L'INTERDISCIPLINARITÉ
OU "DU BON USAGE DES SPÉCIALISTES"
Gérard FOUREZ Université de Namur
MOTS.CLÉS : INTERDISCIPLINARITÉ - SPÉCIALISTES - ILOT DE RATIONALITÉ-CONSULTATION
RÉSUMÉ: On examine les conditions épistémologiques et méthodologiques d'une démarche interdisciplinaire rigoureuse et on montre comment un îlot interdisciplinaire de rationalité se négocie dans un contexte donné, selon un projet spécifique, et par rapport à des destinataires et une production. On propose des étapes pratiques pour cette démarche, qui est basée sur la consultation de spécialistes. L'atelier est centré sur l'examen de la pratique de l'interdisciplinarité, pour qu'elle soit maîtrisée par les maîtres avant qu'ils ne se risquentàl'enseigner dans le contexte de leur classe.
SUMMARY : Epistemological and methodological conditions of a rigorous interdisciplinary endeavor are examined so as to "negociate" an interdisciplinary "island of rationality" in a given context, according to a spécific project, in relation to addressees and to a determined production. Practical steps for such an approach are presented with sorne emphasis on the consultation of specialists. The workshop is aiming at helping teachers to master interdisciplinary practices before they venture to teach them in the classroom.
1. AVERTISSEMENT
Ces pages n'ont pas comme objectif de présenter directement et explicitement une méthode pédagogique pour faire du travail interdisciplinaire, mais de proposer une représentation de ce que peuvent être des pratiques interdisciplinaires l . Elles se situent donc plutôt à un niveau épistémologique, antérieur au travail pédagogique. De même qu'avant d'enseigner la chimie, il est important de la connaître, ainsi, avant d'enseigner aux élèves des démarches interdisciplinaires, il importe que leurs enseignants comprennent en quoi elles consistent et sachent les pratiquer pour eux-mêmes, indépendamment de tout projet pédagogique2.
2. REMARQUES MÉTHODOLOGIQUES ET ÉPISTÉMOLOGIQUES 2.1 Une société où la diversité des approches disciplinaires est un fait
Nous vivons dans une société où la multiplicité des disciplines et des spécialités est un fait. Dès qu'il faut résoudre une question concrète, ni une compréhension globale, ni une approche unidisciplinaire ne suffit: il faut faire intervenir une multiplicité de savoirs spécialisés venant de plusieurs horizons. Qu'il s'agisse de l'acquisition ou de l'isolation d'une maison du choix d'une manière de s'alimenter, de l'achat d'une voiture, d'une réflexion sur l'origine de l'humanité, de l'adoption d'une politique à suivre vis-à-vis de la drogue, aucune discipline ne permet seule d'éclairer adéquatement ces pratiques. De plus, l'usage de la plupart des technologies implique aussi de "gérer" une pluralité de savoirs spécialisés (Layton, 1993). Pour pouvoir communiquer au sujet de nos histoires humaines, pour pouvoir "négocier,,3 entre nous et avec les choses, pour pouvoir décider rationnellement, nous ne pouvons rester cantonnés dans des savoirs disciplinaires parcellisés (Morgan, 1993).
L'interdisciplinarité n'est donc pas un luxe dans notre société: elle devient nécessaire du fait que, d'une part, les approches globales et indifférenciés des "amateurs" sont trop courtes face à la complexité du réel, et que, d'autre part, les disciplines scientifiques ont été créées et qu'elles obéissent à leurs logiques propres, lesquelles ne sont pas celles qui rendent compte des situations concrètes. En d'autres mots, la mise en oeuvre "rationnelle" de pratiques concrètes exige qu'on reconnaisse /' existence de spécialistes et qu'on sache comment les consulter. Autrement dit encore, pour que les savoirs disciplinaires aient un sens - c'est-à-dire, qu'ils puissent être utilisés dans le
IOn trouvera une bonne panie des sujets évoqués ici dans mon ouvrage Alphabétisation Scientifique et Technique. Essai sur les finalités de l'enseignement scientifique. Les aspects plus épistémologiques sont traités dans La construction. des sciences. Au sujet de l'interdisciplinarité. voir aussi: O.E.e.D., Séminaire sur la pluridisciplinarité. Mayor F. & Portella, Emre savoirs: l'interdisciplinarité en acte, Stengers I.&al., D'une science à l'autre. des concepts nomades. Cette communication a été préparée en collaboration avec la C.I.TA., laquelle est soutenue par les Services de la Programmation et de la Politique Scientifique (S.P.P.S.) de Belgique dans le cadre de la Convention nO 32 des "Pôles d'Attraction Interuniversitaires".
2Lors de sessions, j'ai pu constater l'obstacle que peut souvent consister l'intérêt pédagogique lors d'une formation à l'interdisciplinarité.Lesparticipants veulent trop fréquemment passer de suiteàl'application pédagogique, avant d'avoir saisi les spécificités de démarche qui, une fois comprise, pourront être enseignées.
3Au sujet de ces négociations, cf.: Latour B. : The impact if Science Studies on Political Philosophy, Science, Technology & Human Values. 1991, vol. 16, nOl, 3-9.
"réel" et pas seulement dans un laboratoire - il est nécessaire de pouvoir les insérer dans des pratiques interdisciplinaires.
C'est pourquoi il semble essentiel de former les populations aux pratiques de l'interdisciplinarité. Cela ne résoud pas la question de savoir quelle forme d'interdisciplinarité doit être entreprise à différents moments de la formation des jeunes, mais cela signifie, en tous cas, que les formateurs devraient pouvoir se retrouver dans de telles pratiques.
2.2 Une variété d'approches multidisciplinaires
Ilya de nombreuses façons de croiser des savoirs disciplinaires. Malheureusement, celles qui sont le plus souvent adoptées se caractérisent par leur caractère flou, qui déroute facilement les élèves et qui conduit des concepteurs de curricula à s'en méfier. De plus, beaucoup confondent "interdisciplinarité" avec des approches globales ou indifférenciées qui ne font guère place aux apports de spécialistes (ces méthodes, comme celle de la pédagogie du projet, peuvent être très valables dans certains contextes sans pour cela être interdisciplinaires). Dans le cadre de cet atelier, j'appellerai "interdisciplinaire" une démarche qui mèneà un savoir particulier en faisant appel à diverses spécialités, reconnues comme telles. Dans cette perspective, l'interdisciplinarité suppose la reconnaissance des apports des spécialités, elles-mêmes reconnues comme disciplines particulières. Dans cette perspective aussi selon laquelle la consultation des spécialistes est essentielle -l'apprentissage à l'interdisciplinarité est à envisager dès l'enseignement élémentaire et devrait faire partie des capacités auxquelles il importe de former très tôt. Cet apprentissage se situe dans une dynamique souvent acceptée par les enfants: celle de la consultation des gens qui s'y connaissent. La méthode proposée ici est à distinguer aussi d'autres approches dont certaines sont interdisciplinaires. Notamment de l'étude parthèmes (par laquelle on examine tout ce que diverses disciplines peuvent dire d'un thème, comme, par exemple, celui de l'eau). Elle diffère aussi de la pédagogie du projet, plus centrée sur la réalisation d'un objectif, sans se préoccuper des savoirs spécialisés comme tels (cene pédagogie est souvent assez globale et indifférenciée). Nous essayerons aussi d'éviter l'amalgame, processus par lequel on utilise des notions sans se préoccuper des façons dont elles changent de signification selon les divers contextes disciplinaires qui les évoquent. 2.3 L'interdisciplinarité, une pratique "politique"
Pour mieux cerner ce que nous allons viser, je proposerais d'abord une représentation d'une différence épistémologique importante entre les pratiques disciplinaires et interdisciplinaires. Dans les premières, les savoirs sont essentiellementnormésen ce sens qu'il existe un consensus social autour d'un ensemble de manières d'aborder une question (c'est ce que, après Kuhn, on a appelé un paradigme). Ce consensus se marque d'ailleurs institutionnellement par les pratiques scientifiques et universitaires qui déterminent avec assez de précision les approches qui, selon les normes d'une discipline, seront admises. C'est aussi la logique des manuels et des programmes scolaires. Ces normes sont telles que chacun sait comment approcher une question dans un champ disciplinaire (et dans les laboratoires et publications qui y correspondent). Elles sont peu négociables ainsi que l'apprennent à leur dépens les étudiants qui se risquent à les négliger lors des examens.
Quand, par ailleurs, on ne se centre plu:; sur une discipline, mais sur des situations concrètes, il n'existe plus de règles claires qui détenninent quelles sont les approches à privilégier. A propos de la construction d'un pont, par exemple, rien ne dit le poids qu'il convient de donner à l'avis d'un métérologue qui signale du brouillard fréquent dans la vallée. Ou, si l'on considère le problème de l'alimentation humaine, rien ne déterminea priori l'importance qu'on accorderaàla biologie,àla psychologie, ou aux contraintes économiques.
En conséquence, dès qu'on aborde des questions concrètes, avec toute leur complexité, il s'agira de "négocier" les critères qu'on se donnera en vue de l'étude entreprise. Et, comme on ne dispose plus de normes socialement admises4, cette négociation est ouverte: il n'y a pas de "bonne" réponse spécifiéeàl'avance (cette "ouverture" est une caractéristique du "politique", comme d'ailleurs de la recherche de pointe, et de tout ce qui "fait histoire''). Autrement dit, la pratique de l'interdisciplinarité, plus encore que le travail disciplinaire, relève fmalement toujours d'un "art,,5 qui ne peut se mettre entièrement en normes.
2.4 Une dynamique où le théorique est articulé au pratique
La méthode proposée ici6 a pour objectif la constructiond'une représentation théorique d'une
situation,construite de manièreàce qu'on puisse en discuter et éclairer la manière dont on s'y situera
et/ou on y agira. C'est ce que j'ai appelé un flot de rationalité(Fourez, 1994). Sa construction se négocie au milieu d'une série de critères et de contraintes utiles à expliciter: l'îlot est élaboré par des
producteursdéterminés, non en fonction d'une ou de plusieurs disciplines, mais d'un contexte
précis, d'unprojetet dedestinataires,en acceptant la contrainte de media qui véhiculeront la
productionthéorique envisagée. Par exemple, dans le contexte de l'interaction entre l'école et la
famille, on peut envisager la construction d'une note relative aux drogues (la production envisagée), liéeà un projet éducatif pour les enfants, avec - comme destinataires - leurs parents. Ou, dans le contexte d'un hiver rigoureux, on peut envisager la rédaction d'une note (production) pour les automobilistes (destinataires) utilisant un moteur diesel, en vue d'éviter trop de pannes (projet). Dans chacun de ces cas, il faudra se donner une représentation théorique (îlot de rationalité) de la situation; le contexte, le projet, la production et les destinataires envisagés permettront de négocier ce qu'il sera adéquat de retenir dans l'élaboration théorique. Ces éléments permettront notamment de mettre une limite à la recherche pour la "clôturer" avant qu'elle ne devienne inutile?
Les producteurs d'un îlot interdisciplinaire de rationalité seront généralement une équipe de travail qui négociera en son sein les éléments théoriques qui seront retenus et/ou construits. A la limite,
4Si on en disposait, cela signifierait qu'il existe un paradigme disciplinaire accepté qui guiderait le travail. Sde Certeau M.,L'invention du quotidien, 10/18, U.G.E., Paris, 1980 (nlle éd.: Gallimard, Folios-Essais, 1990). 6Elle est inspirée des méthodes d'évaluation sociale des technologies, pratique qui nécessite évidemment une approche interdisciplinaire: Nguyen N.T. et al., 1994 ; SmitsR., Slate of theArtof Technology Assessment in Europe,2d European Congress on Techn%gy Assessment, Milan, 1990; Fourez G., T.A. de Poche, Cahiers de la C.I.T.A., Université de Namur, 1993.
7parmi les éléments de contexte essentiels au travail interdisciplinaire (comme à tout travail de recherche, d'ailleurs) il faut considérer la variable "temps". Une étude parfaite qui durerait trop longtemps devient inutile au projet et donc inadéquate (ou "inappropriée" dans le sens que l'on donne à ce mot dans l'expression "technologie appropriée"). Cette variable "temps" est capitale dans toute démarche interdisciplinaire située dans un contexte pédagogique où le temps est forcément limité.
cependant, un individu isolé peut aussi procéder à cette négociation avec et en lui-même (c'est d'ailleurs ce que nous faisons souvent lorsque nous nous trouvons face à une situation concrète, comme - par exemple - lorsque nous achetons une voiture). il importe pourtant dedistinguer les rôles
des membres d'une équipe de travail interdisciplinaire quand ils négocient en équipe la représentation théorique qui sera construite et quand ils agissent comme spécialistes consultés. En principe il serait possible (mais non souhaitable) de pratiquer l'interdisciplinarité avec une équipe de personnes n'ayant aucune spécialité disciplinaire propre, mais cherchant toujours à l'extérieur d'elle-même les spécialistesàconsulter.
3. ÉTAPES D'UNE DÉMARCHE D'INTERDISCIPLINARITÉ
Ce qui suit est un déploiement d'une série d'étapes qui modélisent la démarche interdisciplinaire proposée. Cette modélisation ne doit évidemment pas être comprise d'une manière rigide. Il importe notamment de se rendre compte que l'image temporelle d'un scénario linéaire est trompeuse: il sera fréquent, dans la pratique, qu'une étape conduise à revenir età modifier les résultats d'une étape précèdente. Dans la mise en oeuvre de la démarche, il importe de toujours garder à l'esprit que ce que l'on cherche, c'est une représentation théorique adéquate d'une situation, dans un contexte donné, pour un groupe ayant un projet aussi clair que possible, et ce, dans un temps limité. Ce sont ces éléments qui permettront de négocier le produit final et de décider de ce qu'on estimera pertinent. (Sans pourtant oublier qu'il arrive que le progrès dans la démarche amène parfoisà"renégocier" le projet, ou à redéfinir son contexte.)
3.1 Faire un "cliché" de la situation étudiée
La première étape proposée est de se faire une image de la situation étudiée. Par cliché, j'entends l'ensemble des représentations que l'équipe de recherche a de la situation. Il s'agit donc d'une représentation spontanée, dans laquelle se mêlent préjugés et jugements critiques. Ce cliché est important puisque c'est de là que la recherche démarre en vue de construire l'îlot de rationalité. Parfois le cliché de base sera foumi par le point de vue - partiellement naïf - d'un spécialiste de la question (par exemple, le cliché de départ d'une étude de l'alimentation saine pourrait être le point de vue d'un diététicien).
3.2 Le panorama spontané
Le "cliché" était entièrement spontané. Il s'agit ici d'élargir la vision de l'équipe de recherche grâceà une grille de lecture qui conduira à percevoir des aspects souvent ignorés de ce qui est étudié. De par la manière dont la grille qui suit est construite, elle permet de se rendre compte d'une multiplicité de points de vue et de spécialités qui pourraient éclairer la situation:
- Uste des acteurs concernés
Cette liste énumérera des personnes, des groupes ou même des choses qui interviennet dans la situa-tion envisagée. Ces acteurs peuvent être concernés directement dans la situasitua-tion étudiée (comme,
dans le cas de l'alimentation, la personne qui se noumt ou l'agriculteur qui produit les aliments), ou être des spécialistes concernés de par leurs savoirs relatifsà la situation (comme le sociologue qui connaît les habitudes alimentaires d'un groupe).
- Recherche de normes et conditions imposées dans la situation
Toute situation est soumise à des normes, des standardisations et des contraintes multiples. Dans le cas de l'alimentation, il existe des normes juridiques quant à la qualité des aliments vendus, des normes diététiques, des contraintes économiques, et des habitudes standardisées, etc
- Listes d'enjeux et de tensions:
La structure de la situation est marquée par des débats relatifsà des options perçues comme des enjeux et générateurs de tensions. Par exemple, il y a ceux relatifsàl'importance accordéeàla santé face aux plaisirs de la table.
- Listede "bifurcations" possibles
Certaines des tensions conduisent à des choix qui vont structurer l'avenir, et suite auxquels les questions qui vont se poser prennent des fonnes nouvelles. Par exemple, la bifurcation entre alimentation végétarienne ou non. Ou encore, la question de savoir si l'on va tenir comple de l'impact des aliments choisis sur le niveau de vie des agriculteurs peut être considérée comme conduisantà une bifurcation.
- Listede "boîtes noires"
Sous ce tenne, on désigne les sous-systèmes matériels et/ou conceptuels qu'on pourrait étudier plusà fond ou, au contraire, ne pas approfondir. (comme la composition bio-chimique des aliments).
- Liste de spécialistes et de spécialités concernées
Ce sont les spécialités, depuis les sciences dites "dures" aux "sciences sociales", qui pourraient éclairer la situation. Il importe aussi de prendre note des spécialistes qui - comme les usagers d'une technologie - ont beaucoup à enseigneràpropos de la situation étudiée, même s'ils ne se rattachent pasàune spécialité socialement ou scientifiquement reconnue.
3.3 Descente sur le terrain
Un contact direct avec]' objet de l'étude est nécessaire (on aurait d'ailleurs déjà pu effectuer cette descente avant même l'étude du "panorama"), que ce soit directement sur le terrain ou indirectement, via un laboratoire. Dans le cas d'une technologie, la descente sur le terrain peut impliquer son utilisation ou son démontage. Le principe de cette étape est d'aller voir, sur place, comment "tout cela" se passe.
3.4 Consultation de spécialistes et de spécialités
Cette phase est celle qui permetàla méthode de se dire interdisciplinaire. Il faut choisir quelles spécialités et quels spécialistes consulter. Les choix faits introduiront inéluctablement des limitesàla recherche, limites qu'on pourra, par la suite, soit trouver très acceptables, soit estimer dommageables au projet qui soutend le travail. Il s'agit, pour ces choix souvent difficilesà effectuer, d'utiliser comme Clitères le projet entrepris, le temps et les spécialistes disponibles, le "coût" de l'ignorance, ete. La consultation des spécialistes exige, elle aussi, de la méthode. Nous savons en effet que trop,
souvent, après avoir vu notre médecin ou notre garagiste, nous sommes frustrés parce que nous n'avons pas pu bien user du temps de consultation. Sans doute le bon usage des spécialistes exige-t-il deux démarches. Par la première, il s'agit d'exiger d'eux des réponses à des questions qu'on se pose, sans se laisser embarquer par eux dans des études interminables. Quantà la seconde, elle consistera à respecter leur "altérité" etàleur demander de mettre en évidence des éléments qui leur apparaissent du fait de leur spécialité et de ses traditions, mais qui risqueraient d'échapperà l'équipe de recherche.
3.5 Ouverture approfondie de l'une ou l'autre boîte noire et découverte de "principes disciplinaires" à la base de la situation
Lors de cette étape, l'équipe de recherche peut entamer (ou commanditer) des études plus approfondies relativesà certaines boîtes noires envisagées auparavant (et là encore, il faudra choisir). Elle pourra aussi - et parfois pour des raisons principalement culturelles et non utilitaires - essayer d'éclairer des principes disciplinaires8liés à la situation (comme les principes disciplinaires pouvant "expliquer" certaines technologies).
3.6 Schématisation globale de la situation
Souvent, un schéma, un dessin, une maquette, un poster, une ou deux phrases, etc., peuvent exprimer rapidement et de façon schématique la situation étudiée. Ce type de synthèse permet souvent de recentrer l'étude et de "laisser tomber" une masse d'informations moins utiles.
3.7 Synthèse de l'îlot de rationalité produit
Cette dernière étape conduit à synthétiser l'îlot de rationalité ainsi obtenu.
n
s'agit donc de se donner la représentation théorique recherchée et de construire la théorie recherchée9...en espérant qu'elle sera adéquate au contexte et au projet, et compréhensible des destinataires.4. DISCUSSION DANS L'ATELIER
De nombreux éléments échangés dans la discussion ont été repris dans le texte présenté ici. Ils concernaient le plus souvent les düficultés que peut rencontrer une telle méthode. La discussion a mis aussi en évidence que des enseignants, s'ils veulent éduquer leurs élèves à l'interdisciplinarité, auront besoin d'une solide formation épistémologique préalable.
8pour comprendre la notion de "principe disciplinaire" d'une situation ou d'une technologie,ilfaut considérerla notion de "traduction".Leprincipe disciplinaire estlatraduction de la situation dans le paradigme d'une discipline. Cf. LatourB .•1989 ; Tilmans-Cabiaux Ch., 1992.
9Ce moment "tMorique", par lequel on se donne de la situation une représentation communicable, discutable et distincte des affects et des projets, est un des moments les plus importants de la "construction" des savoirs: celui de l'objectivation.
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