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L'éphèbe troyen ad astra / eis toùs astéras : étude iconologique et contextuelle de la mosaïque de Ganymède de la Maison de Dionysos à Néa Paphos (Chypre)

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Texte intégral

(1)

L'éphèbe troyen ad astra / eis toùs astéras. Étude

iconologique et contextuelle de la mosaïque de

Ganymède de la Maison de Dionysos à Néa Paphos

(Chypre)

Mémoire

Jean-François Guay

Maîtrise en archéologie - avec mémoire

Maître ès arts (M.A.)

(2)

L’éphèbe troyen ad astra / εἰς τοὺς ἀστέρας

Étude iconologique et contextuelle de la mosaïque de Ganymède de la Maison

de Dionysos à Néa Paphos (Chypre)

Mémoire

Jean-François Guay

Sous la direction de :

(3)

Résumé

Ce mémoire de maîtrise vise à comprendre le symbolisme de la mosaïque de Ganymède de la Maison de Dionysos à Néa Paphos (Chypre) datée de la fin du IIe ou du début du IIIe siècle p.C. et à préciser le contexte d’utilisation de la salle. Ce double questionnement découle de l’observation des motifs géométriques associés à la scène qui représente l’enlèvement de l’éphèbe troyen par un aigle. D’une part, la nature du « fleuron », associé au panneau figuratif, est analysée à l’aide de documents iconographiques et de textes anciens. Les résultats de cette analyse permettent de discuter du sens symbolique, idéologique ou philosophico-religieux que ces motifs confèreraient à la scène. D’autre part, la disposition des « fleurons » et des autres motifs géométriques suggère que la salle aurait pu être utilisée dans un contexte précis. Outre ces indices décoratifs, la fonction de la salle est aussi discutée selon les données architecturales et planimétriques. Certaines conclusions sur le symbolisme, qui découlent de l’étude de la mosaïque de Ganymède, sont ensuite confrontées à certains pavements figurés de la domus.

(4)

Abstract

This masters essay aims to understand the symbolism of the Ganymede mosaic of the House of Dionysus in Nea Paphos (Cyprus) dated to the end of the 2nd or the beginning of the 3rd century AD and to determine the room’s use. This double inquiry arises from the observation of the geometric details associated with the scene representing the rapt of the Trojan ephebe by an eagle. Firstly, the nature of the "rosette" associated with the figurative panel is analyzed with the iconographic documents and the ancient texts. The results of this analysis allow us to discuss the symbolic, ideological or philosophical-religious meaning that motifs would confer on the scene. Secondly, the arrangement of the "rosette" and other geometric patterns suggests that the room could have been used in a specific context. In addition to these decorative clues, the function of the room is also discussed according to architectural and planimetric data. Some conclusions about the symbolism that emerge from the study of the mosaic of Ganymede are then confronted with certain figured pavements found in the domus.

(5)

Sommaire

RÉSUMÉ II

ABSTRACT III

SOMMAIRE IV

LISTE DES FIGURES VI

LISTE DES ABRÉVIATIONS XII

REMERCIEMENTS XV

INTRODUCTION 1

HABITAT DOMESTIQUE ROMAIN : SPHÈRES PRIVÉE ET PUBLIQUE 1

SYMBOLISME DU DÉCOR MOSAÏQUÉ 2

PROBLÉMATIQUE : QUESTIONS DE RECHERCHE, HYPOTHÈSES ET OBJECTIFS 5

ÉTAT DE LA QUESTION 8

PLAN DE RÉDACTION 11

CHAPITRE 1 :DESCRIPTION DU CADRE DE LA RECHERCHE 13

1.1CADRES HISTORIQUE ET ARCHÉOLOGIQUE 13

1.1.1 Chypre et Néa Paphos à l’époque romaine 13

1.1.2 Contexte archéologique de la Maison de Dionysos à Néa Paphos 18

1.1.3 Conclusion 22

1.2CADRES THÉORIQUE ET MÉTHODOLOGIQUE 22

1.2.1 Approches théoriques 23

1.2.2 Approche méthodologique 25

1.2.3 Conclusion 32

1.3DESCRIPTION DU CORPUS ICONOGRAPHIQUE PRINCIPAL 32

1.3.1 La mosaïque de Ganymède de la Maison de Dionysos à Néa Paphos 33

1.3.2 Les documents figurés du corpus principal 35

1.3.3 Conclusion 39

CHAPITRE 2 :ANALYSE DE L’IMAGERIE 40

2.1LE « FLEURON » ET AUTRES MOTIFS RADIÉS 40

2.1.1 Forme et contexte : la nature des motifs 40

2.1.2 Corpus complémentaire : figures célestes dans l’imagerie de Ganymède 44

2.1.3 Recours aux textes : le voyage et la destination 50

2.2RETOUR À LA MOSAÏQUE DE LA MAISON DE DIONYSOS À NÉA PAPHOS : LE NOMBRE

(6)

2.3ANALYSE DES MOTIFS DE L’AIGLE ET DE GANYMÈDE 62

2.3.1 L’aigle : symbole jovien 62

2.3.2 Ganymède : la figuration d’un statut particulier 69

2.4CONCLUSION 81

CHAPITRE 3 :INTERPRÉTATION ET DISCUSSION 83

3.1LA MOSAÏQUE DE GANYMÈDE DANS LA MAISON DE DIONYSOS 83

3.1.1 Contexte : un second triclinium dans la Maison de Dionysos ? 83

3.1.2 Vers une interprétation iconologique de la mosaïque paphienne 88

3.1.3 Symbole d’apothéose/d’héroïsation astrale ou l’allégorie de la montée de

l’âme 92

3.1.4 Élaboration de la composition : artisan-mosaïste ou commanditaire 102

3.2EXCURSUS DANS LA MAISON DE DIONYSOS À NÉA PAPHOS : D’AUTRES INDICES DU

THÈME ASTRAL (?) 103

3.2.1 Paon et « fleuron » 104

3.2.2 Héros/mortels et possibilité d’un lien astral (?) 107

3.2.3 Dioscures et Dionysos 112

3.2.4 Intérêt du dominus pour les astres 118

3.3CONCLUSION 119 CONCLUSION GÉNÉRALE 121 BIBLIOGRAPHIE 127 ÉTUDES 127 SOURCES 147 FIGURES 155

(7)

Liste des figures

Figure 1 - Carte géographique de Chypre et localisation de Néa Paphos (d’après

T. Fujii 2013, p. 9 ; traitée par l’auteur) 155

Figure 2 - Carte archéologique de Néa Paphos et la localisation de l’amphithéâtre (A) et du théâtre (T) (d’après Daszewski et Michaelides 1989, fig. 1, p. 8 ; traitée

par l’auteur) 156

Figure 3 - Relevé de la Maison de Dionysos à Néa Paphos et des vestiges des

occupations antérieures (d’après Hayes 1991, Plan A ; traité par l’auteur) 157

Figure 4 - Relevé de la Maison de Dionysos à Néa Paphos et des vestiges liés aux

occupations antérieures (d’après Hayes 1991, Plan B) 157

Figure 5 - Plan schématisé de la Maison de Dionysos à Néa Paphos (d’après Kondoleon 1995, fig. 1 et fig. 3, p. 10 ; traitées et combinées par l’auteur) 158 Figure 6 - Accès Nord-Ouest à la salle de « Ganymède » dans la Maison de Dionysos

à Néa Paphos (photographie de l’auteur) 158

Figure 7 - Accès Sud à la salle de « Ganymède » dans la Maison de Dionysos à Néa

Paphos (photographie de l’auteur) 159

Figure 8 - Détail du panneau figuratif de l’enlèvement de Ganymède à Néa Paphos

(d’après Michaelides 1992, fig. 14, p. 33) 160

Figure 9 - Vue du décor de la salle de l’enlèvement de Ganymède à Néa Paphos

(photographie de l’auteur) 161

Figure 10 - Relevé en plan du décor de la salle de l’enlèvement à Néa Paphos (d’après celui de M. Medič publié dans Kondoleon 1995, fig. 82, p. 137 ; traité et

complété par l’auteur) 162

Figure 11 - Décentrement du panneau figuratif (a) et disposition « en Π ou en U » des trois types de motifs sur la mosaïque de l’enlèvement de Ganymède à Néa

Paphos (b, c et d) 163

Figure 12 - Détail du registre supérieur du cratère à volutes de Ruvo conservé au

Musée de Naples (d’après Cook 1940, fig. 836, p. 1040) 164

Figure 13 - Reproduction d’un fragment d’un vase apulien de la coll. Hamilton (perdu) (gauche) et détail du registre supérieur (droite) (d’après Pouzadoux 2013,

(8)

Figure 14 - Impression et dessin d’une intaille de Berlin (à droite, d’après Furtwängler 1896, pl. 56, no. 7594 ; à gauche, d’après Overbeck 1969,

Gemmentafel V, 12) 165

Figure 15 - Intaille du Koninklijk Penning-kabinet de La Haye et son impression

(d’après Maaskant-Kleibrink 1978, fig. 646a et 646b) 165

Figure 16 - Groupe en terre cuite conservé au Romano Museo Nazionale, à Rome

(d’après Sichtermann 1988, pl. 86, no. 137) 166

Figure 17 - Plaques de protection en bronze pour une tête de cheval de Straubing

(d’après Kleim et Klumbach 1976, pl. 32, no. 21) 167

Figure 18 - Plaques de protection en bronze pour une tête de cheval (a) du Gäubodenmuseum à Straubing et détails des bonnets (b-d) et du registre inférieur de la plaque centrale (e-f) (d’après https://commons.wikimedia. org/wiki/File:GBM_R%C3%B6merschatz_-_Rossstirn_6.jpg ; traitée par

l’auteur) 168

Figure 19 - Urne cinéraire de Tibérius Claudius Victor conservé à la BnF, Médailles

et Antiques (d’après Cumont 2015, pl. XI) 169

Figure 20 - Fleuron en six feuilles et croissant lunaire gravés sur une colonne de

Bishapour (d’après Compareti 2013, fig. 13, p. 213, traitée par l’auteur) 170

Figure 21 - Vase en terre cuite qui représente Alexandre Kosmocratôr trouvé à

Amisos dans le Pont (d’après Cumont 2015, pl. XVI,1) 171

Figure 22 - Acrotère du groupe Zeus-Ganymède trouvé à Olympie (d’après Reinhardt

2018, fig. 45, p. 79) 172

Figure 23 - Antéfixes en terre cuite trouvées à Cassopée (d’après Bruneau 1962, fig. 3,

p. 199) 172

Figure 24 - Bas-reliefs dits de l’apothéose d’Héraclès (a) et de l’enlèvement de Ganymède (b) sur le pilier d’Igel (d’après Scheid 2003, fig. 6a et 6b, p. 133) 173 Figure 25 - Reproduction du bas-relief (perdu) d’Arlon (d’après Espérandieu V,1,

p. 249, no. 4066) 173

Figure 26 - Tombe des Trois Frères à Palmyre (d’après Eristov et Vibert-Guigue 2014,

pl. CXXII, fig. 1) 174

Figure 27 - Médaillon au centre de la voûte de la tombe des Trois Frères à Palmyre et

sa restitution (d’après Eristov et Vibert-Guigue 2014, pl. CXXIV, fig. 7) 174

(9)

Figure 29 - Décor stuqué de la voûte de la Basilique de la Porte Majeure à Rome

(d’après Wypustek 2013, fig. 6, p. 139) 176

Figure 30 - Vue de l’entrée de la grotte et du triclinium de la Villa de Sperlonga

(d’après Sauron 2009, fig. 142, p. 158) 177

Figure 31 - Statuaire de l’enlèvement de Ganymède de la Villa de Sperlonga

(d’après Sichtermann 1988, pl. 94, no. 250) 178

Figure 32 - Voûte du sanctuaire/héroon privé de la Maison del Sacello Iliaco à Pompéi

(d’après Hakanen 2020, fig. 19, p. 62) 178

Figure 33 - Médaillons stuqués d’Éros (à gauche) et de Ganymède (à droite) au bas du plafond voûté du tepidarium des thermes du forum de Pompéi

(d’après Hakanen 2020, fig. 9, p. 54) 179

Figure 34 - Telamones sous le plafond voûté du tepidarium des thermes du forum de

Pompéi (d’après Hakanen 2020, fig. 13, p. 57) 180

Figure 35 - Monnaies frappées sous les rois macédoniens Antigone Gonatas (a) et Philippe V (b) (d’après BnF, Médailles et Antiques, inv. Luynes 1698 et

Luynes 1702) 181

Figure 36 - Monnaie de consécration de Faustine l’Ancienne (d’après British

Museum, inv. 1860,0326.28) 181

Figure 37 - Deux exemplaires de monnaie de consécration de Faustine la Jeune (d’après British Museum, inv. R.14738 (a) ; d’après Daremberg et Saglio

1969, fig. 391, p. 326 (b)) 182

Figure 38 - Relief de la base de la Colonne d’Antonin le Pieux à Rome (d’après Davies

2004, fig. 33, p. 43) 183

Figure 39 - Détail de la sphère de la Colonne d’Antonin le Pieux à Rome

(d’après Davies 2004, fig. 62, p. 78) 184

Figure 40 - Mosaïque inscrite de la Maison « La Caridad » (d’après Gros 2001,

fig. 139, p. 141) 185

Figure 41 - Mosaïque aux divinités planétaires ou de la semaine à Bir Chana

(d’après Dunbabin 1978, pl. LXIV) 186

Figure 42 - Plafond (a) et linteau (b) sculptés du Temple de Bel à Palmyre

(d’après Seyrig 1933, fig. 5, p. 258 et fig. 2, p. 255) 187

Figure 43 - Mosaïque aux divinités planétaires ou de la semaine de la Villa

(10)

Figure 44 - Passage voûté à caissons de l’Arc de Titus à Rome (d’après Norman 2009,

fig. 6.7, p. 51) 189

Figure 45 - Relief du centre de la voûte de l’Arc de Titus à Rome (d’après Pfanner

1983, pl. 68, fig. 1) 189

Figure 46 - Médaillon de Victoire en or avec le buste de Philippe II de Macédoine et

le détail de la cuirasse (d’après BnF, Médailles et Antiques, F 1673) 190

Figure 47 - Gobelet en argent dit de « l’apothéose d’Homère » trouvé à Herculaneum

(d’après Adriani 1959, pl. XLVIII, fig. 139 et fig. 12, p. 33) 191

Figure 48 - Vase en relief en terre cuite sigillée et la scène de « l’apothéose

d’Homère » (d’après Möbius 1964, pl. VII, 4) 192

Figure 49 - Stèle d’Eutychos trouvée dans le nymphée de la Villa de Domitien à

Albano Laziale (d’après Seston 1949, pl. XXVI) 193

Figure 50 - Groupe coroplastique d’une caricature de Ganymède conservé au Musée

de Chypre à Nicosie (photographie de l’auteur) 194

Figure 51 - Boucles d’oreilles figurées : char et figure ailée (a et b), sirène (c) et

Ganymède (d) (d’après Segall 1942, fig. 2, 3, 4 et 5, p. 50-52) 194

Figure 52 - Phiale à omphalos dite aux « quadriges » et le détail de l’enlèvement de

Ganymède (d’après BnF, Médailles et Antiques, inv. De Ridder.1135) 195

Figure 53 - Mosaïque du triclinium de la Maison des Travaux d’Hercule à Volubilis

(d’après Thouvenot 1949, pl. VI) 196

Figure 54 - Détail de l’enlèvement de Ganymède de la mosaïque à Volubilis

(d’après Foucher 1979, fig. 1, p. 156) 196

Figure 55 - Coupe de Douris, dont le tondo représente l’enlèvement de Ganymède

« endormi » (d’après Kaempf-Dimitriadou 1979, pl. 3, fig. 2 et 4) 197

Figure 56 - Schéma en U du triclinium de la Maison du Concours de boisson à

Séleucie (d’après Martz 2015, fig. 2, p. 170) 198

Figure 57 - Schémas en T+U du triclinium de la Maison d’Aiôn à Néa Paphos (d’après

Daszewski et Michaelides 1989, fig. 45, p. 65) 198

Figure 58 - Oecus (S) et triclinium (T) de la Maison du Ménandre à Mytilène

(d’après Charitonidis et al. 1970, fig. 1, p. 10) 199

Figure 59 - Mosaïque au schéma en U « discontinu » du triclinium de la Maison du

(11)

Figure 60 - Schéma de la mosaïque de la Maison de la rue des Magnans à

Aix-en-Provence (d’après Lavagne 1994, fig. 2, p. 205) 200

Figure 61 - Restitution hypothétique des lits de banquet « à la mode romaine » et

d’une table sur la mosaïque de l’enlèvement de Ganymède à Néa Paphos 201

Figure 62 - Exemple de la restitution des lits amovibles au Musée Archäologische

Staatssammlung de Munich (d’après https://commons.wikimedia.org/wiki/

File:Triclinium_-_Arch%C3%A4ologische_Staatssammlung_M%C3%BCnc

hen.JPG) 202

Figure 63 - Planimétrie schématisée de la Maison de Ménandre à Daphné

(d’après Martz 2015, fig. 3, p. 172) 203

Figure 64 - Mosaïque de Ganymède de la Maison de la Table servie d’Antioche

(d’après Levi 1947, pl. XXIVa) 204

Figure 65 - Mosaïque du triclinium de la Maison de l’Arsenal à Sousse (d’après

Kondoleon 1995, fig. 87, p. 144) 205

Figure 66 - Mosaïque du triclinium de la Maison della Fortuna Annonaria (d’après

Becatti 1961, pl. XCIX) 206

Figure 67 - Détail de la mosaïque de l’Aurige vainqueur de la Maison aux Jets d’eau

à Conimbriga (d’après Correia 2017, fig. 7, p. 137) 207

Figure 68 - Mosaïque du Paon de la Maison de Dionysos à Néa Paphos (photographie

de l’auteur) 208

Figure 69 - Mosaïque des Saisons de la Maison de Dionysos à Néa Paphos

(photographie de l’auteur) 209

Figure 70 - Détail de la figure centrale de la mosaïque des Saisons de la Maison de

Dionysos (Daszewski et Michaelides 1989, fig. 6, p. 21) 209

Figure 71 - Groupe de figurines féminines trouvé dans la Villa de Thésée à Néa

Paphos (d’après Yon 1989, fig. 4, p. 261) 210

Figure 72 - Détail du panneau central (a) d’une lampe en forme de bateau (b) trouvée dans la Maison d’Orphée à Néa Paphos (d’après Michaelides 2009, fig. 5,

p. 200 et fig. 1 et 2, p. 199) 210

Figure 73 - Mosaïque de Narcisse de la Maison de Dionysos à Néa Paphos

(photographie de l’auteur) 211

Figure 74 - Mosaïque de Hippolyte et Phèdre de la Maison de Dionysos à Néa Paphos

(12)

Figure 75 - Panneau figuratif de Dionysos, d’Acmé, d’Icarios et des « Premiers buveurs de vin » de la Maison de Dionysos à Néa Paphos (d’après Dunbabin

1999, fig. 240, p. 228) 213

Figure 76 - Panneaux figuratifs des Dioscures de la Maison de Dionysos à Néa Paphos

(d’après Daszewski et Michaelides 1989, fig. 13-14, p. 26) 213

Figure 77 - Panneau figuratif du Triomphe de Dionysos de la Maison de Dionysos à

Néa Paphos (d’après Daszewski et Michaelides 1989, fig. 12, p. 25) 214

Figure 78 - Mosaïque du grand triclinium de la Maison de Dionysos à Néa Paphos

(d’après Dunbabin 1999, fig. 239, p. 227) 215

Figure 79 - Dessin en plan de la mosaïque aux xenia de la Maison de Dionysos à Néa Paphos (d’après celui de M. Medič publié dans Kondoleon 1995, fig. 71,

(13)

Liste des abréviations

AAS Annales archéologiques arabes syriennes

AJA American Journal of Archaeology

AJH Athens Journal of History

AJP American Journal of Philology

AntK-BH Antike Kunst: Beiheft

ANRW H. Temporini (éd.), Aufstieg und Niedergang der römischen

Welt (Berlin, 1972-)

AntAfr Antiquités africaines

AntCl L’Antiquité classique

a.C. ante Christum

p.C. post Christum

BAntFr Bulletin de la Société nationale des antiquaires de France

BCH Bulletin de correspondance hellénique

BMFA Bulletin of the Museum of Fine Arts

BnF Bibliothèque nationale de France

CAJ Cambridge Archaeological Journal

CCEC Cahiers du Centre d’études chypriotes CCSL Corpus Christianorum, Series Latina

CQ Classical Quarterly

CRAI Comptes rendus des séances de l’Académie des inscriptions et belles-lettres

CVA Corpus vasorum antiquorum (Paris, 1923-)

Décor C. Balmelle et al., Le décor géométrique de la mosaïque romaine (Paris, 1985-2002)

DFHG Berti, M. Digital Fragmenta Historicorum Graecorum Project. [K. Müller (éd.). Fragmenta historicorum graecorum. 5 vol. (Paris, 1841-1873)]

Espérandieu É. Espérandieu. Recueil général des bas-reliefs, statues et bustes

de la Gaule romaine (Paris, 1907-1966)

FGrHist F. Jacoby, Fragmente der griechischen Historiker (Berlin, 1923-)

Graef et Langlotz B. Graef et E. Langlotz (éd.). Die antiken Vasen von der Akropolis

zu Athen (Berlin, 1925-1933)

JdI Jahrbuch des Deutschen archäologischen Instituts

JHS Journal of Hellenic Studies

JMR Journal of Mosaic Research

JRA Journal of Roman Archaeology

LIMC J. Boardman, Lexicon iconographicum mythologiae classicae (Zurich, 1981-2009)

MeditArch Mediterranean Archaeology

MÉFR Mélanges d’archéologie et d’histoire de l’École française de Rome MÉFRA Mélanges de l’École française de Rome, Antiquité

PAM Polish Archaeology in the Mediterranean

(14)

PGM K. Preisendanz (éd.). Papyri Graecae Magicae (Leipzig: Teubner, 1928-1941)

PSAM Publications du service des antiquités du Maroc

RA Revue archéologique

RAC Reallexikon für Antike und Christentum : Sachwörterbuch zur

Auseinandersetzung des Christentums mit der antiken Welt (Stuttgart, 1950-)

RBPhil Revue belge de philologie et d’histoire

RDAC Report of the Department of Antiquities, Cyprus

RE A. Pauly et G. Wissowa (éd.), Real-Encyclopädie der Classischen

Altertumswissenschaft (1893-1978)

RÉA Revue des études anciennes

RÉG Revue des études grecques

Reinach, Cat. ill. S. Reinach. Catalogue illustré du Musée des antiquités nationales

au château de Saint-Germain-en-Laye (Paris, 1917-1921)

Reinach, RV. S. Reinach. Répertoire des vases peints grecs et étrusques (Paris,

1899-1900)

Rev. Num. Revue numismatique

(15)

Pour une archéologie du regard. C’est donc en établissant un rapport constant entre les décors et leurs commanditaires, entre le contenu des uns et les aspirations idéologiques des autres que l’on a quelque chance de parvenir à une interprétation satisfaisante de toutes ces anomalies dont ne peut rendre compte le simple recours à une tradition décorative ou architecturale.

(16)

Remerciements

D’abord, le premier remerciement revient à M. Thierry Petit, mon directeur de recherche, qui m’a soutenu tout au long de mon mémoire et qui m’a offert de nombreux et précieux conseils. Je tiens aussi à témoigner ma gratitude à M. Réginald Auger, désormais professeur retraité d'archéologie de l'Université Laval, pour son grand soutien. Je remercie également les membres du jury, M. Thierry Petit, M. Robert Marcoux et M. Patrick Baker, pour leurs commentaires et leurs remarques dont bénéficie la présente version.

Je tiens aussi à remercier les organismes qui m’ont octroyé des bourses. Cette recherche fut en partie financée par le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada (CRSH). Je remercie également le Groupe de recherche sur l’Antiquité (GRANT) de l’Université Laval.

Je dois toute ma reconnaissance à ma mère et à mon père, ainsi qu’à ma famille qui m’ont toujours soutenu dans mes études et mes projets. Je remercie également ceux qui ont accepté de relire plusieurs pages de ce mémoire et de m’avoir donné leurs commentaires.

(17)

Introduction

Habitat domestique romain : sphères privée et publique

L’habitat domestique romain comprend trois aspects étroitement liés1 : social, qui se

rapporte au noyau familial et son extension (cf. les esclaves) ; matériel, qui comprend autant la maison que les possessions personnelles des membres du groupe ; comportemental, qui englobe divers types d’activités quotidiennes ou particulières. Chez les aristocrates romains, la sphère publique du paterfamilias2 s’entremêle à la vie privée.

En investissant dans les éléments architecturaux ou architectoniques (colonnade, pilastre, aménagement hydraulique ostentatoire, etc.) et dans le décor (fresque murale, mosaïque, statuaire, etc.) de sa domus, le dominus mettait en valeur sa fortune et sa réussite sociale. La présence et la combinaison de ces divers éléments contribuaient évidemment à augmenter le luxe et le confort de la domus, mais également à hiérarchiser les espaces et les salles en fonction de la relation des différents individus avec le dominus, (amis/amici, clients/clientes, famille et esclaves). Selon A. Wallace-Hadrill, le décor aiderait ces individus à s’orienter dans la domus et les guiderait vers les salles appropriées à leur statut : les clientes se concentrent dans le secteur public au décor plus humble, tandis que les invités de marque se dirigent vers les secteurs de réception richement décorés3. Selon cet axe de différenciation, les appartements privés de la famille recevaient un traitement luxueux, tandis que les espaces utilisés par les esclaves présentaient un caractère très modeste.

On connaît deux rites sociaux principaux qui avaient lieu dans l’habitat privé des classes aisées. Les clients (clientes), qui cherchaient une protection, une reconnaissance ou des avantages politiques ou économiques4, se présentaient chez l’aristocrate pour lui rendre

1 Voir : Wilk et Rathje 1982, p. 618.

2 En plus d’être le père de famille, il est aussi désigné comme le maître de maison (dominus), le patron (dans

une relation avec des clients (clientes-patronus) et le commanditaire (celui qui investit pour aménager et pour décorer sa demeure).

3 Wallace-Hadrill 1988, p. 76 et 78. 4 Veyne 1985, p. 98-99.

(18)

les hommages matinaux (salutatio). En retour de la salutation5, le patronus donnait des cadeaux, de la nourriture ou de l’argent. Cette catégorie d’individus avait accès aux espaces publics ou « semi-publics » de la domus, c’est-à-dire ceux qui ne nécessitent pas d’invitations, comme le vestibule d’entrée (vestibulum), l’atrium et le péristyle6. Les amici

et les pairs du dominus constituent une autre catégorie. Ils étaient invités à prendre part à des rencontres sociales tenues dans les salles les plus prestigieuses de la demeure. Les oeci (salons) et les triclinia (salle à manger) « sont donc assurément des endroits où se cultivent des relations amicales plus étroites que celles dictées par les liens clientélaires » selon Pierre Gros7. Lors des banquets, l’aristocrate offrait à ses convives un repas, parfois en plusieurs services, et du vin.

L’habitat domestique romain, qui s’ouvre au public, devient un lieu de représentation du dominus, comme un acteur sur une scène de théâtre8. La demeure permet de mettre en valeur le statut social et les aspirations du propriétaire. Selon Vincent Jolivet, la domus romaine italienne est « constamment parcourue, depuis ses plus anciennes origines, par une tension entre ses fonctions pratiques, et les signes du sacré qui l’investissent et la placent perpétuellement en porte-à-faux par rapport au réel, tout en mettant progressivement en place l’héroïsation de son dominus, qui préfigure déjà, à l’époque d’Auguste, la divinisation des empereurs9 ». La valorisation du statut de l’aristocrate s’observe ailleurs dans le reste de l’Empire. Le décor choisi dans les lieux de réception pouvait refléter les idéaux du propriétaire notamment par la comparaison avec des héros mythologiques10.

Symbolisme du décor mosaïqué

L’habitat domestique aristocratique pouvait être doté d’un grand nombre d’images (scènes mythologiques, scènes de la vie quotidienne, formes architecturales réelles ou fictives, compositions géométriques, etc.). Toutefois, tous n’avaient pas accès à l’ensemble

5 Wallace-Hadrill 1989, p. 68-71 ; Gros 2001, p. 149 ; Gros 2006, p. 539. 6 Vitruve, De l’architecture, VI, 5, 1.

7 Gros 2001, p. 63.

8 Riggsby 1997, p. 53 ; Hales 2003, p. 44-45. 9 Jolivet 2009, p. 64.

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du décor. Certains individus étaient invités à contempler l’imagerie des salles de réception et, dans certains cas, à comprendre le message. En effet, si les compositions picturales peuvent être mises en séries iconographiques, d’autres présentent des détails ou des particularités décoratives qui invitent à s’interroger sur le sens qu’elles revêtaient aux yeux du commanditaire et des membres de son entourage. De plus, le regroupement de différentes figures dans une même scène, de plusieurs sujets sur une même surface ou à l’intérieur d’une même salle permet de poser la question des liens symboliques cohérents qui pourraient les unir. Selon Gilles Sauron, « l’archéologie du regard11 suppose de retrouver les structures de la perception visuelle » des anciens et « de reconstituer la mémoire particulière (religieuse, littéraire, philosophique, scientifique, politique, etc.) de celui qui a ordonné l’exécution de tel ou tel décor »12.

L’imagerie des revêtements de sol mosaïqués présente parfois des originalités. La sélection des motifs ou des détails découlerait d’une pensée intellectuelle élaborée. Les artisans-mosaïstes jouaient un rôle important dans la réalisation des revêtements de sols. En revanche, on a souligné leur fonction d’exécutants au service du commanditaire, comme pour les autres types d’artisans spécialistes13. Les œuvres créées pourraient être liées à la culture

ou à la pensée du propriétaire.

Plusieurs études ont mis en relation l’imagerie et les textes pour comprendre le sens des mosaïques dans leur contexte socioculturel. Il faut signaler entre autres les travaux de Marie-Henriette Quet sur la mosaïque cosmologique de Mérida (Espagne) datée du règne d’Hadrien, d’Antonin ou de Marc-Aurèle14 et sur les mosaïques d’Aiôn15, dont celle de

Shahba-Philippopolis datée du milieu du IIIe siècle p.C.16. Récemment, Jean-Pierre Darmon

11 Voir aussi : Sauron 1994, p. 1-23. 12 Sauron 1998, p. 53.

13 Voir le commentaire de Quet 1981, p. 200, pour la mosaïque de Mérida : l’artisan « ne fait pas œuvre

personnelle, il exécute une commande ». Thébert 1985, p. 381-384 ; Swift 2009, p. 18. Voir aussi : Sauron 1998, p. 150-151.

14 Quet 1981, p. 187-196 : suggère trois niveaux de lecture : cosmologique, qui représenterait la « structure du

ciel et du Cosmos » ; philosophique et religieuse qui lui confèrerait « une fonction protreptique d’initiation à l’ordre et à la perfection du Cosmos » et qui pouvait évoquer le bonheur de l’âme élevée aux cieux ; rhétorico-idéologique, qui renseignerait « sur les superstructures de pouvoir » ; p. 206-207 : pour la datation.

15 Quet 2006.

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s’est intéressé au programme iconographique, c’est-à-dire au lien cohérent qui existerait entre les mosaïques figuratives de la Maison « de la Télétè dionysiaque » ou « de Poséidon » à Zeugma datées de l’époque sévérienne17. Ce dernier suggérait que Dionysos pourrait être célébré en tant que « maître de l’Initiation18 ». À Palmyre, Janine Balty a souligné l’influence des enseignements des philosophes néoplatoniciens dans l’élaboration des mosaïques des maisons d’Achille et de Cassiopée19. C’est notamment dans cette cité qu’une mosaïque, dont

le contexte resterait à mieux définir, représenterait l’apothéose du roi Odeinat au moyen du mythe de Bellérophon et commémorerait sa victoire sur les Perses en 260 p.C.20.

Plusieurs chercheurs se sont intéressés aux cinq panneaux figuratifs du triclinium de la Maison d’Aiôn à Néa Paphos datée du milieu du IVe siècle p.C. Wiktor A. Daszewski,

inventeur de la mosaïque, a supposé la célébration de Dionysos en tant que dieu suprême et sauveur qui représente de nouvelles valeurs morales en tant que créateur et garant d’un nouvel ordre21. Après un réexamen de l’ordre des panneaux proposé initialement, plusieurs

ont suggéré une lecture allégorique en lien avec le destin de la vie humaine (doctrines philosophico-religieuses notamment exprimées par les néoplatoniciens), qui illustrerait le parcours de l’âme depuis son union avec le corps jusqu’à son apothéose (modèle à suivre pour l’initié)22. Dans le contexte théologique de cette époque, certains ont aussi reconnu avec

leur interprétation spirituelle une récupération des schémas de l’art chrétien23 dans le but de s’opposer au christianisme24. Toutefois, certains ont refusé toutes significations symboliques,

religieuse et philosophique, ainsi que tout ordre de lecture des cinq panneaux25. Bien que les noms des figures soient écrits en toutes lettres, ce qui pourrait démontrer un intérêt

17 Darmon 2005, p. 1298 : le décor mosaïqué des trois secteurs de la domus (familiale, résidentiel et de

réception) exprimerait les valeurs idéologiques de « l’aristocrate romain idéal ». Pour certaines scènes de la demeure, voir : Dunbabin 2008, p. 210-219 : qui suggère l’identification d’Éros et de Télétè sur l’un des panneaux. Darmon 2011 : identifie plutôt Éros et Psychè (initialement identifiée à Ariane).

18 Pour les mosaïques du Triomphe de Dionysos et de Pasiphaé regroupées dans le triclinium (P3 ; A1) : Darmon

2005, p. 1292-1295 ; Darmon 2012, p. 271-272.

19 J. Balty 2014, p. 52-53.

20 Gawlikowski 2005, p. 1293, 1296 et 1301-1303 ; Gawlikowski et Zuchowska 2010, p. 16-19. 21 Daszewski 1985, p. 38-45, spécialement p. 44.

22 J. Balty 1988 ; Olszewski 1990-1991, notamment p. 455. Voir aussi : Quet 2006, p. 521-522 : « les étapes du

cheminement vers le divin », c’est-à-dire que l’accès à l’immortalité découlerait du choix d’être initié aux mystères dionysiaques.

23 J. Balty 1988, p. 21 et 26-27.

24 Olszewski 2013 ; Olszewski 2020, p. 222 et 229-231.

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intellectuel de la part du dominus ou du créateur de la mosaïque, pour sa part, Christine Kondoleon doute de la théorie de W. A. Daszewski26. Katherine M. D. Dunbabin considère que le choix des thèmes serait adapté à une salle de banquet et elle indique que « we cannot know to what extent that language [of contemporary theological speculation] was understood either by the owner of the house or by the designer of the mosaic »27. Plusieurs chercheurs qui ont travaillé sur les cinq panneaux de la Maison d’Aiôn à Néa Paphos suggèrent d’y voir un programme iconographique cohérent, qui découle d’un ordre de lecture précis et qui exprime des croyances philosophico-religieuses au moyen de l’allégorie (voir supra). Malgré les débats scientifiques suscités par ces cinq panneaux mosaïqués, Marie-Henriette Quet soutient que : « l’interprétation philosophique et religieuse élaborée par Wiktor Andrzej Daszewski est, dans ses grandes lignes, aujourd’hui unanimement admise, à une exception près, inexplicable28 ».

Les sources d’inspiration pour la réalisation de l’imagerie sont variées. Dans certains cas, les commanditaires semblent avoir eu un intérêt plus personnel et plus actif pour la sélection des images mosaïquées. À travers le décor domestique, les domini pouvaient exprimer leur culture, leur idéologie ou leurs croyances.

Problématique : questions de recherche, hypothèses et objectifs

La Maison de Dionysos, située à Néa Paphos à Chypre (fig. 1 et 2), est un habitat domestique de type aristocratique, comme en témoignent les éléments architecturaux et décoratifs qui ont subsisté, dont les revêtements de sol mosaïqué. La majorité des mosaïques représentent des figures mises en scène dans un panneau, lequel est entouré des compositions géométriques. Excepté lorsqu’elles présentent un schéma particulier, comme celui du grand

triclinium, les compositions géométriques sont généralement considérées comme des

éléments décoratifs, voire de remplissage.

26 Kondoleon 1995, p. 323-324, n. 43 : « Daszewski’s theory stretches our credibility » et le chercheur « errs

on the side of overinterpretation ».

27 Dunbabin 1999, p. 231-232.

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L’une des salles de cette domus représente une scène figurée identifiable au mythe de Ganymède (fig. 8 et 9), fable rapportée brièvement par Homère au VIIIe siècle a.C. Tros, roi des Troyens, avait trois fils, dont Ganymède. Ce dernier, « pareil aux dieux » ou « rival des dieux » (ἀντίθεος), le plus beau des mortels, fut enlevé par les dieux en raison de cette beauté pour servir d’échanson à Zeus et pour vivre avec les immortels29. Depuis sa mention dans les

vers homériques, la représentation de la fable a subi quelques variations iconographiques, dont l’une des plus notables survient à l’époque hellénistique, lorsque les artisans illustrent un aigle qui emporte le jeune homme. Le groupe aigle-Ganymède fut ensuite largement favorisé dans l’art romain. On le retrouve sur divers documents qui proviennent de contextes archéologiques variés (domestique, funéraire, public, etc.). Les artisans pouvaient représenter l’éphèbe troyen à différents moments, comme les scènes où il donne à boire à l’aigle, ou l’associer à d’autres motifs ou encore à d’autres sujets, ce qui suppose des significations plus précises selon les cas. Les auteurs anciens du monde gréco-romain n’avaient pas une opinion unanime sur le mythe et différentes exégèses coexistaient. De fait, on peut se demander comment l’éphèbe troyen pouvait être perçu par le propriétaire de la Maison de Dionysos à Néa Paphos.

Sur la mosaïque de Ganymède à Néa Paphos, les motifs géométriques disposés en marge de la scène figurative incitent à s’interroger sur les raisons de leur présence à deux niveaux : fonctionnel et symbolique. Ces détails, qui n’ont pas été considérés pour l’analyse de l’un ou l’autre de ces aspects par les chercheurs précédents30, nous amènent à poser deux

questions de recherche. La première concerne le contexte d’utilisation. La salle aurait-elle pu servir de second triclinium ? La seconde interrogation découle de l’observation de l’un des types de motifs géométriques, le « fleuron », considéré ici comme un type de motif rayonnant ou radié. Ce dernier, qui se démarque des autres dans la composition, soulève la question de la signification qu’il peut conférer à la scène. Son association avec l’enlèvement de Ganymède pourrait-il exprimer l’idéologie ou les croyances philosophico-religieuses du

dominus et commanditaire ?

29 Homère, Iliade, XX, 231-235.

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Nous partirons de l’hypothèse de travail que les motifs géométriques, notamment les « fleurons », même par leur caractère « discret », ont une valeur symbolique ou une valeur fonctionnelle, c’est-à-dire que leur représentation ne découlerait pas d’un simple souci de remplissage ornemental ou d’une volonté purement décorative ou esthétique. La combinaison du motif avec la scène pourrait faire référence à une idéologie impériale, qui élevait certains individus de la société au rang de divinité, ou elle pourrait évoquer de manière plastique des doctrines sur l’âme qui alliaient la philosophie et la religion31. De plus, l’aménagement du pavement pourrait découler d’un besoin de doter la demeure d’un second espace tricliniaire qui impliquait un mobilier et des manières de table liés à la réception d’invités lors de banquets.

La présente recherche est principalement consacrée à l’interprétation iconologique et contextuelle de la mosaïque de Ganymède de la Maison de Dionysos à Néa Paphos, dont la datation pourrait être attribuée, en l’état actuel des connaissances32, à la fin du IIe ou au début

du IIIe siècle p.C. L’enquête vise à comprendre la relation sémantique entre le « fleuron », l’aigle et l’éphèbe troyen pour déterminer le ou les sens symbolique(s) possible(s) dans un contexte d’utilisation particulier. Les documents iconographiques et les sources textuelles anciennes sont utilisés pour répondre à la question du symbolisme33. Pour déterminer la fonction de la salle, le schéma observé sur la mosaïque de Ganymède est comparé à ceux des salles tricliniaires d’époque romaine. L’étude approfondie de cette mosaïque pourrait restituer en partie la pensée ou la mémoire du propriétaire, dont l’identité précise reste hors de notre portée. Aux termes de cette enquête, nous tenterons de dégager les motivations, autant que faire se peut, qui ont pu mener le dominus à commander l’exécution de la composition pour cette salle. Nous tenterons également de voir si certaines conclusions fonctionnent à d’autres endroits du décor de la domus.

31 Olszewski 2013, p. 208 : « religion and philosophy unite and complement one another ». 32 La question controversée de la chronologie est détaillée dans le premier chapitre de ce mémoire.

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État de la question

Les deux rapports de fouilles de Kyriakos Nicolaou constituent la base pour les données architecturales et planimétriques de la Maison de Dionysos à Néa Paphos34. L’étude des mosaïques de Chr. Kondoleon apporte certaines précisions dans ce domaine, notamment sur le contexte des salles et sur la circulation interne dans le secteur central de la domus35.

Dans la planimétrie, la salle de Ganymède (fig. 5, no. 10) est située au nord du péristyle et elle communique avec deux autres salles. L’une d’elles (no. 9), relativement grande, est revêtue d’un décor de xenia et d’apophoreta (motifs figuratifs qui représentent des objets offerts en cadeau aux invités). L’autre salle correspond à un couloir également mosaïqué (no. 8). Chr. Kondoleon a remarqué que cet ensemble est en retrait du péristyle et qu’il est relativement près du secteur de service, des chambres à coucher et des latrines. Par les indices planimétriques et les parallèles iconographiques trouvés en contexte domestique, la chercheure pense qu’il s’agit d’un ensemble de réception secondaire36, dont la salle aux

xenia serait une salle à manger (dining room) à caractère public37. Celle de Ganymède aurait une fonction similaire. Toutefois, cette salle aurait un caractère privé et elle servirait au divertissement des invités38. Dans leur compte rendu critique respectif de l’ouvrage de Chr. Kondoleon, G. Hellenkemper Salies adhère à l’interprétation d’un ensemble de salles à manger et de salles de réception39 et Janine Balty indique également que le décor des salles 9 et 10 les « désigne comme salles à manger40 ». De plus, dans l’étude iconographique d’une nouvelle mosaïque de Ganymède trouvée à Priverno, en Italie, Stefano Tortorella a recensé les images du jeune Troyen sur les pavements mosaïqués en contexte domestique. Ce dernier

34 K. Nicolaou 1963 ; K. Nicolaou 1967.

35 Kondoleon 1995. Voir aussi le compte rendu critique de Gisela Hellenkemper Salies 1997. 36 Kondoleon 1995, p. 119-120.

37 Kondoleon 1995, p. 133.

38 Kondoleon 1995, p. 146 et p. 182 : « […] can be found at the center of what might well be a dining

room […] ». L’index en fin d’ouvrage établit un double renvoi entre « dining rooms » et « triclinia » (p. 352 et 360). Cependant, l’auteure identifie toujours la salle no. 5 comme un triclinium dans le texte, mais elle considère les salles nos. 9 et 10 seulement au sens dînatoire du terme « dining room » et non comme des triclinia qui sont des salles caractérisées par des indices décoratifs qui marquent la position des lits de table.

39 Hellenkemper Salies 1997, p. 530 : « […] sprechen für Speise- bzw. Empfangsräume von öffentlicherem

(Raum 9) wie privaterem (Raum 10) Charakter. »

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distingue les salles de réception (ricevimento), dont celle de Néa Paphos, et les triclinia41. Plus récemment, on a très brièvement souligné, sans discussion, la possibilité de placer trois lits (klinai) sur au moins trois côtés du panneau figuratif42.

Ainsi, on n’a pas vérifié dans le détail si la salle de Ganymède pouvait avoir une fonction qui serait déterminée par des indices décoratifs propres aux salles tricliniaires utilisées pour la réception d’invités lors des banquets organisés par le dominus. Hélène Wurmser, citée par Anne-Sophie Martz, indique que : « Tout triclinium est une salle à manger, mais toute salle à manger n’est pas un triclinium43 ». La fonction de triclinium, au

sens où nous l’entendons dans cette recherche, implique un emplacement particulier pour accueillir le mobilier de table disposé en U, qui suppose des convives allongés différemment selon les types de lits (à la mode romaine ou grecque), un mode de service des invités et des manières de table. La disposition exacte du panneau figuratif dans la salle et celle des motifs géométriques unitaires dans la riche composition n’ont pas été suffisamment examinées pour déterminer le contexte d’utilisation.

Plusieurs chercheurs ont commenté la scène de l’enlèvement de Ganymède, dont les caractéristiques stylistiques et iconographiques ont attiré plus d’attention que les motifs de la composition géométrique qui l’entoure44. Ces derniers sont passés inaperçus ou ils n’ont pas

suscité d’intérêt lorsqu’il fut question du symbolisme de la scène.

Jocelyn M. C. Toynbee s’est intéressé aux mosaïques romaines à Chypre et elle s’interrogeait sur le choix et le sens de telles images pour les commanditaires. Elle prenait

41 Tortorella 2004, p. 52 : « […] due in cubicoli (nn. 3, 18), altrettanti in sale definite di ricevimento (nn. 12,

22) e cinque in ambienti triclinari (nn. 8, 10, 13, 21, 24). » et p. 57 : « 12. Nea Paphos (Cipro). Dalla Casa di Dioniso, sala di ricevimento (ambiente 10). »

42 Ioset 2016, (la version consultée a une pagination différente de celle donnée dans le sommaire), voir le

chapitre 4, la salle 17 : « The broad geometric border may have allowed the placement of klinai on at least three sides of the figural panel. »

43 Martz 2015, p. 166, n. 11 : qui cite la thèse doctorale d’H. Wurmser 2008, p. 144 (Étude d’architecture

domestique : la maison en Grèce à l’époque impériale. Thèse de doctorat, Université Paris IV-Sorbonne (inédit). [non vidi]).

44 Par exemple, K. Nicolaou 1963, p. 69 ; Vermeule 1976, p. 80-81 ; Foucher 1979, p. 157-158, fig. 5 ; Eliades

1984, p. 43-45 ; Michaelides, 1992, p. 33, no. 14 ; Kondoleon 1995, p. 133-135, fig. 81 et 83, et spécialement fig. 82, dont la restitution des motifs est incomplète.

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l’exemple des sarcophages romains, notamment celui du chef de l’école de gladiateurs à Rome sur lequel est représenté un paysage pastoral sans lien apparent avec la profession du défunt45. Selon elle, le lien qui unirait le décor mosaïqué de la Maison de Dionysos ferait référence aux idées du passage de la vie à la mort et d’une vie bienheureuse et éternelle dans l’au-delà, préoccupations personnelles de certains Romains, et des Cypriotes, qui seraient exprimées dans l’art de cette époque46. Selon elle, la scène de Ganymède enlevé par un aigle

serait « […] a very familiar allegory in Roman funerary art of the soul's rape from the body at death and entry into paradise47 ». Dans son très court article, l’auteure ne présente pas une démonstration détaillée ni approfondie pour étayer ses interprétations pour l’ensemble du décor de cette domus et pour celle de Ganymède.

Plus récemment, Chr. Kondoleon a analysé la chronologie, le style, la technique et l’iconographie des différentes mosaïques de la domus. Elle convoque un grand nombre de documents figurés pour établir des comparaisons avec l’imagerie. D’une part, elle a tenté de comprendre le processus de romanisation de Chypre et, d’autre part, elle s’est intéressée aux goûts, aux préoccupations et aux intentions du dominus et à la signification et à la fonction des images dans leur contexte physique48. Selon elle, « certain themes were selected and received as symbols evoking Romanitas, Italian villa culture, and its attendant luxuries and pleasures49 ». L’auteure suppose que Ganymède serait un signe mythologique d’hospitalité, ce qui serait corroboré par l’association des motifs de xenia et d’apophoreta de la salle adjacente, et par le choix de ce sujet sur plusieurs mosaïques en contexte domestique (cf. les

triclinia et les salles de réception)50.

L’étude de Chr. Kondoleon est importante du point de vue de l’iconographie, de la chronologie relative de certains motifs et des influences artistiques à l’époque romaine. Son

45 Toynbee 1982, p. 210.

46 Toynbee 1982, p. 211-212 et 214. 47 Toynbee 1982, p. 211.

48 Kondoleon 1995, p. 3 et 315. 49 Kondoleon 1995, p. 323.

50 Kondoleon 1995, p. 143-146 : « Ganymede is a mythological sign of hospitality in the same way that the

xenia, most particularly the inclusion of the apophoreta, serve as metonyms of edible and precious gifts to guests and friends […]. » Voir aussi : Tortorella 2004, p. 52-53.

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enquête constitue une base importante pour l’étude des mosaïques de cette domus. Cependant, le symbolisme de certaines scènes ou de leur juxtaposition pourrait être exploré davantage. Dans le cas de la scène de l’enlèvement de Ganymède, elle n’a pas envisagé ou discuté de la possibilité d’une lecture allégorique telle que l’a proposée J. M. C. Toynbee, dont les interprétations « funéraires » pour l’ensemble du décor de la domus sont qualifiées de « farfetched »51. Cependant, certains chercheurs ont fait remarquer que le mot « funéraire » avait un sens moderne. Henri Lavagne suggère que la représentation d’« Hadès » au centre des exploits d’Héraclès dans un triclinium d’une villa de Saint-Paul-lès-Romans (datée des environs de 170-180 p.C.) n’aurait « pas une résonance exclusivement funéraire », mais la présence du dieu des Enfers pourrait être un « symbole de la victoire et d’affranchissement des craintes de la mort52 ». Isabelle Morand considère également que

certaines mosaïques, dont les motifs renvoient à une notion d’immortalité, n’auraient pas « une signification funéraire, au sens " funèbre " du mot », mais elles pourraient être comprises « comme l’aboutissement, l’accomplissement total de l’harmonie universelle »53.

La présence des « fleurons » sur le pavement de Ganymède autorise le réexamen du symbolisme de l’ensemble, du moins d’en poser la question à l’aide d’un cadre méthodologique défini et différent. Plus largement, l’avancement dans la recherche iconographique et iconologique, ainsi que les nouvelles découvertes archéologiques permettent de mener une telle enquête.

Plan de rédaction

Le premier chapitre est composé de trois parties descriptives. D’abord, les cadres historique et archéologique de Chypre et de Néa Paphos, ainsi que le contexte archéologique de la Maison de Dionysos seront présentés. La partie suivante exposera les approches théoriques et la méthode retenues pour répondre aux questions de départ. Enfin, la dernière partie sera consacrée à la description de la mosaïque paphienne et du corpus iconographique

51 Kondoleon 1995, p. 323-324. 52 Lavagne 1979, p. 289-290. 53 Morand 1994, p. 110.

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principal. Le deuxième chapitre présentera l’analyse de la nature du motif radié dans l’imagerie de Ganymède. Des documents figurés complémentaires et des textes anciens seront également convoqués à cet effet. Par rapport à l’imagerie du corpus principal, la mosaïque de Néa Paphos présente cependant une particularité qui devra être abordée séparément. Enfin, les motifs figuratifs de l’aigle et de l’éphèbe troyen font l’objet d’une analyse extensive. Le dernier chapitre sera consacré à la discussion et à l’interprétation des motifs observés sur la mosaïque de Ganymède. La fonction de la salle sera d’abord discutée et le symbolisme ensuite. Certaines mosaïques de la domus seront aussi convoquées à cette étape pour vérifier si les conclusions iconologiques se retrouvent également dans certaines salles de la domus. La conclusion générale reprendra les éléments clés qui auront servi à vérifier les hypothèses. Des réflexions critiques sur la démarche utilisée pour répondre aux questions de recherche de départ seront discutées. Enfin, les possibilités de recherches futures seront finalement énoncées.

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Chapitre 1 : Description du cadre de la recherche

Ce chapitre sera consacré à la description du cadre de la recherche. Dans un premier temps, les données historiques et archéologiques de Chypre, de Néa Paphos et de la Maison de Dionysos seront présentées. La partie suivante sera consacrée aux approches théoriques, aux principes herméneutiques et à la démarche méthodologique. Dans un dernier temps, les documents figurés qui constituent le corpus principal seront décrits.

1.1 Cadres historique et archéologique

L’objet de la première section sera la présentation des cadres historique et archéologique de Chypre, notamment de Néa Paphos à l’époque romaine. La seconde section sera consacrée aux données archéologiques disponibles pour la Maison de Dionysos.

1.1.1 Chypre et Néa Paphos à l’époque romaine

Avant l’époque romaine, Chypre était occupée par les successeurs d’Alexandre le Grand. À la mort de ce dernier, Ptolémée et Antigonos se disputaient l’île. Lorsque celle-ci est devenue la possession des Lagides, Néa Paphos fut nommée la capitale. Sous l’occupation hellénistique, Chypre connaît une période de paix et de prospérité54.

En 58 a.C., P. Clodius Pulcher présentait au Sénat romain la Lex Clodia de Cypro qui visait à confisquer le trésor de Ptolémée le Chypriote et à annexer l’île à la province romaine de Cilicie55. En 50-51, Cicéron était le proconsul responsable de l’administration de la

province républicaine, mais l’orateur ne visitera pas l’île56. Quelques années plus tard, Jules César redonnait l’île aux Ptolémées. Le transfert est de courte durée, puisqu’elle redevient romaine après la victoire d’Actium en 31 a.C. Elle prenait le statut de province impériale

54 Alastos 1955, p. 85-89 ; Karageorghis 1990, p. 178. 55 Mitford 1980a, p. 1290 ; Karageorghis 1990, p. 182-184. 56 Mitford 1980a, p. 1291.

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gouvernée par un proconsul en 22 a.C.57. À partir de cette date, « Cyprus entered upon more than three centuries of a tranquil obscurity, seemingly not unprosperous and apparently well governed » selon Terence Bruce Mitford58.

Néa Paphos, capitale administrative – statut qu’elle perdra au profit de Salamine en 346 p.C. – a reçu le titre de Σεβαστή (Sébastè ; Augusta) de la part d’Auguste après le séisme en 15 a.C.59. En guise de remerciement, la capitale adoptait le calendrier impérial, dont « les mois sont nommés pour glorifier Auguste » et sa gens, tandis que les autres cités, comme Salamine, conservaient le calendrier égyptien60. Une importante inscription sur plaque de marbre mentionne le serment d’allégeance à Tibère prêté par l’« Hestia Boulaia » (Βουλαία Ἑστία) ou le « Koinon » des Cypriotes, ce qui témoigne de l’importance du culte impérial61.

Comme pour les autres provinces romaines, Auguste et les empereurs suivants, ainsi que les membres de leur entourage, sont divinisés et honorés dans l’art statuaire et dans les dédicaces cultuelles62. Le sanctuaire d’Aphrodite à Palaepaphos était un lieu « d’affichage » important,

mais le scaenae frons du théâtre et l’agora de Néa Paphos pourraient également avoir eu un programme décoratif lié au culte impérial63. Les statues honorifiques peuvent prendre des proportions importantes, comme le montre celle de bronze, découverte entière (2,08 m de hauteur) à Kythréa, au nord-est de l’île, qui montrait Septime Sévère en nudité héroïque sous les traits de Mars Pater ou Victor64.

L’activité sismique est importante à Chypre et quelques séismes sont connus historiquement. Le tremblement de terre de 77 p.C. endommageait aussi les monuments de Néa Paphos. Peu de temps après, l’empereur Vespasien aurait participé à la restauration du sanctuaire d’Aphrodite à Palaepaphos. Une dédicace trouvée sur un autel ou une base

57 Pour la liste des proconsuls de Chypre, voir : Mitford 1980a, p. 1299-1304. 58 Mitford 1980a, p. 1295.

59 Mitford 1980a, p. 1297 ; Mitford 1980b, p. 281, n. 33 et p. 286. 60 Mitford 1980a, p. 1312 et 1358 ; Mitford 1980b, p. 281, n. 33. 61 Fujii 2013, p. 77-91 ; Cayla 2018, p. 229-235, no. 108.

62 Mitford 1980a, p. 1347-1355. Par exemple, les dédicaces à la divine Livie en tant que « nouvelle Aphrodite »,

voir : Cayla 2018, p. 226, no. 104 et p. 238, no. 112.

63 Barker et Stennett 2004, p. 258 ; Cayla 2018, p. 92.

64 Vermeule 1976, p. 86 : suggère que la statue tenait une lance et un trophée et que le choix du dieu de la

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d’offrande, qui mentionne Domitien et Titus, aurait été offerte après ces travaux65. Une

anecdote rapportée par Tacite et par Suétone mentionne l’oracle favorable qu’aurait reçu Titus par le prêtre d’Aphrodite lors de son voyage en 69 p.C. pour rejoindre son père en Judée66. Des travaux de restauration du sanctuaire d’Apollon d’Hylatès (« des bosquets ») à Kourion, dont l’épiclèse est seulement attestée à Chypre67, auraient été menés quelque temps

après le tremblement de terre de 77 p.C.68. Sous Trajan et Hadrien, ce sanctuaire devenait un lieu important du culte impérial69. Le temple d’Aphrodite à « la renommée œcuménique » et les autres sites religieux de Chypre auraient eu une « valeur touristique » pour les Romains de l’Empire70.

Parallèlement à la religion païenne gréco-romaine, on trouve des traces des religions monothéistes. Présente sur l’île depuis le temps de Ptolémée Philadelphe, la population juive se révolte en 115-116 p.C. et ravage la ville de Salamine. Cette dernière est ensuite reconstruite sous les règnes de Trajan et d’Hadrien71. Entre 46 et 48 p.C., le proconsul Sergius

Paulus rencontre Paul et Barnabé à Paphos et il se convertit au christianisme72. Après cette date, les mentions des évêques chrétiens de Paphos de 325 et de 343 p.C. marquent le début de l’implantation durable de cette religion sur l’île73, nouveauté qui trouverait cependant des

indices d’opposition dans le décor mosaïqué de la Maison d’Aiôn (voir supra).

Les ressources naturelles de Chypre, les sols fertiles pour la culture de la vigne, de l’olivier et du blé, les forêts du Troodos et les mines de cuivre de Tamassos étaient bien connus74. Ces divers produits étaient apportés dans les ports en vue de l’exportation vers les marchés occidentaux de l’Empire75. Reliée par des routes de navigation directes et indirectes

65 Mitford 1980a, p. 1310-1311 ; Karageorghis 1990, p. 185-187 ; Cayla 2018, p. 240-241, no. 114. 66 Tacite, Histoires, II, 4 ; Suétone, Vie des douze Césars, Titus, V.

67 Vernet 2011, p. 252-253. 68 Kantiréa 2010.

69 Kantiréa 2010, p. 272-273.

70 Mitford 1980a, p. 1309 et 1346-1347 et n. 285. Voir aussi : Gordon 2012, p. 287-288 et n. 1156 et p. 298. 71 Mitford 1980a, p. 1380-1381.

72 Mitford 1980a, p. 1381.

73 Mitford 1980a, p. 1381-1382 ; Cayla 2018, p. 110-111. 74 Cf. Strabon, Géographie, XIV, 6, 5.

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(par cabotage) notamment avec les ports de Rhodes, de la Cilicie, du Levant et de l’Égypte76,

l’île participait à l’économie romaine. Sous le règne des Sévères (193-235 p.C.), Chypre et Néa Paphos connaissent une période de prospérité et un « âge d’or » pour l’art77. Le climat d’instabilité politique qui survient après la mort d’Alexandre Sévère semble marquer un creux pour les échanges et l’économie de l’île, une situation qui se rétablira avec l’instauration de la tétrarchie par Dioclétien78.

On connaît l’emplacement du centre civique de la ville portuaire de Néa Paphos (fig. 2). Un odéon en hémicycle et un « Asclépieion », dédié au dieu de la Médecine, sont situés à l’ouest de l’agora. Jean-Pierre Cayla suggère que l’« odéon », d’une capacité d’environ 1200 personnes, pourrait être le bouleutêrion de Paphos79. La capitale avait un

théâtre, d’environ 7500-8000 places, construit contre le versant sud de la colline de Fabrika située au nord-est de l’agora (fig. 2, cf. T). On a reconnu six phases de modifications et de réaménagements pour ce lieu de divertissement public, dont les quatre dernières sont d’époque romaine80. Il subit quelques transformations peu de temps après le tremblement de

terre de 15 a.C., puis, il est reconstruit au milieu du IIe siècle p.C., peut-être en raison d’un autre séisme sous le règne d’Hadrien. Les fragments de l’architrave, vraisemblablement située au-dessus de la scène, ont révélé une dédicace à Zeus Capitolin, à Antonin le Pieux et à Marc-Aurèle81. Au cours du IIIe siècle, l’orchestra est réaménagée pour accueillir des spectacles nautiques (naumachiae), des combats de gladiateurs et des chasses d’animaux (venationes), importants changements qui ont peut-être été entrepris après un autre tremblement de terre82. La destruction finale aurait eu lieu au cours du IVe siècle. En plus du théâtre, un amphithéâtre serait aussi localisé au sud de la Villa de Thésée près du port83 (fig. 2, cf. A).

76 Arnaud 2005, p. 216-217 et 219-223 (voir aussi les cartes des itinéraires maritimes, p. 212 et 222). 77 Michaelides 1987, p. 3 ; Michaelides 1992, p. 4 ; Gordon 2012, p. 298.

78 Gordon 2012, p. 300-303.

79 Cayla 2018, p. 101, n. 376 et p. 234. 80 Barker et Stennett 2004, p. 253-260.

81 Sur cette inscription, voir : Cayla 2018, no. 120, p. 244-246.

82 Green et Stennett 2002, p. 186 et n. 52 ; Barker et Stennett 2004, p. 258-259.

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Au nord de l’ancienne cité, la nécropole dite des « Tombeaux des Rois », utilisée depuis le IVe siècle a.C., a également livré des inhumations d’époque romaine, dont certaines contiennent des fresques peintes. Une découverte récente a livré une dalle peinte d’une figure féminine richement parée84, dont le style trouverait des rapprochements avec la statuaire palmyrénienne et les portraits du Fayoum des IIe et IIIe siècles p.C.85.

Outre la Maison de Dionysos, trois autres bâtiments à caractère élitaire sont regroupés dans le secteur résidentiel situé au sud de l’agora. La Maison d’Orphée a livré trois panneaux figuratifs : Orphée et les animaux, une Amazone et un cheval et Héraclès et le lion de Némée. La domus, dotée d’un atrium et de salles sur hypocaustes pour des bains privés, serait datée de la fin du IIe et du début du IIIe siècle p.C.86. Sur la mosaïque d’Orphée, l’inscription

grecque « [Tit]us ou [Gai]us Pinnius Restitutus a fait ou a fait réaliser » indiquerait peut-être le nom du propriétaire de la domus, que l’on suppose être un citoyen romain de la partie occidentale de l’Empire87.

Avec une centaine de salles qui se répartissent sur environ 9600 m², on suppose que la « Villa de Thésée » aurait servi de résidence officielle pour les gouverneurs ou proconsuls de l’île88. Construite dans la seconde moitié du IIe siècle p.C., elle fut réaménagée et agrandie

à différents moments jusqu’au Ve siècle. Les mosaïques de Thésée et du Labyrinthe, de

Neptune et d’Amphitrite et de la scène du premier bain d’Achilles, respectivement attribuées au IIIe, au IVe et au Ve siècles89, témoignent de ces changements.

Finalement, les vestiges de la Maison d’Aiôn datée du IVe siècle p.C. sont localisés à

l’ouest de la Villa de Thésée. La domus à péristyle s’inscrit dans la partie sud d’un îlot résidentiel. Son vestibule d’entrée (vestibulum) revêtu d’une mosaïque géométrique tripartite

84 Raptou 2004, p. 311, p. 314-318 et fig. 2 et pl. 40,1 et 45,1 : peut-être une figure divine ou allégorique, avec

une inscription peinte, dont on restituerait « χρηστέ » ou « χρηστή χαιρε » (p. 315). Voir aussi : Mitford 1980a, p. 1374, n. 469 : pour les formules funéraires.

85 Raptou 2004, p. 317-318 et n. 11 et 12.

86 Michaelides 1991 : 3-10 et fig. 2 ; Michaelides 1992, p. 16-21.

87 Michaelides 1986, p. 485-486 : « [ΤΙΤ]ΟΣ ou [ΓΑΙ]ΟΣ ΠΙΝΝΙΟΣ ΡΕΣΤΙΤΟΥΤΟΣ ΕΠΟΙΕΙ ».

88 Daszewski et Michaelides 1988, p. 53 ; Daszewski et Michaelides 1989, p. 57 ; Michaelides 1992, p. 47. 89 Michaelides 1992, p. 47.

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donnait également accès au triclinium, dont le mur de fond présente une niche absidiale flanquée de colonnes engagées90. Les cinq panneaux figuratifs du triclinium au schéma en T+U représentent les scènes de Léda et Zeus, de Dionysos assis sur les genoux d’Hermès, du Triomphe de Dionysos, de la condamnation de Marsyas par Apollon et du concours de beauté entre les Néréides et Cassiopée91.

1.1.2 Contexte archéologique de la Maison de Dionysos à Néa Paphos

La Maison de Dionysos fut découverte accidentellement en 1962 lors de travaux de nivellement entrepris par des moyens mécaniques, lesquels ont endommagé quelques pavements mosaïqués92. Les fouilles archéologiques instaurées cette même année et dirigées

par Kyriakos Nicolaou93 ont ensuite exposé le plan complet de la domus d’une superficie

d’environ 2000 m² (fig. 3 et 4).

Des structures plus anciennes sont connues à cet endroit. L’exploration archéologique sous les vestiges de la domus a mis au jour un revêtement composé de petits galets qui représente le monstre marin Scylla. On lui attribue une datation de la fin du IVe ou du début du IIIe siècle a.C.94.

Toutefois, la faible épaisseur stratigraphique au-dessus des mosaïques complique la chronologie de la domus. Au moment de sa découverte, K. Nicolaou a attribué sa construction à la seconde moitié du IIIe siècle p.C. selon les critères stylistiques des mosaïques et il a supposé une destruction au siècle suivant, par les tremblements de terre de 332 ou de 342 p.C.95 . Les observations stylistiques des scènes figurées et de certains motifs géométriques ont conduit Janine Balty à proposer une datation des mosaïques à la fin du IIIe

90 Brzozowska-Jawornicka 2016, p. 160-164 et pl. 1.1, 3.1-2 et 5 ; Mikocka 2018, p. 124. 91 Daszewski 1985, pl. 2-19 et fig. 3a-b ; Daszewski et Michaelides 1989, fig. 45-51.

92 K. Nicolaou 1963, p. 56 : les mosaïques de Narcisse, du Paon, des Saisons et des Vendanges ont été affectées

par les travaux. Ces dernières ont été restaurées, mais la scène des Vendanges conserve des lacunes importantes.

93 K. Nicolaou 1963 ; K. Nicolaou 1967.

94 Daszewski et Michaelides 1988, p. 15-18 ; Guimier-Sorbets 2009, p. 142. 95 K. Nicolaou 1963, p. 72 ; K. Nicolaou 1967, p. 101 ; K. Nicolaou 1971, p. 144.

Figure

Figure 1 - Carte géographique de Chypre et localisation de Néa Paphos (d’après T. Fujii  2013, p
Figure 2 - Carte archéologique de Néa Paphos et la localisation de l’amphithéâtre (A) et du  théâtre (T) (d’après Daszewski et Michaelides 1989, fig
Figure 4 - Relevé de la Maison de Dionysos à Néa Paphos et des vestiges liés aux  occupations antérieures (d’après Hayes 1991, Plan B)
Figure 6 - Accès Nord-Ouest à la salle de « Ganymède » dans la Maison de Dionysos à Néa  Paphos (photographie de l’auteur)
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