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PARTIE 3 : DISCUSSION

1. SYNTHÈSE DE L’ÉTUDE PERSONNELLE

1.1.1. Description de l’échantillon

Les patients inclus entre le 12/11/2014 et le 19/03/2015, au sein du pôle universitaire de psychiatrie adulte (secteur 33G05 et 33G06) du centre hospitalier Charles Perrens, sont, en moyenne, âgés de 40 ans, avec 52% de femmes et 48% d’hommes. La majorité de l’échantillon souffre de troubles de l’humeur, diagnostic retrouvé chez 59% des patients, tandis que les troubles psychotiques sont retrouvés chez 41% des patients. La moitié des sujets est hospitalisée en soins psychiatriques libres. La plupart des patients (89%) ont déjà été hospitalisés en psychiatrie. 50% sont bénéficiaires de l’AAH et 24% d’une mesure de protection des biens. Enfin, près de la moitié des patients (48%) présente une comorbidité somatique, les plus fréquentes étant les pathologies métaboliques (19%) et endocrinologiques (17%).

1.1.2. Accès à internet, supports, applications

Plus des trois quarts des patients inclus (78%) déclarent avoir accès à internet. Les supports d’accès à internet les plus représentés sont les ordinateurs à domicile (91% des patients) et les smartphones (66%). L’utilisation d’applications numériques orientées vers la santé reste minoritaire dans cet échantillon. Par exemple, seuls 8% des patients interrogés utilisent une ou plusieurs applications destinées à surveiller le poids et l’activité physique.

1.1.3. Utilisation d’internet pour rechercher des informations de santé

Près des deux-tiers (64%) des patients interrogés déclarent avoir déjà utilisé internet pour rechercher des informations de santé. Chez les patients déclarant n’avoir jamais réalisé de recherches internet sur la santé, 31% citent comme motif le fait de ne pas savoir (ou très peu) se servir d’internet, mais 54% des patients déclarent qu’ils utiliseront probablement ou certainement internet, à l’avenir, pour se renseigner sur la santé.

Les principaux troubles psychiatriques recherchés par les patients sur internet sont représentés par le trouble bipolaire (48%) et la schizophrénie (22%). Concernant les traitements médicamenteux psychotropes, 20% des patients ont déjà fait une recherche internet sur la santé concernant les thymorégulateurs (LITHIUM et VALPROATE essentiellement) et 17% concernant les

antipsychotiques (CLOZAPINE et AMISULPRIDE essentiellement). Les informations recherchées sur les psychotropes étaient majoritairement les effets secondaires. Enfin, la majorité des patients estime que leurs recherches internet sur la santé ont eu un impact sur leur comportement de santé concernant l’usage des psychotropes.

Les principales pathologies somatiques à propos desquelles les patients ont effectué des recherches internet sont les maladies sexuellement transmissibles (13%) et les cancers (11%).

Parmi les patients utilisant internet pour rechercher des informations de santé, la plupart (83%) déclarent n’avoir jamais « chatté » avec un internaute à propos d’un problème de santé. D’autre part, seulement quatre patients (6%) déclarent avoir créé un blog à propos de la santé. Enfin, 47% estiment leur niveau d’anglais suffisant pour comprendre les sites internet anglo-saxons.

Seulement deux patients connaissent le label HON (Health On the Net). Concernant le fait de vérifier les auteurs, objectifs et sponsors des sites internet de santé visités, la moitié des patients utilisant internet pour la santé déclarent y être sensibilisés.

Parmi les patients utilisant internet pour rechercher des informations de santé, plus d’un tiers des patients (39%) souhaitent pouvoir utiliser plus fréquemment internet pour ce type de recherches. Enfin, sur un total de 272 recherches internet sur la santé citées par les soixante-quatre patients utilisateurs d’internet pour la santé, le site doctissimo.fr arrive en première position (18%), suivi de wikipédia.org (11%) et enfin des forums sans précision (6%).

1.1.4. Points positifs et négatifs, améliorations souhaitées par les patients

Soixante patients ont pu citer un ou plusieurs points positifs de l’utilisation d’internet pour se renseigner sur la santé. 25% ont cité la rapidité d’internet et 22% la possibilité de se cultiver et d’apprendre des choses. Par ailleurs, 52 patients ont pu citer un ou plusieurs points négatifs. Les points négatifs les plus cités étaient quant à eux la faible qualité de l’information (50%) et la difficulté relative au tri de l’information (17%). Les améliorations souhaitées par les patients interrogés concernant les informations de santé sur internet sont principalement une augmentation de l’encadrement par l’état du contenu internet, davantage de sites internet réalisés par des professionnels de santé et davantage de schémas explicatifs, dessins, photos et vidéos.

1.1.5. Psychothérapies et achats de médicaments en ligne

Parmi les utilisateurs d’internet pour la santé, seulement 15% se sont déjà rendus sur des sites internet proposant des psychothérapies en ligne, et deux patients déclarent avoir bénéficié d’une psychothérapie sur internet. Les modalités de cette psychothérapie sont pour le premier patient d’une

seule séance gratuite via un support vidéo sur YouTube, tandis que pour l’autre patient, ces modalités ne sont pas précisées. Parmi les patients n’ayant jamais bénéficié de psychothérapies en ligne, les trois- quarts ne sont pas au courant de cette possibilité, et près des deux tiers n’imaginent pas avoir recours un jour à une psychothérapie sur internet.

Un utilisateur d’internet pour la santé sur dix déclare s’être déjà procuré des médicaments sur internet. Les molécules citées vont de la pommade antalgique aux diurétiques et amphétamines.

1.1.6. Les médecins et internet

Seulement cinq patients utilisateurs d’internet pour la santé possédaient l’adresse e-mail de leur médecin généraliste. Cependant, plus des deux tiers des patients souhaitaient pouvoir communiquer un jour par e-mail avec leur médecin généraliste. Près d’un patient utilisateur d’internet pour la santé sur quatre déclarait avoir déjà vérifié sur internet des informations délivrées par leur médecin généraliste. Ces vérifications portaient essentiellement sur un traitement prescrit ou proposé (dix patients) ainsi que sur un diagnostic médical (neuf patients).

Moins de 10% des utilisateurs d’internet pour la santé déclaraient discuter avec leur médecin généraliste de leurs recherches internet sur la santé. De fait, la quasi-totalité des patients (89%) n’ont pas de telles discussions avec leur médecin généraliste, le motif le plus fréquemment cité étant de ne le voir que rarement (14%).

Au sein de l’échantillon, alors 50% des patients souhaitaient que les médecins qui participent à leur prise en charge leur recommandent des sites internet sur la santé (78,1% des utilisateurs d’internet pour la santé), seuls cinq patients déclarent que leur médecin généraliste leur a déjà recommandé un site internet en particulier.

Un seul patient utilisateur d’internet pour la santé déclare avoir déjà été mis en garde par son médecin traitant concernant les sites internet financés par l’industrie pharmaceutique.

1.1.7. Analyses comparatives

Les analyses comparatives concernant l’utilisation d’internet pour se renseigner sur la santé entre les patients souffrant de trouble bipolaire et ceux souffrant de troubles psychotiques ne retrouvent pas de résultats statistiquement significatifs. Cependant, quelques différences de fréquences sont à noter et ont été mentionnées plus haut.

1.2. Limites méthodologiques

Le protocole de recherche expose à plusieurs types de biais :

- Un biais de sélection, d’abord. En effet, notre étude a été menée au Centre Hospitalier Charles Perrens au sein d’un unique pôle hospitalier universitaire ayant un secteur de recrutement essentiellement urbain. Ainsi, la généralisation des résultats est limitée, avec une possible sélection d’une population ayant un usage plus fréquent d’internet que l’ensemble de la population des patients hospitalisés en psychiatrie quel que soit le secteur d’origine. D’autre part, la nécessité pour les patients d’être hospitalisés afin de participer à notre étude sélectionne les patients ayant les troubles psychiatriques les plus sévères. Ainsi, nous pouvons émettre l’hypothèse selon laquelle l’utilisation d’internet chez les patients souffrant de troubles psychiatriques sévères et hospitalisés à temps complet diffère de celle des patients souffrant des mêmes troubles mais n’ayant jamais été hospitalisés, notamment du fait de l’importance des troubles cognitifs et de leur retentissement fonctionnel, très certainement à l’origine d’une plus faible propension à utiliser internet ;

- Un biais d’information et de mémorisation, ensuite, en lien avec la symptomatologie aiguë des sujets pouvant être à l’origine de difficultés de compréhension concernant certains items du questionnaire, mais aussi de troubles cognitifs de type mnésiques propres aux pathologies psychiatriques notamment celles psychotiques, ces facteurs pouvant impacter la qualité des réponses apportées. En effet, certains patients interrogés ont pu, par exemple, oublier d’avoir effectué par le passé une recherche internet sur la santé, surtout si celle-ci fut ponctuelle et unique. Par ailleurs, la question « Avez-vous déjà utilisé internet pour rechercher des informations médicales ou pour échanger autour de la santé ? » pouvait ne pas faire écho à certains patients ayant un déni de leurs troubles psychiatriques et estimant qu’une recherche internet sur la psychiatrie, sur leurs symptômes, diffère d’une recherche sur les autres thèmes de santé ou sur la médecine en général ;

- Enfin, l’absence de prise en compte de la sévérité symptomatologique au moyen d’échelles standardisées expose à un biais de confusion.

2. Bilans et propositions concernant l’utilisation d’internet pour se renseigner sur la santé

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