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Ce travail de thèse a permis d’aborder une question fondamentale qui est l’impact des contaminants biotiques et abiotiques sur les écosystèmes aquatiques.

Dans un 1er temps, notre étude s’est portée sur l’introduction et les transferts de parasites non-natifs (Monogènes, Polystomatidae) en milieux naturels, de la tortue de Floride à tempes rouges T. s. elegans, espèce invasive, vers deux espèces modèles de tortues aquatiques natives du sud de l’Europe : l’émyde lépreuse et la cistude d’Europe. Suite aux études menées par Verneau et al (2011) en milieu confiné et Meyer et al (2015) en environnements naturels sur l’émyde lépreuse, nous avons recherché dans un premier temps si la cistude d’Europe était également infectée dans le sud de l’Europe par des polystomes introduits via T. s. elegans.

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Répondre à cette question demeurait essentiel afin de vérifier si nos deux espèces modèles étaient bien confrontées aux stress biotiques relatifs à l’introduction d’hôtes exotiques et de leurs parasites. Nous avons montré dans cette étude que la cistude d’Europe était infectée par cinq espèces de polystomes exotiques importés avec la tortue de Floride à tempes rouges, résultats similaires à ceux obtenus par Meyer et al. (2015) sur l’émyde lépreuse. Nous avons ainsi pu montrer que ces deux espèces de tortues aquatiques subissaient en plus des stress abiotiques liés à la pollution des eaux, des stress biotiques.

Une fois ce verrou scientifique levé, le projet initial de la thèse impliquait le développement d’un outil permettant de mesurer l’état de santé des tortues en milieu naturel. Nous avons choisi d’étudier les variations de l’activité d’enzymes impliqués dans la réponse face au stress oxydatif, à savoir la superoxyde dismutase et la catalase, ainsi que les variations de l’expression des gènes codant pour ces dernières. Avant d’appliquer cet outil sur des populations de tortues échantillonnées en milieu naturel, nous avons cherché à le valider en conditions expérimentales, afin de vérifier si les biomarqueurs envisagés ici étaient pertinents (réponse détectable) et s’ils répondaient à partir d’échantillons sanguins, dans la mesure où, nos deux espèces modèles natives étant des animaux protégés, il n’était pas possible de prélever des tissus ou organes. Cette validation de l’outil s’avérait nécessaire afin de savoir si les différents stress abiotiques et biotiques identifiés dans les zones d’étude provoquaient bien des réponses de nos biomarqueurs, permettant ainsi de mesurer un stress chez nos espèces modèles. Etant donné que le glyphosate est le principal composé qui déclasse les eaux de certains de nos sites sélectionnés, nous avons confronté en conditions expérimentales des juvéniles de T. scripta à une concentration élevée de glyphosate provenant d’une formulation commerciale, ainsi qu’à de l’eau de la Fosseille, rivière localisée aux abords de Perpignan et dont les eaux ont été estimées de mauvaise qualité suite à la détection de glyphosate. Nous avons obtenu une réponse des biomarqueurs dans les deux dispositifs expérimentaux permettant de valider notre outil de mesure du stress et qui plus est dans le sang des tortues. Il était ensuite prévu de réaliser des infestations contrôlées en utilisant nos espèces de parasites modèles (polystomes) sur des tortues juvéniles, afin de rechercher l’existence d’une potentielle réponse des biomarqueurs choisis suite à des infestations parasitaires. Enfin, nous avions également envisagé de tester nos biomarqueurs dans le cadre d’un effet synergique de facteurs de stress biotique et abiotique sur des tortues artificiellement infestées par des polystomes, et maintenues dans de l’eau contenant du glyphosate. Nous n’avons pas pu réaliser ces deux dernières expérimentations pour plusieurs raisons. Mesurer l’impact d’infestations par des parasites exotiques impliquait d’expérimenter sur des cistudes et des

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émydes lépreuses juvéniles, ce qui s’avérait impossible devant la législation imposée pour ces espèces. Néanmoins, cette manipulation aurait pu être possible en demandant un certificat de capacité et l’autorisation d’expérimenter sur ces espèces, processus très longs et fastidieux qui aurait pris trop de temps dans le cadre de cette thèse. De plus, une fois toutes les autorisations obtenues, il aurait été nécessaire de rentrer en contact avec un centre spécialisé dans l’élevage de ces deux espèces pour disposer de juvéniles nés en captivité. Enfin, le cycle de vie des polystomes n’est pas complètement maitrisé en conditions expérimentales. En effet, nous avons pu constater que les cycles de pontes ne sont pas toujours synchronisés, ce qui rend difficile l’obtention de larves en quantité suffisante pour effectuer des infestations contrôlées. Pour toutes ces raisons, et devant le temps de travail pris pour lever les autres verrous scientifiques, cette expérimentation s’est révélée impossible durant cette thèse. Néanmoins, de telles expérimentations, impliquant au préalable une étude approfondie sur le cycle de vie des polystomes, restent primordiales à développer à l’avenir afin d’appréhender les niveaux de stress engendrés d’une part, par la présence de parasites non-natifs et d’autre part, par la combinaison de facteurs de stress biotiques et abiotiques agissant en synergie.

Enfin, l’utilisation de notre outil de mesure de stress sur des populations d’émyde lépreuse en milieu naturel sur différents sites contrastés, nous a permis d’obtenir des résultats intéressants montrant que les animaux échantillonnés dans les sites les plus pollués sont les plus stressés. De plus, nous avons montré que les stations d’épurations localisées sur les deux cours d’eau les plus chargés en contaminants pourraient jouer un rôle important dans le stress subit par les organismes. En effet et contre toute attente, ce sont les tortues échantillonnées après les stations d’épurations qui sont les plus stressées, ce qui suggère que les eaux rejetées par les STEP pourraient avoir un impact négatif sur la biodiversité. Par manque de temps et devant l’investissement financier que représente la mesure des variations des activités enzymatiques, nous avons choisi dans ce travail de thèse de nous focaliser sur l’émyde lépreuse. Il serait intéressant à l’avenir d’appliquer cet outil sur les populations de cistudes, voire même sur d’autres espèces modèles en danger.

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CHAPITRE I: INTRODUCTION

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