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Il faut respecter les souhaits du peuple colonisé, cela était exprimé par la Cour internationale de Justice dans son avis consultatif concernant l’affaire du Sahara

Conclusion du chapitre I

A. La colonisation : un fait potentiellement illicite

96. Il faut respecter les souhaits du peuple colonisé, cela était exprimé par la Cour internationale de Justice dans son avis consultatif concernant l’affaire du Sahara

Occidental en 1975. La consultation ne signifie pas nécessairement l’organisation

d’un référendum, mais il y a peut-être des signes qui reflètent la position majoritaire 345. Le peuple dispose du droit d’exprimer sa volonté librement ; et en ce sens, l'Assemblée Générale des Nations Unies admet « que, conformément à l'alinéa b de l'Article 76 de la

Charte, le statut futur du territoire doit être décidé compte tenu des conditions particulières au territoire et des aspirations librement exprimées de ses populations 346 ;

1. Décide, en vue de la révision ou de l'expiration future de l'accord de tutelle, que des mesures doivent être prises, compte tenu des conditions particulières au territoire sous tutelle, afin de connaître les aspirations des habitants du territoire quant à leur avenir, sans préjudice de la solution qu'ils choisiront en fin de compte, qu'il s'agisse de l'indépendance, de l'unification d'un Togo sous administration britannique indépendant et d'un Togo sous administration française indépendant, de l'union à une Côte-de-l'Or indépendante, ou de tout autre statut d'autonomie ou d'indépendance » 347.

Ainsi, la Cour comme on l’a rappelé plus haut, insiste sur la prise en compte des particularités des peuples en cause, de leurs souhaits et aspirations. Cela va sans dire que dans le cadre de l’exercice du droit dont dispose les peuples pour le choix par exemple de leur gouvernant, on devrait tenir compte des particularités et spécificités qui entourent ceux-ci.

345 Affaire du Sahara Occidental, résumés des jugements, et avis, loc.cit., p. 132.

346 860 (IX) 14 décembre 1954, Question de l'unification du Togo ; avenir du territoire sous tutelle du Togo sous administration britannique, résolutions adoptées par l'Assemblée Générale au cours de sa neuvième session, p. 34.

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L'expression de la volonté du peuple peut se faire par plébiscite, comme l’Assemblée Générale a indiqué : « l'Assemblée Générale, recommande que l'autorité administrante,

conformément à l'alinéa b de l'Article 76 de la Charte des Nations Unies, prenne, en consultation avec un Commissaire des Nations Unies aux plébiscites, des mesures pour organiser, sous la surveillance de l'Organisation des Nations Unies, des plébiscites séparés dans la partie septentrionale et dans la partie méridionale du Cameroun sous administration du Royaume-Uni, afin de déterminer les aspirations des habitants du territoire au sujet de leur avenir » 348.

La Cour souligne dans un de ses avis consultatifs que la liberté d’association doit être la résultante d’une parfaite volonté du peuple suivant des choix démocratiques et transparents ouverts à tous et que suivant le principe de l’intégrité, l’intégration doit naitre de la volonté du peuple sous le contrôle éventuel des Nations Unies 349.

Il est recommandé par l'Assemblée Générale des Nations Unies, que l'autorité administrant le pays qui acquiert son autodétermination organise un référendum afin de s’assurer les souhaits de sa population, comme cela a été le cas du Nord du Cameroun en octobre1961 350.

Il apparaît donc que le respect de la volonté du peuple est très important. On reprendra à cet effet, l’opinion du juge VERESHCHETIN qui déclare que : « la Charte des Nations

Unies n'impose pas expressément aux puissances administrantes l'obligation de consulter le peuple d'un territoire non autonome lorsque la question en cause l'intéresse directement » ; mais de l'avis de M. VERESHCHETIN, la jurisprudence de la Cour montre

que cette obligation existe en droit international, au présent stade de son développement, et dans le cadre actuel du processus de décolonisation 351. De ce point de vue, notons que même si les dispositions du droit international ne prescrivent pas de manière ferme l’obligation de consulter le peuple dans ces cas, la doctrine note que ce devoir résulte bien des décisions rendues par les cours et tribunaux.

348 1350 (XIII) 13 mars 1959, Avenir du territoire sous tutelle du Cameroun sous administration du Royaume-Uni, résolutions adoptées par l'Assemblée Générale au cours de sa treizième session, p. 2.

349 Affaire du Sahara Occidental, loc.cit., p. 37, §. 72.

350 Opinion individuelle de M. VERESHCHETIN, dans l’affaire du Timor Oriental, arrêr du 30 juin 1995,

loc.cit., p. 138.

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Dans la même affaire relative au Timor Oriental, le peuple du Timor Oriental a encore aujourd'hui le droit à disposer de lui-même. L'Assemblée Générale lorsqu’elle parle de discrétion, elle renvoie à l’idée selon laquelle la nécessité d’un référendum doit s’apprécier selon les cas. Ainsi, s’agissant du plébiscite, on voudrait savoir si un peuple accepte de se rattacher à un autre pour un destin commun 352.

Dans l’affaire de la Namibie (Sud-ouest Africain), on peut également noter que le plébiscite organisé sous le contrôle des Nations Unies visait à permettre au peuple de donner son opinion sur son avenir politique 353.

De même, la résolution de l’Assemblée Générale concernant le Sud-ouest Africain, impose la « préparation d'élections générales à l'Assemblée législative qui devront avoir

lieu aussitôt que possible, sur la base du suffrage universel des adultes, sous la surveillance et le contrôle de l'Organisation des Nations Unies, conseils et assistance au Gouvernement issu des élections générales, en vue de préparer l'accession du territoire à l'indépendance complète » 354.

97. Le droit à l’autodétermination passe aussi par l’ouverture dans les procédés mis en place pour permettre aux peuples d’effectuer leurs choix. Cela fait appel à l’élection qui devrait être ouverte à tous les membres du groupe.

Il faut respecter les droits et les libertés des peuples colonisés. Par exemple dans l’affaire concernant l'Angola l’Assemblée Générale affirme que : « notant que dans le

territoire de l'Angola, comme dans d'autres colonies portugaises, la population autochtone est privée de tous les droits et libertés fondamentaux » 355, il faut en conséquence que les autorités ;

« prennent des mesures politiques, économiques et sociales de vaste portée en vue

d'assurer la création d'institutions politiques librement élues et représentatives et

352 Affaire relative au Timor Oriental, 1992, loc.cit., p. 174, §. 6.32.

353 Affaire des conséquences juridiques pour les Etats de la présence continue de l'Afrique du Sud en

Namibie (Sud-ouest Africain), nonobstant la résolution 276 (1970), résumé de l'avis consultatif du 21 juin 1971, loc.cit., p. 65.

354 1702 (XVI) 19 décembre 1961, Question du Sud-ouest Africain, résolutions adoptées par l'Assemblée Générale au cours de sa seizième session, p. 40.

355 1819 (XVII) 18 décembre 1962, la situation en Angola, résolutions adoptées par l'Assemblée Générale au cours de sa dix-septième session, p. 7.

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le transfert des pouvoirs au peuple Angolais ; conformément à la déclaration sur l'octroi de l'indépendance aux pays et aux peuples coloniaux » 356.

Ou encore comme fît M. JOSE RAMOS HORTA, au Conseil de sécurité. Evoquant l'intégration, il admettait, au mois d'avril 1976, qu'elle puisse naitre de la volonté du peuple cependant en affirmant : « [...] pour que le choix soit vraiment libre, il faut que la

population soit libre. Il faut donc respecter la liberté de la population du Timor Oriental, acquise au prix de siècles de souffrances, pour respecter cette liberté que s'est acquise la population du Timor Oriental, il faut reconnaître le droit du peuple à l'indépendance; il faut donc reconnaître la République démocratique du Timor Oriental. Ce n'est que lorsqu'elle sera reconnue que l'on pourra dire que la population est libre et souveraine, jouissant des conditions minimales lui permettant de prendre toutes décisions concernant son avenir. Sinon, il y aura une contradiction flagrante, aucun colonisé ne pouvant être libre. Or, un être qui n'est pas libre ne peut pas décider de son avenir et, dans ces conditions, il ne peut pas exercer son droit à l'autodétermination. Il faut donc reconnaître et soutenir son droit à la liberté et son droit à créer une nation indépendante [...] » 357.

Cette idée appelle à un préalable à l’exercice du droit d’un peuple à disposer de lui-même à savoir qu’il puisse jouir d’une certaine liberté. En effet sans liberté, le peuple ne saurait décider efficacement et par conséquent jouir de son droit à l’autodétermination.

En d’autres termes, le rejet du colonialisme conduit à mettre fin aux souffrances et à la domination des peuples, à reconnaître l’indépendance et la souveraineté de ces derniers et à favoriser par conséquent son droit à l’autodétermination ; ce qui apparaît à nos yeux comme un droit inaliénable permettant aux Etats d’exister et de s’affirmer juridiquement dans une société embarquée dans le train de l’universalité.

356 Ibid.

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3. Le maintien de l’unité territoriale

98. La crainte de voir les puissances colonisatrices ou la puissance administrante, sous le