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Cadre théorique

2.1 Le développement professionnel des enseignants de mathématiques au travers de l’action de l’action

2.1.3 Une modélisation des niveaux de l’activité des enseignants

Nous présentons dans cette partie le modèle proposé par Margolinas (2004) pour analyser l’activité des enseignants de mathématiques : d’abord nous présentons l’apport du cadre de Margolinas (2004) pour notre travail. Ensuite, nous mettons en relation les concepts de situations dans le cadre de la théorie des situations didactiques (Brousseau, 1997) et dans les études de Vergnaud (2011). Nous poursuivons par présenter le regard de Margolinas (2004) sur le travail des enseignants à partir de la structuration de leur milieu.

Margolinas (2004) a présenté une étude basée sur la théorie des situations didactiques (TSD) dans lesquelles elle souligne le point de vue des élèves et le point de vue de l’enseignant en situation didactique. Nous nous intéressons dans notre thèse au point de vue de l’enseignant qui prépare des situations didactiques. Margolinas (2004) propose, dans le cas des enseignants, un ‘modèle descendant’ pour analyser les activités des enseignants autour de la situation didactique.

Le concept de situation didactique est défini par Brousseau comme un triplet constitué d’un

sujet qui apprend, d’un savoir à être enseigné (par quelqu’un) et d’un milieu (Brousseau, 1997).

Le milieu est lié au réel (soit matériel soit symbolique), il se compose des rétroactions qui sont externes à ce sujet. Il est important de faire ici une distinction dans notre usage des concepts de classe de situations (Vergnaud, 2011) et de situations didactiques (Brousseau, 1997). Nous parlerons de situations didactiques quand nous nous intéressons aux situations relatives à l’enseignement des mathématiques aux élèves. Nous utiliserons le concept des classes de situations pour tous les autres types de situations (quelconques) auxquelles le sujet fait face en développant de nouvelles connaissances, tel que les a définies Vergnaud (2011).

Margolinas (2004) a mis en évidence dans la TSD, une partie qui apparaissait sous-estimée dans les analyses proposées par Brousseau (1997). Elle souligne

L’action du professeur n’est pas une action qui se situe uniquement en classe. La planification des chapitres et des leçons, l’étude des documents sont des activités fondamentales du point de vue didactique et qui n’ont pas lieu principalement en classe (Margolinas, 2004, p. 73).

L’enseignant prépare sa leçon en prenant en compte des contraintes institutionnelles et aussi en mobilisant toutes ses connaissances accumulées au long de sa carrière. Pour prendre en compte cela, Margolinas (2004) développe un modèle d’analyse des niveaux d’activité d’un

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enseignant qui va prendre comme point de départ une situation didactique (S0), mais qui considère d’autres activités qui sont liées à création de celle-ci. Nous présentons dans la Figure 2.1 ces niveaux.

Figure 2.1 - La structuration du milieu (Margolinas, 2004, p. 52)

Le niveau noosphérien ou idéologique (dénoté par [+3]) est caractérisé par les réflexions générales sur l’enseignement des mathématiques. Ce niveau d’activité concerne les valeurs, la conception de l’apprentissage et de l’enseignement. Selon Margolinas (2004, p. 78), ce niveau concerne « une situation non finalisée, dans laquelle il n’y a pas d’enjeu mais seulement les éléments qui permettront à la situation suivante de se construire ». Le milieu de l’enseignant est lié à la construction (M+3) de son enseignement, il est alors le professeur noosphérien (P+3 : P-Noosphérien) dans une situation noosphérienne. Dans le cas du P-noosphérien, les visions sur comment les élèves apprennent vont influencer l’activité de l’enseignant, par exemple s’il suppose que dans l’apprentissage les élèves doivent être plus actifs pour construire leurs connaissances, ceci guidera toute la préparation de son enseignement.

Le niveau de construction ou de conception d’un thème (dénoté par [+2]) dans lequel « l’activité du professeur est de concevoir les grandes lignes de l’enseignement d’un thème » (Margolinas, 2004, p. 142). Ce niveau concerne les grandes décisions prises pour traiter un thème donné : l’organisation dans l’année, les concepts à travailler, entre autres. Nous avons, dans ce niveau,

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un milieu de création d’un projet (M+2) dans lequel il a le rôle de professeur constructeur (P+2 : P-constructeur) dans une situation de projet (S+2). Nous pouvons imaginer que l’enseignant veut préparer l’enseignement des fonctions, alors, il doit prévoir quelles compétences les élèves doivent développer, quelle connaissance seront mobilisées, quels concepts seront traités, quelles progressions adopter etc…

Le niveau du projet de leçon (dénoté par [+1]) est relatif à la préparation de la leçon par les enseignants. Ce niveau, le plus proche de la situation didactique, est plus local et lié à l’action finalisée de l’enseignant, l’enseignant prépare sa leçon pour enseigner X. Cette leçon est projetée (milieu de projet, M+ 1) pour un élève réflexif pour lequel le professeur projeteur (P+1 : P-projeteur) va préparer une séquence d’actions pour atteindre ses objectifs (situation de projet, S+1). Dans l’exemple de l’enseignant qui veut enseigner les fonctions, il aura besoin de préparer une séance pour enseigner la fonction affine, par exemple.

Nous venons de reprendre les trois premiers niveaux du modèle de Margolinas (2004) qui composent ce qu’elle appelle des niveaux sur-didactiques. Ce bloc souligne les tensions présentes dans le travail des enseignants : entre leur enseignement et l’apprentissage des élèves, ou encore entre la préparation de leur travail et les contraintes institutionnelles.

Les deux derniers niveaux d’activité des enseignants se situent au moment de la mise en œuvre de la leçon. Le premier est celui de la situation didactique (dénotée [0]) dans laquelle le

professeur (P0 : Professeur) et l’élève (E0 : Élève) cohabitent dans un milieu d’apprentissage (M0).

Dans notre exemple sur l’enseignement de la fonction affine, c’est dans ce niveau que l’enseignant met en œuvre la leçon qu’il a prévue. Pendant, la mise en œuvre, nous passons au deuxième niveau d’observation ou de dévolution (dénoté par [-1])), puisque l’élève a le rôle

d’apprenant (E-1) et le professeur d’observateur (P-1 : P-observateur). Le professeur est face

à la situation d’apprentissage (S-1). Dans notre exemple sur l’enseignement sur la fonction affine, l’enseignant s’assure qu’il atteint les objectifs établis.

Dans ce modèle, les niveaux ne sont ni chronologiquement séparés, ni déconnectés. À titre d’exemple, dans le moment de mise en œuvre d’une séance (niveau 0), à travers une interaction inattendue avec les élèves, l’enseignant peut mettre en cause ses valeurs sur l’enseignement des mathématiques (niveau +3). L’observation du travail des élèves (niveau -1) peut aussi amener l’enseignant à changer son projet d’enseignement du thème. Un modèle est toujours insuffisant pour embrasser la complexité et la dynamique de l’activité de l’enseignant. En revanche, la mobilisation d’un modèle nous donne une direction pour analyser le travail des enseignants. En particulier, ce modèle permet d’analyser l’activité des

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enseignants dans plusieurs niveaux qui nous semblent fondamentaux pour la conception de leur travail.

L’enseignant représenté dans ce modèle développe une activité réflexive, dans tous les niveaux, en apprenant dans toutes les activités qu’il réalise. Il développe ses connaissances sur les mathématiques et sur l’enseignement des mathématiques en construisant son projet d’enseignement (soit pour tout un thème, soit pour une leçon), en mettant en œuvre ses idées, en observant et agissant sur le travail des élèves. On analyse ainsi un sujet qui développe ses connaissances dans son activité et dans son contexte de travail : le regard sur les niveaux d’activité des enseignants proposé par Margolinas (2004) nous semble ainsi tout à fait important.

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