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Délinquance collective : facteur de reconsidération des principes du droit pénal classique

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Academic year: 2021

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(1)

Délinquance collective : Facteur de reconsidération des

principes du droit pénal classique

Mémoire

Maîtrise en droit

Émilie Tudeau Chassé

Université Laval

Québec, Canada

Maître en droit (LL.M.)

et

Université de Toulouse I Capitole

Toulouse, France

Master (M.)

(2)

RÉSUMÉ

La prise en compte de la criminalité collective dans les incriminations a pour effet de modifier les principes du droit pénal classique. Ceux-ci étant avant tout basés sur l’individualisme, l’instauration de la notion de groupe en tant qu’élément infractionnel étend la portée de la responsabilité de l’accusé : celle-ci ne repose plus entièrement sur les agissements de l’accusé lui-même. Les notions de coaction et de complicité, prenant déjà en compte la pluralité d’acteurs infractionnels, sont rapportées à des stades moins développés en présence de l’un des groupes criminels visés. La précocité des infractions visant la criminalité collective élargit également la portée de l’engagement de la responsabilité et remet du même coup en question la théorie de la tentative et développe le rôle préventif de la répression pénale. La responsabilité criminelle est aussi étendue : la prise en compte du groupe force le développement de responsabilités par association et du fait d’autrui en droit criminel et l’élément mental requis pour condamner l’accusé repose en tout ou en partie sur les agissements d’autrui. L’analyse de l’impact des incriminations en matière de criminalité collective se fera de manière comparative, cette façon de faire permettant de faire ressortir les spécificités des régimes canadien et français dans leur considération de la criminalité collective.

(3)

TABLE DES MATIÈRES  

RESUME  ...  III  

TABLE  DES  MATIERES  ...  IV  

INTRODUCTION  ...  1  

TITRE  I  :  LA  MEFIANCE  ENVERS  LES  GROUPES  A  TITRE  DE  JUSTIFICATION  DES   MODIFICATIONS  AUX  PRINCIPES  DU  DROIT  PENAL  CLASSIQUE  ET  A  LA  PARTICIPATION   CRIMINELLE  ...  9  

  CHAPITRE  1  :  L’INSUFFISANCE  DU  DROIT  PENAL  CLASSIQUE  AFIN  DE  LUTTER  EFFICACEMENT  CONTRE  LA   CRIMINALITE  COLLECTIVE  ...  9  

  Section  1  –  La  résurgence  d’un  rôle  préventif  du  droit  criminel  ...  9  

1.1   La dangerosité du groupe en tant que justification de la précocité de la répression : Un glissement vers la répression du risque  ...  9  

1.2   L’adoption d’incriminations préventives sanctionnant des actes préparatoires ou des actes qui tendent à la commission d’une infraction  ...  11  

1.3   La théorie de la tentative : inapplicable à la criminalité de groupe  ...  16  

Section  2  –    Incursion  sémantique  dans  le  jargon  de  la  participation  criminelle  ...  19  

Sous-­‐section  1  –  Coaction  et  complicité  :  participation  facultative,  modalité  particulière  de   réalisation  de  l’infraction  ...  20  

2.1   Commettre : Verbe idoine à la notion d’auteur  ...  20  

2.2   Inciter, entraîner, conseiller, provoquer : La place de l’instigateur  ...  22  

2.3   Aider, encourager : Une autre forme de complicité ordinaire  ...  25  

Sous-­‐section  2  –    La  criminalité  concertée,  participation  nécessaire  ...  28  

2.4   Se regrouper, s’entendre, préparer : Sanction de la formation d’un groupe  ...  28  

a.  S’entendre,  former  un  projet  illicite  :  Le  complot  ...  28  

b.  S’entendre,  se  regrouper,  préparer  :  L’association  de  malfaiteurs  ...  32  

c.  Le  projet  criminel  commun  ...  34  

Sous-­‐section  3  :  Une  participation  ni  nécessaire  ni  facultative  ...  37  

2.5   Faciliter, contribuer, participer à l’activité d’un groupe  ...  37  

  CHAPITRE  2  :  LE  GROUPE  EN  TANT  QU’ELEMENT  INFRACTIONNEL  ...  44  

  Section  1  –  La  définition  juridique  des  groupes  ...  44  

1.1   Une pluralité de participants : La formation du groupe criminel  ...  46  

a.  Le  nombre  de  personnes  requis  pour  former  l’organisation  criminelle  ...  47  

b.  Le  nombre  de  personnes  requis  pour  former  l’association  de  malfaiteurs  ...  49  

1.2   Organisation, hiérarchie, durée, structure et continuité du groupe  ...  51  

a.  La  prise  en  compte  du  crime  organisé  en  tant  que  notion  juridique  en  droit  canadien  ...  52  

b.  Structure  et  continuité  des  groupes  en  droit  canadien  ...  53  

c.  La  durée  de  l’organisation  criminelle  versus  celle  du  complot  ...  59  

d.  La  structure  et  continuité  de  l’association  de  malfaiteurs  ...  62  

1.3   La commission d’infractions graves : Les activités du groupe  ...  63  

Section  2  –    Le  groupe  en  tant  qu’élément  infractionnel  a  pour  conséquence  la  dilution  de   l’élément  matériel  ...  65  

2.1   Indifférence de la commission d’une infraction principale et criminalisation de la résolution d’agir en commun65   2.2   Abaissement du degré de faute requis en raison de la gravité de l’infraction projetée  ...  68  

(4)

TITRE  II  :  L’EXTENSION  DE  LA  RESPONSABILITE  CRIMINELLE  ...  71  

  CHAPITRE  1  :  L’ARTICULATION  DU  PRINCIPE  DE  RESPONSABILITE  INDIVIDUELLE  DANS  UNE  INFRACTION   COLLECTIVE  :  UN  RETOUR  VERS  LA  RESPONSABILITE  COLLECTIVE  ?  ...  71  

  Section  1  –    Responsabilité  par  association,  par  appartenance  et  du  fait  d’autrui  :  Le  lien  entre   le  groupe  et  l’individu  ...  71  

1.1 La responsabilité pour la « simple appartenance » à un groupe  ...  72  

1.2 La responsabilité par association  ...  74  

1.3 La responsabilité du fait d’autrui  ...  78  

Section  2  –    L’incrimination  d’un  état  d’esprit  :  l’emphase  ou  le  manque  d’emphase  sur  les   éléments  subjectifs  de  l’infraction  ...  80  

2.1 Une norme objective de prévisibilité est suffisante pour condamner un individu pour le crime perpétré par autrui  .  81   Un  degré  d’intention  inférieur  à  celui  de  l’auteur  réel  ...  82  

2.2 L’intention en matière de gangstérisme  ...  84  

a.  La  connaissance  de  la  nature  de  l’infraction  projetée  ...  85  

b.  Connaissance  de  l’organisation  criminelle  et  intention  de  l’accusé  de  commettre  en  lien  avec  elle  ...  85  

2.3   L’intention en matière d’association de malfaiteurs  ...  86  

  CHAPITRE  2  :  COMBINAISONS  D’INFRACTIONS  INCHOATIVES  ET  INFRACTIONS  VISANT  LA  CRIMINALITE   COLLECTIVE  ...  88  

  Section  1  –    En  droit  canadien  ...  88  

1.1   La  tentative  de  complot  ...  88  

1.2    Le  complot  et  le  gangstérisme  ...  90  

a.  Les  éléments  essentiels  du  complot  et  les  infractions  visant  les  organisations  criminelles  ...  90  

b.  La  coexistence  du  complot  et  de  l’organisation  criminelle  ...  92  

Section  2  –  En  droit  français  ...  95  

2.1   La tentative et la complicité des infractions d’association  ...  95  

2.2   L’association de malfaiteurs et la circonstance aggravante de commission d’une infraction en bande organisée96   CONCLUSION  ...  98  

ANNEXE  LEGISLATION  ...  100  

BIBLIOGRAPHIE  ...  106  

(5)

ABRÉVIATIONS  

ABCA Cour d'appel de l'Alberta

AJ Actualité juridique

C.A. Alb. Cour d’appel de l’Alberta Alta. L. R. Alberta Law Reports

BCCA Court of Appeal for British Columbia BCSC British Columbia Supreme Court

Bull. crim. Bulletin des arrêts de la Cour de cassation (Chambre criminelle) C. Cr. Code criminel canadien

C. de D. Cahiers de droit

C.A. Recueils de jurisprudence du Québec. Cour d'appel C.A C.-B Cour d’appel de la Colombie-Britannique

C.A. Ont. Cour d’appel de l’Ontario

C.A. Sask. Cour d’appel de la Saskatchewan C.C.C. Canadian criminal cases

C.L.J. Criminal Law Journal C.L.R. Criminal Law Review C. pén. Code pénal français C.R. Criminal Reports

C.S.C. Canada Supreme Court Cases

Cass. crim. Cour de cassation. Chambre criminelle (Arrêt de la) Crim.L.Q. Criminal law quarterly

CSC Cour suprême du Canada

D. Recueil Dalloz

DLR Dominion Law Review

DORS Décrets, ordonnances et règlements (Canada) Gaz.Pal. Gazette du Palais

Harv. L.Rev. Harvard Law Review J. Crim. L. Journal of Criminal Law J.-Cl. Pén. Juris-classeur Pénal J.E. Jurisprudence Express

J.O. Journal Officiel de la République Française

J.C.P. Juris Classeur Périodique = Semaine juridique (édition générale) MBQB Manitoba Court of Queen’s Bench

L.C. Lois du Canada

L.R.C. Lois révisées du Canada

LSJPA Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents O.J. Ontario Judgments

ONCA Ontario, Cour d’appel

ONSC Ontario Superior Court of Justice

ONUDC Office des Nations Unies contre la drogue et le crime

préc. précité

QCCA Québec, Cour d'appel

QCCQ Cour supérieure du Québec

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R.I.D.P Revue internationale de droit pénal

RCS Recueil des arrêts de la Cour suprême du Canada R.T.N.U. Recueil des traités des Nations Unies

Rép. pén. Répertoire de droit pénal et de procédure pénale Rev. can. D.P. Revue canadienne de droit pénal

Rev. int. dr. comp. Revue internationale de droit comparé Rev. int. dr. pén. Revue internationale de droit pénal

RSC Revue de science criminelle et de droit pénal comparé Sask. C.A. Saskatchewan Court of Appeal

S.J. Solicitors' Journal

SKQB Saskatchewan Court of Queen’s Bench

UKPC Judicial Committee of the Privy Council (R.-U.) UKSC Supreme Court of the United Kingdom

(7)

INTRODUCTION

La conception traditionnelle du droit pénal est avant tout individualiste : une personne est coupable du crime qu’elle a elle-même commis. Sénèque, dans l’une de ses tragédies romaines, écrivait que « le coupable est celui à qui le crime profite ».1 On ne peut pas dire que cette interprétation a la même résonance dans le contexte de l’avènement de la responsabilité criminelle collective.

Pourtant, la réalité criminologique, elle, est fortement empreinte de la notion de collectivisme. Le droit pénal a déjà tenté de capturer la responsabilité de la collectivité plus tôt dans l’histoire2. Ces principes ont cependant été délaissés pour revenir vers une conception individuelle de l’infracteur, reflétant la valeur accordée dans nos sociétés à n’accepter la punition que pour son propre fait, importance qui n’est sans doute pas étrangère au développement des droits de l’Homme. Ainsi, la faute en matière pénale doit être rattachée à un élément mental et un élément matériel3.

Les principes du droit pénal, s’ils étaient appliqués dans leur sens strict et dénués de toute dimension collective, empêcheraient d’engendrer la responsabilité de quiconque participe à un crime sans en être l’auteur direct. Ainsi, les législateurs canadien et français ont édicté plusieurs infractions ou modes de responsabilité qui vont au-delà de l’individualisme et permettent d’imputer un crime à une personne qui autrement aurait été impunie, car elle n’a pas commis le crime personnellement. L’infracteur va souvent recevoir de l’aide, qu’elle soit morale ou matérielle, de la part d’une personne ou d’un groupe, pour mener à bien son projet criminel. La question est alors de savoir s’il est possible et, le cas échéant, comment le droit peut prendre en compte cette réalité lors de l’octroi d’une sanction criminelle. Une première façon d’illustrer cette réalité sociale est l’élaboration de théories sur la responsabilité secondaire.

Cette façon d’appréhender la responsabilité secondaire se fait à partir de la catégorisation des individus « accessoires », par opposition à principaux, au crime. Se faisant, il faut s’intéresser à trois façons de traiter la responsabilité collective : premièrement par une analyse de                                                                                                                

1 SENEQUE, Médée, Acte 3e, scène 2.

2 R. MERLE et A. VITU, Traité de droit criminel, 7e éd., Paris, Cujas, 1997, p. 663. 3 Aussi nommés dans cet ouvrage respectivement mens rea et actus reus.

(8)

la participation causale de chaque individu. Dans ce cas, l’individu ne répond que de ses propres faits et gestes. Deuxièmement, prendre en compte avant tout la participation morale à l’infraction, pour capturer le degré de turpitude morale individuel. Troisièmement, considérer la responsabilité collective comme étant une alternative intéressante de façon à reconnaître une culpabilité identique à chaque participant, en faisant fi de ce que l’un d’entre eux a causé la majorité des dégâts lors de la commission de l’infraction4. En vérité, les systèmes français et canadien sont loin d’être construits sur une seule de ces propositions. Si les notions du droit pénal classique retiennent surtout la première conception, la prise en compte de la criminalité collective opère une certaine incorporation des deuxième et troisième approches5. En effet, «[e]n incriminant l’infraction collective de façon originale et en la réprimant de manière spécifique, le législateur est parfois conduit à créer des cas de responsabilité collective : chacun des participants peut avoir à répondre dans certains cas d’actes commis ou aggravés par d’autres. À ce titre de telles solutions paraissent très critiquables. Le sont-elles vraiment ? Il semble en réalité que sous le vocable de responsabilité collective on range des hypothèses qui doivent être différenciées. »6

Ainsi, la responsabilité collective se décline sous deux réalités : soit plusieurs personnes ont participé à la réalisation d’une infraction ou bien une infraction a été commise par un membre d’un groupe et les autres voient leur responsabilité engagée en raison de son appartenance au groupe7. Des solutions empruntées à ces deux réalités sont présentes dans les systèmes français et canadien. La première solution cependant est plus représentative du droit pénal classique : cette notion de participation à la réalisation d’une infraction par plusieurs personnes suggère l’application des notions de coactivité et de complicité. La deuxième est plus originale en ce qu’elle fait entrer une notion tierce dans l’équation : à l’infracteur et au crime s’ajoute le groupe.

Les raisons qui sous-tendent un tel intérêt des législateurs envers les groupes sont bien légitimes : les groupes représentent une menace accrue par rapport à l’infracteur isolé. Qu’il s’agisse du crime organisé, du terrorisme ou encore de « gangs de rue », ces groupes font                                                                                                                

4 R. MERLE et A. VITU, préc., note 2, p. 678. 5 Idem.

6 C. DUPEYRON, « L’infraction collective », RSC 1973. 357, à la page 390.

7 E. VERNY, Le membre d’un groupe en droit pénal, Bibliothèque de sciences criminelles, t. 37, Paris, LGDJ, 2002, p.

90 et P. RAINVILLE, « La responsabilité par appartenance ou les incertitudes conceptuelles et constitutionnelles portant sur l’article 21 (2) C.cr. », (2008) 12 Revue canadienne de droit pénal 161, à la page 167.

(9)

encourir un danger bien réel à la société. Ce faisant, l’emphase du droit pénal « glisse de la répression du dommage à la répression du danger »8. Dans tous les cas d’infractions de criminalité collective, le niveau de gravité du geste commis par l’inculpé pour amener la sanction criminelle a été amenuisé, en comparaison avec ce que l’on demande de l’auteur solitaire, en même temps que la responsabilité a été devancée sur le cheminement criminel.

L’appréhension du risque passe par l’abandon de la nécessité de la gravité de la faute de l’individu qui agit en accointance avec des groupes de malfaiteurs ainsi que d’une redéfinition – voire une absence – de causalité entre son geste et l’infraction subséquemment consommée par un tiers ou même encore que l’infraction à laquelle il a hypothétiquement contribué n’a jamais été commise. En d’autres termes, l’action de l’inculpé est très éloignée de la commission éventuelle de l’infraction.

La mise de côté de la responsabilité individuelle pour ses propres faits est constatée par plusieurs auteurs qui soutiennent que « [d]u côté du droit pénal, la délinquance de groupe a toujours paru justifier un traitement à part en raison de l’effet d’entraînement et, par là, de la nocivité ou dangerosité plus importante de l’activité criminelle de groupe.9 » Le danger d’une telle quête des législateurs est cependant de s’intéresser davantage à la dangerosité du groupe qu’à la dangerosité de l’acte posé par la personne qui est associée à ce groupe, de créer des infractions où l’on constate qu’il y a dilution des éléments matériels et mentaux des crimes dès lors que le délinquant est accompagné pour substituer à ces éléments la présence d’un groupe. Le groupe devient alors « un élément constitutif déterminant » de l’infraction10. Par ailleurs, la pente peut s’avérer glissante en ce qui concerne certaines formes de criminalité collective.

Bien que l’on puisse arguer que le droit pénal « s’efforce désormais de prendre en compte l’originalité de la délinquance collective »11 et que celui-ci est justifié dans son but de vouloir réprimer la criminalité sans attendre la consommation d’une infraction étant donné la gravité des crimes commis dans la collégialité, il n’en demeure pas moins qu’il est impératif de se questionner sur les moyens que les législateurs utilisent afin d’y parvenir : bien qu’ils ne criminalisent pas une simple intention criminelle, ils s’en approchent et dans certains cas il existe des formes de responsabilités qui flirtent avec la responsabilité par appartenance ou pour le fait                                                                                                                

8 R. PARIZOT, La responsabilité pénale à l'épreuve de la criminalité organisée, Bibliothèque des sciences criminelles,

t. 48, LGDJ, 2010, p. 34.

9 Ibid., p. 6.

10 M. MASSE, « La criminalité terroriste », RSC 2012. 89. par. 7. 11 Idem.

(10)

d’autrui. La nécessité que l’individu « participe » à la criminalité du groupe avec lequel son accointance sera sanctionnée doit s’entendre d’une exigence forte de connaissance des activités et de la criminalité du groupe en question, jumelée à la volonté inébranlable d’y apporter son aide. Sans cet impératif, la sanction de participation à un groupe serait non avenue.

La multiplication des normes en matière de criminalité collective est également perceptible dans les systèmes français et canadien. Le changement du droit pénal s’observe donc par un abandon de la « rareté pourtant essentielle » de celui-ci.12 Ainsi, la répression de la criminalité collective par ces deux États est caractérisée par une croissante « complexité, [par] l’éparpillement voire l’éclatement de leur droit interne en la matière »13.

La question alors posée est la suivante : les principes du droit pénal général classique, empreints d’individualisme, sont-ils aptes à englober le traitement de la criminalité collective et à effectuer une répression mesurée de l’implication d’un individu dans un groupe de malfaiteurs ou au contraire sont-ils insuffisants, car trop opposés à la logique qui sous-tend l’incrimination de la criminalité de groupe ?

Ce questionnement entretient certains liens avec la recherche de l’efficacité du droit pénal. Ainsi, la justice pénale devant s’adapter à des formes de plus en plus sophistiquées de criminalité ne présente-t-elle pas certains signes d’effritement et de distorsion des principes du droit pénal classique ?

Pour répondre à la question posée, il faut se poser plusieurs questions connexes. Comment prendre en compte juridiquement le groupement, comment le définir ? Cela est une part non négligeable de la réflexion quant à la prise en compte de la criminalité de groupe pour en délimiter les contours. Pour donner un exemple, soulignons le traitement pénal du crime organisé : le droit français ne le réprime qu’à travers l’association de malfaiteurs, applicable à plusieurs types de groupes sans distinction qui ne sont pas représentatifs du crime organisé, alors que le droit canadien tente d’en capturer les attributs à travers la notion d’organisation criminelle. Nous allons donc nous attarder à esquisser le portrait des groupes criminalisés en France et au Canada et montrer comment certaines solutions sont plus adaptées à capter le réel danger créé par les groupes criminels. Ces infractions, qui visent à anticiper la consommation de l’infraction, pourraient avoir pour effet de capturer la simple intention criminelle. Il n’en est                                                                                                                

12 R. PARIZOT, préc., note 8, p. 33 ; E. BARON, La coaction en droit pénal, thèse de doctorat en droit, Université

Montesquieu – Bordeaux IV, 2012, par. 17.

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pourtant rien, et nous allons nous appliquer à démontrer qu’il existe tout de même une exigence d’intention à satisfaire pour être condamné en raison de son accointance avec un groupe criminel. Le fait que s’enchevêtrent des principes du droit pénal classique et du droit qui vise à réprimer les groupes laisse parfois dubitatif, en ce que l’on peut se demander si la condamnation pour les deux ne représente pas une combinaison interdite notamment par la prohibition de la condamnation d’une personne deux fois pour les mêmes faits.

D’autres questions accessoires à notre question de recherche principale ressortent de l’étude de la participation à la criminalité collective. Elles devront toutes être abordées afin de produire une réponse cohérente à notre question principale. Elles sont les suivantes : qu’est-ce que signifie réellement le fait de participer à une infraction et quelle est l’étendue de la participation nécessaire à engager sa responsabilité criminelle? Cette question se réfère particulièrement à la circonscription des actes tendant à la commission d’une infraction qui sont suffisants à entraîner une responsabilité criminelle pour l’individu agissant avec autrui.

Soulignons, au passage, que la Commission de réforme du droit du Canada se posait déjà des questions similaires à celles que nous venons de poser au début des années 1980 :

Ce […] risque de pénaliser les conduites innocentes ou les simples «pensées criminelles» est encore accentué par la formulation de notre droit pénal. Prenons la notion d'élément matériel, par exemple. En ce qui a trait à la responsabilité principale, cet élément est habituellement défini d'une façon relativement précise dans les dispositions de la partie spéciale. Mais dans le cas de la responsabilité secondaire, l'élément matériel des infractions consistant dans les conseils, l'aide et la tentative n'est caractérisé que très vaguement par les dispositions de la partie générale. Quelles sont les conduites requises pour la constitution des infractions consistant dans les conseils, l'incitation, l'aide, la tentative? À quel moment l'aide, l'encouragement ou la tentative deviennent-ils commission? 14

A fortiori, ces questions se posent de façon encore plus pressante en matière de criminalité

collective, alors que l’acte prohibé est essentiellement celui qui aide le groupe à atteindre ses objectifs subversifs.

                                                                                                               

14 COMMISSION DE REFORME DU DROIT DU CANADA, Droit pénal. La responsabilité secondaire : complicité et

(12)

Il ne fait nul doute que, puisque l’individualité de la responsabilité et la criminalité collective sont deux notions en apparence contradictoires, il ne peut qu’en résulter des changements à la théorie du droit pénal classique. Il semble en effet y avoir contamination du droit « dérogatoire » visant la criminalité collective autant en droit pénal général qu’en droit pénal spécial15. Certes, le droit pénal s’est adapté à la criminalité de groupe, mais il fait encourir à certains de ses fondements des atteintes et des paradoxes qui font s’interroger certains auteurs sur la viabilité de ces changements et les remises en question qu’il suscite à l’égard du droit pénal classique16 : comme mentionné précédemment, l’iter criminis est singulièrement touché par cette adaptation17, le caractère préventif des infractions qui traitent de la criminalité collective est manifeste et « traduit un glissement vers la répression des comportements à risque »18. On appréhende le risque que ces incriminations singulières aient pour effet que le droit dérogatoire « se dilate jusqu’à aboutir à une implosion », qu’il se « développe au point de contaminer le droit commun »19. Ce danger est inhérent à plusieurs formes de criminalité collective prévues par les législateurs français et canadien, mais aussi dans la jurisprudence issue de l’application des dites infractions, malgré le contrôle que les tribunaux peuvent exercer sur la contention de la responsabilité criminelle.

La prise en compte de la criminalité concertée dans le droit pénal a deux conséquences majeures. Cela étant, notre propos sera divisé de la façon suivante : premièrement, elle influe sur l’attribution de la responsabilité pénale20. En plus des apports à la notion de participation criminelle qui induit des changements à la théorie de la complicité et de la coaction21, le droit pénal considérant la criminalité collective fait également encourir des changements en ce qui concerne la théorie de la tentative, le moment de la répression du droit pénal ainsi que la notion de consommation d’une infraction22. D’autre part, l’introduction des groupes en tant qu’élément matériel de l’infraction a également pour effet d’apporter des changements conséquents à la théorie classique individualiste23. Deuxième conséquence de l’appréhension de la criminalité                                                                                                                

15 R. PARIZOT, préc., note 8, p. 9.

16 Que certains auteurs, dont R. PARIZOT, préc., note 8, qualifient de « droit pénal des Lumières », préface. 17 M. MASSE, préc., note 10, par. 13.

18 Idem.

19 R. PARIZOT, préc., note 8, préface. 20 Titre I.

21 Titre I, Chapitre 1, section 2. 22 Titre I, Chapitre 1, section 1. 23 Titre I, Chapitre 2, sections 1 et 2.

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collective : cette prise en compte du groupe amène un élargissement de la responsabilité criminelle24. Il est possible d’être coupable d’une infraction sans soi-même la commettre, ni même l’encourager ou aider à sa réalisation. Le lien escompté entre l’individu et le groupe occupera ainsi une partie du développement25. Ce lien doit, évidemment, être accompagné d’une intention criminelle pour emporter la sanction de l’individu frayant avec un groupe criminel26. De plus, étant donné la nature incomplète des infractions prévues en matière de criminalité collective, il importe de s’interroger quant à la combinaison des infractions visant les groupes entre elles ainsi que leur jumelage à d’autres infractions incomplètes telles que le complot ou la tentative27.

Ainsi, il sera question dans le présent ouvrage des normes réservées par les systèmes français et canadien en matière de criminalité collective. Non seulement cette étude du droit étranger permet-elle d’acquérir une nouvelle perspective sur notre propre droit national, elle permet encore, bien que ce ne soit évidemment pas le but de ce mémoire28, d’apporter des solutions à des lacunes de l’un ou l’autre système, mais aussi de faire germer des questionnements opportuns. À problème similaire, issue différente. Ainsi, puisque l’appréhension par les deux législateurs mentionnés du problème de la criminalité collective appelle, nous allons le voir, des solutions peu similaires, la comparaison entre ces deux systèmes s’avère très éclairante. Certains des traits saillants de ces deux cultures juridiques semblent même s’être inversés à travers l’existence de la criminalité collective : l’attachement traditionnel à l’intention manifesté par un acte pour fonder la responsabilité criminelle en France, issu du droit romain, et l’insistance sur l’action au Canada, qui nous vient directement des préceptes du droit anglais29. C’est pourquoi le choix de ces deux pays afin de servir de base à la comparaison du traitement juridique de la criminalité collective est tout indiqué. Amener le sujet de manière contrastée permettra également d’apprécier la précocité avérée de l’un des systèmes qui nous intéresse, qui semblerait presque, nous le verrons, recourir à l’exagération en ce qui concerne la répression de la criminalité collective.

Ne seront pas considérées de manière approfondie les règles en matière de procédure, l’accent                                                                                                                

24 Titre 2.

25 Titre 2, Chapitre 1, section 1. 26 Titre 2, Chapitre 1, section 2. 27 Titre 2, Chapitre 2.

28 Contentons-nous d’identifier certains problèmes en la matière.

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étant surtout mis sur les règles de fond, qui seront bien suffisantes à répondre à notre question. De plus, bien qu’une telle analyse pourrait être fort intéressante, les groupes visés dans la démonstration sont essentiellement ceux qui sont formés pour la commission d’infractions30. Il importe cependant de signaler qu’il existe des groupes commettant des actes criminels qui sont formés de manière spontanée et dont le crime est foncièrement imprévu, fortuit, opportuniste ou hasardeux, « purement circonstanciel31 ». Nous pensons alors aux crimes de foule. De plus, il est évident que ce sujet est au croisement avec plusieurs notions connexes comme le recel, le blanchiment d’argent, le terrorisme et la corruption. La référence à ces concepts ne sera faite que de manière anecdotique lorsque le développement s’y prêtera. Précisons également que, malgré la parenté évidente entre la responsabilité du fait d’autrui et la responsabilité pénale des entreprises et quant aux professions réglementées32, ces sujets ne feront pas l’objet de notre propos puisque, encore une fois, nous nous intéressons essentiellement à la responsabilité criminelle entraînée dans le sillage de groupes formés dans un but délictuel.

                                                                                                               

30 M.-L. RASSAT, Droit pénal spécial. Infractions du Code pénal, 7e éd., Dalloz, Paris, 2014, p 996. 31 E. BARON, préc., note 12, p. 28.

32 Sur la responsabilité collective en matière de droit des affaires en droit canadien, voir J. A. QUAID, « La

responsabilité pénale des organisations », dans Droit pénal général, vol. 1, Droit pénal collection (S. Roy & M.-P. Robert, eds.), Encyclopédie Jurisclasseur Québec, Montréal, LexisNexis Canada, 2013.

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Titre I : LA MEFIANCE ENVERS LES GROUPES A TITRE DE JUSTIFICATION DES MODIFICATIONS AUX PRINCIPES DU DROIT PENAL CLASSIQUE ET A LA PARTICIPATION CRIMINELLE

Chapitre 1 : L’insuffisance du droit pénal classique afin de lutter efficacement contre la criminalité collective

Section 1 – La résurgence d’un rôle préventif du droit criminel

La criminalité collective a connu un regain d’intérêt de la part des législateurs depuis une vingtaine d’années. Face à la menace posée notamment par la criminalité transnationale organisée et les groupes terroristes, les efforts sont déployés afin de tuer dans l’œuf les premières ébauches des projets criminels émanant d’individus regroupés. Malgré la présence d’infractions ou de modes de responsabilité déjà bien ancrés dans la culture juridique des systèmes français et canadien veillant à réprimer la criminalité collective, comme le complot, l’association de malfaiteurs ou la complicité, les législateurs veulent s’adapter en multipliant les infractions réprimant de manière encore plus spécifique des comportements à composante collective. Ils adoptent des incriminations plus précises en matière de gangstérisme et de terrorisme qui ressemblent étrangement aux infractions et modes de responsabilités déjà existants. Faisant cela, les législateurs français et canadiens modifient de manière marquante l’iter criminis en diluant les éléments infractionnels et en faisant essentiellement reposer la répression sur la notion de risque de la commission d’une infraction. Ils élargissent du même coup la portée de la participation criminelle dans l’espoir d’endiguer la criminalité qui origine de ces groupes criminels, érigeant en comportements criminels des actes qui auparavant n’auraient pas mérité une sanction criminelle33.

1.1 La dangerosité du groupe en tant que justification de la précocité de la répression : Un glissement vers la répression du risque

Les législateurs français et canadien sortent hors des sentiers battus et des principes classiques développés par le droit pénal lorsqu’ils entendent exercer une répression à l’encontre des individus qui agissent de concert. La création de solutions pour le moins originales n’est pas                                                                                                                

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sans faire craindre une remise en question des principes généraux du droit pénal, foncièrement modelé par une logique de criminalité individuelle. Or, la réalité criminologique est toute autre.

Il n’est pas étonnant que les lois pénales aient aujourd’hui pour but de tenter d’endiguer la criminalité collective à l’aide de politiques criminelles innovatrices. En effet, la menace posée par ces groupes criminels est significativement augmentée par rapport au malfrat solitaire. L’infraction collective représenterait un « passage de la criminalité du stade artisanal au stade industriel34.» Le fait de s’associer procure aux criminels des avantages ; le fait de « s’unir, en organisant, en programmant leurs diverses activités délictueuses, en conférant une certaine permanence à leur réunion […] augment[e] leur puissance et [ils] font ainsi peser sur la société une dangereuse insécurité »35. Citons en exemple des infractions parmi les plus graves, telles celles qui sont le fait du crime organisé et le terrorisme, mais aussi divers méfaits commis par des criminels qui ne seraient pas nécessairement passés à l’action sans l’effet d’entraînement du groupe36. De plus, la répartition des tâches au sein du groupe a souvent pour effet l’augmentation de l’impunité des associés37. La réaction des législateurs à l’égard des groupes criminels est indicatrice du niveau de danger qu’ils représentent ; il faut tenter de réprimer l’infraction en puissance, même au stade de sa préparation, ce qui revient à en « saisir son potentiel criminel »38. Il s’agit d’ailleurs de l’une des premières caractéristiques que l’on remarque dans l’étude des infractions visant à lutter contre la criminalité des groupes. L’intervention répressive est nettement devancée dans le processus criminel en comparaison avec le malfrat individuel39.

La formation du groupe ainsi que son existence sont de forts incitatifs au passage à l’acte : ce dernier, de l’ordre de la possibilité lors de l’échafaudage d’un plan illégal par un loup solitaire, devient très probable sinon certain de se réaliser lorsque préparé par un groupe40. Les moyens financiers, matériels et en termes d’effectifs dont disposent les groupes plus élaborés font qu’on se méfie encore davantage des individus regroupés41. De surcroît, plus les moyens du                                                                                                                

34 C. DUPEYRON, préc., note 6.

35 A. VITU,« Participation à une association de malfaiteurs », JurisClasseur Pénal Code , fasc. 20, par. 3.

36 P. ZIMBARDO, The Lucifer Effect: Understanding How Good People Turn Evil, Random House, New York, 2007. 37 C. DUPEYRON, préc., note 6, p. 357.

38 F. PARDO, Le groupe en droit pénal, thèse de doctorat en droit, Nice, 2004, p. 15 ; V. aussi P. RAINVILLE, « La

gradation de la culpabilité morale et des formes de risque de préjudice dans le cadre de la répression de la tentative » (1996) 37 C. de D. 909 à la page 916.

39 G. CÔTÉ-HARPER, P. RAINVILLE et J. TURGEON, Traité de droit pénal canadien, Cowansville, Éditions Yvon Blais,

4e éd., 1998, p. 661-663.

40 C. DUPEYRON, préc., note 6, p. 364. 41 F. PARDO, préc., note 38, p. 34.

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groupe sont importants, plus la structure sera elle aussi importante, ce qui rend plus que vraisemblable la mise à exécution d’un projet criminel42. C’est pourquoi, dans certains cas, les législateurs vont tenter de départager les groupes pour faire encourir aux individus qui s’associent entre eux une sanction criminelle en adéquation avec le niveau d’organisation et de structure du groupe. L’organisation est donc synonyme de dangerosité. En clair, l’organisation d’un regroupement de malfrats donne principalement deux indications par rapport aux infractions qui seront commises : d’un côté, cette organisation rend quasi définitive l’intention de commettre des infractions, et d’un autre côté, évacue toute ambiguïté quant au caractère blâmable des actes préparatoires43.

1.2 L’adoption d’incriminations préventives sanctionnant des actes préparatoires ou des actes qui tendent à la commission d’une infraction

On conçoit traditionnellement le cheminement criminel comme comportant la pensée criminelle à son stade le plus primaire, suivi de la résolution d’agir extériorisée, cette dernière précédant les actes qui visent à préparer la commission de l’infraction, puis le commencement d’exécution et finalement la consommation.44 Cet iter criminis est pensé en ayant en tête le malfrat solitaire. Celui-ci, généralement45, n’est pas inquiété lorsqu’il ne fait qu’aménager la commission d’une infraction. La culpabilité d’un individu s’acquiert dès qu’il dépasse le stade des actes préparatoires et s’engouffre dans le commencement d’exécution de l’infraction46. Au stade des actes préparatoires, le risque de préjudice représenté par un individu isolé n’est pas suffisamment avéré pour encourir une sanction pénale47. Certaines infractions sont cependant édictées primairement dans une fin de prévention48 et se basent principalement sur le principe que certaines conduites, même si elles ne sont pas illégales en soi, sont toutefois moralement blâmables. La lutte contre la criminalité collective appelle des solutions juridiques qui permettent d’étouffer les projets criminels d’un regroupement d’individus avant la survenance                                                                                                                

42 Ibid., p. 153 ; C. DUPEYRON, préc., note 6, p. 357. 43 C. DUPEYRON, préc., note 6, p. 357.

44 Ibid., p. 363.

45 Il existe tout de même certaines exceptions ; l’utilisation d’infractions-obstacles n’est pas le propre de la lutte contre

la criminalité collective, elles sont aussi utilisées dans certains cas pour prévenir certains types de crimes commis par un individu seul, par exemple la fabrication d’un faux passeport (art. 57(1)a) C.cr.), la possession d’instruments destinés à la contrefaçon (art. 409 C.cr.) ou encore la possession de matières incendiaires dans un but criminel (art. 436.1 C.cr.) Ces exemples sont tirés de G. CÔTÉ-HARPER, P. RAINVILLE et J. TURGEON, préc., note 39, p. 667.

46 R. PARIZOT, préc., note 8, p. 38.

47 G. CÔTÉ-HARPER, P. RAINVILLE et J. TURGEON, préc., note 39, p. 641. 48 A. ASHWORTH et L. ZEDNER, préc., note 33, p. 96.

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d’une consommation de l’infraction ou même de sa tentative. La difficulté réside donc dans la volonté du droit de saisir la criminalité latente qui origine des groupes. C’est pourquoi les législateurs, autant en France qu’au Canada, ont façonné des systèmes répressifs ayant en commun la multiplication des infractions visant la criminalité collective49. Les législateurs procèdent essentiellement en édictant des infractions-obstacles, ou inchoatives. Ces infractions inchoatives se veulent un rempart à la commission d’une infraction. En les prévoyant, le législateur part du postulat qu’il n’a pas à attendre la consommation de l’infraction en tous ses aspects constituants pour que la répression soit possible. Il sévit de ce fait contre les actes préparatoires50 ou, plus généralement, contre les actes tendant à la commission de l’infraction, même en l’absence d’un préjudice avéré.

Le droit pénal classique connaît entre autres la notion de complicité, par exemple, qui permet, au Canada, de sanctionner l’aide, l’encouragement51 ou l’incitation52. Le droit français en la matière est très similaire et prévoit qu’est « complice d’un crime ou d’un délit la personne qui sciemment, par aide ou assistance, en a facilité la préparation ou la consommation. Est également complice la personne qui par don, promesse, menace, ordre, abus d’autorité ou de pouvoir aura provoqué à une infraction ou donné des instructions pour la commettre. »53 Une autre infraction inchoative générale commune aux systèmes français et canadien est la tentative54, qui, comme nous le démontrerons, ne suffit hélas pas à saisir le potentiel de dangerosité représenté par la criminalité collective. Le Canada, cependant, dispose une infraction inchoative supplémentaire, également de portée générale. Il s’agit du complot, qui est un acte criminel en vertu de l’article 465 C.cr.. Cette infraction, issue du droit anglais, permet de réprimer l’entente entre deux ou plusieurs personnes en vue de commettre un acte illégal55. Le complot précède la tentative sur le processus infractionnel, il est beaucoup plus incomplet que cette dernière puisque le simple accord entre deux personnes de poursuivre une fin illicite est visé. Aucun acte supplémentaire n’est nécessaire à la consommation de cette infraction. Les                                                                                                                

49 R. PARIZOT, préc., note 8, p. 37.

50 Voir P. RAINVILLE, préc., note 38, p. 925 ; R. PARIZOT, préc., note 8, p. 38.

51 L’aide et l’encouragement sont constitutifs de complicité selon l’article 21(1)b) et c) C.cr.

52 Le conseil de commettre une infraction est réprimé en tant qu’acte de complicité par les articles 22(1) et (2) C.cr. 53 Article 121-7 C. pén.

54 Articles 24(1) du Code criminel et 121-5 du Code pénal.

55 Le complot sera sujet à davantage de développements infra titre II, chapitre 2, section 1 ; Il faut noter que l’article

465 C.cr., bien qu’il prévoit la sanction de l’infraction de complot, n’est pas des plus éloquents pour bien saisir la nature de cette infraction. Aussi fait-elle l’objet d’importants développements jurisprudentiels.

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auteurs Manning, Mewett et Sankoff disent même du complot qu’il est « the “most unfulfilled”

offence of all »56.

Pourtant, le législateur canadien ne s’arrête pas là. Un régime exceptionnel concernant les organisations criminelles a été façonné par celui-ci en réponse à la menace accrue que représente le crime organisé à l’échelle planétaire, mais aussi dans ses propres frontières. Il l’a fait en symbiose avec le reste de la communauté internationale, dont l’impulsion venait des Nations Unies à travers la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale

organisée57. Ce faisant, il a encore une fois devancé le stade de répression sous la forme de l’article 467.11 C.cr., qui sanctionne l’individu qui « participe à une activité d’une organisation criminelle ou y contribue dans le but d’accroître la capacité de l’organisation de faciliter ou de commettre un acte criminel ». Une telle incrimination se situe à point plus précoce encore que celui des infractions inchoatives de complot ou de tentative58 et est, sans être surprenante, pour le moins originale. Elle représente une première manifestation de la sévérité du droit canadien à l’endroit des groupes criminels.

Non content de cette multiplication d’infractions qui sanctionnent des comportements très inachevés, le droit canadien contient également une disposition qui aggrave la situation de celui qui a le malheur de s’adjoindre des acolytes pour perpétrer une infraction. L’article 21(2) C.cr. prévoit une solution particulière pour les infracteurs qui ont formé, avec la volonté de s’entraider, un projet criminel avec une ou d’autres personnes et qui ont ensuite mis à exécution ce projet. Si l’exécution de cette infraction projetée est réalisée et que, dans son déroulement, se commet par l’un des comparses une infraction supplémentaire, tous se verront attribuer la responsabilité de cette infraction non prévue, pour autant qu’elle était une conséquence probable de la mise en œuvre du plan initial.59 Deux amis se trouvent dans un parc le soir. Voyant passer un groupe de jeunes passablement éméchés, l’un des deux amis suggère qu’ils devraient profiter de l’occasion pour dérober leurs portefeuilles et téléphones, ce à quoi son acolyte acquiesce, ajoutant qu’il irait leur parler pour les divertir alors que l’autre en profiterait pour accomplir le dessein des deux comparses. Alors que le plan se déroule comme prévu, celui dont le rôle est de vider les poches des jeunes hommes assène un solide coup de poing à la tête de l’un des fêtards qui s’est rendu                                                                                                                

56 M. MANNING, A. MEWETT & P. SANKOFF, Criminal Law, 5e éd., Markham, LexisNexis Canada, 2015, p. 370. 57Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, R.T.N.U. vol. 2225, p. 209. 58 La tentative de commettre une infraction est prohibée par l’article 24 (1) C.cr.

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compte du subterfuge et les deux malfrats prennent ensuite la fuite avec leur butin. L’application de l’article 21(2) C.cr. aura pour effet non seulement d’emporter la condamnation des deux amis pour le vol, mais aussi de l’infraction de voies de fait, même pour celui n’ayant pas levé la main sur qui que ce soit, pour autant que l’infraction de voies de fait soit une conséquence prévisible projet de voler le groupe de jeunes. L’article 21(2) C.cr. rend, au surplus, potentiellement coupable celui qui ne sait même pas que l’infraction supplémentaire est survenue60. Voilà qui devance non seulement le stade des actes préparatoires, mais aussi la formation d’une intention criminelle en lien avec cette infraction supplémentaire.

De son côté, le droit français intègre aussi à son arsenal répressif des textes qui sanctionnent des actes préparatoires. Cette incrimination des regroupements de malfaiteurs est introduite au début du XIXe siècle en France. Dans sa forme actuelle, elle est prévue à l’article 450-1 du Code pénal. Elle se lit comme suit : « Constitue une association de malfaiteurs tout groupement formé ou entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, d'un ou plusieurs crimes ou d'un ou plusieurs délits punis d'au moins cinq ans d'emprisonnement. »61 Le délit de participation à une association de malfaiteurs62 réprime des actes préparatoires63, sous la forme d’une résolution collective d’agir, couplée à une résolution extériorisée par des faits matériels, la préparation64.

Le texte de l’article 450-1 C. pén. s’applique largement, il est « transversal » puisqu’il s’étend à toutes les infractions qui prévoient au moins 5 ans d’emprisonnement65. Cela traduit la sévérité du droit français à l’endroit des criminels regroupés. Le fait de projeter une seule infraction suffit. Il

                                                                                                               

60 Ibid., p. 169.

61 Le législateur français reprend d’ailleurs, dans plusieurs articles qui visent des formes « spéciales de

regroupement », la notion d’association de malfaiteurs. Il reprend alors la définition de l’association de malfaiteurs pour la faire appliquer à d’autres infractions, par exemple les crimes contre l’humanité (212-3 C pén.), l’eugénisme et le clônage reproductif (214-4 C. pén.), la fraude informatique (323-4 C. pén.) et, ce qui nous intéressera davantage, le terrorisme (421-2-1 C. pén.). Voir A. VITU, préc., note 35, par. 14 ; M.-L. RASSAT, préc., note 30, p. 1004.

62 Le législateur prévoit également la notion de « bande organisée » (article 132-71 C. pén.) qui prévoit que le sanction

est aggravée lorsque l’infraction est commise dans le cadre d’un groupe. Sa définition est la même que celle retenue pour l’association de malfaiteurs, la seule différence étant celle du résultat envisagé ou survenu (M.-L. RASSAT, préc., note 30, p. 998)

63 A. VITU, préc., note 35, par. 5 ; Michelle-Laure Rassat, préc., note 30, p. 996 ; Les actes qui constituent la

préparation pour constituer la notion d’association de malfaiteurs seront examinés infra, Titre I, chapitre 2, section 1.

64 A. VITU, ibid., par. 22 et 24.

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n’est pas nécessaire que les comparses aient eu le dessein de commettre un crime déterminé d’une façon précise66. Clairement, cette infraction vise à faire obstacle au projet criminel collectif.

En droit commun de la complicité, l’aide et l’assistance, si elles sont à titre préparatoire, ne sont pas sanctionnées tant que l’infraction n’est pas commise. Elles ne le seront que lorsqu’il y aura commencement d’exécution de l’infraction. Cependant, l’existence d’une entente, qui forme le délit d’association de malfaiteurs, fait en sorte que l’apport d’un individu sous la forme d’actes de complicité lors des actes préparatoires emporte sa condamnation pour association de malfaiteurs67. Il n’est cependant pas nécessaire pour être inculpé sous le chef d’association de malfaiteurs d’avoir participé à l’infraction sur laquelle le groupe s’est préalablement entendu, le cas échéant.68 Si, cependant, consommation de l’infraction il y a, cette dernière s’ajoute au délit d’association de malfaiteurs69.

C’est en matière de terrorisme, de façon tout à fait compréhensible, que le droit français montre le plus sa détermination à anticiper la commission des infractions. Comme prévu, nous n’allons nous intéresser au terrorisme que lorsque celui-ci peut nous éclairer en ce qu’il peut représenter, mais non exclusivement70, une forme de criminalité collective.

Il s’impose alors que tous les infractions et modes de responsabilité énumérés précédemment ont en commun la présence d’un groupe, que l’inculpé en fasse partie ou non. Cette notion de groupe permettra, nous le verrons, d’évacuer ou de diminuer le degré d’engagement dans le processus criminel en matière d’élément matériel et ainsi de s’approcher toujours plus de la sanction de la pensée criminelle, sans bien sûr y parvenir.

Pourtant, l’impunité accordée aux actes préparatoires en droit pénal classique se justifie normalement en raison du fait qu’il reste possible que l’infracteur n’aille pas jusqu’au bout et qu’il se désiste de son projet criminel. C’est l’espoir que l’individu se ravise et la confiance en                                                                                                                

66 Crim., 11 juin 1970, n° 70-90.400 et 29 octobre 1975, n° 75-91.596; V. R. MERLE et A. VITU, préc., note 2, p.

767.

67 En autant qu’il se soit fait complice en vue d’aider ou d’encourager l’association, par exemple fournir un endroit

pour les réunions de l’association ou aider la communication entre les membres. Si l’aide du complice est fournie pour aider la commission de l’infraction, comme pourvoir au matériel nécessaire à l’infraction, celui-ci perd sa qualification de complice et devient partie à l’association de malfaiteurs. Il sera donc susceptible, dans le cas où les faits consommant l’infraction prévue sont accomplis, non seulement de complicité dans l’infraction consommée, mais aussi de participation à une association de malfaiteurs.

68 A. VITU, préc., note 35, par. 33. 69 Ibid., par. 28.

70 Un délit spécifique d’entreprise terroriste individuelle existe depuis 2014 visant à appréhender les personnes

agissant seules, mais il est limité au domaine du terrorisme ; Cass crim, 10 janvier 2017, n° 16-84.596. V. aussi sur cette question qui a fait l’objet de controverses : D. GOETZ, « QPC : censure partielle et réserve d'interprétation pour le délit d'entreprise terroriste individuelle », Dalloz actualité, 19 avril 2017.

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l’autonomie de chaque personne de décider de ses actes qui sous-tendent les développements de la théorie de la tentative pour l’infracteur isolé. Toutefois, il en est autrement en ce qui concerne la criminalité collective. La présence du groupe fait qu’il est plus difficile de renoncer à son dessein. La chance pour le malfrat de se raviser est retirée ou les conditions d’ouverture fortement amenuisées par le regroupement71. Partant, la théorie de la tentative n’est pas applicable à celui qui s’associe dans le but de commettre une infraction. On assimile alors en quelque sorte la volonté de se regrouper comme l’égal de la perpétration pleinement consciente d’une infraction.

1.3 La théorie de la tentative : inapplicable à la criminalité de groupe

La théorie de la tentative est inadaptée à la criminalité collective72. La place de cet énoncé dans le propos qui nous occupe ici se justifie par l’analogie que l’on peut faire entre l’infraction de tentative et les infractions collectives. En effet, la sanction criminelle est principalement justifiée par le caractère moralement blâmable d’un acte. Pourtant, ni dans le premier ni dans le deuxième cas la consommation d’une infraction n’est nécessaire. Pour emporter condamnation, les actes commis n’ont pas à représenter la consommation d’une l’infraction donnée.

Le droit français fait fi de la notion de tentative et de son impunité des actes préparatoires consacrée à l’article 121-5 C. pén. lorsqu’il prévoit l’incrimination de l’association de malfaiteurs. La théorie de la tentative demande pourtant que la résolution criminelle soit « matérialisée par un commencement d’exécution – acte qui tend directement et immédiatement à la consommation de l’infraction – et non par de simples actes préparatoires. »73

La sanction vise donc à empêcher la commission de cet acte moralement blâmable puisque le législateur postule qu’il en résultera un préjudice ou un risque de préjudice74. L’infraction de tentative présente alors un autre trait s’apparentant à certaines infractions collectives : elle se comprend comme une théorie qui est tournée vers la prévention du préjudice,                                                                                                                

71 P. RAINVILLE et J. DESROSIERS, « Le particularisme juridique de la répression de la criminalité organisée au Canada

» dans Jean Pradel et Jacques Dallest (dir.) La criminalité organisée. Droit français, droit international et droit comparé, LexisNexis, 2012, p. 392-394.

72 C. DUPEYRON, préc., note 6, p. 357. 73 C. GIRAULT, préc., note 13, p. 715.

74 A. MANSON, « Re-codifying attempts, parties and abandoned intentions » (1989) 14 Queen’s Law Journal 85, à la

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en tenant compte du fait que « by definition, the harmful act has not occured. 75 » Ajoutons que la théorie de la tentative a en commun avec les infractions visant la criminalité de groupe, tel que la participation à une organisation criminelle, que l’élément matériel commis n’a pas à être un acte illégal en soi. Il est essentiellement illégal en raison de l’intention du malfrat d’aider la criminalité d’autrui76.

Tout comme le complot et la tentative, la participation à une activité d’une organisation criminelle est une infraction en soi alors qu’aucune infraction substantive n’a encore été commise, hormis celle prévue par l’article 467.11 C.cr. La répression s’effectue à un stade plus avancé encore pour l’infraction prévue à 467.11 C.cr. que pour celle de complot puisqu’aucune

infraction n’a nécessairement été envisagée77. Le processus infractionnel est ainsi chamboulé : il y a absence d’impunité des actes préparatoires78. Ainsi, un détective qui collige des informations, par exemple l’emploi du temps, l’adresse ou le lieu d’emploi d’une personne afin de remettre ces informations à une organisation criminelle qui voudrait éliminer cette personne pourrait être coupable alors même qu’il ignorait ce que le groupe projetait de faire avec les informations, puisqu’il a ainsi facilité la commission d’un crime par l’organisation. Il devra bien sûr savoir qu’il faisait affaire avec une organisation criminelle79. De même, celui qui tente de s’entendre pour former un complot, même sans succès, avec ses acolytes d’une organisation criminelle, a déjà consommé l’infraction de participation à un groupe criminel organisé. Il y aurait normalement impunité à ce stade du processus infractionnel, faute d’entente, n’eût été l’implication de l’organisation80.

L’intervention du droit criminel en matière de tentative découle principalement de l’intention coupable de l’infracteur et des efforts prodigués en vue de commettre l’acte prohibé81. Malgré cette apparence de similitude entre la tentative et certaines formes d’incrimination des actes préparatoires, il n’en reste pas moins que la théorie de la tentative est d’application difficile lorsque le raisonnement s’effectue sur le terrain de la répression des groupes dangereux. Nous l’avons souligné plus haut, les infractions visant la criminalité collective sont, pour l’essentiel,                                                                                                                

75 Ibid., p. 87.

76 P. RAINVILLE, préc., note 38, p. 916. 77 Article 467.11 (2) a), b), c) et d) C.cr.

78 P. RAINVILLE et J. DESROSIERS, préc., note 71, p. 395.

79 V. le développement sur l’exigence quant à la mens rea, infra titre II, chapitre 1, section 2.

80 La tentative de complot n’est pas un crime en droit criminel canadien, seule une entente peut faire naître le crime de

complot. Voir R. c. Déry, 2006 CSC 53, par. 2 et 47-50.

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volontairement placées en amont de la tentative sur le processus infractionnel. Les infractions réprimant une entente, en particulier, « altèrent la théorie de la tentative. »82 La raison en est que la théorie de la tentative nécessite tout de même l’accomplissement d’un certain acte matériel. Or, cela n’est pas suffisant pour lutter contre la criminalité future des groupes. C’est d’ailleurs ce qui a justifié les législateurs à adopter des infractions qui répriment l’association d’individus, ne pouvant attendre que ceux-ci se rendent à l’étape de commencement d’exécution de l’infraction projetée pour intervenir83. Cela fait par ailleurs germer la question de savoir si la théorie de la tentative est applicable à des infractions sanctionnant l’association, par exemple si l’on peut tenter de former un complot84. L’utilisation du crime de complot, en common law, a longtemps permis d’éviter de nommer le crime commis par les infracteurs85 et d’identifier l’acte constituant la tentative, donc d’éluder la question classique dans la théorie de la tentative, celle de savoir à quel moment sont dépassés les actes préparatoires et où s’entame le commencement d’exécution86. Il peut sembler paradoxal, si l’on perd de vue la justification de ces infractions préventives, que

some notion of proximity is required to convict an individual of the crime of attempt, but a far less meaningful act is insisted upon for a conspiracy of two or more persons. An individual who has not committed an attempt could be more dangerous to society than two persons who have agreed to commit the same type of offence at some future fate. […] The law of conspiracy clearly reflects the concern that the combination of two or more persons might be potentially very dangerous, thereby justifying a harsher attitude than with an individual.87

La dangerosité représentée par les groupes justifie alors que soit devancée la répression à un stade plus préliminaire que le commencement d’exécution et par le fait même d’abandonner la théorie de la tentative en ce qui a trait à la criminalité collective. La lutte à ces associations,                                                                                                                

82 C. DUPEYRON, préc., note 6, p. 366. 83 Idem.

84 Cette question sera développée infra Titre II, Chapitre 2, section 1.

85 Sayre, dont les propos sont repris par D. Stuart dans Canadian Criminal Law , 7e éd., Toronto, Carswell, 2014, à la

page 718, explique qu’au XIXe siècle, « [the] judges gave to it the widest use… It enabled judges to punish by criminal process such concerted conduct as seemed to them socially oppressive or undesirable, even though the actual deeds committed constituted of themselves no crime, either by statute or by common law. And in cases where the actual deeds were of doubtful criminality, it saved the judges from the often embarassing necessity of having to spell out the crime. »

86 D. STUART, ibid., p. 739 ; Crim. 8 nov. 1972 no 72-91.720 (Ruiz et autres) ; Crim. 3 mai 1974 no 73-92.289

(Ramel).

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