1.1 Cosmologie
1.1.5 Taux de formation stellaire cosmique Fonction de Luminosit´e
Luminosit´e
L’´evolution des galaxies depuis le domaine z > 6 jusqu’`a l’Univers local est assez bien contrainte `a l’aide du Taux de Formation Stellaire (SFR) par unit´e de volume comobile (ρSFR, en M⊙/an/Mpc3), aussi appel´e taux de formation stellaire cosmique.
La d´etermination de ce taux utilise des m´ethodes et des calibrations diff´erentes, selon le domaine spectral et le redshift auxquels les mesures sont effectu´ees. Pour un ob- jet individuel, on utilise essentiellement comme indicateur de la formation d’´etoiles instantan´ee :
– Le flux ´emis dans les raies spectrales lors de la recombinaison du gaz ionis´e : les raies de l’hydrog`ene (s´erie de Balmer Hα6563 ˚A, Hβ4862 ˚A, ...) ou de l’oxyg`ene
([OII] 3727 ˚A, [OIII] 4959-5007 ˚A) sont li´ees au flux ionisant des ´etoiles les plus
massives, donc les plus jeunes, qui tracent cette formation stellaire.
– Le continuum spectral dans l’ultraviolet, domin´e par le rayonnement de ces mˆemes ´etoiles massives. Diff´erentes calibrations existent selon la longueur d’onde utilis´ee (habituellement 1500 ou 1800 ˚A)
– Le continuum spectral dans l’infrarouge lointain : le rayonnement des popu- lations stellaires (jeunes ou ˆag´ees) est absorb´e puis r´e´emis par la poussi`ere
contenue dans les galaxies. On peut ´evaluer la formation stellaire en faisant des hypoth`eses sur la profondeur optique moyenne des objets ´etudi´es (Buat et al., 2002)
– Le flux des radiosources `a 1.4 GHz : les sources de rayonnement en ondes radio sont le bremsstrahlung thermique des r´egions d’hydrog`ene ionis´e (Ca- plan & Deharveng, 1986), ainsi que l’´emission synchrotron (non-thermique) des ´electrons provenant de rayons cosmiques (voir la revue de Condon (1992)). Les calibrations individuelles de chaque estimateur du SFR ont ´et´e ´etudi´ees en d´etail par Kennicutt (1998). Dans le domaine radio, on utilise davantage celle de Bell (2003).
Selon le domaine de longueur d’onde utilis´e et le d´ecalage spectral de l’objet, on appliquera l’une ou l’autre de ces m´ethodes en fonction des contraintes observation- nelles.
Le flux d’´emission de la raie Lyman-α, dont on a vu qu’elle participait `a la forma- tion stellaire, est tr`es influenc´e par l’environnement proche des galaxies (cf section 1.2.3) et ne constitue pas un traceur fiable pour le SFR.
Dans le cas des calibrations utilisant la luminosit´e dans l’ultraviolet, on a uni- quement acc`es `a la luminosit´e int´egr´ee des galaxies sur l’ensemble de leur population stellaire. Il faut prendre comme hypoth`ese suppl´ementaire un mod`ele de r´epartition relative de la masse des ´etoiles (Fonction Initiale de Masse, ou IMF). Cette fonction φ(m) correspond au nombre d’´etoiles form´ees avec une masse stellaire m, ramen´e `a une unit´e de masse totale form´ee. On l’approxime habituellement par une loi de puissance du type φ(m) ∝ m−x.
La constante de normalisation de φ(m) est telle que : Z ∞
0
m φ(m) dm = 1 (1.44) L’IMF la plus couramment utilis´ee est celle de Salpeter (1955), avec un exposant x = 2.35. On suppose ´egalement des limites en masses pour la formation stellaire, habituellement dans l’intervalle 0.1 M⊙ < M∗ < 100 M⊙.
Dans un ´echantillon important de galaxies, les propri´et´es physiques globales sont bien d´ecrites au travers de la Fonction de Luminosit´e Φ(L). Celle-ci correspond `a la densit´e num´erique d’objets dN par intervalle de luminosit´e dL, mesur´ee dans un certain volume d’Univers.
En prenant comme id´ee de d´epart la fonction de masse de Press-Schechter (cf sec- tion 1.1.4) Schechter (1976) a fourni une forme param´etrique universelle permettant d’ajuster des fonctions de luminosit´es aux donn´ees d’un ´echantillon :
0 13.6 5.9 3.3 2.2 1.6 1.2 0.95 0.77 0.65 2 4 6 8 Age (Milliards d’années) Décalage spectral −3.0 −2.5 −2.0 −1.5 −1.0 −0.5 log 10 ( SFR M O * yr −1 Mpc −3 ) Rho
Taux de formation stellaire cosmique
Fig. 1.8:Diagramme de Madau-Lilly : ´evolution du taux de formation stellaire cosmique ρSFRen fonction du d´ecalage spectral z. Les diff´erentes ´etudes sont symbolis´ees par : un point noir pour les travaux sur l’UDF (Bunker et al., 2004), des cercles blancs pour le relev´e Canada-France Redshift Survey(CFRS) par Lilly et al. (1995), des carr´es pour les donn´ees de Wang et al. (1997), des croix pour les travaux de Steidel et al. (1999) sur les LBGs, des triangles renvers´es pour ceux de Fontana et al. (2003), un losange (Iwata et al., 2003), des pentagones (Bouwens et al., 2003a), des triangles droits (Giavalisco et al., 2004), des cercles-croix pour les travaux de Bouwens et al. (2003b, 2004a). D’apr`es Bunker et al. (2004)
Φ(L) = dN dL = Φ∗ L∗ L L∗ −α e−L/L∗ (1.45) Cette loi param´etr´ee par α, L∗
et normalis´ee par Φ∗
combine une loi de puis- sance (de degr´e −α) lorsque L ≪ L∗
et une coupure exponentielle pour L ≫ L∗
. On retrouve une relation auto-similaire comme dans le cas du Press-Schechter.
Pour pouvoir acc´eder `a le mesure de ρSFR `a partir d’un ´echantillon d’objets de
diff´erentes luminosit´es, on passe par la fonction Φ(L) que l’on ajuste aux observa- tions avant de l’int´egrer depuis une luminosit´e minimale Lmin. En effet, les sources
les plus brillantes vont dominer la valeur de cette int´egrale. On obtient une densit´e de luminosit´e ρL, que l’on convertit ensuite en ρSFR `a l’aide des calibrations donn´ees
plus haut.
L’allure g´en´erale du SFR cosmique en fonction du d´ecalage spectral, repr´esent´ee par la diagramme de “Madau-Lilly” (Madau et al., 1996; Lilly et al., 1996), montre une valeur assez stable, l´eg`erement croissante dans le temps pour 1 < z < 6 puis une forte d´ecroissance entre z = 1 et z = 0 (Figure 1.8).
A z > 6, les r´esultats r´ecents de Bunker et al. (2004), Bouwens et al. (2004b) et Bouwens et al. (2005) utilisant le Champ Ultra-Profond du t´elescope spatial Hubble (Ultra-Deep Field ou UDF) font apparaˆıtre des estimations beaucoup plus faibles de
ρSF R `a ces d´ecalages spectraux.
Cependant, il faut noter qu’aucune de ces valeurs n’est corrig´ee de l’extinction contenue dans ces objets : en prenant en compte des facteurs moyens de rougis- sement typiques des galaxies formant des ´etoiles (loi de Calzetti et al. (2000)), la pente de ρSFR s’inverse dans l’intervalle 1 < z < 6 (Hopkins, 2004), et aucune valeur
d’extinction n’est actuellement connue pour corriger les estimations `a plus grand d´ecalage spectral.