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Chapitre 2 : Introduction diastéréosélective de la chaîne éthyl-3-furyle via des

I.3 Introduction de la chaîne éthyl-3-furyle par couplages radicalaires avec l’α-iodocétone 70 :

I.3.2 Les radicaux : généralités :

Il existe plusieurs méthodes de génération de radicaux ; soit (Schéma 106) :

 Par coupure homolytique de liaisons « faibles » de type σ (c’est le cas des initiateurs de radicaux tels que les peroxydes (équation 1),

 Par transfert d’électron ou addition d’un électron (type réduction de Birch, voir chapitre 2, (équation 2),

 Par substitution (abstraction) d’un radical (équation 3),  Par addition d’un radical (équation 4),

 Par élimination (équation 5).

158 (a) Kharasch, M. S.; Mayo, F. R. J. Am. Chem. Soc. 1933, 55, 2468–2496.

(b) Kharasch, M. S.; Engelmann, H.; Mayo, F. R. J. Org. Chem. 1937, 02, 288–302.

Chapitre 2 : Introduction diastéréosélective de la chaîne éthyl-3-furyle via des stratégies de couplages métallo-catalysés et radicalaires.

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Schéma 106 : Différents types de formation de radicaux.

On distingue plusieurs types de radicaux suivant leur stabilité et leur réactivité. Ces deux notions sont différentes mais liées.

I.3.2.1 Stabilité des radicaux :

La stabilité thermodynamique d’un radical peut être estimée à partir de son énergie de dissociation, c’est-à-dire à partir de l’enthalpie de clivage homolytique de la liaison R-H, ΔH du réactif et des produits. On détermine ainsi l’énergie de dissociation BDE (de l’anglais, Bond Dissociation Energy). Plus l’énergie de dissociation est faible, plus le radical nouvellement créé aura tendance à être stable (Schéma 107).

Schéma 107 : Stabilité thermodynamique relative d’après le calcul de leur énergie de dissociation (BDE).

Cette échelle peut être expliquée par plusieurs paramètres : - La mésomérie :

Un radical est plus stabilisé lorsqu’il est impliqué dans différentes formes mésomères (Schéma 108).

Schéma 108 : Stabilisation des radicaux par effet mésomère.

- L’hyperconjugaison :

A l’instar de l’échelle de stabilité des carbocations alkyles, les radicaux alkyles suivent la même tendance. En effet, le radical tertiaire (mais aussi le primaire ou secondaire) est plan (sauf dans le cas d’un radical fluoré) tout comme l’est le carbocation tertiaire, ceci pour des raisons de répulsion stériques : les groupements alkyles se placent de manière à avoir le moins d’interactions entre eux.

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100 On parle de radical π car l’orbitale dans laquelle se trouve l’électron célibataire est de nature pure p. Dans le cas d’un radical tertiaire substitué par trois groupements CH3, au moins une des liaisons C-H de chaque CH3 est parallèle à l’orbitale p du radical, permettant ainsi un recouvrement orbitalaire correspondant à une interaction faible de type σ (Figure 22). Cela est également applicable à d’autres groupements alkyles. Dans ce cas, le recouvrement aura lieu entre l’orbitale p du radical et l’orbitale σ de la liaison C-C. En revanche, une liaison directe C-H sur le radical n’aura pas la bonne géométrie permettant un recouvrement orbitalaire. C’est pourquoi une seule donation σ (par le seul groupement alkyle) est possible pour les radicaux primaires, tandis que ce sont deux interactions dans le cas des secondaires et trois interactions dans le cas des tertiaires. Ainsi les radicaux tertiaires sont les plus stabilisés.

Figure 22 : Stabilisation des radicaux alkyles par hyperconjugaison.

- La théorie des orbitales frontières :

Les groupements en position α du radical jouent également un rôle très important dans la stabilisation des radicaux. A contrario des carbocations ou carbanions, les radicaux sont stabilisés par des groupements électro-donneurs ou par des groupements électro-attracteurs. En effet cela s’explique par la théorie des orbitales frontières. Le diagramme d’énergie orbitalaire d’un radical (le radical CH3 dans ce cas) est le suivant (Figure 23) :

Figure 23 : Digramme d’énergie orbitalaire du radical CH3.

Le radical (l’électron non apparié) est situé dans l’orbitale de géométrie p qui constitue l’orbitale SOMO (de l’anglais : Singly Occupied Molecular Orbital). Un groupement de type électro-attracteur tel qu’un carbonyle ou un nitrile possède une orbitale LUMO π* de basse énergie. Celle-ci par recouvrement avec la SOMO du radical, forme une interaction à 1 électron et 2 nouvelles orbitales sont formées : la nouvelle SOMO est abaissée en énergie, le radical est donc plus stable (Figure 24).

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Figure 24 : Stabilisation du radical par un groupement électro-attracteur.

Les groupements électro-donneurs de type OR, NR ou SR par exemples possèdent, quant à eux, de par leurs doublets non-liants, une HOMO (orbitale n) de haute énergie. Celle-ci forme alors, par recouvrement avec la SOMO du radical, une interaction à 3 électrons et 2 nouvelles orbitales sont créées (Figure 25).

Figure 25 : Stabilisation du radical par un groupement électro-donneur.

Dans ce cas, la nouvelle SOMO est plus haute en énergie (un électron est monté en énergie). Cependant, la nouvelle HOMO est plus basse en énergie, ce qui signifie que deux électrons sont plus bas en énergie, le système est donc plus bas en énergie (deux contre un) et stabilisé.

Il arrive parfois que le radical soit stabilisé d’une part par un groupement électro-attracteur et d’autre part par un groupement électro-donneur. On assiste alors à une synergie de stabilisation ; on parle d’effet capto-datif.160

Les facteurs électroniques ne sont pas les seuls à rentrer en jeu. On parle aussi de stabilité cinétique lorsque les radicaux présentent un grand encombrement stérique : ceux-ci seront alors plus stables et moins réactifs.

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102 Par exemple, le radical triphénylméthyl radical découvert par Gomberg est très stable mais cela n’est pas seulement dû à la stabilisation des trois phényles car ce composé n’est pas plan et la conjugaison (donc la stabilisation par effets électroniques) n’est pas bonne. Celui-ci est stable grâce aux effets stériques. De la même manière, le TEMPO est très stable et peut même être stocké des années (Figure 26).

Figure 26 : Radical trityle et TEMPO.

I.3.2.2 Nature et réactivité des radicaux :

Les radicaux peuvent être de caractère électrophile ou nucléophile. En effet, ils sont capables de donner leur électron ou d’accepter un électron, on appelle cela le caractère ambiphile. Cependant, il est possible de prédire qualitativement le caractère d’un radical donné en s’appuyant une fois encore sur la théorie des orbitales frontières. En effet, plus le recouvrement orbitalaire est important, c’est-à-dire que la SOMO du radical interagit avec la LUMO ou la HOMO du partenaire de réaction, plus l’interaction sera forte. Pour cela, la LUMO ou la HOMO du partenaire de réaction doit être le plus proche possible en énergie de la SOMO du radical. Comme décrit plus haut, la SOMO d’un radical en α d’un groupement électro-attracteur (radical pauvre en électron) est basse, tandis que la SOMO d’un radical en α d’un groupement électro-donneur (radical riche en électron) est haute en énergie. C’est pourquoi la SOMO d’un radical riche en électron aura tendance à interagir avec une orbitale LUMO du partenaire de réaction et ainsi avoir un caractère nucléophile, tandis que la SOMO d’un radical pauvre en électron aura tendance à interagir avec une orbitale HOMO du partenaire de réaction et ainsi acquérir un caractère électrophile (Figure 27).

Figure 27 : Réactivité des radicaux suivant leur nature.

Un partenaire de réaction riche en électron (caractère nucléophile) aura plus de facilité pour réagir avec un radical pauvre en électron (caractère électrophile), et vice-versa.

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103 Cependant, de par le caractère ambiphile du radical, il est envisageable qu’un radical plutôt électrophile puisse tout de même réagir avec un partenaire de couplage également pauvre en électron, même si cette réaction n’est pas favorisée (Figure 28).

Figure 28 : Réactivité d’un radical suivant la nature du partenaire de couplage.

En ce qui concerne la nature de l’halogène, précurseur de radical, plus la liaison R-X est faible, plus le radical sera facilement créé. Notre dérivé iodé est donc un bon précurseur de radical (I > Br > Cl).

I.3.2.3 Application à notre composé l’α-iodocétone 70 :

Notre composé 70 génère un radical tertiaire en position α d’une cétone. Il est donc stabilisé par l’interaction σ-p des groupements alkyles et par la cétone qui lui confère un caractère plutôt électrophile. Il est alors judicieux de rechercher des partenaires de couplages plutôt riches en électrons. L’inconvénient de ce radical pourrait être son manque de réactivité. En effet, s’il est stabilisé de manière électronique, il est également stériquement encombré.