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Le retrait de dessiccation est la déformation macroscopique causée par la dessiccation du matériau cimentaire. Trois mécanismes sont avancés pour expliquer physiquement le retrait de dessiccation (et celui d’autodessiccation) en conditions isothermes [Kovler 06].

Le premier mécanisme du retrait de dessiccation est la variation de pression capillaire au sein du matériau qui augmente avec la diminution de l’humidité relative environnante. Cela a pour conséquence la contraction locale de la matrice cimentaire qui à l’échelle macroscopique donne un retrait (figure 1.22).

Fig. 1. 22 : Schématisation du retrait par variation de pression capillaire

La variation de la pression de disjonction est le second mécanisme donnant lieu à un retrait. Il existe une zone au sein d’un matériau cimentaire où l’adsorption libre de l’eau est gênée par la taille du pore dans lequel le phénomène a lieu. En effet, comme le montre la figure 1.23, un pore n’ayant plus d’espace à offrir pour l’adsorption d’une nouvelle couche d’eau correspond à une zone d’adsorption empêchée. Ainsi, cette zone est soumise à une pression qui s’oppose aux forces d’attraction des molécules de CSH, appelée pression de disjonction [Bazant 72 cité par Benboudjema 02].

Fig. 1. 23 : Représentation schématique de la pression de disjonction dans une zone d’adsorption empêchée [Benboudjema 02]

De ce fait, la pression de disjonction est reliée aux couches d’eau adsorbée, c'est-à-dire à la saturation en eau du matériau. Le nombre de couches d’eau adsorbée varie au sein des zones d’adsorption empêchée en fonction de l’humidité relative environnante, ce qui influence la pression de disjonction. Elle est alors maximale à l’état saturé et décroit sous dessiccation. La

Phase gazeuse (air sec et vapeur d’eau) Phase d’eau liquide

Phase solide Etat d’équilibre 2r Etat contracté 2r Pression capillaire Tension superficielle de l’eau Contraction locale de la phase solide

variation de pression de disjonction est définie par l’équation de Kelvin (équation (6)), comme pour la pression capillaire [Mounanga 03] et elle est schématisée figure 1.24 :

ln( ) disj eau eau RT P HR M ρ = (10)

où R est la constante des gaz parfaits ; T : la température [K] ; HR : l’humidité relative ;

eau

M : masse molaire de l’eau et ρeau : la masse volumique de l’eau. La masse volumique de l’eau est fonction de la température ; ses valeurs sont respectivement 998,29 kg/m3 à 20°C, 988,02 kg/m3 à 50°C et 971,6 kg/m3 à 80°C [base Thermexcel].

Fig. 1. 24 : Schématisation du retrait par variation de pression de disjonction

Le troisième mécanisme mis en avant est la variation des tensions superficielles des molécules d’eau adsorbées sur les hydrates du matériau. Lorsque l’humidité relative est inférieure à 40%, les couches d’eau adsorbées aux hydrates diminuent, ce qui augmente les tensions superficielles qui existent entre les CSH et les molécules d’eau encore adsorbées. Ainsi, la matrice cimentaire se contracte localement pour compenser la variation des tensions superficielles des couches d’eau adsorbées, induisant un retrait à l’échelle macroscopique. Il est possible de définir le gonflement linéaire l

l

produit par l’adsorption d’eau sur la paroi

solide par l’équation (11) [Mounanga 03] :

0 ( ) l A l γ γ ∆ = − (11) où γ0 est l’énergie superficielle de l’interface sans eau adsorbée ; γ est l’énergie superficielle de l’interface avec eau adsorbée et A constante dépendant du matériau et de sa structure.

Etat d’équilibre Pression de disjonction Contraction locale de la phase solide Etat contracté

Phase gazeuse (air sec et vapeur d’eau) Phase d’eau liquide

Phase d’eau adsorbée Phase solide

Actuellement, bien que nous connaissions les mécanismes du retrait de dessiccation, la prépondérance d’un des mécanismes en fonction de l’humidité relative diffère selon les auteurs [Xi 92]. Cependant, afin de décrire le plus précisément le comportement hydrique du matériau, il est utile de définir quel mécanisme est mis en jeu en fonction des conditions de dessiccation imposées.

Influence de la composition

Le retrait de dessiccation dépend des paramètres de composition du matériau. Le rapport E/C (et donc la porosité) influence l’amplitude du retrait de dessiccation, comme le montrent les résultats expérimentaux de Ma et al., qui mesurent le retrait de dessiccation d’un mortier avec différents rapports E/C [Ma 07 ; Rougelot 08].

Fig. 1. 25 : Influence du rapport E/C sur le retrait de dessiccation [Ma 07]

La hausse du rapport E/C accroît les déformations de retrait de dessiccation. L’augmentation de la proportion d’eau libre au sein du réseau poreux, lui-même de volume plus important, conduit à une matrice cimentaire moins dense et plus sensible aux mouvements de l’eau. Ainsi, sous l’effet de la pression capillaire, la matrice cimentaire présente une contraction locale plus importante et cela donne, à l’échelle macroscopique un retrait de dessiccation plus important.

La nature du ciment est aussi un paramètre qui influence le retrait de dessiccation [Kanna 98 ; Collins 00 ; Mokarem 05]. Jianyong et al. ont mesuré le retrait de dessiccation de trois bétons fabriqués de ciment Portland, avec ou sans additions, et constatent la similitude du retrait des bétons additionnés par rapport à celui à base de ciment Portland [Jianyong 01].

Fig. 1. 26 : Influence de la nature du ciment sur le retrait de dessiccation [Jianyong 01]

(Concrete A  à base de ciment Portland ; Concrete B  30% du poids du ciment remplacé par laitiers de hauts fourneaux ; Concrete C  30% du poids du ciment remplacé par laitiers de haut fourneaux et 10% de

fumée de silice)

Le raffinement de porosité et l’augmentation de densité du matériau, causés par les additions de laitiers et de fumées de silice, sont les causes de la diminution du retrait de dessiccation.

Influence de la température

L’augmentation de la température fait accroitre la dépression capillaire, mise en évidence par la relation de Kelvin (équation (6)). Ceci aura pour conséquence d’intensifier la contraction locale de la phase solide du matériau, ce qui donne à l’échelle macroscopique un retrait plus important et donc un risque de fissurations plus élevé. De la même manière, la pression de disjonction va évoluer avec la température. En effet, l’élévation de température diminue le nombre de couches d’eau adsorbée, ce qui fait diminuer la pression de disjonction, causant un retrait de dessiccation plus important.

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