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Architecture et politique : le Buzludzha, un bâtiment pour la Bulgarie des années 1980

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Architecture et politique : le Buzludzha, un bâtiment

pour la Bulgarie des années 1980

Marine Bouchet

To cite this version:

Marine Bouchet. Architecture et politique : le Buzludzha, un bâtiment pour la Bulgarie des années 1980. Architecture, aménagement de l’espace. 2016. �dumas-01803152�

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Marine Bouchet

Sous la direction de Clara Sandrini 08/09/2016

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2 Je remercie

Georgi Stoilov pour le temps qu'il a consacré à répondre à mes questions, Clara Sandrini pour m'avoir suivie dans ce mémoire,

Thibault Paturle et Line Pékin pour leurs photographies, et ma famille pour m'avoir soutenue dans ce travail.

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Sommaire



I. Historique de la période communiste. ... 8

1. Origine du communisme ... 8

2. Mise en relation de l’histoire de la Bulgarie et de celle de l’URSS ... 10

3. Politique culturelle et architecturale en Bulgarie sous la période communiste. ... 14

II. Le Buzludzha, un monument pour transmettre l’idéologie communiste. ... 17

1. La politique architecturale : la tradition des monuments ... 17

2. Un monument de propagande et d’unification du pays ... 20

3. Un bâtiment pour la postérité ... 25

4. Un édifice presque religieux. ... 27

III. Le Buzludzha, un bâtiment hors norme ... 30

1. Un rapprochement avec les idées des Avant-Gardes Russes. ... 30

2. Une influence de l’Ouest ... 33

3. Un bâtiment contextualisé ... 35

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« La clé de l’architecture soviétique est avant tout politique. La compréhension de son évolution n’est pas à chercher dans le domaine de la théorie architecturale mais, plus prosaïquement, dans celle du régime et de son évolution. Nulle part ailleurs, et sur une telle durée dans le temps, le paysage urbain n’a été aussi directement profilé par le pouvoir. »

Frédéric CHAUBIN, CCCP, Cosmic Communist Constructions Photographed

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Introduction

L’histoire moderne de la Bulgarie est marquée par un courant politique : le communisme. Ce mouvement politique dirigeait toute la société de façon globale. L’architecture est un élément fondamental dans la mise en place d’une société socialiste :

"Dans la pensée totalitaire, la tâche de construire scientifiquement une société progressiste et un homme nouveau étaient étroitement associée à des processus constructifs plus concrets. »1

La question de la préservation du patrimoine architectural communiste est au cœur des questionnements actuels en Bulgarie. Pendant de nombreuses années, le pays a eu du mal à prendre conscience de la valeur de cet héritage architectural socialiste. En effet, cette période historique est très proche dans le temps : certains la dénient complètement tandis que d’autres la glorifient. Cela entraîne des problèmes de consensus empêchant les autorités publiques de prendre des décisions. Il semble alors intéressant de regarder ce patrimoine d’un œil extérieur.

Cet écrit s’intéresse au patrimoine architectural soviétique à travers un bâtiment emblématique de cette période en Bulgarie : le Buzludzha, construit entre1974 et 1981. Edifié au milieu de la Bulgarie, en haut d’un mont historique, il semble montrer la puissance de l’idéologie communiste. Cette construction n’est pas seulement un "bâtiment", elle est surtout un "monument".

La Bulgarie, fidèle alliée de l’Union soviétique se calque sur sa politique. L’architecte, Georgi Stoilov est un membre actif du parti communiste Bulgare, maire de Sofia puis ministre de l’architecture et des travaux publics, il est député à l’assemblée nationale lorsqu’il conçoit le Buzludzha. Le bâtiment tente-t-il de retranscrire l’idéologie communiste ?

Mais cette période historique est aussi une période de doute, l’empire soviétique s’ébrèche et partout en Europe de l’Est on voit apparaitre des bâtiments aux formes extravagantes, bien éloignées des formes standardisées de l’architecture soviétique. Le Buzludzha n’est pas un cas isolé. Montrent-ils un prémisse de liberté ? L’URSS, « trop occupée à différer sa propre disparition » laisse-t-elle faire ou bien ces commandes sont elles une dernière tentative pour montrer la suprématie du dogme communiste ?

1

GOLOMSTOCK Igor, L’art totalitaire, Editions carré, Paris ,1991, Chapitre 7, Architecture et style, Partie 1, L’idéologie faite de pierre.

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6 PROMBLEMATIQUES

Comment le Buzludzha est-il témoin de l’histoire moderne de la Bulgarie ?

Le Buzludzha est construit entre 1974 et 1981 en Bulgarie. A cette époque le bloc communiste commence à s’effriter mais la Bulgarie semble toujours croire en la suprématie de ce modèle. La célébration des 1300 ans de l’Etat Bulgare par le parti communiste en 1981 en est le signe. Les festivités s’accompagnent de la construction de monuments dont fait partie le Buzludzha. Ce bâtiment semble alors être le témoin d’une époque charnière en Bulgarie.

Comment un système politique tel que le communisme peut il avoir de l’influence sur un bâtiment ?

Le Buzludzha est commandé dans les années 1960 par le gouvernement communiste. La demande faite est de « poser une étoile rouge en haut du mont Buzludzha » : de construire un monument en l'honneur de l’idéologie communiste. Mais comment retranscrire cette idée abstraite en architecture ?

Comment l’architecte, Georgi Stoilov se place-t-il dans ce contexte historique pour concevoir le Buzludzha ?

Georgi Stoilov, à la fois homme politique et architecte, gagne le concours pour construire le Buzludzha en 1962. Le parti a totalement confiance en lui ce qui lui donne la possibilité de concevoir librement le monument. On peut alors se demander à quel point l’architecte cherche à transcrire l’idéologie communiste dans le bâtiment, comment il se situe dans les différents courants architecturaux de l’époque ou encore comment il réagit par rapport au contexte.

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7 METHODOLOGIE

Au cours de l’année passée, l’occasion s’est présentée à deux reprises de visiter le Buzludzha. Sans savoir au préalable que ce serait sujet de mémoire, je m’y suis attardée, observant l’édifice et prenant de nombreuses photographies. De retour en France, je me suis plus longuement intéressée au sujet et lu des ouvrages généraux sur le communisme, l’histoire de la Bulgarie ou encore l’architecture soviétique. J’ai alors mis en relation mon expérience dans le Buzludzha avec les informations recueillies au cours de ces lectures. Mais les données en Français et en Anglais sur ce bâtiment ne sont pas très nombreuses. Il est donc compliqué de vérifier certaines informations. Qui peut mieux parler d'un bâtiment que son auteur? J’ai donc contacté Georgi Stoilov, qui m’a proposé un entretien. Je me suis à nouveau rendue à Sofia pour le rencontrer. Certaines théories ont alors été remises en cause tandis que d’autres se sont trouvées vérifiées.

LOGIQUE DE DEMONSTRATION

Ce mémoire s’organise en trois parties. La première resitue le bâtiment dans son contexte politique et historique. Dans une seconde partie nous chercherons en quoi le Buzludzha retranscrit l’idéologie communiste et verrons qu’avec son statut de monument, il parle plus de la force du pouvoir en place que d’idéologie. Nous découvrirons enfin comment le bâtiment montre des signes précurseurs de la fin de l’URSS, avec un détachement par rapport à l’architecture soviétique pour se tourner vers une architecture libérée des modèles.

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Sofia BUZLUDZHA Roumanie Serbie Macédoine Grèce Turquie Bulgarie Mer noire http://www.archdaily.com/86986/the-challenges-of-abandoned-architecture-buzludzha-monument-gueorguy-stoilov/img_2

Le monument sur le mont Buzludzha. Localisation du Buzludzha en Bulgarie.

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Document fourni par Georgi Stoilov

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I.

Historique de la période communiste.

1. Origine du communisme

Commençons par définir ce qu’est le communisme. Cette notion trouve son origine au siècle avec les lumières (XVIIIème siècle) et dans la révolution égalitaire. En effet, en 1762, dans le contrat social, Jean Jacques Rousseau, « Affirme que le mal, et avec lui

l'inégalité, ne vient pas d'un quelconque défaut de la nature humaine, mais d'un état défectueux de la société, du pouvoir usurpé du fort sur le faible, fondement à l'ordre social. » L’idée d’égalité parmi les hommes se répand en Europe et devient un sujet

principal pour les philosophes.

Pour Marx, la tâche suprême des peuples est d’accomplir la révolution égalitaire. En 1848, il expose ses idées dans le Manifeste Communiste. Pour lui, « aussi longtemps

qu’il y aura des différences de fortune au sein de la société, il y aura des différences de pouvoir et de statut, il y aura exploitation de certains par d’autres, domination d’êtres humains sur d’autres êtres humains. Or, toute domination et toute exploitation sont un déni de la dignité humaine, une profanation de la personne sacrée de l'Homme. L'inégalité est donc une déshumanisation, un scandale moral auquel il faut mettre fin si le monde doit enfin atteindre la vraie civilisation. » 2

« Ainsi le socialisme ne désigne jamais, en son usage premier, une forme d'organisation sociale, il désigne une alternative idéale à toutes les formes de sociétés existantes. En résumé, le socialisme est une utopie, au sens littéral du terme : un « non-lieu » ou un « nulle part », conçu comme altérité idéale. »3

Pour parvenir à la société idéale, selon Marx dans le manifeste du parti communiste, la société doit s’approprier toute propriété individuelle : « La théorie du socialisme peut se

résumer en une seule et unique phrase : abolition de la propriété privée. » Avec elle, le

profit et le marché doivent aussi être abolis. Cette révolution a pour objectif de mettre fin à l’exploitation du prolétariat pour aboutir à une société sans Etat et sans classe. En cela, le communisme s’oppose au capitalisme. Finalement, « le socialisme trouve son

origine dans une idée morale, l'égalité, et aboutit à un programme d'action, l'abolition de la propriété et du marché. »4

Dans son manifeste, Marx parle de lutte des classes. Cette lutte est un combat physique et violent. Le ressentiment de la classe devant son exploitation produit une révolution sociale qui fait passer l’humanité d’un mode de production à un autre. Marx entend ainsi que la mise en pratique de son système ne peut se faire sans le bouleversement d’une révolution. « Le socialisme en vient à signifier le point culminant

2 MALIA, Martin, La tragédie soviétique. Histoire du socialisme en Russie. 1917-1991, Éditions du seuil, 1995, chapitre

1, Socialisme : le stade suprême de la démocratie

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de l'Histoire, le but ultime du développement humain ; et sous cet habit, il produit une théorie de l'histoire »5 La société communiste prétend atteindre la fin historique, la fin de la succession « féodalité, capitalisme, socialisme ».

Ce n’est qu’avec la révolution Bolchevique en 1917 que le mouvement est concrétisé dans l'organisation de la société. Mais lorsque les socialistes sont au pouvoir, un fossé se creuse entre cette société et les idéaux du mouvement. En effet, plus les mouvements sont démocratiques, moins ils réalisent le programme économique socialiste. Les méthodes employées sont alors brutales, « le communisme émerge comme

totalitarisme absolu »6.

L'Union Soviétique considérait qu'elle était socialiste, mais n'avait pas encore atteint le stade du communisme. En effet, le socialisme est un stade préalable qui permet d’atteindre le communisme par la nationalisation progressive des moyens de production et d’échange.

5 MALIA, Martin, La tragédie soviétique. Histoire du socialisme en Russie. 1917-1991, Éditions du seuil, 1995, chapitre

1, Socialisme : le stade suprême de la démocratie

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2. Mise en relation de l’histoire de la Bulgarie et de celle de l’URSS

La Bulgarie devient communiste le 9 septembre 1944. Sous la menace des troupes soviétiques à la frontière Nord, le "Front de la Partie", un des partis socialistes Bulgare, en profite pour renverser la monarchie en place. Il signe immédiatement l’armistice avec l’URSS. La pénétration de l’armée rouge fut pacifique. Elle est accueillie à Sofia le 16 septembre « avec sympathie, voire enthousiasme ». Le parti communiste Bulgare s’empare de tous les pouvoirs et dirige le pays suivant le modèle socialiste.

De 1944 à 1948, la Bulgarie entre dans la période de « démocratie populaire ». Dès 1945, l’économie est planifiée dans le but de lutter contre les formes capitalistes de production. Différents plans quinquennaux se succèdent. L’équilibre économique du pays se modifie : la part d’agriculture diminue tandis que celle de l’industrie augmente. Sur le modèle des Kolkhozes soviétiques, des « fermes coopératives de travail se forment : c’est la collectivisation de l’agriculture. A partir de 1947, les industries et les commerces sont nationalisés. En 1947, une nouvelle constitution est votée par la Grande assemblée, elle prend pour modèle la constitution soviétique de 1936. La Bulgarie s’y définit comme « république populaire ». Elle fait maintenant partie du bloc socialiste.

De 1948 à 1953,, l’URSS est dirigée par Staline. Les trois premiers ministres qui se succèdent, à la tête du gouvernement Bulgare, Georgi Dimitrov, Vasil Koralov et Valko Tchervenko, exécutent "à la lettre" les décisions venant du Kremlin. Cette période est caractérisée comme le temps du stalinisme « pur » : « Sa transformation se

fait à l’ombre de la toute puissance de Staline »7.

Adoptant les caractéristiques du système soviétique, le système politique Bulgare devient un régime totalitaire. La Bulgarie est soumise au parti communiste qui prend toutes les décisions, autant politiques que liées au développement de l’industrie, de l’économie, de la construction, de l’administration. Une terreur physique, politique et idéologique s’installe. Les « ennemis » du peuple sont jugés, exécutés ou envoyés dans des camps de travaux forcés. Cette épuration interne est inspirée par la thèse de Staline selon laquelle l’installation de la peur et l’encouragement à la délation renforceront la lutte des classes. Une police secrète est mise en place avec ses méthodes d'interrogation sous torture physique et psychologique. Avec la décapitation du clergé catholique et protestant, l’église est réprimée. L'église orthodoxe Bulgare est quant à elle mise sous tutelle. Le parti communiste Bulgare contrôle complètement l’église jusqu’en 1953, date à laquelle le patriarcat Bulgare est rétabli.

7

CASTELLAN, Georges, La Bulgarie, Editions Que sais-je ?, Presses universitaires de France, 1976, Chapitre « L’établissement du régime socialiste »

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Dans les années 1950, c’est le début de la guerre froide. En réponse au plan Marshall destiné à aider financièrement l’Europe à se reconstruire, l’union soviétique fonde le Kominform auquel la Bulgarie adhère. En plus de se lier économiquement à l’URSS, la Bulgarie s’allie militairement avec cette dernière. En 1955, le pacte de Varsovie forme une institution militaire : la Bulgarie en devient membre. Le monde est divisé en deux blocs. Le nouvel ennemi est l’Amérique.

A la mort de Staline, le 5 mars 1953, le mouvement communiste est à son apogée,

« jamais l’église rouge n’a rassemblé autant de fidèles ». Mais pendant les années qui

suivront, des évènements sonneront la fin de l’URSS voire la précipiteront. Durant cette longue chute, la Bulgarie restera politiquement très proche de l’URSS. Au Xème congrès du parti communiste Bulgare en 1971, la Bulgarie déclare dans sa nouvelle constitution: « L'amitié bulgaro-soviétique est au Parti communiste Bulgare et au peuple

bulgare comme l'air et le soleil sont à tout être humain, c'est une amitié qui date depuis des siècles et qui demeurera dans les siècles, une des forces motrices de notre développement, condition et garante de l'essor futur de notre patrie socialiste et de son avenir. »8

De 1953 à 1989, s’étend la période du Jivkovisme, nom issu du dirigeant de la Bulgarie et du parti communiste bulgare pendant cette période : Todor Jivkov. En URSS, Nikita Khrouchtchev est devenu premier secrétaire du parti communiste soviétique. Au XXème congrès du parti communiste, le 24 février 1956, il dévoile son rapport secret. Il y énumère les crimes de Staline, dressant le portait d’un tyran sanguinaire, fabriquant son propre culte. Le rapport est rapidement diffusé en URSS. En Europe de l’Est, le rapport Khrouchtchev provoque de vives réactions. En Hongrie, en 1956, cela tourne même à la révolution. On s’en prend aux symboles même du parti communiste et l’on réclame des élections libres. Les chars Russes interviennent et écrasent la révolte : sous la menace de l’armée rouge, toute contestation est interdite dans les pays satellites.

En Bulgarie, la population s’attend à un changement positif mais, malgré une légère détente, les grands changements politiques n’arrivent pas : la critique du communisme porte uniquement sur le culte de la personnalité et non sur le fondement totalitaire du régime. Todor Jivkov devient le nouvel homme de confiance de Moscou. Il exécute les instructions de Moscou en prenant soin de suivre « la nouvelle ligne » du parti communiste soviétique. En effet, en Russie, c’est la fin de la terreur, en 1956, les portes des camps s’ouvrent. On commence à croire que les temps changent. En septembre 1959, Khrouchtchev se rend aux Etats Unis. C’est la première visite d’un chef d’Etat soviétique aux Etats Unis. Sous Khrouchtchev, l’URSS s’ouvre un peu sur l’Ouest. La coexistence pacifique débute.

8

CASTELLAN, Georges, La Bulgarie, Editions Que sais-je ?, Presses universitaires de France, 1976, Chapitre « La vie politique »

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Entre 1956 et 1962, les réactions de Jivkov et du parti communiste Bulgare suivent celles de Krouchtchev et du parti communiste soviétique. En 1957, la chine s’oppose à l’union soviétique. La Bulgarie soutient l'URSS au contraire de l'Albanie et de la Roumanie qui en profitent pour s'éloigner du Kremlin. Elle soutient sans réserve la position des soviétiques à toutes les réunions des pays membres du pacte de Varsovie ou du conseil d'entraide économique.

A partir de 1963, l’alignement prosoviétique est à son maximum. Le 4 décembre, Jivkov envoie une lettre à Krouchtchev pour le rassurer de la fidélité des Bulgares envers l'Union Soviétique et de leurs efforts pour instaurer des relations encore plus étroites, jusqu'à insinuer la perspective de réunion de la Bulgarie avec l'Union Soviétique, proposition qui resta secrète.

Mais lors de la "crise des fusées", Khrouchtchev recule devant Kennedy à Cuba. Son bilan est mitigé. En 1964, Brejnev lui succède. En Mai 1968, le printemps de Prague montre de nouveau que l’on ne peut pas quitter pacifiquement l’Union Soviétique. Todor Jivkov décide une fois de plus d'être le plus proche et le plus fidèle disciple de l'union soviétique. Dans la nuit du 20 au 21 Août 1968, les troupes du pacte de Varsovie « rétablissent l’ordre à Prague ». Aux côtés des militaires soviétiques se trouvent des Allemands de l’Est, des Hongrois, des Polonais et des Bulgares.

La Pologne finit de précipiter l’effondrement final. En 1980, les ouvriers du chantier naval de Gdansk se mettent en grève. Cette fois ci, la révolte ne vient pas d’une poignée d’intellectuels mais de la classe ouvrière elle-même. Le parti communiste Polonais est contraint à négocier. Mais en 1981, l’Etat Polonais intervient et décrète l’Etat de guerre. « Le fossé devient évident entre les idéaux surréels et les âpretés

quotidiennes. Le vernis idéologique craque. La foi dans la suprématie d’un système économique et social s’effondre. Plus se dégrade l’image de l’URSS, plus s’étiole la mythologie d’octobre, plus s’effondre l’idéologie communiste, plus l’Union Soviétique s’affirme comme grande puissance militaire.»9 L’URSS et les Etats Unis se lancent dans

une course effrénée à l’armement.

En trois ans, trois dirigeants soviétiques se succèdent. En 1985, Gorbatchev prend finalement la direction du parti. Il a la conviction que l’URSS a besoin de changements. En Bulgarie, apparaît une relative libéralisation économique. Jivkov tolère maintenant l’initiative privée, c’est ce qu’on appelle « l’initiative de participation », de 1979 à 1984. Cette expérience donne les prémices de la Perestroïka de Gorbatchev qui applique les principes de libéralisation de l’économie Bulgare. En 1988, Jivkov tente de mener une Pérestroïka locale, la Preustrojstvo.

9

ROTMAN, Patrick, et BARBERIS, Patrick, La foi du siècle : l’histoire du communisme, Partie 4, Une fin sans fins, KUIV Productions, La Sept-Arte, produit par Michel ROTMAN, Août 2012

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En laissant respirer la société et l’économie, et en affranchissant le pays du poids du parti, Gorbatchev met en route un processus qu’il ne peut plus contrôler. « Le

communisme ne supporte pas la transparence. »10 Dans les pays satellites, on sait que cette fois, l’armée rouge n’interviendra pas. La réaction en chaîne part de Varsovie puis s’étend à Berlin, Prague et Budapest. L’empire soviétique implose. En 1989, des groupes dissidents se forment progressivement. Jivkov a 79 ans. Il est dépassé. Les réformateurs au sein du parti communiste prennent le contrôle. Le 10 novembre 1989, au lendemain de la chute du mur de Berlin, Jivkov est démis de ses fonctions par le parti et Petar Mladenov le remplace à la tête du parti. En Janvier 1990, Jivkov est arrêté pour corruption et en février 1990, le parti communiste décrète la fin du régime, qui s’auto-dissout pour devenir le parti socialiste Bulgare. La foi communiste est morte.

10

ROTMAN, Patrick, et BARBERIS, Patrick, La foi du siècle : l’histoire du communisme, Partie 4, Une fin sans fins, KUIV Productions, La Sept-Arte, produit par Michel ROTMAN, Août 2012

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3. Politique culturelle et architecturale en Bulgarie sous la période communiste.

Pour réaliser l’idéal socialiste, le régime garde le monopole du développement de la culture en Bulgarie. Pendant la première période, celle de la démocratie populaire (1948-1953), « l’idéologie fut utilisée pour unir le peuple bulgare dans l’accomplissement

de l’idéal communiste. »11. La liberté d’expression est stoppée par les purges et l’instauration d’une Direction de la propagande nationale qui réprime les journalistes et les intellectuels Bulgares. Le Parti Ouvrier Bulgare utilise ses institutions comme le comité des sciences, des arts et de la culture pour diriger toutes les activités culturelles suivant la ligne du parti. Georgi Dimitrov tente de démocratiser la culture. Chaque chef lieu de département est doté d’un théâtre, de galeries d’art, de musées et pas une seule agglomération ne se trouvait sans maison de la culture. Les centres les plus importants sont dotés d’ensembles architecturaux modernes abritant les fonctions culturelles. En 1948, lors du Vème congrès du parti ouvrier, Georgi Dimitrov formule des directives pour la vie culturelle, préconisant une « révolution culturelle » par l'élimination des influences occidentales.

Puis suit la période du stalinisme pur, qui implique « la reconnaissance de la domination

totale de l’idéal socialiste par les artistes et les penseurs bulgares »12. Les œuvres doivent maintenant suivre la méthode du réalisme socialiste et respecter les désirs du Parti Ouvrier Bulgare (POB) en vue d’instruire la population. On ne juge plus une œuvre sur sa performance artistique mais selon sa conformité aux buts du POB.

De 1953 à 1985, le culte de la personnalité prend fin. Cela « permet aux intellectuels et

aux artistes de se libérer de certains carcans trop rigides du système, tout en restant dans le cadre très serré de la politique bulgare »13. En Septembre 1956, au plénum central du parti communiste Bulgare, Jivkov impose comme axiome le rôle dirigeant du parti dans la littérature, l’art et la presse. Le 8 Mars 1963, Khrouchtchev déclare devant les intellectuels que l’esprit du parti est le principe suprême de la création intellectuelle. Le 15 avril, Jivkov prononce sa variante de l’allocution devant les intellectuels Bulgares. Jivkov joue un jeu subtil avec les intellectuels : s’ils ne critiquent pas le régime, leur marge de manœuvre est assez grande. Cela permet un essor culturel. Dans les années 1970, l’Etat donne des moyens au développement de la culture mais garde le contrôle de la production et donne des orientations précises. Entre 1975 et 1982, Ludmilia Jivkova (fille de Todor Jivkov) est présidente du comité d’art et de culture. Elle joue un rôle prépondérant dans le monde culturel et organise en 1981 les 1300 ans de la fondation de l’Etat Bulgare.

11 Collectif de Recherche sur l’Architecture Bulgare, Sous la direction de Clara Sandrini, Compilation des textes effectuée

en vue d'une publication, 2016. p.25

12 IDEM. p.26 13IDEM. p.29

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L’architecture fait partie intégrante du programme politique. Elle doit s’adapter aux bouleversements de la révolution : le prolétariat est maintenant devenu l’élément central des décisions politiques. Il faut lui reconstruire son lieu de vie et de travail. De même, la planification économique qui prévoit de passer d’un pays agricole à une puissance industrielle bouleverse le rapport ville/campagne. Il faut réordonner les paysages urbains et ruraux. L’architecture et la planification urbaine se retrouvent au centre de la fondation de la société socialiste, comme si l’ordonnancement architectural pouvait dessiner les contours de base de cette nouvelle société.

« Dans la pensée totalitaire, la tâche de construire scientifiquement une société progressiste et un homme nouveau était étroitement associée à des processus constructifs plus concrets.» 14

Dès 1948, l’Institut de Planification de Sofia, le Sofproekt est créé. L’architecte Bulgare Mitov dessine le plan directeur Tonev en 1945, alors qu’il faut urgemment reconstruire après la guerre. Le plan précédent avait été dessiné par un architecte du IIIème Reich, Mussman qui avait choisi d’appliquer les idées fortes de l’urbanisme occidental en réponse à la crise économique du logement dû à la vague d’immigration à Sofia causée par les guerres balkaniques. Ce plan étant dessiné par un architecte du IIIème Reich, il est immédiatement écarté.

Le nouveau plan permet la mise en place dès 1951 de bâtiments Staliniens symboliques du pouvoir en place. Les nouveaux quartiers sont planifiés, axés sur les grands ensembles d’habitation. L’organisation de la ville reflète une volonté idéologique : le régime veut mettre en place un mode de vie communautaire avec un équilibre entre logement et infrastructures. En effet, chaque grand ensemble possède des installations et infrastructures de transport en commun. Les équipements publics comme les écoles, les crèches et les hypermarchés sont des micros centres pour les quartiers qui s’organisent selon le modèle soviétique de micro-rayons. L’objectif est de rendre chaque micro-rayon autonome permettant d’accéder à pieds aux équipements. Le lien avec le centre ville est quant à lui considéré comme occasionnel.

Le parti donne des instructions différentes selon le type de production. Cette dernière se divise en deux types. Pour commencer, l’architecture publique est construite pour servir les nobles idéaux de la collectivité. Elle se doit de retranscrire l’idéologie communiste. En 1934, le congrès de toutes les républiques des architectes se conclut avec les mots suivants : « Notre tâche consiste à lutter pour incarner dans le langage

architectural les grands mots d’ordre de notre époque. ». Le deuxième type est

l’architecture de masse, elle est faite pour s’intégrer à l’architecture publique, s’effacer pour la mettre en valeur. La production du logement se fait de façon standard, répétant toujours le même modèle de bloc. L’idéologie communiste influence ce modèle. Le pouvoir cherche à supprimer les inégalités entre les personnes et entre les espaces bâtis. De nouveaux critères comme la double orientation apparaissent. Dans

14 GOLOMSTOCK, Igor, L’art totalitaire, Editions carré, Paris ,1991, Chapitre 7, Architecture et style, Partie 1,

L’idéologie faite de pierre.

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cette distinction, on retrouve l’idée communiste : l’individu doit s’effacer au profit de la collectivité. Les bâtiments publics sont glorifiés tandis que l’habitat n’est qu’au service de ces derniers.

Pour mettre en place ce programme architectural, le dirigisme s’installe. En 1947, dans la revue "Sbornik Arhitektoura SSSR", il est écrit que « Pour la première fois, le peuple

est devenu le seul commanditaire d'architecture [soviétique], son juge suprême. » Mais c’est en fait l’Etat qui est son juge suprême. Toutes les commandes viennent de l’Etat qui exerce ainsi un contrôle complet dans le secteur de la construction. Au congrès de toutes les républiques des architectes soviétiques on salue d’ailleurs le camarade Staline comme « le premier architecte et constructeur de notre terre natale socialiste ». Cependant, d’après Georgi Stoilov, la période où la Bulgarie suit pleinement le modèle classique Stalinien est courte. Elle couvre seulement la période où le centre de Sofia, le largo, est construit (1951-1957), ensuite « Le gouvernement a décidé que l’architecture

n’est pas dangereuse pour le communisme. L’architecture est libre ».15

Mais la production de l’architecture est intégrée aux organismes de l’Etat. La création architecturale et l’ingénierie se concentrent dans de grands organismes. L'un dédié à l’architecture industrielle, un autre se concentré sur l’architecture pour l’agriculture, mais celui qui nous intéresse particulièrement nommé « glavproekt », concerne l’architecture publique. Le regroupement des concepteurs est un moyen de contrôle de la production architecturale Bulgare. En gardant l’exclusivité de la commande artistique, l’état s’assure qu’il est la principale voire la seule source de revenu des artistes et ainsi, la seule inspiration de son travail. Pour que l’architecte puisse réaliser des bâtiments, il faut qu’ils soient conformes aux directives esthétiques du parti. Ces directives étant basées sur l’idéologie communiste, l’esthétique devient inséparable de la politique.

En 1965, en fondant l’Union des architectes en Bulgarie, Georgi Stoilov propose une alternative à ces organismes. Toute personne travaillant pour l’Union des architectes obtient le droit de travailler en dehors des organismes de l’état. Après leur journée de huit heures dans un organisme de l’Etat, les membres de l’union des architectes pouvaient travailler librement et gagner de l’argent.

Le concours du Buzludzha est lancé en 1962 et sa construction se termine en 1981. Durant cette période où Brejnev et Jivkov sont les dirigeants respectifs de l’Union soviétique et de la Bulgarie, de nombreux incidents montrent que l’URSS faiblit. Mais en Bulgarie, aucune crise n’est en vue. On continue de mener une politique culturelle soutenant le régime, en particulier en 1981 où l’on célèbre les 1300 ans de l’Etat Bulgare. A cette occasion, des monuments sont érigés pour le gouvernement. Le Buzludzha est un des plus emblématiques.

15ANNEXE 01, Entretien avec Georgi Stoilov

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II.

Le Buzludzha, un monument pour transmettre l’idéologie

communiste.

1. La politique architecturale : la tradition des monuments

Le Buzludzha s’inscrit dans la politique Bulgare qui s’inspire de la tradition soviétique des monuments lancée par Lénine dès son arrivée au pouvoir. En Russie, immédiatement après la Révolution, l’érection de monuments « aux grandes figures de l’activité sociale ou révolutionnaire » sert en effet le plan général de propagande par les monuments. Penchons nous sur la notion de monument en nous appuyant sur Alois Riegl, historien de l’art Autrichien. En 1903, dans son ouvrage « Le culte moderne des monuments », il distingue deux valeurs principales associées au monument : la valeur de contemporanéité et la valeur de remémoration. Avec le Buzludzha, la notion de remémoration est particulièrement importante, regardons la plus particulièrement. Cette valeur est recoupée en trois valeurs : la valeur d’ancienneté, la valeur historique et la valeur de remémoration intentionnelle. Les monuments « intentionnels » sont alors distingués des « monuments historiques » car dans le cas des monuments intentionnels, la valeur de remémoration nous est imposée par d’autres tandis que dans le cas contraire, c’est nous qui l’établissons.

Le Buzludzha est construit comme monument pour remémorer des évènements passés, marquant l’histoire de la Bulgarie. En effet, en 1981, la Bulgarie célèbre le 1300ème

anniversaire de la fondation de l’Etat Bulgare. A cette occasion elle organise une commémoration importante qui consiste en un riche programme d’évènements comme l’achèvement de la restauration de la forteresse « Tzarevets » à Véliko Tarnovo avec la réalisation d’un spectacle son et lumières du réalisateur Valo Radev ou encore, l’érection de monuments parmi lesquels « les Fondateurs de l’Etat Bulgare » à Shoumen, le palais de la culture de Sofia (NDK) et le monument « 1300 ans Bulgarie » sur son esplanade et le Buzludzha. Cette célébration est organisée par la fille de Todor Jivkov (dirigeant de la Bulgarie à cette époque), Ludmilia Jivkova, présidente du comité d’art et de culture. Mais le Buzludzha célèbre aussi un autre évènement, celui du 90ème anniversaire du Parti communiste Bulgare, il remémore ainsi deux moment importants pour la Bulgarie. On sait aussi que le programme demandait simplement de « poser une étoile rouge en haut du mont Buzludzha ». L’édifice est donc aussi érigé en la gloire d’un concept abstrait : le communisme. Dans l’article,

« The Best Examples of the Architectural Heritage of Socialism in Bulgaria », Emilia

Kaleva écrit :

« Le parti a construit ce bâtiment pour sa propre gloire. Un monument ou un mémorial est traditionnellement érigé en mémoire d’une personne ou d’un groupe particulier à cause de leur contribution historique ou en honneur d’un important évènement historique. Le Buzludzha a été érigé en l'honneur de l’idéologie. Il ne porte pas seulement l’importance du

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http://www.voyagebulgarie.travelinbulgaria.eu/?p=804 httpbnr.bgfrpost1005489771981-13-siecles-detat-bulgare

Monument «les Fondateurs de l’Etat Bulgare » à Shoumen

Le palais de la culture de Sofia (NDK) et le monument « 1300 ans Bulgarie »

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mémorial mais cible activement et exerce un impact émotionnel et politique sur les masses. En ce sens, c’est un mémorial unique pour la Bulgarie, un nouveau type créé par et pour le régime. »

Cette citation est confirmée par Georgi Stoilov qui affirme que le Buzludzha n’a jamais été le siège du parti communiste Bulgare. On associe certes quelques fonctions à ce bâtiment, comme la remise des cartes des partisans ou encore des cérémonies officielles mais il n’a jamais été le lieu des réunions du parti communiste Bulgare qui se faisaient à Sofia. Le Buzludzha est juste un monument, non pas construit pour les gens mais pour l’idée du communisme.

Le Buzludzha est un monument à la fois pour remémorer des évènements passés mais aussi à la gloire de l’époque présente, destiné à être témoin dans le futur de la Bulgarie communiste. En ce sens là, puisque la valeur de remémoration nous est imposée, il est, d’après Alois Riegl, un monument intentionnel. Le système politique Bulgare crée intentionnellement des monuments, ayant « pour objectif de faire en sorte que le moment

associé à ce monument ne soit jamais relégué dans le passé »16.

Mais comment le gouvernement a-t-il mené ce projet titanesque ? En 1962, une commande de l’Etat est passée. Comme souvent, on donne les productions architecturales d’envergures aux hommes proches du pouvoir. Georgi Stoilov joue un rôle politique important. Il commence tout d’abord sa carrière dans l’organisme Glavproekt. En 1965, il fonde l’Union des Architectes en Bulgarie puis devient maire de Sofia de 1967 à 1971 et poursuit sa vie politique comme ministre de l’architecture et des travaux publics de 1971 à 1973. A cela s’ajoute sa fonction de député de 1967 à 1990. Lorsque le Buzludzha est commence à être construit en 1974, Georgi Stoilov a une carrière politique établie et est toujours député à l’assemblée nationale. En 1962, Georgi Stoilov avait déjà participé au « concours national pour quatre mémoriaux » et avait été retenu pour le mémorial « étoile à cinq branches ». Les trois autres monuments sont construits, seul ce projet n’est pas réalisé. Lorsque le parti décide de construire le monument du Buzludzha, le cabinet de la communauté de Stara Zagora se souvient qu’il y avait déjà eu un concours pour un tel bâtiment. En 1974, douze ans après le concours, on fait de nouveau appel à Georgi Stoilov pour qu’il réalise le projet. La question du financement se pose ensuite. Georgi Stoilov demande à ce que le projet soit subventionné par une collecte d’argent auprès du peuple Bulgare : « C’était

exceptionnel pour le Buzludha, spécialement pour que le bâtiment soit bâti par le peuple. Il y avait de l’argent du gouvernement mais j’ai dit non, il faut ramasser de l’argent pour bâtir ce bâtiment »17. Des fonds volontaires sont levés grâce aux cotisations obligatoires de l’ensemble de la population, des étudiants aux retraités. Cette levée de fonds a été documentée comme Komsomols « bénévolat » pour la construction du « grand

16

ALOÏS RIEGL, Le Culte moderne des monuments, éditions Allia, Paris, 1903, p.69

17ANNEXE 01, Entretien avec Georgi Stoilov

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Esquisse pour le concours «étoile à cinq branches»

Croquis de Georgi Stoilov, le 10/06/2016

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panthéon du communisme et du socialisme ». Seize millions de Levas sont collectés. Mais seulement 14 millions sont nécessaires à la construction, les 2 millions récoltés en trop sont versés pour construire des bâtiments publics tels qu’une crèche. Le Buzludzha devient ainsi l’œuvre du peuple, une œuvre collective faite pour galvaniser les Bulgares dans un élan patriotique autour d’un projet titanesque. Pour la construction, on fait appel aux forces militaires qui constituent les trois quarts de la main d’œuvre du chantier à laquelle s’ajoutent des ouvriers qualifiés.

De plus, on peut noter que la gloire de la construction n’est pas donnée à un seul homme mais à toute une équipe : 18 groupes d’artistes ont en effet participé au décor. D’après Georgi Stoilov, le projet d’architecture, sans l’intervention d’artistes est « vide » : « il faut donner des choses vivantes ». Il a donc appelé l’Union des artistes et leur a demandé d’envoyer des maîtres de la mosaïque pour réaliser les fresques pour couvrir l’intérieur du monument.

« Le nom de l'auteur symbolisait une créativité collective, qu'il ait travaillé seul ou qu'il ait dirigé une équipe ; derrière son nom se profilait non un talent personnel, mais la méga-machine culturelle : il ne jouait, selon le mot de Lénine, qu'un rôle « de tenons et de mortaises ». 18

Le Buzludzha est en réalité un outil politique qui sert à soutenir le régime en place. Alors qu’on est au lendemain de la crise des fusées à Cuba où le communisme a reculé devant le capitalisme et du printemps de Prague (1968), réprimé violemment par l’URSS, on veut montrer en Bulgarie qu’un système politique communiste est encore puissant. Le bâtiment devient alors objet de propagande.

18 GOLOMSTOCK, Igor, L’art totalitaire, Editions carré, Paris ,1991, Chapitre 7, Architecture et style, Partie 3, Vers

l’âge d’or des cathédrales

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2. Un monument de propagande et d’unification du pays

La propagande est d’usage courant dans le monde soviétique et l’architecture est un de ses moyens. En tant que bâtiment public, le Buzludzha se doit de louer le système politique en place, plus particulièrement parce qu’il s’agit d’un bâtiment mémorial et encore plus particulièrement car il est érigé à la gloire du communisme. Comme on l’a vu précédemment, Georgi Stoilov n’est pas seulement architecte, il est aussi homme politique, partisan du parti communiste Bulgare. Ce dernier affirme qu’il n’avait pas de consigne particulière pour concevoir le Buzludzha « Le parti communiste

Bulgare dit « Tu comprends tout… donc tu dois faire le monument pour nous ! » ».19 Regardons maintenant comment le monument communique l’idéologie communiste.

Commençons avec le choix du lieu. Le bâtiment se positionne sur un point symbolique qui fait référence à des évènements forts de l’Histoire Bulgare. C’est par ce mont que s’est faite la reconquête de la Bulgarie : Khan Asparoukh, troisième fils de Khan Koubrat a libéré la Bulgarie de l’emprise Bysantine vers 680 AC et a fondé le premier gouvernement Bulgare. C’est aussi à cet endroit que s'est réfugié le rebelle Hadji Dimitar et son détachement révolutionnaire, combattant contre l'oppression ottomane. Ce dernier meurt en 1868 pour la liberté de sa partie. A partir de 1942, le véritable nom du mont Buzludzha est d'ailleurs celui de ce héro. S'est ensuite tenue sur cette montagne la bataille historique de Chipka, en 1877, finissant d’après les récits par une victoire grâce à l’élan patriotique des volontaires bulgares contre l’armée Turque. Cet évènement symbolise la victoire du faible sur le fort, de l’opprimé contre l’opprimant et montre la puissance du peuple Bulgare lorsqu’il se fédère. Mais ce mont est aussi où les premiers socialistes Bulgares se sont réunis en 1891 pour créer un parti marxiste en Bulgarie. En construisant un monument où se tiendront des évènements pour la Bulgarie communiste à l’emplacement de la fondation du parti, on tente peut être de transmettre le message que le parti reste toujours fidèle aux fondements de l’idéologie communiste, qu’il se souvient de ses origines. De plus, en se référant à un évènement historique précédant la Bulgarie communiste, le parti s’ancre dans une suite historique logique, se donnant ainsi plus de légitimité. « A travers ce bâtiment, le

régime mêle état et histoire politique et se proclame comme une apothéose naturelle dans le destin de la Bulgarie. »20 . Mais le lieu peut aussi avoir une explication idéologique. Il se situe au milieu de la Bulgarie, au cœur de la campagne, contrairement à Sofia qui est décentrée à l’Est du pays. Le Buzludzha définit un nouveau centre pour la Bulgarie. Plus proche du prolétariat.

19ANNEXE 01, Entretien avec Georgi Stoilov

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KALEVA, Emilia, The Best Examples of the Architectural Heritage of Socialism in Bulgaria, file:///D:/Downloads/20089-51404-1-PB.pdf, consulté le 13/10/2015

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La question de l’échelle se pose ensuite. Lors de l’entretien, Georgi Stoilov parle de l’enseignement qu’il a reçu en Russie en ces termes : « Il y a des grands principes. Les

grands principes de l’architecture à laquelle j’ai étudié en Russie. C’était les principes des proportions et l’échelle. » et il ajoute « Je fais les choses pas à l’échelle de l’homme mais à l’échelle de deux hommes (…) Je pense que l’architecture doit être avec l’échelle héroïque.».

Comme le dit le philosophe Jacques Derrida « La dimension monumentale est là pour

souligner le caractère non représentable du concept même auquel il se rattache. ». Dans le

cas du Buzludzha, le concept auquel il se rattache est celui de la puissance du pouvoir en place et de l’idéologie communiste. Le monument est composé de seulement deux volumes, ce qui permet de donner à chacun une dimension monumentale : le diamètre de la coupole fait 60 mètres tandis que la tour s’élève à 70 mètres. Ces volumes abstraits rendent la perception de l’échelle compliquée, avec la grandeur du paysage avoisinant, si l’on n’a pas de repère pour nous donner la taille du bâtiment, on ne peut définir ses dimensions. "Les cultes de l'éternité et du gigantisme allaient de pair. Les

dimensions de ce type d'architecture, au lieu d'être calculées à l'échelle de l'individu, l'étaient à l'échelle surhumaine."21

De plus, la recherche de la hauteur semble être une évidence dans la conception du Buzludzha. Georgi Stoilov a en effet construit une tour de 70 mètres de haut en haut d’un mont culminant à 1400 mètres d’altitude. Il est d’ailleurs intéressant de noter que le thème de la tour et la recherche de la hauteur semble fasciner Georgi Stoilov, elle est une constante dans son travail : la « Tower Urbia » ou encore la tour « Balcan » en sont des exemples. Par temps nuageux, la tour du Buzludzha transperce les nuages, dominant la nature. Ainsi, le monument s’ancre dans la tradition soviétique de la hauteur. "La théorie architecturale soviétique considérait désormais les gratte-ciel comme

une perpétuation et une extension de la tradition essentielle de l'architecture de l'ancienne Russie: les flèches étaient des copies plus ou moins conformes des sommets des tours du Kremlin et des églises moscovites ogivales du XVIIe siècle"22. Dans le projet du palais des soviets à Moscou, par mauvais temps, la tête et la main de Lénine étaient sensées être cachées par les nuages. La notion de visibilité est ici importante, le Buzludzha est un point de repère, une « balise idéologique », toujours visible depuis la vallée des Roses et la vallée du Danube, situées respectivement au Nord et au Sud du mont Buzludzha.

Le Buzludzha communique l’idéologie communiste aux masses suivant le principe du réalisme socialiste. Dans un article de la revue Arkhitektoura SSSR on écrit en 1952 que "En Union Soviétique, on a fini par prendre le concept d'architecture

parlante" pratiquement au pied de la lettre, après que les règlements de l'union des architectes soviétiques eurent décrété que le réalisme socialiste, qui mettait l'accent sur le "reflet de la réalité dans son dynamisme révolutionnaire", devrait également devenir la méthode fondamentale de l'architecture. Guidée par les idées fortes lénino-staliniennes, l'architecture est appelée à refléter dans ses œuvres la grandeur de l'ère de la construction du

21GOLOMSTOCK, Igor, L’art totalitaire, Editions carré, Paris ,1991, Chapitre 7, Architecture et style, Partie 1,

L’idéologie faite de pierre

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http://europeansectionlgm.typepad.fr/histoiregographiecollgeva/2013/11/larchitecture-totaliraire-%C3%A0-venir.html

Le projet du palais des Soviets à Moscou.

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Images de Georgi Stoilov

Divers projets de Georgi Stoilov traitant le thème de la Tour.

En bas, de gauche à droite, la tour «Balcan» et son dernier projet: la «Tower Urbia».

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http://one360.eu/blog/archives/4371

La tour du Buzludzha, la recherche de la hauteur.

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Photographie: Marine Bouchet

Le Buzludzha dans les nuages, la tour n’est pas visible.

En haut de la tour, au dessus des nuages.

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communisme" La théorie, la critique et la pratique architecturale suivent cette directive

générale. L’artiste est contraint à ajuster ses œuvres selon les buts du communisme, à mener un travail de « remodelage idéologique et d’éducation des travailleurs »23. En d’autres mots, l’architecture doit être facilement comprise par la population pour communiquer les valeurs du communisme au plus grand nombre. Le mot massovost existe d’ailleurs dans la langue Russe pour dire « art pour les masses »

Pour répondre au principe d’architecture parlante, la forme du Buzludzha est artistique. Comme on l’a vu précédemment, l’enseignement que reçoit Georgi Stoilov en Russie est basé sur l’échelle et les proportions « Les proportions c’est du haut. Les

proportions tu dois les sentir, les proportions c’est des choses libres ». L’abstraction et

l’expressivité rendent possible une interprétation symbolique par tous. Pour Emilia Kaleva, le monument est une « combinaison dynamique de deux parties : un corps

horizontal avec une salle des fêtes symbolisant une couronne placée sur la tête et un pylône vertical symbolisant un drapeau communiste flottant ». D’autres y voient une soucoupe

volante en référence à la conquête spatiale par l’URSS. Chacun y projette sa propre imagination, mais toujours associée à l’idée de puissance. Les matériaux sont aux aussi utilisés pour mettre en avant la grandeur de la Bulgarie communiste. De l’extérieur, le bâtiment est en béton brut mettant en valeur l’étoile faite de verre rouge située en haut de la tour. Ce verre a été spécialement acheminé de Kiev en Ukraine et a coûté un million de Leva. L’intérieur du bâtiment est au contraire luxuriant, des mosaïques couvrent de nombreux murs, tandis que le sol et le plafond sont blancs, brillants. Un revêtement ou un éclairage aux couleurs du communisme, rouge, viennent régulièrement recouvrir le plafond. A cela, s’ajoutent les couleurs dominantes des mosaïques : le rouge et le doré. L’espace est donc embaumée d’une lumière rougeâtre, plongeant le visiteur dans une ambiance aux couleurs communistes.

Pour finir, tout comme les fresques dans les églises servent à conter les enseignements de la bible, les mosaïques représentent les personnages importants du communisme comme Marx, Engels et Lénine. Georgi Stoilov précise dans l’entretien qu’au départ il n’était sensé qu’y avoir que ces trois hommes représentatifs de la fondation du communisme représentés dans les mosaïques mais le gouvernement a insisté pour que soient ajoutés les dirigeants Bulgares : Dimitar Blagoev, Georgi Dimitrov et Todor Jivkov alors que certains étaient encore vivants. Ces personnages, entourés par les flammes de la révolution, marquent le début et la fin de la composition artistique de l'auditorium. Cette dernière représente les luttes de la patrie Bulgare depuis sa création en 1891 jusqu'à la victoire du 9 Septembre 1944 et la construction de la société socialiste. A l'extérieur de la salle centrale, sur le mur de l'anneau extérieur, les mosaïques montrent le succès du peuple Bulgare dans la construction d'une société socialiste: des scènes d'industrialisation, de réorganisation de l'agriculture, de la révolution culturelle socialiste ou encore de la place de la femme dans la société sont

23 GOLOMSTOCK, Igor, L’art totalitaire, Editions carré, Paris ,1991, Chapitre 3, Des mots à l’action, Partie 1,

Idéologie : « le réalisme socialiste » et les « principes du Führer ».

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https://vemiplast.wordpress.com/2012/05/22/%D0%B1%D1%83%D0%B7%D0%B-B%D1%83%D0%B4%D0%B6%D0%B0/ Mosaïques de l’auditorium. Marx Engels Blagoev Jivkov Dimitrov Lénine

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https://vemiplast.wordpress.com/2012/05/22/%D0%B1%D1%83%D0%B7%D0%B-B%D1%83%D0%B4%D0%B6%D0%B0/

Mosaïques du couloir périphérique.

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présentes. Que se soient dans les scènes historiques ou de la vie quotidienne, les bienfaits du communisme sont loués. Les écrits viennent appuyer les images. A l’entrée, le premier couplet de l’internationale est inscrit en lettres de béton capitales. L’internationale est un chant révolutionnaire écrit en 1871 par Eugène de Pottier qui symbolise les luttes sociales à travers le monde. L’URSS s’en servit d'hymne national de l'URSS jusqu'en 1944. Le couplet écrit sur le Buzludzha contient certains mots en ancien Bulgare, ce qui est sensé attiser la fierté Bulgare et faire référence à son passé indépendant. De même, autour du médaillon sur le plafond de l’auditorium est inscrit «Prolétaires de tous les pays, unissez-vous!», phrase clôturant le Manifeste du Parti Communiste et rappelant que le communisme sert la cause du peuple et non d’une minorité.

Le parcours, induit par la position du monument en haut du mont, est caractérisé par l’ascension et la vision en contre plongée. Cela a pour effet d’impressionner le visiteur. Pour commencer, depuis la vallée, une statue nous montre la route à emprunter. Cette dernière, étroite et sinueuse, nous mène à une deuxième statue annonçant le monument que l’on aperçoit maintenant en arrière plan. On se gare en contre bas du bâtiment pour finir de monter en marchant. Des marches nous mènent jusqu’au parvis où est inscrit le premier couplet de l’internationale, sous le porte à faux de la soucoupe. Au centre du texte, se situe la porte d’entrée. Cette dernière mène au hall situé sous l’auditorium. Il faut encore monter une volée de marches pour y accéder. Ces escaliers arrivent au niveau du sol de l’auditorium. Pour assister à l’assemblée, il faut encore gravir les gradins. La partie composée de l’auditorium et de sa circulation s’organisent de façon concentrique. La salle principale est circulaire, ce qui induit une non-orientation. Sur le plafond, au centre de la coupole, se situe le médaillon représentant le marteau et la faucille, emblèmes du communisme. Les bancs entourent la totalité de la salle. Tout le monde s’y assoit de la même manière, sans distinction de classe. Le regard n’est pas dirigé vers un endroit en particulier. Depuis cette salle, on accède à un anneau périphérique depuis lequel on peut admirer le paysage montagneux Bulgare. Grâce à cette organisation concentrique, on sent que le Buzludzha est au centre de ce paysage, de la nature, du monde.

Pour finir, des évènements sont organisés autour du monument pour le rendre exceptionnel et marquer l’histoire de la Bulgarie. En août 1975, Todor Jivkov jette la base du monument : une capsule de métal « adressées aux générations », décrivant l’importance historique du bâtiment. Le 23 aout 1981, le Buzludzha est inauguré en grande pompe avec une célébration nationale de l’artillerie, des feux d’artifice et des parades. Après son ouverture, ce lieu est destiné à accueillir de grands meetings pour les camarades et les personnalités. C’est dans ce bâtiment que les membres du parti reçoivent leur carte de membre à partir de 1981. Des visites sont organisées par le parti pour montrer le bâtiment à la population bulgare. Des sorties scolaires sont par exemples proposées et des brochures touristiques sont distribuées dans le pays.

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Le monument visible de loin, depuis les deux vallées. Parcours: une ascension vers le monument.

http://www.archdaily.com/86986/the-challenges-of-abandoned-architecture-buzludzha-monument-gueorguy-stoilov/img_2 BUZLUDZHA

Chipka

Sheynovo

Deuxième statue

Route menant au monument

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Photographie: Marine Bouchet

Statue marquant le début de la route à emprunter.

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Photographie: Line Pékin

Deuxième statue soulignant le bas de la dernière montée.

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Photographie: Line Pékin

http://yomadic.com/communist-architecture-buzludzha-bulgaria/

Marches menant à l’entrée du monument, vue en contre plongée et hall d’entrée.

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http://www.28dayslater.co.uk/buzludha-monument-communist-party-headquarters-bulgaria-august-2015.t98925

La salle d’audience et la coursive, mosaïques.

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Cérémonie d’inauguration du Buzludzha.

Todor Zhivkov avec les membres du Comité central du Parti communiste: Alexander Lilov, Grisha Filipov, Dobri Djurov, Ognyan Doynov, Peko Takov, Petar Mladenov, Peter Tanchev, Stanko Todorov, Todor Bozhinov, Georgi Yordanov, Peter Dulgerov, Stoyan Karadjov, Dimitar Stanishev, Georgi Atanasov, Stoyan Mihaylov, Michael Mishev, Vasil Tsanov, Chudomir Alexandrov, Buzludzha en 1981 http://www.28dayslater.co.uk/buzludha-monument-communist-party-headquarters-bulgaria-august-2015.t98925 https://vemiplast.wordpress.com/2012/05/22/%D0%B1%D1%83%D0%B7%D0%B-B%D1%83%D0%B4%D0%B6%D0%B0/

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Carte postale représentant le Buzludzha.

Photographie de groupe devant le Buzludzha.

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Finalement, le Buzludzha fait émerger l’émotion et montre la grandeur de la Bulgarie communiste : le choix du lieu fait appel à des références historiques partagées par le peuple Bulgare, l’échelle renvoient directement à l’idée de monument tandis que la forme, les matériaux, les œuvres d’art, le parcours composent une architecture parlante, typique du réalisme socialiste, faite pour communiquer l’idéologie communiste. Enfin, autour de ce bâtiment, se déroulent des évènements destinés à marquer l’histoire de la Bulgarie. La mémoire collective est alors marquée et le monument s’ancre dans la postérité.

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