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ter (Suppression maintenue)

Dans le document COMPTERENDUINTÉGRAL SÉNAT (Page 54-73)

M. le président. L'amendement n° 8, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante : L'article 30 du code civil est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« La première délivrance d'une carte nationale d'iden-tité ou d'un passeport certifie l'idend'iden-tité et la nationalité de son titulaire. Les mentions relatives à l'identité et à la nationalité inscrites sur ces derniers font foi jusqu'à preuve du contraire par l'administration.

« L'alinéa précédent est applicable aux demandes de renouvellement de carte d'identité et de passeport en cours d'instruction, ainsi qu'aux recours administratifs et contentieux pour lesquels une décision définitive n'est pas encore intervenue. »

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur.Chacun connaît cet amendement, et je crois que beaucoup l’apprécient…(Sourires.) J’espère donc qu’il sera voté !

Il a en effet pour objet de mettre fin au véritable marasme administratif lié aux démarches de renouvellement des documents d’identité pour les Français nés à l’étranger.

Ces hommes et ces femmes – nous en connaissons tous pour en recevoir dans nos départements, mes chers collègues– se trouvent confrontés à des situations absurdes et inextrica-bles, lourdes de conséquences sur leur quotidien.

Le Sénat, en première lecture, a reconnu la détresse de ces concitoyens qui désespèrent de fournir la preuve de leur nationalité à l’administration. C’est pourquoi il a adopté la disposition que nous proposons.

J’ai donc confiance, mes chers collègues, certain que vous allez voter à nouveau la mesure que vous avez bien voulu adopter voilà quelque temps. Le contraire serait difficile à expliquer, vous en conviendrez.

Les députés ont, hélas, supprimé ce nouvel article. Le Gouvernement a d’ailleurs dit – ce n’était pas par votre voix, monsieur le ministre –que le problème n’était qu’admi-nistratif et qu’il serait réglé par le décret du 18 mai 2010.

Malheureusement, le décret ne règle rien, et vous savez que nous avons déjà entendu de nombreuses promesses à ce sujet.

En 2007, Mme Michelle Alliot-Marie avait adressé une circulaire aux préfets soulignant les difficultés rencontrées par un certain nombre d’usagers et préconisant la simplifica-tion. Cette initiative était restée sans effet direct.

Notre collègue Mme Monique Cerisier-ben Guiga avait saisi Mme Rachida Dati, malheureusement sans effet.

En décembre 2009, face à une inertie alarmante, M. Brice Hortefeux, alors ministre de l’intérieur, rappelait, par voie de circulaire, la nécessité de mettre un terme à la pratique de certains services préfectoraux qui demandaient, de façon systé-matique, la production d’un certificat de nationalité française lors d’un renouvellement de carte nationale d’identité.

Cette attitude, comme le rappelait lui-même M. Hortefeux, et je me permets de le citer, allait « à l’encontre des mesures de simplification qui ont déjà été prises pour éviter de faire peser de trop fortes contraintes sur les demandeurs nés à l’étranger ou nés en France de parents étrangers ». Malheureusement, cela n’a pas eu d’effet.

Le 9 février 2010, M. Hortefeux demandait à nouveau aux services de l’État « de considérer dès à présent, s’agissant du renouvellement des cartes nationales d’identité et des passe-ports, que suffit à prouver la nationalité française du deman-deur la présentation d’une carte nationale d’identité "sécurisée

"[…] ».

En résumé, malgré tout ce que je viens de dire, le problème n’est toujours pas réglé, ce qui est très préjudiciable à nos concitoyens nés à l’étranger.

Aussi, par cet amendement, nous vous proposons, mes chers collègues, de revenir à ce que vous avez voté, à ce que nous avons voté, en inversant une bonne fois pour toutes la charge de la preuve afin de laisser à l’administration le soin, ou plutôt la responsabilité, en cas de doute de sa part, de prouver que le doute serait fondé, et non de faire porter par le citoyen la charge de prouver sa nationalité.

Il s’agit d’une mesure de bon sens, simple, pragmatique, qu’à l’avance, je vous remercie vivement, mes chers collègues, de bien vouloir adopter, comme vous l’avez fait en première lecture, afin de soutenir tous ceux de nos concitoyens qui se heurtent à de si grandes difficultés.

M. le président.Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Cet amendement reprend le texte d’un amendement adopté par le Sénat en première lecture, contre l’avis de la commission, je le rappelle.

M. Jean-Jacques Hyest,président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règle-ment et d'administration générale.Oui !

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission maintient son avis défavorable, et je m’en explique.

Alerté à maintes reprises par les parlementaires, le Gouver-nement a publié, le 18 mai 2010, un décret relatif à la simplification de la procédure de délivrance et de renouvelle-ment de la carte nationale d’identité et du passeport, qui prévoit que la présentation d’un passeport ou d’une carte nationale d’identité d’ancienne ou de nouvelle génération est suffisante pour prouver la nationalité du titulaire.

Ce décret a été suivi récemment d’une circulaire rappelant que la demande de production d’un certificat de nationalité ne doit plus constituer qu’une exception, les services

compé-tents devant privilégier la preuve de la nationalité française fondée sur la possession d’état de la qualité de Français, ce qui est, à l’évidence, beaucoup plus favorable aux intéressés.

Compte tenu de ces explications, il me semble que la demande formulée par les auteurs de l’amendement est large-ment satisfaite par le droit en vigueur.

C’est la raison pour laquelle la commission demande le retrait de cet amendement et, s’il était maintenu, confirmerait son avis défavorable.

M. le président.Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Claude Guéant,ministre. Le Gouvernement émet égale-ment un avis défavorable.

En effet, le décret du 18 mai 2010 et la circulaire citée par M. le rapporteur ont eu des effets. Selon les statistiques du ministère de la justice, on a constaté, depuis l’entrée en vigueur du décret, une baisse de plus de 60 % du nombre de demandes de certificats de nationalité.

Je puis témoigner que, pratiquement, le ministère de l’inté-rieur ne reçoit plus de plaintes à ce sujet.

Il nous semble que ni la carte nationale d’identité ni le passeport n’ont vocation à constituer un titre de nationalité.

Il faut faire très attention à ne pas créer un risque de fraudes documentaires. Or la mesure proposée comporte ce risque.

Je prends un exemple très concret : si une personne vient demander le renouvellement d’une carte nationale d’identité périmée depuis plus de deux ans, l’administration est dans l’incapacité de vérifier l’authenticité du titre, car elle n’a pas le droit de conserver les dossiers personnels plus de douze ans.

Dans un tel cas, il me semble tout à fait normal que des pièces complémentaires soient demandées.

M. le président. Monsieur Sueur, l'amendement n° 8 est-il maintenu ?

M. Jean-Pierre Sueur.J’ai bien entendu les explications de M. le rapporteur, qui ne conteste pas le fait que le Sénat a choisi d’adopter cet amendement en première lecture.

Je comprendrais mal que le Sénat se déjuge. Le décret et la circulaire, dont nous avions connaissance, ne suffisent pas à régler le problème au fond.

M. le ministre a indiqué qu’une diminution du nombre des demandes avait été constatée. Pour notre part, nous pouvons cependant témoigner qu’un certain nombre de nos conci-toyens n’arrivent toujours pas à faire reconnaître leurs droits, la seule difficulté venant de ce qu’ils sont nés à l’étranger. C’est tout de même très difficile à justifier !

En outre, je ne partage pas les arguments qui ont été exposés. D’ailleurs, dans le débat sur le présent texte, il est récurrent, quasi emblématique, que l’on soupçonne les gensa priori d’être des délinquants. En l’occurrence, on souligne qu’une carte nationale d’identité ou un passeport sont falsifia-bles. C’est vrai, mais ce n’est pas une raison pour suspecter tout individu se présentant avec sa carte nationale d’identité ou son passeport et affirmant qu’il est français d’être un délinquant potentiel. Où va-t-on, avec un tel raisonnement ? Le même raisonnement est tenu pour les mariages. Le fait que des personnes veuillent se marier est considéré comme suspect et présentant un risque de supercherie.

Certes, des mesures très lourdes sont prévues dans le code pénal pour réprimer les mariages de complaisance, ceux qui ont lieu pour des raisons n’ayant rien à voir avec la libre

volonté des personnes. De même, le code pénal contient, fort heureusement, des mesures pour lutter contre la falsifi-cation des passeports et des cartes nationales d’identité.

Mais il ne faut pasa priori considérer que chaque deman-deur est un suspect, sauf à vivre dans une société de suspicion ! Cet amendement est donc très important, parce qu’il permet à tous les Français nés à l’étranger et disposant d’un titre, de faire valoir ce dernier.

Si des tricheries apparaissent, nous considérons que les tribunaux doivent en être logiquement saisis et nous deman-dons que les auteurs soient sévèrement réprimés, car nous ne sommes pas des laxistes.

Il s’agit simplement de prendre des mesures pour simplifier la vie de nos concitoyens, qui ont été nombreux à se plaindre, à écrire aux journaux, à témoigner de cas concrets.

C'est pourquoi, mes chers collègues, je maintiens cet amendement et j’espère vivement que le Sénat adoptera la même position qu’en première lecture. Je ne comprendrais pas pourquoi il changerait d’avis.

M. le président.La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Je soutiens cet amende-ment.

J’ajoute qu’il me semble déceler une contradiction entre les explications données respectivement par la commission et par le Gouvernement.

Selon M. le rapporteur, le décret et la circulaire règlent le problème. Or vous nous dites, monsieur le ministre, que la question n’est pas là : toute personne étant soupçonnée d’avoir pu falsifier ses papiers, il faut lui demander d’autres documents pour pouvoir mener des investigations.

À ce moment-là, je vous objecterais, monsieur le ministre, que toute personne, qu’elle soit née en France ou à l’étranger, de parents français ou étrangers, qui veut faire renouveler un document d’identité est susceptible de présenter des papiers falsifiés. Il faudrait alors qu’elle puisse fournir également d’autres documents. Cela pose un problème : si tout un chacun est susceptible de produire des papiers falsifiés, il faut exiger de tous des documents supplémentaires.

Par conséquent, il n’y a pas de logique dans le refus que vous opposez à cet amendement.

M. le président.Je mets aux voix l'amendement n° 8.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. En conséquence, l’article 5 ter demeure supprimé.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ce n’est pas croyable ! Ils changent d’avis !

M. Jean-Jacques Hyest,président de la commission des lois.

La commission n’a pas changé d’avis, madame Borvo Cohen-Seat !

M. Jean-Pierre Sueur.On l’a voté en première lecture ! Je ne comprends pas !

TITRE II

DISPOSITIONS RELATIVES À L’ENTRÉE ET AU SÉJOUR DES ÉTRANGERS

Chapitre IER

DISPOSITIONS RELATIVES À LA ZONE D’ATTENTE M. le président. L'amendement n° 9, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Supprimer cette division et son intitulé.

La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.

Mme Alima Boumediene-Thiery. Les dispositions du chapitre Ier font partie des mesures autonomes du présent projet de loi. Elles ne sont prescrites par aucune des trois directives déjà mentionnées et sont présentées comme la réponse à un fait divers qui s’est déroulé voilà déjà plus d’un an et qui ne s’est pas reproduit : la découverte d’une centaine de ressortissants syriens d’origine kurde sur le littoral corse.

Rien ne justifie l’assouplissement des conditions de création des zones d’attente, si ce n’est la volonté du Gouvernement d’empêcher l’accès au séjour de migrants qui sont déjà présents sur le territoire français.

En dépit des modifications adoptées à l’Assemblée nationale et en commission, les conditions de création des zones d’attentead hocne sont pas acceptables.

Tout d’abord, le seuil de dix migrants ne correspond pas à la notion d’afflux massif telle qu’elle est définie par le droit communautaire.

En outre, la proposition de notre rapporteur de limiter à vingt-six jours la durée d’existence d’une zone d’attente spéciale peut être interprétée comme un allongement de la durée de maintien en zone d’attente.

Par ailleurs, il est à craindre que des régions très vastes ne soient converties en zones d’attentead hoc.

Les dispositions du chapitre Ier portent aussi gravement atteinte au droit constitutionnel d’asile. Certes, les personnes placées dans les zones d’attente ad hoc pourraient solliciter l’admission au séjour au titre de l’asile. Cependant, elles seraient soumises à la procédure de l’asile à la frontière, qui consiste en un simple examen de la recevabilité de la demande.

Or, dans son avis du 5 juillet 2010, la Commission natio-nale consultative des droits de l'homme, la CNDCH, a rappelé que « cette procédure ne présente toujours pas […]

de garanties suffisantes permettant aux demandeurs d’asile d’exercer pleinement leur droit d’asile ».

Je rappelle en effet que, en cas de rejet de leur demande, les candidats à l’asile placés en zone d’attente peuvent être expulsés sous réserve d’un recours suspensif dans le délai de quarante-huit heures auprès du juge administratif, sans qu’ils puissent déposer une demande d’asile auprès de l’OFPRA.

Sachant que, en 2009, seuls 26,8 % des demandeurs d’asile à la frontière ont été autorisés à entrer sur le territoire, il est à craindre que les demandeurs d’asile qui seraient placés en zone d’attente ad hoc ne soient éloignés plus rapidement vers le pays dans lequel ils ont leur résidence habituelle, ce qui peut mettre leur vie en péril.

S’agissant des personnes placées en zone d’attentead hocqui ne solliciteraient pas l’asile, elles pourraient se voir notifier un refus d’entrée, exécutoire d’office, sauf si elles demandaient à bénéficier d’un jour franc, sans possibilité alors de solliciter un recours suspensif.

Enfin, les dispositions du chapitre Ierne sont pas acceptables car des mineurs étrangers isolés pourraient être « enfermés » dans ces zones d’attente spéciales. Or, d’après le Comité des droits de l’enfant des Nations unies, le placement en zone d’attente est particulièrement inadapté pour les mineurs. La création de zones d’attente risquerait notamment de porter atteinte au droit de ces mineurs à être représentés par un administrateurad hoc.

Pour toutes ces raisons, je vous propose, mes chers collè-gues, de supprimer les dispositions du chapitre Ier.

M. le président.Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement de suppression, d’autant qu’il vise l’ensemble du chapitre. L’examen des amendements suivants nous donnera l’occasion d’apporter des précisions sur les dispositions de celui-ci.

M. le président.Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Claude Guéant,ministre.Le Gouvernement émet égale-ment un avis défavorable sur cet amendeégale-ment.

M. le président.Je mets aux voix l'amendement n° 9.

(L'amendement n'est pas adopté.) Article 6

1 I. – (Non modifié) L’article L. 221‑1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est complété par un alinéa ainsi rédigé :

2 « Le présent titre s’applique également à l’étranger qui arrive en Guyane par la voie fluviale ou terrestre. » 3 II. – Après le premier alinéa de l’article L. 221-2 du

même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

4 « Lorsqu’il est manifeste qu’un groupe d’au moins dix étrangers vient d’arriver en France en dehors d’un point de passage frontalier, en un même lieu ou sur un ensemble de lieux distants d’au plus dix kilomètres, la zone d’attente s’étend, pour une durée maximale de vingt-six jours, du ou des lieux de découverte des intéressés jusqu’au point de passage frontalier le plus proche. »

M. le président.La parole est à Mme Catherine Tasca, sur l'article.

Mme Catherine Tasca.Cet article innove en ce qui concerne les zones d’attente.

Projet de loi après projet de loi–et nombreux ont été les textes relatifs à l’immigration au cours de cette mandature –le Gouvernement ajoute de nouveaux dispositifs à ceux qui sont actuellement en vigueur, sans qu’il soit toujours aisé de s’y

retrouver. Mais surtout, chaque fois, le Gouvernement s’éloigne un peu plus du droit commun pour multiplier les dispositifs d’exception.

Ainsi, l’article 6 de ce projet de loi tend à instaurer les zones d’attentead hocafin de rendre légales des pratiques qui, hier, étaient considérées comme contraires au droit par le juge administratif.

Cet article a pour objet de transposer l’article 18 de la directive Retour, qui pose des conditions très précises à la création de zones d’attente provisoires. Nous ne le répéterons jamais assez, celle-ci n’est autorisée que « lorsqu’un nombre exceptionnellement élevé de ressortissants de pays tiers soumis à une obligation de retour fait peser une charge lourde et imprévue sur la capacité des centres de rétention d’un État membre ou sur son personnel administratif et judiciaire ».

En contradiction avec la directive, qui évoque « un nombre exceptionnellement élevé de ressortissants », le Gouvernement a fixé à « au moins dix » le nombre d’étrangers dont l’arrivée en France « en dehors d’un point de passage frontalier » autorise la constitution d’une zone d’attente d’exception.

Fixer ce seuil à dix personnes semble aussi en contradiction avec la notion de « charge lourde et imprévue » pesant sur la capacité des centres de rétention d’un État membre ou sur son personnel administratif et judiciaire évoquée par la directive.

Cette contradiction explique sans doute le silence du projet de loi sur cet élément.

Enfin, le choix de fixer le seuil à ce chiffre permettant le déclenchement du dispositif de la zone d’attente interpelle ceux d’entre nous qui ont défendu la mise en œuvre du mécanisme de protection temporaire pour les réfugiés afghans au mois de février 2010. L’une des conditions néces-saires à la mise enœuvre du mécanisme de protection tempo-raire était un afflux massif de réfugiés qui puisse mettre en cause le bon fonctionnement des systèmes d’asile. Le Gouver-nement nous avait alors répondu que, en dépit du fait que 9 000 Afghans étaient arrivés jusqu’en France au cours du premier semestre de 2009, ce nombre était insuffisant pour justifier le déclenchement de la procédure de protection temporaire.

Hier, on considérait donc que l’arrivée de 9 000 Afghans ne constituait pas un afflux massif : ils étaient trop peu nombreux pour bénéficier de la protection temporaire ; aujourd’hui, l’arrivée d’un groupe de seulement dix étrangers serait suffi-sante pour justifier la création d’une zone d’attente d’excep-tion ! Il est clair que le Gouvernement a une appréciad’excep-tion très variable de ce que constitue une arrivée importante de migrants, selon qu’il s’agit de leur accorder des droits ou de leur appliquer des règles restrictives…

Non seulement tout lieu du territoire français constitue une zone d’attente potentielle, mais le choix a été fait par le Gouvernement de faciliter au maximum la constitution de ces zones d’attente en optant pour des critères très larges, quitte a être en contradiction avec la directive Retour. La volonté manifeste d’étendre largement le recours à ces zones d’attente marque à la fois une extension des mesures de privation de liberté et un recul du droit commun.

Ce choix me paraît contraire aux principes républicains dont vous dites pourtant faire le cœur de la charte des droits et devoirs du citoyen français que vous souhaitez imposer aux candidats à la nationalité française.

Ces zones d’attente, qui pourront surgir à tout endroit du territoire, compliqueront nécessairement le travail des associa-tions qui apportent leur soutien aux migrants, notamment pour s’assurer du respect du droit d’asile : faut-il y voir une des motivations du dispositif ?

C’est pourquoi nous présenterons un amendement de suppression de l'article 6, ainsi que plusieurs amendements tendant à tout le moins à en récrire l’alinéa 4.

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identi-ques.

L'amendement n° 10 est présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 149 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 183 rectifié est présenté par MM. Mézard et Collin, Mme Escoffier, MM. Baylet et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Tropeano et Vall.

Ces trois amendements sont ainsi libellés : Supprimer cet article.

La parole est à Mme Bariza Khiari, pour présenter l'amen-dement n° 10.

Mme Bariza Khiari.Monsieur le président, cet amendement vient d’être fort bien défendu par ma collègue Catherine Tasca.

M. le président.La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l'amendement n° 149.

Mme Éliane Assassi. Cet article vise à créer la possibilité d’instaurer une zone d’attente ad hoc en cas d’arrivée sur le territoire français en dehors d’un point de passage frontalier d’un groupe d’au moins dix étrangers.

Les zones d’attentead hocsont des espaces juridiques fictifs destinés à accueillir des étrangers présumés ne pas être juridi-quement admis à entrer en France malgré leur présence physique sur le sol français.

La création d’une telle zone est une mesure privative de liberté. L’arrivée d’un groupe d’au moins dix étrangers suffi-rait à la justifier, alors que les zones d’attente ad hoc sont actuellement créées dans les ports, les aéroports, les gares internationales et à proximité des lieux de débarquement en fonction des arrivées des migrants, afin de pouvoir enfermer ces derniers.

L’adoption de cet article aboutira simplement à une réduc-tion des droits des primo-arrivants, au prétexte de lutter contre une prétendue immigration massive. En effet, le régime du séjour irrégulier est plus protecteur que celui de l’entrée irrégulière sur le territoire. C’est pourquoi maintenir ces migrants dans une zone d’attente permet de réduire leurs possibilités d’admission au séjour au titre de l’asile, dans des conditions d’exercice de leurs droits restreintes.

Dans le document COMPTERENDUINTÉGRAL SÉNAT (Page 54-73)

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