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2. Trésor minéral et biodiversité végétale

2.2. Tolérance aux métaux lourds des végétaux supérieurs

2.2.3. Tolérance au cuivre et au cobalt

l’hyperaccumulation du Zn et du Cd a permis de mettre en évidence quatre locus responsables de l’accumulation du Cd et du Zn dont un des locus qui est responsable de l’accumulation dans les racines est commun aux deux métaux (Assunção et al. 2006; Deniau et al. 2006). Chez A. halleri, une étude (Filatov et al. 2007) a également permis d’identifier deux locus responsables de l’accumulation du zinc.

L’accumulation et l’hyperaccumulation des autres métaux lourds restent peu connues ; l’élargissement d’études phytogéochimiques semble nécessaire pour accéder à la compréhension de la complexité de ce phénomène.

2.2.3. Tolérance au cuivre et au cobalt

Le cuivre est un nutriment essentiel pour les plantes en faible concentration dans le sol (5 à 10 mg Cu kg-1) (Marschner 1995). Il rentre dans la composition de nombreuses enzymes et participe au flux d’électrons des réactions d’oxydoréduction dans les cellules végétales (Ouzounidou et al. 1995 ; Burkhead et al. 2009). A l’opposé, le cobalt n’est pas considéré comme un élément essentiel même s’il intervient dans le processus de fixation de l’azote atmosphérique chez les bactéries symbiotiques associées aux légumineuses. L’excès de ces deux métaux est toxique pour le développement des plantes. Seules les espèces qui ont développé une tolérance au Cu et au Co sont capables de se développer et se reproduire dans ces conditions extrêmes (Tableau 1).

Tableau 1 Teneurs en cuivre et en cobalt des sols et plantes (médiane, minimal et

maximale en mg kg-1) (Brooks & Malaisse 1985 ; Misra 2000 ; Epstein & Bloom 2005).

Cu Co

Sols normaux 55 (3-110) 0,03-2

Plantes sur sols normaux 6 (2-50) < 1

Sols des collines

cupro-cobaltifères 10000 (100-90000) 1000 (10-100000)

Plantes des collines

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Les cuprophytes (Duvigneaud & Denaeyer-De Smet 1963) correspondent à un groupe de plantes spécifiques qui se développent uniquement ou montrent une fréquence et une abondance particulièrement élevées sur les sols cuprifères (Duvigneaud & Denaeyer-De Smet 1963; Ernst 1974, 1990) (Tableau 1). Les cuprophytes représentent un élément remarquable de la végétation des sites cuprifères du Sud de l’Afrique centrale. Une quarantaine de « cuprophytes absolues » sont connues de ces habitats (Leteinturier 2002 ; Whiting et al. 2004). La tolérance aux concentrations extrêmes en Cu dans les sols (1000-50000 mg kg-1) a été démontrée expérimentalement chez quelques cuprophytes uniquement, deux « cuprophytes absolues » Haumaniastrum robertii (Lamiaceae) (Morrison 1980 ; Morrison et al. 1979) et Silene cobalticola (Caryophyllaceae) (Baker et al. 1983) et chez trois « cuprophytes non absolues » H. katangense, Aeolanthus biformifolius (Morrison 1980 ; Morrison et al. 1979) et Elsholtzia haichowensis (Lou et al. 2004) (Lamiaceae). Les cuprophytes constituent un modèle intéressant pour l’étude des mécanismes physiologiques et des processus évolutifs de la tolérance au cuivre (Brooks & Malaisse 1990).

Même si la tolérance au cuivre a été très peu étudiée chez les cuprophytes, elle est bien documentée chez les pseudométallophytes et représente avec la tolérance au zinc, le premier modèle d’études de l’adaptation des plantes aux métaux lourds (Antonovics et al. 1971 ; Ernst 1974). Elle a été mise en évidence chez de nombreuses pseudométallophytes Agrostis

capillaris (McNeilly & Bradshaw 1968), Agrostis stolonifera (Wu et al. 1975), Silene vulgaris (Schat & Ter Bookun 1992) qui ont contribué largement à l’avancée des

connaissances sur la génétique et l’évolution de la tolérance aux métaux lourds.

La tolérance au cuivre est un caractère héritable (McNeilly & Bradshaw 1968), dominant chez Mimulus guttatus (Allen & Sheppard 1971) et de degré variable entre les populations métallicoles (Antonovics 1966). L’analyse de la ségrégation du caractère de la tolérance au cuivre dans des croisements entre populations métallicoles et non métallicoles chez Mimulus guttatus a permis de déduire la présence d’un ou quelques gènes dominants dont l’expression est sous l’influence de gènes modificateurs (Macnair 1983 ; Macnair 1993 ; Macnair et al. 2000). Chez Silene vulgaris, deux gènes responsables de la tolérance au cuivre à effets dominants et additifs ont été déterminés (Schat et al. 1993).

Il est apparu que l’évolution vers la tolérance aux métaux lourds était un processus

rapide. Des populations métallicoles récentes provenant de populations non métallicoles

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métallicoles étaient faibles (Wu et al. 1975). Parmi les populations métallicoles, les populations les plus anciennes montrent des niveaux de tolérance les plus élevés (Wu et al. 1975). La sélection due à la toxicité du cuivre est continue provoquant ainsi une augmentation du dégré de tolérance. De plus, l’expérience de Wu et al. (1975) prouve l’intensité de la sélection par la toxicité du cuivre. A partir d’un semis de graines d’A. stolonifera provenant de 5 populations non métallicoles sur un sol fortement contaminé en cuivre, les auteurs ont comptabilisé 0,1 % de survivants dès la première année. Une telle intensité de la sélection et la dominance des gènes majeurs de tolérance expliquent que, même en présence de flux de gènes depuis les populations non métallicoles adjacentes, l’évolution vers un premier niveau de tolérance se produit rapidement (Lefèbvre & Vernet 1990). Chez les métallophytes, la sélection due à la toxicité aux métaux lourds peut être qualifiée de rapide, intense et continue (Macnair 1993).

La tolérance au cobalt est très peu connue ; elle semble avoir été mise en évidence de

manière formelle uniquement chez Silene cobalticola (Baker et al. 1983). Duvigneaud (1959) soulevait une affinité particulière pour le cobalt chez quelques espèces de la flore des affleurements de Cu et Co du Katanga (cobaltophytes), notamment Crotalaria cobalticola et

Silene cobalticola (Brooks et al. 1977).

Les mécanismes de tolérance au Cu et au Co semblent être multiples. Il existe des mécanismes d’exclusion du cuivre chez la plupart des graminées tolérantes au cuivre et chez

Mimulus guttatus (Tilstone & Macnair 1997), Silene vulgaris et S. maritima (Baker 1981), Elsholtzia splendens (Song et al. 2004).

Les hyperaccumulatrices de Cu et de Co constituent un groupe remarquable de plantes qui sont pour la plupart presque toutes restreintes aux sols cupro-cobaltifères du

sud de l’Afrique Centrale (Reeves & Baker 2000 ; Reeves 2006). Environ 32 espèces ont été

identifiées avec une concentration foliaire en Cu supérieure à 1000 µ g g-1 de MS (au moins une fois), 30 espèces se comportent de la même manière en accumulant des teneurs élevées en Co. Parmi ces espèces, douze accumulent à la fois Cu et Co. Les plantes se développant sur les sols riches en Co dérivant des roches ultramafiques excèdent rarement la concentration de 20 mg kg-1 (Reeves, 2006). Seules les espèces se développant sur des sols extrêmement riches en cuivre et/ou en cobalt ont été récensées dans la littérature comme hyperaccumulatrices de cuivre et/ou de cobalt. Néanmoins quelques exceptions existent. Notons que sur les sols serpentiniques au Sri Lanka pauvres en cuivre (<50 µg g-1), cinq espèces présentant une