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Apprendre à reconnaitre et nommer les émotions pour mieux les maitriser à l’école maternelle

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Academic year: 2021

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Texte intégral

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Année universitaire 2017-2018

Master

Métiers de l’enseignement, de l’éducation et de la formation

Mention Premier degré

-

Apprendre à reconnaitre et nommer les

émotions pour mieux les maitriser à

l’école maternelle

Présenté par Claire GAUTHIER

Première partie rédigée en collaboration avec Valérie PORRIN et Eglantine

REYNAUD.

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Table des matières

Introduction

...1

1. Les enjeux ...2

1.1 Les enjeux institutionnels ...2

1.2 Les enjeux scolaires ...4

1.3 Les enjeux personnels ...5

2. Apports théoriques ...5

2.1 Le langage ...5

2.1.1 Définition ...5

2.1.2 L’acquisition du langage ...6

2.1.3 Le langage comme outil et instrument ...7

2.2 Le langage oral à l’école maternelle ...8

2.2.1 Les niveaux de langage ...8

2.2.2 Le rôle et la place de l’enseignant ...9

2.2.3 La construction de la syntaxe ...10

2.2.4 L’élaboration progressive du vocabulaire ...10

2.2.5 L’acquisition de l’articulation ...11

2.2.6 Pour un enseignement efficace ...11

2.3 Les émotions ...12

2.3.1 Définition ...12

2.3.2 Vers le développement de la compétence émotionnelle ? ...12

2.3.3 Émotions et cognition : au cœur des processus d’apprentissage ...13

2.3.4 Langage et émotions chez l’enfant ...14

2.2.5 Mettre des mots sur des maux : pourquoi et comment ? ...15

3. Expérimentation en classe ...16

3.1 Présentation du lieu et des élèves ...16

3.2 Problématique et hypothèses ...18

3.3 Le projet ...19

3.3.1 Le groupe témoin ...19

3.3.2 Les évaluations ...19

3.3.3 Les supports utilisés ...21

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4. Résultats ...25

4.1 Description générale des résultats ...25

4.2 Résultats obtenus pour la réception orale ...25

4.3 Résultats obtenus pour la production orale ...26

4.4 Résultats obtenus en réception orale et en production orale des émotions ...26

4.5 Résultats obtenus pour la production orale à partir de situations ...27

5. Analyse des résultats et discussion ...27

5.1 Analyse des résultats ...27

5.1.1 Analyse des résultats obtenus lors de la réception orale ...27

5.1.2 Analyse des résultats obtenus lors de la production orale ...29

5.1.3 Analyse des résultats concernant le vocabulaire des émotions ...30

5.1.4 Analyse production orale des situations ...30

5.2 Retour à la problématique et aux hypothèses de départ ...31

5.3 Limites et perspectives ...32

5.4 Impacts sur ma pratique professionnelle ...33

Conclusion

...34

(4)

1

Introduction

À l’école maternelle, l’enfant est amené à devenir élève. Le professeur des écoles l’accompagne notamment à se construire comme personne singulière et à découvrir le rôle du groupe dans ses propres cheminements. Pour cela, il doit développer la capacité des enfants à identifier et exprimer verbalement leurs émotions.

Le programme d’enseignement de l'école maternelle (BO Spécial n°2, 2015) accorde une place centrale à l'apprentissage du langage oral et écrit. L’apprentissage du langage oral, composé d’un temps de stimulation puis d’un temps de structuration, constitue une des priorités du cycle 1 et relève du domaine intitulé « Mobiliser le langage dans toutes ses dimensions », traité de manière transversale en relation avec tous les autres domaines et de manière spécifique.

Reconnaitre puis nommer ses émotions peut alors être travaillé comme un objet d’apprentissage à part entière, ce que nous avons choisi de faire au cours de la période 3 dans une classe de petite et moyenne sections de maternelle. Nous étudierons donc comment ces élèves s’emparent de ce projet sur les émotions pour s’exprimer et enrichir leur vocabulaire.

Dans une première partie, nous présenterons les enjeux inhérents à la conception et mise en œuvre de la séquence. Dans une deuxième partie, nous étudierons la place du langage oral à l’école maternelle ainsi que le rôle des émotions chez l’enfant. Dans une troisième partie, nous exposerons notre projet et son expérimentation en classe. Enfin, nous analyserons les résultats obtenus à la lumière des réflexions théoriques étudiées tout au long de ce travail.

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1. Les enjeux

Ce projet de langage, ciblé sur l’expression des émotions, a été conçu et mis en œuvre afin de répondre aux instructions officielles, au contexte scolaire, aux valeurs de l’École publique ou à mes valeurs personnelles.

1.1 Les enjeux institutionnels

Étudions, dans un premier temps, la légitimité du projet mis en œuvre par rapport à a réglementation officielle. La loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’École de la République de 2013 énonce 25 mesures clés dont la redéfinition du socle commun et l’élaboration de nouveaux programmes.

À la lecture de cette loi, nous notons que l’une des premières missions demandées aux enseignants de maternelle est de développer chez chaque élève « la confiance en soi et l’envie d’apprendre » et de les « initier aux différents moyens d’expression. » (Loi n°2013-595, 2013). De plus, cette loi s’assure que l’école est tenue de stimuler et structurer le langage oral afin de prévenir les éventuelles difficultés scolaires.

Les acteurs de la refondation de l'École de la République rappellent par ailleurs qu’« un climat scolaire serein est une condition essentielle pour assurer de bonnes conditions de travail [ainsi que] le bien-être et l'épanouissement des élèves » (Loi n°2013-595, 2013). En réalisant une séquence de langage oral sur le thème des émotions, je souhaite que mes élèves de PS-MS acquièrent des bases pour mieux s’exprimer afin qu’ils se comprennent mieux dans la classe et, qu’à plus long terme, le climat scolaire général en soit favorisé. C’est précisément ce que préconisent les professionnels de l’éducation dans l’article Climat scolaire en rappelant que la relation entre climat scolaire et apprentissage est à double sens car « si un bon climat scolaire est une condition des apprentissages, il est essentiel de considérer que les apprentissages contribuent aussi à la qualité du climat scolaire » (BO n°13, 2016). Pour tendre vers cette sérénité, plusieurs éléments sont à prendre au sérieux comme la relation entre les personnes, l’enseignement et l’apprentissage (contenus disciplinaires mais aussi transversaux) et la sécurité (physique mais aussi émotionnelle).

Mis à part les apprentissages disciplinaires que nous étudierons par la suite, il s’agit donc de développer des compétences transversales qui peuvent comporter des apprentissages comme « l’expression des émotions ». Le socle commun de connaissances, de compétences et

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3 de culture, constitué de cinq domaines, présente ce que tout élève doit savoir et maitriser à la fin de la scolarité obligatoire. Son troisième domaine, intitulé La formation de la personne et

du citoyen, vise pourtant à définir à partir de la maternelle, des aptitudes à vivre ensemble qui

amènent chaque élève dans un parcours citoyen où l’expression des émotions y trouve toute sa place et tout son intérêt (BO n°17, 2015).

La loi de 2013, ayant pour but de faire évoluer le contenu des enseignements, a créé un Conseil supérieur des programmes. Ce dernier précise que le langage est une priorité dans le programme d’enseignement de l’école maternelle de 2015. Il relève d’ailleurs du premier domaine intitulé Mobiliser le langage dans toutes ses dimensions, à l’égal du socle commun où le premier domaine s’intitule : Les langages pour penser et communiquer. En outre, comme nous le précise le programme de maternelle, le langage est une « condition essentielle de la réussite de toutes et de tous » et celui-ci, qu’il soit oral ou écrit, concerne « l’ensemble des domaines » (BO Spécial n°2, 2015). En ce sens, ma séquence s’adresse à tous les élèves de la classe et a pour objectif de faire progresser chacun d’entre eux en fonction de leurs compétences initiales. Le langage oral constituant la priorité des apprentissages de l’école maternelle, voici ci-dessous un récapitulatif de ce qui est attendu des élèves de fin de cycle 1 :

MOBILISER LE LANGAGE DANS TOUTES SES DIMENSIONS

ORAL

Oser entrer en communication

Communiquer avec les adultes et les autres enfants, en se faisant comprendre.

S’exprimer dans un langage syntaxiquement correct et précis. Reformuler pour se faire mieux comprendre.

Échanger et réfléchir avec les autres

Pratiquer divers usages du langage oral : raconter, décrire, évoquer, expliquer, questionner, proposer des solutions, discuter

un point de vue. Comprendre et

apprendre

Dire de mémoire et de manière expressive plusieurs comptines et poésies.

Concernant l’expression des émotions, l’enseignant de maternelle « développe la capacité des enfants à identifier, exprimer verbalement leurs émotions et leurs sentiments ». De plus, « il est attentif à ce que tous puissent développer leur estime de soi, s'entraider et partager avec les autres. » (BO Spécial n°2, 2015). Ces citations démontrent l’accord notable entre les différentes recommandations officielles. Nous pouvons renchérir en remarquant que dans le domaine Agir, s’exprimer et comprendre à travers les activités artistiques, les élèves sont également amenés à mettre des mots sur leurs émotions donc à vivre et à exprimer ces émotions. Ayant comme premier objectif de mettre le langage oral au centre des apprentissages des élèves, ce projet traite de l’expression des émotions dans le but de donner confiance aux élèves et de

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4 viser, sur le long terme, l’instauration d’un climat de classe serein. Mon projet de langage aspire donc à prendre en compte l’ensemble de ces instructions officielles.

1.2 Les enjeux scolaires

Ce projet de langage est en lien avec le contexte scolaire dans lequel j’exerce. Il y a dans ma classe deux élèves qui semblent avoir quelques difficultés de comportement. Sans vouloir poser un quelconque diagnostic, nous nous sommes réunis en équipe pédagogique pour en discuter. Il en est ressorti, entre autres, qu’un projet sur les émotions pouvait leur être encore plus bénéfique que pour les autres élèves. En effet, d’après la DSDEN de la Manche qui a publié en 2016 des recommandations pour prévenir les comportements difficiles, l’apprentissage des émotions est incontournable : « il est essentiel qu[e les élèves] sachent les reconnaître, les nommer, les exprimer et les gérer, parce qu'elles interviennent dans le développement des habiletés sociales et dans la compréhension du monde et des autres » (Frigroult, Laisney et Gouriou, 2016). Ces conseillers pédagogiques renchérissent en notant qu’ « une bonne gestion des émotions diminue considérablement le nombre de crises ». Par ailleurs, comme nous l’avons étudié dans les instructions officielles, ils rappellent l’importance de la construction de l’estime de soi qui est inhérente à la réussite dans les apprentissages. Dans cette perspective, il me semblait opportun de suivre précisément à la fois les progrès langagiers réalisés par ces élèves mais également l’évolution de leurs comportements à travers ce projet, tout en étant consciente de la courte période de travail.

De plus, le Projet d’école actuel, a comme axe prioritaire la maitrise de la langue française. Pour cela, une programmation de cycle a été conçue dans le but d’ « accroitre les connaissances lexicales des élèves afin d’améliorer le processus de compréhension et d’enrichir l’expression orale et écrite » (Projet d’école, 2017-2020). Le projet d’école propose à cet égard différentes actions comme réaliser « quatre à cinq séquences d’apprentissage de vocabulaire par niveau » (Projet d’école, 2017-2020) s’appuyant sur les travaux de Micheline Cellier et son ouvrage intitulé Guide pour enseigner le vocabulaire à l’école maternelle » (2014). En ce sens, mon projet de langage s’ancre dans cette programmation puisqu’une des séquences proposées dans cet ouvrage concerne les émotions : « dire ses émotions » (2014, p.63).

Concernant la mission que la Nation confie à l’École, celle de faire partager aux élèves les valeurs de la République, mon projet participe aux prémices de l’Éducation Morale et Civique (EMC). En effet, prenons par exemple l’article 3 de la Charte de la Laïcité à l’École,

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5 qui rappelle le principe de la liberté d’expression de chacun dans le respect de celle des autres. Mon projet de langage s’engage véritablement à écouter et respecter les paroles de chaque élève. De plus, l’article 6 de la Charte évoque le fait que l’École doit permettre à chacun de forger sa personnalité (BO n°33, 2013). Ce projet a l’intention de donner la parole à chaque élève. Pour apprendre ensemble et vivre ensemble, il s’agit d’expliquer que chacun peut exprimer des sensations et des émotions différentes et, ce, en fonction de plusieurs facteurs.

1.3 Les enjeux personnels

Enfin, personnellement, élaborer et vivre un projet de langage sur le thème des émotions dans ma classe de PS-MS m’intéressait grandement. La littérature de jeunesse est fleurissante sur la question, et ceci a attisé ma curiosité. Les ouvrages sur les émotions, l’intelligence émotionnelle et sur le lien entre estime de soi et réussite sont de plus en plus nombreux. La littérature réservée aux adultes est aussi grandissante. Je détaillerai une partie de ces ouvrages et recherches dans les parties 2.2.2 et 2.2.3. L’école maternelle est un lieu où le langage a une place primordiale et où les émotions sont mises à rude épreuve tant pour les élèves que pour l’enseignant, raison de plus pour étudier le sujet.

2. Apports théoriques

2.1 Le langage

2.1.1 Définition

Alors que la langue est un objet social et culturel, le langage désigne une fonction humaine. D’après le Grand Larousse illustré (2015), « le langage est la capacité observée chez tous les hommes, d'exprimer leur pensée et de communiquer au moyen d'un système de signes vocaux et éventuellement graphiques (la langue) ». C’est donc une fonction humaine qui s’acquiert et qui peut prendre deux formes : le langage dit « intérieur », qui n’aboutit pas à une production et le langage dit « extériorisé », qui correspond aux discours ou aux textes produits (Documents d’accompagnement des programmes, 2011).

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6 2.1.2 L’acquisition du langage

N. Chomsky, linguiste américain, pense que l’enfant apprend à parler dans son milieu naturel, en entendant les autres interagir (J.M. Fortis, 2008). Pour J. Bruner, mentionné dans les ressources de la maternelle Eduscol de 2015, l’enfant doit être stimulé de façon consciente. Ce dernier expose trois procédures conventionnelles qui sont imbriquées pour établir la communication entre l’enfant et l’adulte :

- « le phénomène d’attention conjointe [qui] consiste à attirer l’attention de l’autre sur une activité, un objet du réel, afin d’engager un échange à leur propos ;

- le phénomène de coaction [qui] consiste à agir ensemble sur ce même objet du réel ; - les rites d’interaction [qui] vont constituer les bases du dialogue (échanger; saluer…). »

Le langage se construit et s’acquiert de façon constante. Cette construction est essentielle pour le développement de l’enfant car c’est grâce au langage que ce dernier va pouvoir acquérir d’autres compétences. Toutefois, tous les enfants sont différents et construisent leurs compétences à leur rythme, c’est pourquoi des différences sur le plan langagier sont constatées chez des enfants pourtant de même âge. De plus, les enfants comprennent plus de mots qu’ils n’en produisent. C’est d’ailleurs en prenant en compte ces deux observations que nous établirons nos évaluations qui seront détaillées dans la partie 3.3.2. Dans les ressources concernant la maternelle disponibles sur Eduscol, il est exposé que « la communication et les échanges avec différents interlocuteurs sont nécessaires pour le développement intellectuel, affectif et langagier de l’enfant » (2015). L’enfant interagit dès la naissance avec les autres par des cris, pleurs, gestes et mimiques, puis entre en communication avec les autres par la parole pour se faire comprendre. Pour l’accompagner dans cette relation, l’adulte peut intervenir de différentes manières. Le tableau ci-dessous synthétise les caractéristiques essentielles des modèles d’intervention pour l’oral, en fonction de différents spécialistes du langage (L. Pulido, 2016) :

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7 Au fur et à mesure qu’il grandit et élargit son cercle social, l’enfant éprouve de plus en plus le besoin de s’approprier le langage lors de ses différentes interactions orales. Afin de construire des phrases complexes et pour qu’il acquière des compétences discursives, le langage doit alors être considéré comme un objet d’apprentissage spécifique.

2.1.3 Le langage comme outil et instrument

2.1.3.1 Le langage comme outil de communication

Le langage, comme outil efficace dépendant d’une norme, apparaît dans un premier temps comme un moyen de communiquer. L’enfant échange petit à petit dans et avec son cercle familial puis est amené à rencontrer des personnes plus ou moins familières avec lesquelles il apprendra à s’exprimer pour être compris. Le langage va prendre de plus en plus de place dans la vie de l’enfant et va permettre la régulation de ses interactions sociales. Lorsqu’il arrive à l’école maternelle, l’enfant découvre de « nouvelles modalités d’interactions sociales » comme les temps de regroupement par exemple (Scérén-CNDP, 2011). Il doit les découvrir au fur et à mesure, les assimiler et s’en imprégner pour apprendre notamment à maitriser le langage en situation. Ensuite, et petit à petit, il apprend à évoquer ou raconter pour rapporter à ses pairs des éléments qu’ils ne connaissent pas. Nous reviendrons sur cette distinction entre ces deux niveaux de langage dans la partie 2.2.1.

2.1.3.2 Le langage comme instrument du développement et de la pensée

Le langage, considéré donc comme un objet d’apprentissage pour l’enfant est également un instrument de développement. Au niveau psychoaffectif, comme nous l’expliquent les documents d’accompagnement des programmes (2011), la verbalisation permet à l’enfant de se construire, de construire sa pensée par rapport aux autres afin de devenir un individu à part entière. Il développe par exemple des capacités pour exprimer ses besoins, ses sentiments et ses émotions. C’est une des raisons pour laquelle je veillerai, tout au long de la séquence, à lire différents albums aux élèves, au sein desquels je leur demanderai de caractériser la situation émotionnelle du personnage en fonction des événements vécus. Au niveau cognitif, le langage est considéré comme un outil donnant accès aux connaissances et permettant de donner du sens à la réalité. Le langage est alors un outil pour apprendre.

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2.1.3.3 Le langage comme instrument de représentation du monde

L’enfant, dès le plus jeune âge, communique avec ses pairs par des mimiques, des expressions et des sons pour interagir avec les adultes et avec le monde qui l’entoure. Il sollicite les autres pour mieux comprendre et se faire comprendre. Cela passe par un étayage fort de l’adulte ainsi que des reformulations et répétitions constantes. Il apprend à exprimer ce qu’il ressent, à parler de moments vécus, de sensations, de sentiments et ses propos deviennent de plus en plus longs, complexes et précis. Ces notions seront reprises lors de l’explicitation des évaluations de début et fin de séquence (cf. partie 3.3.2), ainsi que lors de l’analyse de celles-ci (cf. partie 5).

2.2 Le langage oral à l’école maternelle

Le langage utilisé à l’école maternelle reprend toutes les facettes du langage décrites en amont et correspond plus particulièrement aux activités de réception, de compréhension et de production. Les élèves de maternelle doivent pouvoir communiquer et entrer dans la « culture » de l’école pour améliorer, entre autres, leurs compétences en langage oral.

2.2.1 Les niveaux de langage

Deux niveaux de langage sont à considérer pour les élèves de maternelle. En effet, pour que l’élève puisse échanger avec les autres élèves et avec le personnel scolaire, il doit dans un premier temps maitriser le langage dit « en situation ». Ce langage est celui qui « accompagne une situation vécue par les interlocuteurs qui échangent » (Scérén-CNDP, 2011). Les interlocuteurs se comprennent, car ils suivent la discussion en même temps, dans le même contexte. Cependant, une des missions de l’école maternelle est d’accompagner les élèves vers la maitrise du langage dit « d’évocation ». Ce langage s’apparente au langage écrit, car il est décontextualisé. Pour le très jeune enfant, il est d’abord utilisé pour exprimer l’absence d’une personne puis il l’utilise par la suite pour évoquer, raconter quelque chose. Trois variables sont à prendre en compte pour que ce langage soit compréhensible par tous : les personnes, le temps et l’espace.

Dans ma séquence, deux missions sont à accomplir par rapport au développement du langage oral. Dans un premier temps, la découverte et l’enrichissement de vocabulaire pour perfectionner le langage en situation (séances 2, 4 et 5 notamment). Dans un second temps,

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9 l’exploitation des albums échos, qui sont présentés dans la partie 2.2.4, pour construire le langage d’évocation (séance 9). D’après les documents d’accompagnement des programmes, il est important d’accompagner les élèves au mieux dans la maitrise de ce deuxième niveau de langage, car il est indispensable à la réussite de leur scolarité (Scérén-CNDP, 2011).

2.2.2 Le rôle et la place de l’enseignant

Comme vu dans la partie 2.1.2, le langage est un objet d’apprentissage qui s’acquiert en situation et grâce à des interactions. En effet, d’après P. Boisseau, « l’interaction est efficace pour faire progresser l’élève car elle est, en quelque sorte, construite sur mesure » (Enseigner la langue orale à l’école maternelle, 2005). Pour mesurer le développement du langage, l’enseignant doit avoir deux types d’objectifs par rapport aux activités langagières qu’il va mettre en place. Ceux-ci sont d’ordre quantitatif, pour que chacun puisse s’exprimer au maximum ; et qualitatif, pour permettre une meilleure expression grâce à différents gestes professionnels.

Afin de favoriser les échanges langagiers au sein de la classe, l’enseignant doit créer un contexte d’apprentissage favorable, c’est-à-dire créer un climat de bienveillance et d’écoute positive pour amener les élèves à progresser sur le plan langagier. L’enseignant, à travers les activités et rituels qu’il propose, reformule les propos des élèves, leur demande de répéter, tout en encourageant leurs essais langagiers pour qu’ils s’expriment en toute confiance.

De plus, l’enseignant doit créer une dynamique dans les échanges oraux en variant les dispositifs pour favoriser la prise de parole de tous, en faisant alterner les discours individuel et collectif. J’ai d’ailleurs, au cours de la séquence mise en place, proposé à la fois des rituels de langage lors des regroupements ainsi que des activités de langage spécifiques (séances 3 et 9 par exemple) afin de favoriser les échanges langagiers. L’enseignant doit également assurer les gestes d’un étayage langagier permanent en veillant « à ce que les parleurs soient de plus en plus nombreux et de plus en plus efficaces dans leur prise de parole » et il doit savoir évaluer par l’observation « pour adapter les situations aux besoins des élèves » (Ressources maternelle Eduscol, 2015). Certaines activités proposées pour cette séquence, reprises lors des temps d’accueil par exemple, ont permis ces temps d’observation. Pour permettre à ses jeunes élèves de progresser, l’enseignant doit d’une part savoir où en sont ses élèves en termes de développement et d’apprentissage (séance 1), et d’autre part, leur prévoir des situations d’apprentissage suffisamment complexes, pour être au plus proche de leur zone proximale de

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10 développement (séance 3). Ce dernier concept a été défini par L. Vygotsky comme la zone où l’élève, à l’aide de ressources, est capable d’exécuter une tâche (1933-34). Ces situations doivent bien entendu susciter le langage au maximum. Afin d’améliorer le langage oral des élèves, il est primordial de soutenir la construction de la syntaxe pour enrichir progressivement le vocabulaire et favoriser l’articulation des élèves (P. Boisseau, 2005).

2.2.3 La construction de la syntaxe

P. Boisseau insiste dans son ouvrage intitulé Enseigner la langue orale en maternelle (2005), sur la nécessité de développer la syntaxe des élèves et ce, dès la maternelle. La syntaxe, parce qu’elle intervient fréquemment et est difficile à acquérir, doit être l’une des priorités de l’enseignant pour ses élèves. L’enseignant doit les encourager à complexifier la syntaxe dans leurs prises de parole. Il peut, à cet égard, utiliser les albums échos réalisés avec les élèves, reprendre ce qui a été dit en ajoutant ou en modifiant quelque peu leurs propos, tout en ayant des exigences de plus en plus grandes. Dans notre thème de séquence, cela peut également s’élaborer grâce à l’utilisation des albums de jeunesse, en reprenant par exemple les émotions vécues du personnage principal et en demandant aux élèves « comment le personnage se sent-il ? », la construction syntaxique de référence étant : « sent-il/elle se sent + émotion, parce que… ». Ces activités permettent de complexifier la structure de la phrase, d’apprendre à argumenter et à justifier ses propos et aident l’élève à différencier les pronoms.

2.2.4 L’élaboration progressive du vocabulaire

D’après R. Goigoux et S. Cèbe, il est primordial de travailler le lexique de manière systématique car « les faiblesses lexicales des élèves sont une source importante de leurs difficultés de compréhensions » (2013). Il s’agit donc d’élargir le vocabulaire des élèves et ce, de manière progressive. Pour cela, P. Boisseau propose une liste de mots de vocabulaire à acquérir en fonction de l’âge des enfants : 750 mots dès 3 ans, 1750 à 4 ans et 2500 pour les 5 ans (2005, p.6). Par exemple, dans ma séquence, j’ai choisi d’enseigner les termes « joie, joyeux, en colère », ceux-ci figurant dans cette liste de 1750 mots ; mais pas d’enseigner les termes « furieux, colérique, serein », ces derniers n’y figurant pas. Ce vocabulaire peut être abordé sous différentes formes. Il est important dans un premier temps de faire des listes de mots appris par les élèves ou bien de réaliser des affichages de ce que disent les enfants. Ensuite,

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11 ce travail peut s’effectuer grâce à des imagiers, des albums, des jeux ou par la création d’albums échos. Ces derniers, réalisés (séance 3) et exploités (séance 9) dans la séquence, sont conçus pour permettre des interactions entre l'adulte et les élèves, seuls ou en petits groupes. Ils constituent un outil efficace pour permettre à certains enfants de rentrer dans le langage ou accélérer cette construction chez les enfants de 3 à 5 ans. Ils se composent de photos d'enfants réalisant une activité d'apprentissage précise. Dans ma séquence par exemple, les élèves devaient mimer une émotion suite à des échanges en lien avec une émotion évoquée. Les photos sont accompagnées d'un petit texte de l'oral qui reprend les propositions émises spontanément par les élèves lors du retour sur celles-ci. Les albums échos sont plutôt faciles à mettre en œuvre et motivent les élèves à raconter les actions photographiées, ce qui améliore à terme leur performance langagière. Ils vont utiliser un vocabulaire de plus en plus précis et diversifié et vont être capable de varier les pronoms. L’important est de partir de ce que dit ou sait l’élève, pour permettre un feedback, c’est-à-dire une « reprise de ce qu’a dit l’élève en le développant légèrement » en vue d’un objectif accessible pour lui (P. Boisseau, 2017).

2.2.5 L’acquisition de l’articulation

Une fois la syntaxe travaillée ainsi que les mots de vocabulaire appris et acquis, il est possible d’axer le travail sur l’articulation de l’enfant (P. Boisseau, 2005). Deux orientations de travail sont préconisées afin d’améliorer les compétences articulatoires des enfants : proposer des comptines ainsi que des paires distinctives.

2.2.6 Pour un enseignement efficace

Pour interagir de manière la plus efficace possible, il faut que l’enseignant privilégie des échanges interindividuels ou des petits groupes d’élèves (A. Florin, 1995), incluant deux ou trois élèves en difficulté. De plus, il doit garder « en permanence une trame de construction de la syntaxe orale, lui permettant de s’adapter au mieux aux propositions spontanées de l’enfant. » (P. Boisseau, 2005). L’enseignant doit accompagner les élèves dans la construction de ces compétences langagières. Cela passe par l’ajustement important des feedback, mais aussi par des relances (pour inciter l’élève à continuer et produire plus), de l’imitation et de la répétition. C’est ce que j’ai veillé à mettre en place tout au long de ma séquence. Afin d’évaluer les progrès des élèves de façon continue et différenciée, P. Boisseau propose une grille d’évaluation basée

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12 sur les compétences construites et en cours de construction concernant le vocabulaire, la syntaxe, l’utilisation des pronoms, les temps, la prononciation etc. Je me suis d’ailleurs inspirée de cette grille pour évaluer mes élèves de petite et moyenne sections (cf. annexe 1).

L’objectif langagier de l’école maternelle est l’acquisition par tous les élèves d’un langage oral riche, organisé et compréhensible par l’autre. Néanmoins, sa mission principale est de « donner envie aux enfants d'aller à l'école pour apprendre, affirmer et épanouir leur personnalité » (BO Spécial n°2, 2015). Nous supposons que cet épanouissement passe par la connaissance de soi et donc de ses émotions.

2.3 Les émotions

2.3.1 Définition

Le terme « émotion » se compose du verbe latin motere signifiant « mouvoir » et du préfixe é, qui indique un mouvement vers l’extérieur. Cette étymologie signifie alors « une tendance à agir » (D. Goleman, 1995) et représente, selon I. Filliozat, « ce qui vient de l’intérieur et qui s’exprime vers l’extérieur » (2017). L’émotion correspond alors à un message envoyé par le cerveau pour nous indiquer si la situation dans laquelle nous sommes nous convient ou non et ce message, cette réaction, va nous aider à gérer cette situation. C’est également ce qu’explique D. Sander en définissant l’émotion comme « un processus rapide, focalisé sur un événement et constitué de deux étapes: (1) un mécanisme de déclenchement basé sur la pertinence qui (2) façonne une réponse émotionnelle multiple ». Autrement dit, c’est donc la façon dont le corps s’adapte à son environnement. D’après J. Siaud-Facchin, psychologue, il n’y a pas d’émotions positives ou négatives, mais chaque émotion a une fonction (2015).

2.3.2 Vers le développement de la compétence émotionnelle ?

D. Goleman popularise le concept d’intelligence émotionnelle et le définit comme « la capacité à réaliser un raisonnement précis sur les émotions et la capacité à utiliser les émotions pour améliorer la réflexion » (1995). D. Sander et K.R. Scherer (2009) traduisent cette intelligence émotionnelle en cinq compétences qui sont : (1) la compréhension des émotions, (2) le fait d’avoir des émotions justifiées, (3) la reconnaissance ainsi que (4) la régulation de ses propres émotions et (5) la reconnaissance des émotions chez autrui. Grâce à cet apport théorique, j’ai construit la séquence dans le but de faire découvrir ou d’enrichir chez mes élèves

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13 ces compétences, tout en prenant en compte l’âge des enfants. Les activités proposées aux élèves comme les bocaux à émotions et le panneau des émotions (séance 1) participent à ce développement, nous les détaillerons dans la partie 3.3.3.

D’après les travaux de l’Organisation de Coopération et de Développement Économiques (OCDE) publiés dans la note d’analyse de France Stratégie, d’autres systèmes scolaires étrangers qui accueillent de jeunes enfants ne se concentrent pas seulement sur l’acquisition de savoirs scolaires, mais visent également le développement de l’enfant « dans toutes ses dimensions : intellectuelle, physique, sociale, émotionnelle, etc. » (D. Agacinski, C. Collombet, 2018). Lors des Assises de la maternelle de 2018, des spécialistes de l’éducation ont d’ailleurs mené des réflexions liées à ces travaux de comparaison, réinterrogeant le fonctionnement de l’école maternelle française. A. Diamond, psychologue, renchérit en expliquant que « si nous voulons améliorer les performances académiques, la route la plus efficace et la plus économe ne consiste pas à se concentrer sur les compétences académiques, mais à favoriser aussi le développement social, physique et émotionnel des enfants » (2018). A l’instar de D. Sander, C. Saarni propose aussi de développer les compétences émotionnelles des enfants pour leur apprendre à gérer et exploiter leurs émotions dans une situation collective spécifique (2000). Elle expose d’ailleurs huit types de savoir-faire que nous présentons en annexe 2. La séquence que je présenterai dans la partie 3.3.4 tend vers l’acquisition de ces compétences, à travers des situations d’apprentissage diverses qui sont détaillées en annexe 3.

2.3.3 Émotions et cognition : au cœur des processus d’apprentissage

Les émotions ont été étudiées dans de multiples domaines tels que la psychologie, la philosophie, la biologie ou la sociologie. Ce n’est que dans les années 1980 que des études ont été réalisées en nombre dans le domaine de la cognition. Cette dernière est définie par D. Sander comme « un processus naturel ou artificiel qui traite de l’information, servant à l’acquisition, l’organisation et l’utilisation de connaissances de manière explicite ou implicite » (2009).

L’étude sur la nature de l’émotion et ses liens avec la cognition semble connaitre de nos jours un essor considérable. En effet, en 2011, l’Agence Nationale de Recherche lance un appel à projets ayant pour titre Émotion(s), Cognition et Comportement. Depuis, de nombreux travaux de recherche ont vu le jour et s’accordent aujourd’hui sur l’existence d’un lien entre émotions et cognition, tant en neurosciences qu’en sciences humaines. Dans un domaine qui nous intéresse particulièrement, le colloque intitulé Émotion et apprentissages scolaires qui a eu lieu

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14 au début de l’année 2018, met les émotions au centre de la question et s’interroge sur l’influence de celles-ci dans les apprentissages scolaires. F. Cuisinier et F. Pons, dans leur article intitulé

Emotions et cognition en classe, relèvent, entre autres, l’intérêt d’explorer les émotions de

l’élève et de comprendre leur impact sur les processus d’apprentissage puisqu’elles constitueraient selon eux « la face cachée du triangle didactique » (2011). D. Sander et K.R. Scherer abordent les effets des émotions sur la cognition et en particulier l’effet de l’intérêt. Ils exposent qu’il faut augmenter « la nouveauté, la complexité et la compréhension » pour déclencher l’intérêt, et donc la connaissance (2009). Ces professeurs de psychologie ont d’ailleurs publié avec d’autres chercheurs un article intitulé Les émotions au cœur des processus

d’apprentissage. Ils s’intéressent désormais aux « émotions comme processus qui, étant donné

leurs implémentations cérébrales en lien avec les systèmes impliqués dans la motivation, l’attention et la mémoire, sont au cœur des apprentissages » (D. Sander, S. Denervaud, M. Franchini, E. Gentaz, 2017). De plus, ils rendent compte de l’importance de comprendre les émotions chez les élèves puisque les compétences émotionnelles seraient « bénéfiques à la fois au bien-être et aux performances scolaires ». (D. Sander et Al., 2017). Cette dernière idée rejoint alors ce que prescrivent les professionnels de l’Éducation) Nationale, comme nous l’avons mentionné dans la partie Enjeux institutionnels (cf. partie 1.1). Toutes ces recherches présentent des enjeux forts liés à l’enseignement et à l’apprentissage pour l’avenir. Considérons à présent l’enfant qui est au cœur de ce sujet.

2.3.4 Langage et émotions chez l’enfant

L’enfant, parce que son cerveau n’a pas atteint sa pleine maturité, a des difficultés à contrôler et maîtriser ses réactions émotionnelles. Cependant, dès l’âge de deux ans, les enfants ont des comportements comme celui qui consiste à donner un jouet à un autre enfant qui pleure, afin de le consoler. D’après M. Monfort et I. Monfort-Juarez, orthophonistes spécialistes des troubles du langage, ces comportements impliquent trois notions distinctes : la première est la notion de l’autre comme une personne qui possède ses propres émotions ; la deuxième, la notion de soi-même car l’enfant donne à l’autre quelque chose qui lui ferait plaisir personnellement ; et la troisième qui représente « la conscience de pouvoir modifier l’état interne des autres » à travers les actions ou les paroles de l’enfant (M. Monfort, 2001). Dans un premier temps, le jeune enfant éprouve des besoins et des émotions avant de pouvoir se les représenter. I. Bretherton et ses collaborateurs proposent un modèle évolutif dans lequel les enfants seraient

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15 capables : à 18 mois de comprendre la fonction des émotions ; quelques mois plus tard, de consoler leurs pairs ; à 2 ans, d’utiliser le langage pour attribuer des émotions à des sujets réels ou non ; puis entre 3 et 5 ans, d’exprimer avec plus de précision, de clarté et de complexité leurs émotions (I. Bretherton, I., J. Fritz, C. Zahn-Waxler, et D. Ridgway, 1986).

Si nous nous référons à ces analyses, nous comprenons alors que la façon de comprendre, d’agir et de parler les émotions se fait de manière naturelle et relève de l’inné chez les êtres humains. Nous pouvons alors nous demander s’il y a un intérêt à réaliser un travail spécifique sur les émotions. Cependant, lorsque l’enfant acquiert le langage, il a alors de nouvelles possibilités d’analyser le développement émotionnel d’autrui. En effet, d’après I. Bretherton et ses collaborateurs (M. Monfort, 2001), « même si l’on a prétendu que l’on peut comprendre les émotions sans utiliser le langage, la capacité de pouvoir en parler permet d’atteindre un niveau différent d’intersubjectivité que celui de la communication non verbale » (1986). Mettre des mots sur ses émotions permet à l’enfant, selon ces chercheurs en psychologie, de réguler et clarifier les relations avec ses pairs. Notre séquence s’adressant à des élèves de 3 et 4 ans et en raison des relations étudiées en amont entre émotions, apprentissages et langage, il nous parait d’autant plus opportun de travailler ce thème afin de surcroît, d’améliorer les relations entre élèves. Quoi qu’il en soit, il est intéressant de réaliser une évaluation diagnostique pour savoir où se situe notre groupe témoin en termes de compréhension et production orales des émotions de base. Nous la présenterons dans la partie 3.3.2.

2.2.5 Mettre des mots sur des maux : pourquoi et comment ?

D’après I. Filliozat, il ne faut pas nécessairement savoir gérer ses émotions, mais il faut savoir les accepter pour leur laisser la place de s’exprimer. L’adulte envers l’enfant devrait agir de la même manière : « il ne faut pas empêcher un enfant d’éprouver des émotions, mais plutôt lui fournir de bons moyens de les exprimer » (2017). Apprendre le langage des émotions a un impact sur le comportement social de l’enfant, sa capacité à surmonter le stress, à gérer son agressivité et à exprimer ses affects. Autrement dit, quand un enfant apprend à reconnaitre ses émotions et repère le message qui lui est envoyé par son corps, il s’adapte mieux et comprend ce qui est important pour lui et pour les autres. C’est dans cet objectif que la séquence proposée s’adresse à tous les élèves de la classe et qu’elle leur permet de s’exprimer de différentes façons (séances 1, 2 et 7 notamment). Par ailleurs, un enfant qui enfouit ses émotions, ses peurs, qui ne peut pas manifester sa joie ou sa colère, n’apprend pas à tenir compte de ce que lui ou les

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16 autres ressentent. Il ne développe pas d’empathie, pas de bienveillance : ni pour lui-même, ni pour les autres. Comme l’expose simplement C. Gueguen, « nommer ce que nous ressentons nous fait du bien » (2015). Elle explique qu’en effet, « quand nous sommes stressés, l’amygdale cérébrale provoque la sécrétion de molécules qui peuvent être très toxiques pour notre santé physique et psychologique ». Si l’individu parvient à mettre des mots sur ses émotions, l’activité de l’amygdale s’en trouve diminuée, la sécrétion de molécules comme l’adrénaline et le cortisol également et cet individu se ressent moins stressé donc plus apaisé. (C. Gueguen, 2015).

Les enfants expriment leurs émotions de façon brute, sans filtre. Ils ont besoin de savoir qu’ils peuvent compter sur des adultes, fiables, pour satisfaire ses besoins et accueillir leurs émotions. Ces derniers, notamment les enseignants que nous sommes, jouent donc un rôle essentiel dans la réception et la compréhension de ces émotions afin de développer la confiance de l’enfant en lui-même et en les autres. Cela est facilité par les nombreuses possibilités de s’exprimer grâce au langage oral puisque le champ lexical des émotions est très riche. Il se compose de verbes (pleurer, rire, trembler, avoir peur…), de noms (joie, tristesse, colère, peur…), d’adjectifs (apeuré, joyeux, souriant, content…) et d’expressions (trembler de peur, gai comme un pinson, des larmes de crocodile…). Les albums de jeunesse que nous avons utilisés pour cette séquence regorgent d’ailleurs de nombreux termes liés aux émotions. Nous détaillerons en particulier le vocabulaire employé dans notre album référent dans la partie 3.3.2 et en annexe 7.

Mon projet, destiné à développer le langage oral à travers la reconnaissance des émotions de base, s’est construit grâce à toutes ces recherches exposant la nécessité de travailler le langage oral à l’école maternelle (parties 2.1 et 2.2) et de développer ses compétences émotionnelles (partie 2.3) tout en considérant les prescriptions institutionnelles et scolaires (partie 1). Je vais désormais présenter mon expérimentation en classe et analyser les résultats obtenus.

3. Expérimentation en classe

3.1 Présentation du lieu et des élèves

Mon projet de langage a été mené au sein d’une école maternelle de la Drôme. Cette école de milieu urbain rassemble des élèves d’origines culturelles diverses et fait état d’une

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17 grande mixité sociale. Elle comprend quatre classes dont celle où j’enseigne à mi-temps : une classe de vingt-quatre élèves dont six élèves de petite section et dix-huit élèves de moyenne section. Depuis septembre 2017, l’école élémentaire et l’école maternelle qui y est rattachée, sont des pôles d’accueil pour les élèves allophones arrivants et répondent ainsi aux exigences d’une école inclusive. Comme évoqué dans la partie Enjeux scolaires (cf. partie 1.2), l’objectif de l’axe du Projet d’école relatif à la maîtrise de la langue française est d’ « accroître les connaissances lexicales des élèves » (Projet d’école 2017-2020). Mon projet en langage s’attache à développer les compétences lexicales et syntaxiques des élèves et s’inscrit donc dans cette perspective. A fortiori, depuis septembre 2017, le groupe scolaire – l’école maternelle et l’école élémentaire du même nom – est un pôle d’accueil pour les élèves allophones arrivants. Deux des six élèves allophones de l’école maternelle sont accueillis dans ma classe, Mouad Ali (PS) et Melisa (MS). Ils seront des apprenants privilégiés au sein de ce projet.

Je travaille selon des modalités d’apprentissage qui diffèrent en fonction des situations proposées. Le travail est réalisé en classe entière, en demi-groupes ou en petits groupes de six élèves (cf. tableau 1, partie 3.3.4). La séquence a eu lieu pendant six semaines, lors de la période 3, pour tous les élèves de la classe. Une à deux séances sont prévues par jour, en fonction des niveaux de classe et des activités proposées.

Les objectifs visés lors de cette séquence sont que les élèves soient capables de comprendre et d’acquérir le vocabulaire des émotions essentielles (vocabulaire passif), puis de l’utiliser afin qu’il fasse partie de leur vocabulaire actif. Cette distinction est présentée par le groupe départemental maternelle de la DSDEN de Reims. Il définit le vocabulaire passif comme « l'ensemble des mots que nous connaissons ou reconnaissons lorsque nous les entendons prononcer ou lorsque nous les lisons » et le vocabulaire actif comme « l'ensemble des mots que nous employons, que nous savons employer à l'oral et à l'écrit, [correspondant à une] manipulation consciente et maîtrisée » (2008). Mon rôle en tant qu’enseignante, est de travailler pour rendre les mots du vocabulaire passif plus clairs et donc susceptibles d’être utilisés activement. Comme l’exposent R. Goigoux et S. Cèbe, « il n’y a pas meilleurs professeurs de mots que les enseignants […] qui aident leurs élèves à les comprendre, à les ranger en mémoire […], à les employer dans de nombreux contextes et à les revoir jusqu’à ce qu’ils fassent partie du vocabulaire actif de tous les élèves » (2013).

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3.2 Problématique et hypothèses

Suite à la lecture de nombreux documents institutionnels et ouvrages présentés dans les partie 1 et 2, ainsi qu’à mon expérience de terrain et à ma formation à l’École Supérieure de Professorat et de l’Education (ESPE), j’ai rapidement compris l’importance donnée au langage oral et notamment à l’apprentissage du vocabulaire pour la réussite scolaire et ce, dès le cycle 1. D’ailleurs, A. Lieury, a montré, en 1998, que les corrélations entre réussite scolaire et connaissances lexicales sont plus élevées qu’entre réussite scolaire et niveau intellectuel. Ceci m’encourage d’autant plus à mener mon projet avec le plus de rigueur possible. Comme je l’ai précisé dans la partie 1.1, les professionnels de l’éducation s’accordent aujourd’hui à mettre la priorité sur l’enseignement du langage oral et proposent en ce sens des outils pour faciliter cet apprentissage. Cependant, utiliser le langage en tant qu’objet de communication pour acquérir le vocabulaire des émotions essentielles semble nécessaire, mais pas suffisant pour que les élèves en disposent dans leur vocabulaire actif. Ainsi, pour la conception de la séquence, je me suis inspirée des outils proposés, notamment de l’album écho défini par P. Boisseau et explicité précédemment (cf partie 2.2.4). De plus, le travail sur le thème des émotions favorise les apprentissages et le bien être individuel et collectif, comme présenté dans la partie 2.3. En effet, tout au long du cycle 1, chaque élève commence à se distinguer d’autrui et se construit comme personne singulière. Il semble alors nécessaire que chacun puisse mettre des mots sur ses ressentis. Mon rôle de professeur des écoles est de les accompagner en ce sens.

La problématique à laquelle s’attachera à répondre ce travail est la suivante : En quoi la mise en place d’une séquence sur le thème des émotions en classe de petite et moyenne sections permet-elle une amélioration des compétences en langage oral et contribue-t-elle à favoriser un climat scolaire favorable aux apprentissages ?

Pour tenter de répondre à cette problématique, j’émets les hypothèses suivantes : - Réaliser une séquence de langage oral dans laquelle le vocabulaire est un objet d’apprentissage propre et dans laquelle des séances de langage spécifiques sont proposées, permet à tous les élèves de disposer de ce vocabulaire dans leur répertoire langagier.

- Réaliser une séquence de langage oral sur le thème des émotions favorise le climat de classe, permettant ainsi d’assurer de bonnes conditions d’apprentissage.

P. Péroz, dans sa recherche CLEA – Comment Les Enfants Apprennent à parler à l’école maternelle – (2016) montre que « la mise en œuvre d’un modèle d’apprentissage qui se donne explicitement comme objectif le développement des compétences langagières est possible et

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19 plus efficient, quand l’ensemble des paramètres de l’acte d’enseignement est pris en compte : régulation des échanges, choix des supports, apprentissages, format de séance ». La séquence de langage que je propose cherche à atteindre les objectifs fixés, en prenant en compte ces réflexions. Je vais à présent préciser mon projet, en détaillant le groupe témoin, les évaluations effectuées, les supports utilisés et la séquence conçue et mise en œuvre dans cette classe de PS/MS.

3.3 Le projet

3.3.1 Le groupe témoin

Afin d’évaluer les progrès des élèves concernant les compétences visées, j’ai choisi de constituer un groupe témoin hétérogène en son sein : des élèves de PS et de MS, des filles et des garçons, et des élèves ayant des compétences langagières variées. De plus, l’école dans laquelle j’exerce étant un pôle d’accueil d’élèves allophones, je trouve intéressant d’étudier les progrès de Melisa et Mouad Ali. Sélyan, élève de MS, étant arrivé juste avant le début de la mise en œuvre de la séquence, j’ai jugé opportun de profiter de ces évaluations pour, entre autres, analyser son niveau de langage. Enfin, j’ai souhaité suivre spécifiquement l’évolution de ce travail auprès de mes deux élèves paraissant avoir des difficultés comportementales : Andreï et Maëlya. Cependant, les aléas de la classe et les absences de début d’année ont modifié le groupe témoin prévu. En définitive, le groupe témoin formé est le suivant :

Garçons Filles

PS MS MS

Allophone

Andreï Ilyes Louka Sélyan Sarah Samara Lina Kessy Melisa

3.3.2 Les évaluations

La scolarité à l’école maternelle nécessite une progression spiralaire qui suppose des retours sur des acquis antérieurs et une complexification progressive de ces acquisitions. Le groupe départemental « maternelle » du Val d’Oise explique en effet qu’ « apprendre est un processus continu » et que la programmation spiralaire des apprentissages « permet aux élèves de construire de façon régulière ce qu’ils ont appris » (2014). Le rôle de l’enseignant est alors de prendre des repères afin de savoir où en est chaque élève en termes de développement et d’apprentissages pour amener chacun à un degré supérieur de compétences, correspondant à sa

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20 zone proximale de développement (cf. partie 2.2.2). En ce sens, l’évaluation « constitue un outil de régulation dans l’activité professionnelle des enseignants » (BO Spécial n°2, 2015). Afin d’adapter au mieux la séquence aux besoins de mes élèves, il me faut donc savoir quelles compétences ces derniers avaient en termes de compréhension et de production orales des émotions essentielles. Il est alors nécessaire de réaliser une évaluation diagnostique. Le groupe témoin a donc bénéficié d’une évaluation pré-test avant le début de la séquence et d’une évaluation post-test à l’issue de celle-ci, pour mesurer les progrès réalisés. Les modalités ont quelque peu varié, point sur lequel je reviendrai dans l’analyse des résultats, partie 4.1.2. Entre ces deux évaluations, se sont déroulées cinq semaines et onze jours de travail. Cette courte période m’a encouragée à déterminer des compétences claires et précises pour chacune de mes séances (cf. annexe 3) et à avoir des objectifs réalistes pour la fin de période. L’objectif général, qui est de développer les compétences langagières des élèves, se traduit en différentes compétences. Être capable :

- d’identifier les émotions essentielles, - de verbaliser les émotions essentielles,

- de reconnaitre les causes d’événements en fonction du contexte,

- et de comprendre et d’exprimer des termes liés aux émotions et à des relations de cause à effet.

Concernant le matériel utilisé pour les évaluations, j’ai choisi des images et des photos représentant les émotions suivantes : la colère, la tristesse, la joie et la peur (cf. annexes 4 et 5). Ce matériel me semble pertinent pour permettre la stimulation de l’expression linguistique des émotions essentielles. Pour les deux premières parties des évaluations, il y a deux photos par émotion, donc huit en tout, plus deux photos intruses, représentant une pomme et une voiture. Pour la troisième partie, plusieurs images de situations sont proposées aux élèves. Pour chaque image, un ou plusieurs objectifs sont attendus et la tâche est accomplie à partir des questions posées. Le tableau ci-dessous répertorie les activités langagières évaluées avec un exemple de consigne donné à l’élève :

Situation d’évaluation Exemple de consigne

Réception orale « Montre-moi l’enfant qui est en colère. »

Production orale (visage) « Comment l’enfant se sent-il ? »

Production orale (situation) « Qu’est-ce que tu peux me dire par rapport à cette image ? »

Production orale (relance pour rester dans le thème des

émotions)

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21 J’ai choisi de ne pas inclure l’émotion de la sérénité (présente dans l’album référent) dans les évaluations, car cette dernière ne fait pas partie de la liste de mots de vocabulaire de P. Boisseau (cf. partie 2.2.4.). Cependant, je l’ai évoquée à maintes reprises, lors des rituels par exemple.

Comme le programme d’enseignement de 2015 le suggère, l’enseignant se doit d’être attentif à ce que les élèves disent ou font. En fonction des réponses, suite aux conseils de P. Boisseau (cf. partie 2.2.6.), il s’agit de proposer des relances et des feedbacks. Leurs réponses doivent être annotées sur une feuille et enregistrées par un dictaphone et/ou une caméra. L’étude de celles-ci a été réalisée ultérieurement, grâce à des critères définis (cf. annexe 6). J.A. Rondal expose que les évaluations de langage oral ont différentes fonctions. Elles servent à « obtenir des précisions immédiatement exploitables individuellement, à contribuer au dépistage et à la prévention de difficultés persistantes [et] à accéder à une meilleure connaissances des réalités dans la classe » (2001). En effet, ces évaluations devraient permettre de savoir quelles compétences sont acquises ou non en termes de réception et production orales chez mes élèves du groupe témoin. En outre, elles serontutiles pour analyser les propos de mes élèves et relever d’autres compétences (la rapidité des réponses, la prononciation…) ou des difficultés (de type cognitif ou pragmatique par exemple), sachant que ces aspects ne seront pas étudiés spécifiquement dans le cadre de ce travail.

3.3.3 Les supports utilisés

La séquence débute suite à la présentation de l’album intitulé La couleur des émotions de Anna Llenas (2012), traduit par Marie Antilogus. Au début de celui-ci, une petite fille rencontre son ami, le monstre des couleurs. Ce dernier est tout « barbouillé », il se sent bizarre, désorienté : ses émotions sont sens dessus dessous. La petite fille va l’aider à reconnaître ses émotions et à les ranger dans des flacons étiquetés pour qu’il retrouve son bien-être.

J’ai choisi de baser ma séquence sur cet album, car il possède de nombreux intérêts. Tout d’abord, ce support présente l’avantage d’être animé, c’est-à-dire que les pages contiennent des mécanismes développant en volume ou mettant en mouvement certains de leurs éléments. Si les élèves ne comprennent pas ce qu’explique la petite fille, les images et l’animation, très explicites, peuvent les aider. En effet, ils peuvent ainsi associer plus facilement une image mentale à chaque situation dans l’histoire. Ensuite, les protagonistes de cet album permettent aux élèves de s’identifier, soit au monstre désorienté, soit à la petite fille aidante. De plus, c’est

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22 un dialogue qui est mis en place entre les deux personnages, à la deuxième personne du singulier. Les élèves se sentent alors directement concernés par le problème du monstre. Aussi, associer le nom de l’émotion avec une couleur, une histoire et un contexte en trois dimensions semble être une bonne combinaison pour que les élèves soient attentifs et traitent au mieux les informations de l’histoire. Du point de vue lexical, cet album contient de nombreux adjectifs, noms et verbes en lien avec les émotions travaillées, dont certains (52 mots sur 86) font partie de la liste des 1750 mots à travailler pour les enfants de 4 ans proposée par P. Boisseau (cf. annexe 7).

La ritualisation a de nombreux intérêts pour les élèves de classe maternelle comme « développer la mémoire, la confiance en soi et l’autonomie par des repères constants » et permet de construire, par la répétition, des savoirs et des savoir-faire en « développ[ant] leurs capacités d’anticipation » (A. Robinson, 2012). À partir de cet album, j’ai donc conçuplusieurs rituels dans la classe dès le début de la séquence, comme le rituel des « bocaux à émotions ». Cette activité de langage donne la possibilité aux élèves de s’exprimer sur les émotions qu’ils ressentent à la fin de la matinée, d’une activité ou de la journée. Ce rituel est complété par un outil nommé « le panneau des émotions », où les élèves ont la possibilité, dès l’accueil, d’aimanter leur étiquette prénom sur l’une des émotions présentées et peuvent la changer de place au cours de la journée, en fonction des émotions ressenties. L’utilisation des panneaux permet de se détacher un peu de l’émotion vécue. Il s’agit là de rituels constituant des temps de classe, spécifique à la période 3 (et prolongés par la suite), fractionnés dans la journée, offrant la liberté à chacun de s’exprimer.

L’album La couleur des émotions est donc un déclencheur de la séquence, cependant il n’est pas le seul support de travail utilisé. R. Goigoux et S. Cèbe, affirment à ce sujet qu’ « il n’y pas meilleurs pourvoyeurs de vocabulaire nouveau et de connaissances du monde que les auteurs de textes » (2013). J’ai donc choisi de multiples albums en lien avec mon thème (cf. bibliographie), suscitant ainsi des émotions et transmettant aux élèves un certain patrimoine culturel. Par ailleurs, divers jeux peuvent être proposés comme des jeux de tri, de « Kim », de loto, de mémoire, des jeux d’association, ainsi que des activités de manipulation (cf. annexe 3). Comme le programme d’enseignement le rappelle, il est important que les élèves jouent car « le jeu favorise la richesse des expériences vécues et alimente tous les domaines d’apprentissage » et leur permet d’être acteurs de leurs apprentissages tout en produisant le vocabulaire attendu (BO Spécial n°2, 2015). Ces différentes situations d’apprentissage permettent aux élèves d’être à la fois en réception orale mais aussi en compréhension et en production orales.

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23 3.3.4 La séquence

La séquence proposée à mes élèves de petite et moyenne sections est composée de dix séances et d’activités complémentaires. Elle est représentée dans le tableau 2. Chaque séance est détaillée et analysée brièvement en annexe 3. Le vocabulaire à acquérir étant relatif aux émotions, je me suis basée sur les émotions citées dans l’album comme support pour la séquence. Le but de cette séquence est d’accompagner les élèves à reconnaître et à nommer les émotions essentielles, notamment en leur faisant remarquer le langage corporel associé à chaque émotion : sourcils froncés quand on est fâché, sourire quand on est content, larmes quand on est triste, yeux grands ouverts quand on a peur, etc. L’objectif final est évidemment de tirer parti de ces apprentissages sur les émotions afin de les mettre en pratique dans la vie de la classe, voire dans la vie quotidienne pour que chaque enfant sache mieux réagir aux différentes situations de la vie. À plus long terme et comme mentionné précédemment (cf. partie 2.3.3), il est important que les enfants sachent « lire » leurs propres émotions et celles des autres, parce que cela facilitera leurs relations sociales, leur permettra d’adapter leur comportement aux situations vécues et sera bénéfique pour leurs apprentissages scolaires. Pour atteindre cet objectif, ce travail spécifique de langage sur les émotions ne sera sans doute pas suffisant. Il devra être accompagné, entre autres, par des activités de classe supplémentaires et par la gestion de situations quotidiennes de classe qui auront lieu tout au long de leur scolarité.

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Tableau 1 : Séquence menée en classe

Séances Compétences Activités

S1 Évaluer les élèves. (évaluation

pré-test)

Les élèves du groupe témoin sont évalués individuellement en réception et en production orales grâce à des photos et images mettant en scène des enfants exprimant différentes émotions.

S2 Pratiquer divers usages du

langage oral : décrire.

Écouter de l’écrit et

comprendre : comprendre un

texte lu, être capable

d’identifier le thème et les éléments de l’histoire.

Description de l’album La couleur des émotions + la première de couverture. Émission d’hypothèses sur l’histoire, le thème. Lecture de l’album en classe entière. La PE demande aux élèves de raconter l’histoire avec leurs mots. Validation des hypothèses. Identification de chaque émotion présentée : joie, peur, colère, tristesse et sérénité (Comment le monstre se sent-il ?).

Présentation des bocaux des émotions avec notre mascotte.

S3 S'exprimer dans un langage

syntaxiquement correct et

précis. Reformuler pour se faire comprendre.

Elèves en petits groupes. La PE demande à chacun « qu’est-ce qui te rend joyeux / tu es joyeux quand quoi ? » et note sous forme de dictée à l’adulte.

De même pour la colère, la tristesse et la peur.

S4 Reconnaitre et nommer les

parties du visage, représenter les 4 émotions sur un visage.

1) Identifier différentes émotions dans l’album Content, fâché, puis manipuler les différentes parties du visage pour recomposer le visage en fonction de chaque émotion.

2) Représenter les quatre émotions sur des visages vierges, en pâte à modeler.

S5 Mimer et « jouer » les

différentes émotions.

Pratiquer divers usages du langage oral : expliquer.

En petits groupes et à partir d’albums de jeunesse, les élèves identifient l’émotion présentée, puis la miment. La PE prend chaque élève en photo et demande la validation par les pairs : est-ce que l’on reconnait la joie ? Comment reconnait-on cette émotireconnait-on ? En classe entière : reconnait-on se déplace en exprimant les différentes émotions.

S6 Affiner son écoute, parler d'un

extrait musical et exprimer son ressenti.

Classe entière et petits groupes. Les élèves écoutent un extrait musical et posent leur étiquette prénom sur l’émotion qu’ils ressentent en écoutant l’extrait. Les élèves colorient un monstre parmi quatre exprimant les différentes émotions.

S7 Décrire une image

(reproductions d’œuvres

d’art), identifier différentes émotions, les associer à des émoticônes.

En petits groupes, les MS décrivent les reproductions une à une. Ils identifient la ou les émotions représentées. Individuellement, ils découpent et collent les émoticônes correspondant à chaque œuvre.

S8 Réaliser une composition

plastique / personnelle et l’associer à une émotion.

Choisir différents outils,

médiums en fonction d’un projet les utiliser en adaptant son geste.

Réalisation d’un livret personnalisé des émotions.

En petits groupes, la PE demande aux élèves quelle couleur utiliser pour représenter telle émotion. Les élèves représentent chaque émotion en utilisant une couleur et des outils différents. La PE assemble chaque page pour réaliser les livrets personnalisés avec les dictées à l’adulte et les photos de chacun.

S9 Pratiquer divers usages du

langage oral : décrire,

expliquer, évoquer.

En petits groupes : exploitation des livrets entre élèves : quelle émotion ressens-tu là ? Quand ressens-ressens-tu cette émotion ? Exploitation du livret des émotions de la classe.

S10 Évaluer les élèves

(Evaluation post-test)

Les élèves du groupe témoin sont évalués individuellement en réception et en production orales grâce à des photos et images mettant en scène des enfants exprimant différentes émotions.

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25

4. Résultats

4.1 Description générale des résultats

Le tableau de résultats présenté en annexe 8 et recensant le nombre de points attribués pour chaque élève en production et réception orales, me permet de prendre conscience de l’évolution des compétences langagières de mes élèves et met en lumière les progrès réalisés suite à la séquence mise en œuvre. Dans ce tableau, les étapes nommées pré-test et post-test sont différenciées ainsi que les activités langagières de réception et de production orales. Chaque élève obtient une note sur 60 me permettant de comparer les résultats obtenus.

Le graphique 1, traduisant ces résultats, tend à valider la première partie de l’hypothèse émise dans la partie 3.2. En effet, ce graphique montre que tous les élèves de mon groupe témoin ont progressé. Néanmoins, les taux d’évolution observés sont très variables puisque le plus faible pourcentage d’augmentation s’élève à 13%, alors que le plus fort atteint 72% :

Afin de comprendre ces évolutions, je vais décrire les résultats concernant chaque activité langagière, puis je les analyserai dans la partie 5.

4.2 Résultats obtenus pour la réception orale

En ce qui concerne la réception orale, je remarque que le score total de tous les élèves est de 125 sur 180 lors de l’évaluation pré-test et passe à 178 sur 180 lors de l’évaluation post-test. Les plus faibles scores initiaux passent eux de 11/20 à 19/20 pour Ilyes et de 11/20 à 20/20 pour Andreï, entre les deux évaluations. Le tableau 2 recense les scores obtenus par les élèves en réception orale, lors du pré-test et du post-test :

0 10 20 30 40 50 60 70 80

Melisa Andreï Lina Sélyan Ilyes Louka Samara Sarah Kessy

Graphique 1 : Pourcentage d'évolution du score global entre le pré-test et le post-test

(29)

26 Scores /20 Melisa Andreï Lina Sélyan Ilyes Louka Kessy Samara Sarah

Pré-test 18 11 15 11 11 11 16 14 18

Post-test 20 20 20 20 19 19 20 20 20

Tableau 2 : Scores réalisés par les élèves en réception orale

4.3 Résultats obtenus pour la production orale

En ce qui concerne la production orale pour laquelle je montrais aux élèves des photos d’enfants exprimant les quatre émotions essentielles, je remarque que huit élèves sur neuf ont progressé et une a stagné, cette dernière obtenant un score de 18/20 lors des deux évaluations.

Le tableau 3 recense les scores obtenus par les élèves en production orale, lors du pré-test et du post-pré-test. Le cas de Melisa, sera analysé en partie 5.1.2.

Scores /20 Melisa Andreï Lina Sélyan Ilyes Louka Kessy Samara Sarah

Pré-test 3 12 11 13 13 17 18 16 18

Post-test 16 19 20 20 18 20 18 18 20

Tableau 3 : Scores réalisés par les élèves en production orale

4.4 Résultats obtenus en réception orale et en production orale des émotions

Concernant la réception et la production orales des mots de vocabulaire travaillés au cours de la séquence, je remarque que tous les élèves ont progressé. Voici le graphique représentant le pourcentage d’évolution de chaque élève du groupe témoin :

Le graphique 2 montre que les élèves ayant obtenu les plus faibles scores lors du pré-test (en jaune dans le graphique) obtiennent un taux d’évolution compris entre 55% et 90%. Tous les élèves du groupe témoin obtiennent, lors du post-test, un score supérieur ou égal à 36 sur 40.

0 20 40 60 80 100

Samara Melisa Andreï Sélyan Ilyes Lina Louka Kessy Sarah

Graphique 2 : Pourcentage d'évolution des scores concernant le vocabulaire des émotions, entre le pré-test et le post-test.

Figure

Graphique 1 : Pourcentage d'évolution du score global  entre le pré-test et le post-test
Graphique 2 : Pourcentage d'évolution des scores concernant le vocabulaire  des émotions, entre le pré-test et le post-test.
Graphique 3 : Résultats des élèves concernant la partie  "production  orale à partir de situations"

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