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Répartition des Italiens en France

géographique de l’immigration italienne

Carte 1. Répartition des Italiens en France

En 1968, 73,7 % des Italiens sont installés dans cinq régions qui sont, par ordre d’importance, la région Rhône-Alpes (18,72 %), la région parisienne (18,45 %), la

Provence-Côte d’Azur (15,38 %), la Lorraine (15,1 %) et le Nord (6 %).144

Parmi les zones d’implantation significative, il faut ajouter, à l’ouest du pays, les régions Midi-Pyrénées et Aquitaine.

Une vue d’ensemble de la carte de 1968 lui confère donc une grande similitude avec celle de 1931145

. Toutefois la hiérarchie de ces régions s’est entre les deux dates considérablement modifiée. Si la région parisienne maintient son rang, la région Provence-Côte d’Azur perd sa première place et voit sa part diminuer de moitié tandis que les régions Rhône-Alpes, en particulier les départements de l’Isère et du Rhône (30 796 et 26 496 Italiens), la Lorraine, notamment la Moselle (57 988 sur les 86 500 Italiens de Lorraine y sont installés, ce qui en fait le département le plus peuplé d’Italiens de France) et la région Nord, ne cessent de voir leur population croître.

Les raisons de ces concentrations sont bien connues. Elles relèvent principalement de deux facteurs : l’un lié au processus d’industrialisation, l’autre à l’établissement de réseaux migratoires. Il faut toutefois souligner que, par rapport à la période de l’entre-deux-guerres, l’aire d’installation des Italiens s’est élargie : si leur part demeure faible à l’Ouest, leur nombre s’est accru dans les départements du Centre et de Normandie, répondant ainsi aux besoins de reconstruction et de développement industriel146

.

L’apport des dernières vagues migratoires ne modifie que très insensiblement la répartition départementale, comme en témoignent les cartes de 1958 et 1968. La hiérarchie des départements les plus peuplés ne se modifie pas, avec par ordre décroissant parmi les départements comptant plus de 20 000 Italiens : la Moselle, l’Isère, les Alpes-Maritimes, les

Bouches-du-Rhône, le Nord, le Rhône, la Meurthe-et-Moselle, Paris, la Seine-Saint-Denis147

. Tout juste peut-on noter un mouvement de décroissance dans certains départements, lié à la baisse globale des effectifs ou encore aux mutations des activités agricoles dans certains départements du Sud-Ouest (la Gironde, l’Aveyron ou les Pyrénées-Orientales par exemple).

La répartition des Italiens sur une surface très vaste de l’Hexagone multiplie les points de contacts avec les Français. La variété des environnements socio-économiques et culturels, souvent déterminés par le niveau d’industrialisation, dans lesquels ils évoluent, modifie les

144 La région Nord connaît après la guerre un des taux d’accroissement de l’immigration italienne parmi les plus élevés ; de 1946 à 1958, elle reçoit environ 7 % des nouveaux arrivants. H. DESPLANQUES, « Les Italiens dans le Nord de la France », Bulletin de la Société de Géographie de Lille, n°4, 1961, p. 7.

145 P. MILZA, Voyage en Ritalie, op. cit., p. 79-80.

146 En Normandie, l’accroissement est surtout sensible jusqu’en 1954. Voir M. COLIN, « Pour une histoire des immigrés italiens en Normandie », Cahiers des Annales de Normandie, n°28, 1998, p. 195-217.

147 Ce département, qui n’apparaît pas sur la carte de 1962, est issu de la recomposition territoriale de la région parisienne. Ce paramètre modifie artificiellement l’évaluation du nombre d’Italiens sur les cartes de 1958 et 1968.

modalités du rapport entretenu avec les populations autochtones et les représentations qui en découlent. Le niveau de concentration de l’immigration italienne dans l’espace, selon une symétrie densité-visibilité148

, provoque également une différenciation sensible des représentations. L’idée que se font les Français des Italiens varie par ailleurs selon leur origine régionale ou plus exactement selon le schéma simplifié de partition entre le Nord et le Sud.

3. L’origine régionale

Le réservoir français de main-d’œuvre se trouve traditionnellement dans les régions septentrionales de l’Italie. Jusqu’à la guerre, les immigrés italiens viennent à 80 % du

Piémont, de la Lombardie, la Vénétie et la Toscane149

. Contrairement aux vœux exprimés par les responsables de la politique d’immigration française, cette situation ne perdure pas. Les septentrionaux sont de moins en moins nombreux à franchir les Alpes et la part des Méridionaux atteint, dès 1951, un quart des introductions annuelles. La tendance s’accentue avec l’accroissement des flux à partir de 1956150

. En 1959, les Méridionaux sont majoritaires avec 56,5 % des entrées et passent à 71 % en 1962. Les Italiens du Nord empruntent donc moins les chemins de l’exode, fixés dans leur région d’origine par un décollage rapide de l’économie, provoquant à la fois un appel massif de main-d’œuvre et une élévation du niveau de vie. Ce n’est d’ailleurs qu’à la faveur d’un ralentissement économique et de ses conséquences sur l’emploi dans les secteurs industriels du nord de la Péninsule, que la proportion de Piémontais, Lombards et Ligures reprend de l’importance dans le courant migratoire à destination de la France. En 1965, l’équilibre est quasiment atteint entre Italiens du Nord (44,4 %) et Italiens du Sud (45,6 %). Si cette tendance se confirme dans les années suivantes, le faible volume des effectifs atténue considérablement les effets d’une telle évolution.

148 Cette visibilité des Italiens ne signifie pas le rejet. L’enquête de l’INED de 1951 observe que « la sympathie est plus grande dans les régions où cette nationalité est plus représentée que dans les autres régions » ( A. GIRARD, J. STOETZEL, op. cit., p. 51).

149 P. MILZA, Voyage en Ritalie, op. cit., p. 89.

150 Les services de l’ISTAT ne proposent malheureusement pas de statistiques prenant en compte l’origine régionale des migrants pour les années 1956-1958. La publication de ce type de statistiques reprend en 1959 :