its Effects on Women's Market Earnings", C. B. Lloyd, ed, Sex, DiSCrimination, and the DiVIsion of Labor, ColumbIa University Press, New York, 1975, pp. 90-122; S. Polachek, "Differences ln Expected Post-School Investment as a Determinant of Market Wage DifferentIais", mimeo, UniversIty of North Carolina, n.d.> ainsi Que J. Gwartney et R. Stroup ("Measurement of Employment DiscrimmatlOn According to Sex" , Southern Economlc Journal, 39, Aprll 1973, pp. 575-587). La théorIe du capital humain

a ensmte conn~ des raffinements successIfs avec, entre autres, les

recherches de S. Sandell (Male-Female Salary DIfferences Among SClentlsts with Ph. D.'s, Ph. D. dissertatIon, Umversity of Minnesota, 1973), et de R. Gronau ,"The Wage. Rates of Women - A Selectlvlty Bias", mimeo, NBER, 1972; "Wage Compansons - A Selectivlty Bias", Journal of Politlcal Economy, vol 82, Nov -Dec. 1974, pp. 1119-1143).

2. C'est nous qUI soul1gnons.

3. Ce modèle est celui qu'a mis au pOint G. S. Becker dans un ouvrage couramment consulté: The Economies of DiscriminatIon, Chicago, Umversity of ChIcago Press, 1957.

4. Pour une évaluation de la portée explicative des théories néO-ClaSSiques face

à

la discrimmation des femmes en emplOi, voir: G. Dussault, 1983, chapitre 1.

5. Ces modèles ont été élaborés par K. Arrow ("The Theory of DiscriminatlOn",

O. Ashenfelter, A. Rees, DiscriminatIon in Labor Markets, Princeton Umversity Press, Princeton, N.J., 1973, pp. 3-33) et E. S. Phelps ("The Statistical Theory of Raclsm and Sexlsm", Amencan Economlc Review, vol. 62, no. 4, Sept. 1972, pp 659-661) (Oussault, 1983: 43).

(44)

6. L'hypothèse d"'overcrowding" a été reformulée par B Bergmann ("OccupatlOnal Segregation. Wages and Profits When Employers Dtscrlminate by Race and Sex", Eastern Economic Journal. vol. 1, Apr.-July 1974, pp 103-110) (Ibid

55).

7. Ce modèle de monopsone, basé sur celUl qu'a présenté J. Robmson (The Economies of Imperfect Competition, 1933, reprint ed., 5t-Martin's Press, New York, 1965) a été developpé par J.

F.

Madden ("DiscrIminatIOn -

A

Manifestation of Male Market Power?" ln

C.

Lloyd ed., op cit).

8. C. Kerr, "The Balkanization of Labor Markets", Labor Mobility and Economie Opportunity,

E.

W. Bakke et aHi, MIT-John Wiley and Sons, New York. 1954, p

109.

9. J. T. Dunlop, '\Job Vacancy Measures and Economic Analysis", The Measurement and Interpretation of Job Vacancies. NBER, New York, 1966.

10. H. Braverman, Travail et capitalisme monopoliste, Maspéro, Paris, 1975.

11. B. Bluestone, "The Tripartite Economy : Labor Markets and the worklng Poor" , Poverty and Human Resources Abstracts. 1970.

12. D'après: U.S. Department of Labor, Wage and Labor Standards Admlnlstrat IOn, Women's Bureau, Facts about Women's Absenteeism and Labor Turnover, Washington, D.C., 1969; W. Kip Viscusi, "Sex Differences in worker QUlttlng", Review of Economics and Statistlc.â, vol. 62, 1980.

13. Aucune des sciences sociales ne réussit d'all1eurs à combler cette lacune. C'est définitivement vers les recherches féministes qu'il faut se tourner pour retrouver des préoccupatIons qui embrassent la totalIté des composantes de la discrImination des femmes au travail. VOir, entre autres, à ce sUJet. Sociologie et sociétés, Les Femmes dans la sociologie (numéro réalIsé par Nicole Laurin-Frenette), vol. XIII, no 2, oct. 1981, 157p, "TravaIl et mouvement des femmes: une hIstoire visible" (bilan hlstorJographique), (Lavigne, Pinard, 1983: 7-60); A. Michel éd., Les femmes dans la société marchande, Presses Universitaires de France, Paris, 1978, 256p., (Sokoloff,

(45)

TEXT COMPLETE.

NATIONAL LIBRARY OF CANADA.

CANADIAN THESES SERVICE.

LE TEXTE EST COMPLET.

BIBLIOTHEQUE NATIONALE DU CANADA.

(46)

LE PHENOMENE DE PENURIE D'EMPLOI'

UN AUTRE REGARD SUR LE FONCTIONNEMENT DU MARCHE DU TRAVAIL

La problématique que nous allons développer dans ce chapitre s'élabore sur les questions de la pénurie d'emploi et de la discrimination systémique LOin de

représenter deux objets d'étude isolés, l'histoire nous enseigne au contraire que ces phénomènes ont entretenu des liens étroits que notre analyse se propose d'expliquer.

L'expérience historique démontre ainsi qu'il existe un rapport entre l'état du marché du travail et la position des femmes en emploi, c'est-à-dire que le niveau de l'emploi exerce une influence sur la manière dont celles-ci participent aux

activités rémunérées. Or, dans une économie qui, le plus souvent depuis la

révolution industrielle, a été marquée par l'insuffisance de la quantité d'emploIs en regard du nombre d'individus susceptibles de les occuper, ce trait caractéristique de la sItuation du marché du travail a agI défavorablement sur le profil d'insertion des femmes en emploI. En d'autres termes, le phénomène de la pénurie d'emploi est à compter parmi les éléments qUI ont Joué un rôle actif dans la mise en œuvre des pratiques discriminatOires. D'où l'hypothese qu'il s'agira

Figure

TABLE  DES MATIERES  (suIte)
GraphIque  4  1 Pourcentege  de  le  meIn-d'œuvre  fémInIne  dens

Références

Documents relatifs

We suggest that underlying the wide range of find- ings regarding future climate impacts is a fundamental difference in implicit assumptions regarding the cau- sal role of

Effet pro-algique du NGF et des facteurs de la famille GDNF Lors du développement embryonnaire, la survie des neurones nociceptifs dépend du NGF (nerve growth factor) via

Tous les effets disparaissent alors, pour les mêmes raisons expliquées pour les colonnes (1) et (2). Une significativité demeure pour le résultat des invalidités visuelle

En décembre 1964, l'Institut national de la Statistique et des Etudes économiques publiait dans sa revue Études et Conjoncture un article sur l'emploi féminin qui rassemblait

Garantir l’égalité de participation à la vie politique est une fin en soi pour créer une société plus juste, ainsi qu’un levier important pour lutter contre la stigmatisation

– En milieu urbain au Mali, le travail domestique occupe en moyenne 16% du temps des femmes contre seulement 2% pour les hommes.. – En milieu rural, ce taux est de 17% du temps

On peut supposer que le nombre d’emplois à temps partiel des jeunes hommes est trop faible pour peser sur leur taux d’emploi à temps partiel et la part de leur emploi à temps

Abolir les lois discriminatoires, adopter des lois compréhensives sur l’égalité des genres y compris la criminalisation de toutes les formes de la Violence à l’égard des Femmes