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ARTheque - STEF - ENS Cachan | La santé, la maladie et leurs représentations dans nos sociétés pluralistes : un enjeu de formation aujourd'hui

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Academic year: 2021

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LA SANTÉ, LA MALADIE ET LEURS REPRÉSENTATIONS

DANS NOS SOCIÉTÉS PLURALISTES :

UN ENJEU DE FORMATION AUJOURD'HUI

Dominique MAILLARD (1, 2), Françoise BLANCHET-BENQUÉ (2) (1) UMR STEF - E.N.S. Cachan (2) UFR Xavier Bichat, Paris 7

MOTS-CLÉS : ÉDUCATION – SANTÉ – FORMATION – BIO-PSYCHO-SOCIAL – REPRÉSENTATIONS CULTURELLES ET SOCIALES

RÉSUMÉ : Après avoir montré l'importance du rapport individuel à la santé et à la maladie comme élément déterminant de la prise en charge du malade par le médecin, il a été demandé aux participants : 1/d'identifier les éléments cognitifs : connaissances, croyances, représentations, normes sur le corps, la maladie et la santé du citoyen ; 2/de prendre en compte les interactions entre le corps, le psychisme et l’environnement social dans la définition de la santé ; 3/de discuter des enjeux pédagogiques de l'éducation à la santé. Cet atelier permet de valoriser l’éducation à la santé.

ABSTRACT : After showing the importance of the human being's relationship to the health or the illness as a major element of the responsibility of the physician toward the patient, it was required to the participants to : 1/identify the cognitive components : knowledge, beliefs, mental imagery, standards about body, illness or health of the citizens ; 2/integrate the relationship between the

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1. INTRODUCTION

Quelle que soit la définition donnée de la santé, il apparaît aujourd'hui que celle-ci ne peut se réduire à des considérations purement médicales. Au-delà d'une dimension physique (physiologique, biologique), la santé a une dimension psychique et une dimension culturelle et sociale. En conséquence, la santé, notre santé individuelle, mais aussi la santé collective, impliquent des choix pour chacun de nous, en tant que sujet et en tant que citoyen.

La santé et la maladie expriment un rapport immédiat à notre corps, c'est-à-dire à nous-mêmes et à notre histoire personnelle, qu'aucune représentation extérieure ne peut complètement transformer. Nos croyances sur la santé, nos représentations du fonctionnement de notre corps, nos normes sociales et culturelles, influencent nos modes de vie, nos comportements face à la maladie, notre aptitude à parler des changements inhabituels de notre corps, et même les raisons pour lesquelles nous consultons un médecin (Fawzy, 1995).

Cette connaissance du rapport individuel à la santé et à la maladie, élément déterminant de la prise en charge du malade par le médecin, n'est pas enseignée en France. Nous nous sommes interrogées sur les causes de cette carence qui contraste tant avec les discours tenus sur la nécessité de la prévention, de l'éducation à la santé et de l'éducation thérapeutique actuellement en France.

L'éducation à la santé a une finalité pour l'individu et pour le citoyen. Changer de croyances, modifier normes sociales et culturelles sur le corps et la santé nous semble être une étape nécessaire pour la prévention des comportements à risque et pour la prise en charge individuelle et collective de la santé. Dans notre société pluraliste, l'éducation à la santé est un passage de la normalité pour tous à la normativité, passage de l'acceptation passive et inconditionnelle de normes préexistantes à de nouvelles normes qui permettent l'adaptation de l'individu à son milieu (G. Canguilhem). La mise en place, en 1998, dans les établissements scolaires, des Comités d'éducation à la santé et à la citoyenneté, et l'introduction de l'éducation à la santé dans les programmes d'enseignement, marquent une étape importante en milieu scolaire. Toutefois, l'enseignant est-il "éduqué" à modifier ses propres représentations pour une approche plus rationnelle et plus globale de la santé ? L'enseignant, l'infirmière, le médecin, les parents sont-ils prêts à assumer la gestion de normativités contradictoires ?

Cet atelier avait trois objectifs : 1/tester, auprès des experts présents, les outils de formation mis en place auprès d'étudiants en médecine ; 2/définir les composantes de la santé d’un individu. 3/discuter comment utiliser ces connaissances dans l’éducation du citoyen.

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2. DÉROULEMENT DE L'ATELIER

Après avoir montré l'importance du rapport individuel à la santé et à la maladie comme élément déterminant de la prise en charge du malade par le médecin, il a été demandé aux participants : 1. d'identifier les éléments cognitifs : connaissances, croyances, représentations, normes sur le corps, la maladie et la santé du citoyen ; 2. de prendre en compte les interactions entre le corps, le psychisme et l’environnement social pour définir l’état de santé d’un individu ; 3. de discuter des enjeux pédagogiques de l'éducation à la santé, à partir de différents outils (textes "construits" présentant des cas de patients, lecture d'un texte philosophique, extraits de film, présentation de travaux scientifiques).

Les participants occupaient des fonctions pour la plupart de chercheurs, associées ou non à des statuts d'enseignants, doctorants et médecins et étaient de nationalité différentes (Belgique, Brésil, France, Italie, Portugal, Suisse). La constitution des groupes, de façon spontanée, a favorisé le brassage d'opinions.

3. BILAN DE L'ATELIER

3.1 Caractéristiques des productions

La production du groupe s'est réalisée au cours de six activités en liaison avec les trois objectifs énoncés.

1. Utilisation d'histoires de malades

Il s'agit de deux textes, l'un présentant les attitudes sociales et les réactions psychologiques d'une femme après mastectomie, et l'autre présentant les comportements d'un homme issu d'une culture où "on ne parle pas" de certaines parties du corps car plus ou moins liées à des pratiques sexuelles. Ces textes, en amenant les participants à imaginer et à établir des présupposés de dialogues, leur ont permis de faire émerger leurs propres représentations du corps, de la maladie et de la santé. Les participants ont identifié les implications sociales de l'image du corps, la notion de croyance concernant la maladie et l'importance des valeurs traditionnelles.

2. Une lecture philosophique

La lecture d'un texte de Canguilhem a permis d'évoquer, comment l'individu construit sa propre normativité à partir de l'adaptation à son milieu, puis d'analyser la frontière entre santé et maladie,

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Cette lecture clôturait la production relative au premier objectif. Les deux activités suivantes ont permis aux participants de percevoir et d'analyser les éléments nécessaires à la vie et participant à la notion de santé.

3. Des extraits de film

Il s'agissait d'initier une réflexion sur l'importance du dialogue et du contact avec le corps dans la prise en charge d'un malade, même inconscient. Les participants devaient regarder ces images avec la consigne de répondre à la question : "quels sont les messages que le corps enregistre ?". Ces images et ces dialogues n'ont pas été utilisés en interaction et le ressenti des participants n'a pas été sollicité.

4. Présentations de travaux scientifiques

Un résumé des travaux de Rosenberg (1992) et de Mary Carlson et Felton Earls (1997) rapporte l'existence et la grande fréquence de pathologies somatiques et psychiatriques chez des enfants roumains placés en orphelinat pendant la période Ceaucescu. Ils font l'hypothèse du rôle des carences psychoaffectives dans la survenue de ces pathologies. Les auteurs décrivent les mécanismes par lesquels le toucher induit une augmentation de certains neurotransmetteurs cérébraux associée au développement neuronal et montrent comment un taux élevé de glycocorticoïdes, produits par le stress aigu et/ou chronique peut inhiber ces processus. Ils s'appuient sur des travaux antérieurs de Sparling.

Ces présentations voulaient illustrer l'importance des interactions entre corps, psychisme et relations sociales dans l'état de santé d'un individu. Toutefois, elles ont suscité de fortes réactions, parmi les participants, centrées essentiellement sur l'aspect non éthiques de ces recherches. La discussion, qui a suivi, n'a pas permis de discuter du rôle de ces mécanismes dans l'état de santé des enfants actuellement en âge scolaire.

5. Définition de la santé

Les définitions données sont très personnelles. Elles traduisent chez les participants, soit la perception d'un état, soit d'une dynamique. Nous rapportons les définitions proposées : L'absence de maladie et de douleurs - La fonctionnalité des organes - La maîtrise du "mouvement" et la possibilité de faire son travail - Un état optimum de bien-être physique, psychique et social - Un état d'équilibre qui dépend de la totalité de la personne Une autonomie physique, psychique et sociale -Se construire en fonction de sa réalité et de ses rêves dans l'ensemble des circonstances de la vie.

6. Les enjeux pédagogiques

Le débat a été orienté par ces questions : 1/Quels seraient vos choix ? 2/Pour quelle période scolaire ? 3/Comment les élèves peuvent-ils s'approprier ses savoirs et compétences ? 4/Quels

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Tous les groupes de travail s'accordaient à penser qu'une éducation doit amener l'apprenant à choisir des comportements (une disposition à) adaptés aux objectifs de santé. Il s'agit de l'acquisition d'une compétence par opposition à l'acquisition de connaissances. Ces compétences ne peuvent s'acquérir que par l'expérience. L'information ne suffit pas. À l'école, cette éducation demande une formation transdisciplinaire. La participation des parents est requise.

Des différences se sont toutefois exprimées, en fonction de la nationalité, dans la mise en œuvre des programmes. En Suisse, l'éducation se fait à l'extérieur de l'école. En Belgique, un décret fixe clairement le rôle de l'école et chaque établissement définit un projet d'éducation à la santé et à l'environnement. En France, les textes de recommandations produits par l'Éducation Nationale sont ambitieux (MEN 1998). Ils n'indiquent toutefois pas comment faire, privilégiant espérances et intentions.

3.2 Synthèse des discussions

Appartenance à un système de santé :

Il apparaît clairement que les deux systèmes de santé discutés correspondent à deux modèles médicaux différents, le système biomédical et le système biopsychosocial. Dans le premier, la santé est appréhendée comme l'absence de maladie, elle-même définie comme un problème organique (biophysiologique), objectivable, déterminée par une ou plusieurs causes qui doivent être identifiées et traitées. Le second modèle ajoute plusieurs éléments : il existe un continuum entre la santé et la maladie ; la santé y est définie comme un état de bien-être physique, mental et social, et pas comme l'absence de maladie (définition OMS) ; la santé y est à la fois objective (contrôlable par des mesures bio-physiologiques) et subjective (en tant que volet d'une construction personnelle et/ou sociale, variant selon les groupes et les périodes) ; la santé concerne l'individu ainsi que son entourage et la société ; la santé peut être abordée sous différents angles : maintien d'un état existant, prévention d'un état non souhaitable, soins et traitement d'un état de maladie avérée (l'exemple du diabète a été abordé), réhabilitation…

Modèles d'éducation :

À ces deux modèles de représentation du modèle de santé correspondent deux modèles d'éducation. Le premier modèle se caractérise par une logique classique d'enseignement, centrée sur l'enseignant, et utilisant des méthodes "transmissives" et inductives des savoirs à acquérir. Ce modèle est illustré par l'enseignement formel, habituel des institutions classiques, où les objectifs et les contenus de formation sont prédéfinis par des experts et où le but est la transmission de savoirs. Le deuxième

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Les acteurs :

Tous les intervenants auprès des enfants et des adolescents sont concernés par leur éducation : les parents, les enseignants, les éducateurs, les membres des mouvements de jeunesse et les intervenants du champ de la santé, médecins, infirmières scolaires, psychologues. Le problème est celui de la définition des responsabilités, des rôles et des territoires. Quel que soit le pays, un besoin de coordination est exprimé car les enjeux de ces quatre groupes d'intervenants sont différents. Il a toutefois été souligné que ce qui est important est d'atteindre les objectifs, quelles que soient les personnes ou les institutions qui les réalisent.

4. CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES

Le corps, objet scientifique ou objet technologique dans l'éducation et la culture ! Le corps objet peut-il devenir "sujet" acteur de sa santé ?

Éducation de l'individu, éducation citoyenne - Quels sont les défis ?

Les contenus :

L'éducation à la santé nécessite selon Deccache et Meremans (2000) la mise en place d'un ensemble d’activités intentionnelles de transfert et/ou de construction de savoirs relatifs à la santé d’une personne, d’un groupe social ou d’une communauté. Les contenus sélectionnés doivent aborder les valeurs, les attitudes et les compétences aussi bien que les connaissances. La santé n'est pas simplement un objet de controverse. Elle porte sur des intérêts vitaux, essentiels, personnels, et elle suscite donc passion et dramatisation.

Dans l'école de Jules Ferry, l'éducation aux valeurs transmettait un corpus de règles et d'exigences incontestables et incontestées, une normalité pour tous. Or, notre société ne se caractérise plus, comme les précédentes, par un ensemble cohérent et bien déterminé de valeurs. Dans notre société pluraliste, l'éducation à la santé signifie, pour l'individu, passage de la normalité à la normativité. Pour une mise en pratique de cette normativité, éduquer à la santé nécessite l'apprentissage du respect de soi et d'autrui, de la liberté, de la responsabilité et de l'autonomie.

Les méthodes éducatives :

L'éducation à la santé en voulant permettre à l'individu d'être mieux adapté à son milieu de vie, ne peut se cantonner au simple débat. Le choix des méthodes pédagogiques et de matériel appropriés est crucial : méthodes actives incitant l'élève à s'engager dans le processus d'apprentissage ;

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vécu passé et futur. L'utilisation d'une grande variété de méthodes fera appel aux différentes façons d'apprendre des élèves.

Le programme :

Ce qui est peut-être plus important que son mode de mise en œuvre, c'est le fait que l'éducation à la santé soit planifiée et coordonnée à travers tout le programme, et les questions introduites à l'étape adéquate pour le développement de l'enfant et de l'adolescent, puis ré abordées à des moments clés à travers un programme dit en spirale. Il est donc nécessaire de coordonner le programme d'éducation à la santé avec l'ensemble des activités de l'école, ce qui revient en France à envisager d'intégrer l'éducation à la santé dans le projet d'établissement.

Les acteurs :

En France, interviennent des infirmières et des médecins, des enseignants appelés à dépasser les limites de leur discipline et des parents, à qui on demande de collaborer sur de nouveaux thèmes choisis par année d'étude. Ces changements de rôle ne vont pas de soi. Un renouvellement de l'éducation à la santé ne peut se penser sans un renouvellement des tâches et de la place des acteurs ainsi que leur formation spécifique. Les enseignants doivent apprendre à faire acquérir des compétences en ne restreignant pas l'enseignement et l'apprentissage au seul domaine cognitif. Dans l'inventaire des facteurs participant au succès de l'éducation à la santé, l'école ne représente qu'un des multiples paramètres susceptibles d'influencer le comportement des jeunes en relation avec la santé. Les informations transmises par la publicité, les média, le prix des cigarettes ou la présence dans les écoles de distributeurs de boissons sucrées (et autres) peuvent induire chez les jeunes certains comportements à risque. L'éducation à la santé à l'école a donc plus de chance d'être efficace si elle prend place dans un contexte favorable plus large (politique, économique, réglementaire, etc.) et si hors de l'école, les jeunes reçoivent des messages cohérents.

BIBLIOGRAPHIE

CANGUILHEM G. (1992). La connaissance de la vie. Paris : Vrin, (2e édition).

EARLS C. M. F. (1997). Psychological and neuroendocrinological sequelae of early social deprivation in institutionalized children in Romania. NY Acad of Sciences. 807, 419-428.

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FAWZY F. I., FAWZY N. W., HYUN C. S., ELASHOFF R., GUTHRIE D., FAHEY J.L. et coll. (1993). Malignant melanoma : effects of an early structured psychiatric intervention on recurrence and survival six years later. Arch Gen Psychiatry, 50, 681-9.

GALICHET F., MANDERSCHEID J.-C. (1996). L'éducation à la santé et la construction de l'identité dans le contexte des sociétés occidentales contemporaines. Revue Française de

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Références

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