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Les exploitations agricoles en difficulté : un aspect de la
pauvreté en agriculture ?
Didier Aubert, Yves Léon, . Arf
To cite this version:
Didier Aubert, Yves Léon, . Arf. Les exploitations agricoles en difficulté : un aspect de la pauvreté en agriculture ?. 10e colloque de l’Association des Ruralistes Français ”La pauvreté dans le monde rural”, Association des Ruralistes Français (ARF). FRA., Nov 1984, Toulouse, France. 15 p. �hal-02327585�
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Xèure GOLLOQUE DE L'ARF-TouLousE 22-23 Novembre 19g4
''LA PAUVRETE DANS LE MONDE RURAL''
LES BTPI{)ITATIONS AGRTCOI.ES ET DIFFICUI.TT
IIN ASPECÎ I}E IÂ PAIIVREIE EN AGRICULTT'RE ?
Didier AUBËRT
-
yves LEONInstltut
National dela
Recherche Agronomique*INTRODUCTION
Le concept. de "pauvreté" ne
fait
paspartie
de ceux quenous avons
utilisés
couramment. dansles
recherches menées iusqutàprésent. Les travaux que nous réalisons depuis quelque ternps -sur
lranalyse des mécanismes de financement des explottallons agrico-les nous conduisent à mettre en évidence de
fortes
inégalité" duo"rragriculture,
inégalitésqui
sont au coeur du processus demoder-nisation du secteur.
Des dlsparités constatées dans
le
donainede
finance-menE,
il est
posslble de passerà
eelles qui exisÈent surle
plan des revenuset
dela
consommaÈlon. on peut nêmedlre
q,r" ro,r"àoro-mes confrontés en permanence
à la
questlon:
quelle incidence lesdisparités relevées dans lraccumulation du
capital
en agrlcult,ureont-elles sur
1avie
desfanilles
dragriculteurs? sril
existedes agrlculteurs dotés dtimportants uoyens de production
et
qulvivent
bien, il y
en a drautresqui,
dufait
des caractéristiquesde leurs exploitatlons, se
trouvent largement au-dessousde
la*Station drEconomle eE Soclologie Rurales,
35042 RENNES CEDEX
rf
J
d
2.
moyenne
en
matièrede
revenu,de
consommation,de
niveau devie
Quant onsait
queles
agrlculteurs sont, globalement, malplacés dans une comparaison avec
les
autres catégories de nénages sur beaucoup de cespoints,
on peut sfinterroger eneffet
sur lesort
de ceux dfentre euxqul se
trouvent dansles
groupes les molns blenlotis.
En examinant de façon préciseleur
siÈuatlon, nesera-t-on pas amené à parler de "pauvreté" ?
Lrétude rigoureuse des
petits
agriculteursa
déjà étéfaite et elle a
permis de préciserles
grandstraits
des groupesoù se recrutent les agriculteurs
quelron peut qualifier
de"PAuVres".
Mals
à
côté decette
pauvreté, déjà analysée,Ia
crise des revenus agricolesa
révéIé lfexistence drautres situationsprécaires en
agriculture, qui ont été
jusqurà présent peu étu-diées.Lrobjectif
de notre communicatlon sera drapporter desprê-cisions sur
cert,ainsde
cesexploitants, les
"agriculteurs endifficulté",
dontla
situationfait ltobjet
de nombreuseslnterro-gations dans
le
monde agricole.Not,re investigatlon sera linitée â la dinenslon
éconoul-que du problène. Plus précisénenÈ, il sera question des
diffi-cultés financières des agriculteurs concernés ; nous montrerons en
quoi lranalyse de ces difflcultês peut contribuer à une neilleure
appréhension du phénonène de la pauvreté en agriculture. Nous ten-Eerons donc de préciser si ces probrènes relèvent de
nanifesta-tions déjà étudlées de la pauvreté ou sl de nouveaux types de
pau-vreté sont apparus dans lragriculture. 11 conviendrait alors dren
préciser les contours.
Notre contribution comprendra deux parties : on metÈra
drabord en relation apparitlon des difficultés financières de
cer-tains agriculteurs et évolution du secteur, ensuite on détaillera
3
I-
ACCUI{ULIIJTION DII C,APITAL DANS LTAGRICT'LflNE ET DIFFICT'LTBSFINANCIBBBS
cette
discussion nous semble devoirêtre
menée en nousréférant à 1révolution globale du secteur agricole. ceci permettra
de comprendre 1es situations individuelles des agriculteurs en les replaçanE dans
le
mouvement de modernisaËion intense quele
sec-teur a connu depuls une trenÈalne dtannées.
Dans un premier temps, on interprètera les mécanismes de
sélection et de relégation des agriculteurs en centrant lranalyse
sur le processus de capitalisatlon à lroeuvre dans lragriculture.
Dans une seconde partle, nous montrerons comment la crlse des revenus agricoles met en péril lrexistence de groupes
drexploita-tlons dont lraveni.r senbLait a priorl assuré, et quL, par sulte de
difficultés financlères se trouvent, elles aussi, engagées sur la
voie de la narginalisation, voire de lrélininat,ion.
Iu1ais avant de développer ces thèmes,
ter les principaux problèmes méthodologiques
recherche.
nous devons
présen-soulevés
par
ceËtet*
A- Quelques considératlons nêthodologiques
Les auteurs qui ont essayé de
définir la
"pauvreté" danslragriculture ont
rencontré des problènes dfordre théorique et néthodologique que nous ne discuterons pasicl (1). par
"orrtr"
nous évoquerons deux questl-ons
qui
jouentun rôle central
dans lranalyse de 1a situation flnancière des exploitations.Tout drabord,
le statut
mêue drentreprise individuelle delrexploitation
conduità
desliens étrolts entre lrunité
deproduction
et le
mênage.Ltinbrication est
particulièrement fortesur
le
plan financier:
revenus agrlcoleset
non-agrlcores sefon-dent souvent dans une caisse coûrnune,
gui sert
aussi bienà
lfex-ploitatlon
qutàla fanille ; le capital
accumuléest
autant unoutll de
Eravail qurun patrimoine.crest dire
que des analysesportant
sur la
formatlonet ltutilisation
des revenus ousur
larentablllté
oula
solvablllËé deltentreprise
seront délicates àmener.
cette
questlon théorique posée,il serait
souhaitable dedisposer
de
conptabilitéslntégrant
nénageet exploitation.
cenfest
pas posslblele
plus souvent,et le
manque de donnéescon-cernant
le
mênage conduit en général à centrer lranalyse surt
4
Un problène plus spécifique à notre
travail
est 11é â ladéfinitlon
des"difflcultés
financières". Leur appréciation estparticulièrement malaisée en agriculture eÈ pratiquement on est
parti
drune approche ernpirique pourles définir. crest ainsi
quele
Ministère deItAgriculture,
en lançant une mesure dtai-de aux"agriculteurs en
difflculté" définissait
ses bénéfi-cialrespoten-tiels
conure ceuxqui
"connaissaient desdifflcultés
dont 1'acult.é menaçaiËà court
termela survie de leur
exploiËatlon,,(Z).Dans
le
contexte dela clrculaire ministérielle, il
apparaissait quela
mesure stadressait surtout aux agriculteurstrès
endettés.Les
problènesde
revenu que pouvaient connaitre cesagriculteurs étaient donc
a priori
re116s à un endettementexces-sif. I1 nrétait
pas question explicitement de ceux{ui, tout
enétant peu ou pas endeËtés, pouvaient avolr du mal
à falre
face àIeurs êchéances,
sl
modestes soient-elles (3).CetÈe anbiguité a subsisté pendant toute la durée
drapplication de la mesure, cat une partie non négligeabre des
candidats à lraise sresÈ révélée appartenir à cette dernière
caÈé-gorie drexploltants peu endettés.
Ceci nrest pas indifférent â notre propos dfaujourd'huL.
En effet nous faisons lrhypothèse que les difficulËés flnancières
menacent la survi.e de lrexploitation (et du nénage) à partir du moment où elles conduisent à une réduction drastique de la
conson-mation privée ou à la liquldation de lroutil de travail.
Cet.te discussion nous ramène donc au coeur de lranalyse
de 1a pauvreté en
agriculture, car les
"pauvres" dans ce secEeurne
sont-lls
pas justement ceuxgul, stils
consommaient"normale-ment", mettraient en
péril
leurs moyens drexistence. Lesagricul-teurs à
faibles
revenus, candidats àlfaide
nefont-ils
pas partiede
ceÈte classe dtagriculteurs pauvres,arrivés pour
diversesraisons "au bout du rouleau" ?
B- Capitalisation
et
marginalisation des exploitationsLe processus de transformatlon des structures drexploi-tations agricoles auquel nous asslstons depuls la fin de la
deuxiène guerre nondiale a êtê abondamment analysé et nous nty
5
drlnsLster
sur le rôle
que jouentles
nécanismes de flnancement dansle
rnaintienvoire
lraccroissementdes disparltés
entreexploitations.
Lrévolution du secteur est. marquée par son déclin
rela-tif
au seln de 1téconomLe nat.lonale, nalgré une crolssance élev6ede
la
producÈlon, avec deux caractêristiques majeurs :-
une dirninutlon rapide dela
force detravail
employée,-
unfort
mouvement draccumulation ducapltal
drexploi-tation.
11 en
est
résulté une augmentation constante ducoeffi-cient de
capital et
dela
produetivlté dutravail agrlcole.
cetteévoluÈlon
stest faite
surla
base de disparités import.antes entreunités de production
;
e1le srest traduite par une rest,ructuration du secteuret la
disparition drun grand nombre drexploitations.Un élérnent
central du
processus nous sernbleêtre
lanécessité de
la capitalisation
impos6eà
tousles
agriculteurs.crest lraccès différencié aux sources de financement
-
interne par1répargne
nette
delrentreprlse, et
externepar
lrendettementqul
Joue unrôle
déterminant dansle
devenir des exploiËations, etagit
sur leur mouvement de concentratlon (4).Ce processus de
capitalisation
condamnecelles qui
sontau-dessous drun certain
seuil à
se retrouver en posltion de plusen plus difftcile
(5). 11 se constltue ainsi des
groupesdrexploltations dont
le
simple maintien de Itappareil productif nepeut se
faire
qutauprix
de renonclaÈions lmportant.es surle
plandu revenu
et
du niveau devie.
ces groupes ne sont pas stablespulsque
le seuil
desurvie se
déplace continuellementvers
1ehaut. ctest
parml eux quese
recrut.entles exploitations
quidlsparalssent. Leur éLinination se
fait
g6néralenent au moment dela
successlon. Elles sont depetite taille,
peu ou pas moderniséeset
mal insérées dans lescircuits
dféchange.Pour les agriculteurs qui se maintiennent, tout en étant en-dessous de ces seuils, 1réquilibre est précaire : leur
exploi-tation, de tail1e insuffisante, mal adaptée aux conditions
actuel-les de production en agriculture, ne leur procure que des revenus
falbles et un niveau de vie médiocre (6). Même en ayant
comprim6 Leurs dépenses au maximum, ils sont à la mercl du moLndre
6
financières", mais cette expression cadre maL avec
la
permanencedtune situatLon
difficlle qul, elle,
se r6fère probablementà
unétat de pauvreté.
C- La crlse des revenus
Les transformations que
lron vient
dedécrlre se
sontproduites
à la
faveur drune crolssance ininterrompue du secteuragrlcole. Depuis I974, au
contraire, la
crlse mondialea
provoquéune baisse
-
en francs constants-
du revenu moyen parexploita-tlon.
Ces nouvel-les condiEions de production,plus
rl_goureuses,déterninent des modalités
dlfférentes de
différenciaÈionet
desélection des unités du secteur.
TouË drabord
Ia
rentablHté dela
pluparÈ desexploiËa-tlons
baisse, quel1e quesoit leur taille
ouleur
orientation. Cette évolution a pour conséquence de rendre encore plus précaireIa situation
des agrlculteurs "pauvres"définls ci-dessus.
Cer-tains
drentre eux ntarrivent même plusà
assurerleur
couverturesociale.
Pour
les
autres, mieux dotés en moyens de production,les
conséquences dela crise
sont diverses selonltinsertion
deleur
exploitation dansle
processusdtintensificatlon et
despé-clalisation.
Les exploitationsqul
avalent pu bénéficier de moyenspropres
suffisants,
de bonnes conditionsde
financementet
quiavaient
sur
grâceà
leurs ressources humalnes, entirer le
part,ivoulu, bien qufaffectées par
la crise,
arrivent ày faire
face.Par contre, les exploltations qui se trouvaient dans une
situation
techniquenentou
financièrementfragile ont
étédéstabilisées par
les
nouveLles conditions de productionqui
leurêtalent lmposêes. Les contrecoups de cette sltuation nouvelle se
traduisent dans un premier temps par des
difficultés
de revenu etde trésorerle. E1les peuvent
aller
ensuite jusquràlfimpossibilité
de maint.enir
la
capaclté productlve de Lrexpl-oitationet
au bouÈdu processus jusqurà son
élinination.
Lacrise fait
donc entrercertaines exploitations
dansune
phaseoù leur survie
est menacée.De nouveaux groupes drexploitants se rapprochent ainsi de ceux que
lron
pouvait classiquement considérer comme menacés âplus ou moins longue échéance. Mais
ils
en sont bien dlfférents,car cette
caEégoriepeut
rassemblerdes exploitations, à
des degrÉsdivers
de développement. 0n peuty
retrouver des jeunesI
7.
venant de
sfinstaller,
des exploltants en reconversion, desagri-culteurs
ayanÈ connudes
problèmesparticuliers (difficultés
technlques, surendettement, maladies, épizooties). Les contraintes
propres à certalnes orientatlons de production comme celles
indul-tes
par uneintensification très
poussée ne doivenL pas non plusêtre
sous-estlm6es.cette
énumération nous amèneà
postuler unehétérogénélté probable de
cette
catégorie, dontle
dénoninateur comnunpourrait être constitué par une
dlnenslon économique au-dessus dela
moyenneet
un engagement plus ou moins marqué vers1 | intensificatlon.
rr-
CaRASTERTSTIQIIBS DES AGRTCITLTBIIRS EI{ DTFFICIILIE ArDESA- Déftnirion de 1a population éÈudiée
L'analyse porÈe sur une population précise
:
lesbénéfi-ciaires
delfaide
excepÈionnelle aux agriculteurs endifficulté
(clrculaires ninistérielles des 3.IX et 4.XII.1981 er
du10.rr.L982) (7).
1- Les
critères
de sélectlon 0nanaissant des d
survie de leur
jugé posslble"
vu que cette mesure
visait
"Les agriculteurscon-ifficultés
dontltacuité
menaçaitâ court
terme laexploitation"...
"mais dontle
redressementétait
La
définition
des agriculÈeurs concernés dans lescircu-laires ministérielles restait
ouverte.Cfest,
dansla
pratique,les
commLssions départernentales d ragrément des plans deredresse-ment
(B) qui lront
concrétisée. Les caractéristlques desbéné-ficiaires
dépendent donc de lfappréciatlon portée parles
parÈiesprenantes
sur la situatlon
des denandeurs deltaide et
aussi dessolutions qurelles avaLent mlses en place face aux problèmes
I
8.
Deux points dolvent être relevés : exploltatlons dont
la
survieétait
nenac6eLe constat drun
état
se rapprochant dela
cessatlon depalement, notion
qui
nfest pas jurldiquernent applicable enagri-culture, est
particuLièrementdéllcat.
on a donc souventprivl1é-g1é
le
niveau absolu de ces dettes sans pouvoir touJours apprécier pr6cisémentleur
caracÈère anormal.perspectives d I assainissement
Les textes ne définissalent pas de
critères
permettantdrapprécier
les
perspectlves deviabilité et
de redressement desexploltatlons. Le
jugementsur les
perspectivesde
redressementrestaLt nécessairement assez formel
et
reposait sur de nombreuseshypothèses.
2-
Les agrlculteursculté aid6s
et les
autres agriculteurs endiffi-on
doit
stinterroger surla
représentativité desbénéfi-cialres
par rapport aIa
population concernée parles difficultés.
Eneffet,
dans plusieurs phases dela
proc6dure, plusleurs groupesassez importants sont apparus comme étant en
difficulté.
Par exernple :
.la
prenlèrepartle
dela
procédure correspondaità
unephase de "repérage" destlnée à mesurer
les
besoins draide.Elle
aêtê
réallséesur la
base decritères
relatlvement sommaires quilimltent les
conclusionsque 1'on peut en tirer,
maisuit"
indiquait que des groupes plus larges que les bénéfieiaires finals
rencontraient des
difficultés
(envlron 40 000 exploitants).. urr ruillier dtexploltants ont été jug6s comme non
redressables au terme de la procédure.
Enfin depuis L982, daÈe de clôture des
listes
dedeman-deurs, dtauLres groupes ont pu rencontrer des
difficultés
ou voir9
On peut donc en conclure que la
constitue qurune partie des exploitat,ions
cultés pour assurer leur survle (9).
population
rencontrant étudiée des diffi-ne
B- La diverslté des agrLcuLteurs en difficulté
1- sltuation par rapport à lrensemble des agriculteurs
Globalement les agriculteurs en difflculté représentent
2 % de lrensemble des exploitants à temps plein.
Par la superficier la dimension économique potentielle
comme par le chiffre dtaffaire, J-eurs exploitatl_ons sont de taille
supérieure à la moyenne des exploitations à tenps plein. Les chefs
drexploitation sont beaucoup plus Jeunes : ceux de rnolns de 35 ans
constltuent le tiers des agriculteurs en difficulté contre 15 y"
seulement des expLoitants à temps plein. Les orientations vers les
productlons animales et notamment les spéculat,ions Lntenslves sont
surreprésentées par rapport à la population de référencer âu détrlment des systèmes végétaux.
Les bén6flcialres des politiques dfaide à
lrinstallatlon
et à la
modernisation dansla
populatlon étudiée sont fortementreprésentés
, r/3
des agriculteurs endlfflculté
ont bén6ficié deItune au molns de ces aides. ceci correspond, par rapport
à
lren-senble des bénéflciaires de
la
DJA à 6 % desattributaires et
pour1es Plans de Développement à Lo "/. des
titulaires
de plansces élénents globaux ne dolvent pas cacher Irexistence
de
fortes
disparitésà f int6rieur
dela
population pour chacun des critèrespris
en compte, comme onle
verra plusloin.
signalons
ici
qurun é16nent important de ces disparitéstient
aux diff6rences dans Lfappllcation dela
procédure suivant1es départernents. selon
lfattltude
de Itenvironnement économiqueet
soclo-professionnel, selonles
typesde
productionset
les problèmesqurelles
posaient,les
populations retenues pouvaientvarler
sensiblement(par
exemple:
pourcentageplus
élevé deJeunes AgriculËeurs,
de petits exploitants ou au
conÈraire, dfexploitants
modernisés,focalisalion sur les
productionsI
_!
2-
Typologle des agrlculteurs. endlfflculté
Au-delà des caractéristiques globales
il
faut maintenantpréciser les groupes en présence. Dans 1rétat actuel de notre
tra-vail
on peut dlstlnguer plusieurs Èypesparnl les
exploitatlonsêtudlÉes.
rls
ne permettent pas de classer tous 1es casdifficiles
mals
ils
constituent des r6férencesqui
se dégagent asseznette-ment
et
regroupent un peu plus dela noiti€
des cas,le
reste desexplolcations se plaçant dans des situations intermédiaires.
Les
trois
grands t,ypes que nous mettons en évidencecor-respondent
à
des problèmesdifférents et
vralsemblablementà
desperspectives de redressement égalenent différenLes.
1- Pour une
partie
des exproitations(A), les
difficul-tés
senblentsurtout liées à
une peÈite dimension(tatlle
infé-rieure àI
000 ucE ou 20 ehb) (environ 20 % des exploitations).ces agriculteurs obtlennent des
r6sultats
technlques etéconomiques
faibles, à la
mesurede leurs
moyens de proàuctionmodestes
et
peuproductifs.
Leur16sultat
disponible moyen estvolsln de zêro. Leur âge rnoyen ne
les
diffêrencie pastrès
nette-ment des autres groupes. Leur endettement nrest pas très élevé parrapport aux autres agriculteurs en
difflculté
rnaisi1 lrest
parrapport
à leur
tai1Leêt,
pour autant quton puisse enjuger,
encomparalson avec des populatlons de référence,
10.
représentent
fait
de leurOn peut considérer que ces exploitations
des groupes plus larges, égalernent en
difflculté
du dimension mais non touchés parla
procédure.2-
Parrniles
exploitations deplus
grandetallle
deuxtypes drexploitaÈions peuvent être individualisés.
-
un prenier groupe (B) (r0-r5z
des exploitations) com-prend des agrlculteurs dont lesdifftcultés
ne sernblent pasremet-tre
en cause 1aviabilité
à terme deleur
unité de producÈion. r1sdisposent drun
outil
detravall
detaille
relativàment importantet
assez producElf.Leur endettemenÈ
à
longet
moyen terme neparait
pasexcesslf
et
ces exploltants obÈlennent des 16sultats économiquesassez élevés
par
rapporE aux autres agriculteurs endifficulté.
Leur problème senble
surtout
provenir drun endet.tementà
courtterme
très
éIevéet
de déséquilibres de tr6soreriequi
devraient11.
-
Le second groupe (C)(lS
"/. des exploitations) ressem_ble au
préc6dentpar la
dlrnension éconourique moyennede
sesexploitatlons, en
revanchetl
s ten distlngue sur
plusieurspoints.
Les niveaux de performances techniques sont
significa-tivement pLus faibles. Ltâge moyen assez bas indique un fort
pour-centage drlnstallatlons récentes. Lrendettement à long et moyen
terne est également beaucoup plus important.. ce groupe cumule 1es
indicateurs de difflcultés retenus : revenu disponlble très bas,
solvabillté compromlse, sltuation nette plus fréquemment
néga-tive.
Leurs revenus disponibles sont forÈement négatifs.
Lrexploitatlon ne dégage donc pas de quoi assurer des prélèverents
prlvés. Lréquilibre du fonctionnement nonétaire de lrensemble
exploitation-ménage est assuré par des ressources extérieures, des revenus de Èransfert ou ull accroissement du crédit à court terme quand il est encore posslble. r1 est vraisernblable que dans un pourcentage élevé de cas les perspectives de redressement de ces
exploltations sont linltées.
C- Les causes des dlfficultés
Lranalyse des causes de
difficultés,
détermlnante pourla
connaissance du problèrne, est délicate àréaliser.
on nedispo-se pratiguement que des données comptables des exploitations sur
un seul exercice,
alors
quela
recherche des causes implique deconnaltre égalenent des éléments
qualitatifs et
sur une pluslon-gue période.
Malgré cela
les
élénents rassenbl_ésfont
apparaitreplu-sieurs résultats.
Lrendettement à court terme qul
sert
en quelque sorte decrl-tère de
déflnltion
des agriculteurs endifflculÈé est
systéma-tiquement
très
é1evé dansnotre
population.r1
correspondà
unpalliatif
aux problèmes de revenuet de trêsorerie (c'est
déjàplus un
effet
qurune cause) naisi1
peut aussiêtre lié
à despro-blèrnes de financement des
actlfs
clrculants, mal réalisés dufait
de
lrexploitant
ou de son envlronnement commercl-al ou bancalre.Les
différences discrininantesà f intérieur de
lapopulation correspondent à des problèmes
liés
àla
productlonet
àt.
L2.
Les problèmes proviennent tout drabord drun déséquilibre
au niveau du processus de productlon.
A
productlon compaiable àcelle
drune population térnoin (RrcA),les
charges engagées sontplus lnportantes pour 1es agriculteurs en
difficulté.
ceciest
dtà
pl-usieurs causes:
insuffisance des performances technlques,difficulté
de maltriserles
systèmes de productlon ml"s enpi""",
charges
structurelles
(amortlssements,frals flnancier"...j
trop éIevées par rapport â ce que lrexploitation peut assumer. cespro-blènes se retrouvent
à
tousles
nlveaux de dimension éconorniquemais
ils ne
conduisent pas aux mêmes l-nterrogationsselon
ladimension de
lrexploltation et le falt
qurelle sesoit
engagée ounon dans 1a modernisation. Dans
le
premier cas, ce qui est encau-scr crest
la
capacité deI'exploitant et
delrexploitation
àassu-mer
les
orientatLons prises, ou lradéquation du type dedéveloppe-ment lui-même aux structures en question (groupes B
et c
de notretypologie), dans
le
second cascrest ra viabilité
delrexploita-tion
quell-e quesoit
lfhypothèse de fonctionnement retenue (groupeA).
Ltendettement
à long et
moyen termenrest élevé
que pour certalns groupes dela
population des agrieulteurs endiffi-culté :
des petites exploitations qui rnalgréleur faible
dimensionont pu s'endetter forÈement, trop
senble-t-il
par rapport à ce quepermettaient leurs moyens de production (groupe
A),
desexploiia-tlons
de plus grande dimenslonqui
ne peuventfaire
faceà
leurs remboursements:
financemenÈsdrinstallatLon, de
modernisationprésentant dès
le
début un caractèreles
rapprochant dropérationsde consolidation, achats de foncler dans querques cas (gràupe c).
Les difficultés
rencontrées amènentà accroftre
lerecours
à
ltendettementà
court. terme pour essayer derégler
lesproblènes de revenu
et
detrésorerie.
Maisles
exploitaiions nepourront pas toutes
faire
face aux contralntes nouvelles crééespar
lfaccroissemenËde ces
flnancements. selonleur taux,
les charges de remboursement gufelles ont déjâ parailleurs, les
êvo-lutions
structurell-es réalis6es (pslt, DJA, en phase de croissance)el-les seront à nêne de dépasser ou non cette phase
qui
detenpo-raire
pourra, en cas dedifftcult6,
débouchersur un
processuscumulatif de décapitalisation
et à
terme,drarrêt
delractivité
I
,; '
13.
cor{cl,ûsrotr
Dans lragriculture, la pauvreté semble largernent liée à
la faible dimension économique de ltoutl"l de production.
ce facteur paralt déterminant dans Irexpll-cation des
processus de margLnallsatlon, volre drélinlnation de certains
agriculteurs. Lrétude des difflcultés financlères conflrme cette
thèse, mals elle montre aussi quton assiste actuellement à
lrappa-rltion - ou au déve1-oppement - dfautres mécanismes de
différencia-tlon des exploltations agricoles, dont pâtissent des unltés de
taille importante.
Pour certaines dtentre elles, les difficultés sont
passagères et découlent de la combinaison drune conjoncture
êcono-nique défavorable et drune situation individuelle temporalrement
fragile. Elles présentent de bonnes perspectives de redressement.
Pour drautres, au contraLre, qui constituent des groupes
non négligeables (sans doute plusieurs
milllers
dfexploitations),il stagit très
probablement dela
mise en place d'un processus de"paupérlsation", dans lequel bas revenus
et
déséquilibres finan-ciers serelaient
sur fond de résultats techniquesfalbles
eÈris-quent de mener
à
1télirulnation. Les agriculteurs concernésdispo-salent dtun
patrinoine personnel,leur "faillite"
le réduit
ànéant
; ils êtaient
producteurs indépendants,ils
se retrouventsans ernplol.
si la
pauvretéest
le'manque detout",
Itexclusionde ces agriculteurs de
la
sphère dela
production, va sans douÈeles conduire à un
état
quiy
ressemble.Cette concluslon,
plutôt
pessimiste, nous suggère deuxquestions:1tune,
relativementcirconscrite, a trait à la
vali-dité
des plans de redressement mis en place pourles
agriculteursaidés, lrautre est
plusgénérale: elle
nous lnterrogesur
lesperspectives drévolution du phénomène que nous avons décrit.
En ce qui
concerneles "plans de
redressement.',il
paralt à peu près assuré qur1ls auront peu dreffeÈ sur
les
agricu-lteurs
auxdifficultés les plus
graves: le faible
montant delraide
consentie handicapait ces plans, une absence de véritableI
t I
I
Sur
lrautre
point,rla
duréepenser
à
une cert.aine permanence des14.
de
Ia crise
nousincite
àconditions dfapparltion des
â une pérennlsat.ion du
pro-difflculrés
bl-èrne.
flnanclères
et
par suite,Existe-t-il
des moyens permettant deliniter
lr6mergencedes "cas
difftciles"
? La politique à mener senble passerp"i
.rrr" plus grande rigueur dansltattribution
parles
dLvers agents dusecteur : cr6dit agricole,
coop6ratives,adninlstration,
des"droits" à
produlre eEà se
développer que constituent prêts,avances
et
aLdes de toutes sortes.Elle nrirait
pas sans contra_dictions.
Eneffet, on lirnlterait
probablementles
risques dedérapage pour
les
agrlculteurs à royens de production lmportants, maLs, en même temps onrlsquerait
degonfler,
par relèvement desseuils, les
groupes dragrlculteurs envole
de marginalisatlon et touchés parla
pauvretê "traditionnelle'..r1 faut
se demander par conséquentsi le
dépassement deeette contradlction ne pourrait pas
être
obtenu par une politiquetotalement nouvelle pernettant
un autre
styl_ede
déveioppenentagricole,
danslequel
lraccumulationdu capital
seral_t moinsintense,
et
mieux malt,risée indlviduellementet
collectivement.*
.T
,i
,
{l
15.
(1
) voir en particulier les travaux de G.
JEGouzo erJ.L.
BRANGEONet
noramment :G.
JEGOUZOer J.L.
BRANGEON"La
condirionsociale
despetits
paysans" INSEE, Itonnées socLales,6dition
1979, pp. 383-400.G.
JEGOUZO "PetiËe paysannerie en France"- A
paraitre1984.
(2) Clrculaire du 3 septembre 1981
(3) Même si le premier paragraphe du texte ci-dessus faisait
allusion à : lraccrol-ssement des disparit.és de revenus
qui se traduit pour une partle des exploitations par des
situat.ions de plus en plus précaires,,.
(4) Voir travaux de divers auteurs (BUTAULT, MINELLI )
ce qui concerne ceux auxquels nous avons partlcipé
agriculteurs et le crédit" Cahl.ers drEconomLe
SocLol-ogLe Rurales, noI, juin, 1984.
(s)
Voir
notammentJ.P.
BUTAULT "Revenu, Consommation,des fanilles agrieoles".
EcononLeRurale,
n"153,Fév.
1983 ;et
CahLersde
1tIREP,no 2 z "La
cri-se pouragricultures" novembre 1981
et
no5 :
"AgriculÈure en questlon" septembre 1983.eL et pour "Les de Epargne janv. ,r quelles (6) (7)
G. JEGOUZO "Petite paysannerie en France" op.
cit.
Lréchanttllon comprend près
de
r300 des 16000 b6néficiairesde
la
procédure. Ces exploitations proviennent de 11 dépar-tements choisls pour représenter 1es principalesorienta-tlons de productlon. Dans B d6partements on a pu prendre la
totalité
des agrlculteurs aldés(n inférieur à
200). Dans1es autres cas on a retenu au minimum
I
cas surtrois.
(8)
regroupant adrninistration,créanciers,
banques,représen-tants de
la
profession.(9)
"Pourle seul
départementd'Ille-et-Vilaine, la
banquever-te
estimeà
400le
nombre de dossiers "non redressables" soumis au service du contentieuxet à
200 ceux passiblesdrune procédure
judlcialre.
Ceci sans compter 1es 600dos-sLers (Cresson)
qui ont fait I'objet
drun plan de redres-sement. Parmi cesderniers, le Crédlt
Agricolea
précis6qutenviron
la moitié se trouvait
dansltimpossibilité
depayer leurs dettes". Ouest-France, 3-4 novembre 1984.
j
I