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Le rôle des suppresseurs de tumeur p53 et Rb dans la sénescence

1 Introduction

1.3 Le suppresseur de tumeur p53

1.4.4 Le rôle des suppresseurs de tumeur p53 et Rb dans la sénescence

voies de p53 et de p16/Rb [126]. Bien que les deux voies puissent s’entrecroiser, elles sont chacune en mesure d’inhiber la progression du cycle cellulaire de manière indépendante

[126]. Aussi, selon plusieurs facteurs, tels l’espèce, la nature du stress ou le type cellulaire,

l’implication de chacune des voies peut varier. Par exemple, chez la souris, la sénescence induite par l’oncogène H-RAS V12 requiert l’activation des deux voies, alors que chez l’humain, l’activation d’une seule des deux voies est suffisante [186]. Aussi, la sénescence induite par la protéine PML dépend essentiellement de la voie de Rb, mais pas de celle de p53 [187]. Dans les prochains paragraphes, une description de chacune des deux voies et de leur implication dans la sénescence est présentée.

1.4.4.1 La voie de p53 dans la sénescence

Comme il l’a déjà été mentionné, p53, en réponse à différents stress, est activée afin de déclencher diverses réponses cellulaires, lesquelles ont pour but de freiner la prolifération. La contribution de p53 dans la sénescence est majeure puisqu’elle régule l’expression de gènes directement impliqués dans l’arrêt du cycle cellulaire. Par exemple, p53 active directement l’expression du gène p21, lequel code pour une CDKI [188].

Les cyclines sont une famille de protéines dont l’expression et l’activité fluctuent périodiquement en phase avec le cycle cellulaire [189]. Elles sont essentielles pour l’activation des CDKs, des kinases dépendantes de cyclines (CDKs, en anglais, pour cyclin-

dependent kinases). Ainsi, les CDKs, lesquelles ont une activité sérine/thréonine kinase,

doivent être obligatoirement associées à une cycline pour pouvoir phosphoryler leurs cibles

[189]. Il existe différents complexes cycline/CDK, lesquels varient selon l’étape à laquelle se

trouve le cycle cellulaire (Figure 1.9). Par exemple, le complexe cyclineD1/CDK4,6 se forme durant la phase G1, alors que la formation du complexe cyclineA/CDK2 a lieu durant la phase S [189].

Figure 1.9 Le cycle cellulaire.

Les différents complexes Cycline/CDK formés au cours de chaque phase sont indiqués.

Ainsi, p21 bloque la transition G1/S du cycle cellulaire en inhibant spécifiquement les complexes cyclineD/CDK4 (phase G1) et cyclinesA,E/CDK2 (phase S) [189]. D’autres cibles transcriptionnelles de p53 sont également impliquées dans l’établissement de la sénescence. Par exemple, il a été démontré que GADD45α contribue à l’établissement de la sénescence induite par l’expression de H-RAS V12, notamment par l’activation des kinases JNK (aussi appelée MAPK8 pour, en anglais, mitogen-activated protein kinase 8) et p38 (aussi appelée MAPK14 pour, en anglais, mitogen-activated protein kinase 14) [190]. Il a également été démontré que PML [191] stimule l’activité transcriptionnelle de p53 pour

l’établissement de la sénescence induite par l’oncogène H-RAS V12 [147]. Enfin, il a été démontré que PAI1 (en anglais, plasminogen activator inhibitor 1) est requise et suffisante pour la mise en place de la sénescence réplicative [192].

1.4.4.2 La voie de p16/Rb dans la sénescence

La protéine Rb constitue, avec p53, l’un des principaux suppresseurs de tumeur de la cellule. Son importance dans la protection de la cellule contre la transformation maligne a été largement démontrée, notamment en raison du fait que son inactivation initie le développement de plusieurs cancers chez les jeunes enfants, tels les rétinoblastomes (d’où son nom) [193, 194] et les ostéosarcomes [195-197]. De plus, chez l’adulte, l’inactivation de Rb par l’oncoprotéine E7 du virus du papillome humain initie le développement de carcinomes cervicaux et de carcinomes épidermoïdes de la tête et du cou [198, 199].

Rb agit en tant que suppresseur de tumeur principalement en inhibant les E2Fs, une famille de facteurs de transcription essentiels à la transition G1/S du cycle cellulaire [200,

201]. En fait, en absence de stress, Rb est maintenue dans un état inactif par l’action du

complexe cycline D1/CDK4,6 [202, 203]. Plus précisément, Rb est inactivée suite à sa phosphorylation par ce complexe [202, 203]. Comme le complexe cyclinD1/CDK4,6 phosphoryle Rb sur plusieurs résidus, on parle de Rb «hyperphosphorylée» pour faire référence à son état inactif. Lorsque la cellule est soumise à un stress, le complexe cyclinD1/CDK4,6 est inactivé par le suppresseur de tumeur p16, un inhibiteur de CDK4

[204]. De ce fait, Rb n’est plus phosphorylée et se retrouve alors «hypophosphorylée», c’est-

à-dire active. Rb activée est en mesure d’interagir avec les facteurs de transcription E2Fs et de les séquestrer de façon à les empêcher d’activer l’expression de leurs gènes cibles. Puisque les gènes régulés par les E2Fs sont essentiels au passage de la cellule en phase S, le cycle cellulaire est alors arrêté en phase G1 [202].

La protéine p16, ou p16INK4a, est un des produits du locus INK4b-ARF-INK4a (Figure 1.10), lequel code pour deux autres protéines: la protéine p15INK4b (aussi appelée

CDKN2B pour, en anglais, cyclin-dependent kinase inhibitor 2B), une autre CDKI, et la protéine ARF, un inhibiteur de MDM2 [203]. Bien que p16INK4A et p15INK4B soient deux protéines fortement semblables (les deux gènes dont ils proviennent sont à l’origine d’une duplication en tandem d’exons), ARF, pour sa part, n’y est aucunement lié (le gène codant pour ARF utilise un exon qu’on ne retrouve pas dans les deux autres protéines et, comme son nom l’indique, est transcrit selon un cadre de lecture différent) [203]. Néanmoins, les trois protéines agissent comme des suppresseurs de tumeur. Ainsi, p16INK4a et p15INK4b favorisent l’hypophophorylation de Rb en inhibant des complexes cycline/CDK, alors que ARF contribue à la stabilisation de p53 en inhibant l’activité ubiquitine ligase de MDM2

[203]. Il est important de noter que p53 assure la répression transcriptionnelle de ARF [205].

Ainsi, p53, de la même façon qu’avec MDM2, assure une rétro-inhibition de sa propre activité.

Figure 1.10 Représentation schématique du locus INK4b-ARF-INK4a.

Schéma adapté de Gil, 2006 [203].

Comme il l’a été mentionné précédemment, p16 inhibe le complexe cyclineD1/CDK4,6 de façon à maintenir Rb dans son état actif. La CDKI p21, dont nous avons parlé plus tôt, inhibe elle aussi le complexe cyclineD1/CDK4, de même que le complexe cyclinesA,E/CDK2. Ainsi, les voies de p53 et p16/Rb se rejoignent puisqu’elles

assurent et maintiennent toutes deux l’hypophosphorylation de Rb et, par conséquent, mènent à l’arrêt du cycle cellulaire (Figure 1.11).

Figure 1.11 Les voies de p53 et p16/Rb dans la sénescence.