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Pour compléter l’action des services départementaux, l’État dispose de moyens propres d’intervention terrestre, de déminage, de secours aérien, de soutien logistique et de commandement.

Les personnels de ces unités relèvent de statuts variés : policiers, militaires, contractuels, ouvriers d’État, personnels administratifs ou techniques. Ils sont amenés à intervenir en urgence sur de larges plages horaires. L’organisation de leur temps de travail est en conséquence différenciée et complexe, caractérisée par l’adaptabilité, dans une finalité opérationnelle.

La Cour a relevé lors de son contrôle que le temps de travail effectif du personnel navigant des avions de la sécurité civile (GASC)93 était inférieur de près de 20 % à la durée légale et que son décompte reposait sur de nombreuses mesures dérogatoires.

93 Ces personnels participent, à titre principal, à la lutte contre les feux de forêt ; ils peuvent également être appelés à participer, dans le cadre des missions du ministère de l’intérieur, à des actions de protection de l’environnement, de transport logistique et de liaison, ainsi qu’à des actions humanitaires.

Des règles particulièrement favorables au sein du groupement d’avions de la sécurité civile (GASC)

Au 31 décembre 2016, le GASC était constitué de 115 agents dont 70 % de pilotes (80 personnes). L’organisation du temps de travail y est fixée par un règlement intérieur mis à jour en dernier lieu en 2013 et qui a pour fondement des textes réglementaires pris entre 2002 et 2009.

Afin de pouvoir intervenir avec des préavis restreints, les équipages sont placés sous un régime « d’alerte ». Ce régime peut être assimilé à une astreinte pour la partie du temps où le navigant n’a pas encore rejoint son lieu de travail. « L’alerte » débute avant le lever du soleil. Elle précède la journée de travail, matérialisée par une présence sur la base aérienne. Elle peut se terminer, après le retour au domicile et, si les besoins opérationnels le nécessitent, par une nouvelle période d’astreinte après le coucher du soleil.

Contrairement à ce que prévoit la réglementation, le temps passé en alerte hors du lieu de travail est comptabilisé en temps de travail, le cas échéant après l’application de coefficients.

Lorsque les pilotes ne sont pas d’alerte, ils peuvent être placés en

« service ordinaire », position qui englobe le temps consacré aux travaux administratifs, à la formation, à l’entraînement ou aux visites médicales.

En raison de ces modalités particulières de décompte, le temps de travail crédité individuellement au personnel navigant en période de forte activité peut atteindre, voire dépasser 380 heures par mois, ce qui représente en moyenne 17,3 heures de travail par jour. S’il est admis que ces personnels ont bénéficié de deux jours de repos hebdomadaires, cette période de forte activité est cependant saisonnière.

Sur l’année, la durée théorique de travail des personnels navigants ayant été fixée à 1 579 heures, soit 28 heures en-deçà de la durée légale, ces règles particulières de comptabilisation du temps de travail conduisent à la computation d’heures supplémentaires (en moyenne 218 heures par naviguant) dont le stock en fin d’année a augmenté en proportion importante depuis 2012. Le temps de travail annuel moyen comptabilisé après application de différents coefficients reste cependant inférieur de près de 20 % (1 308 heures) à la durée légale de travail.

Les règles de décompte du temps de travail des personnels des groupements d’avions (GASC) et d’hélicoptères (GHSC) conduisaient par ailleurs à l’accumulation de nombreuses heures supplémentaires en période de haute activité saisonnière. Pour remédier à cette situation, deux protocoles d’accord sur l’organisation du temps de travail et les rémunérations ont été négociés en 2016 et en 2017 avec les représentants,

respectivement des personnels navigants du groupement d’hélicoptères94 et de ceux du groupement d’avions95. Ces protocoles avaient pour ambition d’apporter une réponse globale à la problématique du temps de travail et de mettre un terme aux dépassements structurels entraînant des repos compensateurs susceptibles d’affecter la capacité opérationnelle.

Ils visaient également à simplifier les régimes de travail et les dispositions statutaires et indemnitaires des personnels des deux groupements.

À cette occasion, le temps de travail des pilotes d’avions a été redéfini. Il distingue désormais :

- les activités d’alerte, pour lesquelles la durée annuelle est fixée à 1 607 heures ; elle est décomptée selon de nouvelles modalités96 ; - les fonctions d’encadrement, dont l’exercice est décompté en jours

travaillés selon un forfait spécifique à chacune d’elles.

Cependant ces protocoles n’ont pas supprimé toutes les irrégularités constatées97. Ils se sont en outre traduits par l’octroi de compensations catégorielles. C’est ainsi que le protocole concernant le GASC mentionne, à ce titre, « la revalorisation générale de la prime de vol (coefficient BE) », « la création d’une prime de fonction spécifique – encadrement au forfait – de 300 € brut par mois », « la revalorisation de certaines fonctions spécifiques », « la revalorisation du tarif des vacations SIT à 50 € au lieu de 30 € » ou bien encore « la création d’une indemnité de détachement opérationnel de 35 € ou une extension d’un régime d’indemnité journalière existant ». Or il est anormal qu’un alignement partiel sur le droit commun régissant le temps de travail s’accompagne de compensations qui sont susceptibles en outre de peser de manière pérenne sur les dépenses salariales du programme 161 du budget de l’État. Par ailleurs, ces protocoles et leurs textes d’application ne garantissent pas le respect des normes européennes (cf. infra, la deuxième partie du présent chapitre). Un projet d’arrêté modifiant celui du 8 janvier 2002 relatif aux cycles de travail particuliers applicables à certains services relevant de l’administration centrale du ministère de

94 Protocole « hélicoptères » du 30 novembre 2016.

95 Protocole « avions » du 28 avril 2017.

96 Forfait détachement de 11 heures au lieu de 13 heures, forfait CEMPN de 7 heures au lieu de 12 heures et suppression du forfait de 6 heures dit « de découché » lors des escales.

97 Pour les personnels navigants contractuels du groupement d’avions, voir le décret n° 2018-952 du 31 octobre 2018, et pour les personnels navigants du groupement d’hélicoptères, le décret n° 2018-951 du même jour. Voir également les arrêtés du 31 octobre 2018 fixant les indices de rémunération et les modalités de répartition de la prime de vol.

l’intérieur prévoit ainsi d’accroître le temps de travail annuel du groupement d’avions de la sécurité civile. Sollicitée par la Cour, la DGAFP a rappelé à cette occasion la nécessité de respecter la durée maximale hebdomadaire de travail de 48 heures.

B - Le temps de travail dans les services