ANAL YSES PREALABLES REALISEES A L'UNIVERSITE PIERRE ET MARIE CURIE POUR ELABORER UN RESEAU CONCEPTUEL INTEGRATEUR DANS L'ENSEIGNEMENT UNIVERSITAIRE DE BIOLOGIE A.GIORDAN J. POCHON C.AI MAR V. HOST E. LE JAN G. STERN C.VILAIN avec la participation A.M. CATESSON M. GROSBOIS M. RIEUTORT J. TAUGOURDEAU C.BOSCH VIDAL
Université Pierre et Marie Curie (En collaboration avec le LDES de l'Université de Genève)
MOTS CLEFS: RESUME:
SYSTEME EDUCATIF - EVALUATION.
L'enseignement universitaire actuel des Sciences Naturelles se heurte à de nombreux écueils. Quotidiennement des exemples de «dysfonc-tionnement» sont vécus dans cet enseignement. Il importait donc de rechercher les causes de ces difficultés ressenties aussi bien par les enseignants que par les étudiants, en vue d'esquisser les grands traits d'une nouvelle formation. Tel était le projet d'un groupe de travaii qui se mit en place à l'Université de Pierre et Marie Curie. Cependant, il est apparu souhaitable d'analyser le contenu des connaissances avant d'aborder l'étude de leur transmission ; en d'autres termes, il apparaissait nécessaire de faire précéder la réflexion épistémologique à l'investigation didactique.
C'est l'état actuel de cette réflexion qui est présentée ici. Elle a perrnis de prendre conscience de la nécessité d'un nouvel outil pour coor-donner et intégrer les connaissances scientifiques actuelles : un réseau conceptuel optimum. (Voir publication dans European Journal of Science Education - sous presse).
Historiquement, l'enseignement des Sciences Naturelles à
l'Université consistait à délivrer un savoir de base, commun aux
étudiants qui se destinaient soit à l'enseignement scolaire soit
à la recherche. L'accumulation des connaissances d'une part et
la nécessité de mieux former des futurs chercheurs d'autre part ont provoqué un nécessaire éclatement des différentes matières
traditionnelles, homologuées par la réforme de 1967 (1).
L'ensei-gnement fut alors organisé en 2 types de maîtrises telles qu'on
les retrouve aujourd'hui Maîtrises Finalisées et Maîtrises
Fondamentales.
Cette nouvelle organisation en matière de programmes a
dé-coupé les êtres vivants, la nature et la vie en de multiples
domaines correspondant chacun à des spécialités relativement
bien cloisonnées. Par ailleurs, cette réforme a conduit à une
orientation de plus en plus précoce des étudiants se destinant
à la recherche et qui ont perdu de ce fait une vision
glo-bale de la biologie. A l'inverse, certains enseignements restés
traditionnels, du type de la maîtrise finalisée d'enseignement ne comportent que très peu de données sur les progrès récents des sciences.
1. Différents exemples de dysfonctionnement.
Si la réforme de 1967 a contribué à moderniser l'enseignement, la création de filières d'orientation dès la 2ème année du DEUG
a parfois été préjudiciable à un enseignement harmonieux du monde
vivant. Il s'est par exemple formé une filière hypertrophiée de
Biochimie de laquelle les futurs enseignants sont exclus. Dans
cet-te filière, les enseignements donnés sous l'appellation Physiologie
animale et Biologie cellulaire traitent, en réalité, en même
temps de: Physiologie cellulaire et de Biologie moléculaire ; ces
deux matières réunies ne représentent que 15% du temps
d'enseigne-ment global (fig.l). Dans la suite du cursus de Biochimie,
l'orga-nisme dans son ensemble et dans ses interrelations avec les
es-pèces n'est abordé à aucun moment (figures 2 et 4).
(1) Actuellaœnt, une nouvelle réfonœ est en place, les rrâres difficultés
FI LIenS
I.Céologh et !iolo&ie
2.8iologie;optioo Biologie duorganisme. 3.BioloCh.optioo Géololie
4.Phy. ico·chimie Biologique S.Childe, Bioehimie
Pour chiqueHIUre, h aoebn
d'heure. t.t e::priCl.é aa poutCII1-t.gl!.
Fil, 1.
toUlauar..Dtoblh.toir. du
DEUG 2b.'Dah.
Par ailleurs, si les notions de Géologie (75 heures) sont
données en 1ère année du DEUG à tous les étudiants, le
cloison-nement entre Sciences de la Terre et Science de la Vie devient ensuite totalement étanche dans les Formations Fondamentales
(fig. 2 et 4). Dans la Formation Finalisée, cette dichotomie est
moins marquée et, d'une manière générale, la diversité du monde
vivant est abordée de façon plus large que dans les Formations
Fondamentales (figures 3 et 5).
Au sein même des Formations Fondamentales, les passerelles possibles entre les différentes maîtrises sont en réalité arti-ficielles ou illusoires, ceci essentiellement au niveau des modu-les optionnels. Ainsi modu-les étudiants inscrits dans modu-les filières
4 et 5 (Physico-chimie biologique et Chimie biochimie)
choisis-sent le plus fréquemment la Maîtrise de Biochimie, laquelle
auto-rise paradoxalement l'inscription à n'importe quel module
op-tionnel. Ainsi, certains étudiants qui choisissent des modules
par manque de bases et de terminologie dans ces spécialités,
obligent les enseignants à organiser des cours de "rattrapage" de
niveau élémentaire pour combler les lacunes. A l'inverse, on peut
se demander pourquoi les étudiants ayant suivi la Formation
Fina-lisée dans laquelle les connaissances de base sont mieux
équi-librées mais moins modernes ne peuvent s'inscrire aux modules
spé-cialisés que par dérogation spéciale ?
Mais les incohérences les plus spectaculaires portent sur
le contenu d'enseignement et entraînent des lacunes grandioses (1).
Quelques exemples pris parmi tant d'autres constatés peuvent
illus-trer ces propos :
En 1ère année du DEUG, le cours de Biologie Cellulaire déve-loppe des "données fondamentales de Biochimie sur les principales macromolécules de la matière vivante" alors que le programme de Chimie ne comporte aucune base de chimie organique.
En Biologie, les statistiques et l'informatique sont des
outils de plus en plus nécessaires. Or, l'enseignement de ces
matières est réduit. Les statistiques sont enseignées en 1ère
année du DEUG, elles le sont également en 2ème année mais à un
niveau inférieur et seulement dans 2 filières. Pourquoi cette
re-dite est-elle dévaluée? Quant à l'informatique, elle n'est
en-seignée que dans 3 filières dans la 2ème année du DEUG.
Des notions de base manquent parfois, ou inversement sont
(1) La génétique des populations1 la biogéographie1 l'anthropologie, sont pratiquanent absentes.
"'-._,,- -'({b/<o~; '
-"
".\
~
\ \ 343données plusieurs fois de suite (1), ou bien encore sont chrono-logiquement mal placés (2). Le tout débouche sur une absence de niveau de connaissance homogène et surtout sur un sentiment de parcellisation et de ponctualisation des connaissances vi-vement ressenti par les étudiants.
Ces aspects déjà visibles au niveau de la juxtaposition de disciplines: petits mondes fragmentés, conséquences d'une connaissance analytique éparpillée, se retrouvent également dans une même discipline par la façon dont les programmes sont formu-lés et traités. En effet, i l est frappant de constater que dans la plupart des disciplines, les programmes sont présentés dans une liste plus ou moins exhaustive des points traités sous forme de table de matière énumérant les titres des cours sans ligne conductrice apparente.
Le fait que la discipline est souvent traitée par plusieurs enseignants augmente les incoordinations ; les décalages fré-quents entre les travaux pratiques, les travaux dirigés et le cours en sont une autre illustration.
2. Conséquences de l'organisation actuelle de l'enseignement. Les programmes actuels qui paraissent obéir plutôt à une mise en ordre linéaire qu'à une organisation très structurée ne peuvent que favoriser des redondances, des émiettements, des
carences et même certaines incohérences, comme nous venons de l ' i l -lustrer. Ces carences se manifestent encore fréquemment au mo-ment des réorganisations de programmes et d'aménagemo-ment d'en-seignement, le système de référence auquel i l est fait appel étant plus contingent qu'épistémologique.
(1) Onenseigne dans plusieurs disciplines et à différents niveaux les lois de M:mdel (déjà présentées en secondalie), les =ganites cellulaires ou les constituants de la matière vivante.
(2) certains points sant traités hors de leur contexte signifiant : la méiose se présente CaJ11ie une "danse" des chrarosaœs, la fécoooation est centrée sur l'aspect moq:hologique et non sur son intérêt génétique. L'Ecologie et la Biologie évolutive apparaissent CCI1TJ€ un "couronnerrent", elles sant traitées uniquerœnt en fin de cycle.
Actuellement l'ordre de présentation et l'importance
accor-dée aux concepts, lorsqu'ils sont formulés, n'obéissent pas à
un ordre explicite mais sont conjoncturaux, liés à la
personna-lité de l'enseignant et à l'organisation locale des programmes.
Cette organisation, classique dans de nombreuses universités, se concentre sur la succession de notions enseignées pour
elles--mêmes, indépendamment des autres et de leur histoire. Elle
re-pose sur des conceptions épistémologiques naives et ignore
géné-ralement les processus de construction du savoir. Il en
ré-sulte pour l'étudiant un êmiettement du savoir. De plus la
situa-tion actuelle de réceptivité favorise la passivité, même l'em-ploi des ouvrages de références est négligé, pourtant i l permet-trait d'acquérir une compréhension plus approfondie d'un plus
grand nombre de connaissances. Elle développe un fausse image du
savoir scientifique, les étudiants ont l'impression que tout est
résolu : les concepts ne sont pas perçus comme une construction
de l'esprit en vue d'avancer dans la compréhension des phénomènes
à partir de questions spécifiques mais comme un absolu (1).
Enfin la conception des examens et des concours renforce
ces tendances elle oblige les étudiants à mémoriser un
en-semble de faits (2), sans "apprendre" véritablement à intégrer
des connaissances ou à les faire fonctionner.
En fait, cette organisation semble ne reposer sur aucune
vision globale de la biologie, encore moins sur un projet éduca-t i f ; elle eséduca-t le produiéduca-t d'une hiséduca-toire faiéduca-te de consensus perma-nent, et aussi de rapports de force entre les différentes spécia-lités qui inscrivent dans l'organigramme l'impact momentané de leur importancp.
(1) Une en;jUête réalisée au niveau des étudiants demaîtrise rrontre que
les concepts sont pour eux une donnée de la réalité. Ils fonctiorment
au mieuxa:mne une définition atemp::>relle.
(2) Les étudiants de maltrise (elX!uête réalisée en 1982) ont l'impression que les professeurs attendentque l'on "récite" leur =urs et rien d'autre. Etudier lemârre danai.ne par une autre approche leur sgnble inutile voire nuisible à l'€XFOsé de laquestion.