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CHAPITRE V VERS UNE GESTION INTÉGRÉE DES MIGRATIONS

1. Vers une politique communautaire en matière d’immigration

On observera que, selon les premières estimations démographiques pour 2000, si l’Union européenne compte aujourd’hui 1,5 million d’habitants de plus qu’il y a un an (377,6 millions au total), c’est en particulier grâce aux flux migratoires.

La mise en place d’une politique européenne commune en matière d’immigration passe par une coordination des actions - dans un cadre communautaire et en assurant la transparence - qui sont à l’heure actuelle menées au niveau de chaque État membre, en raison de leurs effets sur d’autres volets de la politique communautaire (par exemple, la suppression des contrôles aux frontières intérieures et la stratégie européenne pour l’emploi, la politique de développement1, etc).

Les politiques d’immigration et d’asile devraient être, dans la mesure du possible, intégrées plus expressément dans les programmes communautaires concernant les pays tiers.

Il convient de veiller à ce que le cadre légal ne coupe pas les migrants de leur pays d’origine, par exemple en s’assurant qu’ils peuvent s’y rendre sans perdre leur statut dans le pays d’accueil et circuler en fonction de l’évolution de la situation dans leur pays d’origine et ailleurs dans le monde. Une telle conception inciterait les immigrés à prendre part au développement économique de leur pays d’origine, non seulement en envoyant des fonds aux membres de leur famille, mais aussi en soutenant financièrement des projets de

1 Déclaration du Conseil et de la Commission sur « La politique de développement de la Communauté européenne », DE 105, Bruxelles le 10 novembre 2000.

développement, des entreprises… Cela pourrait aboutir dans certains cas à leur retour volontaire dans le cadre de mesures de réintégration.

La coopération entre les pays d’origine et les pays de résidence des immigrés doit être fondée sur un dialogue avec les gouvernements ainsi qu’avec les immigrés eux-mêmes et leurs associations, si l’on veut s’assurer de la prise en compte des mouvements migratoires dans les stratégies économiques, sociales et de développement des pays concernés (par exemple, en favorisant des institutions publiques et financières plus efficaces, les programmes de formation et de qualification de la main-d’œuvre, ainsi que les entrées de capitaux étrangers dans les projets, y compris ceux qui sont réalisés par les émigrants dans leur pays d’origine).

Le traitement équitable des ressortissants de pays tiers résidant légalement sur le territoire des États membres, par le biais d’une politique d’intégration ayant pour ambition de leur offrir des droits et des obligations comparables à ceux des citoyens de l’Union européenne, constitue un élément indispensable à la création de l’espace de liberté, de sécurité et de justice décidée à Tampere.

La Commission a proposé que la coordination communautaire des régimes de sécurité sociale soit étendue aux travailleurs salariés et non salariés qui sont ressortissants de pays tiers et sont assurés dans un Etat membre.

La Commission a proposé d’améliorer le statut légal des membres de la famille de travailleurs de l’Union qui sont ressortissants de pays tiers.

Pour les ressortissants de pays tiers qui sont des résidents de longue durée, des propositions visent à préciser les droits qui leur seront accordés, les conditions dans lesquelles leur statut peut être perdu, leur protection contre l’expulsion et le droit de résider dans un autre État membre.

La régulation des flux migratoires implique un dialogue soutenu entre les pays d’accueil, les pays de transit, les pays d’origine et les immigrants eux-mêmes. Le Conseil a demandé que les démarches en vue d’élaborer une politique commune en matière de visas pour l’Union européenne soient intensifiées. Une gestion efficace des flux migratoires nécessite une procédure de suivi et doit s’accompagner de mesures destinées à réguler les mouvements. Dans ce cadre, une priorité plus grande sera accordée au retour volontaire des personnes qui n’ont pas été admises dans un État membre ou qui n’ont plus le droit de demeurer dans l’Union européenne.

L’analyse de la situation dans le domaine des flux migratoires dans l’Union européenne donne à penser qu’il convient d’adopter une nouvelle approche de l’immigration, plus flexible et commune à tous les États membres. Une telle politique anticipative en matière d’immigration devrait se fonder sur la reconnaissance du fait que les pressions migratoires continueront et qu’une immigration ordonnée peut présenter des avantages pour l’Union européenne, pour les migrants eux-mêmes ainsi que pour leur pays d’origine. L’ouverture de canaux d’immigration à des fins économiques en vue de satisfaire des besoins urgents de main-d’œuvre qualifiée et non qualifiée a déjà commencé dans un certain nombre d’États membres. D’une manière générale, les mouvements migratoires changent de direction, augmentent et diminuent en fonction des

situations économiques et démographiques tant dans les pays de départ que dans les pays de destination. Par conséquent, afin de réguler les flux migratoires de façon satisfaisante et de réduire l’immigration clandestine, l’Union européenne doit adopter une stratégie coordonnée prenant en considération tous les aspects étroitement liés à la question des flux migratoires et travailler en partenariat étroit avec les pays d’origine et de transit.

Introduire la question de la migration de la main-d’œuvre dans le débat sur la mise en place d’une politique économique et sociale pour l’Union européenne permettrait aussi de renforcer les politiques destinées à lutter contre le travail au noir et l’exploitation économique des immigrés qui, à l’heure actuelle, alimentent la concurrence déloyale dans l’Union.

L’égalité en matière de salaires et de conditions de travail n’est pas seulement favorable aux immigrés mais à la société elle-même qui peut alors tirer pleinement profit de la contribution des immigrés à la vie économique et sociale.

La Commission considère que le meilleur moyen d’aboutir à une politique réglementée en matière d’immigration est de mettre en place un cadre général à l’échelon européen. Le principe directeur d’une politique européenne en matière d’immigration doit être le suivant : les personnes admises doivent bénéficier, pour l’essentiel, des mêmes droits et obligations que les ressortissants de l’Union européenne, ces droits et obligations pouvant toutefois être progressifs et liés à la durée du séjour prévue dans leurs conditions d’admission. Une politique européenne de l’immigration doit s’occuper des répercussions de l’immigration tant dans les pays de départ que dans les pays de destination. L’admission d’immigrants économiques devrait de toute évidence répondre aux besoins du marché, notamment en personnes extrêmement qualifiées, mais aussi en main-d’œuvre moins ou non qualifiée ou encore en travailleurs saisonniers. Les politiques d’admission d’immigrants économiques doivent permettre à l’Union européenne d’apporter une réponse rapide et efficace aux besoins du marché du travail à l’échelon national, régional et local en reconnaissant la nature complexe et rapidement changeante de ces besoins et donc la nécessité d’une plus grande mobilité entre États membres pour les migrants arrivant dans l’Union européenne.

En ce qui concerne l’admission des immigrants, la Commission préconise :

une évaluation des niveaux d’immigration appropriés. Les États membres doivent demeurer compétents pour décider de leurs besoins en ce qui concerne les différentes catégories de travailleurs migrants.

Toutefois, un nouveau processus doit être mis en place qui repose sur la coopération, l’échange d’informations et l’établissement de rapports.

Les États membres exposeraient, dans ces rapports, leurs intentions futures en matière d’immigration en fournissant, notamment, des projections sur le nombre de travailleurs migrants qu’ils souhaitent admettre et une indication des niveaux de qualification recherchés. La nécessité de définir une approche souple de besoins économiques qui évoluent autorise à penser que les quotas sont difficiles à appliquer et qu’il serait préférable d’adopter un système approprié d’objectifs indicatifs. Cette approche serait étroitement liée aux besoins du marché

du travail mais prendrait aussi en considération les accords conclus avec les pays d’origine ;

une définition d’un cadre juridique commun dans le domaine de l’admission : la Commission adoptera prochainement des propositions de directives portant sur les conditions d’admission et de séjour dans l’Union européenne de ressortissants de pays tiers qui souhaitent y exercer une activité professionnelle salariée ou indépendante, ou une activité non rémunérée, ou y suivre des études ou une formation professionnelle. L’ensemble de ces directives formera un cadre juridique souple fondé sur les principes suivants : transparence et rationalité, modulation des droits conférés en fonction de la durée du séjour, clarification des procédures de demande et d’examen, amélioration de l’accès à l’information.

Dans ses propositions pour 2001, la Commission a invité les États membres à répondre aux besoins des catégories défavorisées, comme celle des travailleurs migrants résidant au sein de l’Union, en vue de les aider à s’intégrer sur le marché du travail, ainsi qu’à fixer des objectifs nationaux compte tenu de la situation nationale. Toutefois, il est également fondamental de créer une société accueillante et de reconnaître que l’intégration est un processus à double sens requérant une adaptation tant de l’immigré que de la société qui l’accueille. L’intégration est un processus à long terme et une attention particulière doit être accordée aux immigrés de la seconde génération, y compris ceux nés dans l’Union européenne, afin de garantir que certains problèmes ne conduisent pas à l’exclusion sociale et à la criminalité. Dans cette perspective, les politiques d’intégration devraient accorder une grande importance aux femmes et à la famille. Alors que l’intégration relève en premier lieu de la compétence des États membres, les gouvernements devraient partager leurs prérogatives en la matière avec la société civile, notamment à l’échelon local, où des mesures d’intégration doivent être mises en œuvre.

Il est indispensable de disposer de plus d’informations concernant les flux migratoires et les tendances en matière de migrations vers l’Union européenne et au départ de celle-ci, ainsi que sur le rôle des migrants sur le marché du travail et des effets généraux des migrations dans l’Union européenne et dans les pays d’origine et de transit. Il convient de poursuivre les efforts destinés à permettre de mieux comparer les statistiques des migrations et à soutenir des travaux de recherche comparée sur les migrations.

La Commission propose que les résultats de ces débats soient examinés au second semestre 2001 au Sommet de Laaken1.

1 Fin de la Présidence Belge.