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GROUPE MBETE (B60) Lembaama

11 Statut du français au gabon

C’est un pays multilingue, la communication dans toutes les strates de la société se fait en français. Le caractère officiel du français n’est plus à prouver puisqu’il est consigné dans la Constitution. Il assume les fonctions les plus prestigieuses, langue littéraire, de la justice et autres domaines importants de la société. En effet, comme le dit P. Dumont (1990, 31)6 que

« Le français a longtemps été considéré, et continue de l’être à juste titre dans bon nombre d’Etats, comme la langue de l’élite, du pouvoir, de la promotion sociale. Ceci reste vrai dans les Etats d’Afrique noire francophone. Mais cette situation n’est pas immuable ».

Afin de faire ressortir l’influence du français face aux langues nationales, nous présenterons un tableau réalisé par M. Rebecca (2000 :187).

Ce tableau est le résultat d’un travail qui a porté sur la distribution des langues au sein de la société gabonaise.

Tableau 3 : l’usage du français face aux langues locales

Bureau administratif

Langues locales (L) Français (Fr) Alternance (A) 10.8% langues locales, pris ici comme une langue indispensable, incontournable, moderne et langue de prestige.

6 DUMONT, P. 1990. Le Français langue africaine.

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On constate que l’usage du français est réservé aux structures publiques, aux environnements où l’on a la possibilité de retrouver toutes les couches sociales et tous les représentants de chacune des langues du Gabon. En effet, le français est une langue dont les Gabonais font usage pour établir facilement la communication avec autrui. Ce choix de langue peut à la limite paraître règlementé au lieu d’être spontané, au mieux naturel.

Ce choix peut aussi s’interpréter comme une marque de respect à son statut professionnel.

Langue de toutes les instances, le français est obligatoire dans les situations étatiques et interethniques. Il favorise la communication entre les personnes qui n’ont pas la même langue maternelle.

Ainsi, l’usage du français s’impose suivant les contextes. Si l’on veut réellement faire des études supérieures, le Gabonais n’a d’autres choix que d’apprendre en français. Car aucune des langues locales n’a ce pouvoir pour l’instant d’accorder ce privilège qui consiste à la réussite sociale.

La prépondérance du français peut aussi s’expliquer par cette tendance de le prendre pour une langue d’élite susceptible de propulser celui qui la détient vers des hauts sommets.

Le français est de ce fait favorable à cet effet à l’insertion sociale et professionnelle.

C’est une langue qui permet d’avoir une ouverture vers le monde extérieur.

En effet, le français détient sa supériorité par le simple fait qu’il est l’édifice même de l’Etat, le véhicule privilégié des « nantis » africains. Le français est aussi le médium exclusif du savoir scolaire et universitaire.

Les travaux de Zang Bie et Emejulu (1999) inspirés d’un tableau de Fisherman (1991) ont constaté que les langues du Gabon sont classées aux stades 6, 7, 8.

Le stade 6 : ce stade correspond aux enfants qui apprennent la langue par le biais des parents, du voisinage et des communautés ;

Le stade 7 : ici, la langue reste limitée aux événements et cérémonies culturelles ; Le stade 8 : la langue est parlée par quelques personnes âgées. Elle est vouée à l’extinction.

Les langues gabonaises sont reléguées au bas de l’échelle sociale et sont exclues de la vie publique.

Il est tout de même nécessaire de reconnaître qu’il existe une coexistence tolérée entre le français et les langues nationales, bien que ces dernières ne soient vouées qu’à un usage familial ou cérémoniel, initiatique. Elles sont à peine représentées dans les médias.

Cette coexistence nous laisse penser qu’il règne au Gabon une diglossie, au sens de Furguson. La diglossie est, dans le cadre du Gabon « tolérée ».

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Car comme l’écrit Davesne (1933 : 4)7 cité par Dumont (1983 : 202) « La langue française est un incomparable instrument de civilisation » et les langues africaines « les dialectes uniquement parlés, à l’extension singulièrement limitée ».

En effet nous avons d’un côté une langue « haute » qui est le français et une langue

« basse », catégorie dans laquelle nous rangeons toutes les langues vernaculaires.

Cependant, le français du Gabon peut avoir une certaine originalité, comme on le rencontre dans les autres coins de l’Afrique francophone d’ailleurs.

Il est imprégné des termes venus de nos langues locales qui viennent enrichir le français en leur donnant un sens originel propre au Gabon. Comme le souligne M. Chansou (1989 :101)8 « la langue a dû faire face à d’énormes dénominatifs pour désigner des nouvelles réalités (…) importées »

Car, nous avons cette possibilité de retrouver des termes puisés dans les langues nationales insérés dans les phrases bâties en français. Bien évidemment ces mots ont plus une coloration hybride.

Pour A. Jacquot (1979 :493)9 « cinq types de langues peuvent être reconnus au Gabon en fonction de leur contexte sociologique : le français, langue officielle ; les langues vernaculaires propres à une communauté humaine géographiquement localisable ; des langues véhiculaires, le français et les variantes du français, langues locales ; des langues spéciales, langues secrètes rituelles ; les langues propres à certaines minorités d’immigrants dont l’usage ne sort pas de ces communautés ».

Compte tenu de la place de choix qu’occupe le français, est-il possible qu’il soit considéré comme une langue maternelle (LM), langue seconde (LS) ou une langue étrangère (LE) ?

L’usage du français et des langues gabonaises sur le territoire est un indicateur de bilinguisme enveloppé d’un soupçon de diglossie qui ne dit pas son nom. Il existe de ce fait un rapport d’inégalité sociale.

Nous nous sommes inspirés des travaux réalisés par Idiata (2002: 81) sur la vitalité des langues gabonaises dans un environnement urbain pour montrer le comportement des élèves face aux langues. Ainsi, l’analyse faite par l’auteur donne les résultats suivants présentés sous forme de tableau.

7 Davesne, A., 1983, La langue française, langue de civilisation en Afrique Occidentale Française, Saint-Louis.

P.4.

8 Chansou : 1989, P101. Réf du doct.

9 Jacquot :1979, P 493

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Tableau 4 : des pourcentages des langues utilisées par les enfants

Ethnies Langues enfants se retrouvent auprès des grands-parents.

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