POUR CITER CET ARTICLE, UTILISER L’INFORMATION SUIVANTE :
Stebbins, Robert A. (2013). «L'immigration, l'immersion et la création d'une nouvelle
francophonie» dans Yves Frenette, Étienne Rivard et Marc St-Hilaire (dir.), La francophonie
nord-américaine. Québec: Les Presses de l'Université Laval (coll. «Atlas historique du
Québec»). [En ligne]:
https://atlas.cieq.ca/la-francophonie-nord-americaine/l-immigration-l-immersion-et-la-creation-d-une-nouvelle-francophonie.pdf
Tous droits réservés. Centre interuniversitaire d’études québécoises (CIEQ)
Dépôt légal (Québec et Canada), 2013.
ISBN 978-2-7637-8958-3
Par Robert A. Stebbins
L'immigration, l'immersion et la création d'une
nouvelle francophonie
Élèvesàl’ordinateur (progr ammed’immersionfr ançaise,
CommissionsCol aired’etobiCoke), 14 oC tobre 1988 Archives de l’Ontario, C 193-3-0-0-1410 88153, neg. 24 Le s r e c o n f i g u r a t i o n s, 19 6 0 à n o sj o u r s
Ch a p i t r e 5
Trois similitudes
Tout d ’a b ord , le s de u x g roup e s
connaissent une certaine marginalité
culturelle et linguistique au sein des
communautés francophones locales.
Leur accent est différent de la majorité
francophone locale, car il provient
d’un autre milieu, sans compter que
ces immigrants, tout comme les élèves
d’immersion au sein de la
commu-nauté anglophone locale, sont guidés
par toute une gamme de pratiques
culturelles inconnues. De plus, ces
groupes ne jouissent d’une
reconnais-sance que depuis une quarantaine
d ’a nnées, pour des raisons, nous
allons le voir, bien différentes.
Troi-sièmement, l’urbanité : les immigrants
préfèrent les grandes villes pour des
raisons de facilité d’accès à l’emploi
et pour les possibilités de rencontre
de compatriotes, tandis que les élèves,
eux, ont grandi dans ces mêmes villes
où sont concentrées les écoles offrant
des programmes d’immersion.
Ces traits partagés entre
immi-g ra nts f ra ncophones et élèves en
cours d’immersion française justifient
l’examen des deux groupes dans ce
texte. Il est néanmoins évident qu’ils
se distinguent de bien des façons.
Commençons notre étude par les
immigrants qui, en tant que groupe,
sont au Canada depuis bien plus
long-temps que les élèves d’immersion.
L’origine des immigrants
francophones
De nouvelles lois, en 1962 et 1967,
ont ouvert la voie à d ’importants
cha ngement s i nf luenç a nt auta nt
l’immigration francophone
qu’anglo-phone au Canada. Dès 1962, l’origine
nationale a été éliminée comme critère
d’entrée, invalidant ainsi le statut
pri-vilégié dont jouissaient certains pays
francophones comme la France, la
Bel-gique et la Suisse. Du côté anglophone,
ce sont les États-Unis, le Royaume-Uni
et certains pays du Commonwealth
qui prirent du recul. À la suite d’une
autre loi promulguée en 1967 et
per-mettant le parrainage de membres
de familles par des immigrants déjà
établis au Canada, le nombre
d’im-migrants maîtrisant une des deux
langues officielles et provenant de pays
autres que les pays traditionnels a
lar-gement augmenté. De façon analogue,
le nombre d’immigrants provenant
des anciens pays « privilégiés » est en
chute libre et représente une partie
toujours décroissante du nombre
total d’immigrants.
Les destinations
Les immigrants francophones
pro-venant de pays non occidentaux ont
toujours largement préféré le Québec
comme première terre d ’adoption
Immigrants francophones % des francophones de la ville
1971 2006 1971 2006 Halifax 285 625 4,2 6,2 Montréal 62 155 126 705 3,4 6,4 Toronto 6 000 18 955 13,2 30,3 Winnipeg 1 615 1 220 5,3 4,4 Edmonton 1 330 1 770 7,3 7,8
Source : Recensements du Canada, 1971 et 2006
partdesimmigr antsfr anCophonesdansl apopul ationfr anCophonede quelquesvillesCanadiennes, 1971 e t 2006
le s i m m i g r a n t s f r a n C o p h o n e s e t l e s É l è v e s a y a n t C o m p l É t É l e s p r o g r a m m e s d’i m m e r s i o n e n f r a n ç a i s a u n i v e a u s e C o n d a i r e p a r -t a g e n -t d’É t o n n a n t e s s i m i l a r i t É s. Ce s d e u x g r o u p e s p a r t i C i p e n t à l a C r É a t i o n d’u n e n o u v e l l e f r a n C o p h o n i e.
L’immigration, L’immersion
et La création d’une
nouveLLe francophonie
Laf r a n c o p h o n i en o r d-a m é r i c a i n e 2 76
mais, comme nous le verrons, ils n’y
sont pas toujours restés. Vu la préfé
rence marquée des immigrants pour
les grandes villes, Montréal a tou
jours été la destination privilégiée des
franco phones, tandis que la majorité
des immigrants anglophones atterris
sait à Toronto ou à Vancouver. Malgré
la faible proportion qu’occupent les
francophones dans l’immigration
canadienne (3,0 à 3,9 % des effectifs
immigrants entre 1961 et 2006 sont
de langue maternelle française), leur
nombre représente une part croissante
de la population francophone dans la
quasitotalité des grands centres. À
Toronto et à Vancouver en particulier,
la proportion d’immigrants franco
phones relative au nombre total de
francophones a fortement augmenté.
Il est diff icile de connaître pré
cisément le nombre d’immigrants
ou de réfugiés francophones dont le
français est soit la première, soit la
deuxième langue. Mais il appert que
la vaste majorité de ces nouveaux
arrivants se dirige vers le Québec, et
plus particulièrement vers Montréal,
où ils font face à des problèmes qu’ils
ne partagent pas avec les deux autres
catégories linguistiques d’immigrants,
les allophones et les anglophones.
Des observations (Stebbins, 2000)
ont permis de constater que, de nos
jours, la plupart des Québécois sont
ouverts aux immigrants franco phones,
et même a l lophones. Cependa nt,
puisque la plupart des immigrants
proviennent désormais de pays en
voie de développement, leur présence
au Québec soulève l’épineuse ques
tion de leur intégration. Si, en 2006,
77,6 % des immigrants peuvent parler
français, comparativement aux 17,5 %
qui peuvent parler ang lais seule
ment (le reste ne pouvant parler ni
français, ni anglais), ces immigrants
diffèrent par leur origine ethnique,
leur culture, leur langue et parfois leur
religion, de la majorité francophone
« pure laine » québécoise.
En outre, il est aussi diff icile de
retenir les immigrants qui arrivent au
Québec que d’y retenir les Québécois
de naissance qui désirent s’instal
ler ailleurs au Canada. En 2006, par
exemple, selon l’Institut de la statis
tique du Québec, le solde migratoire
international atteint 39 736 personnes,
tandis que 32 377 personnes partent
vers une autre province canadienne.
Si on ignore combien parmi ces der
niers sont des immigrants, il reste que
plusieurs d’entre eux suivent le trajet
historique de l’immigration québé
coise au Canada, en déménageant par
ordre de préférence en Ontario, en
ColombieBritannique et en Alberta.
Certains autres immigrants franco
phone s , en a r r iva nt au C a nad a,
choisissent de s’établir ailleurs au pays,
souvent pour des raisons de facilité
d’accès à l’emploi ou parce qu’ils y
ont déjà des contacts (Korazemo et
Stebbins, 2001; Chambon et al., 2001).
Ethnicité, identité et intégration
Une composante ethnique (c’està
dire raciale, nationale, religieuse) est
évidente dans le mode de vie linguis
tique que poursuivent les « nouveaux
francophones » – immigrants et réfu
giés francophones – dans les grandes
villes canadiennes. Des observations
Avec un tiers de sa population étudiante issue de l’immigration francophone
récente, la Cité collégiale d’Ottawa témoigne des changements qui s’opèrent
dans la francophonie canadienne. Fondée en 1990, la Cité est le premier
collège communautaire de langue française en Ontario.
cité coLLégiaLed’ot tawa, 2007 Cité collégiale d’Ottawa
L’immig r at ion, l’imm e r sion e t la c r é at ion d’un e nou v e ll e f r an cophonie 2 7 7
antérieures ont révélé qu’ils ont une
plus grande tendance à s’associer entre
eux qu’avec les francophones cana
diens, allant parfois jusqu’à créer leurs
propres associations nationales (Beau
doin, 1988; Savas, 1990 : 30 ; Stebbins,
1994 : 120). En effet, ils se sentent
exclus des associations canadiennes
françaises de souche, qui sont souvent
très spécialisées (par exemple, en art,
en sport, en religion, en affaires) et
qui n’ont pas grandchose à offrir à
des immigrants venant de pays en voie
de développement (Chambon, 2001 :
56). De plus, Korazemo et Stebbins
(2001 : 49) ont noté que les immigrants
francophones à Calgary préfèrent tra
vailler le plus possible aux dépens de
leurs heures de loisir. Par conséquent,
il ne reste pas beaucoup de temps pour
participer à la vie communautaire.
Ils sont aussi aptes à démontrer un
profil identitaire particulier, souli
gnant leur origine nationale et dans
certains cas leur ethnicité. Bref, la
recherche sur l’identité francophone
en milieu minoritaire dans l’Ouest et
ailleurs au Canada s’harmonise avec
les conclusions de Heller (1996 : 35) :
l’univers de ces nouveaux arrivants est
en pleine transition. C’est ainsi qu’ils
red
éfinissent les normes linguistiques
qui symbolisent et déterminent l’iden
tité francophone au Canada.
Par exemple, en 2006, Calgary a
accueilli 205 immigrants de langue
maternelle française. Ceci représente
moins de 2 % de la population fran
cophone de Calgary, mais la présence
et l’inf luence de ce type de migrant
se font de plus en plus ressentir. Des
organismes voués à l’accueil de ces
nouveaux arrivants ont été créés dans
des villes telles que Calgary, Edmonton
et Toronto. Ils facilitent l’intégration
non seulement au sein des commu
nautés francophones, mais également
parmi les anglophones. Le fait que
de nombreux nouveaux arrivants ne
soient pas chrétiens et ne répondent
donc pas aux critères d’admission
des écoles catholiques a contribué à
l’ouverture d’écoles non confession
nelles dans le courant des années
1990 dans la plupar t des grandes
v i l les c a nad ien nes. C e que nous
ignorons, c’est la perception qu’ont
les francophones minoritaires de ces
nouveaux arrivants qui, malgré une
grande maîtrise de la langue française,
sont différents en ce qui concerne la
religion et l’ethnicité.
En Ontario, Bellavance (1994 : 15)
remarque que certains observateurs
voient ces vagues d’immigrants fran
cophones comme étant une bouée de
sauvetage pour les communautés fran
cophones, et ce plus particulièrement
dans les grands centres urbains. Tout
comme au Québec, le taux de natalité
des francophones est en chute libre, ce
qui implique un besoin urgent de solu
tion pour maintenir une proportion
viable de francophones. Bellavance
note également que les écoles semblent
bénéficier de cet apport de nouveaux
francophones, car nombre de nou
veaux arrivants désirent instruire leurs
enfants en français. Il cite l’exemple de
la Cité Collégiale à Ottawa où le tiers
de la population étudiante est issue de
familles immigrantes francophones.
Dans le même ordre d’idée, Gratton
(1994 : 15) mentionne que dans une
école secondaire de langue française
d’Ottawa, plus de la moitié des élèves
sont immigrants et, de ce fait, qu’ils
contribuent largement à l’améliora
tion de la qualité du français utilisé
en classe par les FrancoOntariens
de souche.
À cet égard, il est possible que l’On
tario soit exceptionnel. Pour en savoir
davantage, il faudrait approfondir
l’analyse en recueillant des données
sur l’influence des immigrants franco
phones dans les autres communautés
et régions francophones du Canada.
Le recensement de 2006 révèle cer
taines facettes importantes de la vie
des immigrants francophones au début
du
xxiesiècle. D’abord, 86 % d’entre
eux résident dans les grandes villes
(régions métropolitaines de recense
ment), contre 68 % de la population
canadienne. Parmi ces grandes villes,
Montréal et Québec occupent une
place de choix en accueillant 62 % des
immigrants francophones. Enfin une
proportion sensible (17,6 %) préfère
néanmoins, en ordre décroissant, les
villes anglophones où la croissance
économique est vive et le marché de
l’emploi favorable : Toronto, Ottawa
G a t i n e a u , Va n c o u v e r, C a l g a r y,
et Edmonton.
Les débuts des programmes
d’immersion
L’idée d’utiliser la langue française
comme langue d’enseignement des
matières habituelles (par exemple, la
physique, la géographie, l’histoire)
au x élèves de l ’élémentaire et du
secondaire est une invention cana
dienne. C’est une solution au problème
d’instruire efficacement les jeunes
anglophones dans l’autre langue offi
cielle du pays, ce que les programmes
de f ra nçais la ng ue seconde n’ont
jamais réussi à faire. Stern (1988 :
1970) explique qu’au début des années
1960, un groupe de parents à Saint
Lambert, en banlieue de Montréal, a
contacté des chercheurs en linguis
t ique à l ’Université McGi l l da ns
l’espoir de trouver une solution. C’est
en 1965 que fut établi à SaintLambert
un programme expérimental d’im
mersion en maternelle, le prototype de
l’école d’immersion au Canada.
Le climat politique national était
enfin prêt pour la diffusion de ce nou
veau concept. En 1969, le Parlement
fédéral adopta la loi sur les langues
officielles, suivie d’une autre en 1971
instituant le multiculturalisme comme
politique nationale. Les programmes
d’immersion ont, selon l’Association
canadienne des professeurs d’immer
sion, attiré en 20082009 presque
300 000 élèves anglophones (et quel
ques milliers de francophones) dans
2 375 écoles. Dans ces programmes,
les professeurs sont pour la plupart
de langue maternelle française et ils
enseignent aux élèves comme si ces
derniers étaient eux aussi franco
phones. Sont proposées les mêmes
matières que celles offertes dans un
programme uniquement en anglais,
mais la langue d’enseignement est
le français.
Il y a trois types de programmes
d’immersion. En première
immer-sion, les élèves passent par une phase
unilingue où l’enseignement est tota
lement en français et où, selon les
circonstances, l’enseignant et l’enfant
peuvent communiquer en anglais.
Cette phase débute en maternelle et
continue jusqu’à la 2
eou 3
eannée. Elle
est suivie d’une phase bilingue (de la 2
eou 3
eannée jusqu’à la 6
e) où les cours
sont donnés à part égale en français
et en anglais. Finalement, une phase
Laf r a n c o p h o n i en o r d-a m é r i c a i n e 2 7 8
Née dans les années 1960,
l’immersion française au primaire
et au secondaire se répand au
Canada dans la décennie suivante
avec la politique du bilinguisme
officiel. La popularité des ces
programmes ne se dément pas
aujourd’hui, contribuant fortement
à la progression du nombre de
personnes ayant le français comme
langue seconde : en 2010, selon
les provinces considérées, 6 % à
26 % des élèves admissibles étaient
inscrits en immersion française.
Le taux atteint 40 % pour les élèves
allophones. Quelque 2 300
établis-sements à travers le Canada offrent
de telles classes d’immersion.
de maintien de la langue comprenant
de 3 à 5 matières enseignées en fran
çais est offerte aux étudiants de la 7
eà la 12
eannée. L’immersion différée
est identique, excepté que le français
est la langue principale d’enseigne
ment jusqu’à la 4
eannée environ. En
immersion tardive, l’utilisation du
français comme langue d’enseigne
ment est repoussée à la fin de l’école
élémentaire ou au commencement de
l’école secondaire.
L’amélioration de l’apprentissage du
français comme langue seconde n’est
pas l’unique raison d’être des pro
grammes d’immersion. Les parents
de SaintLambert, en communiquant
avec les chercheurs de McGill, dési
raient aussi contrecarrer le manque de
communication entre francophones et
anglophones au Québec. Ils voulaient
augmenter le niveau de contact inter
linguistique pour ainsi promouvoir un
partage des cultures.
Stern (1988 : 19701971) dénote que
ce genre d’éducation immersive « est
reconnu mondialement comme étant
un des rares succès de l’enseignement
d’une langue seconde ». Des écoles
d ’ immersion en f ra nça is et da ns
d’autres langues existent désormais
dans plusieurs pays, dont les États
Unis, où certaines communautés dans
quelques États gèrent leurs propres
écoles d’immersion française. De plus,
selon lui, un des traits caractéristiques
de ce mouvement est la participa
tion des parents, couronnée par la
fondation de l’association nationale
Canadian Parents for French (CPF) en
1977. Cet organisme soutient active
ment l’enseignement du français sous
toutes ses formes auprès des divers
paliers gouvernementaux. La CPF tra
vaille en partenariat avec l’Association
canadienne des professeurs d’immer
sion, fondée en 1976.
Des élèves francophones fréquentent
aussi les écoles d’immersion, mais ils
ne sont pas très nombreux. À Calgary,
dans les années 1990, certains parents
trouvaient ces écoles mieux équipées
que les écoles de langue française
(Stebbins, 1994 : 44). Cependant, les
parents francophones se plaignent
souvent que dans ces écoles d’immer
sion, leurs enfants apprennent à parler
français avec un accent anglais.
L’immersion aujourd’hui
Environ la moitié des élèves de l’élé
mentaire et du secondaire admissibles
suivent des cours de français à l’école.
regiopoLis-notre dame catHoLic HigH scHooL,écoLed’immersionfr ançaiseà kingston, 2010 Photo : Rob McDonald. Modern Languages Department, Regiopolis-Notre Dame Catholic High School
L’immig r at ion, l’imm e r sion e t la c r é at ion d’un e nou v e ll e f r an cophonie 2 7 9
L e s i n s c r ipt ion s au prog r a m me
d’enseignement en français langue
maternelle ont diminué de 1,6 % en
20062007 par rapport à 20052006.
Par contraste, les inscriptions au pro
gramme d’enseignement en immersion
française ont augmenté de 1,7 %.
Il est impossible de connaître le
nombre de diplômés des programmes
d’immersion qui contribueront d’une
façon ou d’une autre à l’épanouisse
ment des communautés francophones,
mais ils peuvent le faire selon qua
t re niveau x d ’ i ntensité, les t rois
premiers comprenant soit un emploi
en français, soit un emploi bilingue
(françaisanglais). Ceux ayant un
mode vie actif peuvent, durant les heu
res de loisir, voir un film ou une pièce
de théâtre en français, être bénévoles
lors d’activités publiques nécessitant
l’usage du français, être membres d’un
ou deux organismes ou clubs franco
phones. Par contraste, ceux qui ont un
mode de vie inactif évitent ces activités
et, par conséquent, la communauté
locale. Ils limitent l’emploi du fran
çais à leur lieu de travail et mènent
une vie essentiellement en anglais, un
choix facile en milieu majoritairement
anglophone. Entre ces deux extrêmes,
certains profitent d’un mode de vie
actif modéré, comprenant par exem
ple un peu de lecture en français, une
émission occasionnelle à la télévision
en français ou une sortie avec un(e)
ami(e) francophone. Le mode de vie
loisirs, le moins engageant du point de
vue linguistique, s’apparente au mode
de vie de style actif ou actif modéré,
mais mené parallèlement à un emploi
unilingue anglophone.
I l e st éga lement i mpos sible de
connaître le nombre de diplômés
issus de ces programmes qui n’obtien
dront jamais un emploi nécessitant
un niveau de compétence quelconque
en français ou qui ne participeront
jamais à la vie en français. Ce groupe
pourrait être assez grand, puisque la
plupart des finissants désirant pour
suivre leurs études postsecondaires
le font dans des institutions anglo
phones. Ils y approfondissent leurs
intérêts et leur goût pour la culture de
langue anglaise, s’y créent des réseaux
d’amis anglophones, etc. Puisque leur
formation supérieure est en anglais,
ils chercheront des emplois dans cet
environnement culturel.
Les francophones de langue seconde,
comprenant une proportion crois
sante de finissants des programmes
proportiond’éLèvesinscritsdansLesprogr ammesd’enseignementenfr ançaisL anguematerneLLee tauprogr ammed’immersionenfr ançais, 1991-2008
fr ancopHonesdeL anguematerneLLee tdeL anguesecondedansqueLquesgr andesviLLes, 2006 Source : Canadian Parents for French (http://www.cpf.ca. enrollement trends 2007-2008,
consulté le 26 janvier 2010)
Source : calculs fondés sur les données du recensement du Canada, 2006
ANNÉES nombres d’élèves inscrits en immersion française Proportions des élèves inscrits en français langue maternellenombres d’élèves inscrits Proportions des élèves inscrits
1991-1992 300 403 7,9 1 790 216 47,1
1999-2000 318 244 7,9 1 749 916 43,6
2007-2008 315 541 8,6 2 069 851 56,5
VILLES langue maternelle (%)Francophones de maternelle ou seconde (%)Francophones de langue ratio colonne 1 sur colonne 2
Villes avec communautés itinérantes
toronto 1,5 9,4 0,16
Hamilton 1,5 6,1 0,25
calgary 1,8 8,0 0,23
edmonton 2,3 7,7 0,29
vancouver 1,4 7,8 0,18
Villes avec communautés indigènes
Ottawa 16,1 38,8 0,41
Laf r a n c o p h o n i en o r d-a m é r i c a i n e 2 8 0
Les immigrants francophones et les élèves d’immersion sont les deux groupes
principaux pouvant compenser le taux de natalité des francophones
cana-diens en milieu minoritaire. Il ne faut donc pas sous-estimer l’importance de
l’apport de ces deux forces salutaires à la survie de la langue et de la culture
françaises au Canada. Selon les origines ethniques de ces immigrants et
élèves, des modifications vont être apportées à la culture francophone. De
tels changements ne seront pas toujours bien accueillis par les franco phones
de souche, même si un nombre grandissant de ces derniers s’est déjà résigné à
cette réalité. Les francophones de langue maternelle sont néanmoins parfois
flattés que les élèves des programmes d’immersion aient opté pour
l’appren-tissage de la belle langue à une époque où l’anglais devient la lingua franca.
relles avec les francophones de souche.
De plus, les élèves d’immersion sont
plus aptes que les autres à apprécier
les diversités culturelle et linguistique
du Canada et d’en tirer profit. Ils se
sentent aussi plus à l’aise de discuter
en français avec des francophones que
leurs congénères anglophones. Ils vont
répondre plus facilement en français
lorsqu’ils sont interrogés dans cette
langue et n’évitent pas les situations
où l’emploi du français est demandé.
Cependant, leur participation, comme
d’ailleurs celle des francophones ins
crits aux programmes d’enseignement
en français au sein des communautés
francophones, est atténuée par un
désintérêt flagrant pour le cinéma, les
émissions de télévision, la radio, les
revues et les journaux en français.
représentationdes misér abLesparLesé tudiantsde L’écoLed’immersionfr ançaise, regiopoLis-notre dame catHoLic HigH scHooL (kingston), 2009
Photo : Rob McDonald. Modern Languages Department, Regiopolis-Notre Dame Catholic High School
d’immersion, sont plus nombreux que
les francophones de langue maternelle
dans les grandes villes du Canada, hors
du Québec. Le calcul de proportions et
ratios entre les deux groupes permet
d’illustrer ce phénomène. Un ratio
faible indique une proportion beau
coup plus élevée de francophones de
langue seconde au sein de la popula
tion d’une ville. Dans les villes à forte
population itinérante (villes avec une
proportion importante de francopho
nes nés ailleurs), les francophones de
langue maternelle sont minoritaires
par rapport aux francophones de lan
gue seconde, alors que dans les villes à
forte population indigène (villes avec
une proportion importante de franco
phones y étant nés) la proportion des
deux groupes est plus équilibrée.
La principale, et peutêtre l’unique,
conclusion que nous pouvons tirer
de ces chiffres est que les francopho
nes de langue maternelle vivant dans
des communautés itinérantes ont
plus souvent l’occasion de côtoyer
des francophones de langue seconde
que leurs homologues résidant dans
des communautés indigènes. Ceci
la i s se supposer u ne plu s g ra nde
participation active aux affaires fran
cophones de la part des francophones
de langue seconde, que ce soit dans
l’organisation d’activités culturelles
ou en tant que clients de commerces
francophones, tels que restaurants,
cinémas et librairies. Nous pouvons
donc en conclure que les francopho
nes de langue seconde contribuent
abondamment au maintien des col
lectivités francophones. Leur degré
de participation est moindre dans les
communautés indigènes.
Certaines études semblent indi
qu e r qu’u ne t e l le p a r t ic ip at ion
pourrait s’avérer être assez consi
dérable (Genesee, 1998 : 318321).
Ainsi, la participation d’élèves aux
programmes d’immersion a contribué
à faire disparaître les barrières cultu
B I B L I O G R A P H I E
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