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Le probl`eme que l’on rencontre pour associer `a la coagulation une ´echelle de temps provient du terme de concentration n dans l’int´egrale de (5.15). Contrairement `a la s´edimentation o`u `a la condensation, on doit connaˆıtre a priori la population de particules pour laquelle on souhaite quantifier l’effet de la coagulation. Si l’on d´efinit le temps de survie τcoag d’une particule i comme le temps mis pour qu’elle double son volume par

coagulation avec des particules j, l’´evaluation de τcoag n´ecessite l’int´egration du produit du coefficient K avec

le spectre en taille de la population. En effet, τ−1 coag= Z ∞ 0 δij vj vi (Kt ij+ Kijg)njdrj+ Z ∞ 0 (1− δij)(Kijt + Kijg)njdrj δij = ( 1 si rj< ri 0 si si rj> ri

o`u vj/viest le rapport du volume de la particule j sur celui de la particule i. On peut n´eanmoins pressentir que ce

ph´enom`ene tendant `a amortir la dispersion en taille des particules, il affectera pr´ef´erentiellement les spectres les plus larges et les populations les plus denses. S’agissant de la poussi`ere martienne, de nombreuses distributions en taille ont ´et´e d´eduites d’observations. La Figure 2.8 examine l’effet de la coagulation pour trois spectres de r´ef´erence [Pollack et al., 1995; Toon et al., 1977; Clancy et al., 1995]. Mˆeme si le consensus actuel s’accorde autour d’un rayon moyen d’environ 1 µm, la disparit´e notable des param`etres de distribution entre les diff´erents auteurs implique une efficacit´e de coagulation variable. On peut voir par exemple qu’une distribution du type Clancy et al. [1995], dont la variance est la plus grande des trois, poss`ede une tr`es large fraction de poussi`eres tr`es fines (r < 0.1µm) dont le temps de vie n’exc`ede pas la journ´ee. Cette distribution sera bien plus affect´ee par l’accr´etion que les deux autres distributions et sera dans l’absolu extrˆemement instable d’un point de vue microphysique. Cet exemple situe bien les contraintes apport´ees par ce genre de consid´erations, contraintes que les scientifiques ne prennent pas forc´ement en compte pour tirer des conclusions de leurs travaux d’observations. Toutefois, on voit d’apr`es la Figure 2.8 que pour la majorit´e des tailles significatives, τcoag descend rarement

en-dessous de 107 s. Par cons´equent, ce ph´enom`ene ne peut, en moyenne, intervenir que sur des p´eriodes de

Mais on l’a dit pr´ec´edemment, un mouvement d’air ascendant peut ´eventuellement accentuer l’efficacit´e de la coalescence. Sur Mars, les mouvements convectifs sont l´egions. Localement, ils sont provoqu´es par les fortes variations diurnes de temp´erature en surface et se propagent le jour dans la couche limite. Aux solstices, la cellule de Hadley poss`ede une branche ascendante tr`es active dans les moyennes latitudes de l’h´emisph`ere d’´et´e. Enfin, ils sont aussi tr`es pr´esents pendant les tempˆetes de poussi`ere globales de l’h´emisph`ere sud. Pour une particule de 1 µm `a une altitude de 20 km, il faudrait un courant ascendant d’environ 1 cm.s−1pour contenir sa

chute. De tels vents ne peuvent ˆetre directement observ´es, mais ils sont simul´es par des mod`eles de circulation g´en´erale. Les r´esultats produits par Murphy et al. [1990] (utilisant un mod`ele 2D-axisym´etrique) indiquent que ces vents peuvent atteindre voire d´epasser une valeur de 1 cm.s−1 aux solstices. Dans le contexte martien, la

coalescence ne semble pouvoir intervenir sur une moyenne globale et annuelle pour la poussi`ere. Par contre, il serait int´eressant d’´evaluer son efficacit´e lors des tempˆetes saisonni`eres lorsque l’abondance des poussi`eres est d´ecupl´ee.

Du point de vue des nuages de glace, la faible dispersion des distributions en taille tend `a neutraliser l’accr´eation des cristaux (dans la mesure o`u coagulations brownienne et gravitationnelle sont le moins efficaces lorsque deux particules sont de taille identique). On peut estimer que τcoagrelatif aux particules de glace d’eau

est de l’ordre de 108 s et donc reste bien en-de¸c`a des ´echelles de temps de condensation ou de s´edimentation.

Figure 2.8 : τcoag estim´e de la poussi`ere martienne en fonction de son rayon. Trois distributions en taille ont ´et´e

superpos´ees (normalis´ees `a leur densit´e num´erique `a 1 µm) afin d’illustrer la r´eponse de l’accr´etion `a un spectre donn´e. Sans commettre d’erreur notable, on peut supposer les particules uniform´ement m´elang´ees (n ∝ ρa). Puisque

(5.16) et (5.18) donnent une d´ependance de K en ρ−1

a , le termeR nK ne d´epend pas, en premi`ere approximation,

6. CE QU’IL FAUT RETENIR. . .

Ph´enom`ene ´echelle de temps d´ependance majoritaire nucl´eation la seconde Sursaturation et Taille des noyaux condensation de la seconde au jour Temp´erature et Taille des cristaux s´edimentation de l’heure `a l’ann´ee Altitude et Taille des particules m´elange turbulent de l’heure `a 100 jours Altitude

coagulation de 1 `a 100 jours Taille et Nombre de particules

Tableau 2.2 : R´esum´e des temps caract´eristiques des processus microphysiques.

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Ce qu’il faut retenir. . .

Cette partie s’est consacr´ee `a l’estimation du temps caract´eristique de chaque processus intervenant dans le devenir des brumes martiennes qu’elles soient faites de poussi`eres ou de cristaux de glace d’eau. Un r´ecapitulatif de ces temps est donn´e dans le tableau 2.2. Une hi´erarchisation des processus apparaˆıt assez naturellement `a sa lecture. Pr´ecisons que la nucl´eation est un ph´enom`ene marginalis´e par son mode op´eratoire. Agissant ponctuel- lement dans la formation nuageuse, son extrˆeme sensibilit´e au rapport de saturation lui conf`ere une r´eaction quasi-binaire ; tel un interrupteur autorisant ou non la nucl´eation de l’ensemble des noyaux de condensation pr´esents. Toutefois, on peut trouver mati`ere `a satisfaction `a voir la th´eorie conforter la possibilit´e qu’ont les nuages (qui sont observ´es) `a se former dans l’atmosph`ere martienne.

Dans l’ensemble, la condensation se d´etache par sa rapidit´e d’action. Celle-ci semble donc en mesure d’assurer le maintien permanent du profil vertical de vapeur d’eau proche de la saturation. De fait, la taille des cristaux dans un nuage sera d’abord contrainte par la masse d’eau condensable, c’est-`a-dire en sursaturation, et par le nombre de CCN disponibles pour la nucl´eation, c’est-`a-dire la concentration num´erique de poussi`eres en suspen- sion. L’autre cons´equence importante de l’efficacit´e de la condensation est de rendre les nuages de glace d’eau martiens non pr´ecipitants (en th´eorie. . . ), nuages que l’on peut donc ranger dans la classe cirrus. Toute parti- cule de glace amen´ee `a s´edimenter dans une r´egion sous-satur´ee en vapeur d’eau va sublimer avant de pouvoir rejoindre le sol (except´e dans le cas des brumes de surface, bien entendu). Ceci est d’autant plus v´erifiable que les diff´erents processus d’accr´etion ne peuvent entraˆıner, comme c’est le cas sur Terre, d’accroissement de taille significatif permettant les pr´ecipitations.

Cette particularit´e typiquement martienne pr´esente l’avantage de r´eduire fortement la complexit´e de l’´etude des brumes. Ajout´e `a la faible diversit´e d’a´erosols qui y sont observ´es, la microphysique sur Mars poss`ede un champ d’action relativement restreint. Mais de par l’envergure g´eographique et temporelle de la pr´esence des brumes, faisant d’elles l’un des premiers acteurs du climat, la toute relative simplicit´e microphysique a sans doute acc´el´er´e les progr`es r´ealis´es pour les pr´edictions climatiques.

- Chapitre 3 -

Cette partie d´ecrit la base de travail qu’a constitu´e la r´ealisation et l’utilisation du mod`ele microphysique simulant formation et ´evolution des nuages de glace d’eau en conditions atmosph´eriques martiennes. Le d´evelop- pement du code de nuages martiens a occup´e pr`es d’un quart de la dur´ee de cette th`ese. Une fois le programme finalis´e, il a pu servir de base pour des ´etudes li´ees directement ou indirectement aux nuages martiens.

Une description de ce mod`ele est donn´ee dans la premi`ere partie, ´eclairant les diff´erentes contraintes qui sont intervenues dans la mod´elisation. La validit´e de notre mod`ele a pu ˆetre ´etablie en le confrontant `a un mod`ele am´ericain sur la base d’un cas type. C’est le th`eme de la deuxi`eme partie qui d´etaille les r´esultats obtenus dans le cas d’un nuage fin se formant `a 25 km d’altitude, son ´evolution journali`ere y est d´ecrite ainsi que diff´erents ph´enom`enes accompagnant sa pr´esence (confinement vertical de la poussi`ere et de l’eau). Les nuages sont la r´esultante d’une combinaison complexe de processus, dont les rˆoles respectifs ont pu ˆetre quantifi´es au travers d’une ´etude de sensibilit´e pr´esent´ee dans la derni`ere partie. On peut y discerner l’importance pr´epond´erante de la nucl´eation, du cycle diurne de temp´erature, de la poussi`ere. . . Les enseignements de cette ´etude indiquent qu’en th´eorie, la formation nuageuse poss`ede une sensibilit´e ´equivalente `a de nombreux param`etres. Par cons´equent, un nombre important de contraintes observationnelles est requis pour am´eliorer la mod´elisation microphysique actuelle.

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Description du mod`ele