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PREMIERE PARTIE Apport théorique

7. Evaluation de la douleur chez l’enfant :

9.4. Le rôle de l’affect :

L’émotion est définit par J.Cottreaux (2007) comme une réponse comportementale et physiologique, brève et intense, qui réflète et/ou révèle le vécu subjectif de la personne qui est affectée par un évènement interne ou externe. Elle est donc déclenchée par une situation. Son vécu est subjectif car il correspond à un traitement de l’information et donc dépend d’une construction mentale à partir d’informations provenant du monde interne ou externe du sujet.Le modèle cognitif explique l’émotion comme une évaluation cognitive. « Selon ce modèle,nous serions moins émus par les évènements que par l’interprétation que nous en donnons » J.Cottreaux (2001 :39) Ceci ramène selon cet auteur à la formule :

Evènement Evaluation cognitive Emotion

L’émotion est une des composantes de la douleur. « Cette composante affective peut se prolonger vers des états émotionnels voisins comme l’anxiété ou la dépression. Cette proximité explique une régle d’approche de tout malade douloureux qui est d’évaluer systématiquement les niveaux d’anxiété et de dépression » F.Boureau (1999 :267)

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L’affectivité négative pourait être à la base de l’amplification des symptômes de l’hypervigilence et de la détresse aussi bien physique que psychologique. Comme émotions consécutives à la douleur chronique, nous allons aborder la peur, l’anxiétéet la dépression :

L’anxiété : C’est un affect pénible, une émotion désagréable qui s’inscrit dans deux registres.

Elle est un ensemble de réactions émotionnelles qui se traduisent habituellement par des symptômes subjectifs somatiques et psychiques, par des modifications comportementales et par des signes physiologiques objectifs. C’est une réaction fondamentalement utile et essentielle. Elle est traduite par une appréhension et l’attente d’un évènement imprévu, vécu comme désagréable.L’attente est accompagnée d’un sentiment de tension interne, une nervosité et une hypervigilence permanente. La menace parait diffuse, plus lointaine et plus vague par rapport à la peur. Le sujet anxieux marque une baisse des performances, des difficultés de raisonnement et de concentration. L’anxiété est considérée comme pathologique lorsqu’elle n’est rattachée à aucune cause évidente et identifiable et quand aussi elle devient chronique.

« Sur le plan de la relation entre l’anxiété et la douleur chronique, on observe un mécanisme d’augmentation de la douleur. Les chercheurs ont également montré une corrélation directe entre les niveaux élevés d’anxiété et une augmentation de la perception de la douleur chez les enfants migraineux et souffrant se douleurs pelviennes et du dos (Feuertein et al. 1987 ; Mc Gowan et al, 1998). » J. Ogden (2008 : 301).

« Les personnes ressentent de l’anxiété quand elles s’estiment mal équipées pour gérer des évennements potentiellement néfastes » A. Bandura (2003 :232)

La peur : Elle est liée à une situation bien précise, identifiable par l’individu. Elle comporte la

plupart du temps un danger actuel ou imminent. Elle est ressentie comme pénible provocant l’alerte de mécanismes d’adaptation, de défense et s’accompagne d’une activation plus ou moins intense du système nerveux central et autonome produisant une accélération des réactions physiologiques et une modification du comportement.La peur liée à la douleur peut créer une hyper vigilance envers la douleur.

La relation entre la peur et la douleur a été établie. Les croyances mènent à l’évitement de la douleur en tant que déclencheurs initiateurs de la douleur. Certaines recherches suggèrent également que la peur peut aussi être impliquée dans l’exacerbation d’une douleur déjà présente et peut transformer une douleur aigüe en une douleur chronique. « Crombez et al. (1999) ont exploré les interrelations entre l’attention portée à la douleur et la peur. Ils ont observé que la douleur fonctionne en demandant un certain degré d’attention, ce qui résulte en une réduction

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de la capacité de se focaliser sur d’autres activités. Leurs résultats ont indiqué que la peur liée à la douleur augmentait cette interférence attentionnelle, suggérant que la peur, liée à la douleur, augmente la qualité d’attention exigée par la douleur »J. Ogden (2008 : 302).

La dépression : La dépression fait de nos jours l’objet de plusieures recherches après avoir été

niée du monde de l’enfant. Le dégagement progréssif du « concept de dépression » chez l’enfant, a permit la reconnaissance de la réalité clinique de cette pathologie à un âge précoce et ce, grace à Mélanie Klein avec « la position dépressive », René Spitz et Jean Bowlby avec « la dépression anaclitique ».

La dépression en cas de maladie reflète une situation où le corps n’est plus considéré comme une simple entité biologique. Ellereprésente l’association d’un ensemble de signes recouvrant un trouble de l’humeur traduit par une tristesse, un pessimisme qui envahi la vie mentale, un sentiment d’ennui, de perte d’interets, une irritabilité. Il existe chez le dépressif des affects et idées négatifs traduits par une autodépreciation et un sentiment de culpabilité. Des signes somatiques tels que les troubles du sommeil et de l’appétit, des plaintes somatiques sont retrouvés avec une inhibition psychomotrice traduite par une asthénie et une diminution voir une perte de l’élan vital.

Plusieurs auteurs ont trouvé une corrélation entre la douleur chronique et la dépression. Selon S.Marchand (2009), les troubles de l’humeur tels que la dépression engendrent des changements dans la perception de la douleur.Peu importe si s’est la dépression qui engendre une douleur ou vice-versa, il est démontré que les symptômes dépressifs, incluant la détresse psychologique, sont d’importants marqueurs prédictifs d’un épisode de douleur chronique. « On rapporte que plus les sympôtmes dépressifs sont nombreux, plus les plaintes de douleur clinique augmentent (Adersson,1999). Aussi, le taux de dépression chez les gens souffrant de douleur chroniques est plus élevée que chez les sujets sains, la valence de troubles dépressifs se situant entre 30 et 54% chez les gens souffrant de douleurs chroniques (Banks et Kerns,1999).»S.Marchand (2009 :300)

M.J.L.Sullivan et al publient en 2005 que la plupart des études qui utilisent des critères standardisés pour diagnostiquer la dépression dans les échantillons de patients souffrant de douleur chronique ont rapporté des pourcentages de prévalence entre 20%et 50%.

Une personne dépressive présente une autodépreciation et un sentiment d’incapacité. D’après A.Bandura (2003), la dépression peut réduire les croyances d’efficacité. Ces croyances abaissées affaiblissent à leur tour la motivation et produisent une faible performance, engendrant une dépression encore plus profonde dans une spirale descendante. A l’inverse, en élevant les

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croyances d’efficacité qui augmentent la motivation et les performances, la bonne humeur peut mettre en actionun processus affirmatif réciproque. L’humeur et les croyances d’efficacité sont liées à la fois de façon simultanée et prédictive.

« Les personnes ayant développé un système de soi négativement biaisé ont tendance à interpréter les évènements de vie difficiles d’une manière pessimiste qui produit, aggrave et prolonge les épisodes dépressifs (Beck,0984 ; Kuiper et Olinger,1986, Peterson& Seligman,1984 ; Rehm, 1988) » A.Bandura (2003 :233)

Cet auteur (2003) nous montre que l’impact de l’humeur sur le jugement d’évaluation peut être modifié en changeant l’information fournie par l’état émotionnel lui-même. Il explique que si on modifie la signification d’un état émotionnel en l’attribuant à une source non émotionnelle ou à une source temporaire ou pertinente, l’état n’affecte pas le jugement évaluatif parcequ’il est considéré comme non informatif pour l’évaluation présente.

Le mécanisme d’efficacité personnelle que nous avons évoqué plus haut joue également selon A.Bandura(2003) un rôle capital dans l’autorégulation des états émotionnels. Cet auteur distingue trois principaux moyens par lesquels les croyances d’efficacité affectent considérablement la nature et l’intensité des expériences émotionnelles : le contrôle personnel sur la pensée, sur l’action et sur l’émotion. Le mode orienté vers la pensée dans la régulation des états émotionnels prend deux formes. La première concerne les croyances d’efficacité qui guident l’attention et influencent la façon d’interpréter les évènements, de se représenter cognitivement et de s’en souvenir d’une façon bénéfique ou émotionnellement perturbante. La seconde forme d’influence se concentre sur les aptitudes cognitives perçues à contrôler les pensées perturbatrices quand elles font intrusion dans la conscience. Dans le mode d’influence orienté vers l’action, les croyances d’efficacitérégulent les états émotionnelsen soutenant les actionsdestinées à transformer l’environnement d’une manière qui modifie son potentiel émotif. Le mode d’influence orienté vers l’émotion implique l’efficacité perçue pour améliorer les états émotionnels désagréables lorsqu’ils sont activés. Ces moyens alternatifs de régulation de l’émotionsont bien mis en évidence dans l’exercice du contrôle de l’activation de l’anxiété, de l’humeur dépressive et des réactions biologiques au stress.

Enfin,« Il est important de retenir que les facteurs psychologiques prédisent non seulement les réactions à l’expérience douloureuse ou la capacité à faire face à la douleur, mais qu’ils ont également une incidence sur l’évolution des symptômes de la douleur chronique. Le traitement

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de la douleur devrait donc toujours prendre en considération que les facteurs psychologiques jouent un rôle important dans le développement de la douleur chronique (Flor et Turk,2006) » S.Marchand (2009 :321)

Conclusion :

Traiter médicalement le symptôme de la douleur n’est pas suffisant ; on ne peut cliver le somatique du psychique. La complexité du phénomène douloureux est à prendre en considération. La prise en charge doit être de ce fait pluridisciplinaire afin d’optimiser l’efficacité et l’efficience du traitement médical.

II. LE COPING

1. Introduction :

Le modèle « transactionnel », développé par Lazarus sert d’arrière plan conceptuel à beaucoup de recherches actuelles sur le stress.

Dans notre étude, la douleur chronique induite par différentes pathologies : l’arthrite chronique idiopathique, le purpura rhumatoïde et l’hémophilie est considérée comme un agent stressant conduisant l’enfant à mettre en œuvre des stratégies d’ajustement ou des stratégies de coping. Qu’elles seraient alors les stratégies adaptativesou non, mises en œuvre par l’enfant pour faire face à sa douleur ? Quelles sont les différentes transactions entre l’enfant et cette réalité stressante ?

Ce qui a motivé notre choix d’étudier le coping auprès d’une population d’enfants, est que le stress psychologique est un facteur de risque significatif et répandu pour la psychopathologie lors de cette étape de développement. La façon dont les enfants gèrent les stresseurs auxquels ils sont confrontés, a un impact crucial sur leur ajustement actuel et futur. Aussi, « -Les stratégies de coping ont un effet direct sur certaines variables de la santé ;-elles ont un effet indirect en donnant lieu à un changement dans le comportement de santé ;-enfin, elles régulent et peuvent diminuer le stress lié à un problème de santé (Parker et Endler) » Fischer (2006 :125).

Le processus de coping chez l’enfant et l’adolescent a été largement étudié, particulièrement durant les 30 dernières années.Lapointe et Marcotte 2001 ont évalué, à travers une étude, des relations entre les stratégies d’adaptation et l’humeur dépressive ; la symptomatologie dépressive

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et les idées suicidaires chez l’adolescent. Silvia Carvalho, a publié dans la revue canadienne des sciences du comportement, en Mai 2009 41(2), 67-83, une étude sur le rôle que peuvent avoir les enfants dans leur adaptation à la séparation ou au divorce de leurs parents. Cette étude a permis la validation d’un modèle théorique du processus de coping de l’enfant face aux conflits conjugaux et à la séparation parentale. Les résultats démontrent que l’évaluation de la menace perçue, en regard de la situation, influence le choix des stratégies de coping et que les stratégies actives influencent l’efficacité perçue du coping chez les enfants. Les composantes du processus de coping des enfants sont particulièrement liées à leur adaptation psychologique.

Les recherches aboutissent à ce que le répertoire du coping s’acquière progressivement. Ainsi, les réponses de stress disponibles chez l’enfant,diffèrent de celles de l’adolescent et de l’adulte. Elles ont la particularité de dépendre du niveau de développement biologique, cognitif, émotionnel et social. Or, si les enfants ne possèdent pas encore toutes les stratégies de coping nécessaires pour faire face à une telle situation stressante, ils pourront être encore plus vulnérables à une telle situation.

Si, avant 6 six ans, les enfants mettent en œuvre des capacités de coping assez rudimentaires, traduites essentiellement par de stratégies d’évitement, d’agressivité ou de solutions simples de résolution du problème, ils utiliseraient par contre, assez peu de stratégies centrées sur l’émotion. Au-delà de six 6 ans, et avec la maturité psychologique, les stratégies utilisées se complexifieraient en s’orientant progressivement vers une meilleure gestion de l’émotion et l’utilisation de techniques cognitives.Il est à noter que les stratégies de coping utilisées par les enfants dépendent de plusieurs facteurs tels que le niveau du développement cognitif et social et les caractéristiques de la situation.

2. Historique :

C’est en se référant à des expériences sur l’animal, s’inspirant sur la théorie psychanalytique et plus précisément sur la psychologie du Moi, que le concept de coping a pris sont origine.

L’approche expérimentale portant sur les animaux, considère le coping comme une réponse comportementale acquise face à une menace vitale. La colère par exemple provoque l’attaque ou la confrontation ; la peur induit la fuite ou l’évitement. « Ainsi, des rats placés dans une cage à deux compartiments (un compartiment où ils reçoivent le choc et un autre où ils ne reçoivent rien) apprennent rapidement à fuir, voir à éviter le choc en se déplaçant dans l’autre

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compartiment dès que retentit le signal sonore avertissant l’arrivée du choc. Le critère essentiel du coping réussi chez l’animal est la survie (Dantzer, 1989) » I. Paulhan (1992 : 546).

D’après Lazarus, le coping chez l’animal est un mécanisme vital. Il consiste à agir pour contrôler les conditions environnementales aversives d’éventuels troubles psychophysiologiques et ce, principalement au moyen de comportements de fuite et d’évitement.

H. Harman(1958) a approfondit l’instance de la personnalité du Moi en s’inspirant de la théorie Freudienne qui propose trois composantes de la personnalité (Ca, Moi, Surmoi). Il a distingué le moi conflictuel ou irrationnel dont l’objectif serait la maîtrise des conflits internes, du Moi libre et rationnel qui représente le siège de nombreux processus tels que la perception, la pensée ou encore la mémoire.L’idée de Harman est de montrer qu’à l’opposé du ça et du Surmoi, le Moi dispose de mécanismes autonomes qui lui accordent une fonction double qui consiste non seulement à s’adapter aux exigences des réalités extérieures mais aussi de maîtriser les conflits internes. Ce Moi permet alors au sujet de s’adapter à son environnement.

Cependant, la mise en relation du coping avec des notions psychanalytiques a nourrit plusieurs discussions. La psychologie du Moi a assimilé le coping à un processus proche du système défensif primaire et inconscient de l’appareil psychique tel qu’il est proposé par Freud.