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Chapitre 2 : Éléments de contextualisation

2. La situation sociolinguistique en Algérie

2.3 Le statut de la langue française

L'histoire de la présence de la langue française remonte aux années 1830 suite à la colonisation qui ne se contentait pas de s'emparer de la terre des Algériens en abusant de ses ressources et en malmenant son peuple ; mais elle s'est laissée aller jusqu'à vouloir dénaturer les Algériens eux-mêmes. Le colonisateur voyait nécessaire : « désagréger définitivement les fondements de l'organisation arabe et de pratiquer une guerre intensive à la culture et à la langue arabe 44 ». En adoptant la politique de la terre brulée l'envahisseur :

Désintégra tous les repères sociaux, économiques et culturel de l'identité algérienne et leur substitua les référents de l'état colonial, symbolisé par la puissance armé, le pouvoir politique, le pouvoir juridique et surtout l'imposition de la langue française45.

Mais, malgré le rejet absolu et les tentatives désespérées contre cette francisation forcée ; les

43 Zaboot, T. (1989). Un code switching algérien : le parler de Tizi Ouzou. Thèse en Sciences du Langage.

Université de la Sorbonne. p50.

44 Cherrad Benchafra, Y (et all). (2002). Le français en Algérie. Editions Duculot. p.19. 45 Loc.cit.

40 Algériens se trouvaient contraints d'apprendre à parler en français puisqu' elle fut la langue du pain, tout en gardant jalousement leurs coutumes et leur langue en dépit du colonisateur. En effet, la langue française a été imposée en tant que langue officielle en Algérie de 1830 à 1962, veillée par une force armée, cette dernière régnait tous les secteurs sans exception :

Notre langue maternelle était en exil dans son propre pays (…), la presse, la radio, les conférences, les films, le théâtre, la publicité sur les murs, les formalités qui vont d’un mondât poste à un état civil, tout ce qui s’écrit, de puis la défense d’afficher jusqu’aux plaques des rues, tout absolument tout, étais privilège et monopole de la langue française46

C’est ainsi que l’Algérie fut coupée du monde arabe et jetée au sein du monde francophone, ce qui n’a laissé aux Algériens que l’obéissance et la maîtrise de cette langue, notamment après la déclaration de l’arabe comme langue étrangère en Algérie en 1938. À partir de 1962, la décolonisation s’est accompagnée de l’arabisme qui pourtant n’a jamais compromis l’usage du français, même si celui-ci a perdu son statut de langue officielle : « Malgré l’indépendance et les actions d’arabisation qui s’en sont suivies, les positions du français n’ont pas été ébranlées, loin de là, son étude ayant même quantitativement progressé du fait de sa place dans l’actuel système éducatif algérien47 ». D’où le bilinguisme et l'obtention de

la langue de Voltaire le statut d'une langue seconde ; ce qui a créé une situation conflictuelle entre les arabophones et les francophones.

Malgré le fait que la langue française ait été considérée officiellement comme langue étrangère depuis 1962 ; l'Algérie a demeuré tout de même dominée par cette langue. Même après l'application des lois visant la généralisation de la langue arabe, notamment la loi Nº 91-5 du 16 janvier 1991 et l’ordonnance Nº 96-30 du 21 décembre 1996 ; La langue française a réussi à garder son prestige qui lui a fourni tous les moyens pour se faufiler à la place de la langue du pouvoir.

Aujourd'hui, le français occupe encore une place prépondérante dans nos administrations, établissements, écoles voire dans nos rues. De cette façon, il sera juste de dire que cette langue a envahi notre refuge au sens littéral du terme puisque l'Algérie s'est classée le deuxième plus grand pays francophone au monde après la France en 2012, mais « Le français en tant que langue de l'ancien colonisateur a un statut ambigu ; d'une part, il attitre le méprise officiel (...) mais d'autre part, il est synonyme de réussite et d'accès à la culture et au modernisme 48 ».

46Haddad, M. (1961). Zéros tournent en rond. Paris. Édition F. p 32.

47Achouche, M. (1981). La situation sociolinguistique en Algérie. Langues et Migrations, Centre de didactique

des langues, Université des Langues et Lettres de Grenoble. p.46.

48 Caubet, D. (1998). «Alternance de codes au Maghreb, pourquoi le français est-il arabisé ? ». In Plurilinguisme, alternance des langues et apprentissage en contextes plurilingues, n°14, décembre 1998.p 122

41 Le français est la langue dans laquelle s'est inscrit le mépris colonial, la langue qui voulait remplacer la langue arabe. Mais, au lendemain de l'indépendance le mépris et l'identité ne sont guère les paramètres en question, tout ce qui importait c'était l'ouverture au monde universel dit moderne. En effet, introduire le plurilinguisme à un âge précoce est : « reconnu par la plupart des pays, notamment au Maghreb presque dans tous les pays arabe comme un atout indispensable pour réussir dans le monde de demain 49 ».

Aujourd'hui, la présence de cette langue constitue un enjeu politique, social, économique et culturel à la fois; car le monolinguisme ne peut contribuer au développement du pays en revanche le multilinguisme permet l'accès aux savoirs et aux connaissances scientifiques et techniques élaborées ailleurs, tout en garantissant le maintien des relations fécondes avec les autres pays , sans pour autant oublier l'essence du développement qu'est l'apprenant.

Une politique rationnelle et avisée des langues étrangères qui tienne compte des seuls intérêts de l’apprenant algérien et de la place de l’Algérie dans le concert des nations, doit être mise en œuvre pour pouvoir accéder à la science, à la technologie et à la culture universelle50.