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Les effets de la pleine conscience sur le stress des adultes âgés présentant un trouble cognitif léger amnésique

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Academic year: 2021

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Les effets de la pleine conscience sur le stress des

adultes âgés présentant un trouble cognitif léger

amnésique

Mémoire doctoral

Anne-Marie Chouinard

Doctorat en psychologie

Docteure en psychologie (D. Psy.)

Québec, Canada

(2)

Les effets de la pleine conscience sur le stress des

adultes âgés présentant un trouble cognitif léger

amnésique

Mémoire doctoral

Anne-Marie Chouinard

Sous la direction de :

Sonia Goulet, directrice de recherche

Carol Hudon, codirecteur de recherche

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iii Résumé

Le trouble cognitif léger amnésique (TCLa) est caractérisé par un déclin de la mémoire épisodique plus important que ce qui est attendu pour l’âge et le niveau de scolarité, sans interférer significativement avec le fonctionnement. Chaque année, 10 à 15 % des adultes âgés avec TCLa développent la maladie d’Alzheimer (MA). Le stress figure parmi les prédicteurs de la progression du TCLa vers la MA et ce, possiblement via les effets neurotoxiques des hormones de stress telles que le cortisol. Les interventions basées sur la pleine conscience (IBPC), démontrées efficaces pour réduire le stress au plan psychologique et physiologique (c.-à-d., cortisol), représentent une approche novatrice intéressante dans le contexte de la prévention du déclin cognitif associé à la MA.

L’objectif de ce mémoire doctoral était d’évaluer les effets d’une IBPC sur le stress au plan psychologique et physiologique des adultes âgés avec TCLa, en comparaison à une intervention basée sur la psychoéducation (IBPE). Les données préliminaires, présentées au Chapitre 5, suggèrent les bénéfices potentiels de l’IBPC et également de l’IBPE pour réduire le stress au plan physiologique et psychologique, respectivement, chez les adultes âgés avec un TCLa. La poursuite de la recherche est essentielle, considérant que ces adultes âgés ont peu d’interventions à leur disposition et que leur qualité de vie est compromise. En effet, l’amélioration du bien-être et de la productivité des adultes âgés avec TCLa, grâce à des interventions telles que l’IBPC ou l’IBPE, pourrait entrainer des gains considérables sur le fardeau socio-économique associé à la MA, un enjeu de santé publique majeur pour la population canadienne vieillissante.

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iv Abstract

Amnestic mild cognitive impairment (aMCI) is characterized by a greater episodic memory decline than expected for age and education, without significantly interfering with functioning. Each year, 10 to 15% of aMCI older adults develop Alzheimer's disease (AD). Stress figures among predictors of aMCI progression to AD, possibly through neurotoxic effects of stress hormones such as cortisol. Mindfulness based interventions (MBI), shown effective to reduce stress on the psychological and physiological (i.e., cortisol) levels, appear as a relevant novel approach to prevent cognitive decline associated with AD.

The aim of this doctoral memoir was to evaluate the impact of a MBI on the psychological and physiological stress of older adults with aMCI, compared to a psychoeducation based intervention (PBI). The preliminary data, presented in Chapter 4, suggest the potential benefits of MBI and also PBI to reduce physiological and psychological stress, respectively, among older adults with aMCI. Further research is essential considering that older adults have few interventions available and compromised quality of life. Indeed, improving well-being and productivity of older adults with aMCI, through interventions such as MBI or PBI, could lead to considerable gains regarding AD’s socio-economic burden, a major public health challenge for Canada's aging population.

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v

Table des matières

Résumé ... iii

Abstract ... iv

Liste des tableaux ... vii

Liste des figures ... viii

Liste des abréviations ... ix

Remerciements ... x

Avant-propos ... xii

INTRODUCTION ... 1

Description du trouble cognitif léger amnésique ... 3

CHAPITRE 1. STRESS ET TROUBLE COGNITIF LÉGER AMNÉSIQUE ... 7

1.1 Stress psychologique et TCLa ... 7

1.2 Stress physiologique et TCLa ... 9

1.3 Hypothèses explicatives ... 12

CHAPITRE 2. LES INTERVENTIONS BASÉES SUR LA PLEINE CONSCIENCE ... 16

2.1 Description des IBPC ... 16

2.2 Effets des IBPC sur le stress psychologique ... 17

2.3 Impacts des IBPC sur le stress physiologique ... 18

2.4 Mécanismes d’action des IBPC ... 19

2.5 Les IBPC pour prévenir la MA ... 22

CHAPITRE 3. PRÉSENTATION DU MÉMOIRE ... 24

3.1 Objectifs et hypothèses ... 24 CHAPITRE 4. ARTICLE ... 26 Résumé ... 27 Abstract ... 28 Introduction ... 29 Methods ... 31

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vi Statistical analyses ... 36 Results ... 37 Discussion ... 39 References ... 49 CONCLUSION GÉNÉRALE ... 57

Rappel de l’objectif général du mémoire ... 57

Rappel de l’étude et des résultats principaux ... 58

Contributions scientifiques et cliniques ... 60

Forces, limites et pistes de recherche futures ... 64

Conclusion ... 67

Bibliographie ... 69

Annexe A ... 90

Algorithme décisionnel des différents sous-types de TCL ... 90

Annexe B ... 92

Décours temporel du déclin cognitif menant à la MA ... 92

Annexe C ... 94

Étapes de l’activation de l’axe HPS ... 94

Annexe D ... 97

Résumé du contenu de la séance d’évaluation diagnostique... 97

Annexe E ... 99

Document sur la collecte du cortisol salivaire en contexte de recherche ... 99

Annexe F ... 109

Calendrier des pratiques méditatives à domicile du groupe IBPC ... 109

Annexe G ... 111

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vii

Liste des tableaux CHAPITRE 4.

Table 1. MBI and PBI sessions’ themes Table 2. Characteristics of participants

Table 3. Means (± standard deviations) and effect sizes for psychological and physiological

stress variables in both groups pre- and post- intervention

Table 4. Means (± standard deviations) and effect sizes of Brief-COPE scores in both

groups pre- and post- intervention

Table 5. Means (± standard deviations) and effect sizes of FFMQ scores in MBI group pre-

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viii

Liste des figures

INTRODUCTION

Figure 1. Algorithme décisionnel des différents sous-types de TCL

Figure 2. Position du stade de TCLa dans le décours temporel du déclin cognitif menant à

la MA

CHAPITRE 1.

Figure 3. Étapes de l’activation de l’axe HPS en situation de stress

CHAPITRE 4.

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ix

Liste des abréviations AD: Alzheimer disease

aMCI: Amnestic mild cognitive impairment APOE ε4: Apolipoprotéine E avec allèles ε4 Brief-COPE: Brief version of the COPE inventory CAR: Cortisol awakening response

CERVO: Centre de recherche CERVO

FFMQ: Five Facets Mindfulness Questionnaire GAI: Geriatric Anxiety Inventory

HPA: Hypothalamic-pituitary-adrenal HPS: Hypothalamique-pituitaire-surrénal

IBPC: Intervention basée sur la pleine conscience IBPE: Intervention basée sur la psychoéducation MA: Maladie d’Alzheimer

MBI: Mindfulness based intervention

MBI+: Subgroup of participants who meditated at home the most MBI-: Subgroup of participants who meditated at home the least MoCA: Montreal Cognitive Assessment

NIA-AA: National Institute of Aging and Alzheimer Association PSS: Perceived Stress Scale

PBI: Psychoeducation based intervention RÉC: Réponse d’éveil cortisolaire TCL: Trouble cognitif léger

TCLa: Trouble cognitif léger amnésique TCLna : Trouble cognitif léger non amnésique

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x Remerciements

À ce jour, en fin de parcours, je constate comme je suis choyée d’être aussi bien entourée. L’accomplissement de ce doctorat est tributaire du support de nombreuses personnes et je ne pourrais conclure sans les remercier.

D’abord, je tiens à remercier ma directrice de doctorat, Sonia Goulet. Merci pour ta présence et ta confiance tout au long de ce parcours. Tes commentaires et réflexions, découlant de ta grande rigueur, ont permis d’aiguiser mon esprit scientifique et d’alimenter ma curiosité intellectuelle. Merci de m’avoir permis d’administrer les interventions à tes côtés, cela a été très formateur. Ton authenticité, ta joie de vivre et les nombreux éclats de rires ont contribué à alléger ce parcours et à l’imprégner de beaux souvenirs.

Ensuite, je tiens à mentionner ma reconnaissance envers Carol Hudon, codirecteur de ce doctorat. Merci pour ta présence et tes réflexions. Ton ouverture vis-à-vis de mes idées, donnant lieu à un travail d’équipe, a permis de faire grandir en moi un sentiment de compétence. Merci de m’avoir offert toutes les ressources essentielles pour rendre possible l’accomplissement de ce doctorat. Ton laboratoire est un réel lieu d’apprentissage et de formation et j’ai été choyée de pouvoir en faire partie. D’ailleurs, je remercie Isabelle Tremblay, professionnelle de recherche, ainsi que tous les étudiants ayant participé au projet de recherche.

Je désire aussi remercier l’Institut de Recherche en Santé du Canada pour l’octroi d’une bourse d’excellence, grâce à laquelle j’ai pu m’investir à temps plein dans la réalisation de mon doctorat. Merci également au centre de recherche CERVO et à l’École de psychologie de l’Université Laval pour l’encadrement, les ressources et la formation académique. D’ailleurs, je tiens à souligner la qualité exceptionnelle de l’enseignement de certains professeurs, dont j’utilise les apprentissages régulièrement. Je remercie donc sincèrement, Nancie Rouleau, Caroline Cellard et Martine Simard.

Je me dois de préciser l’apport considérable de tous mes superviseurs de stage quant à ma formation clinique. Grâce à vous, j’ai acquis confiance en mes compétences de clinicienne et un désir de toujours évoluer. Merci à Marie-France Cimon, Caroline Girard, Caroline Brochu, Joanne Roy, Sophie Chantal et Léonie Jean.

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xi

Je ne peux faire fit du support de toutes mes collègues malgré un parcours semé d’embuches. J’ai eu l’occasion de faire partie d’une cohorte exceptionnelle. Merci Éva, Maryline, Émilie et Laila pour notre belle amitié empreinte de fou rires et de beaux souvenirs.

Je remercie aussi mes amies de toujours pour votre support et votre confiance en moi, malgré mon horaire parfois chargé m’empêchant d’être avec vous autant que je l’aurais souhaité. Vous êtes tout simplement merveilleuses. Merci Lizou, Virg, Caro, Marie, Isa, Soso et Loulou.

À mes parents et ma sœur, Roger, Louise et Isabelle, un immense merci de toujours vous être intéressés à mes études et de m’avoir encouragée à persévérer. Je suis choyée de vous avoir à mes côtés et de pouvoir partager mes passions avec vous. Je vous aime.

Merci également à tous les autres membres de ma famille et belle-famille, vous êtes tous exceptionnels. Claire et Louis, mes beaux-parents, je tiens à vous remercier tout spécialement de votre grande générosité et de votre volonté incessante d’aider. William et moi, sommes très reconnaissants.

D’ailleurs, je réserve ces derniers mots, pour remercier mon amoureux, William. Merci de ta présence, de ton écoute et de tes bons conseils tout au long de ce parcours. Ton calme et ta patience infinie ont su m’apaiser lors des moments plus difficiles. Je te remercie d’être à mes côtés, d’être qui tu es et de m’aimer comme je suis. J’espère pouvoir en faire tout autant pour toi, je t’aime.

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xii Avant-propos

Ce mémoire doctoral est divisé en six sections. D’abord, l’introduction générale aborde la problématique liée au sujet de recherche ainsi que la nomenclature et les critères diagnostiques du stade prodromique de la maladie d’Alzheimer. Ensuite, le Chapitre 1 aborde les liens entre le stress et le stade prodromique de la maladie d’Alzheimer. Le Chapitre 2 poursuit avec la description des interventions basées sur la pleine conscience et présente les données empiriques quant à leurs effets sur le stress. Le Chapitre 3 porte sur les objectifs, les hypothèses et la méthodologie associés à la démarche scientifique ayant conduit à l’accomplissement de l’étude randomisée-contrôlée décrite dans l’article du Chapitre 4. Enfin, la dernière section propose une conclusion générale concernant les résultats obtenus, les interprétations qui en découlent ainsi que les pistes de recherche futures.

Au moment du dépôt initial de ce mémoire doctoral, l’article « Mindfulness and psychoeducation to manage stress in amnestic mild cognitive impairment» est en processus de soumission au journal scientifique Aging and Mental Health. La contribution et l’affiliation des auteurs se présentent ainsi :

Anne-Marie Chouinard (B.A.), candidate au doctorat en psychologie et première auteure de l’article. Affiliation à l’École de psychologie de l’Université Laval et au centre de recherche CERVO. Contribution à la recension des écrits scientifiques, au développement du protocole de recherche, au recrutement et à la collecte des données, à la manualisation et l’administration des deux interventions, à la saisie et l’analyse des données, à l’interprétation des résultats ainsi qu’à la rédaction principale de l’article.

Eddy Larouche (B.A.), candidat au doctorat en psychologie. Affiliation à l’École de psychologie de l’Université Laval et au centre de recherche CERVO. Contribution au développement du protocole de recherche, au recrutement et à la collecte des données ainsi qu’à la manualisation et l’administration des deux interventions.

Sonia Goulet (Ph.D.), directrice de la thèse, professeure et chercheure. Affiliation à l’École de Psychologie de l’Université Laval et au centre de recherche CERVO. Contribution à la supervision de la démarche scientifique, à l’élaboration du protocole de

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recherche, au développement, à la manualisation et l’administration de l’intervention basée sur la pleine conscience, à l’interprétation des résultats et à la rédaction de l’article scientifique et du mémoire doctoral.

Carol Hudon (Ph.D.), codirecteur de la thèse, professeur et chercheur. Affiliation à l’École de Psychologie de l’Université Laval et au centre de recherche CERVO. Contribution à la supervision de la démarche scientifique, à l’élaboration du protocole de recherche, à l’interprétation des résultats et à la rédaction de l’article scientifique et du mémoire doctoral.

Marie-Claude Audet (Ph.D.), membre du comité de thèse, professeure et chercheure. Affiliation au Royal’s Institute of Mental Health Research et à l’Université d’Ottawa. Contribution à la supervision de la démarche scientifique pour les données physiologiques, à l’interprétation des résultats et à la rédaction de l’article scientifique.

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INTRODUCTION

La maladie d’Alzheimer (MA) représente actuellement un enjeu sociétal majeur en raison de l’accroissement de l’espérance de vie, du vieillissement de la population et de l’inefficacité des traitements actuels à renverser les symptômes de démence ou à freiner l’évolution de la maladie (Barnes et Yaffe, 2011; Société Alzheimer du Canada, 2010). La MA est une pathologie neurodégénérative qui implique un déclin de la mémoire épisodique et d’une ou plusieurs autres fonctions cognitives (c.-à-d., langage, praxies, gnosies, fonctions exécutives et visuospatiales) et qui affecte significativement le fonctionnement (American Psychiatric Association, 2013). Au plan neuropathologique, la MA est caractérisée par le dépôt excessif de plaques amyloïde et d’enchevêtrements neurofibrillaires, ainsi qu’une atrophie du lobe temporal-médian affectant particulièrement l’hippocampe et le cortex entorhinal (Mckhann et al., 2011). Le facteur de risque primaire de la MA est l’âge et la probabilité de développer la pathologie double tous les 5 ans à partir de 65 ans (Qiu, Kivipelto, et von Strauss, 2009; Société Alzheimer du Canada, 2010). Compte tenu du vieillissement de la population, il est estimé que la strate des adultes âgés de 65 ans et plus représentera 25% de la population générale du Canada d’ici 2051 (Statistique Canada, 2011), donc un accroissement du nombre de cas de MA. En 2016, environ 564 000 Canadiens étaient atteints de la MA ou d’un trouble neurocognitif apparenté (c.-à-d., démence mixte, démence vasculaire, etc.) et ce nombre pourrait augmenter à 937 000 d’ici 2031 (Société Alzheimer du Canada, 2016). Les coûts annuels directs et indirects engendrés par la MA représentent environ 10.4 milliards de dollars et doubleront d’ici 2031 si aucune stratégie n’est adoptée pour réduire l’incidence de cette pathologie (Société Alzheimer du Canada, 2016). Ainsi, la Société Alzheimer du Canada et les Instituts de recherche en santé du Canada ont recommandé une stratégie nationale de lutte contre le fardeau social et économique de la MA (Société Alzheimer du Canada, 2010).

Actuellement, la prévention représente l’approche la plus prometteuse pour diminuer l’incidence de la MA (Barnes et Yaffe, 2011; Gauthier, Wu, Rosa-Neto et Jia, 2012; Khachaturian et al., 2008; Norton, Matthews, Barnes, Yaffe et Brayne, 2014). Selon

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The Lancet Commission on dementia prevention (Livinston et al., 2017), il faut agir

davantage auprès des adultes âgés à risque plutôt qu’auprès de la population générale. En effet, le processus neurodégénératif de la MA évolue sur plusieurs années avant l’apparition des symptômes de démence (Albert et al., 2011; Morris, 2005; Petersen et al., 2001). Ce stade prodromique représente donc une fenêtre temporelle cruciale pour l’application d’interventions préventives visant à freiner ou retarder le déclin cognitif, avant que les dommages cérébraux qui lui sont associés soient trop importants (Sperling et al., 2011 ; Livingston et al., 2017). De plus, le tiers des cas de MA seraient dus à des facteurs de risque modifiables comme le stress chronique (Wilson, Begeny, Boyle, Schneider et Bennett, 2011), la dépression, le tabagisme, l’hypertension, le diabète, l’obésité et l’inactivité physique et cognitive (Barnes et Yaffe, 2011; Norton et al., 2014; Qiu et al., 2009). Une réduction de 10% de ces facteurs de risque, par décennie, préviendrait environ 8,8 millions de nouveaux cas de MA à travers le monde d’ici 2050 (Norton et al., 2014).

De nombreux essais cliniques pharmacologiques ont été réalisés afin de développer des traitements pouvant agir sur la progression de la MA, mais sans succès significatifs (Cummings, Morstorf et Zhong, 2014; Mangialasche, Solomon, Winblad, Mecocci et Kivipelto, 2010). Les molécules disponibles (c.-à-d., donepezil, rivastigmine, galantamine et memantine) sont prescrites au stade de la démence et permettent de modérer temporairement (c.-à-d., 6 mois à 3 ans) les symptômes cognitifs et comportementaux, ainsi que les impacts fonctionnels de la pathologie (Barnes et Yaffe, 2011; Mangialasche et al., 2010). La prescription de ces molécules en prophylaxie au stade prodromique de la MA n’est pas encore approuvée par les autorités gouvernementales et sanitaires. En effet, les essais cliniques pharmacologiques ne démontrent pas d’amélioration significative au plan cognitif et fonctionnel et les risques d’effets secondaires néfastes sont élevés (Tricco et al., 2013).

Cette situation incite le développement d’interventions préventives non pharmacologiques qui visent l’amélioration du bien-être psychosocial et le contrôle des facteurs de risque modifiables de la MA et ce, dès le stade prodromique (Eshkoor, Hamid, Mun et Ng, 2015; Gauthier et al., 2006; Langa et Levine, 2014). Parmi les facteurs de

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risque modifiables de la MA, le stress représente une cible d’intervention clé (Eshkoor et al., 2015; Tortosa-Martinez et Clow, 2012). Au stade prodromique, la présence de stress peut accentuer le déclin cognitif, les caractéristiques neuropathologiques (c.-à-d., plaques amyloïde, enchevêtrements neurofibrillaires et atrophie hippocampique) et le rythme de progression vers la MA (Rothman et Mattson, 2010; Wilson, 2006). De plus, le stress chronique est une condition sous-jacente à plusieurs autres facteurs de risque de la MA (Tortosa-Martinez et al., 2012), dont la dépression (Checkley, 1996; Daulatzai, 2014), les conditions cardiovasculaires (Batelaan, Seldenrijk, Bot, van Balkom et Penninx, 2016), le diabète (Nader, Chrousos et Kino, 2010), l’obésité (Sinha et Jastreboff, 2013) et l’inactivité physique (Kyrou et Tsigos, 2009). Compte tenu de ces constats, ce projet de mémoire doctoral propose une étude randomisée-contrôlée concernant des approches non pharmacologiques novatrices, soit une intervention basée sur la pleine conscience (IBPC) et une intervention basée sur la psychoéducation (IBPE), pour diminuer le stress des adultes âgés considérés à risque d’évolution vers la MA. La prochaine section présente la nomenclature et les critères diagnostiques permettant d’identifier le stade prodromique de la MA.

Description du trouble cognitif léger amnésique

De manière générale, le trouble cognitif léger (TCL) est défini comme un stade entre le vieillissement normal et la démence (Petersen, 2004). Le TCL est caractérisé par un déclin cognitif plus important que ce qui est attendu pour l’âge et le niveau de scolarité, mais qui n’interfère pas significativement avec le fonctionnement (Petersen, 2004). Petersen (2004) propose deux sous-types principaux de TCL, soit le trouble cognitif léger amnésique (TCLa) et le trouble cognitif léger non amnésique (TCLna). Chaque sous-type peut être distingué par une atteinte dans un seul domaine cognitif ou dans de multiples domaines (voir l’Annexe A pour une représentation schématique de l’algorithme décisionnel des différents sous-types de TCL).

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Selon le National Institute of Aging et l’Alzheimer Association (NIA-AA) ainsi que les écrits de Petersen, le TCLa peut représenter le stade prodromique de la MA (Albert et al., 2011; Petersen, 2004; Petersen et al., 2001) (voir l’Annexe B pour une représentation visuelle de la position du stade de TCLa dans le décours temporel du déclin cognitif menant à la MA). Les critères diagnostiques du TCLa sont : (a) une inquiétude concernant la survenue d’un changement au niveau cognitif, provenant du patient, d’un proche ou du clinicien; (b) un trouble objectivé dans un ou plusieurs domaines cognitifs dont la mémoire épisodique (c.-à-d., -1.5 écart-type et moins sous la moyenne des personnes de même âge et de même niveau de scolarité); (c) une préservation générale de l’autonomie fonctionnelle bien que certaines tâches plus complexes puissent être plus difficiles à accomplir qu’auparavant (p.ex., payer les comptes); et (d) une absence de diagnostic clinique de démence ou de causes vasculaires, traumatiques ou médicales pouvant induire un trouble cognitif (Petersen, 2004). Pour améliorer la précision du diagnostic de TCLa, il est suggéré d’évaluer la présence d’un déclin cognitif progressif, ainsi que d’anomalies génétiques et de biomarqueurs associés à la MA (c.-à-d., un ou deux allèles ε4 sur l’apolipoprotéine E ou APOE ε4, dépôt de plaques amyloïde, enchevêtrements neurofibrillaires et atrophie hippocampique) (Albert et al., 2011).

Les adultes âgés présentant un TCLa forment un sous-groupe à haut risque d’évolution vers la MA. En clinique chaque année, entre 10 et 15 % des patients avec un TCLa développent la MA, en comparaison à un taux annuel de 1 à 2 % dans la population générale (Petersen et al., 2001). Environ 75% des adultes âgés avec TCLa évoluent vers le stade de la démence dû à la MA. Quant aux patients ayant un TCLna, ils sont plus à risque d’évoluer vers une démence de type frontotemporale ou à corps de Lewy que vers la MA (Gauthier et al., 2006). Pour ces raisons, les adultes âgés ayant un TCLa représentent la population d’intérêt dans le cadre de ce mémoire doctoral.

Caractéristiques cognitives du TCLa. Comme la MA, le TCLa est caractérisé au plan cognitif par une atteinte centrale de la mémoire épisodique qui implique la capacité à apprendre et à retenir de nouvelles informations (Albert et al., 2011). Plus spécifiquement, l’atteinte de la mémoire épisodique affecte l’encodage des informations dans leur contexte

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spatio-temporel. Cela entraine des difficultés de récupération qui s’observent aux tâches de rappel libre, de rappel indicé et de reconnaissance lors de l’évaluation neuropsychologique (Belleville, Sylvain-Roy, de Boysson et Ménard, 2008; Hudon, Belleville et Gauthier, 2008). Le TCLa peut aussi comporter des déficits dans d’autres domaines cognitifs (c.-à-d., TCLa multidomaines) tels que la mémoire sémantique (Joubert et al., 2008), la mémoire de travail (Belleville et al., 2008), le langage (Taler et Phillips, 2008), les fonctions exécutives (Johns et al., 2012) et les capacités visuospatiales (Miloto et al., 2013).

Caractéristiques neuropathologiques du TCLa. Un des premiers changements neuropathologiques du TCLa est l’atrophie de l’hippocampe et du cortex entorhinal, deux régions impliquées dans la mémoire épisodique (Masdeu, Zubieta et Arbizu, 2005; Weiner et al., 2015). Stoub, Rogalski, Leurgans, Bennett et deToledo-Morrell (2010) ont démontré que les déficits de mémoire épisodique typiques du TCLa sont associés à l’atrophie progressive de ces deux régions cérébrales1. Il existe également plusieurs biomarqueurs considérés comme des prédicteurs de déclin du TCLa vers la MA. Ceux-ci incluent l’atrophie de l’hippocampe, mais également la présence d’APOE ε4, ainsi que le dépôt de plaques amyloïdes et d’enchevêtrements neurofibrillaires (Albert et al., 2011; Apostolova et al., 2006; Fan, Batmanghelich, Clark, Davatzikos, et Alzheimer’s Disease Neuroimaging, 2008; Jack et al., 1999).

Caractéristiques neuropsychiatriques du TCLa. Différentes manifestations neuropsychiatriques accompagnent 35 à 75% des cas de TCLa (Apostolova et Cummings, 2008). Les plus prévalentes sont les symptômes anxieux et dépressifs, l’apathie, l’irritabilité et les perturbations du sommeil (Apostolova et Cummings, 2008; Beaulieu-Bonneau et Hudon, 2009; Di Iulio et al., 2010; Hwang, Masterman, Ortiz, Fairbanks et Cummings, 2004). Cette sémiologie est similaire à celle observée dans la MA et son ajout au diagnostic de TCLa renforce le risque de déclin vers la phase de démence de la pathologie (Edwards, Spira, Barnes et Yaffe, 2009; Modrego et Ferrandez, 2004). Mah, Binns et Steffens (2015)

1 Il est à noter que d’autres anomalies structurales et fonctionnelles peuvent être associées aux déficits

cognitifs du TCLa telles que l’atrophie du cortex cingulaire postérieur et de l’amygdale (Chetelat et al., 2002; Fan et al., 2008), ainsi que des hyperintensités de la matière blanche des circuits fronto-sous-corticaux (Whitwell et al., 2007; Whitwell et al., 2008),mais ceux-ci ne sont pas le focus de ce mémoire doctoral.

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ont démontré que parmi ces manifestations neuropsychiatriques, les symptômes anxieux représentent un prédicteur de la progression du TCLa vers la MA et ce, indépendamment des symptômes dépressifs, des déficits de mémoire épisodique et de l’atrophie cérébrale. Ces résultats sont appuyés empiriquement par les études de Palmer et al. (2007) et Somme, Fernández, Martínez, Molano et Zarranz (2013).

Le Chapitre 1 présente une revue de littérature sur les liens entre le stress psychologique, son impact au plan physiologique et le TCLa. Dans le contexte de ce mémoire doctoral, l’expression «stress au plan psychologique» englobe les symptômes anxieux et le stress perçu. L’expression «stress au plan physiologique» désigne la sécrétion de l’hormone de stress cortisol par les glandes surrénales en réponse à un stresseur.

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CHAPITRE 1. STRESS ET TROUBLE COGNITIF LÉGER AMNÉSIQUE 1.1 Stress psychologique et TCLa

Les symptômes anxieux figurent parmi les trois manifestations neuropsychiatriques les plus fréquentes dans le TCLa qui incluent aussi les symptômes dépressifs et apathiques (Di Iulio et al., 2010; Edwards et al., 2009; Ellison, Harper, Berlow et Zeranski, 2008; Hwang et al., 2004; Palmer et al., 2007). Leur prévalence est d’environ 40 % (Edwards et al., 2009; Palmer et al., 2007), mais a atteint jusqu’à 75% dans certaines études (Rozzini et al., 2009; Rozzini et al., 2008). Ainsi, depuis quelques années, diverses équipes de recherche s’intéressent à l’implication des symptômes anxieux dans le TCLa afin d’obtenir une compréhension plus juste de la nosologie de cette condition et envisager des cibles d’intervention.

En 2003, Forsell, Palmer et Fratiglioni ont démontré que les symptômes anxieux sont associés avec le diagnostic de TCLa. De fait, ces symptômes anxieux ont été identifiés chez 10 % des participants avec un TCLa en comparaison à 3,5% des participants sans TCLa. Aucune association significative n’a été observée entre les symptômes dépressifs et la présence du diagnostic de TCLa (Forsell et al., 2003). Une étude longitudinale de Palmer et al. (2007) a révélé que même en présence de symptômes dépressifs, uniquement les symptômes anxieux sont liés au risque d’évolution future du TCLa vers la MA. Plus précisément, 83,3% des participants ayant un TCLa et des symptômes anxieux ont développé la MA sur une période de trois ans, en comparaison avec 40,9% pour les participants ayant un TCLa sans symptômes anxieux (Palmer et al., 2007). Les chercheurs ont aussi observé que plus le nombre de symptômes anxieux est élevé chez les participants avec un TCLa, plus le risque de MA augmente. Wilson et al. (2011) se sont intéressés aux liens entre le trait de personnalité de névrotisme (c.-à-d., propension à ressentir des émotions négatives) et la MA car au stade du vieillissement, ce trait est associé à des risques plus élevés de développer un TCLa et la MA (Wilson et al., 2003; Wilson et al., 2007). Les résultats de cette étude indiquent que parmi les différentes facettes du névrotisme, c’est-à-dire l’anxiété, la vulnérabilité au stress, la dépression, l’impulsivité, l’hostilité et la conscience de soi, seules l’anxiété et la vulnérabilité au stress sont associées

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significativement avec le déclin du fonctionnement cognitif global et l’évolution vers la MA (Wilson et al., 2011).

Rosenberg et al. (2011) ont comparé les manifestations neuropsychiatriques entre les différents sous-types de TCL. Leur étude a montré que la sévérité des symptômes anxieux est significativement plus élevée pour les adultes âgés ayant un TCLa que ceux ayant un TCLna (Rosenberg et al., 2011). Suite à ces résultats, Andreescu et al. (2014) ont tenté de préciser la nature des symptômes anxieux associés aux différents sous-types de TCL. Les chercheurs ont développé des questions spécifiques aux symptômes anxieux et classé les participants avec TCLa et TCLna selon trois profils anxieux en fonction de leurs réponses (c.-à-d., inquiétudes légères et chroniques, symptômes anxieux récents et symptômes anxieux sévères et chroniques)2. Les résultats obtenus indiquent que les symptômes anxieux sévères et chroniques, présents chez 25% des participants, sont associés à tous les sous-types de TCL, mais particulièrement au TCLa. Les symptômes anxieux sévères et chroniques sont corrélés aux déficits cognitifs dans tous les domaines mesurés (c.-à-d., mémoire, attention, langage, fonctions exécutives et visuospatiales) (Andreescu et al., 2014). Les inquiétudes légères et chroniques ne sont pas associées avec l’un des sous-types de TCL et les symptômes anxieux récents sont liés au TCLna (Andreescu et al., 2014).

Au plan neuropathologique, Ramakers et al. (2013) ont observé que les symptômes anxieux sont reliés à des concentrations anormales des biomarqueurs de la MA (c.-à-d., Aβ42 et t-tau) dans le liquide céphalo-rachidien des adultes âgés avec un TCLa. De plus, Pietrzak et al. (2015) ont rapporté que les symptômes anxieux accélèrent le déclin cognitif et ce, indépendamment de l’âge, du niveau d’éducation, du quotient intellectuel, de la présence d’APOE ε4, des symptômes dépressifs, des plaintes mnésiques subjectives et des

2 Dans l’étude d’Andreescu et al. (2014), les symptômes anxieux récents sont évalués par des réponses

affirmatives aux questions : «Diriez-vous que vous êtes une personne inquiète ? Diriez-vous que cela est apparût récemment ?». Les inquiétudes légères et chroniques sont évaluées par une réponse affirmative à la question : « Diriez-vous que vous êtes une personne inquiète ?» et négative à la question : «Diriez-vous que vous devenez facilement nerveux ou préoccupé ?». Les symptômes anxieux sévères et chroniques sont évalués par des réponses affirmatives aux questions : « Diriez-vous que vous êtes une personne inquiète ? Diriez-vous que vous devenez facilement nerveux ou préoccupé ? ».

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facteurs de risque vasculaires. Il semble que les symptômes anxieux soient également corrélés à la progression de l’atrophie du cortex entorhinal (Mah et al., 2015).

Dans l’ensemble, les résultats de ces études appuient l’importante prévalence des symptômes anxieux dans le TCLa ainsi qu’une possible association entre ceux-ci et l’évolution vers la MA. Plusieurs chercheurs proposent que les symptômes anxieux augmentent les risques de MA via des effets neurotoxiques des hormones de stress (Andrescu et al., 2014; Mah et al., 2015; Pietrzak et al., 2015).

1.2 Stress physiologique et TCLa

Les stimuli physiques ou psychologiques interprétés comme dangereux, nouveaux, imprévisibles, incontrôlables ou menaçants pour l’égo (Dickerson et Kemeny, 2004; Mason, 1968) peuvent déclencher la réponse physiologique de stress qui permet à l’organisme de mobiliser ses ressources pour répondre aux stresseurs (McEwen, 2007). Cette réponse physiologique implique l’activation de l’axe hypothalamique-pituitaire-surrénal (HPS), soit une cascade endocrine menant à la libération du cortisol, une hormone de stress, via les glandes cortico-surrénales (Lupien, McEwen, Gunnar et Heim, 2009). Une fois libéré, le cortisol se lie aux récepteurs à glucocorticoïdes présents au niveau de plusieurs organes et structures cérébrales. Puis, le cortisol effectue une rétroaction négative au niveau de l’hippocampe, une région cérébrale riche en récepteurs à glucocorticoïdes (King et Hegadoren, 2002). Cette dernière étape permet l’arrêt de la réponse de stress et le retour au calme de l’organisme (voir la Figure 3 de l’Annexe C pour les étapes détaillées de l’activation de l’axe HPS). Néanmoins, l’exposition prolongée au cortisol peut s’avérer neurotoxique, notamment au niveau de l’hippocampe, et ainsi nuire à l’arrêt de la réponse physiologique de stress.

En contexte de recherche, le cortisol est reconnu comme un biomarqueur du stress et est collecté via la salive, le plasma sanguin ou l’urine (Levine, Zagoory-Sharon, Feldman, Lewis et Weller, 2007). Les études s’intéressent plus particulièrement au taux de cortisol diurne ou à la réponse d’éveil cortisolaire (RÉC), deux mesures pouvant être influencées par le stress psychologique chronique ou excessif (Smyth et al., 1998; van Eck, Berkhof, Nicolson et Sulon, 1996). Le taux de cortisol diurne est mesuré à l’aide de

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plusieurs échantillons répartis durant la journée et permet d’observer le cycle de sécrétion de cette hormone qui suit un rythme circadien (Smyth et al., 1997). La RÉC est déterminée en comparant le taux de cortisol au lever et le taux de cortisol 15 à 45 minutes plus tard. La RÉC est caractérisée par une élévation du cortisol pouvant refléter un état de bien-être ou de mal-être physique et psychologique (Clow, Thorn, Evans et Hucklebridge, 2004; Pruessner et al., 1997).

Wolf, Convit, Thorn et de Leon (2002) ont réalisé une des premières études visant à évaluer le taux de cortisol salivaire diurne des adultes âgés avec un TCLa. Les résultats n’ont révélé aucune différence significative entre le taux de cortisol salivaire diurne des participants avec un TCLa et celui des participants sains. Les chercheurs expliquent que la petite taille de l’échantillon a pu limiter l’atteinte d’un seuil significatif pour cette mesure. Par ailleurs, Wolf et al. (2002) ont rapporté une association entre un taux de cortisol salivaire diurne élevé et des performances mnésiques faibles au test de rappel immédiat de paragraphes parmi les participants ayant un TCLa (Wolf et al., 2002). Au sujet des effets du cortisol sur la mémoire, Souza-Talarico, Chaves, Lupien, Nitrini et Caramelli (2010) ont aussi observé une association négative entre le taux de cortisol salivaire diurne et les performances en mémoire déclarative chez les adultes âgés ayant un TCLa. À l’inverse, une association positive entre le taux de cortisol salivaire diurne et la mémoire déclarative a été rapportée pour les adultes âgés sains et ce, pour des niveaux de cortisol similaires. Pour expliquer ces résultats, les chercheurs se basent sur l’étude de Diamond, Bennett, Fleshner et Rose (1992) qui propose une relation en U inversé entre le fonctionnement de la mémoire et le cortisol. Le fonctionnement de la mémoire se trouve donc altéré lorsque les récepteurs à cortisol de l’hippocampe sont hypo- ou hyper- saturés (Diamond et al., 1992). Dans le TCLa, la région de l’hippocampe est atrophiée, sous-entendant une diminution du nombre de récepteurs à cortisol (Souza-Talarico et al., 2010). Ainsi, une moindre dose de cortisol est suffisante pour saturer les récepteurs et altérer les processus mnésiques pris en charge par l’hippocampe chez les adultes âgés atteints d’un TCLa en comparaison avec les adultes âgés sains (Souza-Talarico et al., 2010). Les chercheurs suggèrent donc que le TCLa puisse être caractérisé par un seuil critique au-delà duquel le cortisol devient délétère

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pour la mémoire et qui serait plus bas que la norme (Souza-Talarico et al., 2010). Peavy et al. (2009) ajoutent que les adultes âgés avec un TCLa sont plus vulnérables aux effets néfastes du stress psychologique et physiologique que les adultes âgés sains, en raison d’une fragilité cérébrale possiblement due à la MA en évolution.

Lind, Edman, Nordlund, Olsson et Wallin (2007) ont démontré que 15 minutes après le lever, les adultes âgés atteints d’un TCLa présentent une RÉC plus élevée que les adultes âgés sains et ce, même après la prise orale de dexamethasone3. Bien que les données scientifiques soient mitigées concernant la signification d’une RÉC anormalement élevée, celle-ci a été le plus souvent associée au stress chronique, à un haut niveau de stress perçu et à la dépression (Checkley, 1996; Chida et Steptoe, 2009; Pruessner, Hellamer et Kirschbaum, 1999; Wüst, Federenkol, Hellamer, Kirschbaum, 2000). En somme, les résultats de Lind et al. (2007) suggèrent une perturbation du fonctionnement de l’axe HPS et un déficit d’arrêt de la réponse de stress chez les adultes âgés avec un TCLa. Les résultats de l’étude de Souza-Talarico, Chaves, Nitrini et Caramelli (2009) appuient ces conclusions en démontrant que les adultes âgés avec un TCLa et un haut niveau de stress psychologique présentent des taux de cortisol salivaire diurne plus élevés que les adultes âgés sains.

Des équipes de recherche se sont intéressées aux liens entre le stress psychologique, le cortisol et la progression vers la MA. Selon Peavy et al. (2012), une faible RÉC est associée à l’évolution du statut de contrôle sain à celui de TCLa, tandis que les expériences stressantes prolongées sont davantage reliées à la transition du TCLa vers la MA. Les chercheurs proposent que les anomalies dans l’activation de l’axe HPS et la sécrétion de cortisol font partie intégrante ou reflètent la présence de processus neuropathologiques précoces de la MA (Peavy et al., 2012). De leur côté, Popp et al. (2015) ont démontré que les adultes âgés atteints d’un TCLa ou de la MA présentent des concentrations de cortisol

3 Le dexamethasone est un glucocorticoïde synthétique similaire au cortisol. Il est utilisé en recherche pour le

test de suppression du dexamethasone, qui mesure la capacité de l’organisme à désactiver l’axe HPS et donc, la sécrétion de cortisol. Une réponse normale au test de suppression du dexamethasone implique donc la diminution du taux de cortisol. La non-diminution ou l’élévation du taux de cortisol signifie un dysfonctionnement dans l’arrêt de l’axe HPS et de la sécrétion des substrats endocriniens (Wisse, 2013).

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plus élevées dans le liquide céphalo-rachidien que ceux avec un TCLna ou en bonne santé. Le taux plus élevé de cortisol chez les adultes âgés TCLa est associé à un déclin cognitif et fonctionnel plus rapide (Popp et al., 2015). Popp et al. (2015) concluent que la sécrétion accrue de cortisol est impliquée dans le processus neuropathologique de la MA, qu’elle est observable dès le stade prodromique du TCLa et que sa présence accélère la progression de la pathologie.

1.3 Hypothèses explicatives

À cet égard, deux hypothèses principales, soit la réactivité face aux pertes mnésiques et la neurotoxicité due au stress, ont été proposées pour tenter d’expliquer les liens entre le stress psychologique et physiologique, le TCLa et la progression accélérée vers la MA. Les deux catégories d’hypothèses sont présentées dans les sections suivantes afin d’offrir une perspective globale et nuancée.

1.3.1 Hypothèse de la réactivité face aux pertes mnésiques. Steeman, de Casterlé, Godderis et Grypdonck (2006) suggèrent que le stress psychologique découle d’une réaction face aux pertes mnésiques qui accompagnent le TCLa. Aux stades du TCLa ou de la MA légère, la conscience des pertes mnésiques menace la perception de sécurité, d’autonomie et de contrôle sur la vie, ce qui génère de nombreuses inquiétudes envers le futur (Steeman et al., 2006). D’ailleurs, selon Forsell et al. (2003), la méfiance est un symptôme anxieux fortement associé au TCLa pouvant refléter le sentiment de perte de contrôle liée au déclin mnésique. Les adultes âgés avec un TCLa tentent d’utiliser des stratégies d’adaptation pour s’ajuster aux changements cognitifs et aux perceptions de perte de sécurité, d’autonomie et de contrôle. Or, les déficits mnésiques du TCLa peuvent nuire à l’utilisation de stratégies adaptatives pour faire face à ces changements, ce qui affecte la confiance en soi et amplifie le stress psychologique en générant des inquiétudes, des pensées dévalorisantes, des peurs et des frustrations (Joosten-Weyn Banningh, Vernooij Dassen, Rikkert et Teunisse, 2008; Steeman et al., 2006). L’étude de Souza-Talarico et al. (2009) montre que les adultes âgés avec un TCLa qui utilisent des stratégies d’adaptation dysfonctionnelles (p.ex., blâme) présentent des niveaux de stress psychologique et des taux de cortisol salivaire diurne plus élevés. De plus, leurs plaintes mnésiques subjectives sont

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corrélées positivement avec leur niveau de stress psychologique. Les chercheurs font remarquer que les adultes âgés avec un TCLa sont exposés quotidiennement à des difficultés en lien avec leur mémoire défaillante. Ces difficultés peuvent mener à une anticipation constante de conséquences négatives, ce qui risque d’accentuer le stress psychologique et de déclencher la réponse physiologique de stress, augmentant ainsi le taux de cortisol (Souza-Talarico et al., 2009). Néanmoins, il semble que les adultes âgés qui utilisent des stratégies d’adaptation fonctionnelles centrées sur les problèmes (p.ex., planification de solutions) présentent moins de stress au plan psychologique et physiologique (McIlvane, Popa, Robinson, Houseweart et Haley, 2008; O'Donnell, Badrick, Kumari et Steptoe, 2008; Souza-Talarico et al., 2009).

1.3.2 Hypothèse de la neurotoxicité. D’autres études suggèrent que le stress au plan psychologique et physiologique n’est pas seulement une réaction face aux pertes mnésiques du TCLa, mais représente en lui-même un facteur de risque pour la MA (Andreescu et al., 2014; Mah et al., 2015; Pietzrak et al., 2015; Rothman et Mattson, 2010). L’hypothèse de la cascade glucocorticoïde élaborée par Sapolsky, Krey et McEwen (1986), renommée l’hypothèse de la neurotoxicité par Gilbertson et al. (2002), propose que le stress psychologique chronique accélère le processus de déclin cognitif via l’hyperactivation de l’axe HPS et l’hypersécrétion de cortisol. Étant donné que les neurones de l’hippocampe, riches en récepteurs à glucocorticoïdes, sont particulièrement vulnérables aux effets neurotoxiques de cette hormone de stress, ceux-ci deviennent progressivement moins résistants aux atteintes cérébrales associées au vieillissement normal et au processus neuropathologique de la MA (Lupien et al., 2009; McEwen, 1999; Sapolsky et al., 1986). Par conséquent, les dommages neuronaux de l’hippocampe perturbent l’arrêt de la réponse physiologique de stress ce qui favorise l’hyperactivation de l’axe HPS, l’hypersécrétion de cortisol et la neurodégénérescence graduelle de l’hippocampe (McEwen, 2007). La présence de ce cercle vicieux est associée au vieillissement cellulaire accéléré (Wolkowitz, Epel, Reus et Mellon, 2010), à l’atrophie de structures cérébrales importantes pour l’apprentissage et la mémoire (McEwen, 2007), au dépôt de plaques amyloïdes et d’enchevêtrements neurofibrillaires (Rothman et Mattson, 2010; Toledo et al., 2012) et à la

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réduction de la neurogénèse (Daulatzai, 2014; Lupien et al., 2009). De surcroît, en raison du vaste potentiel d’action du cortisol, l’hypersécrétion de cette hormone nuit aussi à l’intégrité systémique de l’organisme. En effet, l’exposition excessive et prolongée au cortisol peut être liée à la dépression (Butters et al., 2008; Checkley, 1996), à l’inflammation (Reader et al., 2015), ainsi qu’aux conditions cardiovasculaires et métaboliques (Kyrou et Tsigos, 2009), tous des facteurs de risque modifiables de la MA (Tortosa-Martinez et Clow, 2012). Cette cascade d’effets délétères provoquée par la présence chronique du stress psychologique et physiologique crée une surcharge allostatique4 pour l’organisme qui augmente les risques d’évolution vers la MA (Larouche, Hudon et Goulet, 2015; McEwen, 2007, Tortosa-Martinez et Clow, 2012).

1.3.4 Intégration des deux hypothèses. Plusieurs écrits scientifiques se basent sur l’hypothèse de la neurotoxicité pour expliquer l’impact du stress psychologique et physiologique dans le TCLa et la MA. Le fait est que l’hippocampe est l’un des premiers sites affectés par la neuropathologie et il est impliqué à la fois dans la mémoire et dans l’arrêt de la réponse physiologique de stress (Huang et al., 2009; Lupien et al., 2009; Peavy et al., 2009; Peavy et al., 2012; Popp et al., 2015). Toutefois, trop de questionnements demeurent pour exclure l’hypothèse de la réactivité face aux pertes mnésiques. Il semble donc pertinent d’intégrer les explications proposées par les deux hypothèses afin d’en former une seule se détaillant ainsi : à prime à bord le stress chronique au plan psychologique et physiologique peut représenter un facteur de risque majeur pour le déclin cognitif associé au TCLa et la MA et, par la suite, la prise de conscience des pertes mnésiques associées au TCLa peut déclencher ou exacerber une réaction de stress (c.-à-d., présence de symptômes anxieux, activation de l’axe HPS et sécrétion de cortisol). En raison du caractère modifiable du stress psychologique et physiologique, plusieurs chercheurs

4 Le terme allostasie désigne le processus par lequel l’organisme répond et s’adapte aux stresseurs quotidiens

pour maintenir l’équilibre (Sterling et Eyer, 1988). Or, le stress chronique ou excessif peut engendrer une surcharge allostatique, c’est-à-dire une incapacité de l’organisme à déployer une réponse adéquate pour s’adapter et retrouver l’équilibre. Les mécanismes de régulation de la réponse physiologique de stress se débalancent et il en résulte diverses conséquences néfastes tant au plan cérébral que systémique (McEwen, 2007).

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s’accordent sur l’importance d’instaurer des interventions pouvant agir sur ces deux facteurs, contrer leurs effets délétères et diminuer le risque d’évolution future du TCLa vers la MA (Huang et al., 2009; Matousek, Dobkin et Pruessner, 2010; Pietrzak et al. 2015; Popp et al., 2015; Rothman et Mattson, 2010; Tortosa-Martinez et Clow, 2012).

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CHAPITRE 2. LES INTERVENTIONS BASÉES SUR LA PLEINE CONSCIENCE 2.1 Description des IBPC

Les IBPC sont de plus en plus étudiées et considérées dans l’optique de prévenir le déclin cognitif associé aux maladies neurodégénératives telles que la MA (Innes et Selfe, 2014; Larouche et al., 2015; Marciniak et al., 2014; Sapozhnikov, 2015). En effet, les IBPC sont accessibles aux adultes âgés présentant des limitations physiques ou cognitives, sont peu coûteuses à instaurer et s’administrent en groupe plutôt qu’en format individuel (Lenze et al., 2014; Wells, Kerr et al., 2013). De plus, l’enseignement des attitudes de pleine conscience ainsi que des méthodes contemplatives pourraient permettre aux adultes âgés avec un TCLa de poursuivre une existence riche et empreinte de sens en dépit des difficultés cognitives et d’un pronostic incertain. Les IBPC représentent aussi une approche holistique pouvant agir sur divers facteurs de risque modifiables de la MA (Marciniak et al., 2014), dont le stress psychologique (Sharma et Rush, 2014) et physiologique (O’Leary, O’Neill et Dockray, 2015), la dépression (Hofmann, Sawyer, Witt et Oh, 2010), l’inflammation (Rosenkranz et al., 2013) et les conditions cardiovasculaires et métaboliques (Loucks et al., 2015). Sapozhnikov (2015) ajoute que, via ces effets bénéfiques, les IBPC peuvent optimiser la réserve cérébrale-cognitive, un facteur de protection important contre le déclin cognitif et la neuropathologie de la MA5.

Les IBPC découlent du programme Mindfulness Based Stress Reduction de Kabat-Zinn, développé à la Clinique de réduction du stress du Centre médical de l’Université du Massachusetts. Globalement, la pratique de pleine conscience consiste à porter une attention stable et dénuée de jugement sur le moment présent par le biais de quatre pratiques formelles : le balayage corporel, les mouvements conscients, la méditation assise et marchée (Kabat-Zinn, 1990). À travers ces pratiques, les individus sont invités à centrer leur attention sur un objet externe (p.ex., des stimuli sonores ou visuels) ou interne (p.ex.,

5 Le concept de réserve cérébrale-cognitive réfère à la complexité et à l’efficacité neuronale, au volume

cérébral maximal et aux capacités cognitives protectrices contre le déclin fonctionnel. La réserve cérébrale-cognitive permet de maintenir la plasticité et d’augmenter la résistance des neurones aux dommages cérébraux (Satz, 1993; Stern, 2002; Stern, 2006).

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les sensations corporelles associées à la respiration ou affectant toute partie du corps) et à se ramener à celui-ci chaque fois que l’attention s’en détourne (Kabat-Zinn, 1990). Les capacités attentionnelles sollicitées par les pratiques méditatives des IBPC sont la vigilance, l’attention soutenue et le contrôle exécutif (p.ex., décider consciemment de désengager l’attention des pensées pour la diriger vers la respiration) (Hasenkamp, Wilson-Mendenhall, Duncan et Barsalou, 2012).

Les IBPC offrent un programme se déroulant typiquement sur huit semaines, qui comprend une rencontre hebdomadaire d’une durée de 2h30. Les rencontres se déroulent en groupe, ce qui favorise l’accès et la création de liens sociaux pour les adultes âgés qui éprouvent souvent de la solitude et de l’isolement (Creswell et al., 2012). Au fil de ces rencontres, les individus sont initiés aux pratiques méditatives formelles et aux différentes attitudes de pleine conscience, soit le non-jugement, le non-effort, l’acception, la patience, l’esprit du débutant, la confiance et le lâcher-prise (Kabat-Zinn, 1990). En fonction des besoins spécifiques de la population-cible, des segments éducatifs sont incorporés au programme comme la gestion du stress, des sensations douloureuses, des ruminations, etc. En dehors des rencontres de groupe, les individus effectuent les méditations formelles à domicile six jours par semaine au moyen d’un support écrit ou audio. D’une part, les exercices à domicile permettent de pratiquer les différentes méditations enseignées en groupe et, d’autre part, ils offrent des outils visant à développer la capacité à vivre plus souvent avec une bonne présence attentive (p.ex., demeurer vigilant et attentif pendant la prise d’un repas ou des routines d’hygiène), ce qui constitue la pratique informelle de pleine conscience.

2.2 Effets des IBPC sur le stress psychologique

Les effets bénéfiques des IBPC sur le stress psychologique ont été démontrés auprès de diverses populations, entre autres les adultes âgés souffrant de symptômes anxieux ou dépressifs (Foulk, Ingersoll-Dayton, Kavanagh, Robinson et Kales, 2013), d’un trouble cognitif subjectif (Lenze et al., 2014), d’un TCLa (Wells, Kerr et al., 2013) ou de la MA (Innes, Selfe, Brown, Rose et Thompson-Heisterman, 2012). L’étude de Foulk et al. (2013), incluant 50 adultes âgés avec symptômes dépressifs et anxieux, a rapporté une réduction

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significative des symptômes anxieux, des ruminations et des problèmes de sommeil suite à un programme d’IBPC. Les chercheurs ont conclu que les IBPC représentent une approche bénéfique et sécuritaire pour les adultes âgés. De plus, les séances en groupe sont particulièrement appréciées de ceux-ci, car elles favorisent leur habileté à méditer et indirectement leurs occasions de contacts sociaux. L’étude de Lenze et al. (2014) réalisée auprès de 34 adultes âgés ayant un trouble cognitif subjectif a montré que l’IBPC diminue la sévérité des inquiétudes et augmente les habiletés de pleine conscience. Six mois post-IBPC, les participants ont rapporté maintenir les pratiques méditatives apprises, dont notamment la méditation sur la respiration, et en bénéficier lors de situations stressantes. L’étude de Wells, Kher et al. (2013) est particulièrement pertinente en lien avec ce mémoire doctoral car leur programme d’IBPC a été administrée auprès de la population d’intérêt, soit des adultes âgés avec TCLa. Les résultats des entrevues qualitatives sont à l’effet que les participants ont apprécié l’IBPC et ont perçu une amélioration de leur bien-être, une plus grande acceptation et conscience de leurs troubles cognitifs et une réduction de leur réactivité face au stress. De leur côté, Innes et al. (2012) ont démontré des effets positifs d’une IBPC sur le stress perçu, l’humeur et le sommeil des adultes âgés atteints de la MA. En somme, ces études appuient l’efficacité des IBPC pour diminuer le stress psychologique ainsi qu’augmenter le bien-être de ces populations âgées (Innes et al., 2012; Foulk et al., 2013; Lenze et al., 2014; Wells, Kerr et al., 2013).

2.3 Impacts des IBPC sur le stress physiologique

Les effets des IBPC sur le stress psychologique se répercutent au plan physiologique et d’ailleurs, Matousek et al. (2010) suggèrent que le cortisol représente un biomarqueur pertinent pour déterminer l’efficacité objective des IBPC sur cette variable. La majorité des études sur les effets des IBCP sur le cortisol ont été réalisées auprès d’adultes atteints ou en rémission d’un cancer (O’Leary et al., 2015). Entre autres, Carlson, Speca, Patel et Goodey (2004) ont observé une normalisation du taux de cortisol salivaire diurne chez des adultes atteints d’un cancer du sein ou de la prostate suite à une IBPC. Autrement dit, les participants ayant des taux plus élevés de cortisol salivaire diurne basal ont subi une diminution et les participants ayant de faibles taux de cortisol salivaire diurne basal ont subi

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une augmentation (Carlson et al., 2004). Des effets similaires ont été démontrés par Bränström, Kvillemo et Akerstedt (2013) en ce qui concerne le taux de cortisol salivaire au lever d’adultes atteints de cancer. De leur côté, Matousek, Pruessner et Dobkin (2011) ont observé une élévation de la RÉC post-IBPC chez 33 femmes ayant complété un traitement pour le cancer du sein et présentant une RÉC basale émoussée, un changement interprété comme indicateur d’un meilleur fonctionnement de l’axe HPS. D’autres études ont rapporté une diminution de la RÉC post-IBPC en association avec des variables positives, telles que l’amélioration du sommeil et des habiletés de pleine conscience (Brand, Holsboer Trachsler, Naranjo et Schmidt, 2012; Marcus et al., 2003). En somme, les résultats de ces études suggèrent que les IBPC n’ont pas comme seul potentiel de diminuer le taux de cortisol diurne et la RÉC, mais plutôt celui de normaliser l’activation de l’axe HPS et la sécrétion de cortisol (O’Leary et al., 2015). Ainsi, la pratique de la pleine conscience pourrait représenter un facteur de protection, optimisant la réponse physiologique de stress pour mieux s’adapter aux stresseurs quotidiens (c.-à-d., activation de la réponse physiologique de stress pour répondre adéquatement aux stresseurs et arrêt de celle-ci par la suite). D’ailleurs, O’Leary et al. (2015) proposent que les changements cortisolaires observés suite aux IBPC doivent être interprétés en tenant compte du niveau de base des participants.

2.4 Mécanismes d’action des IBPC

Les bénéfices des IBPC sur le stress psychologique et physiologique semblent associés à des mécanismes d’action qui permettent de développer des ressources pour s’adapter et devenir plus résilient aux stresseurs (Kabat-Zinn, 1990). Cependant, peu d’études ont validé empiriquement les ingrédients essentiels à l’efficacité des IBPC. Les mécanismes d’actions proposés représentent donc des hypothèses.

Une de ces hypothèses concerne la diminution de l’élaboration mentale associée aux pensées anxiogènes. En effet, l’anxiété se manifeste fréquemment sous forme de pensées dirigées vers le futur (p.ex., crainte qu’un incident se produise) qui, subjectivement, apparaissent réalistes et engendrent des émotions négatives (Lebois et al., 2015). À travers les pratiques méditatives des IBPC, les individus s’entraînent à désengager leur attention

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des pensées pour s’ancrer dans le moment présent plutôt qu’anticiper négativement le futur (Bishop, 2002; Kabat-Zinn, 1990; Ngô, 2013). En effet, l’attention est centrée sur un objet prédéterminé appartenant au moment présent, comme les cycles de respiration ou une tension musculaire. Chaque fois que l’attention se détourne de l’objet pour suivre des pensées, le participant reçoit comme instruction d’en prendre rapidement conscience et d’exercer un contrôle volontaire pour rétablir le focus attentionnel sur l’objet. Au fil des pratiques méditatives, le contrôle exécutif s’affermit et un maintien plus prolongé de l’attention devient possible (Hölzel et al., 2011; Wallace, 2006). Selon Ngô (2013), la pratique de la pleine conscience est associée à une meilleure attention soutenue ainsi qu’à une réduction des pensées anxiogènes, médiée par une amélioration de la capacité à s’en désengager lorsqu’elles surviennent. Plus l’aptitude à ne plus suivre et se laisser submerger par les pensées croît, meilleure est la réalisation que les pensées ne sont pas des faits réels mais plutôt des états mentaux transitoires (Lebois et al., 2015; Ngô, 2013). Ce changement de perspective permet de diminuer le réalisme subjectif des pensées anxiogènes et des émotions négatives qui les accompagnent (Lebois et al., 2015).

Les pratiques méditatives des IBPC peuvent aussi améliorer la conscience du stress

(Kabat-Zinn, 1990). En majorité, ces pratiques s’exercent sur le senti associé à la respiration ou aux sensations corporelles qui sont d’excellents indicateurs de l’état émotionnel d’instant en instant (Kabat-Zinn, 1990). Par exemple, face à un stimulus stressant, le corps réagit par des tensions des muscles et une respiration rapide et saccadée (Hölzel et al., 2011). Ainsi, la prise de conscience des sensations corporelles peut renseigner sur la présence de stress et possiblement aider à l’identifier dès ses premiers signes d’apparition.

Certaines pratiques méditatives des IBPC requièrent de porter attention aux évènements, aux sensations, aux émotions, aux pensées, puis aux comportements qui émergent dans le moment présent et ce, même si ceux-ci sont anxiogènes. Ce type de pratiques permet d’accueillir et de prendre conscience de l’état émotionnel tel qu’il est, sans toutefois tenter de le modifier ou d’y réagir. Cette étape de prise de conscience du stress psychologique est primordiale pour être en mesure d’y répondre adéquatement. En effet, les

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pratiques méditatives offrent un temps d’arrêt pour créer une distance entre le stress psychologique et les réactions automatiques déclenchées inconsciemment et le plus souvent dysfonctionnelles, comme la consommation de substances (Levin, Luoma et Haeger, 2015). Cette distance permet d’éprouver un sentiment de contrôle face au stress psychologique et d’y répondre en sélectionnant consciemment des stratégies d’adaptation fonctionnelles comme planifier des solutions (Kabat-Zinn, 1990; Zellner Keller, Singh et Winton, 2014). Cousin et Crane (2015) ont démontré que l’IBPC diminue l’évitement, le blâme et le retrait social. Ce changement dans les stratégies d’adaptation est associé à un affect plus positif (Cousin et Crane, 2015). Inversement, d’autres études indiquent que les IBPC favorisent la réinterprétation positive (c.-à-d., percevoir les stresseurs comme bénéfiques, bénins) et l’acceptation (c.-à-d., accueillir les stresseurs tels qu’ils sont plutôt que les repousser, les nier ou les éviter), de même que l’adoption de stratégies d’adaptation fonctionnelles qui permettent la régulation émotionnelle et une diminution du niveau de stress (Dobkin et Zao, 2011; Garland, Gaylord et Fredrickson, 2011; Ngô, 2013). D’ailleurs, Louks et al. (2015) rapportent que suite à l’IBPC, les participants ayant des maladies chroniques ou des problèmes reliés au stress ont un sentiment de contrôle significativement plus élevé par rapport à leur capacité de gérer leurs conditions.

Au plan physiologique, les IBPC pourraient permettre de diminuer la réactivité de l’axe HPS et la sécrétion du cortisol par le biais de l’exposition (Kabat-Zinn, 1990). En effet, les pratiques méditatives des IBPC requièrent d’explorer avec une curiosité bienveillante les sensations corporelles, les émotions et les pensées et ce, même si elles sont de nature anxiogène. L’objectif est de les accueillir, sans tenter de les modifier ou d’y réagir intérieurement (Hölzel et al., 2011; Kabat-Zinn, 1990). Cette forme d’exposition développe l’acceptation et la tolérance envers les différents stimuli internes et externes anxiogènes qui peuvent habiter le moment présent, ce qui mène progressivement à la diminution de la réponse physiologique de stress (Hölzel et al., 2011). À cet effet, Daubenmier et al. (2014) ont montré que l’acceptation cultivée par la pleine conscience est corrélée négativement avec la RÉC.

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Cette diminution de la réponse physiologique de stress s’observe aussi dans les études qui rapportent que les pratiques méditatives des IBPC sont associées à des indices hypo-métaboliques, tels que le ralentissement du rythme cardiaque (Zeidan, Johnson, Gordon et Goolkasian, 2010), de la pression sanguine (de la Fuente, Franco et Salvator, 2010), et de la respiration (Lazar et al., 2005), ainsi que la réduction de la tension musculaire (Benson, 2000) et de la conductance cutanée (Austin, 2006). Ces changements physiologiques reflètent l’augmentation de l’activité du système nerveux autonome parasympathique responsable de la réponse physiologique de relaxation opposée à la réponse physiologique de stress (Bhasin et al., 2013; Hölzel et al., 2011; Lazar et al., 2000). Selon Bhasin et al. (2013), la réponse physiologique de relaxation peut être élicitée via les pratiques méditatives et représentent un mécanisme d’action pouvant contrer les effets adverses du stress physiologique chronique tels que l’hypertension, le diabète et le déclin cognitif associé au vieillissement.

Enfin, les études d’imagerie par résonance magnétique structurelle et fonctionnelle suggèrent que les IBPC augmentent le volume et l’activation de l’hippocampe (Hölzel et al., 2011; Lazar et al., 2000). Ces changements amélioreraient l’efficacité de l’hippocampe dans l’arrêt de la réponse physiologique de stress. L’étude de Wells, Yeh et al. (2013) portant sur une IBPC destinée aux adultes âgés avec un TCLa rapporte des tendances compatibles avec une diminution de l’atrophie hippocampique, ainsi qu’une optimisation de la connectivité de cette région avec les cortex préfrontal et cingulaire postérieur. De plus, tel que cité à la section 3.2, cette même étude a démontré une réduction des inquiétudes, de la réactivité au stress, ainsi qu’une amélioration du bien-être et de la qualité de vie chez les participants. Ces résultats appuient le potentiel des IBPC et indiquent l’importance de s’attarder à la présence du stress, notamment chez les adultes âgés atteints d’un TCLa qui vivent dans la crainte d’une évolution vers la MA et disposent de peu d’options d’intervention actuellement.

2.5 Les IBPC pour prévenir la MA

Les résultats préliminaires et encourageants de Wells Kherr et al. (2013) et Wells Yeh et al. (2013) justifient la poursuite des travaux sur les IBPC auprès des adultes âgés à

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