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Renforcer des approches thématiques pour réduire l’incidence des EIG

7.1 Promouvoir de nouveaux objectifs pour développer la sécurité des patients

7.1.1 Renforcer des approches thématiques pour réduire l’incidence des EIG

La finalité principale d’une politique de sécurité des patients est de prévenir les risques associés à la prise en charge des patients et d’en limiter les effets (récupération des erreurs, voire atténuation des conséquences pour les patients lorsque des dommages surviennent).

Cette réduction de risque est difficile à atteindre pour plusieurs raisons :

• Le terme d’EIG est hétérogène ; il recouvre un large spectre d’évènements qui concernent des pratiques de soins très différentes. Il faut donc agir conjointement sur de multiples cibles, le plus souvent d’ordre structurel ou organisationnel, pour espérer obtenir un résultat d’ensemble. Certains correspondant à la définition du décret de 2016 et doivent être déclarés aux ARS, d’autres non.

• Les EIG mettant en cause les organisations et les pratiques de soins, les actions de prévention correspondantes doivent être mises en œuvre localement ; il est difficile d’obtenir un déploiement uniforme de mesures qui concernent toutes les unités de soins, les cabinets libéraux et les établissements médico-sociaux sur l’ensemble du territoire national.

• Les modalités de mesure du risque d’EIG sont complexes, car les systèmes d’information existants sont incapables d’identifier l’ensemble des EIG. Comme dans d’autres pays, seules les enquêtes nationales (telles qu’ENEIS en France) ont jusqu’à présent permis d’estimer ce risque pour l’ensemble des EIG.

En l’état des connaissances disponibles (ENEIS 2009 pour les plus récentes), l’objectif de réduction globale de l’incidence des risques implique une déclinaison selon de multiples « thèmes » constitutifs des EIG, définis :

• Soit par le type de soins en cause : actes invasifs, médicaments, imagerie médicale, etc.

• Soit par le type de conséquences sur la santé ou le mécanisme : infections, hémorragies, chutes, etc.

Cette nouvelle approche a été mise en œuvre dans les plans nationaux de sécurité des patients analysés plus haut (cf. 4.3.1), comme par exemple aux Pays-Bas où un premier plan similaire au PNSP 2013-2017, visant à développer une culture de sécurité chez les professionnels de santé, a été suivi de deux plans nationaux consacrés à des objectifs plus ciblés.

Ainsi, la poursuite de la politique de sécurité des patients requiert la définition de priorités en matière de thèmes cible et devrait associer deux directions :

- Poursuivre les approches thématiques déjà en place - Considérer de nouvelles thématiques

Poursuivre les approches thématiques déjà en place

Actuellement ces approches concernent principalement la lutte contre les infections associées aux soins, celle visant les risques associés aux médicaments, et la radioprotection. Cette poursuite veillerait à mieux les intégrer dans une politique unique de développement de la sécurité des patients du fait d’actions de nature commune (analyse des évènements, retour d’expérience, etc.).

Poursuivre le Propias en l’intégrant à une politique globale de sécurité des patients

Dans l’enquête ENEIS 2009, l’incidence des infections associées aux soins représentait 0,9 pour 1000 journées d’hospitalisation (soit plus du tiers des EIG évitables survenant en cours d’hospitalisation) et ces infections représentaient 0,7 % des causes d’admission (soit plus du quart des EIG évitables à l’origine d’une hospitalisation). Ces infections restent donc une cible prioritaire de la sécurité des patients.

Les objectifs du programme national d'actions de prévention des infections associées aux soins (Propias) conduit depuis 2015 s’articulent autour de 3 axes prioritaires relatifs à la prise en charge du patient et de son parcours au sein des secteurs d’offre de soins en établissements de santé, médico-sociaux et en ville :

- Développer la prévention des infections associées aux soins - Renforcer la prévention et la maitrise de l’antibiorésistance

- Réduire les risques infectieux associés aux actes invasifs tout au long du parcours de santé.

Le Propias est inscrit dans la durée et doit évoluer au regard des évaluations qui en seront faites et de l’évolution des politiques de santé. Sa mise en œuvre s’appuie sur l’amélioration des comportements et sur le décloisonnement des secteurs de l’offre de soins.

Réduire la survenue des EIG liés à la prise en charge médicamenteuse (PECM)

Dans l’enquête ENEIS 2009, l’incidence des EIG liés aux médicaments représentait 0,7 p 1000 journées d’hospitalisation (soit plus du quart des EIG évitables survenant en cours d’hospitalisation) et ces événements représentaient 1,3 % des causes d’admission (soit la moitié des EIG évitables à l’origine d’une hospitalisation). Il s’agit donc là aussi d’une priorité en matière de sécurité des patients. L’OMS a d’ailleurs fixé en 2017 la réduction de moitié des effets graves évitables liés à des erreurs de prise en charge médicamenteuse comme objectif dans les 5 ans32.

De multiples mesures ou dispositifs sont consacrés à la prévention de ce risque mais de manière segmentée et principalement dans les établissements de santé. Chacune des approches (pharmacovigilance, système de management de la qualité de la prise en charge médicamenteuse et gestion des risques, suit sa propre méthode d’analyse. Les retours d’information ou d’expérience issus des signalements sont pour l’instant limités.

En fait ces approches dissociées s’expliquent par l’origine majoritairement multifactorielle des EIG liés aux médicaments. La prévention de ce risque doit prendre en compte le processus de prise en charge médicamenteuse du patient dans son ensemble, et ses composantes successives : le médicament lui-même, le dispositif médical associé, le cas échéant, le patient, son ou ses affections et ses caractéristiques socio-culturelles, les professionnels de santé et leurs pratiques, l’organisation des soins, le système d’information disponible, etc. Cette complexité invite à considérer les EIG liés au médicament comme le résultat d’un processus multifactoriel et à rechercher des causes possibles ou des modalités de prévention tout au long du parcours de soins (voir plus loin).

32 Medication without harm: WHO's Third global patient safety challenge

Il s’agira ainsi d’agir aux différents niveaux :

Prioriser les médicaments à risque et les classes thérapeutiques les plus en cause dans les EIG évitables, en agissant de la prescription (formation sur leur pertinence et bon usage) jusqu’à leur suivi, incluant une détection précoce des EI sans attendre la survenue d’EIG ;

La communication, l’information et l’éducation thérapeutique des patients en tenant compte de leur adéquation réelle (littératie en santé) dans une approche patient partenaire ;

L’organisation et la collaboration inter professionnelle notamment au niveau des interfaces de parcours : rôles propres et rôles collaboratifs autour de la PECM (hospitaliers et libéraux), pour une PECM adaptée et sécurisée, en lien avec les nouvelles organisations (maisons de santé), missions (pharmacie clinique, infirmiers de pratique avancée) ou chantiers de transformation du système de santé, ainsi que le développement des analyses d’incidents et de retours d’expérience intersectoriels.

Poursuivre dans le domaine de la radioprotection et l’intégrer à la politique de développement de la sécurité des patients

L’utilisation des rayonnements ionisants est l’objet d’un important encadrement réglementaire. L’Autorité de Sureté Nucléaire (ASN) et la HAS ont mis en place un système de management de la sécurité dans les trois secteurs concernés : radiologie, médecine nucléaire et radiothérapie.

Une vingtaine de programmes d’amélioration visent à sécuriser le parcours des patients concernés et améliorer leurs soins, en matière de pertinence, de qualité et de sécurité. Les divers outils correspondants sont également destinés à être mis en œuvre dans le cadre du développement professionnel continu, de la certification des établissements de santé voire de l’accréditation des professionnels et des équipes exerçant des pratiques à risques, comme par exemple la radiothérapie et les actes interventionnels radioguidés.

Ces mesures et dispositifs doivent être poursuivis.

Considérer de nouvelles thématiques

Réduire la survenue des EIG liés à des actes invasifs

Dans l’enquête ENEIS 2009, l’incidence des EIG liés à des actes invasifs était de 0,9 p 1000 journées d’hospitalisation (soit plus du tiers des EIG évitables survenant en cours d’hospitalisation,) et ces EIG représentaient 0,7 % des causes d’admission (soit plus du quart des EIG évitables à l’origine d’une hospitalisation). Ces estimations sont similaires à celles des infections associées aux soins. Ces EIG devraient donc constituer eux aussi une priorité de la sécurité des patients.

De multiples actions ou dispositifs de prévention visent déjà à réduire ce risque d’EIG, comme par exemple la mise en place de la check-list « Sécurité du patient au bloc opératoire », les mesures de prévention des infections du site opératoire ou la procédure de certification des établissements, notamment l’organisation du bloc opératoire (critère 26.a).

La proposition de réduire la survenue des EIG liés à des actes invasifs vise à aller plus loin en explorant plusieurs pistes :

- Prendre en compte la pertinence des actes invasifs en veillant à réduire la fréquence de soins non appropriés, mais aussi des retards ou des erreurs lors de la délivrance des soins, notamment en lien avec l’identitovigilance ;

- Considérer l’ensemble des EIG liés à des actes invasifs comme objectif de réduction de risque, en étendant la cible des infections aux autres EIG, comme les complications mécaniques ou hémorragiques ; cette approche globale est plus conforme à une logique de patient ;

- Inscrire la prévention des risques liés aux actes invasifs dans l’ensemble du parcours du patient, c’est-à-dire en amont (préparation) et en aval (suivi) de leur réalisation. La politique envisagée de « virage ambulatoire » va en particulier induire une réduction de la durée d’hospitalisation au décours d’un acte chirurgical qui pourrait exposer les patients concernés à des risques accrus d’EIG, qu’il faut absolument anticiper.

Promouvoir la sécurité des patients dans les nouveaux processus de soins

Les données de la dernière enquête ENEIS remontent à près de 10 ans ; il est vraisemblable que les résultats de la nouvelle enquête ENEIS attendus pour 2020 apporteront de nouvelles connaissances sur les EIG à prioriser.

Les nouvelles modalités de soins, comme l’extension de l’usage du numérique, la télémédecine ou les nouveaux dispositifs de coordination des soins pourraient générer des risques spécifiques et nécessitent de mettre en place un système de veille adaptée. En outre la définition de priorités en la matière doit prendre en compte les perceptions et l’acceptabilité de ces risques par les patients et les professionnels. C’est la raison même de mise en œuvre d’une concertation suivie (voir plus loin).

Les propositions ci-dessus devront dont être révisées régulièrement.