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Rôle des métaux et des membranes sur la structure et la réactivité des peptides bêta-amyloïdes liés à la maladie d'Alzheimer

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Academic year: 2021

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Présentée devant

L’UNIVERSITE PAUL SABATIER TOULOUSE III (Sciences) Ecole doctorale

SCIENCES de la MATIERE En vue de l’obtention du grade de :

DOCTEUR DE L’UNIVERSITE PAUL SABATIER Spécialité :

CHIMIE des BIOMOLECULES et APPLICATIONS

Par

Vanessa SONOIS MAZARS

Rôle des métaux et des membranes sur la structure et la

réactivité des peptides

ββββ

-amyloïdes liés à la maladie d’Alzheimer

Soutenue publiquement le 17 Décembre 2007 devant la commission d’examen :

M. W. BACSA Professeur à l’Université Toulouse III Directeur de thèse M. J. COVES Directeur de Recherche au CNRS, IBS, Grenoble Rapporteur M. D. DUNSTAN Professeur à l’Université Queen Mary, Londres Rapporteur M. P. FALLER Professeur à l’Université Toulouse III Examinateur

M. T. MATTIOLI Chercheur au CEA, Saclay Examinateur

M. A. VIGROUX Professeur à l’Université Toulouse III Président du jury

Centre d'Elaboration des Matériaux et d'Etudes Structurales 29 rue Jeanne Marvig, BP 94347, 31055 Toulouse cedex 4

(2)
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Messieurs François Amalric (IPBS), Jean-Jacques Bonnet puis Denis Neibecker (LCC), Adnen Mlayah (LPST) et Jean-Pierre Launay (CEMES) pour m’avoir accueillie dans leurs laboratoires respectifs pendant ces trois ans de thèse.

Messieurs David Dunstan, Jacques Covès, Tony Mattioli et Alain Vigroux pour avoir accepté de juger ce travail. Leur présence à ce jury est un honneur et je leur en suis reconnaissante. Ces travaux ont été effectués sous la direction de Messieurs Wolfgang Bacsa, Peter Faller, Alain Milon et Justin Teissié. Je les remercie tous les quatre pour leur investissement dans ce projet, les discussions scientifiques, leur gentillesse et leur disponibilité. Je tiens spécialement à remercier Peter, coordinateur du projet, pour ces trois années fort enrichissantes; travailler dans son équipe a été un réel plaisir. Je lui souhaite plein de réussite et de bonheur à venir. Pour l’aide qu’ils m’ont apportée et leur contribution (scientifique ou non ...) à l’aboutissement de ce projet : Muriel Golzio, Jean-Michel Escoffre, Claire Millot, Aude Saulière, Serge Mazères, Honoré Mazarguil, Olivier Saurel, Marie Renault, Isabelle Muller, Pascal Puech, Pierre-Marie Chassaing, Christina Villeneuve, Sébastien Moyano, Frédéric Neumayer, Antoine Zwick, Vincent Collière, Philippe Eyraud, Alain Estève, Nejma Fazouan, Georges Landa, Gabriele Meloni, Milan Vasak, Jean-Pascal Sutter, Julie Milon.

Les membres de l’équipe F (anciens et actuels), pour tous les bons moments qu’ils m’ont fait passer pendant ces trois ans : Emmanuelle pour toutes nos discussions entre mamans, Luc pour nos conversations « privées » qui resteront inoubliables, Christine (grâce à toi je sais que l’on peut revendre du fanta© !), et aussi Rodrigue, Audrey, Sarah, Ambar, Maëva, Alina, Mario, Louise, Katja, Christophe, Jade, Vincent. Travailler à leurs côtés dans le laboratoire fut une expérience très agréable.

Les permanents de l’équipe Bernadou pour les discussions scientifiques au cours des séminaires ; mais aussi les étudiants avec qui j’ai partagé beaucoup et surtout les délicieux repas de la cantine : Céline (rentre vite dans la ville rose), Sophie, Tamara, François, Fatima, François bis, Jérôme, Carmen, Guillaume. Ces pauses déjeuners nous ont offert tant de fous rires !

Pierrot, Delph, Cyril, Sandy, Chris, Caro, Alex, Estelle, Paul, Benoît, Béa, Filou (et p’tite Pauline), Julie, Cédric et Stéphanie : pour toute la vie en dehors du labo! Les repas délicieux, les apéros, les vacances à Montpellier, à Fréjus ou à Biscarrosse, les parties de belote, les coups de téléphone au Québec....

Je n’oublie pas non plus les « parisiens » : Stéphanie et Guilhem, petit Peysou, Fred, Nath ; la vie à Paris était plus agréable à vos côtés!

Enfin je remercie du fond du cœur Sébastien, ma petite Mathilde, mes parents, ma famille ainsi que la famille de Sébastien. Qu’ils trouvent ici l’expression de ma profonde gratitude pour leur soutien de tous les instants et l’affection dont ils m’ont toujours entourée.

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Table des matières

Liste des abréviations

5

Chapitre I. La maladie d’Alzheimer : mécanismes biologiques et

biochimiques

9

I. La maladie d'Alzheimer: un problème de santé publique 11

I.1 Prévalence 11

I.2 Diagnostic, facteurs de risque 11

I.2.1 Diagnostic 11

I.2.2 Facteurs de risque 12

I.3 Dérèglements du système neuronal engendrés par la maladie d’Alzheimer 13 I.3.1 Systèmes cellulaires perturbés par la maladie d’Alzheimer 13

I.3.1.1 Les cellules du tissu nerveux 13

I.3.1.2 La transmission neuronale ou influx nerveux 13 I.3.2 Dysfonctionnement des systèmes de neurotransmetteurs 15

I.3.2.1 L’acétylcholine 15

I.3.2.2 Le glutamate: phénomène d’excitotoxicité 16 I.3.2.3 Le zinc "libre" comme neuromodulateur 17 I.3.3 Toxicité générée par le dérèglement de l’homéostasie du calcium 17

I.3.4 Inflammation 18

I.4 Lésions caractéristiques de la maladie 18

I.4.1 Dégénérescence neurofibrillaire 20

I.4.2 Plaques séniles 21

I.4.3 Relation entre tau et Aβ 22

I.5 Hypothèse de la cascade amyloïde 23

II. Les plaques amyloïdes 25

II.1 Origine de Aβ: la protéine APP 25

II.1.1 La protéine APP 25

II.1.2 Le peptide β-amyloïde (Aβ) 28

II.2 Agrégation 29

II.3 Toxicité due à l’agrégation 31

III. Interaction Aββββ - ions métalliques. Production de ROS 33

III.1 Les ions métalliques dans le cerveau 33

III.2 Toxicité des complexes Aβ - ions métalliques 34

III.2.1 Régulation normale du stress oxydant 34

III.2.2 Mécanisme de production de ROS par les métaux 34

III.2.3 Interaction Aβ - ions métalliques 35

III.2.3.1 Caractérisation structurale 35

III.2.3.2 Production de ROS 38

III.2.4 Dommages générés par l’interaction Aβ - métaux 40

IV. Interaction Aβ - membranes 41

IV.1 Interaction Aβ - phospholipides 42

(6)

IV.3 Interaction Aβ - gangliosides 45 IV.4 Influence des métaux dans l’interaction Aβ - membranes 46

V. Différentes approches thérapeutiques 47

V.1 Traitements ciblant les systèmes de neurotransmetteurs 47

V.1.1 Les inhibiteurs de choline estérases 47

V.1.2 Antagonistes des récepteurs du glutamate de la famille NMDA 48

V.2 Axes de recherche ciblant l’APP et Aβ 48

V.2.1 Traitements ciblant l’APP 49

V.2.2 Aβ et ses différentes conformations 49

V.2.3 Immunisation et immunomodulation de Aβ 51

V.2.4 Modulation de la dégradation de Aβ 52

V.3 Axes de recherche ciblant l’interaction Aβ - ions métalliques 52

V.3.1 Les chélateurs d’ions métalliques 52

V.3.2 Les métalloprotéines 52

V.3.2.1 L’humanin 53

V.3.2.2 La métallothionéine-3 53

V.4 Axes de recherche ciblant les dommages générés par Aβ 54

V.4.1 Les antioxydants naturels 54

V.4.2 Les anti-inflammatoires 55

VI. Conclusion 55

VII. Bibliographie 57

Chapitre II. Toxicité du peptide

ββββ

-amyloïde in vivo

75

I. Introduction 77

II. Article soumis 79

II.1 Résumé de l’article 79

II.2 Article 81

III. Etude in vivo. Partie expérimentale 101

III.1 Etude au stéréo microscope 101

III.1.1 Principes des tests de coloration 101

III.1.2 Protocole de mesure de la viabilité cellulaire 102 III.2 Mesure de la viabilité cellulaire par le test MTT 102

IV. Résultats 103

V. Conclusions et perspectives 105

VI. Bibliographie 106

Chapitre III. L’humanin, chélateur du zinc

109

I. Introduction 111

(7)

I.2 Importance du ZnII dans la maladie d’Alzheimer 112

I.3 Intérêt biologique du complexe ZnII/humanin 112

II. Résumé de l’article paru dans le Journal of Inorganic Biochemistry 113

III. Article 114

IV. Commentaires 122

V. Bibliographie 123

Chapitre IV. Spectroscopie Raman appliquée aux molécules

biologiques

125

I. Rappel sur la spectroscopie Raman 127

I.1 Historique 127

I.2 Principe de la spectroscopie Raman 127

I.3 Application de la spectroscopie Raman à l’étude des protéines 129

II. Micro cristallisation sur substrat de SiO2/ Si 131

II.1 Résumé de l’article paru dans Chemical Physics Letters 131

II.2 Article 132

II.3 Commentaires 137

III. Application de la méthode à l’histidine, glycine et valine. 137

III.1 Résumé de l’article soumis 137

III.2 Article 138

III.3 Commentaires 156

IV. Etude de trois protéines à hème 157

IV.1 Partie expérimentale 157

IV.2 Résultats 158

IV.3 Conclusion 160

V. Bibliographie 161

Chapitre V. Interaction du peptide

ββββ

-amyloïde avec les membranes 163

I. Introduction 165

II. Partie expérimentale 166

III. Résultats 166

III.1 Préparation de fibres de Aβ40 marqué (13C, 15N) 166

III.1.1 Dosage par la thioflavine T en fluorescence 167

III.1.2 Microscopie électronique à transmission (TEM) 168

III.2 Expériences de RMN MAS 168

III.2.1 Etude sur le lyophilisat brut 168

(8)

III.2.3 Etude des fibres de Aβ40 en présence des vésicules de

DMPC/cholestérol 171

IV. Bibliographie 173

(9)

Liste des abréviations

Aβ: Peptide β-amyloïde

ACE: Enzyme convertissante d’angiotensine ACh: Acétylcholine

AChE: Acétylcholine estérase

AChE-I: Inhibiteur d’acétylcholine estérase ADDL: Aβ-Derived Diffusible Ligands ADN: Acide désoxyribonucléique AICD: Domaine intracellulaire de l’APP APP: Amyloid Precursor Protein ApoE: Apolipoprotéine E

3-APS: Acide 3-amino-1-propanosulphonique ARN: Acide ribonucléique

ATPase: Adénosine triphosphatase BCA: Acide bicinchoninique BuChE: Butylcholine estérase

5-CFDA AM: 5-carboxyfluorescéine diacétate acetoxy méthyl ester ChAT: Choline acétyltransférase

DAPH: 4,5-Dianilinophthalimide DC: Dichroïsme circulaire

DFT: Density Functional Theory

DMEM: Dulbecco’s modified eagle’s medium DMPC: Dimyristoylphosphatidylcholine EDTA: Acide éthylène diamine tétraacétique ER: Réticulum endoplasmique

FTDP-17: Démence fronto-temporale avec syndrome parkinsonien liée au chromosome 17 GAG: Glycosaminoglycan

GPI: Glycosylphosphatidylinositol GSH: Glutathion

GSK-3β: Glycogen Synthase Kinase 3β GTPase: Guanosine-5'-triphosphatase HN: Humanin

(10)

H2O2: Peroxyde d’hydrogène

HPLC: Chromatographie Liquide Haute Performance IDE: Insulin Degrading Enzyme

IP: Iodure de Propidium IR: Infrarouge

IRM: Imagerie par Résonance Magnétique

LC/MS: Chromatographie liquide couplée à la spectrométrie de masse LMCT: Ligand to Metal Charge Transfer

LPAC: Lipid-Protein Attenuating Compounds MAPK: Mitogen-Activated Protein Kinase MAS: Magic Angle Spinning

MMSE: Mini Mental State Examination

MPAC: Metal-Protein Attenuating Compounds MT: Métallothionéine

MTT: Bromure de 3-(4,5-diméthylthiazol-2-yl)-2,5-diphényl tétrazolium NMDA: N-Méthyl-D-Aspartate

nNOS: Synthase d’oxyde nitrique neuronale PHF: Paires de filaments hélicoïdaux

PC: Phosphatidylcholine PG: Phosphatidylglycérol PI: Phosphatidylinositol PiB: Pittsburgh composé B

PPAC: Protein-Protein Attenuating Compounds PS: Phosphatidylsérine

PS1/2: Préséniline 1/2

RMN: Résonance Magnétique Nucléaire ROS: Espèces réactives de l’oxygène

RPE: Résonance Paramagnétique Electronique SDS: Sodium dodécylsulfate

SDS-PAGE: Electrophorèse en gel de polyacrylamide de dodécylsulfate de sodium SM: Sphyngomiéline

SOD: Superoxyde dismutase SVF: Sérum de veau fœtal

(11)

TEP: Tomographie à Emission de Positrons TGF: Transforming Growth Factor

UV: Ultra-violet Zi: Zincon

(12)
(13)

Chapitre I

La maladie d’Alzheimer :

(14)
(15)

I.

La maladie d'Alzheimer: un problème de santé publique

I.1

Prévalence

Découverte en 1906 par le docteur Aloïs Alzheimer (1864-1915), la maladie d’Alzheimer touche en 2007 environ 860 000 personnes en France. La prévalence augmente très fortement avec l’âge: environ 1,5% à l’âge de 65 ans, elle double tous les quatre ans pour atteindre 25% à l’âge de 80 ans. C’est la forme la plus commune de démence sénile (70% des démences). Au niveau mondial, elle affecte entre 12 et 15 millions d’individus dans le monde (Alzheimer International, www.alz.co.uk). Dans les pays occidentaux, elle constitue la quatrième cause de décès, précédée par les maladies cardiaques, le cancer et les accidents vasculaires cérébraux. Ce nombre ne cesse de s’accroître à cause du vieillissement de la population, aussi bien dans les pays développés que dans les pays en voie de développement.

Cette maladie, qui touche essentiellement les personnes âgées, est une démence dégénérative du cerveau par opposition aux autres causes de démences (vasculaires, toxiques ou carentielles). Elle associe des troubles importants de la mémoire (particulièrement des évènements récents), des troubles cognitifs et/ou du comportement ayant un retentissement sur la vie quotidienne des patients.

La maladie d’Alzheimer est un réel problème de santé publique auquel la société doit répondre par diverses actions, tant sur le point des traitements médicaux des patients que d’un point de vue social; avec notamment le soutien aux familles des patients, la mise en place de structures d’accueil spécialisées et une prise en charge des frais médicaux et paramédicaux engendrés par la maladie.

I.2

Diagnostic, facteurs de risque

I.2.1 Diagnostic

Il se passe en moyenne deux ans entre les premiers symptômes (identifiés par les proches) et le diagnostic clinique; la moyenne de l’espérance de vie à partir du diagnostic est d’en moyenne 8 à 9 ans (www.alzheimer-adna.com).

Il est encore aujourd’hui difficile de diagnostiquer tôt et avec certitude la maladie, le diagnostic définitif ne pouvant se faire que post mortem; mais une combinaison d’observation de signes cliniques, de tests neuropsychologiques (basés sur des grilles standardisées permettant une analyse de la mémoire par une approche qualitative et quantitative) et de

(16)

techniques d’imagerie cérébrale (IRM, tomographie à émission de positrons (TEP)) permet une évaluation du stade de développement de la maladie chez le patient.

Après les premiers signes cliniques « classiques » consistant en des troubles épisodiques de la mémoire, s’ajoutent ensuite des troubles du langage, de la motricité et de la reconnaissance (des objets, des lieux et des sons), des facteurs de désorientation. La maladie conduit à une perte de cohérence dans le discours et une inintelligibilité de l’expression écrite, ainsi qu’à des détériorations dans d’autres domaines cognitifs interférant avec l’humeur, la raison ou le jugement jusqu’à une démence forte où le patient devient totalement dépendant. Le trouble de la mémoire est le signe le plus précoce, ce qui explique les difficultés du diagnostic précoce. Devant un tel signe isolé, seules des consultations spécialisées ayant recours aux tests neuropsychologiques vont permettre le diagnostic, en s’attachant à rechercher des signes non apparents. L'imagerie (scanner cérébral et résonance magnétique) permet l’observation comparative de cerveaux de patients sains et malades (diagnostic différentiel). La mise au point et le développement de marqueurs permettant la visualisation directe des plaques amyloïdes est un des principaux axes de recherche actuel dans le cadre de la lutte contre la maladie.

I.2.2 Facteurs de risque

Actuellement, les causes exactes de l’apparition des lésions caractérisant la maladie demeurent encore inconnues. Certaines études sont donc orientées vers la recherche de facteurs qui semblent avoir une influence quelconque sur la progression de la maladie. Ce sont les «facteurs de risque». Bien que 90 à 95% des cas de la maladie restants soient sporadiques, sans antécédents familiaux et à étiologie inconnue (Rocchi et al., 2003), la maladie semble être en relation avec plusieurs facteurs :

- le facteur héréditaire (5% des cas dus à des mutations géniques).

- les facteurs biologiques et environnementaux tels que l’âge; le sexe (les femmes sont plus touchées par la maladie (Andersen et al., 1999); des carences alimentaires (les vitamines C et E qui sont des antioxydants limiteraient la production d’espèces réactives de l’oxygène toxiques pour l’organisme (Zandi et al., 2004).

- le cholestérol: constituant essentiel des membranes cellulaires, il joue un rôle fondamental dans le développement, le maintien de la plasticité et le fonctionnement des neurones (Shobab et al., 2005).

(17)

- les variations du gène ApoE codant pour la production de l’alipoprotéine E impliquée dans le transport du cholestérol, altéré dans la maladie d’Alzheimer (Corder et al., 1993).

I.3

Dérèglements du système neuronal engendrés par la

maladie d’Alzheimer

I.3.1 Systèmes cellulaires perturbés par la maladie d’Alzheimer

I.3.1.1 Les cellules du tissu nerveux

Le neurone est un type de cellule différenciée composant avec les cellules gliales le tissu nerveux. Il est composé d’un corps cellulaire et de prolongements de deux types: les dendrites et l’axone au bout duquel se situent les synapses. Les neurones assurent la transmission d'un signal que l'on nomme influx nerveux. Il est important de noter que la plupart des neurones sont incapables de division cellulaire. Cette incapacité fait qu’un traumatisme endommage le système nerveux de façon irréversible.

Les cellules gliales sont environ 5 fois plus nombreuses que les neurones dans le cerveau. On trouve dans le système nerveux central plusieurs types de cellules gliales dont les astrocytes et les cellules microgliales. Les astrocytes assurent un support mécanique aux neurones et les approvisionnent en nutriments. Ils ont de plus un rôle de digestion et d’élimination des « déchets ». Les cellules microgliales constituent quant à elles la première ligne de défense contre les envahisseurs étrangers, avec un rôle comparable à celui des macrophages. De récents travaux montrent que certaines cellules gliales jouent également un rôle actif dans la transmission de l'influx nerveux en facilitant l’établissement de nouvelles connexions.

I.3.1.2 La transmission neuronale ou influx nerveux

Au repos, il existe une différence de potentiel négative (environ -70mV) entre la face interne de la membrane du neurone et sa face externe: c’est le potentiel de repos. Cette différence de potentiel vient d'une différence de concentration en ions potassium, sodium, chlorure (K+, Na+, Cl-) entre l'intérieur et l'extérieur du neurone. Le milieu intra cellulaire est riche en ions K+, alors que le milieu extracellulaire est riche en Na+.

(18)

L'influx nerveux se caractérise par une modification instantanée et localisée de la perméabilité de la membrane du neurone: des ions Na+ pénètrent dans la cellule en passant au travers de canaux ioniques sélectivement perméables au sodium. Le potentiel de membrane prend alors une valeur positive (environ +35mV). Ce phénomène porte le nom de dépolarisation. Puis, très rapidement des ions K+ sortent de la cellule en passant au travers d'autres canaux ioniques, perméables au potassium. Le potentiel de membrane reprend alors une valeur négative: on parle d'hyperpolarisation. L'ensemble constitué par la dépolarisation suivie de l'hyperpolarisation s'appelle le potentiel d'action.

Il ne dure que quelques millisecondes, entraînant l'ouverture de nouveaux canaux appelés canaux Ca2+ voltage-dépendants et l'entrée d'un flux d'ions calcium Ca2+ dans le compartiment présynaptique. La présence de calcium sous forme ionique est indispensable pour la suite des événements. C'est en effet l'intrusion des ions Ca2+ qui va permettre la fusion des vésicules de transport contenant le neurotransmetteur, avec la membrane présynaptique. Des centaines de vésicules vident ainsi leur contenu dans l'espace synaptique par exocytose: le signal électrique est alors converti en signal chimique. Les neurotransmetteurs viennent se fixer sur les récepteurs spécifiques présents en grand nombre sur la membrane postsynaptique, initiant un signal qui sera à son tour transmis dans cette cellule (Figure 1.1).

(19)

De plus, la mémoire et l’apprentissage sont associés à la transmission neuronale par un processus appelé potentialisation à long terme. Ce phénomène consiste en un renforcement de l’activité et de l’efficacité des synapses sur des longues durées, via des changements morphologiques durables des neurones.

I.3.2 Dysfonctionnement des systèmes de neurotransmetteurs

Dans l’hippocampe et le cortex (régions les plus affectées dans la maladie d’Alzheimer), deux systèmes de neurotransmetteurs sont particulièrement perturbés lors de la maladie d’Alzheimer: l’acétylcholine et le glutamate.

I.3.2.1 L’acétylcholine

L’acétylcholine (ACh) est un neurotransmetteur libéré dans l’espace intersynaptique. Son taux est régulé par deux enzymes: elle est synthétisée à partir de la choline par la ChAT (choline acétyltransférase) et hydrolysée par l’AChE (acétylcholine estérase) localisée dans la membrane post-synaptique (Figure 1.2).

N O O N OH O O H+ ACh Ch AChE ChAT

Figure 1.2. Libération de la choline à partir de l’acétylcholine.

Dans les parties endommagées du cerveau des patients atteints de la maladie d’Alzheimer, on observe une perte importante de neurones cholinergiques avec de faibles niveaux d’acétylcholine dans l’espace intersynaptique. En effet, lors de la progression de la maladie d’Alzheimer, l’activité de l’acétylcholine estérase diminue. Cela devrait entraîner une augmentation du taux d’acétylcholine, mais il existe une autre enzyme de la même famille, la butylcholine estérase (BuChE), qui reconnaît également l’acétylcholine comme substrat (Scarpini et al., 2003) et dont l’activité croît au cours de la maladie, probablement du à la prolifération des cellules gliales (des changements de ratios AChE/BuChE ont aussi été reportés) (Arendt et al., 1992). Ce déficit se traduit par une diminution des fonctions cognitives suite à une diminution de l’activation des récepteurs cholinergiques muscariniques (type M) et nicotiniques (type N) (Figure 1.3).

(20)

Figure 1.3. Représentation schématique du système cholinergique (d’après Scarpini et al., 2003).

I.3.2.2 Le glutamate: phénomène d’excitotoxicité

Le glutamate est un neurotransmetteur excitateur majeur du système nerveux central. Les neurones à glutamate sont impliqués dans les processus cognitifs du cortex tels que l’apprentissage et la mémoire, incluant le processus de potentialisation à long terme.

Lors de la maladie d’Alzheimer, des dysfonctionnements du métabolisme énergétique et des systèmes de transport du glutamate, ainsi que le stress oxydant, conduisent à l’accumulation de ce neurotransmetteur dans les synapses. Or le glutamate endogène induit un effet neurotoxique (appelé excitotoxicité) via l’activation excessive des récepteurs qui lui sont associés, en particulier les récepteurs du NMDA (N-Méthyl-D-Aspartate).

Le récepteur du NMDA est couplé à un canal ionique perméable au Ca2+ (et au Na+). Au potentiel de repos de celle-ci, ce canal calcique est bloqué par des ions magnésium Mg2+. Une dépolarisation de la membrane permet d’expulser le Mg2+. Dans ces conditions, et si du glutamate est fixé sur le récepteur, le canal ionique s’ouvre, permettant un influx de Ca2+ dans la cellule (Figure 1.4). Or l’entrée massive des ions calcium dans la cellule neuronale est toxique pour celle-ci, comme cela sera évoqué par la suite (Lipton, 2006).

(21)

Figure 1.4. Représentation du récepteur du NMDA activé par le glutamate (d'après Lipton, 2006). "NR1" et " NR2": sous-unités 1 et 2 du récepteur du NMDA. "Glu or NMDA": site de liaison du glutamate ou du NMDA. "Gly": site de liaison de la glycine. "Zn2+": site de liaison du Zn2+.

I.3.2.3 Le zinc "libre" comme neuromodulateur

Parmi les espèces libérées au niveau des synapses de l'hippocampe, on trouve également des ions métalliques, et en particulier le ZnII (Atwood et al., 1999).

Le ZnII "libre", c'est-à-dire rapidement échangeable, est contenu dans les vésicules synaptiques de certains neurones situés principalement au niveau de l'hippocampe.

Il est libéré de manière Ca2+-dépendante dans la fente synaptique lors de la transmission du signal nerveux, à des concentrations pouvant atteindre 300µM. Le ZnII peut alors pénétrer dans le neurone post-synaptique par l'intermédiaire de canaux perméables au zinc (Frederickson, 2003). Il a un rôle de neuromodulateur, permettant le transport d'information d'une cellule à une autre.

I.3.3 Toxicité générée par le dérèglement de l’homéostasie du calcium L’ion calcium est le messager intracellulaire le plus important du cerveau. Il joue un rôle fondamental dans les processus d’apprentissage et de mémoire et est impliqué dans la survie et la mort neuronale. L’incapacité des neurones à réguler l’homéostasie du calcium est un aspect de la maladie d’Alzheimer impliqué dans le dysfonctionnement des neurones et de leur mort.

Ce dérèglement de l’homéostasie du calcium est une conséquence de la maladie d’Alzheimer.

(22)

Des taux élevés de calcium intracellulaire ont de nombreuses conséquences délétères. Une concentration élevée de Ca2+ génère du stress oxydant via la surconcentration de calcium dans les mitochondries, l’activation de l’oxyde nitrique synthase neuronale (nNOS) qui conduit à la production d’oxyde nitrique NO• et à la formation du peroxynitrite toxique ONOO- avec O2•-.

De plus, une dérégulation de l’homéostasie du calcium a un impact sur les fonctions neuronales dépendant du calcium telles que la libération de neurotransmetteurs et la plasticité synaptique. Le stress oxydant et le Ca2+ en excès conduisent également à l’activation de kinases dont GSK-3 ou encore les MAPs (Mitogen-activated proteins) kinases capables de phosphoryler la protéine tau et donc d’induire sa toxicité. Ainsi, les neurones affectés par les enchevêtrements de neurofibrilles présentent des taux de calcium élevés et des signes d’hyperactivation des protéases et des kinases Ca2+-dépendantes (Mattson, 2004). L’activation de ces kinases par le Ca2+ conduit également à l’activation de facteurs de transcription pouvant déclencher l’apoptose. Hormis les kinases, l’excès de Ca2+ intracellulaire cause l’activation des caspases et d’autres facteurs d’induction d’apoptose, conduisant également à la perte des neurones (Lipton, 2006; Suh et al., 2002).

I.3.4 Inflammation

La neurodégénérescence du tissu cérébral dans la maladie d’Alzheimer est accompagnée de phénomènes inflammatoires (Suh et al., 2002).

Les marques de cette inflammation sont significativement plus élevées dans le cerveau des malades d’Alzheimer que chez les personnes saines (Suh et al., 2002). La formation de plaques séniles et certaines modifications oxydantes entraînent l’activation microgliale et l’apparition d’astrocytes en réponse à ces éléments "étrangers" non reconnus. Les cellules microgliales et astrocytes sont alors à l’origine de la libération de médiateurs inflammatoires (cytokines, chémokines, facteur de croissance TGF…) et d’une production supplémentaire de peroxyde d’hydrogène et de peroxynitrite qui peuvent induire l’apoptose ou faciliter les réactions de stress oxydant.

I.4

Lésions caractéristiques de la maladie

La maladie d’Alzheimer est caractérisée par deux types de lésions cérébrales: les plaques séniles extracellulaires (plaques amyloïdes) et les enchevêtrements neurofibrillaires intra neuronaux, i.e. « tangle » (dégénérescence neurofibrillaire) (Figure 1.5).

(23)

Figure 1.5. Image de microscopie fluorescente sur des sections de cortex frontal (A) patient atteint de la maladie d’Alzheimer (B) patient âgé non atteint de démence (d’après Mathis et al., 2007).

La caractérisation de ces deux types de lésions ne peut se faire à l’heure actuelle que sur les cerveaux des patients décédés de la maladie.

L’imagerie cérébrale permet l’observation globale des lésions cérébrales in vivo: les plaques amyloïdes et neurofibrilles, la perte de neurones ainsi que d’autres altérations neuropathologiques incluant l’atrophie du cerveau, la perte de synapses, la réduction sélective de certains systèmes de neurotransmetteurs tels que l’acétylcholine, une diminution du métabolisme énergétique et un niveau élevé d’inflammation (Mattson, 2004).

La recherche de marqueurs permettant de visualiser, de façon précoce, spécifiquement les plaques amyloïdes par tomographie à émission de positron (TEP) ou IRM est donc une voie d’étude en pleine expansion, avec notamment la conception de molécules dérivées de la thioflavine T (dont le Pittsburgh composé B ou PiB), qui est un colorant fluorescent se fixant sur les structures en feuillets β (Figure 1.6) (Mintun et al., 2006; Leuma Yona et al., in press).

(24)

Figure 1.6. Comparaison de cerveaux de personnes saines (HC) et d’individus atteints de la maladie d’Alzheimer (AD) (d’après Masters et al., 2006). Images obtenues par tomographie à émission de positrons (TEP) avec marquage au 11C-PiB des plaques amyloïdes.

I.4.1 Dégénérescence neurofibrillaire

Les enchevêtrements de neurofibrilles sont constitués d’agrégats de protéines tau sous forme hyperphosphorylée (Grundke-Iqbal et al., 1986). Ce type de lésions impliquant la protéine tau n’est pas spécifique à la maladie d’Alzheimer, il est également retrouvé dans d’autres maladies neurodégénératives regroupées sous le terme "taupathies", incluant le syndrome de Down, la démence fronto-temporale avec Parkinsonisme liée au chromosome 17 (FTDP-17), la maladie de Pick ou encore la paralysie supranucléaire progressive (LaFerla et al., 2005).

La protéine tau est responsable de l’assemblage et de la stabilisation des microtubules, composants essentiels du cytosquelette des neurones. Dans son état natif, tau est une protéine comprenant entre 352 et 441 acides aminés (de masse 55 à 62 kDa) et existe sous six isoformes produites à partir d’un gène unique situé sur le chromosome 17.

Des mutations génétiques sur ce chromosome conduisent à la démence frontale temporale avec Parkinsonisme (FTDP-17), mais aucune mutation conduisant à la maladie d’Alzheimer n’a été répertoriée à ce jour (LaFerla et al., 2005).

Ces protéines ont la particularité de posséder dans leur séquence trois à quatre répétitions d’un même domaine qui permet la liaison aux microtubules. Cette liaison est par ailleurs fortement régulée par la phosphorylation de la protéine au niveau de résidus sérine et thréonine.

(25)

La protéine tau pathologique est hyperphosphorylée. Suite à cette hyperphosphorylation, tau se dissocie des microtubules (Bramblett et al., 1993), compromettant ainsi leur stabilisation et leur fonctionnement. Cela conduit à une altération des transports axonaux et dendritiques ainsi qu’à une dégénérescence des neurones. De plus, la protéine hyperphosphorylée libérée montre une solubilité nettement plus faible. Elle est aussi plus sensible aux modifications chimiques induites par le stress oxydant et subit des changements conformationnels suite à ces oxydations. Elle s’agrège alors, selon un processus de polymérisation avec une étape de nucléation (Barghorn et al., 2002), sous forme de paires hélicoïdales de filaments (PHFs: "paired helical filaments"). Ces dernières s’associent ensuite en structures plus grandes: les neurofibrilles. Par ailleurs, il est également suggéré que les ions AlIII et FeIII, retrouvés liés à tau dans des cerveaux de patients post mortem, soient impliqués dans la polymérisation des protéines tau hyperphosphorylées (Sayre et al., 2000; Shin et al., 2003; Smith et al., 1997).

Ces structures en filaments hélicoïdaux présentes dans le cytoplasme sont responsables de neurodégénérescence. Des modèles de protéines tau hyperphosphorylées sont toxiques sur cultures cellulaires (Fath et al., 2002). De plus, le nombre et la localisation des enchevêtrements de neurofibrilles dans le cerveau post mortem ont pu être corrélés avec le niveau de démence, alors qu’une telle relation n’existe pas dans le cas des plaques amyloïdes (Arriagada et al., 1992).

I.4.2 Plaques séniles

Les plaques séniles sont des lésions extracellulaires, sous la forme d’agrégats sphériques denses de protéines organisées en fibrilles. Le peptide β-amyloïde (Aβ) en est le composant principal. Ces lésions extra cellulaires sont présentes principalement dans les régions limbiques du cerveau telles que l’hippocampe et le complexe amygdalien, ainsi que dans des régions corticales et subcorticales spécifiques.

Le peptide Aβ contient de 39 à 43 acides aminés. Les formes les plus abondantes sont celles avec 40 et 42 acides aminés (Aβ40 et Aβ42).

Ces deux formes jouent un rôle important dans la maladie d’Alzheimer mais Aβ42 est considéré comme le plus neurotoxique par sa propriété hautement insoluble et oligomérisante (Jarrett et al., 1993). La description de ces plaques, leur voie de formation ainsi que leur constituant principal fait l’objet d’une étude détaillée dans le deuxième paragraphe de ce chapitre.

(26)

Il est important de noter que des agrégats de type amyloïde impliquant d’autres protéines se retrouvent également dans des maladies aussi différentes que le diabète de type 2, la maladie de Huntington ou les maladies liées aux prions.

I.4.3 Relation entre tau et Aβ

La relation entre les lésions de la maladie d’Alzheimer observées histologiquement (plaques amyloïdes et enchevêtrements de neurofibrilles) et les composants qui leur sont associés (Aβ et tau) a longtemps été controversée. De même, l'origine du processus neurodégénératif a été discutée: elle pourrait être due à la production anormale d'Aβ ou à la dégénération du cytosquelette neuronal causée par tau (Suh et al., 2002).

Parmi les kinases qui entrent en jeu dans la phosphorylation de tau, deux kinases sont importantes dans la pathologie d’Alzheimer: la 3β-kinase synthase glycogène (GSK-3) et la mitogène activée protéine kinase (MAPK). Ces deux kinases sont capables de phosphoryler tau et sont colocalisées avec les neurofibrilles dans le cerveau des patients atteints. Des travaux montrent qu’une stimulation de MAPK par Aβ peut augmenter la phosphorylation de tau (Rapoport et al., 2000). L’activation de GSK-3 suite à l’agrégation d'Aβ induit aussi l’hyperphosphorylation de tau, et conduit consécutivement à la mort neuronale (Alvarez et al., 1999; Takashima et al., 1993). Une étude sur des cultures neuronales de rats a également décrit que le peptide Aβ pouvait induire l’hyperphosphorylation de tau, et diminuer l’activité de la choline acétyl transférase (Zheng et al., 2002).

Plus récemment, des études réalisées sur des souris triplement transgéniques [APP × PS1 × tau] ont également montré le lien hiérarchique entre Aβ et tau (LaFerla et al., 2005). L'emploi d'anticorps spécifiques a montré que ces souris développent les pathologies associées à Aβ et à tau, mais de façon non synchrone. En effet, la détection d'Aβ intracellulaire est possible dès trois mois et celle des dépôts amyloïdes extracellulaires vers six mois alors que les premiers changements conformationnels de tau ne sont visibles qu'au bout de dix à douze mois et l'hyperphosphorylation de tau seulement à partir de douze à quinze mois (Oddo et al., 2003).

Il faut toutefois noter que tau lui-même est essentiel pour la neurotoxicité associée à Aβ. Ainsi, dans un modèle cellulaire en présence d'Aβ fibrillaire, on observe une dégénérescence des neurones isolés de souris transgéniques surexprimant tau (humain ou de souris), alors que les cellules issues d’animaux délétères pour tau ne dégénèrent pas. Cette dégénérescence est rétablie suite à la réexpression de tau (Rapoport et al., 2002).

(27)

Il est aussi décrit que la réduction du taux d’Aβ soluble et de tau (et pas seulement de Aβ), améliore le déclin cognitif dans des souris transgéniques modèles ayant des plaques et des neurofibrilles (Oddo et al., 2006).

En résumé, le peptide Aβ et ses différentes formes agrégées sont à l'origine d'un niveau élevé de stress oxydant qui va engendrer, entre autres phénomènes complexes, la stimulation des kinases et ainsi conduire à l'hyperphosphorylation de tau.

I.5

Hypothèse de la cascade amyloïde

La maladie d’Alzheimer est une maladie complexe et multifactorielle, qui touche principalement les synapses de certains neurones situés dans l’hippocampe et le cortex. C’est au niveau de ces zones que les principaux acteurs de la maladie exercent leurs effets délétères (Figure 1.7).

Figure 1.7. Localisation des principaux facteurs conduisant à la maladie d'Alzheimer (d'après Mattson, 2004). ER: réticulum endoplasmique.

L’hypothèse de la cascade amyloïde (Figure 1.8) fait intervenir l’Aβ comme le déclencheur de tous les cas d’Alzheimer, plaçant les pathologies associées à tau, ainsi que d’autres modifications dégénératives, en aval de celui-ci (Hardy et al., 1992; Hardy et al., 2002).

(28)

Métabolisme altéré de APP (ApoE4, dégradation

défectueuse de Aβ)

Formes familiales Formes sporadiques

Mutations des gènes de APP, PS1 et PS2

Augmentation de la production et accumulation de Aβ42 dans le cerveau

Accumulation et oligomérisation d’ Aβ42 dans le système limbique

Effets des oligomères d’ Aβ42 sur le transport synaptique

Déposition graduelle d’oligomères d’Aβen plaques diffuses Activation des microglies et des astrocytes

Réponse inflammatoire

Homéostasie ionique neuronale altérée Dommages oxydants

Dysfonctionnements synaptiques, mort cellulaire dans le cortex et l’hippocampe,

déficit progressif en neurotransmetteurs Perturbation de l’activité des kinases, phosphatases / hyperfibrillation de tau,

neurofibrilles

DEMENCE

Métabolisme altéré de APP (ApoE4, dégradation

défectueuse de Aβ)

Formes familiales Formes sporadiques

Mutations des gènes de APP, PS1 et PS2

Augmentation de la production et accumulation de Aβ42 dans le cerveau

Accumulation et oligomérisation d’ Aβ42 dans le système limbique

Effets des oligomères d’ Aβ42 sur le transport synaptique

Déposition graduelle d’oligomères d’Aβen plaques diffuses Activation des microglies et des astrocytes

Réponse inflammatoire

Homéostasie ionique neuronale altérée Dommages oxydants

Dysfonctionnements synaptiques, mort cellulaire dans le cortex et l’hippocampe,

déficit progressif en neurotransmetteurs Perturbation de l’activité des kinases, phosphatases / hyperfibrillation de tau,

neurofibrilles

DEMENCE

Figure 1.8. Hypothèse de la cascade amyloïde (adaptée à partir de Hardy et al., 2002; Selkoe, 2001).

Selon cette hypothèse, l'origine de la dégénération neuronale et synaptique observée dans la maladie d'Alzheimer provient d’une protéolyse altérée de la protéine APP. Des causes génétiques et environnementales (le taux de cholestérol par exemple) et une altération générale du fonctionnement du cerveau liée à l'âge sont responsables de l'augmentation de la production d'Aβ (et plus particulièrement de sa forme la plus toxique, Aβ42). Celui-ci est alors libéré au niveau de la membrane présynaptique des neurones, où l'APP est accumulée.

Dans le cas des neurones à acétylcholine, la présence de l'acétylcholine estérase dans cette zone favorise la fibrillation d'Aβ et la formation de plaques amyloïdes. De même, les ions métalliques ZnII et CuII libérés lors de la transmission synaptique causent l'agrégation du peptide au niveau des synapses.

Les ions CuII libérés peuvent aussi être à l'origine de toxicité, via la production de stress oxydant. Celui-ci conduit en particulier à l'oxydation des membranes et à la perte de leur intégrité.

(29)

L'interaction directe du peptide Aβ hydrophobe avec ces membranes et sa pénétration entraîne également la perméation de celles-ci. Il en résulte une augmentation du flux de Ca2+ à l'intérieur de la cellule neuronale, entraînant de nombreux effets délétères. Elle génère du stress oxydant supplémentaire.

Cette augmentation active également des kinases, conduisant à l'hyperphosphorylation de tau. Il s'en suit une déstructuration des axones et une perte des synapses qui conduit à l'altération de la mémoire et des fonctions cognitives. Une concentration intracellulaire de Ca2+ excessive peut également déclencher des facteurs d'induction d'apoptose et conduire à la mort neuronale.

D’autre part, la dérégulation des synapses perturbe le fonctionnement des systèmes de neurotransmetteurs cholinergiques et favorise ainsi la production supplémentaire d'Aβ et son accumulation. Les dysfonctionnements synaptiques et le stress oxydant augmentent par ailleurs l'influx de Ca2+ dans la cellule au niveau des neurones à glutamate, via la suractivation des récepteurs au NMDA. Ce phénomène conduit à une toxicité accrue au niveau de ce type de neurones.

Enfin, l'inflammation déclenchée suite à ces évènements produit davantage de stress oxydant et accentue la toxicité générale.

II.

Les plaques amyloïdes

II.1

Origine de A

ββββ

: la protéine APP

II.1.1La protéine APP

Le gène des protéines APP est situé sur le chromosome 21; son épissage alternatif conduit à la formation de plusieurs ARN messagers, puis de glycoprotéines dont 3 isoformes principales ayant une longue partie N-terminale située dans la partie extracellulaire, une partie transmembranaire et une courte région C-terminale située dans le cytoplasme. Le nombre d’acides aminés de ces protéines est variable (entre 695 et 770).

Elles sont exprimées dans tous les tissus, mais les neurones expriment plus particulièrement la protéine APP695 que l’on trouve en forte quantité dans le cerveau (Clippingdale et al., 2001). En raison de l’évidence de la perturbation du métabolisme de l’APP, de nombreuses recherches se sont focalisées sur la compréhension des rôles physiologiques normaux de l’APP et de ses dérivés (Turner et al., 2003).

(30)

L’APP est exprimée de façon ubiquitaire dans l’organisme, mais ses fonctions pathologiques multiples ne sont pas encore bien connues.

Une hypothèse fréquemment rencontrée dans la littérature est son implication dans la régulation de l’homéostasie du cuivre dans les neurones (Maynard et al., 2002; White et al., 1999). Il a été montré que l’APP est aussi capable de lier le ZnII assez fortement (Kd: 765 nM) (Bush, 2003). Des études complémentaires sur un peptide modèle (Ciuculescu et al., 2005) ont démontré que le Zn pourrait induire la dimérisation de l’APP in vivo. Ceci pourrait être important pour la fonction de l’APP ou influencer la production de Aβ. Mais l’APP semble aussi jouer des rôles très différents dans les processus d’adhésion cellulaire, de stimulation de la croissance neuritique et de synaptogénèse (De Strooper et al., 2000).

De l’APP à Aβ

La protéine APP est métabolisée via deux voies biologiques: la voie non-amyloïdogénique (qui ne produit pas de peptides amyloïdes) et la voie non-amyloïdogénique. Ces deux voies se distinguent par les enzymes de clivage et par les métabolites (fragments) produits. L’APP est dégradée par des protéases appelées sécrétases (Figure 1.9) (Selkoe, 2001). L’APP est coupée dans un premier temps par l’α- ou la γ-sécrétase.

Dans la voie non-amyloïdogénique, l’α-sécrétase coupe près du domaine transmembranaire, au milieu de la région Aβ de l’APP, pour générer un large ectodomaine soluble (α-APPs) et laisser un fragment de 83 acides aminés (C83) dans la membrane.

La voie amyloïdogénique fait intervenir la β-sécrétase, qui coupe plus loin de la membrane, produisant l’ectodomaine soluble β-APPs et un fragment C-terminal de 99 résidus (C99) contenant le peptide Aβ en partie N-terminale.

C83 et C99 sont tous deux substrats d’une troisième protéase, la γ-sécrétase. Cette enzyme est constituée d’un complexe multi-protéique, comprenant la préséniline, la nicrastine, Aph-1 et Pen-2 (De Strooper, 2003) et catalyse une hydrolyse inhabituelle au sein de la région transmembranaire. La protéolyse de C99 par la γ-sécrétase produit le peptide Aβ, alors que C83 est clivé pour donner p3, une forme de Aβ tronquée au niveau de la partie N-terminale (Aβ17-40/42).

Dans les deux cas, le fragment AICD (domaine intracellulaire de l’APP) est libéré. Bien que la fonction de l’ensemble de ces fragments ne soit pas précisément établie, il a été suggéré que le domaine AICD jouait un rôle dans la transmission des signaux de la membrane vers le noyau (signalisation cellulaire).

(31)

Figure 1.9. Métabolisme de la protéine APP et génération des peptides Aβ (d’après Citron, 2004).

Les cas d’Alzheimer génétiques sont souvent dus à une protéolyse altérée de l’APP conduisant à une surproduction de Aβ, que ce soit chez les souris transgéniques ou chez l’homme. En effet, les mutations mises en cause sur le gène codant pour APP favorisent les voies β- et γ-sécrétases, tandis que les mutations des gènes codant pour les présénilines PS1 et PS2 accentuent l’activité γ-sécrétase (Hardy, 1997; Selkoe, 2001).

Dans les cas sporadiques, les modifications du métabolisme de l’APP (notamment l’augmentation de l’activité de la β-sécrétase) conduisant à la surproduction de Aβ peuvent être dues à des augmentations de stress oxydant, une diminution du métabolisme énergétique ou une perturbation de l’homéostasie des métaux.

Le cholestérol influence les taux de Aβ via l’activité des sécrétases impliquées dans le métabolisme de l’APP, en dirigeant celles-ci vers la voie amyloïdogénique. Aβ est issu du clivage de l’APP. Or celle-ci peut être clivée par les sécrétases α et β, mais seul le clivage par la β-sécrétase peut ensuite donner Aβ (Figure 1.9).

L’activité des sécrétases α et β qui sont en compétition pour le même pool d’APP, semblent modulées par le cholestérol. Des études sur cultures cellulaires ou sur des souris transgéniques montrent que des environnements riches en cholestérol réduisent la voie α-sécrétase lors de la protéolyse de l’APP, conduisant ainsi à un taux élevé de Aβ (Bodovitz et al., 1996; Refolo et al., 2000). A l’opposé, une diminution du taux de cholestérol (via des agents réalisant l’extraction du cholestérol ou des statines) a pour conséquence une augmentation de la voie de l’α-sécrétase et une diminution de la sécrétion de Aβ (Kojro et al., 2001), ou une diminution de la voie de la β-sécrétase (Simons et al., 1998).

















APP β-APPs C99 AICD domaine extracellulaire cytoplasme

















APP α-APPs p3 C83 AICD

















β-sécrétase γ-sécrétase









α-sécrétase membrane plasmique Voie non-amylogène (α-sécrétase) Voie amylogène (β-sécrétase)

















APP β-APPs C99 AICD domaine extracellulaire cytoplasme

















APP α-APPs p3 C83 AICD

















β-sécrétase γ-sécrétase









α-sécrétase

















β-sécrétase γ-sécrétase









α-sécrétase membrane plasmique Voie non-amylogène (α-sécrétase) Voie amylogène (β-sécrétase) Voie non-amyloïdogénique Voie amyloïdogénique

(32)

Par ailleurs, l’élimination du cholestérol dans les membranes inhibe l’activité de la γ-sécrétase de façon totale mais réversible (Wahrle et al., 2002). Le mécanisme d’action n’est pas encore totalement compris, mais il est possible que la modification de la fluidité des membranes en fonction du taux de cholestérol (une diminution du taux de cholestérol augmente la fluidité de la membrane) affecte les sécrétases associées à celles-ci en favorisant (ou en défavorisant) le contact entre les enzymes et leur substrat APP, ou en modifiant l’activité intrinsèque des enzymes, notamment dans le cas de la γ-sécrétase dont le site actif se situe au sein de la membrane (Bodovitz et al., 1996; Wahrle et al., 2002).

II.1.2Le peptide β-amyloïde (Aβ)

Le peptide Aβ est produit à partir de l’APP via les voies β- puis γ-sécrétases. Le clivage par cette seconde enzyme est hétérogène. Il conduit principalement à un peptide Aβ de 40 acides aminés noté Aβ40. Cependant, d’autres formes plus courtes ou plus longues sont également produites (entre 39 et 43 acides aminés), en particulier la forme Aβ42 (Figure 1.10), qui représente environ 10 % des espèces de Aβ. Les deux peptides Aβ40 (majoritaire) et Aβ42 (minoritaire) sont présents en tant qu’espèces solubles dans les fluides biologiques de tous les individus. Cependant une augmentation de la production de Aβ42 et son accumulation conduisent à des dépôts amyloïdes dans le cerveau des malades d’Alzheimer (Iwatsubo et al., 1994). C’est le constituant principal des plaques séniles. Il est supposé jouer un rôle plus important que Aβ40 dans la pathologie.

Asp1-Ala-Glu-Phe-Arg-His6-Asp-Ser-Gly-Tyr10-Glu-Val-His13-His14 -Gln-

Lys-Leu-Val-Phe-Phe-Ala-Glu-Asp-Val-Gly-Ser-Asn-Lys-Gly-Ala-Ile-Ile-Gly-Leu-Met35-Val-Gly-Gly-Val-Val40-Ile41-Ala42

Figure 1.10. Séquence du peptide Aβ42. La partie en gras correspond au domaine intramembranaire (d’après Clippingdale et al., 2001). Les acides aminés en rouge sont évoqués comme impliqués dans la chélation des ions métalliques et/ou dans la production de ROS.

L’accumulation du peptide Aβ dépend de la balance entre sa production et sa dégradation. En plus de sa surproduction lors de la maladie d’Alzheimer, il semblerait que sa dégradation par des peptidases « spécifiques » soit elle aussi altérée. Ainsi, la variabilité génétique concernant la protéine α2-macroglobuline ou encore une diminution de l’activité de la néprilysine dans l’hippocampe suite au vieillissement, ces deux protéines étant impliquées dans la dégradation de Aβ, favorisent son accumulation (Iwata et al., 2002; Selkoe, 2001).

(33)

L’IDE (Insulin Degrading Enzyme), qui intervient dans son élimination, semble elle aussi avoir une activité réduite chez les patients d’Alzheimer.

Les mutations des gènes codant pour l’APP et la PS1 augmentent non seulement la production et la sécrétion de Aβ mais favorisent également l’espèce Aβ42 parmi les différentes formes de Aβ (Hardy, 1997; Selkoe, 2001). Cela explique en partie les cas génétiques de la maladie.

La neurotoxicité exercée par Aβ (oligomères) peut l’être via divers mécanismes tels que la génération de stress oxydant, la dérégulation des systèmes de neurotransmetteurs ou de l’homéostasie du calcium (voir paragraphe I.3.2), une réponse inflammatoire forte et l’activation de diverses voies de signalisation conduisant à la mort cellulaire (Suh et al., 2002). Les dysfonctionnements engendrés sont en interconnexion, c'est-à-dire qu’un dérèglement quelque part en induit un autre ailleurs.

II.2

Agrégation

Les peptides Aβ ont une tendance naturelle à agréger. C’est ainsi que la majorité de Aβ dans le cerveau des patients d’Alzheimer est agrégée sous forme de fibrilles qui elles-mêmes ont tendance à former les plaques amyloïdes en présence d’autres éléments (métaux, protéines, …) (Clippingdale et al., 2001).

Le peptide Aβ42 est plus hydrophobe que ses analogues plus courts. Sa solubilité est par conséquent plus faible, et sa capacité à s’agréger très forte (environ 70 fois plus rapide que Aβ40). Ce phénomène d’agrégation dépend non seulement de la nature de Aβ (40/42), mais aussi du temps, du solvant, du pH, de la concentration en peptide ou encore de la présence d’ions métalliques (Atwood et al., 1998; Bitan et al., 2003; Clippingdale et al., 2001; Huang et al., 1997; Jarrett et al., 1993).

La capacité de Aβ à former des structures organisées (fibrilles) est principalement gouvernée par des interactions hydrophobes, et peut être directement corrélée à la proportion de structures secondaires en feuillets β adoptées par le peptide.

En effet, une étape clé dans l’agrégation d’Aβ est le passage d’une structure secondaire principalement non structurée pour le monomère natif à une structure en feuillets

β, éventuellement via un intermédiaire contenant des portions en hélice α (Clements et al.,

1996; Kirkitadze et al., 2001; Soto et al., 1995). Ces structures en feuillets β tendent ensuite à former des oligomères de type protofibrilles par des interactions entre les différents feuillets β qui s’associent par la suite en fibrilles "torsadées" (Clippingdale et al., 2001; Walsh et al.,

(34)

D’autres intermédiaires favorisant la formation d’hélice α (Walsh et al., 1999) ont également été trouvés.

Des études cinétiques ont par ailleurs indiqué que la fibrillation comporte deux étapes: une étape lente de nucléation suivie d’une étape rapide de polymérisation (Jarrett et al., 1993). Il a été montré in vitro que ces deux étapes sont plus rapides dans le cas de Aβ42 que d’Aβ40. Un mécanisme proposé passe par la formation de paranuclei pentamèriques ou hexamèriques de Aβ42 qui s’associent ensuite entre eux pour former des protofibrilles puis des fibrilles (Bitan et al., 2003).

Une étude récente couplant la RMN, la RMN du solide et des études de mutagenèse a pu mettre en évidence ces structures tridimensionnelles pour Aβ42 agrégé sous forme de fibrilles (Figure 1.11) (résidus 1-17: désordonnés; résidus 18-42: deux brins β).

Figure 1.11. Structure tridimensionnelle d’une fibrille de Aβ42 (oxydé sur Met35) d’après Lührs et al., 2005. La direction de l’axe de la fibrille est indiquée par les flèches. (A et B) Structure en rubans des résidus 17-42 illustrant la nature intermoléculaire des interactions entre les feuillets β. (C) Polarité de la surface de van der Waals (code couleur des résidus: jaune: hydrophobe, vert: polaire , rouge: chargé négativement et bleu: chargé positivement). (D) Simulation d’une fibrille constituée de 4 protofibrilles. (E) Exemples de micrographies de fibrilles de Aβ42(oxydé sur Met35), échelle de la barre: 50 nm.

Cette étude souligne entre autres la nature intermoléculaire des interactions entre les feuillets-β parallèles, ainsi qu’une interaction ionique intermoléculaire forte entre les résidus Lys28 et Asp23 de deux peptides (Figure 1.11, A et B) (Lührs et al., 2005).

(35)

Des structures RMN ont aussi été publiées pour Aβ40, proposant l’existence de structures en feuillets-β parallèles dans la partie 12-40 avec des liaisons inter-brins intramoléculaires et des liaisons intermoléculaires ponctuelles (interaction électrostatique entre Lys28 et Asp23) qui favorisent la formation des fibrilles (Petkova et al., 2002; Petkova et al., 2006; Tycko, 2004) (Figure 1.12).

Figure 1.12. Modèle structural d’un protofilament d’Aβ1–40. (a) Modélisation de la partie Aβ 9-40 représentant deux feuillets β par molécule et feuillets β parallèles dans le coeur du motif.

L’axe de la fibre est perpendiculaire à l’axe des feuillets β (b) Représentation atomique en couleur selon le type de chaîne latérale du résidu (vert, hydrophobe; magenta, polaire; rouge, chargé négativement; bleu, chargé positivement). La partie N-terminal est désordonnée. Il y a des ponts salins entre D23 et K28 dans le coeur hydrophobe.

Les différences existant entre les modèles structuraux pour Aβ40 et Aβ42 peuvent s’expliquer, au moins en partie, par le fait que ces deux peptides adoptent des structures différentes en solution et ne s’agrègent pas selon le même mécanisme (Bitan et al., 2003).

II.3

Toxicité due à l’agrégation

Les plaques amyloïdes, caractéristiques des cerveaux des malades d’Alzheimer lors d’examens post mortem, sont la forme terminale du processus d’agrégation de Aβ.

Actuellement, les formes responsables de la toxicité sont toujours discutées (oligomérique ou fibrillaire, extracellulaire ou intracellulaire) (Hardy et al., 2002; Klein et al., 2001).

(36)

Cependant, via de nombreuses études, les formes oligomériques solubles intermédiaires semblent être les plus toxiques, corrélant notamment avec les dysfonctionnements cognitifs dans la maladie d’Alzheimer (McLean et al., 1999; Hoshi et al., 2003). De plus, chez les souris transgéniques, les peptides Aβ peuvent commencer à exercer leur toxicité avant même la formation de plaques (Moechars et al., 1999; Mucke et al., 2000).

Par ailleurs, de petits oligomères globulaires (des trimères aux 24-mères) de Aβ42 solubles (ADDLs en anglais pour "Aβ-derived diffusible ligands"), et les protofibrilles, également solubles, sont proposés comme d’autres formes d’agrégation de Aβ pouvant générer de la toxicité, notamment en inhibant in vivo la plasticité synaptique et le mécanisme de potentialisation à long terme associé à la mémoire (Gong et al., 2003; Lambert et al., 1998; Walsh et al., 2002; Walsh et al., 1997).

Enfin, des accumulations intraneuronales de Aβ, évènements précoces de l’agrégation de Aβ, sont également neurotoxiques et responsables de dysfonctionnements synaptiques in vivo (Mucke et al., 2000; Oddo et al., 2003; Takahashi et al., 2002).

Des modifications chimiques et structurales associées à la polymérisation de Aβ ont également été relevées in vitro et in vivo suite au "vieillissement" du peptide. Elles incluent par exemple la formation de formes tronquées (via la formation de pyroglutamates N-terminaux en positions 3 et 11 par exemple), l’isomérisation (notamment au niveau des aspartates), la racémisation, l’oxydation (en particulier la sulfoxydation des méthionines), des "cross-links" via les tyrosines (Figure 1.13) et la formation de polymères de Aβ40 et de Aβ42 résistants au SDS (Piccini et al., 2005; Roher et al., 1993; Zirah et al., 2006). Ces diverses modifications entraînent une résistance aux protéases, rendant ainsi plus difficile la métabolisation et l’élimination des peptides.

OH R OH R O R OH R dityrosine isodityrosine H N N H O O pyroglutamate N-terminal N H O O N H O OH iso-aspartate N H O O H N méthionine sulfoxyde S O

(37)

Il est difficile d’attribuer l’initiation de l’amyloïdogénèse à la seule présence des peptides Aβ40 et Aβ42, alors que ce sont des constituants normaux du fluide cérébrospinal et que les porteurs de la maladie d’Alzheimer familiale, qui surexpriment Aβ42 dès la naissance, ne présentent pas de dépôts amyloïdes dans leur enfance. D’autre part, il est difficile d’expliquer que les dépôts formés soient localisés à des endroits bien précis (au niveau des synapses par exemple) et que leur distribution ne soit pas uniforme puisque l’Aβ est exprimé de façon ubiquitaire. Il est donc raisonnable d’évoquer, en plus de la surproduction d’Aβ (liée à des causes génétiques ou à l’âge), d’autres facteurs permettant l’initiation des dépôts amyloïdes avec l’âge.

Parmi ces facteurs, il a été proposé que les ions métalliques participent à ce phénomène (Atwood et al., 1999). L’interaction entre Aβ et les métaux (cuivre, zinc et fer), qui fait l’objet d’un intérêt croissant, est décrite dans le paragraphe suivant.

III.

Interaction A

ββββ

- ions métalliques. Production de ROS

III.1

Les ions métalliques dans le cerveau

En fonctionnement normal, le cerveau régule strictement l’homéostasie des ions métalliques dans le cerveau; ce processus normal joue un rôle important dans l’activité neuronale. Les ions métalliques (cuivre, zinc et fer notamment) sont essentiels pour les organismes vivants. Ils sont présents dans les cerveaux sains à des concentrations relativement élevées (Atwood et al., 1999) où ils participent à l’activité neuronale. Par exemple, la concentration en ZnII est de l’ordre de 150 à 300µM, celle de CuII peut atteindre 100µM, et le FeIII jusqu’à 500µM. Une dérégulation (soit une déficience soit un excès) entraîne des dysfonctionnements dans l’organisme.

En effet, les ions métalliques CuII et FeIII sont généralement initiateurs de toxicité par leurs propriétés oxydo réductrices, via la production de ROS (HO•, O2• -).

De nombreuses maladies neurodégénératives sont d’ailleurs associées à des dérégulations de l’homéostasie des métaux, comme le montre le tableau 1.1 (Doraiswamy et al., 2004).

(38)

Maladies Métal impliqué Métalloprotéines ou enzymes Maladie d’Alzheimer Cuivre, fer, zinc Aβ, APP

Maladie de Parkinson Fer α synucléine, ferritine, ceruloplasmine,

mélanotransferrine, lactoferrine Creutzfeld-Jacob Cuivre, fer protéine prion

Maladie de Huntington Fer, calcium huntingtine Syndrôme de Down Cuivre, fer, zinc Aβ

Cataracte Cuivre, fer α cristalline

Tableau 1.1. Maladies neurodégénératives et le rôle possible des métaux (d’après Doraiswamy et al., 2004).

Dans le cas de la maladie d’Alzheimer, de nombreuses études ont montré que le métabolisme des ions métalliques est altéré.

Les concentrations de cuivre, de zinc et de fer sont plus élevées que la normale, et plus particulièrement dans les lésions caractéristiques de la maladie (plaques amyloïdes) et à proximité de celles-ci (Atwood et al., 1999; Lovell et al., 1998).

III.2

Toxicité des complexes A

ββββ

- ions métalliques

III.2.1 Régulation normale du stress oxydant

La protection de l’organisme vis-à-vis des dommages oxydants est réalisée par un grand nombre d’antioxydants, enzymatiques ou non. Par exemple, les superoxyde dismutases Mn-SOD et Cu/Zn-SOD sont responsables de la conversion de l’anion superoxyde en H2O2 et

O2. L’H2O2 est quant à lui détoxifié en O2 et H2O par la catalase et les peroxydases.

Cependant, lorsque les taux de ROS dépassent la capacité antioxydante de la cellule, les phénomènes délétères de stress oxydant apparaissent au niveau des lipides, des protéines ou encore de l’ADN de celle-ci. Cela se produit lorsque l’activité de ces enzymes diminue ou lorsque la quantité de ROS produite est plus importante, suite par exemple au dérèglement de l’homéostasie des ions métalliques.

III.2.2 Mécanisme de production de ROS par les métaux

Le principal mécanisme de production de ROS provient de la réaction de l’oxygène moléculaire avec des métaux tels que CuI ou FeII (Halliwell et al., 1999), parmi lesquels l’anion superoxyde O2•-, le peroxyde d’hydrogène (H2O2) et le radical hydroxyle OH• obtenu

Figure

Figure 1.6. Comparaison de cerveaux de personnes saines (HC) et d’individus atteints de la  maladie d’Alzheimer (AD) (d’après Masters et al., 2006)
Figure  1.7.    Localisation  des  principaux  facteurs  conduisant  à  la  maladie  d'Alzheimer  (d'après Mattson, 2004)
Figure 1.9. Métabolisme de la protéine APP et génération des peptides Aβ (d’après Citron,  2004)
Figure  1.11.  Structure  tridimensionnelle  d’une  fibrille  de  Aβ42 (oxydé  sur  Met35)  d’après  Lührs  et  al.,  2005
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